T‑66/1462014TJ0066EU:T:2016:4300001111212TARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)21 juillet 2016 (
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)
«Politique étrangère et de sécurité commune — Mesures restrictives prises à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation au Zimbabwe — Gel des fonds — Responsabilité non contractuelle»
Dans l’affaire T‑66/14,
John Arnold Bredenkamp, demeurant à Harare (Zimbabwe),
Echo Delta (Holdings) PCC Ltd, établie à Castletown (Île de Man),
Scottlee Holdings (Private) Ltd, établie à Harare,
Fodya (Private) Ltd, établie à Harare,
représentés par MM. P. Moser, QC, et G. Martin, solicitor,
parties requérantes,
contre
Conseil de l’Union européenne, représenté par M. B. Driessen et Mme E. Dumitriu-Segnana, en qualité d’agents,
et
Commission européenne, représentée par Mmes S. Bartelt, D. Gauci et M. T. Scharf, en qualité d’agents,
parties défenderesses,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 268 TFUE et tendant à obtenir réparation du préjudice que les requérants auraient prétendument subi à la suite de l’adoption du règlement (CE) no 77/2009 de la Commission, du 26 janvier 2009, modifiant le règlement (CE) no 314/2004 du Conseil concernant certaines mesures restrictives à l’égard du Zimbabwe (JO 2009, L 23, p. 5), du règlement (UE) no 173/2010 de la Commission, du 25 février 2010, modifiant le règlement (CE) no 314/2004 du Conseil
concernant certaines mesures restrictives à l’égard du Zimbabwe (JO 2010, L 51, p. 13), et du règlement (UE) no 174/2011 de la Commission, du 23 février 2011, modifiant le règlement (CE) no 314/2004 du Conseil concernant certaines mesures restrictives à l’égard du Zimbabwe (JO 2011, L 49, p. 23),
LE TRIBUNAL (huitième chambre),
composé de M. D. Gratsias (rapporteur), président, Mme M. Kancheva et M. C. Wetter, juges,
greffier : M. L. Grzegorczyk, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 24 février 2016,
rend le présent
Arrêt ( 1 )
Antécédents du litige
1 Dans sa position commune 2002/145/PESC, du 18 février 2002, concernant des mesures restrictives à l’encontre du Zimbabwe (JO 2002, L 50, p. 1), adoptée sur le fondement de l’article 15 UE, le Conseil de l’Union européenne a exprimé sa profonde préoccupation concernant la situation au Zimbabwe, en particulier les graves violations des droits de l’homme, et notamment de la liberté d’opinion, d’association et de réunion pacifique, commises par le gouvernement de la République du Zimbabwe. Il a donc
imposé des mesures restrictives pour une période de douze mois renouvelable, devant faire l’objet d’un examen permanent.
2 La position commune 2004/161/PESC du Conseil, du 19 février 2004, renouvelant les mesures restrictives à l’encontre du Zimbabwe (JO 2004, L 50, p. 66), a prévu un renouvellement des mesures restrictives instaurées par la position commune 2002/145. Selon l’article 4, paragraphe 1, de la position commune 2004/161, tel que modifié en vertu de l’article 1er, paragraphe 1, de la position commune 2008/632/PESC du Conseil, du 31 juillet 2008, modifiant la position commune 2004/161 (JO 2008, L 205,
p. 53), « [l]es États membres [prenaient] les mesures nécessaires pour empêcher l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire des membres du gouvernement [de la République] du Zimbabwe et des personnes physiques qui leur [étaient] associées, ainsi que d’autres personnes physiques dont les activités [portaient] gravement atteinte à la démocratie, au respect des droits de l’homme et à l’État de droit au Zimbabwe » et « [l]es personnes dont il [était] question dans le présent paragraphe
[étaient] énumérées à l’annexe ». Selon l’article 5, paragraphe 1, de la position commune 2004/161, tel que modifié en vertu de l’article 1er, paragraphe 5, de la position commune 2008/632, « [t]ous les capitaux et ressources économiques appartenant à des membres du gouvernement [de la République] du Zimbabwe ou à toute personne physique ou morale, entité ou organisme qui leur [étaient] associés, ou appartenant à d’autres personnes physiques ou morales dont les activités [portaient] gravement
atteinte à la démocratie, au respect des droits de l’homme et à l’État de droit au Zimbabwe, [étaient] gelés » et « [l]a liste des personnes et entités dont il [était] question dans le présent paragraphe figure à l’annexe ». La position commune 2004/161, ainsi modifiée, a été successivement prorogée jusqu’au 20 février 2010 en vertu de la position commune 2009/68/PESC du Conseil, du 26 janvier 2009, renouvelant les mesures restrictives à l’encontre du Zimbabwe (JO 2009, L 23, p. 43), puis,
jusqu’au 20 février 2011, en vertu de la décision 2010/92/PESC du Conseil, du 15 février 2010, prorogeant les mesures restrictives à l’encontre du Zimbabwe (JO 2010, L 41, p. 6). L’article 4, paragraphe 1, et l’article 5, paragraphe 1, de la décision 2011/101/PESC du Conseil, du 15 février 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre du Zimbabwe (JO 2011, L 42, p. 6), qui a abrogé la position commune 2004/161 et était applicable jusqu’au 20 février 2012, ont prévu des mesures identiques
à celles prévues à l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 5, paragraphe 1, de la position commune 2004/161.
