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19/05/2022 | CJUE | N°C-635/20

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. A. M. Collins, présentées le 19 mai 2022., Commission européenne contre République italienne et Royaume d'Espagne., 19/05/2022, C-635/20


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ANTHONY M. COLLINS

présentées le 19 mai 2022 ( 1 )

Affaire C‑635/20 P

Commission européenne

contre

République italienne,

Royaume d’Espagne

« Pourvoi – Régime linguistique – Avis de concours généraux pour le recrutement d’enquêteurs et de chefs d’équipe – Connaissances linguistiques – Limitation du choix de la deuxième langue de concours à l’allemand, à l’anglais ou au français – Règlement no 1 – Statut des fonctionnaires 

Discrimination fondée sur la langue – Justification – Intérêt du service – Nécessité que le personnel nouvellement recruté soit immédiatement opérationn...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ANTHONY M. COLLINS

présentées le 19 mai 2022 ( 1 )

Affaire C‑635/20 P

Commission européenne

contre

République italienne,

Royaume d’Espagne

« Pourvoi – Régime linguistique – Avis de concours généraux pour le recrutement d’enquêteurs et de chefs d’équipe – Connaissances linguistiques – Limitation du choix de la deuxième langue de concours à l’allemand, à l’anglais ou au français – Règlement no 1 – Statut des fonctionnaires – Discrimination fondée sur la langue – Justification – Intérêt du service – Nécessité que le personnel nouvellement recruté soit immédiatement opérationnel »

I. Introduction

1. Les langues constituent un élément essentiel de l’identité culturelle et politique des citoyens de l’Union et tant le traité sur l’Union européenne que la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne consacrent le respect de la diversité linguistique de l’Union ( 2 ). Ce respect trouve sa concrétisation dans le choix des 24 langues officielles de l’Union comme langues de travail de ses institutions ( 3 ).

2. Les langues facilitent la communication entre les personnes et leur permettent ainsi de travailler ensemble. Comme, en l’état actuel des choses, l’utilisation simultanée des 24 langues officielles compromettrait gravement cette communication et cette collaboration, on peut comprendre que les institutions de l’Union cherchent à recruter des fonctionnaires ayant une connaissance professionnelle d’au moins une langue véhiculaire en plus de leur langue maternelle. La liste des langues dont on peut
considérer qu’elles ont bénéficié, à certains moments de l’histoire européenne, du statut de langue véhiculaire sur l’ensemble, ou sur de larges parts, du continent, est longue. Une langue peut être perçue comme étant véhiculaire dans un contexte politique et économique particulier qui ne perdure pas au fil du temps ; il est toutefois indéniable qu’une langue qui est perçue comme étant véhiculaire voit son statut renforcé.

3. Dès lors que l’Union met l’ensemble de ses langues officielles sur un pied d’égalité et que le choix d’une langue comme langue véhiculaire à une fin donnée confère un avantage indiscutable aux candidats qui la maîtrisent, ce choix doit être justifié par des raisons objectives et raisonnables. Dans sa jurisprudence, la Cour reconnaît que les besoins du service constituent une telle justification, moyennant le respect de deux conditions. La justification avancée doit se rapporter aux fonctions que
les personnes recrutées seront appelées à exercer. Les éléments de preuve invoqués pour justifier la restriction envisagée doivent être exacts, fiables et cohérents ( 4 ).

4. Dans la présente affaire, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 9 septembre 2020, Espagne et Italie/Commission (T‑401/16, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2020:409) par lequel le Tribunal a annulé un avis de concours général pour le recrutement d’administrateurs. Le concours EPSO/AD/323/16 concerne le recrutement d’« [e]nquêteurs (AD 7) dans les domaines suivants : 1 – Enquêteurs : dépenses de l’UE, lutte contre la
corruption – 2 – Enquêteurs : douanes et commerce, tabac et contrefaçons » tandis que le concours EPSO/AD/324/16 porte sur le recrutement d’« [e]nquêteurs (AD 9) : chefs d’équipe » ( 5 ). En l’espèce, l’avis de concours litigieux ( 6 ) précise que les candidats doivent remplir les conditions linguistiques spécifiques suivantes :

– Langue 1 : niveau C1 au minimum dans l’une des 24 langues officielles de l’Union européenne ;

– Langue 2 : niveau B2 au minimum en allemand, en anglais ou en français (cette langue doit obligatoirement être différente de la langue 1) ( 7 ).

5. L’avis de concours litigieux identifie ensuite spécifiquement un niveau élevé de connaissance de la langue anglaise comme étant nécessaire pour pouvoir remplir les fonctions pertinentes :

« Pour être recruté dans le cadre de ces deux concours, une bonne compréhension de l’anglais (à l’écrit et à l’oral) est exigée. L’anglais est la langue principalement utilisée par les enquêteurs travaillant dans le domaine de la lutte contre la corruption et/ou de la délinquance financière dans un contexte international. Par conséquent, une bonne maîtrise de l’anglais, tant pour des exposés et des débats que pour la rédaction de rapports, est indispensable pour garantir l’efficacité de la
coopération et des échanges d’informations avec les autorités nationales des États membres et des pays tiers. »

6. L’arrêt attaqué constate que la Commission n’a pas démontré que la limitation à l’allemand, à l’anglais et au français du choix, par les candidats, de la deuxième langue est objectivement justifiée et proportionnée à l’objectif primordial escompté, qui consiste à recruter des administrateurs qui seraient immédiatement opérationnels. La Commission n’a pas non plus démontré que la limitation linguistique est justifiée par des motifs tirés des contraintes budgétaires et opérationnelles et/ou de la
nature de la procédure de sélection ( 8 ). Dans son pourvoi, la Commission fait valoir que la charge que le Tribunal lui impose afin de justifier la limitation linguistique est excessivement lourde. Elle conteste également l’appréciation faite par le Tribunal des éléments de preuve qu’elle a produits à l’appui de cette limitation.

II. Le cadre juridique

A.   Le règlement no 1/58

7. En adoptant le règlement no 1/58, le Conseil a exercé les compétences qui lui sont conférées par ce qui est actuellement l’article 342 TFUE afin de fixer, notamment, le régime linguistique des institutions de l’Union et en leur sein. Dans sa version actuellement en vigueur, il prévoit, en ses parties pertinentes :

« Article premier

Les langues officielles et les langues de travail des institutions de l’Union sont l’allemand, l’anglais, le bulgare, le croate, le danois, l’espagnol, l’estonien, le finnois, le français, le grec, le hongrois, l’irlandais, l’italien, le letton, le lituanien, le maltais, le néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque, le slovène, le suédois et le tchèque.

[...]

Article 6

Les institutions [de l’Union européenne] peuvent déterminer les modalités d’application de ce régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. »

B.   Le statut des fonctionnaires

8. Dans la mesure où cela peut être pertinent, l’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires ( 9 ) dispose :

« 1.   Dans l’application du présent statut est interdite toute discrimination, telle qu’une discrimination fondée sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.

[...]

