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20/05/2021 | CJUE | N°C-724/19

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. M. Campos Sánchez-Bordona, présentées le 20 mai 2021., Procédure pénale contre HP., 20/05/2021, C-724/19


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA

présentées le 20 mai 2021 ( 1 )

Affaire C‑724/19

Spetsializirana prokuratura

contre

HP

[demande de décision préjudicielle formée par le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie)]

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Décision d’enquête européenne – Directive 2014/41/UE – Article 2, sous c) – Autorité d’émission – Article 6, paragraphe 2 –

Conditions d’émission – Procureur exerçant les fonctions d’autorité judiciaire d’émission – Émission réservée à un juge en tant qu’autorité compétente en...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA

présentées le 20 mai 2021 ( 1 )

Affaire C‑724/19

Spetsializirana prokuratura

contre

HP

[demande de décision préjudicielle formée par le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie)]

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Décision d’enquête européenne – Directive 2014/41/UE – Article 2, sous c) – Autorité d’émission – Article 6, paragraphe 2 – Conditions d’émission – Procureur exerçant les fonctions d’autorité judiciaire d’émission – Émission réservée à un juge en tant qu’autorité compétente en cas de procédure nationale similaire »

1. Le ministère public d’un État membre est-il compétent pour émettre une décision d’enquête européenne en matière pénale (ci-après « DEE ») par laquelle il demande les données relatives au trafic et à la localisation afférentes à certaines communications électroniques, lorsque, en vertu du droit national de l’État d’émission, l’obtention de cette preuve ne peut être autorisée que par un juge ou une juridiction ?

2. Telle est, en substance, la question que soulève ce renvoi préjudiciel. En statuant sur celui-ci, la Cour a l’occasion d’étoffer sa jurisprudence sur la notion d’« autorité d’émission » d’une DEE, au sens de la directive 2014/41/UE ( 2 ), à propos du ministère public.

I. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union : la directive 2014/41

3. Aux termes du considérant 30 de la directive 2014/41, « [l]es possibilités de coopérer au titre de la présente directive en matière d’interception de télécommunications ne devraient pas être limitées au contenu des télécommunications, mais pourraient aussi concerner la collecte de données relatives au trafic et à la localisation liées à ces télécommunications, ce qui permettrait aux autorités compétentes d’émettre une [DEE] aux fins d’obtenir des données moins intrusives sur les
télécommunications. Une [DEE] émise aux fins d’obtenir des données historiques en matière de trafic et de localisation liées aux télécommunications devrait être traitée dans le cadre du régime général applicable à l’exécution de la [DEE] et peut être considérée, en fonction du droit national de l’État d’exécution, comme une mesure d’enquête intrusive ».

4. Selon le considérant 32 de la directive 2014/41, « [d]ans toute [DEE] comprenant une demande relative à l’interception de télécommunications, il convient que l’autorité d’émission fournisse à l’autorité d’exécution des informations suffisantes, comme par exemple des informations détaillées concernant le comportement délictueux qui fait l’objet de l’enquête, afin de permettre à l’autorité d’exécution d’évaluer si cette mesure d’enquête serait autorisée dans le cadre d’une procédure nationale
similaire ».

5. L’article 1er de la directive 2014/41, intitulé « Décision d’enquête européenne et obligation de l’exécuter », dispose :

« 1.   [DEE] est une décision judiciaire qui a été émise ou validée par une autorité judiciaire d’un État membre (ci-après dénommé “État d’émission”) afin de faire exécuter une ou plusieurs mesures d’enquête spécifiques dans un autre État membre (ci-après dénommé “État d’exécution”) en vue d’obtenir des preuves conformément à la présente directive.

La [DEE] peut également être émise pour l’obtention de preuves qui sont déjà en [la] possession des autorités compétentes de l’État d’exécution.

2.   Les États membres exécutent une [DEE] sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément à la présente directive.

3.   Dans le cadre des droits de la défense applicables conformément à la procédure pénale nationale, l’émission d’une [DEE] peut être demandée par un suspect ou une personne poursuivie, ou par un avocat agissant au nom d’un suspect ou d’une personne poursuivie.

4.   La présente directive n’a pas pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques inscrits à l’article 6 du traité sur l’Union européenne, y compris les droits de la défense des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale, et il n’est porté atteinte à aucune des obligations qui incombent aux autorités judiciaires à cet égard. »

6. L’article 2 de la directive 2014/41, intitulé « Définitions », énonce :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

c) “autorité d’émission” :

i) un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur compétent(e) dans l’affaire concernée ; ou

ii) toute autre autorité compétente définie par l’État d’émission qui, dans le cas d’espèce, agit en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales, compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national. En outre, avant d’être transmise à l’autorité d’exécution, la [DEE] est validée, après examen de sa conformité aux conditions d’émission prévues par la présente directive, en particulier les conditions prévues à l’article 6, paragraphe 1,
par un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur dans l’État d’émission. Lorsque la [DEE] a été validée par une autorité judiciaire, cette dernière peut également être considérée comme une autorité d’émission aux fins de la transmission de la [DEE] ;

