ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)
19Â juin 2025Â ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Politique d’immigration – Directive (UE) 2016/801 – Conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers à des fins d’études – Article 34, paragraphe 5 – Recours contre la décision rejetant la demande d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études – Droit fondamental à un recours juridictionnel effectif – Article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne »
Dans l’affaire C‑299/23 [Darvate e.a.] ( i ),
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le tribunal de première instance francophone de Bruxelles (Belgique), par décision du 10 mai 2023, parvenue à la Cour le 11 mai 2023, dans la procédure
Ordre des barreaux francophones et germanophone de Belgique,
Coordination et Initiatives pour et avec les Réfugiés et les Étrangers ASBL,
NX
contre
État belge,
LA COUR (dixième chambre),
composée de M. D. Gratsias, président de chambre, MM. E. Regan (rapporteur) et J. Passer, juges,
avocat général : M. J. Richard de la Tour,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour l’Ordre des barreaux francophones et germanophone de Belgique, Coordination et Initiatives pour et avec les Réfugiés et les Étrangers ASBL et NX, par Mes J. Hardy, C. Jadot et M. Kaiser, avocats,
– pour le gouvernement belge, par Mmes M. Jacobs, C. Pochet et M. Van Regemorter, en qualité d’agents, assistées de Me E. Derriks, avocate,
– pour la Commission européenne, par Mmes J. Hottiaux et A. Katsimerou, en qualité d’agents,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 5, paragraphe 3, et de l’article 34 de la directive (UE) 2016/801 du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2016, relative aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers à des fins de recherche, d’études, de formation, de volontariat et de programmes d’échange d’élèves ou de projets éducatifs et de travail au pair (JO 2016, L 132, p. 21), ainsi que du principe d’effectivité et des articles 7,
14 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la « Charte »).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Ordre des barreaux francophones et germanophone de Belgique, Coordination et Initiatives pour et avec les Réfugiés et les Étrangers ASBL, une association sans but lucratif, ainsi que NX à l’État belge au sujet de l’adoption de dispositions légales permettant d’assurer une voie de recours effective contre les décisions de refus de délivrance de visa à des fins d’études.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
3 L’article 5 de la directive 2016/801, intitulé « Principes », dispose, à ses paragraphes 1 et 3 :
« 1.   L’admission d’un ressortissant de pays tiers au titre de la présente directive est subordonnée à la vérification des documents justificatifs attestant que le ressortissant de pays tiers remplit :
a) les conditions générales fixées à l’article 7 ; et
b) les conditions particulières applicables définies à l’article 8, 11, 12, 13, 14 ou 16.
[...]
3.   S’il remplit les conditions générales et spécifiques, le ressortissant de pays tiers a droit à une autorisation.
Si un État membre délivre des titres de séjour uniquement sur son territoire et si toutes les conditions d’admission prévues par la présente directive sont remplies, l’État membre concerné doit délivrer le visa sollicité au ressortissant de pays tiers. »
4 L’article 7 de cette directive, intitulé « Conditions générales », prévoit, à son paragraphe 1 :
« En ce qui concerne l’admission d’un ressortissant de pays tiers dans le cadre de la présente directive, le demandeur doit :
a) présenter un document de voyage en cours de validité conformément au droit national et, si cela est exigé, une demande de visa ou un visa en cours de validité ou, le cas échéant, un titre de séjour en cours de validité ou un visa de long séjour en cours de validité ; les États membres peuvent exiger que la période de validité du document de voyage couvre au moins la durée du séjour envisagé ;
b) présenter, si le ressortissant de pays tiers est mineur au regard du droit national de l’État membre concerné, une autorisation parentale ou un document équivalent pour le séjour envisagé ;
c) produire la preuve que le ressortissant de pays tiers a souscrit ou, si le droit national le prévoit, qu’il a demandé à souscrire une assurance maladie pour tous les risques contre lesquels les ressortissants de l’État membre concerné sont normalement couverts ; l’assurance est valable pendant toute la durée du séjour envisagé ;
d) si l’État membre le demande, apporter la preuve du paiement des droits exigés pour le traitement de la demande prévus à l’article 36 ;
e) à la demande de l’État membre concerné, apporter la preuve que le ressortissant de pays tiers disposera au cours du séjour envisagé de ressources suffisantes pour couvrir ses frais de subsistance sans recourir au système d’aide sociale de l’État membre concerné, ainsi que ses frais de retour. L’évaluation de la suffisance des ressources est fondée sur un examen individuel du cas d’espèce et tient compte des ressources provenant, entre autres, d’une indemnité, d’une bourse, d’un contrat de
travail valable ou d’une offre d’emploi ferme ou d’une déclaration de prise en charge par un organisme participant à un programme d’échange d’élèves, une entité accueillant des stagiaires, un organisme participant à un programme de volontariat, une famille d’accueil ou un organisme servant d’intermédiaire pour les jeunes au pair. »
5 L’article 11 de ladite directive, intitulé « Conditions particulières applicables aux étudiants », énonce, à son paragraphe 1 :
« Outre les conditions générales énoncées à l’article 7, en ce qui concerne l’admission d’un ressortissant de pays tiers à des fins d’études, le demandeur apporte la preuve :
a) que le ressortissant de pays tiers a été admis dans un établissement d’enseignement supérieur pour y suivre un cycle d’études ;
b) si l’État membre le demande, que les droits d’inscription exigés par l’établissement d’enseignement supérieur ont été payés ;
c) si l’État membre le demande, que le ressortissant de pays tiers dispose d’une connaissance suffisante de la langue du programme d’études qu’il suivra ;
d) si l’État membre le demande, que le ressortissant de pays tiers disposera de ressources suffisantes pour couvrir ses frais d’études. »
6 L’article 34 de la directive 2016/801, intitulé « Garanties procédurales et transparence », dispose, à ses paragraphes 1, 3 et 5 :
« 1.   Les autorités compétentes de l’État membre concerné adoptent une décision statuant sur la demande d’autorisation ou de renouvellement d’une autorisation et notifient par écrit leur décision au demandeur, conformément aux procédures de notification prévues par le droit national, le plus rapidement possible, mais au plus tard dans un délai de 90 jours à compter de la date d’introduction de la demande complète.