3 Le règlement (CE) no 314/2004 du Conseil, du 19 février 2004, concernant certaines mesures restrictives à l’égard du Zimbabwe (JO 2004, L 55, p. 1), a été adopté, ainsi que le mentionne son considérant 5, afin de mettre en œuvre les mesures restrictives prévues par la position commune 2004/161 pour autant que celles-ci entrent dans le champ d’application du traité CE. Il a, notamment, prévu, en son article 6, paragraphe 1, qu’étaient gelés les fonds ou ressources économiques appartenant à des
membres du gouvernement de la République du Zimbabwe et à toute personne physique ou morale, toute entité ou tout organisme associé à ces derniers, qui étaient énumérés à son annexe III. En vertu de son article 11, sous b), la Commission des Communautés européennes a été habilitée à modifier ladite annexe sur la base des décisions prises concernant l’annexe de la position commune 2004/161.
4 Le nom du premier requérant, M. John Arnold Bredenkamp, a été ajouté à la liste des personnes visées aux articles 4 et 5 de la position commune 2004/161 en vertu de l’article 2 et de la partie I de l’annexe de la position commune 2009/68. La motivation sous-tendant l’inscription de ce nom au point 7 de ladite annexe se lit ainsi :
« Homme d’affaires étroitement lié au gouvernement [de la République] du Zimbabwe. A fourni au régime, notamment par l’intermédiaire de ses entreprises, un soutien financier et d’autres formes d’aide (voir également, dans la partie II, les points 1 à 9, 12, 14, 20, 24, 25, 28, 29, 31 et 32). »
5 Le nom du premier requérant a été ajouté à la liste des personnes physiques et morales, des entités et des organismes visés à l’article 6 du règlement no 314/2004 en vertu de l’article 1er et de l’annexe du règlement (CE) no 77/2009 de la Commission, du 26 janvier 2009, modifiant le règlement no 314/2004 (JO 2009, L 23, p. 5). La motivation sous-tendant l’inscription du requérant au point 7 de la partie I de ladite annexe se lit ainsi :
« Homme d’affaires étroitement lié au gouvernement zimbabwéen. A apporté au régime un appui financier et d’autres formes de soutien, notamment par le biais de ses entreprises (voir également entrées nos [1 à 9], 12, 14, 20, 24, 25, 28, 29, 31 et 32 dans la partie II). »
6 Les noms des deuxième et troisième requérantes, Echo Delta (Holdings) PCC Ltd et Scottlee Holdings (Private) Ltd, ont également été ajoutées à la liste des personnes visées aux articles 4 et 5 de la position commune 2004/161 en vertu de l’article 2 et de l’annexe de la position commune 2009/68. Ces mêmes noms ont été ajoutés à la liste des personnes physiques et morales, des entités et des organismes visés à l’article 6 du règlement no 314/2004 en vertu de l’article 1er et de l’annexe du règlement
no 77/2009. La motivation sous-tendant leur inscription sur les listes en question figure avec la mention « Propriété de John Arnold Bredenkamp » dans la position commune 2004/161 ou avec la mention « Appartenant à John Arnold Bredenkamp » dans le règlement no 77/2009. Par ailleurs, la dénomination « Breco International » a été ajoutée au point 7 de la partie II de la liste des personnes visées aux articles 4 et 5 de la position commune 2004/161, en vertu de l’article 2 et de l’annexe de la
position commune 2009/68 et au point 7 de la partie II de l’annexe III du règlement no 314/2004, en vertu de l’article 1er et de l’annexe du règlement no 77/2009. La motivation sous-tendant l’inscription de cette dénomination sur lesdites listes est identique à celle sous-tendant l’inscription des noms des deuxième et troisième requérantes sur les mêmes listes.
7 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 avril 2009, M. Bredenkamp et 18 personnes morales, dont les deuxième et troisième requérantes dans la présente affaire, ont introduit un recours tendant à l’annulation du règlement no 77/2009 (affaire T‑145/09, Bredenkamp e.a./Commission).
8 Les noms des trois premiers requérants ainsi que celui de Breco International ont été maintenus sur les listes en question en vertu de la décision 2010/92, du règlement (UE) no 173/2010 de la Commission, du 25 février 2010, modifiant le règlement no 314/2004 (JO 2010, L 51, p. 13), de la décision 2011/101 et du règlement (UE) no 174/2011 de la Commission, du 23 février 2011, modifiant le règlement no 314/2004 (JO 2011, L 49, p. 23).
