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01/07/2021 | CJUE | N°C-277/20

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. J. Richard de la Tour, présentées le 1er juillet 2021., Procédure engagée par UM., 01/07/2021, C-277/20


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN RICHARD DE LA TOUR

présentées le 1er juillet 2021 ( 1 )

Affaire C‑277/20

UM

en présence de

HW en tant que administrateur de succession de ZL

[demande de décision préjudicielle formée par l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche)]

« Renvoi préjudiciel – Règlement (UE) no 650/2012 – Champ d’application – Actes de disposition à cause de mort – Notion de “pacte successoral” – Donation entre vifs – Choix de la loi applicable

à la succession – Dispositions transitoires – Article 83, paragraphes 2 à 4 »

I. Introduction

1. La demande de dé...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN RICHARD DE LA TOUR

présentées le 1er juillet 2021 ( 1 )

Affaire C‑277/20

UM

en présence de

HW en tant que administrateur de succession de ZL

[demande de décision préjudicielle formée par l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche)]

« Renvoi préjudiciel – Règlement (UE) no 650/2012 – Champ d’application – Actes de disposition à cause de mort – Notion de “pacte successoral” – Donation entre vifs – Choix de la loi applicable à la succession – Dispositions transitoires – Article 83, paragraphes 2 à 4 »

I. Introduction

1. La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, sous b), ainsi que de l’article 83, paragraphe 2, du règlement (UE) no 650/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen ( 2 ).

2. Cette demande a été présentée dans le cadre de la contestation par UM, ressortissant allemand, du rejet par les autorités autrichiennes de sa requête aux fins d’inscription au registre foncier du droit de propriété d’un bien immobilier situé en Autriche, qu’il entend faire valoir, pour les besoins d’une procédure de succession ouverte en Allemagne, en se fondant sur un acte de donation à cause de mort.

3. Dès lors, la Cour est invitée à se prononcer, selon la qualification d’un tel acte entre vifs qui est susceptible d’être retenue, sur le champ d’application du règlement no 650/2012 ainsi que sur l’interprétation de ses dispositions transitoires.

4. Je vais exposer les raisons qui me conduisent à considérer qu’un acte de donation à cause de mort peut être qualifié de « pacte successoral », au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 650/2012, et les conséquences qui devraient en être tirées quant à la validité du choix de la loi applicable dont dépend la compétence de la juridiction saisie.

II. Le cadre juridique

A.   Le règlement no 650/2012

5. Les considérants 9, 11, 14, 37 et 49 du règlement no 650/2012 énoncent :

« (9) Le champ d’application du présent règlement devrait s’étendre à tous les aspects de droit civil d’une succession à cause de mort, à savoir tout mode de transfert de biens, de droits et d’obligations à cause de mort, qu’il s’agisse d’un acte volontaire de transfert en vertu d’une disposition à cause de mort ou d’un transfert dans le cadre d’une succession ab intestat.

[...]

(11) Le présent règlement ne devrait pas s’appliquer aux domaines du droit civil autres que les successions. Pour des raisons de clarté, le champ d’application du présent règlement devrait explicitement exclure une série de questions dont il pourrait être estimé qu’elles ont un lien avec les questions de succession.

[...]

(14) Les droits et biens créés ou transférés autrement que par succession, par exemple au moyen de libéralités, devraient également être exclus du champ d’application du présent règlement. Néanmoins, c’est la loi désignée par le présent règlement comme étant la loi applicable à la succession qui précise s’il convient que les libéralités ou autres formes de dispositions entre vifs qui donnent naissance à un droit réel avant le décès fassent l’objet d’un rapport ou d’une réduction aux fins du
calcul des parts des bénéficiaires conformément à la loi applicable à la succession.

[...]

(37) Afin de permettre aux citoyens de profiter, en toute sécurité juridique, des avantages offerts par le marché intérieur, le présent règlement devrait leur permettre de connaître à l’avance la loi applicable à leur succession. Des règles harmonisées de conflits de lois devraient être introduites pour éviter des résultats contradictoires. La règle principale devrait assurer que la succession est régie par une loi prévisible, avec laquelle elle présente des liens étroits. Pour des raisons de
sécurité juridique et afin d’éviter le morcellement de la succession, cette loi devrait régir l’ensemble de la succession, c’est-à-dire l’intégralité du patrimoine composant la succession, quelle que soit la nature des biens et indépendamment du fait que ceux-ci sont situés dans un autre État membre ou dans un État tiers.

[...]

(49) Un pacte successoral est un type de disposition à cause de mort dont la recevabilité et l’acceptation varient d’un État membre à l’autre. En vue de faciliter l’acceptation dans les États membres de droits successoraux acquis du fait d’un pacte successoral, il convient que le présent règlement détermine quelle loi doit régir la recevabilité de tels pactes, leur validité au fond et leurs effets contraignants entre les parties, y compris les conditions de leur dissolution. »

6. L’article 1er du règlement no 650/2012, intitulé « Champ d’application », dispose, à son paragraphe 1 et à son paragraphe 2, sous g):

« 1.   Le présent règlement s’applique aux successions à cause de mort [...]

2.   Sont exclus du champ d’application du présent règlement :

[...]

g) les droits et biens créés ou transférés autrement que par succession, par exemple au moyen de libéralités, de la propriété conjointe avec réversibilité au profit du survivant, de plans de retraite, de contrats d’assurance et d’arrangements analogues, sans préjudice de l’article 23, paragraphe 2, [sous] i) ; »

7. L’article 3 du règlement no 650/2012, intitulé « Définitions », prévoit, à son paragraphe 1, sous a), b) et d) :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

a) “succession”, la succession à cause de mort, ce terme recouvrant toute forme de transfert de biens, de droits et d’obligations à cause de mort, qu’il s’agisse d’un acte volontaire de transfert en vertu d’une disposition à cause de mort ou d’un transfert dans le cadre d’une succession ab intestat ;

b) “pacte successoral”, un accord, y compris un accord résultant de testaments mutuels, qui confère, modifie ou retire, avec ou sans contre-prestation, des droits dans la succession future d’une ou de plusieurs personnes parties au pacte ;

[...]

d) “disposition à cause de mort”, un testament, un testament conjonctif ou un pacte successoral ; »

8. Aux termes de l’article 21 du règlement no 650/2012, intitulé « Règle générale », inséré au sein du chapitre III, relatif à la « [l]oi applicable » :

« 1.   Sauf disposition contraire du présent règlement, la loi applicable à l’ensemble d’une succession est celle de l’État dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès.