[...] »

7. L’article 6 de la directive 2014/41, intitulé « Conditions d’émission et de transmission d’une décision d’enquête européenne », prévoit :

« 1.   L’autorité d’émission ne peut émettre une [DEE] que si les conditions suivantes sont réunies :

a) l’émission de la [DEE] est nécessaire et proportionnée aux finalités des procédures visées à l’article 4, compte tenu des droits du suspect ou de la personne poursuivie ; et

b) la ou les mesures d’enquête indiquées dans la [DEE] auraient pu être ordonnées dans les mêmes conditions dans le cadre d’une procédure nationale similaire.

2.   Dans chaque cas, le respect des conditions visées au paragraphe 1 est vérifié par l’autorité d’émission.

3.   Lorsque l’autorité d’exécution a des raisons de penser que les conditions visées au paragraphe 1 n’ont pas été respectées, elle peut consulter l’autorité d’émission sur l’importance d’exécuter la [DEE]. Après cette consultation, l’autorité d’émission peut décider de retirer la [DEE]. »

8. L’article 9 de la directive 2014/41, intitulé « Reconnaissance et exécution », dispose :

« 1.   L’autorité d’exécution reconnaît une [DEE], transmise conformément à la présente directive, sans qu’aucune autre formalité ne soit requise, et veille à ce qu’elle soit exécutée de la même manière et suivant les mêmes modalités que si la mesure d’enquête concernée avait été ordonnée par une autorité de l’État d’exécution, à moins que cette autorité ne décide de se prévaloir de l’un des motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution ou de l’un des motifs de report prévus par la présente
directive.

2.   L’autorité d’exécution respecte les formalités et procédures expressément indiquées par l’autorité d’émission, sauf si la présente directive en dispose autrement et sous réserve que ces formalités et procédures ne soient pas contraires aux principes fondamentaux du droit de l’État d’exécution.

3.   Lorsqu’une autorité d’exécution reçoit une [DEE] qui n’a pas été émise par une autorité d’émission telle qu’elle est définie à l’article 2, point c), l’autorité d’exécution renvoie la [DEE] à l’État d’émission.

[...] »

B.   Le droit bulgare

1. La loi sur la décision d’enquête européenne

9. L’article 5, paragraphe 1, de la Zakon za evropeyskata zapoved za razsledvane (loi sur la décision d’enquête européenne), du 7 février 2018 (DV no 89, du 20 février 2018, ci-après la « ZEZR »), prévoit que l’autorité compétente pour émettre une DEE est le procureur au cours de la phase préliminaire de la procédure pénale, et la juridiction compétente lors de la procédure judiciaire proprement dite.

2. Le code de procédure pénale

10. L’article 159a du nakazatelno-protsesualen kodeks (code de procédure pénale), du 29 avril 2006 (DV no 86, du 28 octobre 2005, ci-après le « NPK »), intitulé « Fourniture de données par des entreprises fournissant des réseaux et/ou des services de communications électroniques », prévoit :

« (1)   À la demande de la juridiction lors d’une procédure judiciaire ou sur ordre motivé d’un juge de la juridiction respective de première instance rendue à la demande du procureur compétent lors de la procédure préliminaire de la procédure pénale, les entreprises fournissant des réseaux et/ou des services de communications électroniques publics fournissent les données générées au cours de leurs opérations commerciales qui sont nécessaires pour :

1. suivre et identifier la source de la connexion ;

2. identifier le tournant de la connexion ;

3. identifier la date, l’heure et la durée de la connexion ;

4. identifier le type de connexion ;

5. identifier le dispositif terminal de la communication électronique de l’utilisateur ou celui présenté comme son terminal ;

6. constater l’identificateur des cellules de données utilisées.

(2)   Les données visées au paragraphe 1 sont collectées si nécessaire pour les enquêtes concernant les infractions intentionnelles graves.

(3)   La demande d’émission d’une décision d’enquête du procureur responsable en vertu du paragraphe 1 doit être motivée et doit contenir les éléments suivants :

1. des informations sur le crime dont l’enquête nécessite l’utilisation de données relatives au trafic ;

2. la description des circonstances sur lesquelles la demande est fondée ;

3. des données sur les personnes nécessitant les données de trafic ;

4. la période couverte par l’enquête ;

5. l’organisme d’enquête auquel les données doivent être fournies.

(4)   Dans l’ordonnance visée au paragraphe 1, le tribunal indique ce qui suit :

1. les données devant être reflétées dans l’enquête ;

2. la période couverte par l’enquête ;

3. l’organisme d’enquête auquel les données doivent être fournies.

(5)   La période autorisée pendant laquelle la fourniture de données en vertu du paragraphe 1 est requise ne peut excéder six mois.