9 Les noms des trois premiers requérants ainsi que de Breco International ont été radiés des listes en question en vertu de la décision 2012/97/PESC du Conseil, du 17 février 2012, modifiant la décision 2011/101 (JO 2012, L 47, p. 50), et du règlement d’exécution (UE) no 151/2012 de la Commission, du 21 février 2012, modifiant le règlement no 314/2004 (JO 2012, L 49, p. 2).
10 À la suite de l’adoption de la décision 2012/97 et du règlement d’exécution no 151/2012, le Tribunal a considéré, dans l’ordonnance du 6 septembre 2012, Bredenkamp e.a./Commission (T‑145/09, non publiée, EU:T:2012:407), qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur le recours introduit le 6 avril 2009.
Procédure et conclusions des parties
11 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 janvier 2014, les requérants ont introduit le présent recours.
12 Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
— condamner le Conseil et la Commission au paiement des dommages et intérêts spécifiés dans la requête ;
— condamner le Conseil et la Commission au paiement d’intérêts composés au taux Euribor majoré de deux points de pourcentage à compter de la date de l’arrêt mettant fin à l’instance ;
— condamner le Conseil et la Commission aux dépens.
13 Le Conseil et la Commission concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours ;
— condamner les requérants aux dépens.
14 Les parties ont produit une série de mémoires déposés dans le cadre de l’affaire T‑145/09, Bredenkamp e.a./Commission. Aucune raison ne justifiant d’écarter ces pièces du dossier de la présente affaire, elles y sont définitivement versées. Les parties ne se sont, par ailleurs, pas opposées à la production de ces mémoires de part et d’autre.
En droit
15 Au soutien du recours, les requérants font valoir avoir subi cinq chefs de préjudice, matériel et moral, causés par une série d’illégalités affectant l’inscription initiale et le maintien de leur nom sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004. Ces illégalités sont exposées en quatre griefs.
16 Le Conseil estime, à titre liminaire, que le recours doit être rejeté comme manifestement irrecevable ou comme manifestement dénué de tout fondement en droit en raison de l’insuffisance manifeste des preuves invoquées au soutien du chapitre relatif aux chefs de préjudice que les requérants prétendent avoir subi.
17 À cet égard, il y a lieu de relever que l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, au sens de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, pour comportement illicite de ses organes, est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué. Le caractère cumulatif de ces trois conditions d’engagement de la
responsabilité implique que, lorsque l’une d’entre elles n’est pas remplie, le recours en indemnité doit être rejeté dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions (voir arrêt du 23 novembre 2011, Sison/Conseil, T‑341/07, EU:T:2011:687, points 28 et 29 et jurisprudence citée).
18 Eu égard à la demande du premier requérant relative à la réparation du préjudice non matériel qu’il a prétendument subi, il y a lieu d’examiner, tout d’abord, la problématique liée à la légalité du comportement du Conseil et de la Commission à l’égard dudit requérant. En effet, les arguments du Conseil concernant l’irrecevabilité du recours ou son caractère manifestement non fondé compte tenu des éléments de preuve annexés à la requête sont à rejeter à tout le moins en ce qui concerne le
préjudice non matériel allégué par le premier requérant, le recours contenant suffisamment d’éléments décrivant les circonstances susceptibles de fonder un tel préjudice. Dans ce contexte, s’il s’avère que lesdites institutions n’ont pas agi de manière illégale à l’égard dudit requérant, le recours sera à rejeter dans son intégralité à l’égard de l’ensemble des requérants, compte tenu du fait que le motif fondant les inscriptions litigieuses repose sur l’inscription du nom du premier requérant
sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004.
19 La Commission, pour sa part, soutient, à titre liminaire, que la quatrième requérante n’a jamais fait l’objet de mesures restrictives, de sorte que le recours doit être rejeté comme irrecevable à l’égard de celle-ci.
