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04/05/2017 | CJUE | N°T-403/15

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal, JYSK sp. z o.o. contre Commission européenne., 04/05/2017, T-403/15


DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

4 mai 2017 (*)

« Recours en annulation – FEDER – Article 41, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1083/2006 – Refus d’octroyer une contribution financière à un grand projet – Entreprise responsable de la réalisation du projet – Défaut d’affectation directe – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑403/15,

JYSK sp. z o.o., établie à Radomsko (Pologne), représentée par M^e H. Sønderby Christensen, avocat,

partie req

uérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. R. Lyal, B.-R. Killmann et M^me M. Cl...

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

4 mai 2017 (*)

« Recours en annulation – FEDER – Article 41, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1083/2006 – Refus d’octroyer une contribution financière à un grand projet – Entreprise responsable de la réalisation du projet – Défaut d’affectation directe – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑403/15,

JYSK sp. z o.o., établie à Radomsko (Pologne), représentée par M^e H. Sønderby Christensen, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. R. Lyal, B.-R. Killmann et M^me M. Clausen, puis par MM. Lyal et Killmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision C(2015) 3228 de la Commission, du 11 mai 2015, refusant l’octroi d’une contribution financière du Fonds européen de développement régional (FEDER) au grand projet « Centre européen de services partagés – Systèmes logistiques intelligents » dans le cadre du programme opérationnel « Économie innovante » établi par la République de Pologne pour la période de programmation 2007-2013,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de MM. M. van der Woude, président, I. Ulloa Rubio et M^me A. Marcoulli (rapporteur), juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 24 novembre 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 1^er octobre 2007, par la décision C(2007) 4562, la Commission européenne a adopté le programme opérationnel « Économie innovante » présenté par la République de Pologne en application de l’article 32 du règlement (CE) n° 1083/2006 du Conseil, du 11 juillet 2006, portant dispositions générales sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) n° 1260/1999 (JO 2006, L 210, p. 25).

2        Il ressort du dossier que la requérante, JYSK sp. z o.o., une société polonaise de droit privé, a présenté aux autorités polonaises, le 17 juillet 2008, une demande de subvention pour le projet « Centre européen de services partagés – Systèmes logistiques intelligents » (ci-après le « projet ») et que, le 18 février 2009, les autorités polonaises et la requérante ont signé un contrat relatif à l’octroi d’une subvention pour la mise en œuvre dudit projet dans le cadre du programme
opérationnel « Économie innovante » (ci-après le « contrat »).

3        La subvention, visant à financer une partie des dépenses éligibles du projet, était financée par la République de Pologne pour 85 % au titre d’une contribution provenant du Fonds européen de développement régional (FEDER) et pour 15 % au titre de fonds de l’État. En outre, il ressort du contrat, tel qu’amendé le 19 avril 2010, que, si la Commission refusait de contribuer au financement conformément à l’article 41, paragraphe 3, du règlement n° 1083/2006, le contrat prenait fin à la
date de notification de la décision de la Commission au bénéficiaire (voir article 5, paragraphe 12, du contrat) et que, dans un tel cas, le bénéficiaire s’engageait à rembourser la totalité ou la partie des fonds déjà payés par les autorités polonaises (voir article 5, paragraphe 14, du contrat).

4        Le 30 avril 2010, au titre des articles 39 à 41 du règlement n° 1083/2006, la République de Pologne a présenté à la Commission une demande de confirmation de la contribution financière du FEDER au projet.

5        À la suite d’un échange de lettres entre la République de Pologne et la Commission, cette dernière ayant émis des doutes quant au fait de pouvoir confirmer une contribution du FEDER au projet, par lettre du 15 juillet 2011, la République de Pologne a retiré la demande de confirmation de la contribution financière du FEDER. Par lettre du 3 août 2011, la Commission a pris acte du retrait de la demande et a de nouveau informé la République de Pologne des problèmes relatifs au projet. Le
projet a été complété en 2011, après le retrait de la demande de confirmation.

6        Le 1^er août 2013, la République de Pologne a présenté à la Commission une nouvelle demande de confirmation de la contribution financière du FEDER au projet. La demande de contribution, présentée par la République de Pologne conformément à l’annexe XXII du règlement (CE) n° 1828/2006 de la Commission, du 8 décembre 2006, établissant les modalités d’exécution du règlement n° 1083/2006 et du règlement (CE) n° 1080/2006 du Parlement européen et du Conseil relatif au FEDER (JO 2006, L 371,
p. 1), désigne la requérante en tant qu’« organisation responsable de la réalisation du projet (bénéficiaire) ».

7        Par lettre du 24 juin 2014, la Commission a émis des doutes sur la nouvelle proposition relative au projet. Par lettre du 28 août 2014, la République de Pologne a répondu aux observations de la Commission.

8        Le 11 mai 2015, sur le fondement de l’article 41, paragraphe 3, du règlement n° 1083/2006, la Commission a adopté la décision C(2015) 3228 (ci-après la « décision attaquée »), par laquelle elle refusait une contribution financière au projet (article 1^er). La décision attaquée précise que toute dépense relative au projet incluse dans un état des dépenses antérieur à cette décision doit être rectifiée lors de l’état des dépenses successif (article 2). La décision attaquée est adressée à
la République de Pologne (article 3).

