ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
21 septembre 2023 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Union douanière – Règlement (UE) no 952/2013 – Code des douanes de l’Union – Articles 70 et 74 – Détermination de la valeur en douane – Valeur en douane de fruits et légumes auxquels s’applique un prix d’entrée – Règlement (UE) no 1308/2013 – Article 181 – Règlement délégué (UE) 2017/891 – Article 75, paragraphes 5 et 6 – Valeur transactionnelle déclarée supérieure à la valeur forfaitaire à l’importation – Écoulement des produits dans des conditions confirmant la réalité de la
valeur transactionnelle – Vente à perte par l’importateur – Liens entre l’importateur et l’exportateur – Contrôle juridictionnel de la décision fixant la dette douanière »
Dans l’affaire C‑770/21,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Administrativen sad Sofia-grad (tribunal administratif de la ville de Sofia, Bulgarie), par ordonnance du 23 novembre 2021, parvenue à la Cour le 13 décembre 2021, dans la procédure
OGL-Food Trade Lebensmittelvertrieb GmbH
contre
Direktor na Teritorialna direktsia « Mitnitsa Plovdiv » pri Agentsia « Mitnitsi »,
LA COUR (cinquième chambre),
composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. D. Gratsias (rapporteur), M. Ilešič, I. Jarukaitis et Z. Csehi, juges,
avocat général : M. J. Richard de la Tour,
greffier : Mme R. Stefanova-Kamisheva, administratrice,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 janvier 2023,
considérant les observations présentées :
– pour OGL-Food Trade Lebensmittelvertrieb GmbH, par Me G. Goranov, advokat, et Me C. Salder, Rechtsanwalt,
– pour le Direktor na Teritorialna direktsia « Mitnitsa Plovdiv » pri Agentsia « Mitnitsi », par Mmes E. Dimitrova, E. Harizanova, N. Kancheva et S. Kirilova,
– pour le gouvernement bulgare, par Mmes M. Georgieva, T. Mitova et E. Petranova, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par Mmes F. Clotuche-Duvieusart, D. Drambozova, M. Morales Puerta et F. Moro, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 20 avril 2023,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation :
– des articles 22, 44, 70 et 74 du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union (JO 2013, L 269, p. 1) (ci-après le « code des douanes de l’Union ») ;
– des articles 127 et 142 du règlement d’exécution (UE) 2015/2447 de la Commission, du 24 novembre 2015, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement no 952/2013 (JO 2015, L 343, p. 558) (ci-après le « règlement d’exécution du code des douanes de l’Union ») ;
– de l’article 75 du règlement délégué (UE) 2017/891 de la Commission, du 13 mars 2017, complétant le règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les secteurs des fruits et légumes et des produits transformés à base de fruits et légumes ainsi que le règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les sanctions à appliquer dans ces secteurs et modifiant le règlement d’exécution (UE) no 543/2011 de la Commission (JO 2017,
L 138, p. 4).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant OGL-Food Trade Lebensmittelvertrieb GmbH (ci-après « OGL-Food ») au Direktor na Teritorialna direktsia « Mitnitsa Plovdiv » pri Agentsia « Mitnitsi » (directeur de la direction territoriale « douanes de Plovdiv » de l’agence « douanes », Bulgarie, ci-après le « directeur des douanes ») au sujet de la valeur transactionnelle déclarée pour l’importation de courgettes à l’état frais originaires de Turquie.
Le cadre juridique
La législation douanière
Le code des douanes de l’Union
3 Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union :
« Le présent règlement établit le code des douanes de l’Union [...] fixant les règles et procédures générales applicables aux marchandises entrant dans le territoire douanier de l’Union ou en sortant.
Sans préjudice des conventions et de la législation internationales ainsi que de la législation de l’Union régissant d’autres domaines, [ce] code s’applique de façon uniforme dans l’ensemble du territoire douanier de l’Union. »
4 L’article 5 de ce code, intitulé « Définitions », prévoit :
« Aux fins du code [des douanes de l’Union], on entend par :
1) “autorités douanières” : les administrations douanières des États membres chargées de l’application de la législation douanière et toute autre autorité habilitée en droit national à appliquer certaines dispositions douanières ;
[...]
3) “contrôles douaniers” : les actes spécifiques accomplis par les autorités douanières pour garantir la conformité avec la législation douanière et les autres dispositions régissant l’entrée, la sortie, le transit, la circulation, le stockage et la destination particulière de marchandises circulant entre le territoire douanier de l’Union et les pays ou les territoires situés en dehors de ce dernier, et la présence et la circulation sur le territoire douanier de l’Union de marchandises non Union
et de marchandises placées sous le régime de la destination particulière ;
[...] »
5 L’article 22 dudit code, intitulé « Décisions arrêtées à la suite d’une demande », dispose, à ses paragraphes 6 et 7 :
« 6. Avant de prendre une décision susceptible d’avoir des conséquences défavorables pour le demandeur, les autorités douanières informent le demandeur des motifs sur lesquels elles comptent fonder leur décision, lequel a la possibilité d’exprimer son point de vue dans un délai déterminé à compter de la date à laquelle il reçoit ou à laquelle il est réputé avoir reçu cette communication desdits motifs. À la suite de l’expiration de ce délai, le demandeur est informé, dans la forme appropriée, de
la décision.
[...]
7. Une décision qui a des conséquences défavorables pour le demandeur expose les raisons qui la motivent et mentionne le droit de recours prévu à l’article 44. »
6 L’article 44 du code des douanes de l’Union, intitulé « Droit de recours », est libellé comme suit :
« 1. Toute personne a le droit d’exercer un recours contre les décisions relatives à l’application de la législation douanière prises par les autorités douanières et qui la concernent directement et individuellement.
[...]
2. Le droit de recours peut être exercé au minimum en deux temps :
a) dans un premier temps, devant les autorités douanières ou une autorité judiciaire ou un autre organisme désigné à cet effet par les États membres ;
b) dans un second temps, devant une instance supérieure indépendante qui peut être une autorité judiciaire ou un organisme spécialisé équivalent, conformément aux dispositions en vigueur dans les États membres.
[...] »
7 L’article 46 du code des douanes de l’Union, intitulé « Gestion des risques et contrôles douaniers », dispose, à son paragraphe 1 :
« Les autorités douanières peuvent exercer tout contrôle douanier qu’elles estiment [nécessaire].
Les contrôles douaniers peuvent notamment consister à vérifier les marchandises, prélever des échantillons, contrôler l’exactitude et le caractère complet des informations fournies dans une déclaration ou une notification ainsi que l’existence, l’authenticité, l’exactitude et la validité de documents, examiner la comptabilité des opérateurs économiques et d’autres écritures, contrôler les moyens de transport et inspecter les bagages et autres marchandises transportés par ou sur des personnes ainsi
que mener des enquêtes officielles et procéder à d’autres actes similaires. »
8 Aux termes de l’article 70 de ce code, intitulé « Détermination de la valeur en douane sur la base de la valeur transactionnelle » :
« 1. La base première pour la détermination de la valeur en douane des marchandises est la valeur transactionnelle, c’est-à-dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union, après ajustement, le cas échéant.
2. Le prix effectivement payé ou à payer est le paiement total effectué ou à effectuer par l’acheteur au vendeur ou par l’acheteur à une tierce partie au bénéfice du vendeur, pour les marchandises importées et comprend tous les paiements effectués ou à effectuer comme condition de la vente des marchandises importées.
3. La valeur transactionnelle s’applique à condition que l’ensemble des conditions suivantes soient remplies :
[...]
d) que l’acheteur et le vendeur ne soient pas liés ou que les liens n’aient pas influencé le prix. »
9 L’article 74 dudit code, intitulé « Méthodes secondaires de détermination de la valeur en douane », prévoit :
« 1. Lorsque la valeur en douane des marchandises ne peut être déterminée par application de l’article 70, il y a lieu de passer successivement du point a) au point d) du paragraphe 2 jusqu’au premier de ces points qui permettra de la déterminer.
[...]
2. La valeur en douane déterminée par application du paragraphe 1 est :
[...]
c) la valeur fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes sur le territoire douanier de l’Union des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, ainsi faites à des personnes non liées aux vendeurs ; [...]