20 Comme cela a été exposé au point 6 ci-dessus, la quatrième requérante prétend être successeur à titre universel de Breco International (Private), laquelle aurait été ajoutée, sous la dénomination « Breco International », à la liste des personnes morales, des entités et des organismes visés à l’article 6 de l’annexe III du règlement no 314/2004 en vertu de de l’article 1er et de l’annexe du règlement no 77/2009. Il y a lieu de relever, à cet égard, que, au point 7 de la partie II de ladite annexe,
il est indiqué que Breco International est une personne morale établie à Saint-Hélier (Jersey). Selon les explications données par le Conseil lors de l’audience, l’existence d’une telle entité établie à Jersey a été déduite d’un rapport provenant d’une agence d’informations d’entreprises annexé à la duplique déposée par cette institution. Or, selon un certificat de changement de nom issu du registre des sociétés zimbabwéen en date du 29 septembre 2010, produit par les requérants dans le cadre de
la régularisation de la requête, la quatrième requérante est la société zimbabwéenne Breco international (Private) Ltd, devenue Fodya (Private) Ltd. Dans ce contexte, premièrement, force est de constater que l’inscription du nom de Breco International sur les listes en question n’a pas été fondée sur une preuve de l’existence juridique de cette entité provenant du registre des sociétés zimbabwéen. Deuxièmement, aucun élément ne permet de déduire que, en incluant le nom de Breco International dans
lesdites listes, les institutions concernées entendaient inscrire sur ces listes le nom de la quatrième requérante, qui est établie à Harare (Zimbabwe), et dont les données d’identification diffèrent, de ce fait, substantiellement de celles relatives à Breco International. Dans ces conditions, les requérants soutiennent à tort que le nom de la quatrième requérante a fait l’objet d’une inscription sur les mêmes listes.
21 Toutefois, contrairement à ce que soutient la Commission, la circonstance selon laquelle la quatrième requérante n’apporte pas la preuve que son nom a fait l’objet d’une inscription sur les listes en question n’affecte pas la recevabilité du présent recours en indemnité en ce qu’il est introduit par celle-ci. En effet, la question de savoir si l’inscription du nom de Breco International ou celles des noms des trois premiers requérants sur lesdites listes ont causé à la quatrième requérante des
préjudices devant être réparés selon les règles exposées au point 17 ci-dessus ne concerne pas la recevabilité du recours, mais est liée à la réalité desdits préjudices allégués ainsi qu’à l’existence d’un lien de causalité entre les prétendues illégalités entachant ces inscriptions et ces préjudices.
22 Par conséquent, s’il est vrai que l’argumentation des requérants n’est pas exacte dans la mesure où ils font valoir que le nom de la quatrième requérante a fait l’objet d’une inscription sur les listes en question, il n’en demeure pas moins que le recours est recevable en ce qui concerne la quatrième requérante.
23 S’agissant du comportement prétendument illégal du Conseil et de la Commission, il convient de relever d’emblée que, même si, dans la partie introductive de la requête, les requérants se réfèrent tantôt aux positions communes et aux décisions adoptées sur le fondement des dispositions relatives à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) du traité UE et imposant des mesures restrictives à leur égard tantôt aux règlements adoptés sur le fondement des dispositions des traités CE et FUE,
ils visent, dans leurs griefs relatifs aux prétendues illégalités commises, exclusivement ces derniers règlements. Dans ces conditions, il y a lieu de juger que le recours vise à établir la responsabilité non contractuelle de l’Union sur le seul fondement des règlements en question, à l’exclusion des positions communes et des décisions adoptées dans le cadre de la PESC.
24 Pour qu’il soit satisfait à la condition d’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union relative à l’illégalité du comportement reproché aux institutions, une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers doit être établie. Tel est par définition le cas du droit fondamental à la propriété (arrêt du 23 novembre 2011, Sison/Conseil, T‑341/07, EU:T:2011:687, points 33 et 75).
25 En l’espèce, les requérants font valoir que, en tant que les règlements nos 77/2009, 173/2010 et 174/2011 les concernent, ceux-ci sont, premièrement, dénués de base juridique, deuxièmement, entachés d’erreurs de droit et de fait, troisièmement, viciés par des violations de formes substantielles et, quatrièmement, compte tenu des illégalités susmentionnées, constitutifs d’une violation du droit à la propriété.
26 Il y a lieu de relever, à titre liminaire, que, s’agissant de la condition selon laquelle la règle de droit prétendument violée doit avoir pour objet de conférer des droits aux particuliers, les mesures restrictives ont pour objet de limiter l’exercice de certains droits de la part des personnes ciblées, en premier lieu celui de leur droit de propriété. Toutefois, au regard des objectifs que le système de mesures restrictives comme celui en cause vise à atteindre, ce dernier constitue une
limitation répondant aux critères de l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») (arrêt du 27 février 2014, Ezz e.a./Conseil, T‑256/11, EU:T:2014:93, points 195 à 205). Par ailleurs, les requérants ne prétendent pas que ce système enfreint en tant que tel leur droit de propriété. Il convient toutefois de rappeler que le pouvoir de restreindre le droit de propriété doit s’exercer selon les règles de procédure et de fond prévues à
cet effet. À défaut, une restriction injustifiée du droit de propriété sera à constater dans un cas donné (voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, points 352, 353 et 368 à 370). Par conséquent, dans la mesure où les griefs soulevés à l’appui du recours visent à établir que les règlements ayant imposé le gel des avoirs des trois premiers requérants sont viciés d’illégalités relatives
aux règles de procédure et de fond régissant le pouvoir de restreindre leur droit à la propriété, ils se fondent sur des règles conférant des droits aux particuliers.