2.   Lorsque, à titre exceptionnel, il résulte de l’ensemble des circonstances de la cause que, au moment de son décès, le défunt présentait des liens manifestement plus étroits avec un État autre que celui dont la loi serait applicable en vertu du paragraphe 1, la loi applicable à la succession est celle de cet autre État. »

9. L’article 22, paragraphes 1 et 2, du règlement no 650/2012, intitulé « Choix de loi », est libellé comme suit :

« 1.   Une personne peut choisir comme loi régissant l’ensemble de sa succession la loi de l’État dont elle possède la nationalité au moment où elle fait ce choix ou au moment de son décès.

[...]

2.   Le choix est formulé de manière expresse dans une déclaration revêtant la forme d’une disposition à cause de mort ou résulte des termes d’une telle disposition. »

10. L’article 23, de ce règlement, intitulé « Portée de la loi applicable », dispose, à son paragraphe 1 et à son paragraphe 2, sous i) :

« 1.   La loi désignée en vertu de l’article 21 ou 22 régit l’ensemble d’une succession.

2.   Cette loi régit notamment :

[...]

i) le rapport et la réduction des libéralités lors du calcul des parts des différents bénéficiaires ; »

11. L’article 25 dudit règlement, intitulé « Pacte successoral », énonce, à ses paragraphes 1 et 3 :

« 1.   Un pacte successoral qui concerne la succession d’une seule personne est régi, quant à sa recevabilité, sa validité au fond et ses effets contraignants entre les parties, y compris en ce qui concerne les conditions de sa dissolution, par la loi qui, en vertu du présent règlement, aurait été applicable à la succession de cette personne si elle était décédée le jour où le pacte a été conclu.

[...]

3.   Nonobstant les paragraphes 1 et 2, les parties peuvent choisir comme loi régissant leur pacte successoral, quant à sa recevabilité, sa validité au fond et ses effets contraignants entre les parties, y compris en ce qui concerne les conditions de sa dissolution, la loi que la personne ou l’une des personnes dont la succession est concernée aurait pu choisir en vertu de l’article 22, selon les conditions qui y sont fixées. »

12. L’article 83 du règlement no 650/2012, intitulé « Dispositions transitoires », prévoit, à ses paragraphes 2 à 4 :

« 2.   Lorsque le défunt avait, avant le 17 août 2015, choisi la loi applicable à sa succession, ce choix est valable s’il remplit les conditions fixées au chapitre III ou s’il est valable en application des règles de droit international privé qui étaient en vigueur, au moment où le choix a été fait, dans l’État dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle ou dans tout État dont il possédait la nationalité.

3.   Une disposition à cause de mort prise avant le 17 août 2015 est recevable et valable quant au fond et à la forme si elle remplit les conditions prévues au chapitre III ou si elle est recevable et valable sur le fond et en la forme en application des règles de droit international privé qui étaient en vigueur, au moment où la disposition a été prise, dans l’État dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle, dans tout État dont il possédait la nationalité ou dans l’État membre de
l’autorité chargée de régler la succession.

4.   Si une disposition à cause de mort, prise avant le 17 août 2015, est rédigée conformément à la loi que le défunt aurait pu choisir en vertu du présent règlement, cette loi est réputée avoir été choisie comme loi applicable à la succession. »

B.   Le droit autrichien

13. L’article 956 de l’Allgemeines Bürgerliches Gesetzbuch (code civil), dans la version à appliquer en l’espèce avant l’entrée en vigueur de l’Erbrechts-Änderungsgesetz 2015 (loi modifiant le droit de la succession de 2015) ( 3 ), du 30 juillet 2015, était rédigé comme suit :

« Une donation, qui ne doit intervenir qu’après le décès du donateur, est valable en tant que legs dès lors que les formalités prescrites ont été respectées. Elle n’est considérée comme un contrat que si le donataire l’a acceptée, que le donateur a expressément exprimé renoncer à la révocation et qu’un acte écrit à cet effet a été remis au donataire. »

14. L’article 1er, paragraphe 1, sous d), de la Notariatsaktsgesetz (loi sur les actes notariés) ( 4 ), du 25 juillet 1871, dans sa version applicable au litige au principal, lie la validité d’un acte de donation sans remise effective à l’établissement d’un acte notarié.

15. L’article 26 de l’Allgemeines Grundbuchsgesetz (loi sur le livre foncier) ( 5 ), du 2 février 1955, dans sa version applicable au litige au principal, prévoit :

« (1)   Les inscriptions et les réserves ne peuvent être autorisées que sur la base d’attestations établies sous la forme prescrites pour leur validité.

(2)   Ces attestations doivent, lorsqu’il en va de l’acquisition ou de la modification d’un droit réel, contenir une base juridique valable. »

16. Aux termes de l’article 2, point 3, de la Rechtspflegergesetz (loi relative aux auxiliaires de justice) ( 6 ), du 12 décembre 1985, dans sa version applicable au litige au principal :

« Un officier de justice peut être désigné auxiliaire de justice pour un ou plusieurs des domaines d’activité suivants :

[...]

3.   Affaires relatives au livre foncier et au registre maritime. »

17. L’article 16, paragraphe 2, point 6, de cette loi prévoit :

« Sont toujours réservées au juge :

[...]

6.   Les décisions dans lesquelles un droit étranger doit être appliqué. »

III. Le litige au principal et les questions préjudicielles

18. ZL, ressortissant allemand ayant sa résidence habituelle en Allemagne au moment de son décès le 13 mai 2018, avait conclu, le 22 juillet 1975, avec son fils, UM, ressortissant allemand, et l’épouse de celui-ci, XU, ressortissante autrichienne, un contrat prévoyant la remise, au moment de son décès en faveur de ces derniers et pour moitié chacun, d’un bien immobilier situé en Autriche. Lors de la conclusion de ce contrat, toutes les parties avaient leur résidence habituelle en Allemagne.