[...] »
Le règlement d’exécution du code des douanes de l’Union
10 Sous le titre II du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union, relatif aux « [é]léments sur la base desquels les droits à l’importation ou à l’exportation et d’autres mesures sont appliqués dans le cadre des échanges de marchandises », figure le chapitre 3 de ce règlement d’exécution, intitulé « Valeur en douane des marchandises ». Au sein de ce chapitre 3, l’article 127 dudit règlement d’exécution, intitulé « Dispositions générales » et relatif à l’article 70, paragraphe 3, sous d),
du code des douanes de l’Union, est libellé comme suit :
« 1. Aux fins du présent chapitre, deux personnes sont réputées liées si l’une des conditions suivantes est remplie :
[...]
b) elles ont juridiquement la qualité d’associés ;
[...] »
11 L’article 134 du même règlement d’exécution, intitulé « Transactions entre personnes liées » et relatif à l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, dispose :
« 1. Lorsque l’acheteur et le vendeur sont liés, pour déterminer si ces liens n’ont pas influencé le prix, les circonstances de la vente sont examinées, le cas échéant, et le déclarant a la possibilité de fournir tous autres renseignements détaillés concernant ces circonstances qui pourraient être nécessaires.
2. Il convient toutefois d’évaluer les marchandises conformément à l’article 70, paragraphe 1, du code [des douanes de l’Union], lorsque le déclarant démontre que la valeur transactionnelle déclarée est très proche de l’une des valeurs de référence définies ci-après, déterminée au même moment ou à peu près au même moment :
[...]
b) la valeur en douane de marchandises identiques ou similaires, déterminée conformément à l’article 74, paragraphe 2, point c), du code [des douanes de l’Union] ;
[...] »
12 L’article 142 du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union, intitulé « Méthode déductive », portant modalités d’application de l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union, prévoit :
« 1. Le prix unitaire utilisé pour déterminer la valeur en douane conformément à l’article 74, paragraphe 2, point c), du code [des douanes de l’Union] est le prix auquel les marchandises importées ou les marchandises identiques ou similaires importées sont vendues dans l’Union en l’état au moment ou à peu près au moment de l’importation des marchandises à évaluer.
[...]
4. Les ventes suivantes ne sont pas prises en considération aux fins de la détermination de la valeur en douane conformément à l’article 74, paragraphe 2, point c), du code [des douanes de l’Union] :
[...]
b) les ventes à des personnes liées ;
[...] »
La législation relative à l’importation de fruits et légumes auxquels s’applique un prix d’entrée
Le règlement (UE) no 1308/2013
13 L’article 181 du règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) no 922/72, (CEE) no 234/79, (CE) no 1037/2001 et (CE) no 1234/2007 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 671), intitulé « Système des prix d’entrée pour certains produits des secteurs des fruits et des légumes, des fruits et des légumes transformés et du secteur vitivinicole », dispose :
« 1. Aux fins de l’application des droits du tarif douanier commun pour les produits des secteurs des fruits et des légumes, des fruits et des légumes transformés et des moûts de raisins et jus de raisins, le prix d’entrée d’un lot est égal à sa valeur douanière calculée conformément au [code des douanes de l’Union] et au [règlement d’exécution du code des douanes de l’Union].
2. Afin d’assurer l’efficacité du système, la Commission est habilitée à adopter des actes délégués en conformité avec l’article 227 afin de prévoir que la réalité du prix d’entrée déclaré d’un lot doit être vérifiée à l’aide d’une valeur forfaitaire à l’importation et de fixer les conditions dans lesquelles la constitution d’une garantie est requise.
3. La Commission adopte des actes d’exécution établissant des règles applicables au calcul de la valeur forfaitaire à l’importation visée au paragraphe 2. Ces actes d’exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d’examen visée à l’article 229, paragraphe 2. »
Le règlement délégué 2017/891
14 Le règlement délégué 2017/891, qui a été adopté sur le fondement notamment de l’article 181, paragraphe 2, du règlement no 1308/2013, comporte un titre III, intitulé « Échanges avec les pays tiers – Système des prix d’entrée », qui comporte les articles 73 à 75.
15 L’article 73 de ce règlement délégué dispose :
« Aux fins du présent [titre], on entend par :
a) “lot” : les marchandises présentées sous le couvert d’une déclaration de mise en libre pratique ne couvrant que les marchandises relevant d’une même origine et d’un seul code de la nomenclature combinée ; [...]
[...] »
16 L’article 74 dudit règlement délégué, intitulé « Notification des prix et quantités des produits importés », prévoit, à son paragraphe 1 :
« Pour chacun des produits et pendant les périodes indiqués à l’annexe VII, partie A, pour chaque jour de marché et pour chaque origine, les États membres notifient à la Commission, au plus tard à 12 heures (heure de Bruxelles) le premier jour ouvrable qui suit :
a) les prix moyens représentatifs des produits importés des pays tiers et commercialisés sur les marchés d’importation des États membres ; et
b) les quantités totales correspondant aux prix visés au point a).
Aux fins du premier alinéa, point a), les États membres communiquent à la Commission les marchés d’importation qu’ils considèrent comme représentatifs et qui incluent Londres, Milan, Perpignan et Rungis.
Lorsque les quantités totales visées au premier alinéa, point b), sont inférieures à dix tonnes, les prix correspondants ne sont pas notifiés à la Commission. »
17 Aux termes de l’article 75 du même règlement délégué, intitulé « Base des prix d’entrée » :
« 1. Aux fins de l’article 181, paragraphe 1, du règlement [no 1308/2013], les produits des secteurs des fruits et légumes et des fruits et légumes transformés visés dans cet article sont ceux figurant à l’annexe VII du présent règlement.
2. Lorsque la valeur en douane des produits énumérés à l’annexe VII, partie A, est déterminée conformément à la valeur transactionnelle visée à l’article 70 du [code des douanes de l’Union] et que la valeur en douane dépasse de plus de 8 % le montant forfaitaire calculé par la Commission comme valeur forfaitaire à l’importation au moment de la déclaration de mise en libre pratique des produits, l’importateur doit fournir une garantie conformément à l’article 148 du règlement d’exécution [du
code des douanes de l’Union]. À cet effet, le montant des droits à l’importation dont les produits énumérés à l’annexe VII, partie A, du présent règlement peuvent en définitive être passibles est le montant des droits qui aurait été payé si le classement avait été effectué sur la base de la valeur forfaitaire à l’importation concernée.
[...]
3. Lorsque la valeur en douane des produits énumérés à l’annexe VII, partie A, est calculée conformément aux dispositions de l’article 74, paragraphe 2, point c), du [code des douanes de l’Union], la déduction des droits se fait dans les conditions prévues à l’article 38, paragraphe 1, du règlement d’exécution (UE) 2017/892 [de la Commission, du 13 mars 2017, portant modalités d’application du règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le secteur des
fruits et légumes et des fruits et légumes transformés (JO 2017, L 138, p. 57)]. Dès lors, l’importateur fournit une garantie égale au montant des droits qu’il aurait payés si le classement des produits avait été effectué sur la base de la valeur forfaitaire à l’importation applicable.
4. La valeur en douane des marchandises importées en consignation est directement déterminée conformément aux dispositions de l’article 74, paragraphe 2, point c), du [code des douanes de l’Union] et, à cet effet, la valeur forfaitaire à l’importation calculée conformément à l’article 38 du règlement d’exécution (UE) 2017/892 s’applique au cours des périodes en vigueur.
5. L’importateur dispose d’un délai d’un mois à compter de la vente des produits concernés, dans la limite d’un délai de quatre mois suivant la date d’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique, soit pour prouver que le lot a été écoulé dans des conditions telles qu’elles confirment la réalité des prix visés à l’article 70 du [code des douanes de l’Union], soit pour déterminer la valeur en douane visée à l’article 74, paragraphe 2, point c), dudit [code].
Le non-respect de l’un de ces délais entraîne la perte de la garantie fournie, sans préjudice de l’application du paragraphe 6.
La garantie fournie est libérée dans la mesure où les preuves relatives aux conditions d’écoulement sont apportées à la satisfaction des autorités douanières. Dans le cas contraire, la garantie reste acquise, en paiement des droits à l’importation.
Afin de prouver que le lot a été écoulé dans les conditions prévues au premier alinéa, l’importateur met à disposition, en plus de la facture, tous les documents nécessaires à l’exécution des contrôles douaniers requis en ce qui concerne la vente et l’écoulement de chaque produit du lot concerné, y compris les documents relatifs au transport, à l’assurance, à la manutention et à l’entreposage du lot.
[...]
6. Le délai de quatre mois visé au paragraphe 5, premier alinéa, peut être prolongé de trois mois au maximum par les autorités compétentes de l’État membre sur demande dûment justifiée de l’importateur.
[...] »
18 L’annexe VII, partie A, du règlement délégué 2017/891, contient notamment l’entrée suivante :
Code NC Désignation Période d’application
0709 90 70 Courgettes Du 1er janvier au 31 décembre
Le règlement (CEE) no 2658/87
19 Le règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), tel que modifié par le règlement d’exécution (UE) 2018/1602 de la Commission, du 11 octobre 2018 (JO 2018, L 273, p. 1), comporte, en son annexe I, troisième partie, section I, annexe 2, notamment, l’entrée suivante :
Code NC Désignation des marchandises Taux du droit conventionnel (%)
[...] [...] [...]