6.   Dans le respect du principe de non‑discrimination et du principe de proportionnalité, toute limitation de ces principes doit être objectivement et raisonnablement justifiée et doit répondre à des objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel. [...] »

9. Le chapitre 1 du titre III du statut des fonctionnaires est intitulé « Recrutement » et comporte les articles 27 à 34. L’article 27 dispose :

« Le recrutement doit viser à assurer à l’institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutés sur une base géographique la plus large possible parmi les ressortissants des États membres de l’Union. [...] »

10. En vertu de l’article 28, sous f), du statut des fonctionnaires :

« Nul ne peut être nommé fonctionnaire :

[...] S’il ne justifie posséder une connaissance approfondie d’une des langues de l’Union et une connaissance satisfaisante d’une autre langue de l’Union dans la mesure nécessaire aux fonctions qu’il est appelé à exercer. »

11. L’annexe III du statut des fonctionnaires est intitulée « Procédure de concours ». En son article 1er, elle prévoit :

« 1.   L’avis de concours est arrêté par l’autorité investie du pouvoir de nomination, après consultation de la commission paritaire.

Il doit spécifier :

[...]

f) Éventuellement les connaissances linguistiques requises par la nature particulière des postes à pourvoir ;

[...] »

III. Les faits, la procédure au principal et les conclusions

12. Les points 1 à 15 de l’arrêt attaqué résument les faits de l’espèce ainsi que les termes de l’avis de concours litigieux.

13. La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

– annuler l’arrêt attaqué ;

– si la Cour estime que le litige est en état d’être jugé, rejeter le recours en première instance comme non fondé ;

– condamner le Royaume d’Espagne et la République italienne aux dépens de la présente procédure ainsi qu’à ceux de la procédure en première instance.

14. À l’appui de ces conclusions, la Commission invoque trois moyens.

15. Le premier moyen comporte trois branches. La première branche est tirée d’une erreur de droit et d’une erreur de motivation aux points 157 et 181 à 183 de l’arrêt attaqué.

16. La deuxième branche conteste le point 133, dernière phrase, les point 158, 164, 167, dernière phrase, ainsi que les points 180 à 183, 201, et 205 de l’arrêt attaqué. La Commission soutient que ces points lui imposent une charge excessivement lourde en ce qui concerne tant l’obligation de motivation de la limitation linguistique contenue dans l’avis de concours litigieux que l’appréciation des éléments de preuve qu’elle a produits à l’appui des motifs invoqués par EPSO.

17. Dans la troisième branche, la Commission soutient que les points 152 à 155 de l’arrêt attaqué sont entachés d’une erreur de droit en ce que la jurisprudence n’impose pas à la Commission d’identifier dans son règlement intérieur un acte juridiquement contraignant comme étant le fondement d’une limitation linguistique.

18. Le deuxième moyen de pourvoi tend à identifier six passages dans lesquels le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve produits devant lui. Le troisième moyen est tiré de l’illégalité de l’analyse par le Tribunal des langues de communication des candidats.

19. Le Royaume d’Espagne et la République italienne contestent les arguments de la Commission. Ils concluent à ce qu’il plaise à la Cour :

– rejeter le pourvoi ;

– condamner la Commission aux dépens.

20. La présente affaire a été jointe à l’affaire C‑623/20 aux fins de l’audience du 2 mars 2022, au cours de laquelle les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions écrites et orales posées par la Cour.

21. Conformément à la demande de la Cour, mes conclusions se limitent au premier moyen du pourvoi.

IV. Appréciation du premier moyen

A.   Sur la première branche

22. La Commission estime que le point 157 de l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit en ce que le Tribunal y conclut qu’il ne saurait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui ne maîtrise pas les langues allemande, anglaise ou française, ne serait pas capable de fournir immédiatement un travail utile dans une institution de l’Union. Le Tribunal aurait plutôt dû apprécier si la limitation linguistique était objectivement justifiée, dans
l’intérêt du service, par la nécessité de recruter des candidats immédiatement opérationnels. La Commission opère une distinction entre un candidat capable de « fournir immédiatement un travail utile » et un candidat « immédiatement opérationnel ». Dès lors que l’erreur commise par le Tribunal a joué un rôle essentiel dans le rejet des éléments de preuve concernant le lien existant entre l’emploi de ces trois langues par le collège des commissaires et le travail quotidien des services de la
Commission, il y a lieu d’annuler l’arrêt attaqué.

23. Le point 157 de l’arrêt attaqué est ainsi libellé :

« Plus précisément, il ne ressort pas de ces textes, ni a fortiori des autres éléments des dossiers des présentes affaires, qu’il existe un lien nécessaire entre les procédures décisionnelles de la Commission, notamment celles se déroulant au sein du collège de ses membres, et les fonctions que les lauréats des concours litigieux seront susceptibles d’exercer, à savoir les fonctions d’enquêteur et de chef d’équipe d’enquêteurs telles qu’exposées au point 113 ci-dessus. En effet, à supposer même
que les membres d’une institution déterminée utilisent exclusivement une ou certaines langues dans leurs délibérations, il ne saurait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui ne maîtrise aucune de ces langues, ne serait pas capable de fournir immédiatement un travail utile dans l’institution en question [arrêt du 15 septembre 2016, Italie/Commission, T‑353/14 et T‑17/15, EU:T:2016:495, points 121 et 122 (non publié)]. Il en va d’autant plus ainsi
que, dans les présentes affaires, il s’agit de fonctions bien spécifiques qui ne présentent, a priori, aucun lien étroit avec les travaux du collège des membres de la Commission. »

24. Je relèverai tout d’abord que l’article 1er quinquies, paragraphe 6, première phrase, du statut des fonctionnaires prévoit que toute limitation du principe de non‑discrimination doit être objectivement et raisonnablement justifiée et doit répondre à des objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel. Ensuite, conformément à la jurisprudence constante de la Cour, une différence de traitement fondée sur la langue, telle que celle résultant de la limitation
linguistique, ne peut être admise que si elle est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service ( 10 ). Les points 71 et 72 de l’arrêt attaqué expliquent cette condition et citent les points 89 et 90 de l’arrêt Commission/Italie ( 11 ), lesquels citent à leur tour le point 88 de l’arrêt Italie/Commission ( 12 ).

25. Pour apprécier si une différence de traitement est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service, il convient tout d’abord de vérifier ces besoins. En l’espèce, les dispositions générales applicables aux concours généraux publiées au Journal officiel de l’Union européenne du 27 février 2015 ( 13 ) énoncent, en leur point 1.3, en ses parties pertinentes :

« Selon le concours, il vous sera demandé d’apporter la preuve de vos connaissances des langues officielles de l’Union européenne. En règle générale, vous devrez disposer de connaissances solides (niveau C1 du CECR) dans l’une des langues officielles de l’Union européenne et de connaissances satisfaisantes (niveau B2 du CECR) dans une autre. Toutefois, l’avis de concours peut imposer des exigences plus strictes (cela est notamment le cas pour les profils de linguistes). Sauf spécification
contraire dans l’avis de concours, le choix de la seconde langue sera normalement limité à l’allemand, à l’anglais ou au français.

[...]

