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02/04/2020 | CJUE | N°C-84/19,

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. G. Hogan, présentées le 2 avril 2020., Profi Credit Polska SA e.a. contre QJ e.a., 02/04/2020, C-84/19,


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GERARD HOGAN

présentées le 2 avril 2020 ( 1 )

Affaires jointes C‑84/19, C‑222/19 et C‑252/19

Profi Credit Polska S.A. z siedzibą w Bielsku- Białej

contre

QJ (C‑84/19)

[Renvoi préjudiciel du Sąd Rejonowy Szczecin – Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie (tribunal d’arrondissement de Szczecin, Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie, Pologne)]

BW

contre

DR (C‑222/19)

et

QL

contre

CG (C‑252/19)>
[Renvoi préjudiciel du Sąd Rejonowy w Opatowie (tribunal d’arrondissement d’Opatowie, Pologne)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Contrats de c...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GERARD HOGAN

présentées le 2 avril 2020 ( 1 )

Affaires jointes C‑84/19, C‑222/19 et C‑252/19

Profi Credit Polska S.A. z siedzibą w Bielsku- Białej

contre

QJ (C‑84/19)

[Renvoi préjudiciel du Sąd Rejonowy Szczecin – Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie (tribunal d’arrondissement de Szczecin, Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie, Pologne)]

BW

contre

DR (C‑222/19)

et

QL

contre

CG (C‑252/19)

[Renvoi préjudiciel du Sąd Rejonowy w Opatowie (tribunal d’arrondissement d’Opatowie, Pologne)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Contrats de crédit aux consommateurs – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Article 1er, paragraphe 2 – Exclusion prévue pour les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions légales ou réglementaires contraignantes – Disposition nationale établissant un montant maximal du coût total du crédit pour le consommateur hors intérêt – Article 4, paragraphe 2 – Champ d’application –
Application à des clauses prévoyant des frais en sus des intérêts – Obligation de rédaction claire et compréhensible des clauses contractuelles – Article 3, paragraphe 1 – Compatibilité d’une législation nationale fixant les coûts maximaux du crédit hors intérêt – Directive 2008/48/CE – Article 3, sous g) – Compatibilité d’une législation nationale calculant le montant maximal du coût du crédit hors intérêt en prenant en considération les frais généraux de l’établissement de crédit »

1. Les présentes demandes de décision préjudicielle portent une nouvelle fois sur l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 2, et de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE ( 2 ), ainsi que de l’article 3, sous g), et de l’article 22 de la directive 2008/48/CE ( 3 ).

2. La directive 93/13 a déjà donné lieu à une abondante jurisprudence tant de la Cour que de juridictions nationales. Si cette directive a de toute évidence renforcé le régime de protection des consommateurs en conférant aux tribunaux le pouvoir de déclarer abusives (et, partant, inexécutables) des clauses de portée générale rédigées par le professionnel, son article 4, paragraphe 2, prévoit cependant deux importantes exceptions à ce régime : lorsque la clause dont le caractère abusif est allégué
porte, premièrement, sur la définition de l’objet principal du contrat, soit, deuxièmement, sur l’adéquation entre le prix ou la rémunération et les biens ou les services. C’est le champ d’application de ces exceptions qui est au cœur des présentes demandes de décision préjudicielle, l’une des questions principales (dans l’affaire C‑84/19) étant de savoir si relèvent de l’une de ces exceptions les frais hors intérêts payés par le client d’une banque dans le cadre d’un contrat de prêt.

3. Cette problématique surgit à propos de trois contrats de crédit à la consommation différents. En substance, dans chaque affaire, le consommateur a opposé le caractère abusif de certaines clauses de coût en réponse au recours formé par l’établissement de crédit pour obtenir l’exécution du contrat de prêt conclu avec le consommateur. Même si elles présentent certains recoupements, chacune de ces affaires soulève une problématique distincte relative à l’application des principes contenus dans la
directive 93/13 dans le cadre des contrats de crédit. Toutefois, avant d’examiner ces questions, il convient tout d’abord de présenter les dispositions juridiques pertinentes.

I. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

1. La directive 93/13

4. L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 dispose :

« Les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des dispositions ou principes des conventions internationales, dont les États membres ou la Communauté sont partis, notamment dans le domaine des transports, ne sont pas soumises aux dispositions de la présente directive. »

5. L’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 dispose :

« Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat. »

6. L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 est libellé comme suit :

« L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

7. L’article 5 de la directive 93/13 énonce :

« Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d’une clause, l’interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. »

8. L’article 8 de la directive 93/13 dispose :

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. »

9. Selon l’article 8 bis, paragraphe 1, de ladite directive :

« Lorsqu’un État membre adopte des dispositions conformément à l’article 8, il informe la Commission de l’adoption desdites dispositions ainsi que de toutes modifications ultérieures, […] »

2. Directive 2008/48

10. L’article 3 de la directive 2008/48, intitulé « Définitions » énonce :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[…]

g) “coût total du crédit pour le consommateur” : tous les coûts, y compris les intérêts, les commissions, les taxes, et tous les autres types de frais que le consommateur est tenu de payer pour le contrat de crédit et qui sont connus par le prêteur, à l’exception des frais de notaire ; ces coûts comprennent également les coûts relatifs aux services accessoires liés au contrat de crédit, notamment les primes d’assurance, si, en outre, la conclusion du contrat de service est obligatoire pour
l’obtention même du crédit ou en application des clauses et conditions commerciales ».

11. L’article 22, paragraphe 1, de la directive 2008/48, intitulé « Harmonisation et caractère impératif de la présente directive », est libellé comme suit :

« 1.   Dans la mesure où la présente directive contient des dispositions harmonisées, les États membres ne peuvent maintenir ou introduire dans leur droit national d’autres dispositions que celles établies par la présente directive. »

B.   Le droit polonais

12. En ce qui concerne la présentation de la législation nationale, je me réfère à mes conclusions dans l’affaire Mikrokasa et Revenue Niestandaryzowany Sekurytyzacyjny Fundusz Inwestycyjny Zamknięty w Warszawie ( 4 ). En substance, le droit polonais limite au double des intérêts légaux annuels les intérêts pouvant être demandés en contrepartie d’un acte juridique. Cependant, certains créanciers ont éludé cette limite en augmentant artificiellement le montant facturé de la commission et des frais.
Le législateur polonais a alors adopté l’article 5, point 6-a, et de l’article 36-a de l’ustawa z dnia 12 maja 2011 r. o kredycie konsumenckim [loi du 12 mai 2011 sur le crédit à la consommation (Dz. U. de 2011, no 126, position 715, ci-après la « loi sur le crédit à la consommation »), qui établit un mécanisme plafonnant le montant des coûts du crédit hors intérêts pouvant être demandés.

II. Les faits et les demandes de décision préjudicielle

A.   Affaire C‑84/19

13. Le 19 septembre 2016, Profi Credit Polska et un consommateur ont conclu un contrat de crédit à la consommation par le biais d’un intermédiaire. En échange de la remise de la somme de 9000 zlotys polonais (PLN) (environ 2090 euros) remboursable par l’emprunteur en 36 mensualités, le contrat prévoit que le consommateur doit verser, premièrement, un taux d’intérêt annuel de 9,83 % du capital emprunté, deuxièmement, un « paiement préalable » de 129 PLN (environ 30 euros), troisièmement, une
« commission » de 7771 PLN (environ 1804 euros) et quatrièmement, un paiement pour paquet complémentaire [désigné par « Twój Pakiet – Pakiet Extra » (« Ton Paquet – Paquet Extra »)] de 1100 PLN (environ 255 euros).

14. Selon la juridiction de renvoi, les coûts du crédit hors intérêts prévus par le contrat ont été fixés à hauteur du plafond prévu à l’article 36-a de la loi sur le crédit à la consommation. Toutefois, le contrat ne précisait pas en quelle qualité agissait la personne avec laquelle le défendeur a conclu le contrat. Il ne définissait pas non plus les notions de « paiement préalable » et de « commission », et il ne détaillait pas les prestations spécifiques de la requérante dont les frais précités
représentaient la contrepartie. Seule pouvait être déterminée la contrepartie de « Ton Paquet », qui recouvrait le droit du consommateur à obtenir un report unique de deux mensualités ou une réduction unique du montant de quatre mensualités, s’accompagnant d’une prolongation de la durée du contrat (en cas de report) ou de la nécessité d’un remboursement à une date ultérieure (en cas de réduction).