0709 93 10 – – – Courgettes
[...] [...] [...]
– – – – du 1er avril au 31 mai
– – – – – avec un prix d’entrée par 100 kg poids net
– – – – – – de 69,2 € ou plus 12,8
– – – – – – de 67,8 € ou plus mais inférieur à 69,2 € 12,8 + 1,4 €/100 kg/net
– – – – – – de 66,4 € ou plus mais inférieur à 67,8 € 12,8 + 2,8 €/100 kg/net
– – – – – – de 65 € ou plus mais inférieur à 66,4 € 12,8 + 4,2 €/100 kg/net
– – – – – – de 63,7 € ou plus mais inférieur à 65 € 12,8 + 5,5 €/100 kg/net
– – – – – – inférieur à 63,7 € 12,8 + 15,2 €/100 kg/net
Le litige au principal et les questions préjudicielles
20 Le 23 avril 2019, OGL-Food, agissant en tant qu’importateur, a déposé, auprès du bureau des douanes de Svilengrad (Bulgarie), une déclaration en douane par laquelle elle a déclaré, sous le régime de mise en libre pratique à des fins de consommation finale, des « courgettes à l’état frais », originaires de Turquie, relevant de la sous-position 07099310 de la nomenclature tarifaire et statistique des marchandises, pour un poids de 4800 kilos et pour une valeur en douane, convertie en euros, de
90,81 euros par 100 kilos (ci-après le « lot litigieux »). L’exportateur était une société établie à Antalya (Turquie).
21 La Commission avait établi, pour le 23 avril 2019, la valeur forfaitaire à l’importation pour des courgettes de toute provenance à 53,80 euros par 100 kilos. Comme la valeur transactionnelle déclarée pour le lot litigieux dépassait de plus de 8 % la valeur forfaitaire à l’importation, OGL-Food a fourni une garantie s’élevant à 982,17 leva bulgares (BGN) (environ 502 euros), conformément à l’article 75, paragraphe 2, du règlement délégué 2017/891.
22 Compte tenu des frais de transport, de déchargement, de traitement et d’assurance encourus jusqu’au point d’entrée du lot litigieux dans l’Union européenne, des frais de transport après l’arrivée audit point d’entrée et des frais encourus auprès de l’agence de sécurité des aliments bulgare, les autorités douanières bulgares ont fixé le prix total qu’OGL-Food a payé pour acheter le lot litigieux à 109,6 euros par 100 kilos.
23 Par lettre du 24 avril 2019, les autorités douanières bulgares ont informé OGL-Food que, conformément à l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891, elle était tenue de prouver, dans les délais prévus par cette disposition, que le lot litigieux avait été écoulé dans des conditions telles qu’elles confirmaient la réalité de la valeur transactionnelle déclarée. À cette fin, OGL-Food a été invitée à fournir, notamment, une déclaration en douane de l’État d’exportation, une facture de
transport, un contrat commercial, des factures « fiscales » relatives à la vente du lot litigieux au premier niveau commercial, un décompte du prix de vente de ce lot, basé sur le prix d’acquisition, des extraits de comptes bancaires, les relevés bancaires de paiement en faveur du vendeur, le livre-journal des achats et des ventes, le livre-journal d’enregistrement des transactions et des bons de livraison des produits. OGL-Food a également été informée des conséquences de la non-présentation des
éléments de preuve demandés, à savoir la perte de la garantie en application de l’article 75, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement délégué 2017/891.
24 Le 23 mai 2019, OGL-Food a fourni aux autorités douanières bulgares une facture d’achat du lot litigieux, une facture de transport, une lettre de voiture internationale, une facture de vente du lot litigieux au premier niveau commercial dans l’Union, des bons de livraison, des confirmations de la réception du lot litigieux, le décompte du prix de vente fondé sur le prix d’acquisition et des extraits de comptabilité concernant des importations et des ventes. Elle a également produit des relevés de
taxe sur la valeur ajoutée (TVA) se rapportant à la période allant du mois de janvier au mois d’avril 2019, des livres-journaux des achats et des ventes ainsi que des déclarations de TVA concernant les livraisons intracommunautaires pour la même période. OGL-Food a demandé, sur le fondement des éléments de preuve produits, la libération de la garantie fournie.
25 Selon le décompte du prix de vente fourni par OGL-Food, celle-ci a vendu le lot litigieux au prix de 106 euros par 100 kilos. Compte tenu du fait que ce dernier prix était inférieur au prix total de 109,6 euros par 100 kilos qu’OGL-Food avait payé pour acheter le lot litigieux, les autorités douanières bulgares ont considéré que cette dernière n’avait pas apporté la preuve de l’écoulement de celui-ci dans des conditions confirmant la réalité de la valeur transactionnelle déclarée et que, dès
lors, conformément à l’article 75, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement délégué 2017/891, la garantie devrait rester acquise en paiement des droits à l’importation.
26 En application de l’article 22, paragraphe 6, du code des douanes de l’Union, OGL-Food a été informée de ces motifs, sur lesquels le directeur des douanes comptait fonder sa décision, et a été invitée à faire valoir son point de vue dans un délai de 30 jours.
27 Dans ses observations sur lesdits motifs, OGL-Food a fait valoir, tout d’abord, que l’article 75 du règlement délégué 2017/891 n’impose pas de fournir la preuve d’une revente des marchandises avec profit pour prouver la réalité de la valeur transactionnelle déclarée en tant que valeur en douane. Ensuite, elle a souligné que la vente du lot litigieux s’inscrivait dans le cadre d’une relation commerciale de longue date avec une chaîne de supermarchés internationale et que l’examen de cette relation
sur une période plus longue aurait permis d’observer qu’une telle relation lui permettait de réaliser des bénéfices. Enfin, OGL-Food a observé que le prix auquel elle a vendu le lot litigieux était nettement supérieur à la valeur forfaitaire à l’importation calculée, le 23 avril 2019, par la Commission pour des produits identiques à ceux faisant partie du lot litigieux.
28 Par décision du 30 octobre 2020 (ci-après la « décision fixant la dette douanière »), le directeur des douanes a décidé, notamment, que la garantie fournie devait rester acquise en paiement des droits à l’importation, fixés à 982,17 BGN. Cette décision prend appui, premièrement, sur le fait qu’OGL-Food n’a pas fourni d’éléments susceptibles d’expliquer la différence notable entre la valeur transactionnelle déclarée de 90,81 euros par 100 kilos et la valeur forfaitaire à l’importation de
53,80 euros par 100 kilos, tels que la qualité exceptionnelle ou la provenance biologique du lot litigieux, qui était simplement décrit comme étant « de première qualité ». Deuxièmement, le directeur des douanes a pris en compte la perte réalisée lors de la vente du lot litigieux pour considérer qu’OGL-Food n’avait pas prouvé l’écoulement de celui-ci dans des conditions confirmant la réalité de la valeur transactionnelle déclarée, au sens de l’article 75, paragraphe 5, du règlement
délégué 2017/891.
29 OGL-Food a introduit un recours en annulation contre la décision fixant la dette douanière devant l’Administrativen sad Sofia-grad (tribunal administratif de la ville de Sofia, Bulgarie), qui est la juridiction de renvoi, à l’occasion duquel elle fait valoir que les éléments, non contestés, qu’elle a soumis au directeur des douanes confirment que la valeur transactionnelle déclarée satisfait aux conditions de l’article 70 du code des douanes de l’Union. Dans ce contexte, OGL-Food soutient, d’une
part, que l’existence d’un bénéfice résultant de la vente de produits comparables à ceux du lot litigieux à un client concret est à déterminer sur une base mensuelle et non au niveau de chaque opération individuelle. D’autre part, OGL-Food affirme que la valeur de ce lot, telle que calculée, conformément à l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union, par un expert judiciaire, confirme, ne serait-ce que par voie indirecte, qu’il n’y a pas eu une augmentation artificielle du
prix dudit lot. OGL-Food ajoute, par ailleurs, qu’elle et la chaîne de supermarchés internationale à laquelle elle a vendu le lot litigieux n’ont pas la qualité d’associés, au sens de l’article 127, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union.
30 Le directeur des douanes souligne, pour sa part, premièrement, qu’OGL-Food n’a pas fourni d’éléments permettant de justifier le niveau élevé de la valeur transactionnelle déclarée par rapport à la valeur forfaitaire à l’importation, tels que la qualité exceptionnelle des produits concernés ou qu’ils proviennent de l’agriculture biologique. Deuxièmement, le fait pour OGL-Food de vendre le lot litigieux à perte ne serait pas conforme à la logique du marché, qui voudrait que celle-ci cherche à
réaliser un bénéfice commercial. Troisièmement, le code des douanes de l’Union s’appliquerait sans préjudice du règlement délégué 2017/891. Or, ce dernier exclurait la possibilité de tenir compte d’autres opérations d’importation afin d’apprécier la réalité de la valeur transactionnelle déclarée aux fins de l’importation du lot litigieux. En outre, quatrièmement, la méthode de détermination de la valeur en douane prévue à l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union ne
serait pas applicable en l’espèce.