[...]
3.   Si les informations ou les documents fournis à l’appui de la demande sont incomplets, les autorités compétentes précisent au demandeur, dans un délai raisonnable, quelles informations complémentaires sont requises et fixent un délai raisonnable pour la communication de celles-ci. Le délai visé au paragraphe 1 ou 2 est suspendu jusqu’à ce que les autorités compétentes aient reçu les informations complémentaires requises. Si les informations ou les documents complémentaires n’ont pas été
fournis dans les délais, la demande peut être rejetée.
[...]
5.   Toute décision déclarant irrecevable ou rejetant une demande ou toute décision de refus de renouvellement ou de retrait d’une autorisation est susceptible d’un recours dans l’État membre concerné, conformément au droit national. La notification écrite indique la juridiction ou l’autorité administrative auprès de laquelle le recours peut être introduit, ainsi que le délai dans lequel il doit être formé. »
Le droit belge
7 L’article 39/82 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers (Moniteur belge du 31 décembre 1980, p. 14584), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après la « loi du 15 décembre 1980 »), dispose :
« § 1er. Lorsqu’un acte d’une autorité administrative est susceptible d’annulation en vertu de l’article 39/2, le Conseil est seul compétent pour ordonner la suspension de son exécution.
La suspension est ordonnée, les parties entendues ou dûment convoquées, par décision motivée du président de la chambre saisie ou du juge au contentieux des étrangers qu’il désigne à cette fin.
En cas d’extrême urgence, la suspension peut être ordonnée à titre provisoire sans que les parties ou certaines d’entre elles aient été entendues.
[...]
§ 2. La suspension de l’exécution ne peut être ordonnée que si des moyens sérieux susceptibles de justifier l’annulation de l’acte contesté sont invoqués et à la condition que l’exécution immédiate de l’acte risque de causer un préjudice grave difficilement réparable. Cette dernière condition est entre autre remplie si un moyen sérieux a été invoqué sur la base des droits fondamentaux de l’homme, en particulier des droits auxquels aucune dérogation n’est possible en vertu de l’article 15,
alinéa 2, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales[, signée à Rome le 4 novembre 1950].
Les arrêts par lesquels la suspension a été ordonnée sont susceptibles d’être rapportés ou modifiés à la demande des parties.
§ 3. Sauf en cas d’extrême urgence, la demande de suspension et la requête en annulation doivent être introduits par un seul et même acte.
[...]
La demande comprend un exposé des moyens et des faits qui, selon le requérant, justifient que la suspension ou, le cas échéant, des mesures provisoires soient ordonnées.
[...]
§ 4. Le président de la chambre ou le Juge au contentieux des étrangers qu’il désigne statue dans les trente jours sur la demande de suspension. Si la suspension est ordonnée, il est statué sur la requête en annulation dans les quatre mois du prononcé de la décision juridictionnelle.
Lorsque l’étranger fait l’objet d’une mesure d’éloignement ou de refoulement dont l’exécution est imminente, en particulier lorsqu’il est maintenu dans un lieu déterminé visé aux articles 74/8 et 74/9 ou est mis à la disposition du gouvernement, il peut, s’il n’en a pas encore demandé la suspension par la voie ordinaire, demander la suspension de l’exécution en extrême urgence de cette mesure dans le délai visé à l’article 39/57, § 1er, alinéa 3.
Si la demande apparaît manifestement tardive, le président de la chambre saisie ou le juge au contentieux des étrangers qu’il désigne l’indique dans son ordonnance et convoque sans délai les parties à comparaître dans les vingt-quatre heures de la réception de la demande. Le président de la chambre ou le juge au contentieux des étrangers procède à un examen attentif et rigoureux de tous les éléments de preuve portés à sa connaissance, en particulier ceux qui sont de nature à indiquer qu’il existe
des motifs de croire que l’exécution de la décision attaquée exposerait le requérant au risque d’être soumis à la violation des droits fondamentaux de l’homme auxquels aucune dérogation n’est possible en vertu de l’article 15, alinéa 2, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui fait l’objet d’un contrôle attentif et rigoureux.