27 Il convient d’examiner, tout d’abord, le grief tiré de la prétendue absence de base juridique, puis celui tiré de la prétendue violation des formes substantielles et, enfin, les deux autres griefs concernant la légalité au fond des actes incriminés.
Sur la prétendue absence de base juridique
28 Les requérants font valoir que les articles 60 et 301 CE, sur lesquels se fonde le règlement no 314/2004, visent, tout au plus, des pays tiers ainsi que leurs dirigeants et les individus et entités qui sont associés à ces dirigeants ou contrôlés par ceux-ci. Or, aucun des requérants ne relèverait d’une de ces catégories même si la thèse selon laquelle le premier requérant était étroitement lié au gouvernement zimbabwéen devait être acceptée, ce que les requérants contestent. En effet, ce ne
serait pas n’importe quel type d’association, indépendamment d’un comportement particulier, qui justifierait l’inscription du nom d’un homme d’affaires zimbabwéen sur la liste des personnes visées à l’article 6 dudit règlement. Selon les requérants, le droit à une protection juridictionnelle effective implique qu’ils peuvent demander la réparation du préjudice subi en raison de l’absence de base juridique entachant la légalité des actes litigieux. En toute hypothèse, ils soutiennent que, même si
le premier requérant devait être regardé comme entretenant des liens avec le gouvernement zimbabwéen, cette circonstance n’habiliterait pas les institutions concernées à ajouter automatiquement les noms des deuxième et troisième requérants ainsi que celui de Breco International sur les listes en question.
29 Par cette argumentation, les requérants font valoir, en substance, que, interprété à la lumière des articles 60 et 301 CE, qui constituent sa base juridique, l’article 6 du règlement no 314/2004 vise les pays tiers et leurs dirigeants et, s’agissant des personnes physiques ou morales, tout au plus celles directement associées ou contrôlées par ces derniers et non des hommes d’affaires et des entreprises comme eux.
30 L’article 60 CE prévoit, en son paragraphe 1, que, si, dans les cas envisagés par l’article 301 CE, une action de la Communauté est jugée nécessaire, le Conseil peut prendre, à l’égard de pays tiers concernés, les mesures urgentes nécessaires en ce qui concerne les mouvements de capitaux et les paiements. Selon l’article 301 CE, lorsqu’une position commune ou une action commune adoptées en vertu des dispositions du traité sur l’Union européenne relatives à la PESC prévoient une action de la
Communauté visant à interrompre ou à réduire, en tout ou en partie, les relations économiques avec un ou plusieurs pays tiers, le Conseil prend les mesures urgentes nécessaires.
31 Au vu du libellé des articles 60 et 301 CE, en particulier des termes « à l’égard des pays concernés » et « avec un ou plusieurs pays tiers » y figurant, ces dispositions visent l’adoption de mesures à l’encontre de pays tiers, cette dernière notion pouvant inclure les dirigeants d’un tel pays ainsi que des individus et des entités qui sont associés à ces dirigeants ou contrôlés directement ou indirectement par ceux-ci. Or, il ne saurait être exclu que les dirigeants de certaines entreprises
puissent faire l’objet de mesures restrictives adoptées sur le fondement des articles 60 et 301 CE pour autant qu’il soit établi qu’ils sont associés aux dirigeants du pays tiers ciblé (voir, en ce sens, arrêt du 13 mars 2012, Tay Za/Conseil, C‑376/10 P, EU:C:2012:138, points 53 et 55).
32 Le règlement no 314/2004 ainsi que les règlements litigieux le modifiant, cités au point 25 ci-dessus, portent sur l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de la République du Zimbabwe.
33 Selon le considérant 2 du règlement no 314/2004, compte tenu des atteintes graves aux droits de l’homme perpétrées par le gouvernement de ce pays, il y avait lieu de continuer à appliquer les mesures restrictives déjà en place depuis février 2002.
34 Les mesures restrictives en cause se sont traduites par le gel de tous les fonds et ressources économiques appartenant aux personnes relevant des catégories décrites à l’article 6 du règlement no 314/2004. Il s’agit des membres du gouvernement zimbabwéen et des personnes physiques ou morales, entités et organismes associés auxdits membres.
35 En l’espèce, il ressort de l’annexe du règlement no 77/2009 que le nom du premier requérant a été inscrit sur la liste des personnes physiques et morales, des entités et des organismes visés à l’article 6 du règlement no 314/2004 au motif que celui-ci était « étroitement lié au gouvernement zimbabwéen » et avait « apporté au régime un appui financier et d’autres formes de soutien, notamment par le biais de ses entreprises » (voir point 5 ci-dessus). Cette inscription a été effectuée en vertu du
pouvoir conféré à la Commission par l’article 11, sous b), dudit règlement et à la suite de l’adoption de la position commune 2009/68.