19. Ce contrat prévoyait l’acquisition par ZL d’un bien immobilier, sous les conditions suivantes :

« [...]

b) ZL s’engage à construire sur ce bien immobilier dont il aura alors la propriété une maison bi-familiale dans un délai de dix ans à compter de la conclusion du contrat. Cet engagement est transmis à ses héritiers s’il ne le remplit pas de son vivant [...]

c) ZL remet le bien immobilier cité au moment de son décès à XU et UM chacun pour moitié, y compris tout ce qui au moment de son décès est lié au bien immobilier, en particulier la maison qui s’y trouve [...] La remise a lieu au moment du décès de ZL, mais pas avant l’achèvement de la construction de la maison. La remise est soumise à la condition que, au moment du décès de ZL, [UM et XU] ne soient pas divorcés et que XU survive à ZL. Si cette condition n’est pas remplie, la remise n’est réputée
avoir lieu au moment du décès qu’au seul bénéfice de UM ; le droit découlant du contrat à conclure peut être transmis par succession dès avant le décès de ZL.

d) Pour autant que des contreparties ne sont pas convenues pour cette remise, celle‑ci a lieu au moment du décès à titre de donation ainsi que ZL le déclare expressément. Il renonce à la révocation du contrat.

e) En tant que contrepartie partielle de la remise, [UM et XU] sont tenus de reconnaître à [...] la mère de XU, un droit d’habitation dans la maison à construire [...]

f) Le droit autrichien s’applique aux rapports juridiques découlant des contrats à conclure [...]

g) ZL s’engage à ne pas vendre ou grever, sans l’accord de UM et de XU, le bien immobilier dont il a la propriété afin de garantir leurs droits découlant du contrat de cession au moment du décès [...]

h) ZL autorise l’inscription dans le livre foncier pour le numéro de registre de la commune cadastrale [...] à créer pour le terrain objet du contrat

aa) [...]

bb) en vertu du présent contrat et de l’acte officiel de décès de ZL, du droit de propriété à chaque fois pour moitié, sur demande conjointe, pour les deux cessionnaires, [UM et XU], ou du droit de propriété uniquement pour UM sur sa demande et sur présentation de la preuve de satisfaction de la condition pour la remise du bien immobilier à sa seule personne.

[...] »

20. Lors du décès de ZL, XU, divorcée de UM, était décédée depuis le 5 novembre 2005 et aucune maison n’avait été construite.

21. La procédure de succession se déroule devant l’Amtsgericht Köln (tribunal de district de Cologne, Allemagne). À cette fin, en faisant valoir que, au moment du décès de son père, il était l’unique bénéficiaire de l’acte de donation, UM a demandé l’inscription sur le livre foncier de son droit de propriété relatif au bien immobilier en cause auprès de la juridiction compétente, le Bezirksgericht Hermagor (tribunal de district de Hermagor, Autriche). Le Rechtspfleger (auxiliaire de justice,
Autriche) de ce tribunal de première instance, chargé de contrôler la demande de UM, a considéré que la loi applicable était la loi autrichienne et a rejeté cette demande en l’absence de preuves documentaires établissant que les conditions requises par le contrat dont se prévalait UM étaient réunies. Le Landesgericht Klagenfurt (tribunal régional de Klagenfurt, Autriche) a confirmé cette décision aux motifs que le règlement no 650/2012 ne serait pas applicable en raison du choix du droit
autrichien opéré dans ce contrat et que la remise du bien immobilier sur le fondement de la donation à cause de mort ne pourrait intervenir sans preuve de la construction de la maison telle que prévue dans ledit contrat. La juridiction de renvoi, l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche), est saisie du recours en « Revision » contre cette décision.

22. Cette juridiction, qui a relevé que les documents soumis au tribunal compétent pour le registre foncier permettent de conclure que, d’après les critères du droit autrichien, un acte de donation à cause de mort a été conclu au profit d’UM, est d’avis que cet acte relève du champ d’application du règlement no 650/2012 et pourrait être qualifié de « pacte successoral » au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b) ou d), de ce règlement.

23. S’agissant de l’application de la loi autrichienne choisie par les parties au contrat, l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) considère que les dispositions transitoires dudit règlement sont applicables et doute de l’interprétation de l’article 83, paragraphe 2, de ce même règlement quant à son applicabilité au choix de la loi applicable dans un pacte successoral.

24. Dans ces conditions, l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) L’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 650/2012 doit‑il être interprété en ce sens que constitue un pacte successoral au sens de cette disposition, un acte de donation à cause de mort portant sur un bien immobilier situé en Autriche, conclu entre deux ressortissants allemands ayant leur lieu de résidence habituelle en Allemagne et en vertu duquel le donataire devrait avoir à l’égard de la succession, après le décès du donateur, un droit personnel à l’inscription de son droit de
propriété dans le livre foncier sur la base de cet acte de donation et de l’acte de décès du donateur, et donc sans intervention de l’administration compétente en matière successorale ?

2) En cas de réponse positive à cette question :

L’article 83, paragraphe 2, du règlement [no 650/2012] doit-il être interprété en ce sens qu’il régit également la validité du choix de la loi applicable, effectué avant le 17 août 2015, pour un acte de donation à cause de mort qui doit être qualifié de pacte successoral au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement [no 650/2012] ? »

25. Des observations écrites ont été soumises à la Cour par UM, par le gouvernement espagnol et par la Commission européenne. Ces parties ainsi que le gouvernement allemand ont répondu aux questions pour réponse écrite de la Cour dans les délais impartis.