La demande en suspension en extrême urgence est examinée dans les quarante‑huit heures suivant sa réception par le président de la chambre ou par le juge au contentieux des étrangers. Ce délai est toutefois étendu à cinq jours suivant celui de la réception par le Conseil de cette demande, lorsque l’éloignement ou le refoulement effectif de l’étranger est prévu à une date ultérieure au délai de huit jours.
Si le président de la chambre ou le juge au contentieux des étrangers ne se prononce pas dans le délai, il doit en avertir le premier président ou le président. Celui-ci prend les mesures nécessaires pour qu’une décision soit rendue, selon le cas, soit, au plus tard septante-deux heures suivant la réception de la requête, soit, dans les meilleurs délais. Dans les deux cas, il peut notamment évoquer l’affaire et statuer lui-même.
Par dérogation aux alinéas qui précèdent, le président de la chambre saisie ou le juge au contentieux des étrangers qu’il désigne se prononce en priorité sur la recevabilité de la demande, au besoin sans convoquer les parties lorsque les conditions suivantes sont réunies :
1° il s’agit d’une deuxième mesure d’éloignement ou de refoulement, et
2° la demande est manifestement tardive, et
3° la demande est introduite moins de douze heures avant le moment prévu pour l’exécution de la mesure, et
4° le requérant et, le cas échéant, son avocat sont informés au moins quarante-huit heures avant le moment prévu pour l’exécution de la mesure.
S’il déclare la demande irrecevable, l’arrêt met fin à la procédure. S’il déclare la demande recevable, la procédure est poursuivie comme prévu aux alinéas 3 à  6.
[...] »
8 L’article 60 de la loi du 15 décembre 1980 énonce :
« § 1er. Le ressortissant d’un pays tiers souhaitant séjourner sur le territoire du Royaume en tant qu’étudiant doit introduire sa demande auprès du poste diplomatique ou consulaire compétent pour le lieu de sa résidence à l’étranger.
§ 2. Par dérogation au paragraphe 1er, le ressortissant d’un pays tiers qui est déjà admis ou autorisé à séjourner sur le territoire du Royaume pour une durée n’excédant pas nonante jours conformément au Titre I, Chapitre II, ou qui est déjà admis ou autorisé à séjourner sur le territoire du Royaume pendant plus de nonante jours en une autre qualité, peut introduire sa demande auprès de l’administration communale du lieu de sa résidence sur le territoire du Royaume s’il introduit la demande avant
l’expiration de la durée de validité de ce permis ou de cette autorisation, à condition qu’il soit déjà inscrit dans un établissement d’enseignement supérieur afin d’y suivre des études à temps plein.
§ 3. Le ressortissant d’un pays tiers joint à sa demande les documents suivants :
1° une copie de son passeport valable ou d’un document de voyage en tenant lieu ;
2° la preuve du paiement de la redevance, comme prévu à l’article 1/1, s’il est soumis à cette obligation ;
3° une attestation délivrée par un établissement d’enseignement supérieur prouvant :
a) qu’il est inscrit dans un établissement d’enseignement supérieur pour suivre des études supérieures ou une année préparatoire à temps plein, ou
b) qu’il est admis aux études, ou
c) qu’il est inscrit à un examen d’admission ou une épreuve d’admission ;
Le Roi fixe les conditions auxquelles cette attestation doit répondre.
4° s’il est âgé de moins de dix-huit ans, une preuve de l’autorisation de ses parents ou, le cas échéant, de la personne exerçant la tutelle ;
5° la preuve, conformément à l’article 61, qu’il disposera de moyens de subsistance suffisants pour la durée de son séjour, afin de ne pas devenir une charge pour le système d’aide sociale du Royaume au cours de son séjour ;
6° la preuve qu’il dispose ou disposera d’une assurance maladie couvrant l’ensemble des risques en Belgique pour la durée de son séjour ;
Si la demande a été introduite à l’étranger et qu’il n’est pas encore possible de joindre cette preuve à la demande, celle-ci doit être produite dans le délai prévu à l’article 61/1/1, § 4 ;
7° un certificat médical attestant qu’il n’est pas atteint d’une des maladies énumérées à l’annexe de la présente loi ;
8° s’il est âgé de plus de dix-huit ans, un extrait du casier judiciaire ou un document équivalent, délivré par le pays d’origine ou par le pays de sa dernière résidence, datant de moins de six mois, et attestant qu’il n’a pas été condamné pour des crimes ou des délits de droit commun.
En cas d’impossibilité dûment justifiée de produire les documents visés au 7° et 8°, le ministre ou son délégué peut toutefois, compte tenu des circonstances, autoriser l’étranger à séjourner sur le territoire du Royaume pour y faire des études.
[...] »
9 L’article 61/1/1, § ler, de cette loi dispose que le ministre ou son délégué prend une décision et la notifie au ressortissant d’un pays tiers dans un délai de 90 jours suivant la date de l’accusé de réception de la demande, visé à l’article 61/1, § ler.