[...] »

II. Les faits à l’origine du litige, la procédure au principal et les questions préjudicielles

11. Après avoir ouvert une procédure pénale en Bulgarie contre HP pour financement d’activités terroristes, le ministère public bulgare a émis quatre DEE au contenu identique en vue d’obtenir des données relatives au trafic et à la localisation afférentes à certaines communications électroniques ( 3 ).

12. Les quatre DEE ont été émises par le ministère public bulgare, sans qu’un juge ou une juridiction intervienne ou les valide, puis ont été transmises aux autorités compétentes en Allemagne, en Autriche, en Belgique et en Suède.

13. Sauf dans le cas de la Belgique, les ministères publics des États membres destinataires des DEE ont procédé à l’exécution de ces décisions sans qu’un juge ou une juridiction les autorise ou les valide.

14. Sur le fondement des preuves réunies, dont les informations fournies en réponse aux DEE, HP et cinq autres personnes ont été mises en accusation pour financement d’actes terroristes et participation à une organisation criminelle visant à financer ces actes.

15. Le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie), appelé à examiner les preuves obtenues en vertu des DEE, doute de leur légalité au motif que, par application du droit national, ces preuves n’auraient pu être obtenues en Bulgarie qu’après autorisation judiciaire.

16. Dans ces circonstances, le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Une législation nationale [...] qui désigne le procureur comme l’autorité compétente, lors de la phase préliminaire de la procédure pénale, pour émettre une [DEE] visant à la transmission de données relatives au trafic et à la localisation en relation avec des télécommunications, est-elle conforme à l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41 et au principe d’équivalence, alors même que, dans un même cas de figure dans le cadre national, l’autorité compétente est un juge ?

2) La reconnaissance de cette [DEE] par l’autorité compétente de l’État d’exécution (procureur ou juge d’instruction) peut-elle remplacer l’ordonnance d’un juge qu’exige le droit de l’État d’émission ? »

III. La procédure devant la Cour

17. La demande de décision préjudicielle a été enregistrée au greffe de la Cour le 1er octobre 2019.

18. Des observations écrites ont été déposées par HP, les gouvernements allemand et hongrois, ainsi que par la Commission européenne.

19. La Cour a décidé, en lieu et place de l’audience, d’entendre les parties et les intervenants à la procédure sur l’éventuelle incidence, dans le présent litige, des arrêts du 8 décembre 2020 ( 4 ) et du 2 mars 2021 ( 5 ).

20. Conformément aux instructions de la Cour, les présentes conclusions ne porteront que sur la première question préjudicielle.

IV. Arguments des parties

21. HP fait valoir que l’article 5, paragraphe 1, point 1, de la ZEZR n’est pas conforme à l’article 2, sous c), de la directive 2014/41, au motif que cette dernière disposition ne permet pas d’exclure la compétence du juge lorsqu’il s’agit d’ordonner des actes tels que ceux visés dans la décision de renvoi. Il rappelle, en outre, que, dans la législation bulgare, ces actes doivent être adoptés par la juridiction compétente. La façon dont les informations sur les données relatives au trafic ont été
obtenues dans la procédure en cause serait donc illégale en vertu de cette législation.

22. Pour le gouvernement allemand, la réponse à la question posée se trouve non pas à l’article 2, sous c), de la directive 2014/41, mais à l’article 6, paragraphe 1, sous b), de cette directive. Indépendamment du point de savoir si l’article 2, sous c), de ladite directive autorise à distinguer la compétence pour ordonner une mesure d’enquête spécifique, d’une part, et celle pour émettre une DEE, d’autre part, il juge certain que l’article 6, paragraphe 1, sous b), de la même directive s’oppose à
ce que la demande tendant à une mesure d’enquête transfrontalière puisse être soumise à des conditions moins strictes que celles applicables, en vertu du droit national, à une procédure interne similaire.

23. Selon le gouvernement allemand, si le droit national de l’État membre d’émission exige qu’un juge approuve certaines mesures d’enquête, cette condition doit également s’appliquer lorsque ces mesures doivent être exécutées dans un autre État membre.

24. Le gouvernement hongrois considère que la réponse à la première question préjudicielle est liée au respect des conditions d’émission prévues à l’article 6, paragraphe 1, sous b), de la directive 2014/41. Il estime que la reconnaissance mutuelle sur laquelle se fonde la coopération judiciaire en matière pénale présuppose que la décision de l’État membre d’émission a été prise par une juridiction ou une autorité ayant une compétence matérielle et territoriale.

25. Le gouvernement hongrois déduit de cette prémisse que, dans le contexte de la directive 2014/41, l’une des conditions d’émission d’une DEE est que la mesure qui y est indiquée a été vérifiée par une autorité qui aurait compétence pour l’adopter au niveau national. Dans le cas contraire, les garanties demandées pour les mesures d’enquête à effectuer dans un autre État membre seraient moindres que celles prévues pour des mesures similaires appelées à être mises en œuvre dans l’État d’émission.