36 Ainsi que le font valoir le Conseil et la Commission, cette motivation correspond bel et bien à la notion de personne « associée » aux dirigeants du pays concerné par les mesures restrictives. En effet, eu égard aux objectifs poursuivis par les mesures restrictives, consistant à empêcher toute aide procurée au gouvernement ciblé, la notion d’« associé » doit inclure également les personnes développant des activités telles que décrites au point 35 ci-dessus. Par conséquent, l’inscription du nom du
premier requérant par le règlement no 77/2009 sur la liste des personnes physiques et morales, des entités et des organismes visés à l’article 6 du règlement no 314/2004 est valablement fondée sur les articles 60 et 301 CE, sur lesquels est fondé à son tour ce dernier règlement.
37 Cette conclusion est également valable à l’égard des personnes morales dont les noms sont inscrits sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004 qui appartiennent au premier requérant. En effet, ainsi que le fait valoir le Conseil, la possibilité d’adopter des mesures restrictives à l’encontre de toute personne morale appartenant à une personne physique associée aux dirigeants du pays concerné est à l’évidence une condition de l’effectivité desdites mesures. Ainsi, dès
lors que les noms des deuxième et troisième requérantes ont été inscrits sur les listes en question au motif que celles-ci appartiennent au premier requérant, cette inscription repose valablement sur les articles 60 et 301 CE. Il en est de même de l’inscription du nom de Breco International, qui repose sur le fondement d’un motif identique, de sorte que le règlement no 314/2004 a valablement été fondé sur lesdits articles en ce qui la concerne.
38 Aucune illégalité n’est donc à constater s’agissant de la base juridique fondant l’inscription des noms des trois premiers requérants et de Breco International sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004.
39 Au demeurant, dans la mesure où l’argumentation des requérants selon laquelle leur comportement ne permet pas de les qualifier d’associés du gouvernement zimbabwéen pourrait être interprétée comme faisant valoir qu’ils ne sont pas des associés dudit gouvernement au sens de l’article 6 du règlement no 314/2004 tel qu’interprété au point 34 ci-dessus, une telle argumentation se confondrait avec le grief tiré des prétendues erreurs relatives à l’appréciation des faits, qui sera examiné aux points 65
à 94 ci-après.
Sur la prétendue violation des formes substantielles
40 Les requérants font valoir que les actes en vertu desquels les noms des trois premiers d’entre eux et de Breco International ont été inscrits sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004 ne comportent pas de motifs spécifiques et concrets leur permettant d’apprécier le bien-fondé de ces inscriptions au regard des conditions légales s’y rapportant ni, par conséquent, d’en contester la validité. Or, selon eux, la motivation des actes en question aurait dû leur être
fournie au moment de leur adoption, omission à laquelle il ne pourrait être remédié en cours d’instance. En toute hypothèse, les éléments de preuve s’y rapportant auraient dû leur être fournis avant le premier renouvellement de leur inscription et être accompagnés de la possibilité pour eux d’être entendus. Or, ils n’auraient eu droit à aucun élément de ce type, la correspondance avec le Conseil ayant été limitée à des questions de procédure.
41 Par cette argumentation, les requérants soulèvent deux griefs. Le premier est tiré d’un prétendu défaut de motivation et le second d’une violation de leurs droits de la défense en raison, d’une part, de l’absence de communication des éléments de preuve retenus à leur charge ainsi que, d’autre part, de l’impossibilité de faire valoir leurs arguments devant le Conseil et la Commission. Cette prétendue violation du droit d’être entendu aurait également compromis leur droit à une protection
juridictionnelle effective.
[omissis]
Sur la prétendue violation du droit d’être entendu
48 Compte tenu de l’effet de surprise nécessaire à une mesure de gel de fonds (voir point 45 ci-dessus), le droit d’être entendu, qui doit être respecté en matière de mesures restrictives, ne requiert, selon une jurisprudence constante, ni que les autorités de l’Union communiquent à la personne ou à l’entité concernée les motifs de l’inscription de son nom sur la liste imposant des mesures restrictives, préalablement à l’inscription initiale de ce nom sur cette liste (voir arrêt du 4 février 2014,
Syrian Lebanese Commercial Bank/Conseil, T‑174/12 et T‑80/13, EU:T:2014:52, point 137 et jurisprudence citée), ni que le Conseil procède, d’office, à une audition de cette personne ou entité (arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, EU:T:2009:401, points 93 et 98).
49 En revanche, lorsque le Conseil a gelé initialement des avoirs pour une durée déterminée, il doit, en principe, donner aux personnes intéressées l’opportunité d’être entendues avant de proroger l’application de cette mesure. En effet, pour être efficaces, les actes prorogeant l’application d’une telle mesure ne doivent pas nécessairement bénéficier d’un effet de surprise (voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 2014, Al Assad/Conseil, T‑202/12, EU:T:2014:113, point 70).