10 L’article 61/1/3 de ladite loi prévoit les cas dans lesquels le ministre ou son délégué refuse ou peut refuser une demande. Notamment, ils doivent refuser cette demande si les conditions prévues à l’article 60 de la même loi ne sont pas remplies ou si le ressortissant d’un pays tiers est considéré comme constituant une menace pour l’ordre public, la sécurité nationale ou la santé publique. Par ailleurs, ils peuvent refuser une telle demande lorsque des preuves ou motifs sérieux et objectifs
permettent d’établir que le séjour poursuivrait d’autres finalités que les études. Si le ressortissant d’un pays tiers ne se trouve pas dans l’un des cas visés à cet article 61/1/3, l’autorisation de séjour doit être accordée.
Le litige au principal et les questions préjudicielles
11 Le 25 février 2021, le président d’AVOCATS.BE et celui de l’Orde van Vlaamse Balies (Ordre des barreaux flamands) ont adressé un courrier au secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration (Belgique) afin de l’interpeller sur la problématique de l’absence de recours effectif en faveur des ressortissants de pays tiers contre les décisions des autorités compétentes rejetant les demandes de visa de ces derniers à des fins d’études.
12 Ils lui ont, de nouveau, adressé un courrier le 16 août 2021, aux termes duquel ils ont invité l’État belge, et, au besoin, l’ont mis en demeure, de saisir sans délai le Parlement d’un projet de loi tendant à prévoir des recours devant être examinés dans le cadre d’une procédure d’urgence par le Conseil du contentieux des étrangers (Belgique) en ce qui concerne ces décisions.
13 Le secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration leur a répondu par courrier du 23 septembre 2021, lequel n’a pas permis de résoudre la question soulevée.
14 Le 16 juin 2022, les requérants au principal ont introduit un recours devant le tribunal de première instance francophone de Bruxelles (Belgique), qui est la juridiction de renvoi, visant à faire condamner l’État belge, sous astreinte, à adopter des mesures légales permettant aux ressortissants de pays tiers désireux de poursuivre leurs études en Belgique d’exercer un recours effectif contre les décisions rejetant leurs demandes de visa déposées à cette fin. La juridiction de renvoi indique que,
outre l’invocation d’un moyen tiré de la violation de l’article 47 de la Charte, ces requérants soutiennent que l’absence de recours effectif porte atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale ainsi qu’au droit à l’éducation, lesquels sont garantis, respectivement, aux articles 7 et 14 de la Charte.
15 Lesdits requérants allèguent que la mise en œuvre d’un tel recours constitue une mesure de réparation des conséquences dommageables de la carence fautive de l’État belge.
16 La juridiction de renvoi relève que, en raison des spécificités de la procédure applicable aux demandes de visa à des fins d’études, certains demandeurs ne reçoivent une décision qu’au cours d’une période allant du mois d’août au mois d’octobre de l’année au cours de laquelle ils souhaitent poursuivre leurs études en Belgique. En cas de rejet de la demande, la personne concernée ne pourrait donc saisir le Conseil du contentieux des étrangers que peu de temps avant le début de l’année académique
concernée.
17 Il ressort de la décision de renvoi que si cette juridiction peut être saisie d’un recours tendant à la suspension ou l’annulation de la décision de rejet, elle n’exerce qu’un contrôle de légalité et ne dispose pas d’un pouvoir de réformation, de sorte qu’elle ne peut ni substituer son appréciation à celles des autorités compétentes ni prendre une nouvelle décision à la place de celles-ci. Néanmoins, en cas d’annulation de cette décision, ces autorités seraient tenues par l’autorité de la chose
jugée s’attachant au dispositif de l’arrêt de ladite juridiction et aux motifs qui en constituent le soutien nécessaire.
18 Par ailleurs, la juridiction de renvoi souligne que, dès lors que le Conseil du contentieux des étrangers ne dispose pas du pouvoir d’ordonner des mesures provisoires, notamment, afin d’enjoindre aux autorités compétentes de prendre une nouvelle décision aux fins de la délivrance du visa à des fins d’études demandé, il se pourrait que l’année d’étude de la personne concernée soit irrémédiablement compromise du fait d’une absence de décision en temps utile.
19 En outre, cette juridiction indique, d’une part, que, en raison d’un arrêt de l’assemblée générale du Conseil du contentieux des étrangers du 24 juin 2020, la demande de suspension en extrême urgence prévue à l’article 39/82 de la loi du 15 décembre 1980 ne peut concerner qu’une mesure d’éloignement ou de refoulement dont l’exécution est imminente et, d’autre part, que les décisions des juridictions de référé saisies après cet arrêt n’ont pas offert de solutions satisfaisantes pour ce qui est des
décisions rejetant les demandes de visa à des fins d’études.