26. La Commission estime que les doutes de la juridiction de renvoi visent deux aspects différents : l’autorité compétente pour émettre une DEE [article 2, sous c), de la directive 2014/41], d’une part, et les conditions d’émission de cette DEE (article 6 de cette directive), d’autre part.

27. La Commission souligne que l’exigence de la compétence « dans l’affaire concernée » ou « dans le cas d’espèce » [article 2, sous c), de la directive 2014/41] implique que l’autorité d’émission joue un rôle institutionnel dans la procédure pénale d’origine. Le droit de l’Union ne précise toutefois pas si cette autorité doit être entièrement en charge de la procédure ou si son implication peut uniquement porter sur la mesure d’enquête en question : la directive 2014/41 offre aux États membres de
la flexibilité à cet égard.

28. Ainsi la Commission estime-t-elle que la réponse à la question posée se trouve à l’article 6, paragraphe 1, sous b), de la directive 2014/41. Selon elle, si la mesure requiert, au niveau national, l’intervention d’un juge (comme c’est le cas en Bulgarie), son exécution dans un autre État membre par la voie d’une DEE exige que l’émission de cette DEE soit également réservée à une autorité judiciaire.

V. Analyse

A.   Considérations liminaires

29. La Cour a récemment rendu deux arrêts [celui du 8 décembre 2020, Staatsanwaltschaft Wien (Ordres de virement falsifiés) ( 6 ), et l’arrêt Prokuratuur]. Les parties et les intervenants dans la procédure préjudicielle ont été entendus quant aux répercussions de ces deux arrêts dans la présente affaire.

30. Même si les questions posées par la juridiction dans le présent renvoi ne concernent pas directement le point qui était en cause dans les deux arrêts susmentionnés, rien ne s’oppose à ce que la Cour fournisse à la juridiction de renvoi, sur le fondement du dossier et des observations présentées, des informations sur des aspects non traités dans la demande préjudicielle, si elle l’estime opportun afin d’améliorer sa coopération avec la juridiction de renvoi.

31. L’arrêt du 8 décembre 2020, Staatsanwaltschaft Wien (Ordres de virement falsifiés), a levé les doutes quant à la compétence du ministère public d’émettre une DEE même s’il ne jouit pas d’un statut de pleine indépendance par rapport au pouvoir exécutif ( 7 ).

32. Dès lors, quelle que soit la position institutionnelle du ministère public bulgare en droit interne, sa compétence, de manière générale, à émettre des DEE n’est pas entravée par la directive 2014/41.

33. Bien qu’il ne concerne pas directement une DEE, mais une mesure d’enquête purement nationale sans dimension transfrontalière (par laquelle le ministère public d’un État membre a accepté de collecter des données relatives au trafic et à la localisation afférentes à certaines communications électroniques), l’arrêt Prokuratuur présente une plus grande pertinence pour la présente affaire.

34. Dans l’arrêt Prokuratuur, la Cour a jugé que la directive 2002/58/CE ( 8 ), lue en combinaison avec les articles 7, 8 et 11 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, « s’oppose à une réglementation nationale donnant compétence au ministère public, dont la mission est de diriger la procédure d’instruction pénale et d’exercer, le cas échéant, l’action publique lors d’une procédure ultérieure, pour autoriser l’accès d’une autorité publique aux données relatives au trafic et aux
données de localisation aux fins d’une instruction pénale ».

35. Les développements de la Cour sur ce point sont notamment les suivants :

– « Aux fins de garantir, en pratique, le plein respect de ces conditions, il est essentiel que l’accès des autorités nationales compétentes aux données conservées soit subordonné à un contrôle préalable effectué soit par une juridiction soit par une entité administrative indépendante et que la décision de cette juridiction ou de cette entité intervienne à la suite d’une demande motivée de ces autorités présentée, notamment, dans le cadre de procédures de prévention, de détection ou de
poursuites pénales. En cas d’urgence dûment justifiée, le contrôle doit intervenir dans de brefs délais [...] » ( 9 )

– « Ce contrôle préalable requiert entre autres, ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général au point 105 de ses conclusions, que la juridiction ou l’entité chargée d’effectuer ledit contrôle préalable dispose de toutes les attributions et présente toutes les garanties nécessaires en vue d’assurer une conciliation des différents intérêts et droits en cause. S’agissant plus particulièrement d’une enquête pénale, un tel contrôle exige que cette juridiction ou cette entité soit en
mesure d’assurer un juste équilibre entre, d’une part, les intérêts liés aux besoins de l’enquête dans le cadre de la lutte contre la criminalité et, d’autre part, les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel des personnes dont les données sont concernées par l’accès. » ( 10 )