50 S’il est vrai que, lorsque, comme en l’espèce (voir points 43 à 46 ci-dessus), des informations suffisamment précises, permettant à l’intéressé de faire connaître utilement son point de vue sur les éléments retenus à sa charge par les institutions concernées, ont été communiquées, le respect des droits de la défense n’implique pas l’obligation pour ces dernières de donner spontanément accès aux documents contenus dans leur dossier, il n’en demeure pas moins que, sur demande de la partie
intéressée, lesdites institutions sont tenues de donner accès à tous les documents administratifs non confidentiels concernant la mesure en cause (voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, EU:T:2009:401, point 97).
51 En outre, le droit d’être entendu préalablement à l’adoption d’actes maintenant des mesures restrictives à l’égard de personnes déjà visées par celles-ci présuppose que le Conseil ait retenu de nouveaux éléments à l’encontre de ces personnes (arrêt du 12 mars 2014, Al Assad/Conseil, T‑202/12, EU:T:2014:113, point 71).
52 En l’espèce, il ressort du dossier que, le 5 février 2009, un avocat a adressé à la Commission une demande d’accès aux documents fondant l’inscription initiale du nom du premier requérant, en vertu du règlement no 77/2009, sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004. Cette demande a été faite sur le fondement du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil
et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43). Par lettre du 5 mars 2009, la Commission a reconnu être en possession de deux documents relatifs à la demande. En particulier, elle a reconnu détenir deux documents émanant du système « correspondance européenne » (COREU) contenant notamment des informations relatives à l’inscription des noms du premier requérant et des sociétés appartenant à ce dernier sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004. Néanmoins, elle a refusé
l’accès à ces documents sur le fondement de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement no 1049/2001, relatif à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales.
53 Par lettre du 9 mars 2009, une « demande confirmative » a été introduite, cette fois, pour le compte du premier requérant et de seize sociétés, dont les deuxième et troisième requérantes ainsi que Breco International. Par lettre du 3 juillet 2009, la Commission a refusé l’accès auxdits documents en invoquant le même motif que celui fondant le refus initial.
54 En outre, par lettre du 6 juin 2012, le premier requérant a adressé au Conseil une demande d’accès aux informations qui concernent l’inscription de son nom ainsi que des noms de plusieurs de ses sociétés dont les deuxième et troisième requérantes ainsi que Breco International sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004. Cette demande a été formulée sur le fondement du règlement (CE) no 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2000, relatif à la
protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2000, L 8, p. 1). Par lettre du 18 septembre 2012, le Conseil a répondu en communicant quatre documents adressés par son secrétariat général aux délégations des États membres. Ces documents contiennent, pour l’essentiel, des informations relatives à l’identité des trois premiers requérants et de Breco
International. Un de ces documents, intitulé « Coreu CFSP/0053/09 », se réfère à l’imposition de mesures restrictives à l’encontre du premier requérant par les autorités fédérales des États-Unis d’Amérique, motif pris de l’appui financier que celui-ci aurait offert au gouvernement zimbabwéen grâce au réseau de ses entreprises. Il y est également mentionné que le premier requérant est associé à un ministre dudit gouvernement ainsi qu’au président du Zimbabwe, M. Robert Mugabe.
55 Il ressort de ces éléments que les trois premiers requérants et Breco International se sont adressés à la Commission, au plus tard le 9 mars 2009, en demandant un accès aux éléments fondant l’inscription des noms des trois premiers requérants et de Breco International sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004. Toutefois, la Commission, auteur tant du règlement no 77/2009, en vertu duquel les noms des requérants ont été initialement inscrits sur les listes en
question, que des règlements nos 173/2010 et 174/2011, n’a pas déféré à cette demande.
56 À supposer que cette omission puisse être considérée comme susceptible d’avoir empêché les trois premiers requérants de faire valoir utilement leur point de vue sur la mesure que cette institution avait adoptée à leur égard, il convient encore d’examiner si, étant donné les circonstances de l’espèce, ce fait ne constitue, en tout état de cause, qu’une irrégularité sans conséquences, dès lors que, en l’absence de celle-ci, ces requérants n’auraient pas pu mieux assurer leur défense (arrêt du
4 février 2014, Syrian Lebanese Commercial Bank/Conseil, T‑174/12 et T‑80/13, EU:T:2014:52, point 146).
57 À cet égard, il convient de relever que les requérants exposent avoir présenté, le 19 février 2009, au Foreign & Commonwealth Office (FCO, Bureau des Affaires étrangères et du Commonwealth, Royaume-Uni), conformément au Freedom of Information Act 2000 (loi de 2000 relative à la liberté de l’information), une demande d’accès aux documents concernant l’inscription des noms des trois premiers requérants et de Breco International sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement
no 314/2004. En réponse à cette demande, le FCO a fourni, le 2 juin 2009, une liste de 17 documents ainsi que des copies de deux autres documents, tous publiquement disponibles. Parmi ces documents, figurent un rapport du Groupe d’experts sur l’exploitation illégale des ressources naturelles et autres formes de richesse de la République démocratique du Congo (ci-après le « groupe d’experts »), du 8 octobre 2002, établi sous l’égide du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU)
(ci-après le « rapport du 8 octobre 2002 »), une série d’articles de presse portant sur le premier requérant et un certain nombre de liens Internet vers des informations relatives aux sociétés visées.