15. Avant l’échéance du remboursement, Profi Credit Polska a sollicité le prononcé d’une injonction de paiement. La juridiction de renvoi a rendu en sa faveur un jugement par défaut à l’encontre duquel le consommateur a formé une opposition en soulevant des objections tirées du caractère abusif de certaines clauses du contrat. Au cours de cette procédure, l’établissement de crédit a expliqué que le « paiement préalable » correspondait aux frais réels encourus lors de la conclusion du contrat et que
la « commission » rémunérait l’octroi du prêt, les intérêts rémunérant la mise à la disposition de fonds au consommateur.

16. C’est dans ce contexte que la juridiction de renvoi a exprimé des doutes quant à savoir s’il fallait considérer que les clauses fixant ces frais étaient exclues de l’appréciation du caractère abusif des clauses prévues par la directive 93/13. Les motifs en sont les suivants : premièrement, puisque ces frais n’excèdent pas le plafond prévu par la législation nationale, il pourrait être soutenu que lesdites clauses se bornent à refléter cette législation et, partant, conformément à l’article 1er,
paragraphe 2 de la directive 93/13, qu’elles ne sont pas soumises aux dispositions de cette directive. Deuxièmement, ces clauses relatives au prix pourraient constituer l’objet principal du contrat pour Profi Credit Polska et, en tant que telles, sortir du champ d’application de la directive au titre de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13. Troisièmement, l’appréciation de la justification de ces frais pourrait également être exclue en vertu de l’article 4, paragraphe 2, de cette
directive en ce qu’elle équivaudrait à une appréciation de l’adéquation de la rémunération au service fourni en contrepartie. Enfin, la juridiction de renvoi a des doutes quant à la clarté et à l’intelligibilité de la rédaction d’une clause au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 qui impose des intérêts, des frais et une commission sans spécification de leurs différences, ni leurs natures respectives et qui ne précise pas en quelle qualité a agi la personne avec laquelle le
consommateur a conclu le contrat.

17. C’est dans ces circonstances que le Sąd Rejonowy Szczecin – Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie – III Wydział Cywilny (tribunal d’arrondissement de Szczecin-Prawobrzeże, Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie, troisième division civile, Pologne) a décidé de surseoir à statuer et de déférer les questions suivantes à la Cour :

« 1) L’article 1er, paragraphe 2, de la [directive 93/13] doit-il être interprété en ce sens qu’il exclut l’application des dispositions de ladite directive en matière d’appréciation du caractère abusif des différentes clauses relatives aux coûts du crédit hors intérêts, lorsque des dispositions législatives impératives dans un État membre instaurent un plafond pour ces coûts, en prévoyant que les coûts du crédit hors intérêts qui résultent d’un contrat de crédit à la consommation ne sont pas
dus pour la partie dépassant les coûts maximaux du crédit hors intérêts, calculés de la manière prévue par la loi, ou le montant total du crédit ?

2) L’article 4, paragraphe 2, de la [directive 93/13] doit-il être interprété en ce sens que le coût hors intérêts, qui est supporté et payé par l’emprunteur parallèlement à l’emprunt, en sus des intérêts, et lié à la conclusion du contrat et à l’octroi du prêt, en tant que tels (ce coût revêtant la forme d’un paiement, d’une commission ou une autre nature), en tant que clause dudit contrat, n’est pas soumis à l’appréciation visée dans cette disposition, dans le contexte de son caractère abusif,
si cette même clause a été rédigée de façon claire et compréhensible ?