31 La juridiction de renvoi semble considérer que l’analyse sur laquelle est fondée la décision fixant la dette douanière, qui est en défaveur d’OGL-Food, n’est pas conforme à la jurisprudence nationale, rendue au sujet de l’appréciation des preuves relatives à la réalité de la valeur transactionnelle déclarée en application de l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891. Cela étant, la juridiction de renvoi considère que, aux fins de trancher le litige pendant devant elle, il convient
de soulever d’office l’éventualité qu’OGL-Food entretienne avec l’exportateur du lot litigieux et avec son client dans l’Union des relations permettant de les qualifier tous de personnes « liées », au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), et de l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union respectivement.
32 En effet, d’une part, il y aurait lieu d’apprécier si, en l’absence de contrat commercial ou d’autre lien juridique entre les parties, les relations durables, périodiques et récurrentes d’approvisionnement en cause au principal, telles que reflétées dans les factures et les écritures comptables s’y rapportant, suffisent pour qualifier l’exportateur et OGL-Food de personnes ayant « juridiquement la qualité d’associés », au sens de l’article 127, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution du
code des douanes de l’Union, et donc de personnes « liées », au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), de ce code, auquel cas il y aurait lieu de vérifier, par la suite, si ce lien a influencé la valeur transactionnelle déclarée du lot litigieux.
33 D’autre part, devant la juridiction de renvoi, OGL-Food aurait fait valoir que la valeur transactionnelle déclarée aurait dû être acceptée par le directeur des douanes au motif qu’elle était proche de la valeur en douane de marchandises identiques ou similaires, déterminée conformément à l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union, ainsi que l’avait calculée l’expert judiciaire. Cette juridiction estime que, pour apprécier la pertinence de cet argument, qui se rapporte à
l’article 134, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union, il y a lieu d’apprécier si OGL-Food et son client dans l’Union sont des personnes liées, au sens de l’article 142, paragraphe 4, sous b), de ce règlement d’exécution, qui établit les modalités d’application de l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union. À cet égard, ladite juridiction considère que la notion de « personnes liées » a la même signification tant dans le cadre de
l’article 70, paragraphe 3, sous d), et de l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union que dans celui de l’article 127, paragraphe 1, et de l’article 142, paragraphe 4, sous b), du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union.
34 Toutefois, la juridiction de renvoi se pose la question de savoir si un importateur peut obtenir l’application de la méthode prévue à l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union pour la première fois lors de l’introduction d’un recours contre la décision fixant la dette douanière, à savoir après l’expiration des délais prévus à l’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué 2017/891. En cas de réponse négative, cette juridiction nourrit des doutes quant au respect,
compte tenu de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), des droits de la défense de l’importateur, et quant à la question de savoir si elle peut constater que ce dernier est une personne liée à l’exportateur, en application de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, alors que la décision fixant la dette douanière n’a pas écarté la valeur transactionnelle pour ce motif.
35 La juridiction de renvoi s’interroge également sur le point de savoir si l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891 doit être interprété en ce sens que, afin de prouver la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union, l’importateur doit produire un contrat d’achat ou tout autre document équivalent, si l’autorité douanière peut tenir compte du fait que les marchandises importées ont été vendues à perte sur le marché de l’Union et si les circonstances
entourant cette vente à perte revêtent une pertinence aux fins de l’application de cette disposition.
36 La juridiction de renvoi se demande, enfin, si l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891 doit être interprété en ce sens que, sans remettre en cause l’authenticité de la facture établie par l’exportateur et la preuve du paiement à l’intention de celui-ci, l’autorité douanière peut établir la valeur en douane au niveau de la valeur forfaitaire à l’importation lorsque la valeur transactionnelle déclarée est anormalement élevée et en l’absence de production d’un contrat entre
l’exportateur et l’importateur ou d’autres preuves justifiant le niveau élevé de la valeur transactionnelle déclarée.
37 Dans ces conditions, l’Administrativen sad Sofia-grad (tribunal administratif de la ville de Sofia) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Au regard de l’article 70, paragraphe 1, du [code des douanes de l’Union], lu en combinaison avec l’article 75, paragraphe 5, premier alinéa, et paragraphe 6, du règlement délégué [2017/891], aux fins de l’appréciation de la condition visée à l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de [l’Union], selon laquelle il faut “que l’acheteur et le vendeur ne soient pas liés”, dans le cadre de l’application de la valeur transactionnelle des marchandises à des fins douanières figurant
dans une déclaration en douane spécifique d’importation de légumes, les données suivantes doivent-elles être considérées comme pertinentes :
– les données relatives aux relations entre les parties dans le cadre de l’importation des marchandises et de leur vente au premier niveau commercial dans l’Union (des livraisons de longue date et récurrentes de marchandises du même type, en grandes quantités et d’une valeur importante) qui excluent le caractère ponctuel des relations s’agissant de l’importation concrète faisant l’objet de la vérification ;
– les données relatives aux factures émises pour des livraisons, au paiement du prix, à l’enregistrement des factures dans la comptabilité et dans les registres de la TVA de l’importateur et le droit à déduction de la taxe en amont exercé en conséquence ;
– la valeur transactionnelle déclarée de l’importation concrète faisant l’objet de la vérification qui est nettement supérieure à la valeur forfaitaire à l’importation pour le même produit, déterminée par la Commission aux fins de l’application des droits à l’importation dans le secteur des légumes, tandis que le même produit est vendu à perte dans l’Union ;
– [le fait que] l’importateur n’a pas présenté de contrat commercial à l’occasion de l’importation concrète, demandé par les autorités douanières, ni aucune autre sorte de document établissant la relation juridique entre les parties contractantes ?
Dans l’hypothèse où ces données seraient pertinentes, ces circonstances permettent-elles de dire que les opérateurs, importateur et exportateur, respectivement un importateur et un acheteur au premier niveau commercial dans l’Union, sont des personnes ayant “juridiquement la qualité d’associés” ou des personnes liées, au sens de l’article 127, paragraphe 1, sous b), et de l’article 142, paragraphe 4, sous b), du règlement d’exécution [du code des douanes de l’Union] ?
Dans l’hypothèse où ces données seraient pertinentes, mais ne suffiraient pas pour conclure que les opérateurs sont des personnes liées, aux fins de la vérification au titre de l’article 75, paragraphe 6, du règlement délégué [2017/891], existe-il une obligation d’apprécier si la relation entre les opérateurs n’a pas influencé la détermination d’un prix plus élevé des marchandises concernant l’importation spécifique, et ce afin d’éviter la fraude aux droits de douane et la perte de recettes
fiscales pour le budget de l’Union, eu égard également à la vente à perte ultérieure au premier niveau commercial dans l’Union ?
2) Au regard de l’article 47, [premier alinéa], et de l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la [Charte], interprétés à la lumière du droit de recours de la personne, visé à l’article 44, paragraphe 1, du [code des douanes de l’Union] et de l’obligation pour les autorités douanières de motiver la décision visée à l’article 29, lu conjointement [avec] l’article 22, paragraphe 7, [de ce] code, et des circonstances de l’espèce, et du fait que, dans le cadre de la procédure de recours juridictionnel
contre la décision, la juridiction de première instance est tenue d’apprécier d’office la légalité de ladite décision et des moyens non mentionnés dans la requête, de collecter de nouvelles preuves et de nommer d’office un expert judiciaire :
– la condition énoncée à l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, selon laquelle il faut “que l’acheteur et le vendeur ne soient pas liés ou que les liens n’aient pas influencé le prix”, peut-elle être déterminée pour la première fois dans le cadre de la procédure juridictionnelle ou bien l’autorité douanière est-elle déjà tenue de parvenir à une conclusion à cet égard dans les motifs de la décision attaquée ?
– lorsque l’importateur n’a pas expressément indiqué qu’il déterminerait la valeur des marchandises importées conformément à l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union, bien qu’il en ait eu la possibilité procédurale, est-il contraire à l’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué 2017/891, en particulier au délai de prescription fixé pour cette détermination, [le fait] que cette valeur soit établie pour la première fois dans le cadre de la procédure de
recours de la décision, y compris dans le cadre de l’examen des objections de l’importateur fondées sur le fait que le prix de vente de la marchandise dans l’[Union] était proche de la valeur transactionnelle déclarée ?