IV. Analyse

26. Au préalable, il me paraît opportun de souligner, en raison de la finalité du règlement no 650/2012, que la demande de décision préjudicielle, qui porte sur l’applicabilité de ce règlement, est formée à l’occasion d’une procédure nationale ayant pour objet la reconnaissance de l’attribution de droits relatifs à un bien immobilier, situé en Autriche, qui a fait l’objet d’une donation à cause de mort ( 7 ), aux fins d’inscription sur un registre foncier. La procédure de succession est ouverte dans
un autre État membre. Par conséquent, de manière inédite, la demande de décision préjudicielle se présente dans le cadre plus général de la vérification d’un droit de propriété que celui de la succession, en ce que l’autorité saisie par UM n’est pas chargée de prendre une décision ou de délivrer un acte directement lié à celle-ci. En outre, la juridiction de renvoi a précisé que sa demande vise à vérifier la compétence de l’autorité qui a rejeté la demande d’UM, qui dépend de l’application du
droit autrichien ( 8 ).

A.   Sur la première question préjudicielle

27. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour si l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 650/2012 doit être interprété en ce sens que relève de la notion de « pacte successoral » un acte de donation entre vifs en vertu duquel le transfert de la propriété d’un bien appartenant au donateur n’intervient qu’au décès de celui-ci.

28. En premier lieu, il y a lieu de préciser que la question portant sur l’applicabilité de ce règlement est justifiée :

– ratione temporis, conformément à son article 83, paragraphe 1, dès lors que le litige au principal a pour objet la succession de ZL, décédé après le 17 août 2015 ;

– du fait des incidences transfrontières de la succession, aux motifs que le défunt résidait habituellement en Allemagne et que l’affaire au principal concerne un bien immobilier qui lui appartenait situé en Autriche ( 9 ), et

– en ce que le litige a pour objet les conditions dans lesquelles un droit est acquis dans le cadre d’une succession, en vue de son inscription sur un registre foncier, et non les modalités de celle-ci qui ne relèvent pas du règlement no 650/2012 ( 10 ).

29. En second lieu, il doit être relevé que, en l’absence de dispositions relatives aux donations à cause de mort dans le règlement no 650/2012 ( 11 ), différents éléments doivent en être tirés afin de déterminer si de tels actes peuvent être qualifiés de « pacte successoral », au sens de son article 3, paragraphe 1, sous b), ainsi que la juridiction de renvoi, UM, le gouvernement allemand et la Commission le soutiennent ou, au contraire, si ces actes doivent être considérés comme des libéralités au
sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous g), de ce règlement, ainsi que le gouvernement espagnol le fait valoir.

30. À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il découle des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes d’une disposition du droit de l’Union, qui ne comporte aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer son sens et sa portée, doivent normalement trouver, dans toute l’Union, une interprétation autonome et uniforme, qui doit être recherchée en tenant compte non seulement des termes de
celle-ci, mais également du contexte de la disposition et de l’objectif poursuivi par la réglementation en cause ( 12 ).

31. Pour les besoins de l’interprétation littérale des dispositions du règlement no 650/2012 applicables en l’espèce, j’observe, d’une part, que, selon l’article 1er, paragraphe 1, première phrase, de ce règlement, celui-ci s’applique aux « successions à cause de mort ». À l’article 3, paragraphe 1, sous a), dudit règlement, il est précisé qu’on entend par « succession » la succession à cause de mort et que ce terme recouvre « toute forme de transfert de biens [...] à cause de mort » ( 13 ). Cette
définition reprend le contenu du considérant 9 du même règlement, selon lequel celui-ci doit s’appliquer « à tous les aspects de droit civil d’une succession à cause de mort » ( 14 ).

32. Deux modes de transfert de biens à cause de mort y sont visés, à savoir un acte volontaire en vertu d’une disposition à cause de mort et dans le cadre d’une succession ab intestat.

33. À l’article 3, paragraphe 1, sous d), du règlement no 650/2012, il est précisé que l’expression « disposition à cause de mort » recouvre « un testament, un testament conjonctif ou un pacte successoral ». Ce pacte est défini à cet article, sous b), comme étant, pour l’essentiel, un accord qui confère des droits dans une succession future d’une ou de plusieurs parties à ce pacte.

34. D’autre part, ces définitions, qui constituent des notions autonomes ( 15 ), en ce qu’elles visent à garantir l’application uniforme du règlement no 650/2012 indépendamment du droit des États membres, doivent être rapprochées de l’exclusion du champ d’application de ce règlement des « droits et biens [...] transférés autrement que par succession, par exemple au moyen de libéralités » ( 16 ), énoncée à son article 1er, paragraphe 2, sous g) ( 17 ).

35. Eu égard à la notion de « succession » ( 18 ) et faute de définition tant des libéralités que du testament, la question se pose de savoir quel critère permettrait de distinguer les libéralités ( 19 ) des dispositions à cause de mort, en vue d’une interprétation uniforme de ces notions.

36. Je relève, en premier lieu, que, au considérant 14 du règlement no 650/2012, à la lumière duquel l’article 1er, paragraphe 2, sous g), de ce règlement doit être lu, est utilisée l’expression « libéralités ou autres formes de dispositions entre vifs qui donnent naissance à un droit réel avant le décès » ( 20 ).

37. Il me paraît devoir en être déduit, également par rapprochement avec les autres modes de transfert de droits et biens visés à l’article 1er, paragraphe 2, sous g), du règlement no 650/2012, à savoir la propriété conjointe avec réversibilité au profit du survivant, les plans de retraite, les contrats d’assurance et les arrangements analogues, que le législateur de l’Union a entendu exclure du champ d’application de ce règlement les actes entre vifs constitutifs de droits avant le décès de leur
titulaire ou qui, en principe, organisent le transfert de biens hors succession.

38. En deuxième lieu, je précise que l’article 1er, paragraphe 2, sous g), du règlement no 650/2012 a pour source l’article 1er, paragraphe 2, sous d), de la convention sur la loi applicable aux successions à cause de mort, signée à La Haye le 1er août 1989 ( 21 ), jamais entrée en vigueur. Dans le rapport explicatif de cette convention ( 22 ), il est précisé que cet article 1er, paragraphe 2, sous d), a un domaine très vaste couvrant toutes dispositions autres que celles à cause de mort et qu’il
exclut les transactions inter vivos, lorsque le droit de propriété prend naissance au décès.