3) L’article 4, paragraphe 2, de la [directive 93/13] doit-il être interprété en ce sens que les clauses contractuelles instaurant divers types de coûts liés à l’octroi du prêt ne sont pas “rédigées de façon claire et compréhensible” si elles ne précisent pas quels sont concrètement les services réciproques en échange desquels lesdits coûts sont prélevés et si elles ne permettent pas au consommateur de déterminer les différences entre ces coûts ? »

B.   L’affaire C‑222/19

18. Le 8 mars 2018, BW a conclu avec un consommateur un contrat de crédit à la consommation d’une durée de deux ans. Le contrat, qui n’a pas fait l’objet d’une négociation individuelle, prévoit la remise de 4500 PLN (environ 1048 euros) remboursable en 24 mensualités et son exécution est garantie par un billet à ordre émis en blanc. En contrepartie de la mise à la disposition de cette somme, le contrat prévoit le paiement d’intérêts annuels de 10 %, ce qui représente un montant total de 900 PLN
(environ 210 euros), des frais d’octroi du prêt s’élevant à 1125 PLN (environ 262 euros) et des frais de gestion du prêt s’élevant à 2700 PLN (environ 628 euros). Selon la juridiction nationale, le taux annuel effectif a été fixé à 119,42 %. Toutefois, les coûts du crédit hors intérêts au sens de l’article 36-a de la loi sur le crédit à la consommation n’excèdent pas le plafond instauré par cette disposition.

19. Le consommateur a reçu le montant convenu et a commencé à effectuer les paiements. Un défaut de paiement a amené le prêteur à assigner le défendeur devant la juridiction de renvoi en paiement du solde restant dû ainsi que des intérêts légaux moratoires. Le prêteur a simultanément formé une demande d’injonction de paiement sur la base du billet à ordre émis en blanc.

20. Cependant, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant à la compatibilité de la législation polonaise avec la directive 93/13 s’agissant du plafonnement des coûts du crédit hors intérêts facturables par les établissements de crédit, étant donné que le calcul du plafond prend en considération non seulement les coûts associés à la conclusion ou à la gestion du contrat de crédit, mais aussi les frais généraux du prêteur. Un tel mécanisme n’interdirait pas au prêteur de répercuter sur le
consommateur des coûts tels que la maintenance de la base de données, la rémunération du personnel ou la gestion du risque opérationnel. Toutefois, il serait possible d’interpréter l’arrêt rendu dans l’affaire Constructora Principado ( 5 ) en ce sens que pourrait être considéré comme impliquant un « déséquilibre significatif » au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 un cas de figure dans lequel un professionnel répercute des frais lui incombant sur le consommateur par le
biais de clauses standardisées.

21. C’est dans ce contexte que le Sąd Rejonowy w Opatowie – I Wydział Cywilny (tribunal d’arrondissement d’Opatów, première division civile, Pologne) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Les dispositions de la [directive 93/13], et en particulier l’article 3, paragraphe 1, de cette directive, ainsi que les principes de droit de l’Union relatifs à la protection du consommateur et à l’équilibre contractuel, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils font obstacle à l’instauration, dans l’ordre [juridique] national, de l’institution des “coûts maximaux du crédit hors intérêts” et du modèle mathématique de calcul du montant de ces coûts, prévus à l’article 5, point 6-a, lu
conjointement avec l’article 36-a, de la [loi sur le crédit à la consommation], ces mécanismes juridiques permettant d’inclure également, dans les coûts afférents au contrat de crédit qui sont supportés par le consommateur (coût total du crédit), les coûts de l’activité économique exercée par l’entreprise ? »

C.   Affaire C‑252/19

22. Le 31 août 2016, un consommateur a conclu avec QL un contrat de crédit non négocié portant sur 5000 PLN (environ 1149 euros), remboursable en 36 mensualités. Le contrat prévoit à titre de rémunération de l’établissement de crédit le paiement, premièrement, d’un intérêt annuel de 9,81 %, à savoir, un total de 796 PLN (environ 182 euros), deuxièmement, de frais préalables de 129 PLN (environ 29 euros), troisièmement, de frais relatif au service intitulé « Twój Pakiet » (Ton paquet) de 900 PLN
(environ 206 euros) et, quatrièmement, d’une commission de 3939 PNL (environ 905 euros). Le taux annuel effectif global du contrat de prêt serait ainsi de 77,77 %. S’agissant des coûts de ce crédit hors intérêt au sens de l’article 36-a de la loi sur le crédit à la consommation, ils sont inférieurs au plafond instauré par cette disposition.