20 Les ressortissants de pays tiers, lorsqu’il n’est pas fait droit en temps utile à leur demande de visa à des fins d’études, disposeraient également d’une action visant à l’engagement de la responsabilité civile de l’État belge leur permettant une indemnisation pécuniaire. Toutefois, la perte d’une année d’étude présenterait un aspect irréversible ne pouvant être adéquatement réparée par l’existence d’un recours en indemnisation.
21 Dès lors, se poserait la question de savoir si le recours ouvert, en droit belge, à un ressortissant de pays tiers afin de contester la décision de rejet de sa demande de visa à des fins d’études et, ce faisant, de pouvoir bénéficier, le cas échéant, des droits qu’il tire de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2016/801 afin de poursuivre ses études en Belgique suffit à satisfaire les exigences qui découlent de l’article 34, paragraphe 5, de cette directive, lu en combinaison avec les
articles 7, 14 et 47 de la Charte ainsi que le principe d’effectivité.
22 Dans ces conditions, le tribunal de première instance francophone de Bruxelles a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« L’article 34 de la directive [2016/801], lu seul ou en combinaison avec les articles 7, 14[, paragraphe 1] et 47 de la [Charte] ainsi qu’avec le principe d’effectivité, et à la lumière de l’objectif poursuivi par [cette] directive de renforcer les garanties procédurales offertes aux ressortissants de pays tiers et [de favoriser] l’arrivée d’étudiants étrangers au sein de l’Union européenne, requiert-il :
[a]) qu’une possibilité de recours exceptionnelle soit offerte à l’étudiant étranger, menée dans les conditions de l’extrême urgence, lorsqu’il démontre qu’il a fait preuve de toute la diligence requise et que le respect des délais nécessaires pour mener une procédure ordinaire (en suspension/annulation) pourrait entraver le déroulement des études en question ?
Si la réponse à la question précédente est négative, la même réponse négative s’impose-t-elle lorsque l’absence de décision dans un délai rapproché risque de faire perdre irrémédiablement une année d’étude à la personne concernée ?
[b]) qu’une possibilité de recours exceptionnelle soit offerte à l’étudiant étranger, menée dans les conditions de l’extrême urgence, lorsqu’il démontre qu’il a fait preuve de toute la diligence requise et que le respect des délais nécessaires pour mener une procédure ordinaire (en suspension/annulation) pourrait entraver le déroulement des études en question, dans le cadre de laquelle, concomitamment à la suspension, il pourra solliciter que d’autres mesures provisoires soient ordonnées afin de
garantir l’effectivité du droit d’obtenir une autorisation s’il remplit les conditions générales et spécifiques, tel que garanti à l’[article 5, paragraphe 3, de ladite directive] ?
Si la réponse à la question précédente est négative, la même réponse négative s’impose-t-elle lorsque l’absence de décision dans un délai rapproché risque de faire perdre irrémédiablement une année d’étude à la personne concernée ?
[c]) que le recours organisé contre la décision de refus de visa permette au juge de substituer son appréciation à celle de l’autorité administrative et de réformer la décision de cette autorité, ou un contrôle de légalité permettant au juge de censurer une illégalité, notamment une erreur manifeste d’appréciation, en suspendant ou en annulant la décision administrative, est-il suffisant ? »
Sur les questions préjudicielles
23 Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 34, paragraphe 5, de la directive 2016/801, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il exige, pour ce qui est de l’action par laquelle un ressortissant de pays tiers, afin de se prévaloir des droits qu’il tire de l’article 5, paragraphe 3, de cette directive, entend contester la décision des autorités compétentes ayant rejeté sa demande
d’admission sur le territoire de l’État membre concerné à des fins d’études :
– qu’un recours exceptionnel examiné dans le cadre d’une procédure d’urgence soit offert à ce ressortissant, lorsque, bien qu’il ait fait preuve de la diligence requise, le nécessaire respect des délais afférents à la procédure ordinaire de contrôle de cette décision pourrait faire obstacle au déroulement de ses études ;
– que, dans le cadre d’un tel recours exceptionnel, la juridiction saisie dispose du pouvoir d’ordonner, le cas échéant, des mesures provisoires, notamment, afin d’enjoindre aux autorités compétentes de prendre une nouvelle décision aux fins de la délivrance de l’autorisation de séjour à des fins d’études demandée, et
– que la juridiction saisie d’un recours contre ladite décision dispose du pouvoir de substituer son appréciation à celle de ces autorités ou d’adopter une nouvelle décision.
24 À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 5, paragraphe 3, de la directive 2016/801, le ressortissant d’un pays tiers ayant introduit une demande d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études a droit à une autorisation de séjourner sur le territoire de cet État membre s’il remplit les conditions générales fixées à l’article 7 de cette directive et les conditions particulières applicables en fonction du type de demande introduite, en l’occurrence celles
prévues à l’article 11 de ladite directive pour les demandes d’admission à des fins d’études.
25 Il s’ensuit que, en application de cet article 5, paragraphe 3, les États membres sont tenus de délivrer un titre de séjour à des fins d’études au demandeur ayant satisfait aux exigences figurant aux articles 7 et 11 de la directive 2016/801 (arrêt du 29 juillet 2024, Perle, C‑14/23, EU:C:2024:647, point 35 et jurisprudence citée).
