T‑384/1462014TJ0384EU:T:2016:29800011177T
ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
12 mai 2016 ( *1 )
«FEOGA — Section ‘Garantie’ — FEAGA et Feader — Dépenses exclues du financement — Secteurs bovin et ovin — Correction financière forfaitaire — Correction ponctuelle — Articles 48 et 69 du règlement (CE) no 1782/2003 — Droits spéciaux — Obligation de motivation»
Dans l’affaire T‑384/14,
République italienne, représentée par Mmes G. Palmieri et B. Tidore, en qualité d’agents,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par MM. P. Rossi et D. Bianchi, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision d’exécution 2014/191/UE de la Commission, du 4 avril 2014, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO L 104, p. 43), en tant qu’elle exclut certaines dépenses
effectuées par la République italienne,
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, F. Dehousse et A. M. Collins (rapporteur), juges,
greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 10 décembre 2015,
rend le présent
Arrêt ( 1 )
[omissis]
Procédure et conclusions des parties
21 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 juin 2014, la République italienne a introduit le présent recours.
22 Sur proposition du rapport du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.
23 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 10 décembre 2015.
24 La République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— annuler la décision attaquée en ce qu’elle lui applique des corrections financières de 5026453,43 et de 1860259,60 euros ;
— condamner la Commission aux dépens.
25 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours comme non fondé ;
— condamner la République italienne aux dépens.
En droit
26 La République italienne invoque à l’encontre de la décision attaquée des moyens tenant, en substance, à la violation des règles de l’Union en matière de PAC, à la violation des formes substantielles en raison d’un défaut de motivation, ainsi qu’à la violation de plusieurs principes généraux de droit de l’Union, dont les principes de proportionnalité, de légalité et de sécurité juridique, en ce que la Commission a appliqué des corrections financières, premièrement, dans le cadre de l’octroi des
paiements supplémentaires au sens de l’article 69 du règlement no 1782/2003 et, deuxièmement, dans le cadre de la détermination des droits spéciaux au sens des articles 47 et 48 du même règlement.
27 Au cours de l’audience, la République italienne a déclaré qu’elle renonçait à se prévaloir du moyen tiré de l’application erronée de la correction forfaitaire de 3477225 euros en ce qu’elle reposait sur le non-respect des critères d’agrément d’un organisme payeur. Dès lors, l’objet du présent litige se limite à la légalité de l’application par la Commission des articles 47, 48 et 69 du règlement no 1782/2003 pour fonder les corrections financières de respectivement 1860259,60 euros
et 5026453,43 euros.
Considérations de principe
28 Au préalable, il convient de rappeler que le FEOGA et le Fonds ne financent que les dépenses effectuées conformément au droit de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (arrêts du 8 mai 2003, Espagne/Commission,C‑349/97, Rec, EU:C:2003:251, point 45 ; du 24 février 2005, Grèce/Commission,C‑300/02, Rec, EU:C:2005:103, point 32, et du 12 septembre 2012, Grèce/Commission,T‑356/08, EU:T:2012:418, point 12).
29 À cet égard, il résulte des règles relatives au FEOGA et au Fonds que les États membres sont tenus d’organiser un ensemble de contrôles administratifs et de contrôles sur place permettant d’assurer que les conditions matérielles et formelles d’octroi des aides sont correctement observées. Si l’organisation d’un tel ensemble de contrôles fait défaut ou si celle mise en place par un État membre est défaillante au point de laisser subsister des doutes quant à l’observation de ces conditions, la
Commission est fondée à ne pas reconnaître certaines dépenses effectuées par l’État membre concerné (arrêts du 12 juin 1990, Allemagne/Commission,C‑8/88, Rec, EU:C:1990:241, points 20 et 21 ; du 14 avril 2005, Espagne/Commission,C‑468/02, EU:C:2005:221, point 36, et du 30 septembre 2009, Portugal/Commission,T‑183/06, EU:T:2009:370, point 31).