23. Cependant, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant à la compatibilité de la législation nationale plafonnant les frais facturables des établissements de crédit avec la directive 2008/48. En effet, la fixation de ce plafond implique de prendre en considération non seulement les frais liés à la conclusion ou à la gestion d’un contrat en particulier, mais aussi les frais généraux du prêteur. Cependant, il semblerait qu’il découle de l’article 3, sous g), de la directive 2008/48 que les
seuls frais pouvant être mis à charge du consommateur seraient les frais marginaux, c’est‑à‑dire les frais liés au contrat de crédit.

24. C’est dans ces circonstances que le Sąd Rejonowy w Opatowie I Wydział Cywilny (tribunal d’arrondissement d’Opatów, première division civile, Pologne) a décidé de surseoir à statuer et de déférer à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Les dispositions de la directive [2008/48], et en particulier l’article 3, sous g), et l’article 22, paragraphe 1, de ladite directive, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils font obstacle à l’instauration, dans l’ordre [juridique] national, de l’institution des “coûts maximaux du crédit hors intérêts” et du modèle mathématique de calcul du montant de ces coûts, prévus à l’article 5, point 6-a, lu conjointement avec l’article 36-a, de la [loi sur le crédit à la consommation], ces
mécanismes juridiques permettant d’inclure également, dans les coûts afférents au contrat de crédit qui sont supportés par le consommateur (coût total du crédit), les coûts de l’activité économique exercée par l’entreprise ? »

III. Analyse

A.   Sur la première question dans l’affaire C‑84/19

25. Par sa première question, la juridiction de renvoi veut savoir en substance, dans l’affaire C‑84/19, si l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’échappent au champ d’application de la directive les clauses d’un contrat de crédit non négocié prévoyant le paiement de frais par le consommateur, lorsque ces frais, considérés dans leur intégralité, n’excèdent pas un certain plafond instauré par la législation nationale.

26. Il convient à cet égard de prendre en considération le fait que, en vertu des dispositions combinées de son article 1er, paragraphe 1, et de ses articles 2 et 3, paragraphe 1, la directive 93/13 s’applique aux clauses de tout contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle et qui a été conclu entre un professionnel et un consommateur. Toutefois, à titre exceptionnel, l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 prévoit que les clauses contractuelles qui reflètent des
dispositions législatives ou réglementaires impératives ne sont pas soumises aux dispositions de celle‑ci.

27. Bien qu’il incombe à la juridiction de renvoi de déterminer si une clause contractuelle spécifique, telle que celle en cause au principal, relève de cette exception, la Cour peut néanmoins fournir à la juridiction de renvoi des indications dont cette dernière est censée tenir compte afin d’apprécier le caractère abusif de la clause concernée ( 6 ). La juridiction de renvoi est alors en mesure d’examiner si l’exception prévue par cette disposition est susceptible de s’appliquer dans l’affaire en
cause au principal.

28. En l’espèce, la juridiction de renvoi se demande si des clauses prévoyant des frais n’excédant pas un certain plafond financier fixé par une disposition nationale peuvent relever des exclusions prévues à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13.

29. Il convient à cet égard de noter que le simple fait que des clauses contractuelles sont conformes à une disposition législative n’implique pas en tant que tel que ces clauses « reflètent » nécessairement le libellé de cette disposition.

30. En l’espèce, il s’avère que les doutes exprimés par la juridiction de renvoi procèdent des considérations figurant dans la jurisprudence de la Cour, selon lesquelles l’exception prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 trouve sa raison d’être dans le fait qu’il est légitime de présumer que le législateur national a établi un équilibre entre l’ensemble des droits et des obligations des parties à certains contrats, un équilibre que le législateur de l’Union a expressément voulu
préserver ( 7 ).

31. Cependant, pour ma part, je ne considère pas qu’il y a lieu de déduire de ces considérations de la Cour que l’instauration dans la législation nationale d’une limite maximale impliquerait nécessairement la réalisation, par le législateur, d’un équilibre entre tous les droits et les obligations des parties. Je parviens à cette position pour les motifs suivants.

32. Premièrement, ainsi que la Cour l’a jugé, puisque l’article 1er, paragraphe 2, institue une exception à la directive 93/13 dont l’objectif est de protéger les consommateurs, cette exception est d’interprétation stricte ( 8 ).