3) Au regard de l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué [2017/891], selon lequel “l’importateur met à disposition [...] tous les documents nécessaires à l’exécution des contrôles douaniers requis en ce qui concerne la vente et l’écoulement de chaque produit du lot concerné”, interprété à la lumière du point 1 du dispositif de l’arrêt du 11 mars 2020, X (Recouvrement de droits additionnels à l’importation) (C‑160/18, EU:C:2020:190), en ce qui concerne la preuve de la
valeur transactionnelle déclarée en vertu de l’article 70, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union,
– les autorités douanières ou, dans le cadre d’un recours, la juridiction doivent-elles tenir compte de la circonstance que les marchandises importées (des légumes) ont été vendues à perte dans l’Union en tant qu’indice sérieux que ledit prix à l’importation était artificiellement élevé, y compris eu égard à l’appréciation de la question de savoir si le fait que les personnes étaient liées a influencé la valeur transactionnelle déclarée, y compris afin d’éviter la fraude aux droits de douane
et la perte de recettes fiscales ?
– l’importateur est-il tenu de produire un contrat ou un document équivalent prouvant le prix à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation vers le territoire douanier de l’Union ou bien suffit-il qu’il prouve avoir payé la valeur déclarée des marchandises à l’importation ? ou
– l’importateur ne doit-il présenter que les documents expressément visés à l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué 2017/891 comme preuve de la valeur transactionnelle déclarée pour l’importation de légumes, et donc les circonstances relatives à la vente à perte de ce produit dans l’Union ne sont pas pertinentes aux fins de la vérification visée à l’article 75, paragraphe 6, dudit règlement, en ce qui concerne la non-acceptation de la valeur transactionnelle et la
détermination du droit à l’importation ?
4) Résulte-t-il de l’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué [2017/891] et de l’interprétation donnée dans l’arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary (C‑291/15, EU:C:2016:455), que, dans les circonstances de l’affaire au principal, la valeur en douane de l’importation de légumes en provenance de pays tiers ne peut pas être déterminée au regard de la valeur transactionnelle déclarée lorsque :
– la valeur transactionnelle déclarée du produit est sensiblement supérieure à la valeur forfaitaire à l’importation pour la même marchandise déterminée par la Commission aux fins de l’application des droits à l’importation dans le secteur des légumes ;
– l’autorité douanière ne conteste pas ni ne remet en cause de quelque autre manière que ce soit l’authenticité de la facture et de l’attestation de paiement des marchandises présentées comme preuve du prix à l’importation effectivement payé ;
– l’importateur, en réponse à la demande de l’autorité douanière, n’a pas présenté de contrat ou tout autre document équivalent prouvant le prix à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation vers le territoire douanier de l’Union, y compris des preuves supplémentaires établissant des éléments économiques relatifs aux marchandises justifiant leur valeur plus élevée au moment de leur achat par l’exportateur tels qu’un lot de légumes issus de l’agriculture biologique
ou d’une qualité supérieure ? »
Sur les questions préjudicielles
Observations liminaires
38 Conformément à l’annexe I, troisième partie, section I, annexe 2, du règlement no 2658/87, les droits du tarif douanier commun pour les produits en cause dans l’affaire au principal sont soumis à un droit ad valorem d’un taux de 12,8 % et à un droit variable, exprimé en euros. Le montant de ce droit variable augmente à mesure que la valeur en douane des produits importés diminue.
39 La valeur en douane des produits importés doit être déterminée, selon l’article 70, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union, prioritairement par référence à la valeur transactionnelle déclarée. Cela étant, conformément à l’article 70, paragraphe 3, sous d), de ce code, la valeur transactionnelle s’applique à condition que l’acheteur et le vendeur, à savoir l’importateur et l’exportateur, ne soient pas liés ou que les liens n’aient pas influencé le prix.
40 Il ressort, par ailleurs, de l’article 74, paragraphe 1, premier alinéa, du code des douanes de l’Union que, lorsque la valeur en douane des marchandises ne peut être établie sur la base de la valeur transactionnelle déclarée, en application de l’article 70 de ce code, cette valeur doit être déterminée en application de la première des dispositions de l’article 74, paragraphe 2, sous a) à sous d), dudit code, qui permettra de la déterminer.
41 Parmi ces dispositions, l’article 74, paragraphe 2, sous c), du code des douanes de l’Union prévoit une méthode de détermination de la valeur en douane qui est dénommée « méthode déductive » par l’article 142 du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union (ci-après la « méthode déductive »). Cette méthode est fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes sur le territoire douanier de l’Union des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées
totalisant la quantité la plus élevée, ainsi faites à des personnes non liées aux vendeurs.
42 L’article 134, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union, disposition qui régit les transactions entre des personnes « liées », au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), de ce code, prévoit que, même si l’importateur et l’exportateur sont liés, il convient d’évaluer les marchandises conformément à l’article 70, paragraphe 1, dudit code lorsque le déclarant démontre que la valeur transactionnelle déclarée est très proche de la valeur en douane de
marchandises identiques ou similaires, déterminée conformément à la méthode déductive.
43 Il convient néanmoins de relever que, conformément à l’article 1er, paragraphe 1, second alinéa, du code des douanes de l’Union, ce dernier s’applique sans préjudice de la législation de l’Union régissant d’autres domaines. Or, le règlement no 1308/2013 et le règlement délégué 2017/891 énoncent des règles douanières spéciales en matière d’importations de fruits et légumes.
44 En effet, aux fins de l’application des droits du tarif douanier commun pour les produits relevant du secteur des fruits et des légumes, l’article 181 du règlement no 1308/2013 prévoit un mécanisme dit « du prix d’entrée » qui repose sur des seuils de prix minimaux à l’importation en dessous desquels s’appliquent des droits spécifiques additionnels qui sont d’autant plus élevés que la valeur à l’importation est faible.
45 Dans ce contexte, l’article 181, paragraphe 2, du règlement no 1308/2013 habilite la Commission à adopter des actes délégués afin de prévoir que la réalité du prix d’entrée déclaré d’un lot doit être vérifiée à l’aide d’une valeur forfaitaire à l’importation et de fixer les conditions dans lesquelles la constitution d’une garantie est requise.
46 Le règlement délégué 2017/891, qui a été adopté sur le fondement de l’article 181, paragraphe 2, du règlement no 1308/2013, comporte, premièrement, l’article 74 en vertu duquel, aux fins du calcul de cette valeur forfaitaire à l’importation, les États membres doivent notifier à la Commission, chaque jour de marché, les prix moyens représentatifs des produits importés des pays tiers et commercialisés sur les marchés d'importation des États membres ainsi que les quantités totales correspondant à
ces prix.
47 Deuxièmement, l’article 75 du règlement délégué 2017/891 prévoit les modalités selon lesquelles sont établis les prix d’entrée des produits concernés.
48 En particulier, d’une part, selon l’article 75, paragraphe 2, de ce règlement délégué, lorsque la valeur en douane de certains produits, parmi lesquels figurent des produits comme ceux en cause au principal, est déterminée conformément à la valeur transactionnelle visée à l’article 70 du code des douanes de l’Union et que cette valeur en douane dépasse de plus de 8 % le montant forfaitaire calculé par la Commission comme valeur forfaitaire à l’importation, au sens de l’article 181, paragraphe 2,
du règlement no 1308/2013, au moment de la déclaration de mise en libre pratique des produits, l’importateur doit fournir une garantie. Cette garantie est égale au montant des droits qui aurait été payé si le classement avait été effectué sur la base de la valeur forfaitaire à l’importation concernée.
49 D’autre part, selon l’article 75, paragraphe 5, premier alinéa, du règlement délégué 2017/891, l’importateur dispose d’un délai d’un mois à compter de la vente des produits concernés, dans la limite d’un délai de quatre mois suivant la date d’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique, soit pour prouver que le lot a été écoulé dans des conditions telles qu’elles confirment la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union, soit pour déterminer la valeur en
douane visée à l’article 74, paragraphe 2, sous c), de ce code. Selon l’article 75, paragraphe 5, deuxième et troisième alinéas, du règlement délégué 2017/891, le non-respect de l’un de ces délais entraîne la perte de la garantie fournie en paiement des droits à l’importation, tel étant également le cas si l’importateur ne fournit pas, à la satisfaction des autorités douanières, les preuves relatives aux conditions d’écoulement du lot. En revanche, la garantie est libérée dans la mesure où les
preuves relatives aux conditions d’écoulement, telles qu’énoncées à l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué 2017/891, sont apportées à la satisfaction des autorités douanières.
50 Étant donné que la première question concerne les données à prendre en compte aux fins d’apprécier si l’acheteur et le vendeur sont liés au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, tandis que la deuxième question porte, notamment, sur la possibilité, pour une juridiction nationale d’appliquer cette disposition dans des circonstances telles que celles en cause au principal, il convient d’examiner d’abord la deuxième question.