30 Il ressort également de la jurisprudence que, même si la réglementation pertinente relative à l’octroi des primes n’impose pas expressément aux États membres d’instaurer des mesures de surveillance et des modalités de contrôle telles que celles évoquées par la Commission lors de l’apurement des comptes du FEOGA et du Fonds, il n’en reste pas moins que cette obligation peut découler, le cas échéant implicitement, du fait que, en vertu des règles relatives au FEOGA et au Fonds, il incombe aux États
membres d’organiser un système efficace de contrôle et de surveillance (arrêts Espagne/Commission, point 29 supra, EU:C:2005:221, point 35 ; du 24 avril 2008, Belgique/Commission,C‑418/06 P, Rec, EU:C:2008:247, point 70, et du 4 septembre 2009, Autriche/Commission,T‑368/05, EU:T:2009:305, point 76).
31 S’agissant des règles concernant la charge de la preuve dans le domaine de l’apurement des comptes, il appartient à la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de la PAC, non de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres.
Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du Fonds (arrêts du 11 janvier 2001, Grèce/Commission,C‑247/98, Rec, EU:C:2001:4, points 7 à 9 ; du 1er juillet 2009, Espagne/Commission,T‑259/05, EU:T:2009:232, point 112, et Grèce/Commission, point 28 supra, EU:T:2012:418, point 13).
32 En effet, la gestion du financement du Fonds repose principalement sur les administrations nationales chargées de veiller à la stricte observation des règles de l’Union. Ce régime, fondé sur la confiance entre les autorités nationales et l’Union, ne comporte aucun contrôle systématique de la part de la Commission, que celle-ci serait d’ailleurs matériellement dans l’impossibilité d’assurer. Seul l’État membre est en mesure de connaître et de déterminer avec précision les données nécessaires à
l’élaboration des comptes du Fonds, la Commission ne jouissant pas de la proximité nécessaire pour obtenir les renseignements dont elle a besoin auprès des agents économiques (arrêts du 1er octobre 1998, Irlande/Commission,C‑238/96, Rec, EU:C:1998:451, point 30 ; du 7 juillet 2005, Grèce/Commission,C‑5/03, Rec, EU:C:2005:426, point 97, et du 17 octobre 2012, Espagne/Commission,T‑491/09, EU:T:2012:550, point 25).
33 C’est, en conséquence, à l’État membre qu’il incombe de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (arrêt Grèce/Commission, point 28 supra, EU:T:2012:418, point 13).
34 L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système de contrôle fiable et opérationnel. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle
(arrêts du 28 octobre 1999, Italie/Commission,C‑253/97, Rec, EU:C:1999:527, point 7 ; Espagne/Commission, point 28 supra,EU:C:2003:251, point 48 ; du 12 juillet 2011, Slovénie/Commission,T‑197/09, EU:T:2011:348, point 40, et Grèce/Commission, point 28 supra, EU:T:2012:418, point 35).
35 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les moyens avancés par la République italienne au soutien du recours en ce qu’il vise les deux catégories de corrections financières appliquées dans la décision attaquée.
[omissis]
2. Sur le moyen relatif à la correction ponctuelle portant sur la détermination et le paiement des droits spéciaux prévus par les articles 47 et 48 du règlement no 1782/2003
80 La République italienne soutient avoir correctement appliqué les articles 43 et 48 du règlement no 1782/2003 dans toutes les situations de transfert ou de succession des droits aux paiements d’un agriculteur à un autre, visées par la décision attaquée. Selon elle, ces droits aux paiements spéciaux ont été correctement calculés en maintenant séparés, d’une part, le montant de référence de l’activité d’élevage et, d’autre part, les droits aux paiements liés aux superficies. Le système de
redistribution de ces droits serait compatible avec la réglementation de l’Union dès lors qu’il respecte l’exigence de la traçabilité des droits au paiement.
81 La Commission conteste les arguments de la République italienne.
82 À titre liminaire, il convient d’observer que, au point 4.16 de la requête, la République italienne avance que la décision attaquée est illégale « en raison d’une violation des principes généraux de proportionnalité, de légalité, de sécurité juridique, de confiance légitime, ainsi que du devoir de motivation ». Il convient de constater que, s’agissant des principes et du devoir prétendument violés, la République italienne ne fait valoir aucune argumentation, même sommaire. En particulier, dans la
mesure où elle invoque une absence de motivation complète et appropriée de la décision attaquée sans indiquer les points à propos desquels la motivation ferait défaut et sans préciser les éléments de droit et de fait qui auraient nécessité des développements complémentaires, la requête ne satisfait pas aux exigences de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, de sorte que ces différents griefs doivent être déclarés irrecevables (voir, en ce sens, arrêt du 15 octobre 2008,
Mote/Parlement,T‑345/05, Rec, EU:T:2008:440, points 75 à 77).