58 De surcroît, à la suite de l’adoption de la décision 2011/101 et du règlement no 174/2011, le premier requérant a formulé, le 4 novembre 2011, une nouvelle demande auprès du FCO portant sur les documents concernant son inscription sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004. En réponse à cette demande, le FCO a fourni au premier requérant une liste de quinze documents, dont, notamment, le rapport du 8 octobre 2002 et une série d’articles de presse.
59 Il importe également de relever que, comme le rappelle le Conseil, la Commission a informé le premier requérant de l’inscription de son nom sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004 par lettre du 27 janvier 2009 et a invité ledit requérant, par lettre du 18 décembre 2009, à adresser ses observations et son éventuelle demande de radiation au Conseil. En outre, le premier requérant s’est adressé, par lettres des 26 octobre et 26 novembre 2009, des 21 janvier
et 10 février 2010 à tous les membres du Conseil en exposant ses observations au sujet de l’inscription de son nom ainsi que des noms de ses sociétés sur les listes en question. Par lettre du 16 février 2010, le Conseil a réfuté les arguments du premier requérant en faisant notamment référence aux éléments ressortant du deuxième rapport, établi sous l’égide de l’ONU, en date du 15 octobre 2003 (ci-après le « rapport du15 octobre 2003 »), par le groupe d’experts. Le Conseil a informé le premier
requérant que les inscriptions en question seraient maintenues en vertu de la décision 2010/92. Le premier requérant a répondu à cette dernière lettre par courrier du 19 avril 2010, auquel le Conseil a répondu par lettre du 7 juin 2010. Enfin, par lettre du 13 mai 2011, le premier requérant a présenté ses observations au haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et a reçu une réponse de la part du service européen pour l’action extérieure en date du
29 juin 2011. De surcroît, en réponse à deux lettres du premier requérant en dates des 11 octobre et 3 novembre 2011, le Conseil a rappelé à ce dernier, par lettre du 9 novembre 2011, qu’il pouvait lui soumettre à tout moment une demande documentée tendant à ce que les mesures restrictives soient réexaminées.
60 Premièrement, il ressort de ce qui précède que les trois premiers requérants ainsi que Breco International ont eu accès, par le biais du FCO, à un ensemble d’éléments, constituant l’essentiel des preuves et des informations ayant fondé leur inscription sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004. En effet, d’une part, les requérants font itérativement valoir, aux points 52.3 et 55 de la requête, que l’inscription des noms des trois premiers requérants et de Breco
International sur les listes en question ont été faites à l’initiative du Royaume-Uni et qu’il est improbable que le Conseil ou la Commission aient eu en leur possession d’autres éléments que ceux qui leur ont été communiqués par le FCO. D’autre part, le Conseil indique que les éléments que les requérants ont obtenus de la part du FCO constituent l’essentiel des éléments dont il a été tenu compte.
61 Deuxièmement, il en ressort que, après avoir eu accès à ces éléments, les trois premiers requérants et Breco International ont établi et maintenu un contact permanent avec le Conseil ayant porté sur les questions de fond liées à l’inscription et au maintien de leurs noms sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004.
62 Compte tenu de ces considérations, force est de constater que la circonstance selon laquelle la Commission n’a pas divulgué aux trois premiers requérants les éléments fondant l’inscription de leurs noms sur la liste des personnes visées à l’article 6 du règlement no 314/2004 n’a pas entraîné une violation de leurs droits de la défense. En effet, cette omission n’a pas empêché ces derniers d’exposer leur cause, après avoir pris connaissance d’un ensemble d’éléments qu’eux-mêmes considèrent comme
constituant l’essentiel des informations prises en compte par les institutions concernées pour fonder une motivation qui, par ailleurs, est restée identique pendant toute la période de ladite inscription. Par ailleurs, compte tenu des appréciations figurant au point 20 ci-dessus, dont il ressort que la quatrième requérante n’a pas fait l’objet d’une inscription sur les listes en question, aucune violation des droits de la défense de cette dernière ne saurait être constatée.
[omissis]
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (huitième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) John Arnold Bredenkamp, Echo Delta (Holdings) PCC Ltd, Scottlee Holdings (Private), Ltd et Fodya (Private) Ltd supporteront les dépens du Conseil de l’Union européenne et de la Commission européenne.
Gratsias
Kancheva
Wetter
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 juillet 2016.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.
( 1 ) Ne sont reproduits que les points du présent arrêt dont le Tribunal estime la publication utile.