Sur la deuxième question
51 La deuxième question est fondée sur la circonstance que, saisie d’un recours contre une décision des autorités douanières fixant la dette douanière, la juridiction de renvoi est, selon le droit national, tenue d’apprécier d’office la légalité de cette décision et peut recueillir de nouvelles preuves ainsi que nommer d’office un expert judiciaire.
52 À cet égard, la demande de décision préjudicielle laisse apparaître qu’OGL-Food a invoqué devant la juridiction de renvoi un calcul de la valeur en douane effectué conformément à la méthode déductive afin de prouver, en tirant argument de la proximité entre le résultat de ce calcul et la valeur transactionnelle déclarée, la réalité de cette dernière. Il ressort, en outre, de la référence de la juridiction de renvoi à l’article 134 du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union, que,
comme OGL-Food l’a par ailleurs confirmé lors de l’audience, celle-ci souhaitait se voir appliquer la possibilité offerte par le paragraphe 2, sous b), de cet article, de prouver que la valeur transactionnelle était « très proche » de la valeur en douane de marchandises identiques ou similaires, déterminée conformément à la méthode déductive. Selon OGL-Food, cette proximité aurait dû conduire les autorités douanières à reconnaître la réalité de la valeur transactionnelle déclarée.
53 La référence à l’article 134 du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union, qui constitue une disposition d’exécution de l’article 70, paragraphe 3, sous d), de ce code, paraît, en outre, avoir conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur la possibilité d’appliquer, d’office, cette dernière disposition, en dépit du fait que, dans l’affaire en cause au principal, les autorités douanières n’ont pas écarté la valeur transactionnelle déclarée au motif qu’OGL-Food et l’exportateur
auraient été « liés », au sens de cette dernière disposition.
54 Ainsi, par la première partie de sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si une juridiction nationale peut soulever, d’office et pour la première fois dans le cadre du litige pendant devant elle, la question de savoir si l’importateur et l’exportateur sont liés, au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, et, dans l’affirmative, si les éventuels liens existant entre eux ont influencé ou non le prix effectivement payé ou à payer, au
sens de cette disposition.
55 Par la seconde partie de sa deuxième question, qu’il convient d’examiner en premier lieu, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si l’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué 2017/891 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un importateur, qui n’a pas choisi, dans les délais prévus par ces dispositions, de déterminer la valeur en douane du lot importé conformément à la méthode déductive, mais a, au contraire, déterminé cette valeur conformément à
l’article 70 du code des douanes de l’Union, puisse valablement s’appuyer, au soutien de son recours juridictionnel contre une décision des autorités douanières fixant la dette douanière, sur un calcul de la valeur en douane effectué conformément à la méthode déductive, afin de prouver la réalité des prix visés à l’article 70 de ce code.
56 Il convient de rappeler, à titre liminaire, que le droit de l’Union relatif à l’évaluation en douane vise à établir un système équitable, uniforme et neutre qui exclut l’utilisation de valeurs en douane arbitraires ou fictives. La valeur en douane doit donc refléter la valeur économique réelle d’une marchandise importée (arrêt du 9 juin 2022, Baltic Master, C‑599/20, EU:C:2022:457, point 24 et jurisprudence citée).
57 Or, cet objectif doit également prévaloir lorsque la valeur en douane est déterminée en vertu de dispositions spéciales, telles que celles prévues à l’article 75 du règlement délégué 2017/891, applicables en l’occurrence.
58 À cet égard, il ressort de l’article 75, paragraphe 5, premier alinéa, et paragraphe 6, de ce règlement délégué que l’importateur peut soit choisir de déterminer la valeur en douane du lot importé sur la base de la valeur transactionnelle déclarée, auquel cas il lui incombe de prouver, dans des délais précis, que ce lot a été écoulé dans des conditions telles qu’elles confirment la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union, soit déterminer, dans les mêmes délais, la
valeur en douane selon la méthode déductive.
59 En outre, conformément à l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué 2017/891, afin de prouver que le lot importé a été écoulé dans des conditions qui confirment la réalité de la valeur transactionnelle déclarée, l’importateur met à disposition, en plus de la facture, tous les documents nécessaires à l’exécution des contrôles douaniers requis en ce qui concerne la vente et l’écoulement de chaque produit de ce lot, y compris les documents relatifs au transport, à
l’assurance, à la manutention et à l’entreposage dudit lot.
60 Il s’ensuit que l’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué 2017/891 impose à l’importateur de choisir, dans des délais précis, entre l’application de deux dispositions différentes du code des douanes de l’Union prévoyant des méthodes alternatives de détermination de la valeur en douane. Par conséquent, un calcul de la valeur en douane effectué selon la méthode déductive ne peut être valablement invoqué au soutien d’un recours juridictionnel que si l’importateur a préalablement choisi,
dans les délais prévus à cet effet par l’article 75, paragraphe 5, premier alinéa, et paragraphe 6, de ce règlement délégué, de déterminer la valeur en douane selon cette méthode. En revanche, si l’importateur a opté pour la méthode de la valeur transactionnelle, le résultat d’un tel calcul ne peut pas être avancé, dans le cadre d’un tel recours, dans le but de prouver, conformément à l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué 2017/891, qui plus est après l’expiration
desdits délais, la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union.
61 En outre, l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891 requiert que la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union soit confirmée par référence aux conditions d’écoulement du lot, tel que ce terme est défini à l’article 73, sous a), de ce règlement délégué, et non par référence aux ventes, sur le territoire douanier de l’Union, de marchandises ne faisant pas partie dudit lot.
62 Cette exigence exclut que l’importateur puisse, en application de l’article 134, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union, disposition qui a été invoquée par OGL-Food devant la juridiction de renvoi et a suscité les interrogations de celle-ci, déterminer la valeur en douane sur la base de la valeur transactionnelle déclarée au motif que cette dernière est très proche de la valeur en douane de marchandises identiques ou similaires déterminée selon la méthode
déductive.
63 Au demeurant, un calcul de la valeur en douane, tel que celui effectué par l’expert judiciaire, nommé dans l’affaire au principal, en application de la méthode déductive, qui tient compte, ainsi qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle, du prix de vente du lot litigieux à la chaîne de supermarchés cliente d’OGL-Food ne répond pas aux exigences de l’article 134, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union, disposition qui exclut la prise en compte
d’une valeur fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes sur le territoire douanier de l’Union des marchandises importées elles-mêmes.
64 Il ressort des appréciations qui précèdent que l’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué 2017/891 ne permet pas à un importateur qui n’a pas choisi, dans les délais prévus par ces dispositions, de déterminer la valeur en douane des marchandises importées selon la méthode déductive, mais qui a déterminé cette valeur conformément à l’article 70 du code des douanes de l’Union, de s’appuyer, au soutien de son recours juridictionnel contre une décision des autorités douanières fixant la
dette douanière, sur un calcul de la valeur en douane effectué conformément à ladite méthode, en invoquant l’article 134, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution de ce code, afin de prouver la réalité des prix visés à l’article 70 dudit code.
65 Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’article 41, paragraphe 2, sous c), et par l’article 47, premier alinéa, de la Charte. En effet, la première de ces dispositions s’adresse non pas aux autorités des États membres, mais uniquement aux institutions, aux organes et aux organismes de l’Union (arrêt du 5 novembre 2014, Mukarubega, C‑166/13, EU:C:2014:2336, point 44). Quant à la seconde de ces dispositions de la Charte, elle consacre le droit à un recours effectif au profit de toute
personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés, de sorte qu’elle ne préjuge pas de l’applicabilité des dispositions du droit matériel sur lesquelles prend appui la personne concernée.
66 En second lieu, s’agissant de la première partie de la deuxième question préjudicielle, il est, certes, vrai que l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891 n’empêche pas les autorités douanières d’examiner si l’importateur et l’exportateur sont liés, au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union et, dans l’affirmative, si ces liens ont influencé le prix.
67 Cependant, concernant les produits auxquels s’applique un prix d’entrée, la question de savoir si les éventuels liens unissant l’importateur et l’exportateur ont influencé le prix, au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, est susceptible d’affecter la réalité de la valeur des marchandises, telle que celle-ci est indiquée dans la déclaration en douane.
68 À cet égard, il ressort de l’article 46, paragraphe 1, second alinéa, du code des douanes de l’Union que les contrôles douaniers consistent, entre autres, en la vérification de l’exactitude et du caractère complet des informations fournies dans une déclaration. Il s’ensuit que la vérification de la réalité de la valeur transactionnelle déclarée, effectuée conformément à l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué 2017/891, constitue, ainsi qu’il ressort, par ailleurs, du
libellé même de cette dernière disposition, un acte relevant des contrôles douaniers, au sens de l’article 46, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union.