Dans la pratique, les institutions européennes utilisent depuis longtemps l’allemand, l’anglais et le français principalement pour la communication interne, et ce sont également ces langues qui sont le plus souvent nécessaires pour communiquer avec le monde extérieur et gérer les dossiers.

Les options en matière de seconde langue pour les concours ont été définies dans l’intérêt du service et requièrent des nouvelles recrues qu’elles soient immédiatement opérationnelles et capables de communiquer efficacement dans le cadre de leurs tâches quotidiennes, sans quoi le bon fonctionnement des institutions pourrait être gravement compromis. »

26. De plus, dans l’avis de concours litigieux, sous le titre « Puis-je poser ma candidature ? », il est indiqué que « [l]a deuxième langue choisie doit être l’allemand, l’anglais ou le français. Ces langues sont les principales langues de travail de la Commission et il est indispensable, dans l’intérêt du service, que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels et capables de communiquer efficacement dans l’une de ces langues au moins dans leur travail quotidien ». À l’annexe II de
l’avis de concours litigieux, intitulée « Justification du régime linguistique applicable aux présentes procédures de sélection », il est indiqué, au premier paragraphe, que « [l]es conditions énoncées dans la section “Puis-je poser ma candidature ?” du présent avis de concours sont conformes aux exigences principales fixées par les institutions de l’[Union] concernant les compétences, l’expérience et les connaissances spécialisées et à la nécessité que les nouveaux recrutés soient en mesure de
travailler efficacement, notamment avec les autres membres du personnel ». Au troisième paragraphe de cette annexe, il est indiqué qu’« [u]ne fois recrutés, il est essentiel que les administrateurs soient immédiatement opérationnels et puissent communiquer avec leurs collègues et la hiérarchie ». Sous le titre « Justification du choix des langues pour chaque procédure de sélection », le deuxième paragraphe indique que « [l]es nouveaux recrutés doivent être immédiatement opérationnels et capables
d’exercer les fonctions pour lesquelles ils ont été recrutés. EPSO doit donc veiller à ce que les candidats retenus possèdent une connaissance suffisante d’une combinaison de langues qui leur permettra d’exercer leurs fonctions efficacement et, en particulier, à ce qu’ils soient capables de communiquer efficacement, dans le cadre de leur travail quotidien, avec leurs nouveaux collègues qui sont déjà en service, tels que leurs pairs et leur hiérarchie ».

27. C’est pour cette raison que la description des « besoins réels du service » dans l’avis de concours litigieux inclut la nécessité de recruter des candidats qui soient immédiatement en mesure de travailler efficacement. Partant, lorsque, au point 157 de l’arrêt attaqué, le Tribunal indique qu’il ne saurait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui ne maîtrise aucune de ces langues, ne serait pas capable de fournir immédiatement un travail utile
dans l’institution en question, il fait référence aux « besoins réels du service » tels qu’ils sont décrits dans l’avis de concours litigieux.

28. Le fait que le Tribunal considère que l’exigence que les personnes nouvellement recrutées soient « immédiatement opérationnelles » constitue une raison essentielle de la limitation linguistique ( 14 ) et qu’il utilise fréquemment cette expression dans l’arrêt attaqué ( 15 ) n’implique pas que d’autres descriptions fondées sur le texte de l’avis de concours litigieux ne sont pas également pertinentes aux fins d’apprécier si les éléments de preuve disponibles démontrent que la limitation
linguistique est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service.

29. Il est en effet difficile de comprendre comment la Commission peut soutenir qu’une référence incidente dans l’arrêt attaqué à un texte figurant dans l’avis de concours litigieux afin de justifier la limitation linguistique est de nature à invalider ledit arrêt. De surcroît, il est difficile de distinguer le fonctionnaire nouvellement recruté « immédiatement opérationnel » de celui qui est « capable de fournir immédiatement un travail utile ». Alors qu’elle se fonde sur cette distinction pour
soutenir que le Tribunal a commis une erreur de droit, la Commission, dans son argumentation, n’explique pas en quoi consiste cette distinction. Lors de l’audience, elle a précisé que, selon elle, la capacité de fournir un travail utile renvoie à la capacité d’effectuer des tâches marginales sans lien avec les tâches réelles des candidats. Cette interprétation va toutefois à l’encontre du sens habituel des termes et du contexte dans lequel ceux-ci sont utilisés au point 157 de l’arrêt attaqué.

30. Il ne saurait non plus être reproché au Tribunal d’avoir cité, au point 157 de l’arrêt attaqué, un arrêt antérieur dans lequel il a utilisé la même formulation et est parvenu à une conclusion similaire, dès lors que la Cour a rejeté le pourvoi formé par la Commission contre cet arrêt ( 16 ).

31. L’autre argument principal de la Commission consiste à soutenir que le Tribunal a insuffisamment expliqué pourquoi il ne saurait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui ne maîtrise pas la langue allemande, anglaise ou française, ne serait pas capable de fournir immédiatement un travail utile au sein d’une institution de l’Union européenne. Selon moi, cet argument revient à tenter de renverser la charge de la preuve. C’est à la Commission qu’il
revient d’expliquer en quoi une différence de traitement fondée sur la langue, telle que celle qui résulte de la limitation linguistique en cause, est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service, que ceux-ci fassent référence à la nécessité que les fonctionnaires nouvellement recrutés soient « immédiatement opérationnels » ou à celle qu’ils soient « capables de fournir immédiatement un travail utile » ( 17 ).

32. Dès lors, je propose à la Cour de rejeter la première branche du premier moyen.

B.   Sur la deuxième branche

33. La Commission soutient que la charge que lui impose le Tribunal, s’agissant tant du bien-fondé des motifs de la limitation linguistique figurant dans l’avis de concours litigieux que de son appréciation des éléments de preuve que la Commission a produits à l’appui des motifs invoqués par EPSO, est déraisonnable.

1. Sur le bien-fondé des motifs de la limitation linguistique figurant dans l’avis de concours litigieux

34. La Commission a précisé lors de l’audience que, même si l’appréciation par le Tribunal du bien-fondé des motifs de limitation linguistique figurant dans l’avis de concours litigieux soulève un certain nombre de questions ( 18 ), elle ne conteste pas cette appréciation dès lors que l’arrêt attaqué annule l’avis de concours litigieux pour d’autres motifs.

35. La Commission fait néanmoins valoir que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal admet que, dès lors qu’un avis de concours est une mesure de portée générale, sa motivation peut se limiter à une description de la situation d’ensemble qui a conduit à son adoption et des objectifs généraux qu’il se propose d’atteindre. Le Tribunal parvient à la conclusion injustifiée que la formulation du motif de l’avis de concours litigieux est « vague et générale » ( 19 ). L’avis satisfait à l’exigence formulée par
la jurisprudence selon laquelle des règles limitant le choix de la deuxième langue doivent prévoir des critères clairs, objectifs et prévisibles afin que les candidats puissent savoir, suffisamment à l’avance, quelles exigences linguistiques sont requises, et ce pour pouvoir se préparer aux concours dans les meilleures conditions.