 Procédure et conclusions des parties

9        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 juillet 2015, la requérante a introduit le présent recours, tendant à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée.

10      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 15 octobre 2015, la Commission a introduit une exception d’irrecevabilité, au titre de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, tendant à ce qu’il plaise à ce dernier :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

11      La requérante a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité au greffe du Tribunal le 1^er décembre 2015, tendant à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité ;

–        déclarer le recours recevable.

12      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 14 décembre 2015, la Commission a demandé la jonction de la présente affaire à l’affaire enregistrée sous la référence T‑512/14, Green Source Poland/Commission. La requérante a déposé ses observations sur la demande de jonction au greffe du Tribunal le 8 février 2016. Le président de la quatrième chambre du Tribunal a décidé de ne pas joindre les deux affaires à ce stade de la procédure.

13      Par décision du président du Tribunal, la présente affaire a été attribuée à un nouveau juge rapporteur, siégeant dans la septième chambre.

14      Par actes déposés au greffe du Tribunal le 10 juin 2016, la requérante a formulé de nouvelles observations sur l’exception d’irrecevabilité et demandé de joindre celle-ci au fond. Le président de la septième chambre du Tribunal a décidé de ne pas verser ces actes au dossier.

15      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (septième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, d’une part, a invité la requérante à déposer un document et, d’autre part, a posé aux parties des questions écrites. Les parties ont répondu dans le délai imparti.

16      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal à l’audience du 24 novembre 2016.

 En droit

 Observations liminaires

17      Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions visées aux premier et deuxième alinéas de cette disposition, un recours contre les décisions dont elle est destinataire et contre les décisions qui, bien que prises sous l’apparence d’un règlement ou d’une décision adressée à une autre personne, la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la
concernent directement et ne comportent pas de mesures d’exécution.

18      En outre, selon une jurisprudence constante de la Cour, ne constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation que les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celle-ci (voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9, et du 20 septembre 2016, Mallis e.a./Commission et
BCE, C‑105/15 P à C‑109/15 P, EU:C:2016:702, point 51 et jurisprudence citée).

19      En l’espèce, il est constant, d’une part, que la décision attaquée ne constitue pas un acte réglementaire ne comportant pas de mesures d’exécution et, d’autre part, qu’elle a été notifiée par la Commission à la République de Pologne, de sorte que la requérante ne peut pas être considérée comme destinataire de ladite décision au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

20      Dans ces conditions, il y a lieu de vérifier si la requérante est recevable à former un recours en annulation contre ladite décision au motif qu’elle est directement et individuellement concernée par celle-ci.

 Sur l’affectation directe de la requérante

21      Dans l’exception d’irrecevabilité, la Commission soutient, notamment, que la requérante n’est pas directement concernée par la décision attaquée. Elle soutient, en substance, que l’État membre concerné est le seul destinataire d’une décision accordant ou refusant, comme en l’espèce, une contribution financière du FEDER à un grand projet et que cette décision ne produit pas d’effets juridiques directs sur la requérante.

22      La requérante conteste l’exception d’irrecevabilité et soutient qu’elle est directement concernée par la décision attaquée. Dans les observations sur l’exception d’irrecevabilité, elle a fait valoir qu’elle a bénéficié d’une aide publique et que la décision négative de la Commission a eu pour conséquence directe que, le 22 juin 2015, elle a dû rembourser aux autorités polonaises un montant total de 89 959 304,82 zlotys polonais (PLN) (environ 21 millions d’euros). Lors de l’audience, la
requérante a ultérieurement précisé que, en l’espèce, la République de Pologne n’avait pas la possibilité, même théorique, de ne pas recouvrer ledit montant et de financer elle-même le projet.

23      Il résulte d’une jurisprudence constante que la condition selon laquelle une personne physique ou morale doit être directement concernée par la décision faisant l’objet du recours requiert la réunion de deux critères cumulatifs, à savoir que la mesure contestée de l’Union européenne, en premier lieu, produise directement des effets sur la situation juridique du particulier et, en second lieu, ne laisse aucun pouvoir d’appréciation à ses destinataires qui sont chargés de sa mise en
œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires (voir arrêt du 10 septembre 2009, Commission/Ente per le Ville Vesuviane et Ente per le Ville Vesuviane/Commission, C‑445/07 P et C‑455/07 P, EU:C:2009:529, point 45 et jurisprudence citée, et ordonnance du 9 juillet 2013, Regione Puglia/Commission, C‑586/11 P, non publiée, EU:C:2013:459, point 31 et jurisprudence citée). Le second critère,
relatif à l’absence de pouvoir d’appréciation de l’État membre concerné, est également rempli lorsque la possibilité pour ce dernier de ne pas donner suite à l’acte de l’Union est purement théorique, sa volonté de tirer des conséquences conformes à celui-ci ne faisant aucun doute (voir arrêts du 10 septembre 2009, Commission/Ente per le Ville Vesuviane et Ente per le Ville Vesuviane/Commission, C‑445/07 P et C‑455/07 P, EU:C:2009:529, point 46 et jurisprudence citée, et du 3 mars 2011, Caixa
Geral de Depósitos/Commission, T‑401/07, non publié, EU:T:2011:72, point 61 et jurisprudence citée).