39. En troisième lieu, je souligne que, s’agissant d’une exclusion au champ d’application du règlement no 650/2012 visant à soumettre l’ensemble de la succession à une loi unique, l’article 1er, paragraphe 2, sous g), de ce règlement doit être interprété de manière stricte, quand bien même les libéralités n’échappent pas totalement à l’application de la loi de la succession ( 23 ).

40. Par conséquent, ne peuvent être qualifiées de « libéralités », au sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous g), les donations à cause de mort, qui prévoient de conférer un droit sur des biens qui font partie du patrimoine du défunt, uniquement à son décès, en faveur du donataire, s’il lui survit, et organisent, par là même, des modalités de transmission de la succession. Autrement dit, le critère essentiel est celui de la détermination des droits du donataire quant aux biens constituant la masse
successorale par rapport aux autres héritiers ( 24 ) sur une succession non ouverte.

41. Dès lors que le décès du donateur doit constituer une condition de ce transfert de droit et non de son exécution concrète ( 25 ) et que la donation résulte d’un accord irrévocable ( 26 ) entre les parties sur les droits de propriété prenant naissance au décès sur les biens qui constitueront alors le patrimoine du défunt ( 27 ), la donation à cause de mort (ou, en d’autres termes, tout accord relatif au transfert de droit de propriété mortis causa) peut être qualifiée, selon moi, de « pacte
successoral » au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 650/2012, en tant que notion autonome ( 28 ), quand bien même cet acte ne porterait pas sur l’universalité de la succession ( 29 ) ou sur des biens que le donateur ne possédait pas déjà au moment de l’accord.

42. Par conséquent, doit être abordée la question de la diversité des régimes juridiques des donations à cause de mort ainsi que des pactes successoraux, relevée, pour ces derniers, au considérant 49 du règlement no 650/2012 et soulignée tant par les parties dans leurs observations écrites que par la doctrine ( 30 ), afin de garantir une application uniforme de ce règlement.

43. À cet égard, je partage les avis exprimés par plusieurs auteurs en ce sens que la qualification de l’acte devrait résulter de l’application de la loi régissant les pactes successoraux telle que prévue à l’article 25 du règlement no 650/2012 ( 31 ).

44. Une telle interprétation est conforme à l’objectif poursuivi par ce règlement qui est, d’une part, d’aider les héritiers et légataires, les autres personnes proches du défunt ainsi que les créanciers de la succession à faire valoir leurs droits dans le contexte d’une succession ayant des incidences transfrontières ainsi que de permettre aux citoyens de l’Union de préparer leur succession ( 32 ).

45. D’autre part, pour ces raisons de sécurité juridique et afin d’éviter le morcellement de la succession ( 33 ), le règlement no 650/2012 prévoit, pour l’intégralité du patrimoine qui la compose, l’unité de la loi successorale, qui a des incidences sur la compétence des juridictions pour statuer sur l’ensemble de la succession ( 34 ), par rattachement à la loi de l’État membre dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès, selon l’article 21 de ce règlement, ou à la
loi de l’État dont le défunt a la nationalité, choisie par celui-ci en vertu de l’article 22 dudit règlement.

46. En outre, afin de garantir la plus large adéquation de ces dispositions aux finalités du règlement no 650/2012, le législateur de l’Union a prévu des aménagements, notamment au principe de l’unité de la loi successorale ( 35 ). Tel est le cas, ainsi que le souligne le gouvernement allemand dans ses réponses aux questions écrites de la Cour, de l’article 25 de ce règlement, qui doit être lu à la lumière de son considérant 49, qui détermine, dans des termes similaires à ceux de l’article 24 dudit
règlement, relatifs aux autres dispositions à cause de mort, que les pactes successoraux sont régis par la loi applicable à la succession au jour de leur conclusion afin de préserver l’organisation de la succession prévue dans ces actes.

47. Dans ces conditions, je considère, à la différence du gouvernement espagnol, que qualifier une donation à cause de mort de « pacte successoral » n’est pas de nature à entraîner le morcellement de la succession, mais garantit aux parties concernées par le transfert d’un bien ou des biens constituant le patrimoine du défunt la sécurité juridique recherchée en cas de succession ayant une incidence transfrontière.

48. Une interprétation contraire aurait pour effet d’exclure du champ d’application d’autres actes couramment établis en vue de planifier la transmission successorale pour lesquels les mêmes questions se posent, tels que les donations au dernier vivant ou les donations-partages ( 36 ).

49. Dès lors, un grand nombre d’actes importants pour l’organisation de la succession devraient être soumis, selon le cas, soit au règlement (CE) no 593/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I) ( 37 ), soit aux règles nationales ou conventionnelles de l’État concerné ( 38 ), ce qui risquerait de fragiliser sérieusement le principe de l’unité de la loi successorale.

50. En l’occurrence, l’affaire au principal a pour objet un accord organisant le transfert de propriété d’un bien immobilier qui devait intervenir au moment du décès du père du requérant, sous certaines conditions ( 39 ). Si, à mon sens, cet accord présente les caractéristiques d’un pacte successoral, au sens du règlement no 650/2012, cette qualification devrait dépendre de la loi successorale applicable, ainsi que je l’ai proposé ( 40 ).

51. Pour l’ensemble de ces raisons, je considère que l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 650/2012 doit être interprété en ce sens que relève de la notion de « pacte successoral » un acte de donation entre vifs en vertu duquel le transfert, au profit du donataire, de la propriété d’un bien ou des biens qui constituent même partiellement le patrimoine successoral du donateur n’intervient qu’à son décès.

B.   Sur la seconde question préjudicielle

52. La juridiction de renvoi s’interroge sur la validité du choix de la loi autrichienne dans l’accord en cause dans l’affaire au principal ( 41 ) au regard des dispositions transitoires du règlement no 650/2012 et vise son article 83, paragraphe 2. Celui-ci prévoit un renvoi aux conditions fixées à l’article 22 de ce règlement, intitulé « Choix de loi ».