– « [...] En particulier, dans le domaine pénal, l’exigence d’indépendance implique, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général en substance au point 126 de ses conclusions, que l’autorité chargée de ce contrôle préalable, d’une part, ne soit pas impliquée dans la conduite de l’enquête pénale en cause et, d’autre part, ait une position de neutralité vis-à-vis des parties à la procédure pénale. » ( 11 )

– « Tel n’est pas le cas d’un ministère public qui dirige la procédure d’enquête et exerce, le cas échéant, l’action publique. En effet, le ministère public a pour mission non pas de trancher en toute indépendance un litige, mais de le soumettre, le cas échéant, à la juridiction compétente, en tant que partie au procès exerçant l’action pénale. » ( 12 )

– « La circonstance que le ministère public soit, conformément aux règles régissant ses compétences et son statut, tenu de vérifier les éléments à charge et à décharge, de garantir la légalité de la procédure d’instruction et d’agir uniquement en vertu de la loi et de sa conviction ne saurait suffire à lui conférer le statut de tiers par rapport aux intérêts en cause au sens décrit au point 52 du présent arrêt. » ( 13 )

36. La Cour, en somme, ne reconnaît pas au ministère public la qualité de « tiers impartial » lorsque celui-ci cumule les fonctions d’instruction pénale, d’une part, et l’exercice de l’action publique dans le cadre d’une procédure ultérieure, d’autre part. Aussi ne saurait-il se voir attribuer la compétence d’autoriser l’accès aux données relatives au trafic et aux données de localisation détenues par les fournisseurs des services de communications électroniques.

37. L’interprétation de la directive 2014/41 ne saurait échapper à l’influence de l’arrêt Prokuratuur.

38. Au considérant 30 de la directive 2014/41, le législateur a reconnu le caractère intrusif en ce qui concerne la vie privée de l’interception des communications électroniques. C’est précisément la raison pour laquelle certains États membres soumettent cette mesure d’enquête à l’autorisation préalable d’un juge ou d’une juridiction, à l’exclusion d’autres autorités, dont le ministère public.

39. Or, comme je l’exposerai plus en détail dans les présentes conclusions, l’article 6 de la directive 2014/41 dispose que l’autorité d’émission ne peut émettre une DEE que lorsque la mesure d’enquête indiquée dans celle-ci aurait pu être ordonnée dans les mêmes conditions dans le cadre d’une procédure nationale similaire.

40. À cette condition s’ajoute désormais celle qui découle de l’arrêt Prokuratuur pour les cas présentant les deux éléments cumulatifs suivants : a) les autorités émettrices d’une DEE font partie d’un ministère public qui remplit la double condition susmentionnée (fonctions d’instruction et exercice ultérieur de l’action pénale), et b) la DEE comporte une mesure d’interception des communications électroniques ayant l’intensité de celle analysée dans cet arrêt.

41. Selon ces hypothèses, la DEE ne peut pas être émise par le ministère public, même si la législation en vigueur dans son État membre lui permet d’adopter lui-même, sans contrôle juridictionnel préalable au sens strict, la mesure d’interception des communications électroniques.

B.   Appréciation

42. La juridiction de renvoi sollicite l’interprétation du terme « compétent » utilisé dans chacun des deux points de l’article 2, sous c), de la directive 2014/41.

43. Cette disposition définit l’« autorité d’émission » d’une DEE sous une double perspective :

– à l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41, la notion vise « un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur compétent(e) dans l’affaire concernée » ( 14 ) ;

– à l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41, la notion est élargie pour inclure « toute autre autorité compétente définie par l’État d’émission qui, dans le cas d’espèce, agit en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales, compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national » ( 15 ).

44. Pour la juridiction de renvoi :

– Si le terme « compétent » avait la même signification aux points i) et ii) de l’article 2, sous c), de la directive 2014/41, cette directive laisserait entièrement au droit national le soin de déterminer l’autorité compétente pour émettre une DEE.

– Au titre de cette attribution de compétence, l’article 5, paragraphe 1, point 1, de la ZEZR a conféré en Bulgarie au ministère public un pouvoir général d’émission des DEE, indépendamment de leur objet.

– Étant donné que, en droit bulgare, seul un juge peut ordonner l’obtention de certaines preuves dans le cadre de procédures pénales nationales, la ZEZR pourrait enfreindre les principes d’équivalence et d’égalité de traitement : dans certaines affaires purement nationales, le justiciable se voit garantir une intervention judiciaire qui lui serait refusée lorsque les preuves sont obtenues par la voie d’une DEE.

45. Je peux admettre que le terme « compétent » revêt en principe la même portée dans les deux cas visés par l’article 2, sous c), de la directive 2014/41. Tous deux concernent le pouvoir conféré à une autorité d’exercer, dans le cadre d’une procédure pénale, les facultés qui lui sont octroyées par la loi.

46. Ce qui distingue les points i) et ii) de l’article 2, sous c), de la directive 2014/41 n’est pas (ou pas directement), en réalité, la compétence dans « l’affaire concernée » ou « dans le cas d’espèce », mais l’autorité qui l’exerce dans chaque cas.