24      Il convient donc de vérifier si ces deux critères cumulatifs sont remplis en l’espèce.

 Sur le premier critère de l’affectation directe

25      S’agissant du premier critère de l’affectation directe mentionné au point 23 ci-dessus, en premier lieu, il convient de noter que, au sens de l’article 14, paragraphe 1, du règlement n° 1083/2006, le budget de l’Union alloué aux fonds structurels est exécuté dans le cadre de la gestion partagée entre les États membres et la Commission. L’article 59 du règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables
au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1), prévoit que, lorsque la Commission exécute le budget en gestion partagée, des tâches d’exécution du budget sont déléguées à des États membres. En particulier, au sens de l’article 180 du règlement n° 966/2012, la gestion, la sélection et le contrôle des projets financés par les fonds faisant l’objet d’une gestion partagée sont régis par les règlements concernant ces fonds, à
savoir, s’agissant du FEDER, par le règlement (CE) n° 1080/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relatif au FEDER et abrogeant le règlement (CE) n° 1783/1999 (JO 2006, L 210, p. 1), et par le règlement n° 1083/2006.

26      En deuxième lieu, par conséquent, afin de déterminer les effets juridiques de la décision attaquée, il y a lieu de prendre en compte le cadre juridique régissant, notamment, la sélection des projets, et tout particulièrement des grands projets, financés par le FEDER.

27      Dans cette perspective, il ressort des dispositions pertinentes du règlement n° 1083/2006 que :

–        les objectifs des fonds structurels sont poursuivis dans le cadre d’une coopération étroite, dénommée partenariat, entre la Commission et chaque État membre (voir article 11, paragraphe 1, du règlement n° 1083/2006) ;

–        les fonds interviennent en complément des actions nationales et leur contribution ne se substitue pas aux dépenses structurelles des États membres (voir article 9, paragraphe 1, et article 15, paragraphe 1, du règlement n° 1083/2006) ;

–        chaque État membre présente à la Commission un cadre de référence stratégique national qui assure la cohérence des interventions des fonds avec les orientations stratégiques de l’Union pour la cohésion et constitue un instrument de référence pour préparer la programmation des fonds (voir article 27, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 1083/2006) ;

–        dans chaque État membre, l’action des fonds prend la forme de programmes opérationnels établis par l’État membre et présentés à la Commission pour évaluation et adoption (voir article 32, paragraphes 1 à 5, du règlement n° 1083/2006) ;

–        les États membres sont responsables de la gestion et du contrôle des programmes opérationnels et, à cette fin, désignent notamment une autorité de gestion, une autorité de certification, ainsi que, éventuellement, des organismes intermédiaires pour réaliser tout ou partie de leurs tâches, et une autorité d’audit (voir article 58, article 59, paragraphes 1 et 2, et article 70, paragraphe 1, du règlement n° 1083/2006). L’autorité de gestion est chargée de la gestion et de la mise en
œuvre du programme opérationnel et, notamment, « de veiller à ce que les opérations soient sélectionnées en vue d’un financement selon les critères applicables au programme opérationnel et [à ce] qu’elles soient conformes, pendant toute la durée de leur exécution, aux règles [de l’Union] et [règles] nationales applicables » [voir article 60, sous a), du règlement n° 1083/2006] ;

–        pour chaque programme opérationnel, les États membres instituent un comité de suivi, qui s’assure de l’efficacité et de la qualité de la mise en œuvre du programme opérationnel, notamment en examinant et en approuvant les critères de sélection des opérations financées (voir articles 63 et 65 du règlement n° 1083/2006) ;

–        chaque opération, à savoir un projet ou un groupe de projets visant à réaliser les objectifs du programme opérationnel, est sélectionnée par l’autorité de gestion selon les critères fixés par le comité de suivi (voir article 2, point 3, du règlement n° 1083/2006) ;

–        lorsque l’État membre sélectionne un grand projet, à savoir « des dépenses comprenant un ensemble de travaux, d’activités ou de services destiné à remplir par lui-même une fonction indivisible à caractère économique ou technique précis, qui vise des objectifs clairement identifiés et dont le coût total excède 50 [millions d’euros] » (voir article 39 du règlement n° 1083/2006), et l’inclut dans un programme opérationnel en vue de son financement par le FEDER, celui-ci doit être approuvé
par la Commission, afin que soient évalués sa finalité et son impact ainsi que l’utilisation envisagée des ressources de l’Union (voir considérant 49 du règlement n° 1083/2006) :

–        à cette fin, le grand projet est présenté à la Commission par l’État membre, ou son autorité de gestion, avec transmission des informations visées à l’article 40 du règlement n° 1083/2006 (voir article 41, paragraphe 1, de ce règlement) ;