26 Aux termes de l’article 34, paragraphe 5, de cette directive, toute décision déclarant irrecevable ou rejetant une demande ou toute décision de refus de renouvellement ou de retrait d’une autorisation est susceptible d’un recours dans l’État membre concerné, conformément au droit national.
27 Il en ressort que, en cas de décision rejetant une demande d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études, cet article 34, paragraphe 5, confère expressément au ressortissant d’un pays tiers ayant introduit une telle demande la possibilité de former un recours conformément à la législation nationale de l’État membre qui a pris cette décision (arrêt du 29 juillet 2024, Perle, C‑14/23, EU:C:2024:647, point 61 et jurisprudence citée).
28 Il y a lieu donc d’observer que, en indiquant que le recours doit être formé conformément à la législation nationale de l’État membre concerné, le législateur de l’Union a laissé aux États membres le soin de décider de la nature et des modalités concrètes des voies de recours dont disposent les demandeurs de visa à des fins d’études relevant de la directive 2016/801 (voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 2021, Konsul Rzeczypospolitej Polskiej w N., C‑949/19, EU:C:2021:186, point 42).
29 Toutefois, la nature et les modalités concrètes de la procédure de recours visée à l’article 34, paragraphe 5, de la directive 2016/801 doivent être déterminées en conformité avec l’article 47 de la Charte (voir, en ce sens, arrêt du 29 juillet 2024, Perle, C‑14/23, EU:C:2024:647, point 62 et jurisprudence citée).
30 En effet, bien qu’il appartienne, en l’absence de réglementation de l’Union en la matière, à l’ordre juridique interne de chaque État membre de désigner les juridictions compétentes et de régler les modalités procédurales des recours destinés à assurer la sauvegarde des droits individuels dérivés de l’ordre juridique de l’Union, les États membres ont la responsabilité d’assurer, dans chaque cas, le respect du droit à une protection juridictionnelle effective desdits droits tel que garanti Ã
l’article 47 de la Charte (arrêt du 14 mai 2020, Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság Dél-alföldi Regionális Igazgatóság, C‑924/19 PPU et C‑925/19 PPU, EU:C:2020:367, point 142 ainsi que jurisprudence citée).
31 En outre, il convient de rappeler que la Cour a jugé que le droit à un recours effectif, consacré à l’article 47 de la Charte, serait illusoire si l’ordre juridique d’un État membre permettait qu’une décision judiciaire définitive et obligatoire reste inopérante au détriment d’une partie. Cela est tout particulièrement vrai lorsque l’obtention du bénéfice effectif des droits découlant du droit de l’Union, tels que reconnus par une décision juridictionnelle, implique le respect d’impératifs de
temps (arrêt du 29 juillet 2024, Perle, C‑14/23, EU:C:2024:647, point 63 et jurisprudence citée).
32 À cet égard, dans le cadre de la présente affaire, la juridiction de renvoi s’interroge sur le moment utile de la délivrance du visa à des fins d’études demandé et, conséquemment, de la décision statuant sur le recours introduit contre le refus d’un tel visa, afin que le ressortissant de pays tiers concerné ait la possibilité, le cas échéant, de bénéficier des droits qu’il tire de la directive 2016/801.
33 Dans ce contexte, premièrement, s’agissant de l’instauration d’un recours exceptionnel devant être examiné dans le cadre d’une procédure d’urgence, il importe de souligner que, selon une jurisprudence constante, le droit de l’Union, en ce compris les dispositions de la Charte, n’a pas pour effet de contraindre les États membres à instituer des voies de droit autres que celles établies par le droit interne, à moins, toutefois, qu’il ne ressorte de l’économie de l’ordre juridique national en cause
qu’il n’existe aucune voie de recours juridictionnelle permettant, fût-ce de manière incidente, d’assurer le respect des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2023, Rayonna prokuratura Lovech, teritorialno otdelenie Lukovit (Fouille corporelle), C‑209/22, EU:C:2023:634, point 54 et jurisprudence citée].
34 Dès lors, l’article 34, paragraphe 5, de la directive 2016/801, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte, n’exige pas l’instauration d’un recours exceptionnel devant être examiné dans le cadre d’une procédure d’urgence.
35 Toutefois, il doit être veillé à ce que les conditions dans lesquelles est exercé le recours contre une décision des autorités compétentes rejetant une demande d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études et, le cas échéant, le jugement adopté à l’issue de celui-ci est exécuté soient telles qu’elles permettent, en principe, l’adoption d’une nouvelle décision dans un bref délai, de telle manière que le ressortissant de pays tiers suffisamment diligent puisse bénéficier de la
pleine effectivité des droits qu’il tire de cette directive (voir, en ce sens, arrêt du 29 juillet 2024, Perle, C‑14/23, EU:C:2024:647, point 66).