83 Il s’ensuit qu’il y a lieu de considérer que, par le présent grief, la République italienne fait valoir essentiellement une violation des articles 47 et 48 du règlement no 1782/2003.
84 Il y a également lieu de considérer que l’appréciation du présent grief ne porte que sur le bien-fondé de l’interprétation de l’article 48 du règlement no 1782/2003 retenue par la Commission dans la décision attaquée, lue conjointement avec les pièces produites pendant la procédure administrative. En effet, ainsi qu’il ressort des échanges lors de l’audience, les parties s’opposent sur l’interprétation qu’il convient de faire de cette disposition.
85 La correction ponctuelle de 1860259,60 euros appliquée par la Commission dans la décision attaquée, en raison de la détermination et de l’attribution indues de droits aux paiements spéciaux, n’a pas fait l’objet d’une conciliation préalable et, partant, aucune explication n’est fournie à son sujet dans le rapport de synthèse. La carence reprochée à la République italienne fait l’objet d’explications dans les lettres de la Commission des 22 décembre 2010 et 13 décembre 2012 (voir points 12 et 14
ci-dessus). Elle concerne, d’une part, l’affectation des droits spéciaux en présence des droits découlant des ovins et des bovins et des superficies et, d’autre part, la répartition des droits spéciaux résultant du secteur oléicole, pour les années de demande 2006 à 2009. Dans ces lettres, la Commission reproche aux autorités italiennes d’avoir mal géré ces situations de cumul des droits à l’aide. Les situations visées par le présent grief y sont décrites comme suit :
— si un agriculteur avec des droits spéciaux attribués sur la base de la période de référence a reçu d’un autre agriculteur (par transfert ou par héritage) des hectares et les montants correspondants avant la première année de mise en œuvre du régime de paiement unique, la valeur de ses droits spéciaux n’a pas été répartie par les autorités italiennes entre les droits normaux (jusqu’à 5000 euros) ;
— si un agriculteur avec des droits normaux attribués sur la base de la période de référence a reçu des montants provenant de la prime bovine sans hectares correspondants d’un autre agriculteur (par transfert ou par héritage) avant la première année de mise en œuvre du régime de paiement unique, la valeur des droits spéciaux reçus n’a pas été affectée par les autorités italiennes à ses droits normaux (jusqu’à 5000 euros).
86 Selon la Commission, l’application correcte de l’article 48 du règlement no 1782/2003 exigeait d’affecter les droits spéciaux aux droits normaux jusqu’au plafond de 5000 euros par hectare et, ensuite, d’affecter le solde aux droits spéciaux. Elle a maintenu, tout au long de la procédure administrative, que les droits aux paiements additionnels (spéciaux) pour un montant inférieur à 5000 euros ne devaient pas être utilisés de façon autonome par rapport au paiement unique, mais être affectés aux
droits normaux aux fins de déterminer le droit au paiement par hectare, ce calcul consistant à diviser les paiements reçus pendant la période de référence par les hectares qui ont contribué à les générer comme si ces hectares avaient également contribué à générer les paiements additionnels (jusqu’au plafond de 5000 euros). En revanche, les autorités italiennes, en maintenant distincts les droits normaux et les droits spéciaux (sans aucune redistribution), auraient créé plus de droits spéciaux et,
en conséquence, auraient sous-calculé les droits normaux de référence.