–        l’État membre ou l’autorité de gestion présente la demande d’intervention conformément aux schémas de demande (libellés « Grand projet – Demande de confirmation de financement en vertu des articles 39 à 41 du règlement […] n° 1083/2006 ») prévus aux annexes XX à XXII du règlement n° 1828/2006 [voir article 40, paragraphe 2, sous e), et paragraphe 3, de ce dernier règlement] ;

–        sur la base des informations contenues dans ladite demande, la Commission évalue la cohérence du grand projet avec les priorités du programme opérationnel ou des programmes concernés, sa contribution à la réalisation des objectifs de ces priorités et sa cohérence avec les autres politiques de l’Union (voir article 41, paragraphe 1, du règlement n° 1083/2006) ;

–        à condition que la demande soit soumise conformément à l’article 40 du règlement n° 1083/2006, la Commission adopte une décision dans les plus brefs délais et au plus tard trois mois après la présentation du grand projet (voir article 41, paragraphe 2, du règlement n° 1083/2006) ;

–        la décision de la Commission, lorsqu’elle est positive, décrit l’objet physique du projet et indique l’assiette sur laquelle le taux du cofinancement s’applique et le plan de contribution du fonds (voir article 41, paragraphe 2, du règlement n° 1083/2006) ;

–        lorsque la Commission refuse la contribution au grand projet, elle en communique les raisons à l’État membre (voir article 41, paragraphe 3, du règlement n° 1083/2006) ;

–        lorsque la Commission refuse la contribution à un grand projet et que l’État membre a déjà inclus des paiements relatifs audit grand projet dans un état des dépenses soumis à la Commission, l’état des dépenses suivant l’adoption de la décision de refus doit être rectifié en conséquence (voir article 78, paragraphe 4, du règlement n° 1083/2006).

28      Il résulte de l’ensemble de ces dispositions que c’est dans le cadre des seules relations entre la Commission et l’État membre que se déroulent les opérations visant à ce que la Commission évalue et confirme ou non à un État membre une contribution financière du FEDER pour un grand projet (voir, par analogie, ordonnance du 6 mars 2012, Northern Ireland Department of Agriculture and Rural Development/Commission, T‑453/10, non publiée, EU:T:2012:106, point 46).

29      En effet, il ressort des dispositions rappelées au point 27 ci-dessus que c’est l’État membre qui est responsable de la sélection des opérations financées par le biais du FEDER, y compris des grands projets ; que c’est toujours l’État membre qui, après avoir sélectionné un grand projet en vue de son financement par le FEDER dans le cadre d’un programme opérationnel, présente à la Commission une demande de confirmation contenant les informations qui y sont afférentes et qui, le cas
échéant, les complète ; que c’est sur la base de cette demande que la Commission évalue le grand projet ; que le résultat de l’évaluation n’est communiqué par la Commission qu’à l’État membre et que, lorsque la Commission refuse une contribution à un grand projet, il incombe à l’État membre de rectifier les états des dépenses déjà soumis à la Commission qui contiendraient des dépenses relatives audit grand projet. C’est donc à l’État membre concerné que la Commission accorde ou refuse une
contribution financière du FEDER pour un grand projet. Partant, c’est l’État membre concerné qui est titulaire du droit au concours financier de l’Union en question (voir, par analogie, ordonnance du 9 juin 2016, IREPA/Commission et Cour des comptes, T‑825/14, non publiée, EU:T:2016:345, point 38).

30      Cela est conforme au fait que, selon la jurisprudence, le concours du FEDER est conçu comme un système entre la Commission et l’État membre (voir, en ce sens, arrêt du 3 mars 2011, Caixa General de Depósitos/Commission, T‑401/07, non publié, EU:T:2011:72, point 69).

31      En troisième lieu, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la désignation, dans une décision d’octroi d’un concours financier de l’Union au titre du FEDER, d’une entité comme autorité responsable de la réalisation du projet n’implique pas que cette entité soit elle-même titulaire du droit audit concours. Le fait qu’une entité soit mentionnée comme autorité responsable de la demande de concours financier n’a pas non plus comme conséquence de la placer dans un
rapport direct avec le concours de l’Union. De même, le fait qu’une entité soit désignée comme bénéficiaire du concours financier n’implique pas qu’elle soit titulaire du droit audit concours. Or, c’est l’État membre, en tant que destinataire de la décision d’octroi du concours financier du FEDER, qui doit être considéré comme titulaire du droit audit concours (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2009, Commission/Ente per le Ville Vesuviane et Ente per le Ville Vesuviane/Commission,
C‑445/07 P et C‑455/07 P, EU:C:2009:529, points 47 à 54 et jurisprudence citée, et ordonnance du 14 septembre 2011, Regione Puglia/Commission, T‑84/10, non publiée, EU:T:2011:468, point 30 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, ordonnances du 21 mai 2015, APRAM/Commission, T‑403/13, non publiée, EU:T:2015:317, points 36 et 62 et jurisprudence citée, et du 9 juin 2016, IREPA/Commission et Cour des comptes, T‑825/14, non publiée, EU:T:2016:345, points 38 à 40 et jurisprudence
citée).

32      Il découle de la jurisprudence visée au point 31 ci-dessus que, en l’espèce, c’est la République de Pologne, et non la requérante, qui doit être considérée comme étant le titulaire du droit au concours du FEDER pour le projet.