36 Deuxièmement, pour ce qui est de l’instauration de la possibilité pour la juridiction saisie d’enjoindre aux autorités compétentes de prendre une nouvelle décision aux fins de la délivrance de l’autorisation de séjour demandée et, troisièmement, s’agissant de la faculté éventuelle pour une telle juridiction de substituer son appréciation à celle desdites autorités ou d’adopter une nouvelle décision, il y a lieu de relever que ces interrogations de la juridiction de renvoi ont trait aux pouvoirs
que les juridictions saisies d’actions visant à contester le rejet de demandes d’admission sont susceptibles d’exercer.
37 À cet égard, il convient de rappeler que, lorsque est en cause une décision administrative nationale qui, afin d’assurer le respect du bénéfice effectif des droits de l’intéressé découlant du droit de l’Union, en l’occurrence ceux qu’il tire de la satisfaction des exigences prévues à l’article 5, paragraphe 3, de cette directive, doit impérativement être adoptée avec célérité, il ressort de la nécessité, découlant de l’article 47 de la Charte, d’assurer l’effectivité du recours introduit contre
la décision administrative initiale rejetant la demande de celui-ci, que chaque État membre doit aménager son droit national de telle manière que, en cas d’annulation de celle-ci, une nouvelle décision soit adoptée dans un bref délai et soit conforme à l’appréciation contenue dans le jugement ayant prononcé l’annulation (voir, en ce sens, arrêt du 29 juillet 2024, Perle, C‑14/23, EU:C:2024:647, point 64 et jurisprudence citée).
38 Ainsi, à la lumière des considérations figurant aux points 29 à  31 du présent arrêt, la Cour a jugé que, pour ce qui est des demandes d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études, le fait que la juridiction saisie est compétente pour statuer seulement en annulation sur la décision des autorités compétentes rejetant une telle demande suffit, en principe, à satisfaire les exigences de l’article 34, paragraphe 5, de ladite directive, lu à la lumière de l’article 47 de la
Charte, sans qu’il soit exigé que cette juridiction puisse substituer son appréciation à celle de ces autorités ou adopter une nouvelle décision, à condition que, le cas échéant, lesdites autorités soient liées par l’appréciation contenue dans le jugement qui prononcerait l’annulation de cette décision (voir, en ce sens, arrêt du 29 juillet 2024, Perle, C‑14/23, EU:C:2024:647, point 65).
39 Outre les considérations exposées au point 34 du présent arrêt, une telle appréciation est également valable, dans le cas où la juridiction statuant au titre d’un recours exceptionnel examiné dans le cadre d’une procédure d’urgence ne disposerait pas du pouvoir d’ordonner des mesures provisoires, notamment, afin d’enjoindre aux autorités compétentes de prendre une nouvelle décision aux fins de la délivrance de l’autorisation de séjour à des fins d’études demandée.
40 Toutefois, ainsi qu’il a été rappelé au point 35 du présent arrêt, la Cour a précisé que, dans le cas où la juridiction saisie dispose uniquement d’un pouvoir d’annulation, il doit être veillé à ce que les conditions dans lesquelles le recours dont elle est saisie est exercé et, le cas échéant, le jugement adopté à l’issue de celui-ci est exécuté soient telles qu’elles permettent, en principe, l’adoption d’une nouvelle décision dans un bref délai, de telle manière que le ressortissant de pays
tiers suffisamment diligent puisse bénéficier de la pleine effectivité des droits qu’il tire de la directive 2016/801.
41 Cela étant, il ressort de la décision de renvoi que certains ressortissants de pays tiers ne reçoivent une décision quant à leur demande d’admission sur le territoire belge à des fins d’études que peu de temps avant le début de l’année académique qu’ils souhaitent suivre en Belgique. Ainsi, il convient de constater que la possibilité pour les autorités compétentes, à la suite de l’annulation de cette décision initiale, de prendre une nouvelle décision dans un bref délai, de telle manière que le
ressortissant de pays tiers suffisamment diligent puisse bénéficier de la pleine effectivité des droits qu’il tire de la directive 2016/801, dépend également des conditions relatives à l’adoption de ladite décision initiale.
42 À cet égard, en vertu de l’article 34, paragraphe 1, de cette directive, les autorités compétentes de l’État membre concerné doivent adopter une décision sur la demande d’admission sur le territoire de cet État membre à des fins d’études le plus rapidement possible, mais au plus tard dans un délai de 90 jours à compter de la date d’introduction de la demande complète. Par ailleurs, conformément au paragraphe 3 de cet article 34, si les informations ou les documents fournis à l’appui de la demande
sont incomplets, les autorités compétentes précisent au demandeur, dans un délai raisonnable, quelles informations complémentaires sont requises et fixent un délai raisonnable pour la communication de celles‑ci, ce qui a pour effet de suspendre le délai prévu au paragraphe 1 dudit article 34 jusqu’à ce que les autorités compétentes aient reçu les informations complémentaires.
43 Ainsi qu’il a été rappelé aux points 24 et 25 du présent arrêt, le bénéfice des droits tirés de l’article 5, paragraphe 3, de ladite directive, en l’occurrence l’autorisation de séjourner sur le territoire d’un État membre à des fins d’études, requiert que le ressortissant de pays tiers concerné ait satisfait aux conditions générales fixées à l’article 7 de la directive 2016/801 et aux conditions particulières applicables aux étudiants, prévues à l’article 11 de cette directive pour les demandes
d’admission à des fins d’études, ces dernières conditions incluant, notamment, le fait que ce ressortissant a été admis dans un établissement d’enseignement supérieur pour y suivre un cycle d’études.