33. Deuxièmement, la fixation par le législateur d’un plafond financier n’implique pas nécessairement qu’il faille considérer, en toutes hypothèses, qu’une clause prévoyant le paiement de frais inférieurs à ce plafond est équilibrée. Si tel était le cas, un État membre pourrait écarter la protection prévue par la directive 93/13 en instaurant un plafond très élevé.

34. Troisièmement, ainsi que le gouvernement polonais le relève, la directive 93/13 serait privée de tout effet utile si l’on devait considérer que les clauses contractuelles qui sont conformes aux dispositions nationales régissant les contrats reflètent des dispositions législatives ou réglementaires au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de cette directive, puisque, en toute hypothèse, les clauses contractuelles sont présumées respecter le droit national.

35. À mon sens, en énonçant la raison d’être de l’exception prévue par l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13, comme elle l’a fait dans des arrêts tels que les arrêts RWE Vertrieb et Banco Santander et Escobedo Cortés, la Cour voulait uniquement mettre en exergue le fait que le contrôle que la directive 93/13 vise à instaurer porte non pas sur la législation nationale, mais sur tous les inconvénients auxquels le consommateur est susceptible d’être exposé en raison de l’asymétrie
d’information, des compétences techniques et du pouvoir de négociation existant entre lui et le professionnel ( 9 ).

36. Dans ces circonstances, je ne vois aucune raison de me départir de la conclusion selon laquelle l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 ne s’applique pas à des clauses qui se bornent à se conformer à une limite monétaire fixée par une législation nationale. Par conséquent, j’estime que l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que les clauses non négociées individuellement, fixant des coûts devant être payés par le consommateur, ne sont pas
exclues du champ d’application de cette directive pour l’unique motif que ces coûts, considérés dans leur intégralité, n’excèdent pas un certain plafond fixé par la législation nationale ( 10 ).

B.   Sur la deuxième question dans l’affaire C‑84/19

37. Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande en substance, dans l’affaire C‑84/19, si l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que les clauses d’un contrat de crédit non négocié rédigées de manière claire et compréhensible sont exclues de l’appréciation de leur caractère potentiellement abusif au motif qu’elles prévoient le paiement de frais autres que des intérêts.

38. Il convient de rappeler à cet égard que l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 prévoit deux exceptions en ce qui concerne l’appréciation du caractère abusif de clauses contractuelles. Cependant, l’application de ces exceptions est soumise à la condition que les clauses concernées soient rédigées de façon claire et compréhensible.

39. Bien que, en principe, il incombe aux juridictions nationales de déterminer précisément les clauses qui, parce qu’elles fixent les prestations essentielles du contrat, doivent être considérées comme étant relatives à son objet principal ( 11 ), ou dont le contrôle serait lié à la question l’adéquation entre le prix et le service ou le bien fourni en contrepartie, cette exception doit néanmoins trouver dans toute l’Union européenne une interprétation autonome et uniforme. Il s’ensuit, par
conséquent, que la Cour peut préciser si l’article 4, paragraphe 2, est applicable à une catégorie déterminée de clauses ( 12 ).

40. En vertu de la première exception, les clauses relatives à « la définition de l’objet principal du contrat » sont exclues de l’appréciation de leur caractère potentiellement abusif. Conformément à la jurisprudence de la Cour, de telles clauses sont celles qui fixent les prestations essentielles du contrat et qui, comme telles, caractérisent celui‑ci. Pour apprécier si tel est le cas, il y a lieu de prendre en considération l’essence, l’économie générale et les obligations essentielles du
contrat, ainsi que son contexte juridique et factuel ( 13 ).

41. À cet égard, l’objet principal de tout accord de type contractuel est ce qui caractérise sa nature juridique, c’est‑à‑dire les clauses d’un contrat qui sont essentielles à sa formation. En ce qui concerne les contrats de crédits, ces obligations sont celles par lesquelles un prêteur consent à prêter une somme d’argent à un emprunteur qui a l’obligation de la rembourser à une date déterminée ou sous la forme de mensualités.

42. Dans un contrat de crédit standardisé, le crédit est bien entendu consenti aux conditions du marché. Les prestations essentielles de l’emprunteur portent donc non seulement sur le remboursement de l’argent mis à sa disposition, mais aussi sur la rémunération de ce service. En effet, l’obligation de l’acheteur de verser le prix ou la rémunération convenue fait de toute évidence partie de l’objet principal de la vente de biens ou de la fourniture de services ( 14 ).