53. Ainsi que la Commission l’a relevé, la version en langue allemande de l’article 22 du règlement no 650/2012, à la différence d’autres versions linguistiques ( 42 ), ne précise pas que le choix de la loi doit porter sur l’ensemble de la succession.

54. À cet égard, il y a lieu de préciser que la Cour a jugé, dans un arrêt rendu peu de temps après le dépôt de la présente demande de décision préjudicielle, qu’une personne peut choisir une loi « régissant l’ensemble de sa succession » en vertu de cet article 22 et que l’article 83, paragraphe 2, dudit règlement vise le cas dans lequel le défunt avait, avant le 17 août 2015, choisi la loi « applicable à sa succession » ( 43 ).

55. Par conséquent, je considère, à l’instar de la Commission, que la réponse de la Cour ne peut porter sur l’interprétation de cette disposition, dès lors qu’il résulte des constatations de la juridiction de renvoi que le droit autrichien a été choisi par les parties pour être appliquée aux rapports juridiques entre elles et non en vue de régir la succession dans son ensemble.

56. Cependant, eu égard aux circonstances dans lesquelles cette seconde question préjudicielle est posée, il me semble opportun de compléter mon analyse relative aux dispositions transitoires en indiquant, d’une part, que, s’agissant d’une disposition à cause de mort prise avant le 17 août 2015 par un donateur décédé après cette date, celle-ci sera valable, conformément à l’article 83, paragraphe 3, du règlement no 650/2012, si les conditions fixées par la loi désignée selon les dispositions du
chapitre III, précisément à l’article 25, applicable à un pacte successoral, sont satisfaites, ou, à défaut, selon les règles de conflit antérieures à l’entrée en vigueur dudit règlement.

57. D’autre part, ainsi qu’il a été relevé par la Commission, en l’occurrence, des conséquences sur la compétence de la juridiction saisie, quant à la qualification de l’acte en cause, devraient être tirées du constat de l’inapplicabilité de l’article 83, paragraphe 2, du règlement no 650/2012, faute de choix de la loi régissant l’ensemble de la succession ( 44 ), et, partant, selon moi, de l’inapplicabilité du paragraphe 4 de cet article ( 45 ). En effet, dès lors que, en vertu de ce règlement, le
défunt ne pouvait choisir la loi autrichienne, celle-ci ne peut être réputée avoir été choisie comme loi applicable à la succession ( 46 ).

58. Dans ces conditions, je considère qu’il n’y a pas lieu de répondre à la seconde question préjudicielle.

V. Conclusion

59. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche) dans les termes suivants :

L’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) no 650/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen, doit être interprété en ce sens que relèvent de la notion de « pacte successoral » les actes de donation entre vifs en vertu desquels le transfert, au
profit du donataire, de la propriété d’un bien ou des biens qui constituent même partiellement le patrimoine successoral du donateur n’intervient qu’à son décès.

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( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) JO 2012, L 201, p. 107.

( 3 ) BGBl. I, 87/2015.

( 4 ) BGBl, 76/1871.

( 5 ) BGBl, 39/1955.

( 6 ) BGBl, 560/1985.

( 7 ) La même question aurait pu également être posée si une demande de délivrance de certificat successoral européen, qui permet à chaque héritier, légataire ou ayant droit mentionné dans ce certificat de prouver dans un autre État membre sa qualité et ses droits successoraux dans la masse successorale, avait été formée. Voir, à cet égard, arrêts du 1er mars 2018, Mahnkopf (C‑558/16, EU:C:2018:138, points 36 et 42, ainsi que jurisprudence citée), et du 21 juin 2018, Oberle (C‑20/17, EU:C:2018:485,
point 45).

( 8 ) Voir, s’agissant des conditions de la mise en œuvre de la procédure nationale, points 16 et 17 des présentes conclusions.

( 9 ) Voir arrêt du 16 juillet 2020, E. E. (Compétence juridictionnelle et loi applicable aux successions) (C‑80/19, EU:C:2020:569, points 34 à 36, ainsi que 42 et 43).

( 10 ) Voir considérant 18 et article 1er, paragraphe 2, sous l), du règlement no 650/2012, ainsi que arrêt du 12 octobre 2017, Kubicka (C‑218/16, EU:C:2017:755, point 54).

( 11 ) Tel est le cas dans la version en langue française. Le terme « donaciones » figure toutefois dans la version en langue espagnole de l’article 23, paragraphe 2, sous i), de ce règlement à la différence d’autres versions linguistiques, notamment en langues allemande, anglaise, italienne ou roumaine. Je précise que ces divergences n’ont pas d’incidence sur l’interprétation des dispositions dudit règlement en cause en l’espèce.

( 12 ) Voir arrêt du 23 mai 2019, WB (C‑658/17, EU:C:2019:444, point 50 et jurisprudence citée).

( 13 ) Italique ajouté par mes soins.

( 14 ) Italique ajouté par mes soins. Cette expression est relevée par la Cour dans les arrêts du 1er mars 2018, Mahnkopf (C‑558/16, EU:C:2018:138, point 34), et du 21 juin 2018, Oberle (C‑20/17, EU:C:2018:485, point 30).

( 15 ) Voir, à cet égard, Bonomi, A., « Article 1. Champ d’application », dans Bonomi, A., et Wautelet, P., Le droit européen des succession, Commentaire du règlement (UE) no 650/2012, du 4 juillet 2012, 2e éd., Bruylant, Bruxelles, 2016, p. 73 à 139, en particulier point 2, p. 75, ainsi que Looschelders, D., « Artikel 3 EuErbVO », dans Hüßtege, R., et Mansel, H.-P., Rom-Verordnungen, 2e éd., Nomos, Baden-Baden, 2015, p. 839 à 847, en particulier point 8, p. 841 et 842.

( 16 ) Italique ajouté par mes soins.

( 17 ) Sur le rappel du caractère limitatif des exclusions figurant à l’article 1er, paragraphe 2, dudit règlement, s’agissant notamment des questions liées aux régimes matrimoniaux, voir arrêt du 1er mars 2018, Mahnkopf (C‑558/16, EU:C:2018:138, point 33).