36. Au point 116 de l’arrêt attaqué, le Tribunal conclut que le motif tiré de la nécessité que les nouvelles personnes recrutées soient immédiatement opérationnelles ne saurait, compte tenu de sa formulation vague et générale et en l’absence, dans l’avis de concours litigieux, d’indications concrètes de nature à l’étayer, justifier la limitation linguistique. Le Tribunal examine ensuite si les informations et les éléments de preuve produits par la Commission concernant la nécessité que les personnes
nouvellement recrutées soient immédiatement opérationnelles justifient la limitation linguistique. Il conclut que tel n’est pas le cas ( 20 ). L’annulation de l’avis de concours litigieux est dès lors fondée sur les deux branches de l’analyse du Tribunal. Par souci d’exhaustivité, j’aborderai la critique formulée par la Commission à l’égard de la première partie de l’arrêt attaqué.

37. La Commission soutient que l’avis de concours litigieux satisfait à l’exigence selon laquelle des règles limitant le choix de la deuxième langue doivent prévoir des critères clairs, objectifs et prévisibles afin que les candidats puissent savoir, suffisamment à l’avance, quelles exigences linguistiques sont requises, et ce pour pouvoir se préparer aux concours dans les meilleures conditions.

38. Les critères de clarté, d’objectivité et de prévisibilité découlent du point 90 de l’arrêt Italie/Commission ( 21 ). Il est précisé, aux points 87 à 94 de cet arrêt, que les institutions concernées par les concours dans cette affaire n’avaient pas adopté de règles internes conformément à l’article 6 du règlement no 1/58 afin de préciser les langues officielles qui devraient être utilisées dans des cas spécifiques.

39. Le point 95 de cet arrêt énonce :

« La Commission a fait valoir, lors de l’audience, que les candidats avaient la possibilité de se préparer après la publication de l’avis de concours. Il y a lieu cependant de relever que le délai entre la publication de chaque avis de concours litigieux et la date des épreuves écrites ne permet pas nécessairement à un candidat d’acquérir les connaissances linguistiques suffisantes pour démontrer ses compétences professionnelles. Quant à la possibilité d’apprendre l’une de ces trois langues dans
la perspective de futurs concours, elle présuppose que les langues imposées par l’EPSO soient déterminables longtemps à l’avance. Or, l’absence de règles [de procédure adoptées conformément à l’article 6 du règlement no 1/58] ne garantit en aucune manière la permanence du choix des langues de concours et ne permet aucune prévisibilité en la matière » ( 22 ).

40. Les critères de clarté, d’objectivité et de prévisibilité reflètent dès lors l’exigence selon laquelle, pour obtenir un emploi au sein d’une institution, les candidats potentiels doivent être informés suffisamment à l’avance de l’exigence de connaître une ou plusieurs langues données à un niveau déterminé pouvant être apprécié objectivement. L’avis de concours litigieux indique qu’une connaissance de l’allemand, de l’anglais ou du français de niveau B2 est requise. Cette exigence semble claire
et objective. Toutefois, le nombre d’heures cumulées généralement proposé pour la préparation à l’examen du niveau B2 semble se situer dans une fourchette de 500 à 650 ( 23 ). À moins que les candidats potentiels ne soient en mesure d’atteindre ce niveau de connaissance pour une des trois langues mentionnées dans l’avis de concours litigieux entre la date de publication de celui-ci et la date à laquelle se déroulent les épreuves dans cette langue, il est peu probable que l’avis de concours
litigieux satisfasse le critère de prévisibilité évoqué au point 95 de l’arrêt Italie/Commission ( 24 ). En outre, cette exigence s’ajoute à celle selon laquelle une limitation linguistique n’est admissible que si elle est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service ( 25 ). Il est donc erroné de laisser entendre, comme semble le faire la Commission, que, dès lors qu’elle démontre que les règles limitant le choix de la deuxième langue sont claires, objectives et
prévisibles, le Tribunal est dispensé d’apprécier le bien-fondé des motifs de la limitation linguistique figurant dans l’avis de concours litigieux.

2. Sur l’appréciation des éléments de preuve

41. La Commission invoque plusieurs arguments distincts tendant à démontrer que le Tribunal a outrepassé les limites de contrôle dégagées par la jurisprudence.

42. À titre liminaire, je relèverai que la jurisprudence admet que l’article 2 du statut des fonctionnaires confère aux institutions de l’Union un large pouvoir d’appréciation et une autonomie quant à la création d’un emploi de fonctionnaire ou d’agent, quant au choix du fonctionnaire ou de l’agent aux fins de pourvoir à l’emploi créé et quant à la nature de la relation de travail ainsi établie ( 26 ).

43. Lorsqu’une décision fait l’objet d’un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE, le Tribunal a pour mission d’exercer un contrôle juridictionnel complet tant du droit que des faits faisant l’objet d’une telle procédure. En particulier, ainsi que je l’ai relevé au point 24 des présentes conclusions, la Cour considère que le juge de l’Union peut contrôler si la limitation du choix de la deuxième langue est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service.

44. Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général Bobek dans ses conclusions dans l’affaire Commission/Italie ( 27 ), présentées dans le cadre de faits et d’éléments de preuve très semblables à ceux examinés dans le cadre du présent pourvoi, la plupart des motifs invoqués à l’appui de la limitation linguistique dans l’avis de concours litigieux, de même que les éléments de preuve produits par la Commission à l’appui de cet avis, sont des considérations de fait. La large marge d’appréciation dont
jouissait l’auteur de la décision dans cette affaire incluait la question de savoir s’il souhaitait limiter le choix de la deuxième langue dans ce concours et la manière de le faire ainsi que les raisons justifiant cette limitation. Dès lors qu’EPSO motive son choix des deuxièmes langues en se référant à un ensemble de considérations de fait, le juge de l’Union est pleinement compétent pour contrôler cette motivation ainsi que les éléments de preuve produits à l’appui de celle-ci. Ce contrôle
inclut la question de savoir si les règles en matière de charge et d’administration de la preuve ont été respectées et si des critères juridiques corrects ont été appliqués lors de l’appréciation des faits et des éléments de preuve ( 28 ).

45. À la lumière de ces observations, j’examinerai les arguments invoqués par la Commission au soutien de son affirmation selon laquelle l’appréciation des éléments de preuve produits effectuée par le Tribunal lui a imposé une charge excessivement lourde.

46. S’agissant, tout d’abord, de l’argument de la Commission selon lequel « le degré de précision de la motivation d’une décision doit être proportionné aux possibilités matérielles et aux conditions techniques ou de délai dans lesquelles elle doit intervenir », je relèverai que cette affirmation découle, notamment, de la jurisprudence en matière de contrôle des concentrations d’entreprises ( 29 ). Les possibilités matérielles de rédiger une décision relative à l’effet attendu d’une concentration
sur la concurrence dans les délais imposés par le règlement sur les concentrations ( 30 ) ont sans doute une incidence sur le degré de précision de la motivation qu’elle contient. Toutefois, les circonstances sont différentes en l’espèce : il ne s’agit pas d’une évaluation ex ante ; il n’est pas nécessaire d’obtenir et de s’appuyer sur des informations détaillées concernant le marché qui sont fournies par des tiers ; aucune analyse économique complexe n’est nécessaire et aucun délai n’est
imposé. De plus, la Commission a omis de fournir au Tribunal les informations relatives aux possibilités matérielles entourant l’adoption de l’avis de concours litigieux et d’expliquer les contraintes auxquelles elle était confrontée en termes de délais et de conditions techniques, une omission qui met en cause la recevabilité même de l’argument. Compte tenu de l’ensemble de ces circonstances, cette jurisprudence ne saurait être invoquée pour étayer la thèse selon laquelle le Tribunal aurait
dépassé les limites que la jurisprudence lui impose.