69 Or, l’article 5, point 3, du code des douanes de l’Union attribue la compétence pour accomplir des contrôles douaniers aux autorités douanières, à savoir, conformément à l’article 5, point 1, de ce code, aux administrations douanières des États membres chargées de l’application de la législation douanière et à toute autre autorité habilitée en droit national à appliquer certaines dispositions douanières. Ainsi, les autorités judiciaires chargées de se prononcer, conformément à l’article 44 du
code des douanes de l’Union, sur les recours contre les décisions prises par les autorités douanières à l’issue d’un contrôle douanier sont à distinguer de ces dernières.
70 Par conséquent, saisie d’un recours contre une décision d’une autorité douanière fixant la dette douanière conformément à l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891, une autorité judiciaire ne peut pas soulever, d’office et pour la première fois, la question de l’existence de liens entre l’importateur et l’exportateur, au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, et si ces éventuels liens ont influencé le prix, au sens de cette dernière
disposition, alors que le contrôle douanier effectué par l’autorité douanière a porté non pas sur l’existence de tels liens mais sur les conditions d’écoulement du lot importé sur le marché de l’Union, qui, selon cette autorité, n’ont pas confirmé la réalité de la valeur transactionnelle déclarée.
71 Cette conclusion reste également valable lorsque la question de savoir si les conditions d’application de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union sont réunies est susceptible de se poser dans le cadre de l’examen d’un argument qu’une partie contestant une décision des autorités douanières fixant la dette douanière tire de l’article 134, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution du code des douanes de l’Union.
72 L’article 47, premier alinéa, de la Charte est sans incidence à cet égard. En effet, cette disposition, qui consacre le droit à un recours effectif au profit de toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés, ne préjuge pas de la répartition des compétences entre, d’une part, les autorités administratives, telles les autorités douanières, et, d’autre part, les autorités judiciaires, telle que cette répartition résulte des dispositions pertinentes du
droit de l’Union, en l’occurrence celles de l’article 5, point 1, et de l’article 44 du code des douanes de l’Union.
73 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la deuxième question que l’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué 2017/891 doit être interprété en ce sens que :
– il s’oppose à ce qu’un importateur, qui n’a pas choisi, dans les délais prévus par ces dispositions, de déterminer la valeur en douane du lot importé conformément à la méthode déductive, mais a, au contraire, déterminé cette valeur conformément à l’article 70 du code des douanes de l’Union, puisse valablement s’appuyer, au soutien de son recours juridictionnel contre une décision des autorités douanières fixant la dette douanière, sur un calcul de la valeur en douane effectué conformément à la
méthode déductive afin de prouver, en invoquant l’article 134, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution de ce code, la réalité des prix visés à l’article 70 dudit code ;
– il s’oppose à ce que, saisie d’un recours contre une décision d’une autorité douanière fixant la dette douanière, une autorité judiciaire puisse soulever, d’office et pour la première fois dans le cadre du litige pendant devant elle, la question de savoir si l’importateur et l’exportateur sont liés, au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, et, dans l’affirmative, si les éventuels liens existant entre eux ont influencé ou non le prix effectivement payé ou à
payer, au sens de cette dernière disposition, alors que le contrôle douanier effectué par l’autorité douanière n’a pas porté sur l’existence de tels liens, ladite autorité ayant écarté la valeur transactionnelle déclarée pour des motifs différents, portant sur les conditions d’écoulement du lot concerné sur le marché de l’Union.
Sur la première question
74 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, en vue de l’application de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, si certaines circonstances factuelles, telles que le caractère durable des relations commerciales, l’écart important entre la valeur transactionnelle déclarée et la valeur forfaitaire à l’importation applicable, la vente ultérieure à perte et la non-présentation d’un contrat relatif à l’importation sont pertinentes aux fins de
l’appréciation de l’existence de liens entre l’importateur et l’exportateur ou entre l’importateur et son client dans l’Union.
75 Toutefois, il ressort de la réponse donnée à la deuxième question que l’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué 2017/891 fait obstacle à l’application, d’office et pour la première fois, de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du code des douanes de l’Union, par la juridiction nationale saisie d’un recours contre une décision des autorités douanières fixant la dette douanière lorsque le contrôle douanier n’a pas porté sur l’existence de liens entre l’importateur et l’exportateur.
76 Étant donné qu’il est constant que, dans l’affaire au principal, le contrôle douanier réalisé n’a pas porté sur l’existence de tels liens, il n’y a pas lieu de répondre à la première question.
Sur la troisième question
77 Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891 doit être interprété en ce sens que l’écoulement du lot de marchandises importées moyennant une vente à perte constitue un indice sérieux du caractère artificiellement élevé de la valeur transactionnelle déclarée qui oblige l’importateur à fournir aux autorités douanières, en vue de démontrer la réalité de cette valeur, outre les documents relatifs au transport,
à l’assurance, à la manutention et à l’entreposage, expressément mentionnés au quatrième alinéa de cette disposition, et la preuve du paiement de la valeur transactionnelle déclarée, un contrat ou un document équivalent stipulant le prix auquel le lot importé a été acheté par lui.
78 Il importe de rappeler que, conformément au libellé clair de l’article 75, paragraphe 5, premier, troisième et quatrième alinéas, du règlement délégué 2017/891, lorsque l’importateur choisit de déterminer la valeur en douane du lot importé sur la base de la valeur transactionnelle déclarée, il lui incombe de prouver que ledit lot a été écoulé dans des conditions telles qu’elles confirment la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union.
79 À cet égard, il convient de rappeler que, s’agissant de l’écoulement du lot, la notion de « conditions », au sens de l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué 2017/891, désigne l’ensemble des circonstances postérieures à la mise en libre pratique de marchandises dans l’Union, qui sont susceptibles de confirmer ou d’infirmer la réalité de la valeur transactionnelle déclarée, telle que celle-ci figure dans la déclaration en douane [voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2020,
X (Recouvrement de droits additionnels à l’importation), C‑160/18, EU:C:2020:190, point 37].
80 La possibilité de confirmer la réalité de la valeur transactionnelle déclarée à la lumière de l’ensemble de ces conditions répond au besoin des autorités douanières de s’assurer que, dans le cadre d’un système selon lequel plus cette valeur est élevée moins le montant des droits variables à payer par l’importateur est important, ce dernier sera empêché de déterminer la valeur en douane sur la base d’une valeur transactionnelle déclarée artificiellement majorée [voir, par analogie, arrêt du
11 mars 2020, X (Recouvrement de droits additionnels à l’importation), C‑160/18, EU:C:2020:190, points 38 à 40].
81 La preuve incombant à l’importateur vise ainsi l’ensemble des conditions afférentes au déroulement de la vente du lot importé dans l’Union, lesquelles peuvent constituer un faisceau d’indices concordants permettant de confirmer la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union [voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2020, X (Recouvrement de droits additionnels à l’importation), C‑160/18, EU:C:2020:190, point 42].
82 Certes, loin de confirmer la réalité de ces prix, une vente du lot importé à perte est de nature à faire naître des doutes sur celle-ci. En effet, une telle vente à perte, qui n’est pas, en elle-même, une pratique commerciale rentable, peut constituer un indice fort selon lequel la valeur transactionnelle déclarée a été artificiellement majorée par l’importateur afin d’éluder le droit à l’importation devant être payé ou d’en réduire le montant, notamment lorsqu’il s’agit de ventes à perte
récurrentes ou ayant lieu pendant une longue période. Toutefois, le seul constat selon lequel un importateur a revendu à perte des marchandises dans l’Union ne saurait permettre aux autorités douanières de conclure automatiquement que la valeur transactionnelle déclarée ne correspond pas à la réalité [voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2020, X (Recouvrement de droits additionnels à l’importation), C‑160/18, EU:C:2020:190, points 44 et 45].
83 Dans ces conditions, il incombe à l’importateur de démontrer non seulement que cette vente à perte s’explique par des circonstances qui n’affectent pas la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union, mais aussi que les autres conditions d’écoulement de ce lot confirment la réalité de ces prix.
84 À cet effet, l’importateur doit, conformément à l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué 2017/891, mettre à disposition des autorités douanières, en plus de la facture, tous les documents nécessaires à l’exécution des contrôles douaniers requis en ce qui concerne la vente et l’écoulement de chaque produit du lot importé, y compris les documents relatifs au transport, à l’assurance, à la manutention et à l’entreposage de ce lot.
85 Cette liste de documents n’ayant pas, ainsi qu’il ressort des termes « y compris », employés à cette disposition, un caractère exhaustif, rien n’empêche un importateur, si les documents relatifs au transport, à l’assurance, à la manutention et à l’entreposage du lot de marchandises concernées ne suffisent pas à démontrer la réalité de la valeur transactionnelle déclarée, de fournir aux autorités douanières d’autres documents liés à la vente et à l’écoulement de ce lot, tels que, notamment, un
contrat écrit conclu entre lui et l’exportateur ou tout autre document équivalent de nature à établir les éléments pertinents de la relation contractuelle, dont ceux afférents aux conditions entourant la stipulation du prix auquel le lot importé a été acheté.