( 18 ) Voir point 31 des présentes conclusions.

( 19 ) À cet égard, Marie Goré relève que « [l]’anticipation successorale n’a pas été pensée dans toute son ampleur » (Goré, M., « Les silences du règlement européen sur les successions internationales », Droit et Patrimoine, Lamy, Paris, 2013, no 224, p. 34 à 37, en particulier p.6).

( 20 ) Italique ajouté par mes soins.

( 21 ) Disponible à l’adresse Internet suivante : https://www.hcch.net/fr/instruments/conventions/full-text/?cid=62. L’expression « par exemple au moyen de libéralités » a été ajoutée dans le règlement no 650/2012. Voir considérant 9 et article 1er, paragraphe 3, sous f), de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions et des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un
certificat successoral européen [COM(2009) 154 final], reformulés par le Parlement dans son rapport du 6 mars 2012 sur cette proposition (A7-0045/2012), s’agissant du libellé de l’exclusion.

( 22 ) Voir rapport explicatif de M. Donovan W. M. Waters disponible à l’adresse Internet suivante : https://assets.hcch.net/docs/ed641835-352a-4fe0-a378-5bf4222086c8.pdf [points 41 (p. 542) et 92 (p. 574)].

( 23 ) Voir article 23, paragraphe 2, sous i), du règlement no 650/2012.

( 24 ) Voir, par analogie, arrêt du 1er mars 2018, Mahnkopf (C‑558/16, EU:C:2018:138, point 40).

( 25 ) Une distinction doit être opérée entre les donations à cause de mort et les donations qui organisent un transfert de droits immédiat tout en prévoyant la possession du bien différée à une date qui pourrait être celle du décès du donateur. Voir, en ce sens, Boulanger, D., « Le renouvellement du traitement de l’anticipation successorale au travers du règlement (UE) du 4 juillet 2012 », La Semaine Juridique – Notariale et Immobilière, LexisNexis, Paris, no 27, p. 39 à 44, en particulier
point 15, p. 41. J’observe, à cet égard, que, dans la version en langue française des pièces de la procédure, l’expression « remise du bien » ne devrait pas être une source de confusion. En effet, il y a lieu, à ma connaissance, de se référer à l’« Abstraktionsprinzip », en vertu duquel le transfert d’un bien immobilier recouvre celui du droit de propriété (acte de vente, par exemple) et la remise physique du bien (par inscription au livre foncier). Sur la distinction entre l’exécution du vivant du
donateur et celle qui intervient à son décès, voir Looschelders, D., « Artikel 1 EuErbVO », dans Hüßtege, R., et Mansel, H.-P., Rom-Verordnungen, op. cit., p. 817 à 835, en particulier points 45 et 46, p. 829 et 830.

( 26 ) Voir Bonomi, A., « Article 25. Pacte successoral », dans Bonomi, A., et Wautelet, P., Le droit européen des succession, Commentaire du règlement (UE) no 650/2012, du 4 juillet 2012, op. cit., p. 429 à 449, en particulier point 13, p. 436 ; Pesendorfer, U., « Art. 3 EuErbVO », dans Burgstaller, A., Neumayr, M., Geroldinger, A., et Schmaranzer, G., Die EU-Erbrechtsverordnung, LexisNexis, Vienne, 2016, p. 68 à 81, en particulier points 12 et 17, p. 74 à 76, ainsi que Dutta, A., « Art. 3 EuErbVO
Begriffsbestimmungen », Münchener Kommentar zum Bürgerlichen Gesetzbuch, C.H. Beck, Munich, 2020, point 8.

( 27 ) Voir Boulanger, D., op. cit., point 14, p. 41.

( 28 ) Voir, dans le même sens, Bonomi, A., « Article 3. Définitions », dans Bonomi, A., et Wautelet, P., Le droit européen des succession, Commentaire du règlement (UE) no 650/2012, du 4 juillet 2012, op. cit., p. 143 à 179, en particulier point 21, p. 155 ; Dutta, A., « Art. 1 EuErbVO Anwendungsbereich », Münchener Kommentar zum Bürgerlichen Gesetzbuch, op. cit., point 37 et « Art. 3 EuErbVO Begriffsbestimmungen », op. cit., point 10 ; Mankowski, P., « Art 1 EuErbVO », dans Deixler-Hübner, A., et
Schauer, M., Kommentar zur EU-Erbrechtsverordnung (EuErbVO), 2e éd., Manz’sche Verlags- und Universitätsbuchhandlung, Vienne, 2020, p. 16 à 66, en particulier point 79, p. 42 et 43 ; Deixler-Hübner, A., et Schauer, M., « Art 3 EuErbVO », dans Deixler-Hübner, A., et Schauer, M., Kommentar zur EU-Erbrechtsverordnung (EuErbVO), op. cit., p. 70 à 94, en particulier, point 14, p. 77 et 78, ainsi que Fontanellas Morell, J. M., « Las donaciones mortis causa ante la reglementación comunitaria de la
sucesiones », Anuario Español de Derecho Internacional Privado, Iprolex, Madrid, Espagne, 2011, p. 465 à 484, en particulier p. 481 à 483.

( 29 ) À cet égard, je suis d’un avis contraire à celui du gouvernement espagnol mais concordant avec les analyses des autres parties, en ce sens que la notion de « pacte successoral » figurant à l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 650/2012 est définie en termes suffisamment généraux pour recouvrer un accord sur seulement un bien ou une partie de la succession. Il suffit que le critère commun résultant du même article, sous d), combiné avec la définition figurant sous a), relatif aux
dispositions à cause de mort, soit respecté, à savoir un transfert de la propriété de bien(s) prenant effet au décès du propriétaire, partie au pacte.

( 30 ) Voir Bonomi, A., « Article 1. Champ d’application », op. cit., points 51 et 52, ainsi qu’auteurs cités aux notes en bas de page, p. 102 à 104.