47. Ensuite, la Commission critique la conclusion, formulée aux points 133, 158 et 180 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les documents produits ne démontrent pas que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues effectivement utilisées par « tous les services de la Commission dans leur travail au quotidien ». Selon la Commission, la seule question pertinente est celle de savoir si les services auxquels les candidats retenus seront affectés utilisent ces langues.

48. Cet argument ne me convainc pas. L’avis de concours litigieux précise que les lauréats seront essentiellement affectés à l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) ; il n’exclut pas que certains d’entre eux travailleront ailleurs ( 31 ). La thèse de la Commission se trouve également contredite par un autre argument qu’elle soulève, selon lequel le travail quotidien de l’institution consiste en un grand nombre d’actes préparatoires, notes, projets préliminaires et autres documents, y compris
des communications électroniques, qui constituent des outils d’analyse et de communication utilisés au sein de l’institution pour adopter des mesures reflétant la position du service concerné. Si les lauréats peuvent être affectés dans tous les services de la Commission, la question de savoir si les éléments de preuve montrent que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues effectivement utilisées par « tous les services de la Commission dans leur travail au quotidien » est pertinente.
De plus, les éléments de preuve visés aux points 133 et 158 de l’arrêt attaqué portent sur la pratique interne de la Commission en matière linguistique en général et non sur le travail ou les procédures des services spécifiques auxquels les lauréats seront affectés. Sur la base des éléments de preuve produits devant lui, le Tribunal ne pouvait apprécier que la seule question de savoir si l’allemand, l’anglais et le français sont les langues généralement utilisées au sein de la Commission.

49. La Commission critique également la conclusion, figurant au point 180 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les éléments de preuve portant spécifiquement sur les connaissances linguistiques du personnel travaillant au sein de l’OLAF ne démontrent pas que la limitation linguistique est proportionnée à la nécessité que le personnel recruté soit immédiatement opérationnel dès lors qu’il n’est pas possible d’établir, à l’aide de ces données, quelles sont les langues utilisées dans les différents
services, ou les langues qui sont indispensables à l’exercice des fonctions d’enquêteur ou de chef d’équipe ( 32 ). La Commission évoque ce point à titre d’exemple de la charge excessivement lourde que le Tribunal lui a imposée.

50. Aux points 182 à 184 de l’arrêt attaqué, le Tribunal analyse ces éléments de preuve en partant de l’idée que les connaissances linguistiques du personnel de l’OLAF indiquent que, afin d’être immédiatement opérationnelles, les nouvelles personnes recrutées devraient maîtriser ces langues. Même dans cette hypothèse, le Tribunal conclut que la restriction linguistique n’était pas justifiée. Il apparaît ainsi que le Tribunal a examiné les éléments de preuve produits devant lui par la Commission sous
tous les angles afin de vérifier s’ils étaient de nature à justifier la limitation linguistique. Dès lors, je ne vois pas comment il pourrait être affirmé que l’analyse des éléments de preuve effectuée par le Tribunal impose une charge excessivement lourde à la Commission.

51. La Commission soulève ensuite, en ce qui concerne plus particulièrement le document auquel il est fait référence dans l’arrêt attaqué comme la communication de la Commission SEC(2006) 1489 final, du 20 décembre 2006, relative à « la traduction à la Commission », un argument selon lequel, au point 164 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait apprécié de manière erronée si ce document démontre que les trois langues « procédurales » qui y sont mentionnées sont exclusivement utilisées dans les
procédures qu’il vise ( 33 ). L’appréciation des éléments de preuve à cet égard serait inexacte dès lors que la Commission n’aurait été tenue de produire des preuves qu’afin de démontrer que l’allemand, l’anglais et le français sont principalement utilisés pour la communication interne, et que ce sont également ces langues qui sont le plus souvent nécessaires pour communiquer avec le monde extérieur et gérer les dossiers, selon les termes utilisés dans l’avis de concours litigieux ( 34 ).

52. Aux points 160 à 162 de l’arrêt attaqué, le Tribunal examine la communication SEC(2006) 1489 final, du 20 décembre 2006, relative à « la traduction à la Commission ». Il conclut, au point 163, que cette communication ne présente pas de pertinence pour la solution du litige. Dans la suite de l’arrêt, il n’est plus fait référence à ce document. Les points 164 à 168 de l’arrêt attaqué analysent quant à eux un document intitulé « Exigences linguistiques en fonction de la procédure d’adoption ». Lors
de l’audience, il a été demandé à la Commission de préciser le lien entre la communication SEC(2006) 1489 final, du 20 décembre 2006, relative à « la traduction à la Commission » et l’analyse des documents auxquels les points 164 à 168 de l’arrêt attaqué font référence. Elle a répondu en indiquant que l’utilisation des termes « [e]n tout état de cause » au début du point 164 indiquerait que le Tribunal a tenu compte de ce document dans l’analyse figurant aux points 164 à 168 de l’arrêt attaqué.
Une lecture objective des passages pertinents de l’arrêt attaqué montre que cet argument de la Commission est inopérant.

53. La Commission conteste ensuite les points 181 à 183 de l’arrêt attaqué qui font état de l’avantage dont pourraient bénéficier les candidats ayant certaines connaissances linguistiques au détriment de ceux qui ne les ont pas.

54. Les points 171 à 180 de l’arrêt attaqué évaluent les données relatives aux connaissances linguistiques du personnel de l’OLAF. Les points 181 à 187 de cet arrêt tirent certaines conséquences de l’appréciation de ces éléments de preuve. Le point 181, première phrase, indique à juste titre qu’une limitation linguistique ne peut être admise que si elle est objectivement justifiée et proportionnée aux besoins réels du service. Le point 183 ajoute que, sur la base des éléments de preuve produits,
seule la connaissance de l’anglais peut être considérée comme étant un atout pour les lauréats et que ces éléments ne permettent pas d’expliquer pourquoi un candidat disposant d’une connaissance approfondie de l’italien et d’une connaissance satisfaisante de l’allemand ( 35 ) pourrait être immédiatement opérationnel, alors qu’un candidat disposant d’une connaissance approfondie de l’italien et d’une connaissance satisfaisante du néerlandais ne le pourrait pas ( 36 ).

55. Les points 181 à 183 de l’arrêt attaqué comparent ainsi des catégories de candidats ayant des connaissances linguistiques différentes pour tenter d’évaluer l’aptitude des candidats de ces différentes catégories à être immédiatement opérationnels. Je ne vois pas comment il pourrait être compris que la référence à la connaissance de certaines langues conférant un avantage impose une charge excessivement lourde à la Commission.