33      En quatrième lieu, il convient de rappeler que, en l’espèce, conformément aux dispositions rappelées au point 27 ci-dessus, c’est effectivement la République de Pologne qui, le 1^er août 2013, a présenté à la Commission une demande de contribution financière du FEDER pour le projet (voir point 6 ci-dessus).

34      En outre, par la décision attaquée, la Commission a refusé ladite contribution financière à la République de Pologne (voir point 8 ci-dessus). En effet, d’une part, l’article 3 de la décision attaquée désigne la République de Pologne comme l’unique destinataire de cette décision. D’autre part, l’article 1^er de la décision attaquée, par son refus d’accorder une contribution du FEDER, a pour effet d’exclure que la République de Pologne puisse imputer au FEDER ses éventuelles dépenses
relatives au projet. De ce fait, l’article 2 de la décision attaquée contraint la République de Pologne à rectifier toute dépense relative au projet qui aurait déjà été soumise à la Commission dans un état des dépenses antérieur à ladite décision.

35      Partant, en vertu de la décision attaquée, c’est la République de Pologne qui a été privée d’une contribution financière du FEDER pour le financement du projet et qui doit rectifier les éventuelles dépenses relatives à ce projet déjà soumises à la Commission.

36      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la décision attaquée ne produit pas d’effets sur la situation juridique de la requérante et que, par conséquent, le premier critère de l’affectation directe n’est pas rempli en l’espèce.

 Sur le second critère de l’affectation directe

37      S’agissant du second critère de l’affectation directe mentionné au point 23 ci-dessus, il convient de rappeler que l’interposition d’une volonté autonome du destinataire entre la décision et ses répercussions sur la partie requérante implique que celle-ci n’est pas affectée directement. Si la décision du destinataire n’est imposée juridiquement ni par le droit de l’Union ni par la décision concrète de la Commission, mais qu’elle repose sur une décision autonome de l’État membre, il
n’existe alors aucun lien direct entre la décision de la Commission et la partie requérante (voir ordonnance du 6 mars 2012, Northern Ireland Department of Agriculture and Rural Development/Commission, T‑453/10, non publiée, EU:T:2012:106, point 54 et jurisprudence citée).

38      Or, il convient de rappeler que, en l’espèce, l’article 1^er de la décision attaquée a pour effet de refuser à la République de Pologne une contribution du FEDER pour le projet. Cette disposition implique donc que les éventuelles dépenses de la République de Pologne relatives à ce projet ne seront pas prises en charge par le FEDER.

39      L’article 2 de la décision attaquée, conformément à l’article 78, paragraphe 4, du règlement n° 1083/2006, impose à la République de Pologne l’obligation de rectifier les états des dépenses déjà soumis à la Commission qui contiendraient des dépenses relatives au projet.

40      Dans ces circonstances, l’exécution de la décision attaquée par la République de Pologne requiert uniquement que, d’une part, lesdites dépenses ne soient pas déclarées à la Commission et que, d’autre part, si de telles dépenses ont déjà été déclarées à la Commission dans un état des dépenses antérieur à la décision attaquée, l’état des dépenses suivant soit rectifié en conséquence.

41      Force est donc de constater que l’exécution de la décision attaquée par la République de Pologne n’implique, en vertu de la décision attaquée elle-même ou des dispositions du droit de l’Union ayant vocation à régir son effet, aucune conséquence pour la requérante, ses effets étant circonscrits aux seules relations entre l’Union, notamment le FEDER, et la République de Pologne.

42      Ainsi, la décision attaquée n’empêche pas la requérante de réaliser le projet ou la République de Pologne de le financer au moyen de ressources financières autres que celles provenant du FEDER. De même, la décision attaquée n’impose pas à la République de Pologne de résilier le contrat ou de recouvrer des sommes qu’elle aurait versées à la requérante pour la réalisation du projet.

43      Or, au point 84 des conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans l’affaire Regione Siciliana/Commission (C‑417/04 P, EU:C:2006:28), en l’absence d’une contribution du FEDER, il a été relevé ce qui suit :

« C’est à […] l’État membre concerné qu’il incombe de décider du futur de ce qui constitue véritablement son propre projet. Il dispose de solutions diverses, comme l’abandonner, le suspendre ou le céder, mais il a aussi la faculté d’assumer le coût financier à charge de son budget pour en garantir la réalisation. Bien que [le refus d’une contribution ait des inconvénients], lorsqu’elle [refuse la contribution], la Commission ne préjuge ni n’anticipe, pas plus qu’elle ne recommande, la façon
dont l’État membre doit procéder pour déterminer l’avenir de ses projets de développement territorial. »

44      Dans ces circonstances, il y a lieu de constater qu’aucune répercussion pour la requérante ne découle directement de la décision attaquée en vertu du droit de l’Union ou de la décision elle-même et que, partant, le second critère de l’affectation directe n’est pas non plus rempli en l’espèce.

45      Les conclusions contenues aux points 36 et 44 ci-dessus sur les deux critères de l’affectation directe ne sont pas remises en cause par les arguments de la requérante.