86 En revanche, si les documents énumérés à l’article 75, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement délégué 2017/891 produits par l’importateur suffisent pour convaincre les autorités douanières de la réalité des prix visés à l’article 70 du code des douanes de l’Union, il ne saurait être exigé que celui-ci produise en outre un contrat écrit le liant à l’exportateur ou un document équivalent stipulant le prix auquel le lot importé a été acheté par lui.
87 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la troisième question que l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891 doit être interprété en ce sens que l’écoulement du lot de marchandises importées moyennant une vente à perte constitue un indice sérieux du caractère artificiellement élevé de la valeur transactionnelle déclarée qui n’oblige pas l’importateur à fournir aux autorités douanières, en vue de démontrer la réalité de cette valeur, outre les documents
relatifs au transport, à l’assurance, à la manutention et à l’entreposage, expressément mentionnés au quatrième alinéa de cette disposition, et la preuve du paiement de la valeur transactionnelle déclarée, un contrat ou un document équivalent stipulant le prix auquel le lot importé a été acheté par lui, lorsque les premiers documents suffisent à démontrer la réalité de la valeur transactionnelle déclarée.
Sur la quatrième question
88 Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891 doit être interprété en ce sens que, aux fins de la détermination de la valeur en douane, les autorités douanières doivent écarter la valeur transactionnelle déclarée d’un lot de marchandises importées lorsque cette valeur est nettement supérieure à la valeur forfaitaire à l’importation fixée par la Commission, que ce lot a été vendu à perte sur le territoire
douanier de l’Union et que, en dépit du fait d’avoir été invité à présenter tout document prouvant que ledit lot a été écoulé dans des conditions telles qu’elles confirment la réalité de cette valeur, l’importateur n’a pas présenté de documents suffisants à cette fin, alors même que ces autorités ne contestent pas l’authenticité de la facture émise par l’exportateur ni le paiement effectif de celle-ci par l’importateur.
89 Il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 75, paragraphe 5, premier, troisième et quatrième alinéas, du règlement délégué 2017/891 qu’il incombe à l’importateur de prouver, à la satisfaction des autorités douanières, que les conditions d’écoulement d’un lot déterminé démontrent la réalité de la valeur transactionnelle déclarée, au sens de l’article 70 du code des douanes de l’Union, de telle sorte que la garantie fournie en paiement des droits à l’importation puisse être libérée.
90 Or, il résulte de la jurisprudence de la Cour qu’une différence de prix de plus de 50 %, telle que celle constatée, en l’occurrence, entre la valeur transactionnelle déclarée d’un lot de marchandises importées et la valeur forfaitaire à l’importation fixée par la Commission est suffisante pour que l’autorité douanière éprouve des doutes quant à la réalité de cette valeur transactionnelle déclarée (voir, par analogie, arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary, C‑291/15, EU:C:2016:455, points 38
et 39). Il en va d’autant plus ainsi lorsqu’une telle différence de prix se cumule avec la vente à perte du lot concerné au client de l’importateur, une telle vente à perte n’étant pas, en elle-même, une pratique commerciale rentable, ainsi que cela a déjà été relevé au point 82 du présent arrêt.
91 Il est sans incidence, à cet égard, que l’authenticité des documents fournis par l’importateur en vue d’attester la réalité de la valeur transactionnelle déclarée ne soit pas contestée par les autorités douanières. En effet, l’authenticité de ces documents n’est pas l’élément déterminant, mais constitue un facteur parmi d’autres dont ces autorités doivent tenir compte (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary, C‑291/15, EU:C:2016:455, point 41).
92 Il en est de même du fait que l’importateur est en mesure de prouver que le prix effectivement payé par lui correspond à la valeur transactionnelle déclarée (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary, C‑291/15, EU:C:2016:455, point 44).
93 Dans ces circonstances, il incombe, en revanche, à cet importateur, ainsi qu’il ressort déjà des points 78 à 87 du présent arrêt, de fournir aux autorités douanières tout document probant de nature à démontrer que le lot de marchandises importées a été écoulé dans des conditions qui confirment la réalité de la valeur transactionnelle déclarée.
94 En l’absence de présentation de tout document de cette nature dans un délai raisonnable, les autorités douanières sont, dès lors, fondées à rejeter la valeur transactionnelle déclarée et, partant, à conserver, conformément à l’article 75, paragraphe 5, troisième alinéa, du règlement délégué 2017/891, la garantie fournie en paiement des droits à l’importation.
95 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la quatrième question que l’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891 doit être interprété en ce sens que, aux fins de la détermination de la valeur en douane, les autorités douanières doivent écarter la valeur transactionnelle déclarée d’un lot de marchandises importées lorsque cette valeur est nettement supérieure à la valeur forfaitaire à l’importation fixée par la Commission, que ce lot a été vendu à perte sur
le territoire douanier de l’Union et que, en dépit du fait d’avoir été invité à présenter tout document prouvant que ledit lot a été écoulé dans des conditions telles qu’elles confirment la réalité de cette valeur, l’importateur n’a pas présenté de documents suffisants à cette fin, alors même que ces autorités ne contestent pas l’authenticité de la facture émise par l’exportateur ni le paiement effectif de celle-ci par l’importateur.
Sur les dépens
96 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :
1) L’article 75, paragraphes 5 et 6, du règlement délégué (UE) 2017/891 de la Commission, du 13 mars 2017, complétant le règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les secteurs des fruits et légumes et des produits transformés à base de fruits et légumes ainsi que le règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les sanctions à appliquer dans ces secteurs et modifiant le règlement d’exécution (UE) no 543/2011 de la
Commission,
doit être interprété en ce sens que :
– il s’oppose à ce qu’un importateur, qui n’a pas choisi, dans les délais prévus par ces dispositions, de déterminer la valeur en douane du lot importé conformément à l’article 74, paragraphe 2, sous c), du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union, mais a, au contraire, déterminé cette valeur conformément à l’article 70 de ce règlement, puisse valablement s’appuyer, au soutien de son recours juridictionnel
contre une décision des autorités douanières fixant la dette douanière, sur un calcul de la valeur en douane effectué conformément à l’article 74, paragraphe 2, sous c), du règlement no 952/2013, afin de prouver, en invoquant l’article 134, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution (UE) 2015/2447 de la Commission, du 24 novembre 2015, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement no 952/2013, la réalité des prix visés à l’article 70 du
règlement no 952/2013 ;
– il s’oppose à ce que, saisie d’un recours contre une décision d’une autorité douanière fixant la dette douanière, une autorité judiciaire puisse soulever, d’office et pour la première fois dans le cadre du litige pendant devant elle, la question de savoir si l’importateur et l’exportateur sont liés, au sens de l’article 70, paragraphe 3, sous d), du règlement no 952/2013, et, dans l’affirmative, si les éventuels liens existant entre eux ont influencé ou non le prix effectivement payé ou à
payer, au sens de cette dernière disposition, alors que le contrôle douanier effectué par l’autorité douanière n’a pas porté sur l’existence de tels liens, ladite autorité ayant écarté la valeur transactionnelle déclarée pour des motifs différents, portant sur les conditions d’écoulement du lot concerné sur le marché de l’Union européenne.
2) L’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891
doit être interprété en ce sens que :
l’écoulement du lot de marchandises importées moyennant une vente à perte constitue un indice sérieux du caractère artificiellement élevé de la valeur transactionnelle déclarée qui n’oblige pas l’importateur à fournir aux autorités douanières, en vue de démontrer la réalité de cette valeur, outre les documents relatifs au transport, à l’assurance, à la manutention et à l’entreposage, expressément mentionnés au quatrième alinéa de cette disposition, et la preuve du paiement de la valeur
transactionnelle déclarée, un contrat ou un document équivalent stipulant le prix auquel le lot importé a été acheté par lui, lorsque les premiers documents suffisent à démontrer la réalité de la valeur transactionnelle déclarée.
3) L’article 75, paragraphe 5, du règlement délégué 2017/891
doit être interprété en ce sens que :
aux fins de la détermination de la valeur en douane, les autorités douanières doivent écarter la valeur transactionnelle déclarée d’un lot de marchandises importées lorsque cette valeur est nettement supérieure à la valeur forfaitaire à l’importation fixée par la Commission européenne, que ce lot a été vendu à perte sur le territoire douanier de l’Union européenne et que, en dépit du fait d’avoir été invité à présenter tout document prouvant que ledit lot a été écoulé dans des conditions telles
qu’elles confirment la réalité de cette valeur, l’importateur n’a pas présenté de documents suffisants à cette fin, alors même que ces autorités ne contestent pas l’authenticité de la facture émise par l’exportateur ni le paiement effectif de celle-ci par l’importateur.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : le bulgare.