56. La Commission conteste également le point 181 de l’arrêt attaqué, selon lequel « il n’existe aucune raison valable de ne pas admettre également toutes les autres langues officielles ».

57. La phrase complète dont est tirée cette citation explique que sur la base des éléments de preuve produits devant le Tribunal, à savoir les données relatives aux compétences linguistiques du personnel de l’OLAF, seule la connaissance de l’anglais confère un avantage évident quant à l’aptitude des lauréats à être immédiatement opérationnels. L’avis de concours litigieux reconnaît que, sur les trois langues, seule une bonne connaissance de l’anglais est nécessaire pour exercer les fonctions
décrites. Il précise que les candidats doivent se soumettre à un test de compréhension linguistique supplémentaire en langue anglaise, éliminatoire s’ils n’obtiennent pas la note minimale requise. Au point 110 de l’arrêt attaqué, le Tribunal évoque ce test supplémentaire. Au point 111, il conclut que l’exigence d’un test linguistique en anglais démontre que, par rapport à cette langue, rien ne justifie l’inclusion de l’allemand et du français parmi les langues retenues. Le fait d’exiger
spécifiquement un certain niveau d’anglais a pour conséquence qu’un candidat germanophone ou francophone pourrait ne pas être immédiatement opérationnel, même si l’avis de concours litigieux autorise cette combinaison de langues.

58. En d’autres termes, il peut se justifier d’exiger la connaissance de l’anglais en tant que deuxième langue, mais pas d’exiger la connaissance de l’allemand, de l’anglais ou du français. Le Tribunal relève ensuite, à la fin du point 181, qu’il n’existe aucune raison valable de ne pas admettre la connaissance de l’anglais ou d’une ou de plusieurs des langues officielles, autres que le français et/ou l’allemand. Je ne peux remettre en cause cette conclusion. Rien n’indique que le Tribunal exclut
que la Commission aurait pu produire d’autres éléments de preuve qui auraient pu conforter une conclusion différente. À nouveau, je ne vois pas comment, en parvenant à une conclusion fondée sur les éléments de preuve produits devant lui, le Tribunal aurait imposé à la Commission une charge déraisonnable.

59. La Commission soutient que le Tribunal a exclu à tort les éléments de preuve relatifs à l’utilisation des langues allemande, anglaise et française dans l’Union européenne au motif qu’elle ne saurait refléter correctement les connaissances linguistiques de candidats potentiels ( 37 ). Elle se fonde sur le point 124 de l’arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie ( 38 ), pour soutenir que, sur la base des données statistiques, le Tribunal aurait dû présumer le caractère proportionné de la limitation
linguistique, et ce d’autant plus que ces données n’ont pas évolué au fil des années.

60. Le point 124 de l’arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie ( 39 ), est ainsi rédigé :

« À cet égard, s’il n’est pas exclu que l’intérêt du service puisse justifier la limitation du choix de la langue 2 du concours à un nombre restreint de langues officielles dont la connaissance est la plus répandue dans l’Union (voir, par analogie, arrêt du 9 septembre 2003, Kik/OHMI, C‑361/01 P, EU:C:2003:434, point 94), et ce même dans le cadre des concours ayant une nature générale, tel que celui visé par l’“Avis de concours général – EPSO/AD/276/14 – Administrateurs (AD 5)”, une telle
limitation doit néanmoins, eu égard aux exigences rappelées aux points 92 et 93 du présent arrêt, impérativement reposer sur des éléments objectivement vérifiables, tant par les candidats au concours que par les juridictions de l’Union, de nature à justifier les connaissances linguistiques exigées, qui doivent être proportionnées aux besoins réels du service. »

61. Je ne considère pas que cette lecture des règles juridiques oblige le Tribunal à présumer qu’une limitation linguistique est justifiée dès lors qu’elle couvre les langues dont la connaissance est la plus répandue dans l’Union européenne. Au contraire, je l’interpréterais comme une déclaration du Tribunal selon laquelle la Commission peut se fonder sur des éléments de preuve relatifs aux langues dont la connaissance est la plus répandue dans l’Union européenne pour justifier une limitation
linguistique. Une telle limitation doit cependant être fondée sur des éléments objectivement vérifiables, par les candidats et par les juridictions de l’Union, de manière à justifier le niveau de connaissance linguistique requis, qui doit être proportionné aux besoins réels du service.

62. C’est dès lors à juste titre que le Tribunal a, dans un premier temps, apprécié les éléments de preuve produits par la Commission relatifs à la diffusion de l’allemand, de l’anglais et du français en tant que langues étrangères parlées et étudiées en Europe ( 40 ). Les points 197 à 203 de l’arrêt attaqué relèvent que les éléments de preuve montrent que l’anglais est de loin la langue étrangère la plus étudiée à tous les niveaux d’éducation, suivie du français, de l’allemand, du russe et, à un
moindre degré, de l’espagnol, et que la langue étrangère la mieux connue de loin[, en Europe,] est perçue comme étant l’anglais, suivie de l’allemand, du russe, du français et de l’espagnol. D’autres éléments de preuve montrent que l’allemand est la langue la plus parlée en Europe et que l’anglais, le français et l’allemand sont les trois langues étrangères le plus souvent étudiées comme deuxième langue (respectivement 38 %, 12 % et 11 %).

63. Le Tribunal a, dans un second temps, relevé que les données statistiques en question se réfèrent à l’ensemble des citoyens de l’Union, y compris des personnes n’ayant pas atteint l’âge de la majorité, si bien qu’elles pourraient ne pas refléter correctement les connaissances linguistiques des candidats potentiels. Il en a conclu que ces données statistiques démontrent seulement que le nombre de candidats potentiels dont la situation est affectée par la limitation linguistique en cause en
l’espèce est moins important qu’il ne le serait si ce choix était limité à d’autres langues que l’allemand, l’anglais et le français mais que cette circonstance ne suffit pas en soi pour conclure que la limitation linguistique n’est pas discriminatoire.

64. L’approche du Tribunal ne saurait être critiquée à cet égard. Contrairement à ce que soutient la Commission, il n’a pas écarté les preuves statistiques parce qu’elles incluaient des citoyens de l’Union n’ayant pas encore atteint l’âge de la majorité. En réalité, le Tribunal a conclu que les éléments de preuve démontrent que la limitation linguistique fondée sur l’allemand, l’anglais et le français est susceptible d’avoir eu un effet négatif sur un nombre moindre de candidats potentiels qu’une
restriction fondée sur une autre combinaison linguistique. Rien n’indique que cette conclusion, que la Commission ne conteste d’ailleurs pas, aurait été différente si les données statistiques avaient exclu les citoyens de l’Union n’ayant pas encore atteint l’âge de la majorité.

65. Enfin, la Commission soutient que le point 159 de l’arrêt attaqué apprécie de manière erronée la communication SEC(2000) 2071/6, du 29 novembre 2000, relative à la simplification du processus décisionnel de la Commission à laquelle il est fait référence aux points 158 et 159 de l’arrêt attaqué. La Commission fait valoir que le Tribunal n’a pas retenu sa signification claire mais lui a substitué sa propre vision subjective de la manière dont le travail est organisé entre fonctionnaires.