46      Premièrement, dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la requérante a fait valoir que, en conséquence de la décision attaquée, elle a dû rembourser aux autorités polonaises l’aide publique reçue pour la réalisation du projet.

47      Or, ainsi que cela a été observé aux points 38 à 42 ci-dessus, force est de constater que ce remboursement ne découle ni de la décision attaquée elle-même ni des dispositions du droit de l’Union ayant vocation à régir ses effets, mais est l’une des conséquences que, dans le cadre du contrat, les autorités polonaises et la requérante ont attribuées à ladite décision. En effet, c’est l’article 5, paragraphes 12 et 14, du contrat qui prévoit sa résiliation en cas de décision négative de la
Commission sur la demande de confirmation et, dans ce cas, l’obligation pour la requérante de rembourser les fonds déjà reçus des autorités polonaises, y compris ceux ne provenant pas du FEDER. Partant, les conséquences et les obligations découlant du contrat s’interposent entre la situation juridique de la requérante et la décision attaquée (voir, par analogie, ordonnance du 6 juin 2002, SLIM Sicilia/Commission, T‑105/01, EU:T:2002:147, point 53).

48      En outre, à cet égard, contrairement à ce que la requérante a allégué lors de l’audience, lesdites clauses contractuelles ne reflètent pas le contenu de l’article 78, paragraphe 4, du règlement n° 1083/2006, lequel ne porte pas, en cas de décision négative, sur le recouvrement des sommes avancées par l’État membre au responsable de la réalisation du projet, mais sur la rectification des états de dépenses soumis à la Commission par l’État membre. Ainsi, les effets de ladite disposition
demeurent circonscrits aux seules relations entre la Commission et l’État membre et ne concernent nullement les relations entre l’État membre et le responsable de la réalisation du projet, lesquelles, en l’espèce, sont réglées de manière autonome par le contrat.

49      Deuxièmement, lors de l’audience, la requérante a invoqué cinq circonstances objectives qui démontreraient que la République de Pologne n’avait pas la possibilité, même théorique, de ne pas recouvrer ledit montant et de financer elle-même le projet.

50      S’agissant de la présence des clauses contractuelles mentionnées au point 47 ci-dessus, il y a lieu de relever que ces clauses ne permettent pas de conclure à l’absence de marge d’appréciation des autorités polonaises en vertu de la décision attaquée.

51      En effet, tout d’abord, dans la mesure où un tel argument consiste à invoquer une prétendue absence de marge d’appréciation découlant du contrat et non de la réglementation de l’Union, il repose sur une lecture erronée de la jurisprudence citée aux points 23 et 37 ci-dessus, selon laquelle l’absence de marge d’appréciation doit précisément découler du droit de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 14 septembre 2011, Regione Puglia/Commission, T‑84/10, non publiée, EU:T:2011:468,
point 50 et jurisprudence citée).

52      Ensuite, il convient d’observer que le fait même que les autorités polonaises et la requérante aient décidé de résilier le contrat en cas de refus du concours du FEDER et de prévoir, dans ce cas, l’obligation pour la requérante de rembourser les fonds déjà reçus des autorités polonaises constitue l’expression de l’existence de leur volonté autonome, en l’absence de toute obligation découlant à cet égard du droit de l’Union (voir, par analogie, arrêt du 10 septembre 2009, Commission/Ente
per le Ville Vesuviane et Ente per le Ville Vesuviane/Commission, C‑445/07 P et C‑455/07 P, EU:C:2009:529, point 56). Enfin, si la seule existence d’une telle clause était suffisante pour établir l’intérêt direct requis par l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, cela reviendrait, d’une part, à permettre aux parties à un tel contrat de décider si la personne concernée dispose ou non de la qualité pour agir devant les juridictions de l’Union (voir, en ce sens, ordonnances du 14 septembre 2011,
Regione Puglia/Commission, T‑84/10, non publiée, EU:T:2011:468, point 52, et du 21 mai 2015, APRAM/Commission, T‑403/13, non publiée, EU:T:2015:317, point 49) et, d’autre part, à apprécier différemment la situation d’une personne prétendument concernée par une décision de la Commission selon qu’elle a conclu ou non un tel contrat avec les autorités nationales, selon les pratiques existantes dans chaque État membre.

53      S’agissant du fait que, en l’espèce, les autorités polonaises ont effectivement demandé et obtenu le remboursement des sommes avancées à la requérante, il y a lieu d’observer que cette circonstance n’implique pas, en tant que telle, que la République de Pologne n’a eu aucun pouvoir d’appréciation ou ne l’a pas exercé, mais que, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, elle a décidé, en l’absence de prise en charge par le FEDER, de ne pas financer le projet par d’autres ressources.

54      S’agissant du fait que la requérante n’a pas commencé le projet avant d’avoir reçu le support financier des autorités polonaises, il y a lieu d’observer, d’une part, que cet argument, dès lors qu’il vise en fait la subvention des autorités polonaises, ne saurait démontrer l’affectation directe de la requérante à l’égard de la décision attaquée et, d’autre part, que, en l’espèce, le projet a été complété par la requérante en 2011, après le retrait par la République de Pologne de la
première demande de contribution et bien avant que la décision attaquée ne soit adoptée par la Commission le 11 mai 2015.