47. En effet, la vraie différence entre les points i) et ii) de l’article 2, sous c), de la directive 2014/41 réside dans le fait que chacun d’eux vise des catégories d’« autorités d’émission » qui ne coïncident pas : d’une part, les autorités judiciaires [point i)] et, d’autre part, les autorités non judiciaires [point ii)] ( 16 ), qui sont toutes compétentes pour exercer leur autorité respective dans les procédures pénales :

– L’article 2, sous c), i), de cette directive désigne comme « autorité d’émission » d’une DEE les « autorités judiciaires » qui, dans l’exercice de leurs compétences, agissent dans le cadre d’une procédure pénale particulière.

– L’article 2, sous c), ii), de ladite directive confère la qualité d’« autorité d’émission » d’une DEE à « toute autre autorité compétente [...] dans le cas d’espèce ». Cette autre autorité n’est évidemment pas « judiciaire » et la DEE qu’elle décide ne peut être transmise à l’État d’exécution qu’après validation par un juge, une juridiction ou un procureur.

48. L’« autre autorité » visée à l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41 doit être habilitée par le droit national à agir « en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales » et à « ordonner l’obtention de preuves », c’est-à-dire à exercer, dans le cadre des procédures pénales, des compétences propres à certaines autorités administratives (comme, par exemple, les policiers) lorsque le régime auquel elles sont soumises le prévoit.

49. L’article 2, sous c), i) et ii), de la directive 2014/41 emploie ainsi la notion de « compétence » dans un sens unitaire (comme un ensemble de facultés conférées à une institution publique), pour aussitôt tracer une ligne entre les compétences propres des différentes autorités visées aux points i) et ii). L’émission d’une DEE est soumise à des conditions différentes selon les compétences dont il s’agit.

50. Il ne fait pas de doute qu’un procureur compétent dans le cadre d’une procédure pénale déterminée peut être l’« autorité d’émission » de toute DEE au sens de l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41.

51. De même, et conformément à l’article 2, sous c), ii), de cette directive, une « autorité d’émission » peut également être une autorité non judiciaire à laquelle, comme je l’ai déjà rappelé, le droit national confie des missions d’enquête dans le cadre de procédures pénales ou octroie la faculté d’ordonner l’obtention de preuves.

52. Toutefois, le simple statut d’« autorité d’émission » ne suffit pas pour que les autorités auxquelles ce statut est attribué puissent émettre une DEE spécifique et la transmettre à l’État d’exécution. Là encore, il convient de distinguer entre les autorités judiciaires et les autorités non judiciaires visées à l’article 2, sous c), de la directive 2014/41.

53. Comme je l’ai exposé à une autre occasion ( 17 ), « bien que les États membres se voient reconnaître la faculté de désigner les autorités [(non judiciaires)] habilitées à enquêter dans le cadre de procédures pénales et à ordonner l’obtention de preuves, l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41 n’attribue pas aux autorités ainsi désignées d’autre fonction que celle consistant à choisir d’émettre une [DEE], laquelle, “avant d’être transmise à l’autorité d’exécution, [...] est validée” ;
et elle doit l’être spécifiquement par un juge, une juridiction ou un procureur » ( 18 ).

54. En d’autres termes, le droit national peut conférer à une autorité non judiciaire habilitée à ordonner l’obtention de preuves la qualité générique d’« autorité d’émission » d’une DEE. Toutefois, la DEE qu’elle a émise ne peut être transmise à l’État membre d’exécution qu’après validation par une autorité judiciaire.

55. Dans le cas d’une autorité judiciaire, qu’il s’agisse d’un juge ou d’un procureur, la directive 2014/41 n’impose pas qu’un tiers valide la décision d’émettre chaque DEE particulière, mais soumet celle-ci à deux conditions, dont il appartient au juge ou au procureur qui entend l’émettre de vérifier le respect.

56. En effet, l’article 6 de la directive 2014/41, intitulé « Conditions d’émission et de transmission d’une décision d’enquête européenne », prévoit à son paragraphe 1 que l’autorité d’émission ne peut décider d’émettre une DEE que si ces deux conditions sont remplies :

– Premièrement, qu’elle soit « nécessaire et proportionnée » ( 19 ), en plus de tenir compte des droits du suspect ou de la personne poursuivie [article 6, paragraphe 1, sous a), de cette directive].

– Secondement, qu’elle ait pour objet une mesure qui aurait pu « être ordonnée dans les mêmes conditions que dans le cadre d’une procédure nationale similaire » [article 6, paragraphe 1, sous b), de ladite directive].

57. C’est cette seconde condition qui nous intéresse en l’espèce. La directive 2014/41 instaure un certain parallélisme en soumettant l’émission d’une DEE aux conditions prévues par le droit national pour l’adoption d’une mesure équivalente.