44 Dans ce contexte, l’adoption par les autorités compétentes, dans le respect du délai prévu à l’article 34, paragraphe 1, de la directive 2016/801, d’une décision sur les demandes d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études permet, en principe, de garantir l’effectivité des droits que ces ressortissants tirent de ladite directive, pour autant que le déroulement de la procédure d’examen des demandes d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études par les
autorités compétentes n’aboutisse pas, en pratique, à priver systématiquement les ressortissants de pays tiers dont la demande est rejetée de la possibilité de bénéficier, le cas échéant, de la pleine effectivité de ces droits, en raison de la date à laquelle sont adoptées les décisions relatives auxdites demandes et eu égard aux délais incompressibles d’une éventuelle procédure de recours contre ces décisions.
45 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions préjudicielles que l’article 34, paragraphe 5, de la directive 2016/801, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il n’exige pas, pour ce qui est de l’action par laquelle un ressortissant de pays tiers, afin de se prévaloir des droits qu’il tire de l’article 5, paragraphe 3, de cette directive, entend contester la décision des autorités compétentes ayant rejeté sa
demande d’admission sur le territoire de l’État membre concerné à des fins d’études :
– qu’un recours exceptionnel examiné dans le cadre d’une procédure d’urgence soit offert à ce ressortissant, lorsque, bien qu’il ait fait preuve de la diligence requise, le nécessaire respect des délais afférents à la procédure ordinaire de contrôle de cette décision pourrait faire obstacle au déroulement de ses études ;
– que, dans le cadre d’un tel recours exceptionnel, la juridiction saisie dispose du pouvoir d’ordonner, le cas échéant, des mesures provisoires, notamment, afin d’enjoindre aux autorités compétentes de prendre une nouvelle décision aux fins de la délivrance de l’autorisation de séjour à des fins d’études demandée, ou
– que la juridiction saisie d’un recours contre ladite décision dispose du pouvoir de substituer son appréciation à celle de ces autorités ou d’adopter une nouvelle décision.
46 Les conditions dans lesquelles le recours contre une décision des autorités compétentes rejetant une demande d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études est exercé et, le cas échéant, le jugement adopté à l’issue de celui-ci est exécuté doivent, toutefois, être de nature à permettre l’adoption d’une nouvelle décision dans un bref délai, conforme à l’appréciation contenue dans le jugement ayant prononcé l’annulation, de telle manière que le ressortissant d’un pays tiers
suffisamment diligent soit en mesure de bénéficier de la pleine effectivité des droits qu’il tire de ladite directive.
Sur les dépens
47 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
 Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) dit pour droit :
 L’article 34, paragraphe 5, de la directive (UE) 2016/801 du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2016, relative aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers à des fins de recherche, d’études, de formation, de volontariat et de programmes d’échange d’élèves ou de projets éducatifs et de travail au pair, lu à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne,
 doit être interprété en ce sens que :
 il n’exige pas, pour ce qui est de l’action par laquelle un ressortissant de pays tiers, afin de se prévaloir des droits qu’il tire de l’article 5, paragraphe 3, de cette directive, entend contester la décision des autorités compétentes ayant rejeté sa demande d’admission sur le territoire de l’État membre concerné à des fins d’études :
– qu’un recours exceptionnel examiné dans le cadre d’une procédure d’urgence soit offert à ce ressortissant, lorsque, bien qu’il ait fait preuve de la diligence requise, le nécessaire respect des délais afférents à la procédure ordinaire de contrôle de cette décision pourrait faire obstacle au déroulement de ses études ;
 – que, dans le cadre d’un tel recours exceptionnel, la juridiction saisie dispose du pouvoir d’ordonner, le cas échéant, des mesures provisoires, notamment, afin d’enjoindre aux autorités compétentes de prendre une nouvelle décision aux fins de la délivrance de l’autorisation de séjour à des fins d’études demandée, ou
– que la juridiction saisie d’un recours contre ladite décision dispose du pouvoir de substituer son appréciation à celle de ces autorités ou d’adopter une nouvelle décision.
 Les conditions dans lesquelles le recours contre une décision des autorités compétentes rejetant une demande d’admission sur le territoire d’un État membre à des fins d’études est exercé et, le cas échéant, le jugement adopté à l’issue de celui-ci est exécuté doivent, toutefois, être de nature à permettre l’adoption d’une nouvelle décision dans un bref délai, conforme à l’appréciation contenue dans le jugement ayant prononcé l’annulation, de telle manière que le ressortissant d’un pays tiers
suffisamment diligent soit en mesure de bénéficier de la pleine effectivité des droits qu’il tire de ladite directive.
 Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : le français.
( i ) Le nom de la présente affaire est un nom fictif. Il ne correspond au nom réel d’aucune partie à la procédure.