87 Dans ses écritures, la République italienne reconnaît avoir divergé, dans sa pratique, de l’application des dispositions en cause, telle que retenue par la Commission. Elle soutient que « [l]es articles 43 et 48 ont été appliqués sur la fraction des montants de référence de chaque agriculteur cédant et sur l’agriculteur cessionnaire pour la fraction des montants résultant de l’activité agricole de ce dernier, en considérant que chacun avait droit à des paiements directs au cours de la période de
référence » et que « les autorités italiennes ont décidé de ne pas […] effectuer [une redistribution des droits aux paiements spéciaux] seulement dans les cas où la somme de tous les montants de référence […] aboutissait à un montant unitaire par hectare supérieur à 5000 euros ». Selon elle, cette application serait également conforme à l’article 48 du règlement no 1782/2003.
88 Il convient de relever que l’interprétation de l’article 48 du règlement no 1782/2003, qui établit les modalités d’application de la dérogation prévue par l’article 47 à la règle générale énoncée par l’article 43 du même règlement, est nécessairement d’interprétation stricte (voir, par analogie, arrêt du 13 décembre 2001, Heininger,C‑481/99, Rec, EU:C:2001:684, point 31 et jurisprudence citée).
89 À titre liminaire, il convient de rappeler l’objectif général poursuivi par le règlement no 1782/2003, à savoir la mise en œuvre du régime de paiement unique. Eu égard à une interprétation littérale de l’article 48 du règlement no 1782/2003, compte tenu des dispositions adjacentes, cette disposition s’applique à l’agriculteur qui a bénéficié de « paiements donnant naissance à des droits au paiement soumis à des conditions spéciales » visés à l’article 47 dudit règlement et qui, au cours de la
période de référence, « ne possédait pas d’hectares au sens de l’article 43 [du même règlement] » aux fins de la détermination des droits au paiement unique ou dont le montant du droit par hectare est supérieur à 5000 euros. Cet agriculteur, qui soit n’a pas d’hectares, soit possède des hectares dont le droit par hectare dépasse 5000 euros, a droit a) au paiement égal à son « montant de référence » (de base) correspondant aux paiements directs dont il a bénéficié au cours de la période moyenne de
trois ans et b) aux paiements « pour chaque tranche de 5000 euros ou fraction du montant de référence » (c’est-à-dire les paiements spéciaux) dont il a bénéficié au cours de la période moyenne de trois ans.
90 Il s’ensuit que les paiements spéciaux sont affectés au montant de référence par hectare jusqu’au montant de 5000 euros et, à partir de ce seuil, constituent un droit au paiement (spécial) de plus. À cet égard, l’article 47, premier paragraphe, du règlement no 1782/2003 prévoit que les montants qu’il énumère doivent être « intégrés au » montant de référence sous les conditions prévues par l’article 48 du même règlement. Il ressort également de l’article 47, deuxième paragraphe, du règlement
no 1782/2003 que, à partir de 2007, et par dérogation aux articles 33, 43 et 44 du même règlement, les montants provenant de la prime aux produits laitiers et des paiements supplémentaires (prévus aux articles 95 et 96 du règlement no 1782/2003) seront « inclus dans » le régime de paiement unique selon les conditions prévues aux articles 48 à 50. Ainsi, la législation pertinente établit le principe de cumul des paiements provenant des différents titres dans un paiement unique.
91 La République italienne soutient donc à tort qu’il découle de l’article 48 du règlement no 1782/2003 une obligation de maintenir séparés tous les paiements provenant des différents droits. Par ailleurs, le renvoi à l’article 49 dudit règlement, tel qu’effectué dans la requête, ne saurait davantage soutenir la thèse avancée par la République italienne. Cette disposition, intitulée « Conditions » et portant sur les droits aux paiements spéciaux, prévoit une dérogation à l’article 36, paragraphe 1,
et à l’article 44, paragraphe 1, du même règlement en ce qu’un agriculteur qui détient de tels droits au paiement pour lesquels il ne disposait pas d’hectares au cours de la période de référence est autorisé à déroger à l’obligation de fournir un nombre d’hectares admissibles équivalant au nombre de droits. Cette dérogation est soumise à la condition de maintenir au moins 50 % de l’activité agricole que l’agriculteur exerçait durant la période de référence, exprimée en unités de gros bétail. Il
convient de constater que cette disposition ne prévoit aucune méthode alternative de détermination des droits aux paiements spéciaux, ni aucune obligation de maintenir séparés les paiements provenant des différents droits. En effet, l’article 49, paragraphe 3, du règlement no 1782/2003 précise que « [l]es droits au paiement déterminés conformément à l’article 48 ne sont pas modifiés ».