( 31 ) Voir Bonomi, A., « Article 1. Champ d’application », op. cit., point 53 et auteurs cités à la note en bas de page 76, p. 104. Voir, également, Dutta, A., « Art. 25 EuErbVO Erbverträge », Münchener Kommentar zum Bürgerlichen Gesetzbuch, op. cit., point 9. Sur la considération plus générale selon laquelle il devrait être fait référence à la loi applicable aux dispositions à cause de mort, voir Bonomi, A., « Article 1. Champ d’application », op. cit., point 53 et auteurs cités à la note en bas
de page 75, p. 104. Dans le même sens, voir Köhler, A., « Teil 1 EuErbVO, § 4 Internationales Privatrecht », dans Grierl, W., Köhler, A., Kroiß, L., et Wilsch, H., Internationales Erbrecht : EuErbVO, IntErbRVG, DurchfVO, Länderberichte, 3e éd., Nomos, Vienne, 2020, p. 57 à 127, en particulier point 52, p. 70, et point 74, p. 78.

( 32 ) Voir arrêts du 12 octobre 2017, Kubicka (C‑218/16, EU:C:2017:755, point 56), et du 21 juin 2018, Oberle (C‑20/17, EU:C:2018:485, point 49).

( 33 ) Voir considérant 37 du règlement no 650/2012, ainsi que arrêts du 12 octobre 2017, Kubicka (C‑218/16, EU:C:2017:755, points 44 et 57), ainsi que du 21 juin 2018, Oberle (C‑20/17, EU:C:2018:485, point 56).

( 34 ) Voir arrêts du 21 juin 2018, Oberle (C‑20/17, EU:C:2018:485, point 55), et du 16 juillet 2020, E. E. (Compétence juridictionnelle et loi applicable aux successions) (C‑80/19, EU:C:2020:569, point 41).

( 35 ) Voir, s’agissant des dispositions relatives à la compétence juridictionnelle en matière de succession, arrêt du 16 juillet 2020, E. E. (Compétence juridictionnelle et loi applicable aux successions) (C‑80/19, EU:C:2020:569, point 69). La Cour a jugé que « le principe de l’unité de la succession n’est pas absolu ».

( 36 ) Voir, à cet égard, Boulanger, D., op. cit., points 16 et 17, p. 41. Voir, également, en droit allemand, Dutta, A., « Art. 3 EuErbVO Begriffsbestimmungen », op. cit., point 11.

( 37 ) JO 2008, L 177, p. 6. Deux différences majeures entre le règlement no 593/2008 et le règlement no 650/2012 peuvent être relevées quant aux règles de rattachement que ce dernier vise précisément à abandonner. D’une part, selon l’article 3 du règlement no 593/2008, les parties à la donation disposent du libre choix du droit applicable au contrat. D’autre part, à défaut de choix, les donations immobilières sont soumises à la loi du pays de situation de l’immeuble, en vertu de l’article 4,
paragraphe 1, sous c), de ce règlement. En outre, il peut être déduit de l’article 4, paragraphe 2, dudit règlement que, à défaut de choix, les donations mobilières sont régies par la loi de la résidence habituelle du donateur en tant que débiteur de la prestation caractéristique du contrat.

( 38 ) En vertu de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), du règlement no 593/2008, est exclu de celui-ci le droit patrimonial de la famille. Voir, à cet égard, synthèse de Gaudemet-Tallon, H., « Convention de Rome du 19 juin 1980 et règlement “Rome I” du 17 juin 2008. – Champ d’application. – Clauses générales », JurisClasseur Droit international, LexisNexis, Paris, 2020, fascicule 552-11, point 52.

( 39 ) Voir point 19 des présentes conclusions.

( 40 ) Voir point 43 des présentes conclusions.

( 41 ) Voir paragraphe f) du contrat cité au point 19 des présentes conclusions.

( 42 ) Ainsi qu’il a été relevé par la Commission, j’observe que la portée de la loi choisie est précisée dans les versions en langues anglaise, française, italienne, néerlandaise et polonaise et que dans la version en langue espagnole, tout aussi équivoque que la version en langue allemande lors de sa publication, a été rectifiée comme suit : « Toute personne peut désigner comme loi régissant l’ensemble de sa succession la loi de l’État » (rectificatif JO 2019, L 243, p. 9).

( 43 ) Voir arrêt du 16 juillet 2020, E. E. (Compétence juridictionnelle et loi applicable aux successions) (C‑80/19, EU:C:2020:569, points 88 et 92).

( 44 ) Voir article 15 du règlement no 650/2012, intitulé « Vérification de la compétence ». Voir, s’agissant des règles de compétence et leur incidence sur la circulation des décisions, arrêts du 21 juin 2018, Oberle (C‑20/17, EU:C:2018:485, points 37 et 53 à 55), ainsi que du 16 juillet 2020, E. E. (Compétence juridictionnelle et loi applicable aux successions) (C‑80/19, EU:C:2020:569, points 61 et 62).

( 45 ) Voir, s’agissant de l’articulation des dispositions transitoires ainsi que du lien entre celles-ci et la compétence judiciaire internationale, conclusions de l’avocat général Campos Sánchez-Bordona dans l’affaire E. E. (Compétence juridictionnelle et loi applicable aux successions) (C‑80/19, EU:C:2020:230, points 101 à 104, ainsi que 108 à 112).

( 46 ) Voir arrêt du 16 juillet 2020, E. E. (Compétence juridictionnelle et loi applicable aux successions) (C‑80/19, EU:C:2020:569, points 92 et 93).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-277/20
Date de la décision : 01/07/2021
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Oberster Gerichtshof.

Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile – Successions – Règlement (UE) no 650/2012 – Article 3, paragraphe 1, sous b) – Notion de “pacte successoral” – Champ d’application – Contrat translatif de propriété à cause de mort – Article 83, paragraphe 2 – Choix de la loi applicable – Dispositions transitoires.

Coopération judiciaire en matière civile

Espace de liberté, de sécurité et de justice


Parties
Demandeurs : Procédure engagée par UM.

Composition du Tribunal
Avocat général : Richard de la Tour

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2021:531

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