66. Cet argument démontre que la Commission ne cherche pas tant à faire sanctionner par la Cour une dénaturation des éléments de preuve qu’à l’inviter à substituer sa propre appréciation des faits et des éléments de preuve à celle du Tribunal. Un tel argument est irrecevable dans le cadre d’un pourvoi ( 41 ).

67. C’est pourquoi les arguments de la Commission ne sauraient être invoqués pour étayer la thèse selon laquelle l’arrêt attaqué outrepasse les limites que la jurisprudence impose. Dès lors, je propose à la Cour de rejeter la deuxième branche du premier moyen.

C.   Sur la troisième branche

68. La Commission fait valoir, d’emblée, que les points 152 à 155 de l’arrêt attaqué réduisent la portée des éléments de preuve en ce qu’ils ne démontrent pas l’existence d’un acte juridiquement contraignant définissant les langues de travail de l’institution. Selon la Commission, il ne saurait être déduit ni de la jurisprudence ni de l’article 1er quinquies, paragraphe 6, du statut des fonctionnaires que seuls des actes juridiquement contraignants peuvent légitimement restreindre le choix d’une
deuxième langue. Par ailleurs, le point 11 de l’arrêt attaqué relève à juste titre que l’avis de concours litigieux fait référence à des « règles internes », à savoir des règles qui ne sont contraignantes qu’au sein des institutions. Cette description de ces règles est corroborée par les éléments de preuve produits par la Commission.

69. Au point 11 de l’arrêt attaqué, le Tribunal relève qu’il est indiqué au point 2 de l’annexe II de l’avis de concours litigieux que, pour chaque procédure de sélection, le conseil d’administration d’EPSO doit déterminer au cas par cas les langues qui doivent être utilisées pour chaque concours général, en tenant compte des « éventuelles règles internes particulières sur l’utilisation des langues au sein de l’institution ou des institutions, ou des organismes concernés ».

70. Aux points 152 et 153 de l’arrêt attaqué, le Tribunal relève que les éléments de preuve produits, décrits aux points 123 à 125 et 127 du même arrêt, ne sauraient s’analyser comme des modalités d’application édictées par la Commission au titre de l’article 6 du règlement no 1/58. La Commission reconnaît que ces éléments de preuve ne font que refléter une pratique administrative longuement établie selon laquelle les documents soumis à l’approbation du collège des commissaires doivent être
disponibles en allemand, anglais et français. Le point 154 de l’arrêt attaqué constate que rien ne prouve que le président de la Commission ou le collège des commissaires aurait formellement approuvé le « Manuel des procédures opérationnelles ». Il ressort du point 155 de l’arrêt attaqué que, dans le cadre de la présente affaire, la Commission a confirmé qu’il n’existe pas de décision interne fixant les langues de travail en son sein.

71. Aux points 157 à 159 de l’arrêt attaqué, le Tribunal examine si les documents produits par la Commission révèlent un lien entre ses procédures décisionnelles, y compris celles du collège de ses membres, et les tâches à accomplir par les lauréats. Ensuite, aux points 160 à 169 de cet arrêt, il apprécie ces éléments de preuve à la lumière d’autres documents produits par la Commission.

72. Contrairement à ce qu’affirme la Commission, l’arrêt attaqué ne rejette pas les preuves, ni n’en « réduit la portée » au motif que les éléments de preuve qu’elle a produits ne démontreraient pas l’existence d’« actes juridiquement contraignants ». Au contraire, le Tribunal examine à juste titre si la Commission avait adopté des règles internes en vertu de l’article 6 du règlement no 1/58 précisant qu’une ou plusieurs des langues officielles et les langues de travail énumérées à l’article 1er de
ce règlement doivent être utilisées dans des cas particuliers. Or, il ressort du point 155 de l’arrêt attaqué que la Commission n’a pas contesté que de telles règles n’ont pas été adoptées.

73. Parvenu à cette conclusion intermédiaire non contestée, le Tribunal poursuit son appréciation approfondie des éléments de preuve produits par la Commission concernant ses procédures internes.

74. Par conséquent, je propose à la Cour de rejeter la troisième branche du premier moyen du pourvoi en ce qu’elle semble fondée sur une lecture erronée et sélective de l’arrêt attaqué.

V. Conclusion

75. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de rejeter le premier moyen du pourvoi.

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( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Article 3 TUE et article 22 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il convient également de tenir compte des quelque 60 langues régionales et minoritaires parlées sur le territoire de l’Union.

( 3 ) Article 1er du règlement no 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), tel que modifié par le règlement (UE) no 517/2013 du Conseil, du 13 mai 2013 (JO 2013, L 158, p. 1) (ci-après le « règlement no 1/58 »).

( 4 ) Voir, notamment, arrêts du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752) ; du 26 mars 2019, Commission/Italie (C‑621/16 P, EU:C:2019:251) ; du 26 mars 2019, Espagne/Parlement (C‑377/16, EU:C:2019:249) ; du 15 septembre 2016, Italie/Commission (T‑353/14 et T‑17/15, EU:T:2016:495) ; du 14 décembre 2017, PB/Commission (T‑609/16, EU:T:2017:910) ; du 3 mars 2021, Barata/Parlement (T‑723/18, EU:T:2021:113), et du 9 juin 2021, Calhau Correia de Paiva/Commission (T‑202/17,
EU:T:2021:323).

( 5 ) EPSO/AD/323/16 et EPSO/AD/324/16, JO 2016, C 187 A, p. 1, ci-après l’« avis de concours litigieux ».

( 6 ) L’article 2 de la décision 2002/620/CE du Parlement européen, du Conseil, de la Commission, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Comité économique et social, du Comité des régions et du médiateur, du 25 juillet 2002, portant création de l’Office de sélection du personnel des Communautés européennes (JO 2002, L 197, p. 53) a transféré les pouvoirs de sélection visés à l’article 30, premier alinéa, du statut et à l’annexe III du statut à l’Office européen de sélection du personnel
(EPSO). Conformément à l’article 4 de cette décision, tout recours relatif à l’exercice des pouvoirs dévolus à EPSO est dirigé contre la Commission.

( 7 ) Le cadre européen commun de référence pour les langues, conçu par le Conseil de l’Europe (Recommandation du Comité des ministres du Conseil de l’Europe no R (98) 6, du 17 mars 1998, ci-après le « CECR ») décrit six niveaux de compétence linguistique, allant de A1 à C2. Un de ses tableaux présente un aperçu des niveaux communs de compétences. Le niveau C1, qui correspond au niveau de connaissance d’un « utilisateur expérimenté », est décrit de la manière suivante : « Peut comprendre une grande
gamme de textes longs et exigeants, ainsi que saisir des significations implicites. Peut s’exprimer spontanément et couramment sans trop apparemment devoir chercher ses mots. Peut utiliser la langue de façon efficace et souple dans sa vie sociale, professionnelle ou académique. Peut s’exprimer sur des sujets complexes de façon claire et bien structurée et manifester son contrôle des outils d’organisation, d’articulation et de cohésion du discours. » Le niveau B2, qui correspond au niveau de
connaissance d’un « utilisateur indépendant », est présenté comme suit : « Peut comprendre le contenu essentiel de sujets concrets ou abstraits dans un texte complexe, y compris une discussion technique dans sa spécialité. Peut communiquer avec un degré de spontanéité et d’aisance tel qu’une conversation avec un locuteur natif ne comportant de tension ni pour l’un ni pour l’autre. Peut s’exprimer de façon claire et détaillée sur une grande gamme de sujets, émettre un avis sur un sujet d’actualité et
exposer les avantages et les inconvénients de différentes possibilités. »

( 8 ) Arrêt attaqué, point 205.