58. Ces conditions relèvent, à mon sens, des règles visant à apprécier l’opportunité et de celles qui régissent la procédure, telles que prévues par la législation nationale, mais aussi, et plus particulièrement, de la compétence conférée par cette législation pour adopter, sur le plan national, une mesure équivalente à celle devant être mise en œuvre par la voie de la DEE.

59. Si, parmi les conditions requises dans une procédure nationale similaire, le droit de l’État d’émission prévoit que seul un juge ou une juridiction a compétence pour prendre une mesure d’enquête spécifique, cette mesure ne pourra faire l’objet d’une DEE que si elle est émise par une autorité juridictionnelle ( 20 ).

60. En ce sens, l’article 6, paragraphe 1, sous b), de la directive 2014/41 définit l’étendue de la « compétence » visée à l’article 2, sous c), i), de cette directive.

61. Il résulte de la combinaison de ces deux dispositions que l’autorité judiciaire (juge ou procureur) « compétente dans l’affaire concernée », à laquelle renvoie l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41, est celle habilitée par le droit national à ordonner, dans une affaire purement nationale, la même mesure que celle faisant l’objet de la DEE dont l’émission est en cause.

62. En d’autres termes, la compétence pour émettre une DEE correspond exactement à celle exigée pour adopter, en droit national, une décision de contenu et de portée similaires dans le cadre d’une procédure strictement interne.

63. La « compétence » de l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41 se décompose donc ainsi : a) la compétence pour jouer un rôle dans une procédure pénale, d’une part, et b) la compétence pour adopter une mesure déterminée dans cette procédure, d’autre part.

64. Bien que le régime des mandats d’arrêt européen (MAE) ( 21 ) et celui des DEE soient différents, ce second instrument n’autorise pas davantage le ministère public à faire sur le plan transfrontalier ce qui lui est interdit au niveau national ( 22 ).

65. Dans la présente affaire, les DEE émises par le ministère public bulgare concernaient l’adoption de mesures que, dans une procédure purement interne, seul un juge ou une juridiction est autorisé à prendre en vertu du droit bulgare. En particulier, comme on l’a déjà indiqué, quatre DEE avaient été émises au sujet de la transmission de données relatives au trafic et à la localisation afférentes à certaines communications électroniques.

66. La réglementation bulgare qui, dans cette situation, réserve à un juge (et non pas au ministère public) la décision de demander à un opérateur de téléphonie l’accès aux données relatives au trafic et à la localisation afférentes à des communications électroniques est parfaitement conforme au droit de l’Union.

67. S’agissant des fonctions du ministère public en ce qui concerne cette mesure d’enquête spécifique, l’arrêt Prokuratuur confirme, s’il était besoin, la pertinence de cette législation.

68. En somme, le ministère public bulgare n’a pas la faculté d’émettre et de transmettre une DEE dans un autre État membre en vue d’obtenir une preuve que seule une autorité juridictionnelle pourrait ordonner en Bulgarie. Ce ministère public n’a pas la « compétence » qui, conformément à l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41, lu en combinaison avec l’article 6, paragraphe 1, sous b), de cette directive, constitue la condition à laquelle est subordonnée sa reconnaissance en tant
qu’« autorité d’émission » au sens de cette disposition.

VI. Conclusion

69. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose d’apporter la réponse suivante à la première question préjudicielle du Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie) :

L’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41/UE du Parlement européen et du Conseil, du 3 avril 2014, concernant la décision d’enquête européenne en matière pénale, lu en combinaison avec l’article 6, paragraphe 1, sous b), de cette directive, doit être interprété en ce sens que le ministère public d’un État membre ne peut pas émettre une décision d’enquête européenne en vue d’obtenir les données relatives au trafic et à la localisation afférentes à certaines communications électroniques
lorsque, selon le droit interne de cet État membre, dans une affaire nationale similaire, un juge ou une juridiction se voit réserver la compétence exclusive pour ordonner l’obtention de cette preuve.

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( 1 ) Langue originale : l’espagnol.

( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant la décision d’enquête européenne en matière pénale (JO 2014, L 130, p. 1).

( 3 ) La juridiction de renvoi précise qu’il s’agissait de données relatives au trafic et à la localisation, demandées conformément « au considérant 30 de la directive 2014/41 et à l’article 159a, paragraphe 1, de la NPK ».

( 4 ) Arrêt du 8 décembre 2020, Staatsanwaltschaft Wien (Ordres de virement falsifiés) (C‑584/19, EU:C:2020:1002).

( 5 ) Arrêt du 2 mars 2021, Prokuratuur (Conditions d’accès aux données relatives aux communications électroniques) (C‑746/18, ci-après l’« arrêt Prokuratuur », EU:C:2021:152).

( 6 ) C‑584/19, EU:C:2020:1002.