55      S’agissant du fait que la Commission aurait participé à la sélection du projet de la requérante dans le cadre du comité de suivi du programme opérationnel, il convient d’observer, tout d’abord, que, en vertu de l’article 65 du règlement n° 1083/2006, le comité de suivi n’a pas pour mission de sélectionner des opérations individuelles, mais seulement d’examiner et d’approuver les critères de sélection relevant d’un programme opérationnel, la sélection des opérations incombant à
l’autorité de gestion ; ensuite, que, en vertu de l’article 64, paragraphe 2, du règlement n° 1083/2006, s’il est vrai qu’un représentant de la Commission peut participer aux travaux du comité de suivi, il peut le faire uniquement à titre consultatif et, enfin, que, en tout état de cause, il ne ressort nullement du document invoqué par la requérante au soutien de son argument, à savoir de la fiche d’évaluation du ministère de l’Économie polonais du 10 octobre 2008 annexée à la requête, que la
Commission aurait contribué d’une quelconque façon à la sélection du projet par les autorités polonaises.

56      S’agissant, enfin, de l’argument tiré du fait que la République de Pologne ne serait pas libre d’affecter au projet d’autres fonds provenant du budget national, il convient de relever que cet argument, à supposer même que ladite circonstance soit établie, repose également, à la lumière de la jurisprudence rappelée au point 51 ci-dessus, sur une lecture erronée du droit de l’Union, dans la mesure où il consiste à invoquer une prétendue absence de marge d’appréciation découlant du droit
national et non de la réglementation de l’Union.

57      Troisièmement, la jurisprudence invoquée par la requérante lors de l’audience au soutien de la thèse de l’absence d’un pouvoir d’appréciation des autorités polonaises, à savoir les arrêts du 23 novembre 1971, Bock/Commission (62/70, EU:C:1971:108), du 17 janvier 1985, Piraiki-Patraiki e.a./Commission (11/82, EU:C:1985:18), du 5 mai 1998, Dreyfus/Commission (C‑386/96 P, EU:C:1998:193), du 5 mai 1998, Compagnie Continentale (France)/Commission (C‑391/96 P, EU:C:1998:194), et du 5 mai
1998, Glencore Grain/Commission (C‑403/96 P, EU:C:1998:195), n’est pas transposable en l’espèce.

58      En effet, il convient de rappeler que la Cour elle-même a jugé que la solution consacrée dans lesdits arrêts revêt un caractère exceptionnel qui s’explique par les situations spécifiques au regard desquelles elle a été rendue et que cela ressort des termes mêmes de ces arrêts (voir, en ce sens, ordonnance du 6 mars 2014, Northern Ireland Department of Agriculture and Rural Development/Commission, C‑248/12 P, non publiée, EU:C:2014:137, points 23 et 26). La Cour a donc rappelé que c’est
à titre exceptionnel qu’elle avait jugé que la partie requérante pouvait être directement affectée, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, dès lors que d’autres facteurs, parmi lesquels la faculté purement théorique de ne pas donner suite à la décision en cause, permettaient de conclure à l’existence d’un intérêt direct la concernant (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2009, Commission/Ente per le Ville Vesuviane et Ente per le Ville Vesuviane/Commission, C‑445/07 P et
C‑455/07 P, EU:C:2009:529, point 58, et ordonnance du 6 mars 2014, Northern Ireland Department of Agriculture and Rural Development/Commission, C‑248/12 P, non publiée, EU:C:2014:137, point 25).

59      En outre, le présent cas d’espèce ne se caractérise pas par un contexte factuel et économique tel que, sans la contribution du FEDER, la requérante serait privée de toute possibilité effective de réaliser le projet ou de disposer des ressources nécessaires à cette fin, dès lors que la contribution du FEDER est loin d’être la seule source de financement du projet et que, au contraire, il ressort du considérant 6 de la décision attaquée que celui-ci aurait été financé à environ 75 % par
des fonds privés ainsi qu’à environ 4 % par d’autres fonds de l’État membre concerné.

60      Quatrièmement, la requérante a fait valoir lors de l’audience que la jurisprudence rappelée au point 31 ci-dessus ne serait pas applicable en l’espèce au motif qu’elle viserait des entités qui ne sont pas les bénéficiaires du concours du FEDER, dont le rapport avec ledit concours serait donc plus indirect que pour le bénéficiaire. Un tel argument ne saurait être retenu, dès lors qu’il ressort précisément de ladite jurisprudence que le fait qu’une entité soit désignée comme bénéficiaire
du concours financier n’est pas de nature à la distinguer des autres entités visées par cette même jurisprudence et n’implique pas qu’elle soit titulaire du droit audit concours (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2009, Commission/Ente per le Ville Vesuviane et Ente per le Ville Vesuviane/Commission, C‑445/07 P et C‑455/07 P, EU:C:2009:529, point 54 ; voir également, par analogie, ordonnances du 21 mai 2015, APRAM/Commission, T‑403/13, non publiée, EU:T:2015:317, point 62, et du 9 juin
2016, IREPA/Commission et Cour des comptes, T‑825/14, non publiée, EU:T:2016:345, point 40). Par ailleurs, selon la requérante, ladite jurisprudence ne serait pas non plus applicable au motif qu’elle viserait des cas dans lesquels le remboursement des sommes payées n’aurait pas encore été demandé ou dans lesquels il n’y aurait pas d’obligation de le demander, alors que, en l’espèce, la République de Pologne a demandé un tel remboursement et était tenue de le faire en vertu du contrat. Ces
arguments ne sauraient non plus être retenus, dès lors que, en l’espèce, ainsi que cela est indiqué aux points 47 et 48 ci-dessus, le remboursement des sommes en cause par la requérante ne découle nullement de la décision attaquée ou du droit de l’Union, mais uniquement du contrat.