( 9 ) Règlement (CEE, Euratom, CECA) no 259/68 du Conseil, du 29 février 1968, fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, et instituant des mesures particulières temporairement applicables aux fonctionnaires de la Commission (JO 1968, L 56, p. 1), tel que modifié (ci-après le « statut des fonctionnaires »).

( 10 ) Voir également arrêt attaqué, point 96 et jurisprudence citée.

( 11 ) Arrêt du 26 mars 2019 (C‑621/16 P, EU:C:2019:251).

( 12 ) Arrêt du 27 novembre 2012 (C‑566/10 P, EU:C:2012:752).

( 13 ) JO 2015, C 70 A, p. 1.

( 14 ) Arrêt attaqué, point 106.

( 15 ) On retrouve au moins 30 occurrences des termes « immédiatement opérationnel[le]s » dans l’arrêt attaqué, y compris dans les points consacrés à l’analyse des éléments de preuve (points 117 et 118) et dans les points exposant les conclusions intermédiaires de l’appréciation des éléments de preuve (points 114, 169, 196 et 205).

( 16 ) Arrêt du 15 septembre 2016, Italie/Commission (T‑353/14 et T‑17/15, EU:T:2016:495, points 121 et 122). La Cour a rejeté le pourvoi formé par la Commission dans l’arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie (C‑621/16 P, EU:C:2019:251).

( 17 ) Voir, à cet égard, arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie (C‑621/16 P, EU:C:2019:251, point 93 et jurisprudence citée).

( 18 ) Arrêt attaqué, points 54 à 117.

( 19 ) Arrêt attaqué, point 116.

( 20 ) Voir, notamment, arrêt attaqué, point 205.

( 21 ) Arrêt du 27 novembre 2012 (C‑566/10 P, EU:C:2012:752).

( 22 ) Voir également conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Commission/Italie, C‑621/16 P (EU:C:2018:611, point 175), et arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 67).

( 23 ) Conclusions de l’avocate générale Sharpston dans l’affaire Espagne/Parlement (C‑377/16, EU:C:2018:610, point 46).

( 24 ) Arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752). Voir également arrêt du 15 septembre 2016, Italie/Commission (T‑353/14 et T‑17/15, EU:T:2016:495, points 50 et 51), confirmé par arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie (C‑621/16 P, EU:C:2019:251).

( 25 ) Arrêt du 26 mars 2019, Commission/Italie (C‑621/16 P, EU:C:2019:251, point 91).

( 26 ) Voir, à cet égard, arrêts du 8 septembre 2005, AB (C‑288/04, EU:C:2005:526, points 26 et 28), et du 26 mars 2019, Commission/Italie (C‑621/16 P, EU:C:2019:251, point 88 et jurisprudence citée).

( 27 ) C‑621/16 P, EU:C:2018:611, points 105, 108 et 112.

( 28 ) Arrêt du 2 mars 2021, Commission/Italie e.a. (C‑425/19 P, EU:C:2021:154, points 52 et 53, et jurisprudence citée).

( 29 ) Arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 167 et jurisprudence citée).

( 30 ) Règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (JO 2003, L 1, p. 1).

( 31 ) Au point 1 de l’avis de concours litigieux, il est indiqué que le concours est organisé en vue de la constitution de listes de réserve, à partir desquelles la Commission, essentiellement l’OLAF recrutera de nouveaux membres de la fonction publique en tant qu’« administrateurs » (groupe de fonctions AD). Au point 120 de l’arrêt attaqué, le Tribunal relève que deux des 40 lauréats du concours EPSO/AD/323/16 ont été recrutés par d’autres employeurs, à savoir le Contrôleur européen de la
protection des données et la Cour des comptes européenne. Des 50 lauréats du concours EPSO/AD/324/16, aucun n’a été recruté par une autre institution de l’Union.

( 32 ) Arrêt attaqué, points 175 à 180.

( 33 ) Arrêt attaqué, point 164.

( 34 ) Voir arrêt attaqué, point 3, troisième alinéa, qui cite l’avis de concours litigieux.

( 35 ) Je comprends qu’il est fait référence au niveau de connaissance B2.

( 36 ) Il ressort des données visées aux points 175 à 178 de l’arrêt attaqué relatives aux première et deuxième langues qu’environ 72 % du personnel de l’OLAF a des connaissances en anglais, 42 % en français, 15 % en allemand, 11 % en italien, 10 % en néerlandais, 8 % en espagnol, et 7 % en polonais. Si l’on inclut la troisième langue, les pourcentages sont les suivants : 91 % en anglais, 74 % en français, 24 % en allemand, 18 % en espagnol, 15 % en néerlandais, 14 % en italien et 7 % en polonais.
La conclusion qui s’impose est que le fait de communiquer dans une langue autre que l’anglais exclut une proportion importante de collègues des procédures de travail pertinentes. De 25 à 60 % des collègues pourraient ne pas comprendre la communication si le français est utilisé, 76 % d’entre eux pourraient ne pas comprendre la communication formulée en allemand.

( 37 ) Arrêt attaqué, point 201.

( 38 ) C‑621/16 P, EU:C:2019:251.

( 39 ) C‑621/16 P, EU:C:2019:251.

( 40 ) Arrêt attaqué, points 197 à 203.

( 41 ) Voir, notamment, arrêts du 21 septembre 2006, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission (C‑105/04 P, EU:C:2006:592, points 69 et 70, et jurisprudence citée), et du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission (C‑113/04 P, EU:C:2006:593, points 82 et 83, et jurisprudence citée).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-635/20
Date de la décision : 19/05/2022
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé, Pourvoi - irrecevable
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi – Régime linguistique – Avis de concours généraux pour le recrutement d’administrateurs chargés de fonctions d’enquêteurs et de chefs d’équipes d’enquêteurs – Connaissances linguistiques – Limitation du choix de la deuxième langue des concours aux langues allemande, anglaise et française – Langue de communication avec l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) – Règlement no 1 – Statut des fonctionnaires – Article 1er quinquies, paragraphe 1 – Différence de traitement fondée sur la langue – Justification – Intérêt du service – Exigence de recrutement d’administrateurs “immédiatement opérationnels” – Contrôle juridictionnel – Niveau de preuve exigé.

Dispositions institutionnelles

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Commission européenne
Défendeurs : République italienne et Royaume d'Espagne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Collins

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2022:405

Source

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