( 7 ) Arrêt du 8 décembre 2020, Staatsanwaltschaft Wien (Ordres de virement falsifiés) (C‑584/19, EU:C:2020:1002, point 75 et dispositif) : « [L]’article 1er, paragraphe 1, et l’article 2, sous c), de la directive 2014/41 doivent être interprétés en ce sens que relève des notions d’“autorité judiciaire” et d’“autorité d’émission”, au sens de ces dispositions, le procureur d’un État membre ou, plus généralement, le parquet d’un État membre, indépendamment du rapport de subordination légale qui
pourrait exister entre ce procureur ou ce parquet et le pouvoir exécutif de cet État membre, et de l’exposition dudit procureur ou dudit parquet au risque d’être soumis, directement ou indirectement, à des ordres ou à des instructions individuels de la part de ce pouvoir dans le cadre de l’adoption d’une [DEE] ».

( 8 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques) (JO 2002, L 201, p. 37), telle que modifiée par la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009 (JO 2009, L 337, p. 11).

( 9 ) Arrêt Prokuratuur, point 51.

( 10 ) Arrêt Prokuratuur, point 52.

( 11 ) Arrêt Prokuratuur, point 54.

( 12 ) Arrêt Prokuratuur, point 55.

( 13 ) Arrêt Prokuratuur, point 56.

( 14 ) Mise en italique par mes soins.

( 15 ) Mise en italique par mes soins.

( 16 ) Comme dans mes conclusions dans l’affaire A***** und weitere unbekannte Täter (ordres de virement falsifiés) (C‑584/19, ci-après les « conclusions Staatsanwaltschaft », EU:C:2020:587, point 32 et note en bas de page 16), j’utilise les termes « judiciaires » et « non judiciaires » pour des raisons de simplification, dès lors qu’ils reflètent la nature des institutions relevant de ces deux catégories.

( 17 ) Voir mes conclusions dans l’affaire XK (C‑66/20, EU:C:2021:200).

( 18 ) Voir mes conclusions dans l’affaire XK (C‑66/20, EU:C:2021:200, point 75). Mise en italique par mes soins.

( 19 ) La « nécessité » et la « proportionnalité » doivent être appréciées au regard des fins que poursuivent les procédures prévues à l’article 4 de la directive 2014/41 elle-même. Y figurent notamment les « procédures pénales qui sont engagées par une autorité judiciaire, ou à engager devant celle-ci, concernant une infraction pénale conformément au droit de l’État d’émission » [article 4, sous a), de la directive 2014/41].

( 20 ) Par ailleurs, le considérant 30 de la directive 2014/41 permet, du point de vue de l’État d’exécution, de considérer l’interception des communications électroniques, « en fonction du droit national de l’État d’exécution, comme une mesure d’enquête intrusive ».

( 21 ) Voir décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 (JO 2009, L 81, p. 24).

( 22 ) J’ai examiné les différences entre le régime juridique des MAE et des DEE dans les conclusions Staatsanwaltschaft, points 46 à 65. J’ai soutenu que le ministère public ne pourrait pas « valider [(comme condition d’adoption d’un MAE)] une arrestation policière dont les conditions et les effets iraient au-delà de ceux des arrestations qu’il peut lui-même décider » [conclusions dans les affaires OG et PI (Parquets de Lübeck et de Zwickau) (C‑508/18 et C‑82/19 PPU, EU:C:2019:337, point 54)]. Il
serait en effet paradoxal « qu’il ne puisse faire le moins (délivrer un mandat d’arrêt national pour un court laps de temps) tout en pouvant le plus (délivrer un [MAE] qui peut emporter un délai de détention bien plus long) » [conclusions dans les affaires OG et PI (Parquets de Lübeck et de Zwickau) (C‑508/18 et C‑82/19 PPU, EU:C:2019:337, point 76)]. Le paradoxe ne serait pas moindre, selon moi, si le procureur pouvait par lui-même réclamer dans un autre État membre l’obtention de preuves pour
lesquelles il aurait besoin, dans son propre État, de l’autorisation d’une autorité juridictionnelle.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-724/19
Date de la décision : 20/05/2021
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Spetsializiran nakazatelen sad.

Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Décision d’enquête européenne – Directive 2014/41/UE – Article 2, sous c), i) – Notion d’“autorité d’émission” – Article 6 – Conditions d’émission d’une décision d’enquête européenne – Article 9, paragraphes 1 et 3 – Reconnaissance d’une décision d’enquête européenne – Décision d’enquête européenne visant à obtenir des données relatives au trafic et des données de localisation liées aux télécommunications, émise par un procureur désigné comme “autorité d’émission” par l’acte national transposant la directive 2014/41 – Compétence exclusive du juge, dans le cadre d’une procédure nationale similaire, pour ordonner la mesure d’enquête indiquée dans cette décision.

Coopération judiciaire en matière pénale

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Parties
Demandeurs : Procédure pénale
Défendeurs : HP.

Composition du Tribunal
Avocat général : Campos Sánchez-Bordona

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2021:414

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