61      Cinquièmement, s’agissant de l’argument invoqué par la requérante lors de l’audience selon lequel elle ne pourrait présenter aucune plainte contre l’État membre et devrait ainsi être considérée comme directement affectée par la décision attaquée, il convient de rappeler que, si les particuliers doivent pouvoir bénéficier d’une protection juridictionnelle effective des droits qu’ils tirent de l’ordre juridique de l’Union, l’invocation du droit à une telle protection ne saurait toutefois
remettre en cause les conditions posées à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. Or, conformément à une jurisprudence constante, la protection juridictionnelle des personnes physiques ou morales qui ne peuvent pas, en raison des conditions de recevabilité prévues à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, attaquer directement des actes de l’Union du type de la décision litigieuse doit être assurée de manière efficace par les voies de recours devant les juridictions nationales. Celles-ci sont,
conformément au principe de coopération loyale énoncé à l’article 4 TFUE, tenues d’interpréter et d’appliquer, dans toute la mesure du possible, les règles internes de procédure gouvernant l’exercice des recours d’une manière qui permette auxdites personnes de contester en justice la légalité de toute décision ou de toute autre mesure nationale relative à l’application à leur égard d’un acte de l’Union tel que celui en cause, en excipant de l’invalidité de ce dernier et en amenant ainsi ces
juridictions à interroger à cet égard la Cour par la voie de questions préjudicielles (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2009, Commission/Ente per le Ville Vesuviane et Ente per le Ville Vesuviane/Commission, C‑445/07 P et C‑455/07 P, EU:C:2009:529, points 65 et 66 et jurisprudence citée, et ordonnance du 9 juin 2016, IREPA/Commission et Cour des comptes, T‑825/14, non publiée, EU:T:2016:345, points 48 et 49 et jurisprudence citée).

62      En l’espèce, dans le respect du droit national applicable, la requérante aurait notamment pu s’opposer, devant le juge national compétent, à la résiliation du contrat ou au remboursement demandé par les autorités polonaises en vertu dudit contrat, en excipant de l’invalidité de la décision attaquée déclenchant lesdites demandes. La requérante aurait pu amener ainsi le juge national à interroger la Cour sur la validité de la décision attaquée par la voie de questions préjudicielles.

63      La circonstance évoquée par la requérante selon laquelle les autorités polonaises contestent elles-mêmes la décision attaquée, laquelle fait effectivement l’objet d’un recours introduit par la République de Pologne devant le Tribunal, n’implique pas que la requérante, dans le respect du droit national applicable, n’aurait pas pu s’opposer à la résiliation du contrat ou au remboursement demandé par les autorités polonaises en vertu dudit contrat.

64      En tout état de cause, il importe de souligner que l’exigence d’une protection juridictionnelle effective ne saurait aboutir à écarter la condition de l’affectation directe posée par l’article 263, quatrième alinéa, TFUE (voir ordonnance du 9 juin 2016, IREPA/Commission et Cour des comptes, T‑825/14, non publiée, EU:T:2016:345, point 50 et jurisprudence citée).

65      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, les deux critères mentionnés au point 23 ci-dessus n’étant pas remplis, la requérante n’est pas directement affectée par la décision attaquée, celle-ci produisant uniquement des effets dans les relations juridiques entre la Commission et la République de Pologne.

66      Il y a donc lieu de conclure que la requérante ne satisfait pas à l’une des conditions de recevabilité posées à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, à savoir celle relative à l’affectation directe, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’examiner si la requérante est individuellement concernée par la décision attaquée.

67      Partant, le présent recours doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur les dépens

68      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      JYSK sp. z o.o. supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

Van der Woude Ulloa Rubio Marcoulli

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 mai 2017.

Signatures

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* Langue de procédure : l’anglais


Synthèse
Formation : Septième chambre
Numéro d'arrêt : T-403/15
Date de la décision : 04/05/2017
Type de recours : Recours en annulation - irrecevable

Analyses

Recours en annulation – FEDER – Article 41, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1083/2006 – Refus d’octroyer une contribution financière à un grand projet – Entreprise responsable de la réalisation du projet – Défaut d’affectation directe – Irrecevabilité.

Fonds européen de développement régional (FEDER)

Cohésion économique, sociale et territoriale


Parties
Demandeurs : JYSK sp. z o.o.
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Marcoulli

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:2017:300

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