92 Il convient également d’écarter l’argument, figurant au point 32 de la réplique, selon lequel les montants visés par l’article 48, premier alinéa, du règlement no 1782/2003 sont « ajoutés » au montant de référence. En effet, une comparaison des différentes versions linguistiques de l’article 47, paragraphe 1, de ce règlement, notamment des versions italienne, anglaise et allemande, confirme la signification des termes « intégrés au » (« sono inclusi » ; « included in » ; « in die Berechnung des
Referenzbetrags aufgenommen »). En tout état de cause, lors de l’audience, la République italienne a renoncé à cet argument.
93 S’agissant de l’allégation selon laquelle, d’une part, la méthode de détermination des droits utilisée par les autorités italiennes n’a pas entraîné de différences dans la valeur globale des droits au paiement attribués aux agriculteurs concernés et, d’autre part, en ce qui concerne les droits spéciaux, l’obligation de maintien des unités de gros bétail a été retenue conformément à l’article 49 du règlement no 1782/2003, elle ne saurait prospérer. Dès lors que ce règlement a prévu une méthode
spécifique de calcul des droits au paiement à ces fins et afin d’assurer la régularité des droits alloués dans tous les États membres, la République italienne était tenue de l’appliquer. Il résulte de l’analyse qui précède que l’article 48 du règlement no 1782/2003 présente un caractère obligatoire et ne prévoit aucune marge discrétionnaire pour l’État membre. Par conséquent, la République italienne ne peut prétendre que sa méthode alternative est aussi efficace, apte à prévenir les fraudes, ou
encore, plus favorable à l’agriculteur (voir, en ce sens, arrêts Espagne/Commission, point 44 supra, EU:C:2002:192, point 87 et jurisprudence citée, et du 28 mars 2007, Espagne/Commission,T‑220/04, EU:T:2007:97, point 89 et jurisprudence citée).
94 Il en va de même en ce qui concerne l’argument selon lequel l’action des autorités italiennes n’a provoqué aucun risque pour le Fonds. Force est de constater que la République italienne reste en défaut de produire un élément de preuve de nature à mettre en cause le calcul, par les services de la Commission, des montants exacts exposant le Fonds à un risque. En effet, il ressort, d’une part, du procès-verbal de la réunion bilatérale du 8 février 2011 et, d’autre part, de la lettre du 13 décembre
2012 que les autorités italiennes ont, sur la base d’une méthodologie approuvée par la Commission, « fourni le calcul indiquant le risque réel pour le Fonds découlant de l’application incorrecte des articles 43 et 48 du règlement no 1782/2003, correspondant au montant de 1813699,96 euros pour quatre ans ».
95 S’agissant de l’argument selon lequel la Commission n’a pas indiqué les effets concrets résultant de l’application incorrecte des articles 43 et 48 du règlement no 1782/2003 par les autorités italiennes, il doit également être écarté. À l’instar des considérations figurant au point 31 ci-dessus, il incombe à la Commission de présenter un élément de doute sérieux et non de démontrer que les risques ont été réalisés.
96 Eu égard aux considérations qui précèdent, et notamment à celles figurant aux points 89 et 90 ci-dessus, il convient de constater que l’interprétation de l’article 48 du règlement no 1782/2003 défendue par la République italienne est contraire tant à son libellé qu’à sa structure. Dans la mesure où l’ensemble de ses arguments ont été écartés, il y a lieu de rejeter le présent moyen soulevé par la République italienne, relatif à la correction ponctuelle portant sur la détermination et le paiement
des droits spéciaux, comme étant non fondé.
97 Partant, il convient de rejeter le recours dans son ensemble.
[omissis]
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) La République italienne est condamnée aux dépens.
Frimodt Nielsen
Dehousse
Collins
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 mai 2016.
Signatures
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
( *1 ) Langue de procédure : l’italien.
( 1 ) Ne sont reproduits que les points du présent arrêt dont le Tribunal estime la publication utile.