43. En vertu de la deuxième exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, l’appréciation du caractère abusif des clauses ne saurait porter sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir, d’autre part, pour autant bien entendu, que ces clauses soient rédigées dans des termes clairs et compréhensibles ( 15 ).

44. Étant donné qu’une condition (« term ») du contrat peut revêtir la forme de plusieurs clauses, paragraphes ou alinéas et inversement, un contrat peut également stipuler plusieurs clauses prévoyant le paiement de frais en contrepartie d’un seul service ( 16 ). Il en résulte que, lorsqu’une clause énonce des frais faisant partie du prix total des biens ou des services, constituant l’objet principal du contrat en cause, on assiste à chevauchement des deux exceptions en cause.

45. En l’occurrence, il semble que les doutes émis par la juridiction de renvoi trouvent leur origine dans la notion de prix ou de rémunération. En effet, la juridiction de renvoi indique que, en droit polonais, une clause relative au prix ne peut pas porter sur l’objet principal d’un contrat de crédit, si ce prix est exprimé sous une autre forme que des intérêts.

46. Cependant, en droit de l’Union européenne, la notion de prix ou de rémunération n’est pas aussi restrictive, même dans le cas d’un contrat de crédit. En effet, il s’avère qu’il n’y a pas de disposition de droit de l’Union stipulant que le paiement devant être effectué à propos d’un contrat de crédit ne peut prendre que la forme d’intérêts ( 17 ). Les établissements de crédit peuvent donc demander à être payés sous la forme d’intérêts ou de frais fixes ( 18 ).

47. Cette conclusion est également corroborée par le libellé de la directive 2008/48 qui prévoit, s’agissant des contrats de crédit visés par cette directive, l’obligation pour les établissements de crédit d’informer les consommateurs du coût total de tels crédit, lequel doit être calculé en prenant en considération tous les types de frais relatifs au contrat de crédit que le consommateur est tenu de payer. En effet, si le droit de l’Union avait pour effet d’interdire aux prêteurs de se rémunérer
autrement que par les intérêts, la référence à tous les types de frais n’aurait pas été nécessaire.

48. S’agissant plus précisément de la directive 93/13, comme celle-ci ne définit pas la notion de « prix » ou de « rémunération », il convient, selon une jurisprudence constante de la Cour, de se référer au sens habituel de ceux‑ci dans le langage courant, tout en tenant compte du contexte dans lequel ils sont utilisés et des objectifs poursuivis par la réglementation dont ils font partie ( 19 ).

49. Dans le langage courant, le terme « prix » correspond à la somme totale exigée pour payer une opération contractuelle particulière, alors que le terme « rémunération » correspond de manière plus générale à l’argent versé pour un travail déterminé ou pour la prestation d’un service. Ces deux notions sont dès lors plus ou moins synonymes, si ce n’est que la notion de « prix » est peut-être plus souvent utilisée à propos du paiement de biens, alors que le terme « rémunération » est plus
généralement employé à propos d’un service, en particulier dans le contexte du travail ( 20 ).

50. Par conséquent, peuvent relever de la première exception de l’article 4, paragraphe 2, les clauses rédigées de manière claire et compréhensible qui énoncent le prix global du service ou du bien constituant l’objet principal du contrat, indépendamment du fait qu’elles prévoient le paiement d’intérêts ou de frais, quelles que soient les tâches incombant à l’établissement de crédit pour octroyer le crédit.

51. Dans l’affaire en cause au principal, à l’exception de la clause relative au prix afférente à « Ton paquet – paquet complémentaire », les dispositions de l’accord contractuel régissant le prix du crédit – exprimé en frais ou en intérêts – doivent être considérées comme relevant tout simplement de la contrepartie de l’octroi du prêt et, partant, comme étant régies par la première exception énoncée à l’article 4, paragraphe 2.

52. Les clauses régissant le prix du crédit sont bien entendu aussi visées par la deuxième exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13, mais uniquement en ce qui concerne le prix demandé ( 21 ). Étant donné que les clauses en cause dans l’affaire C‑84/19 ne sont pas seulement relatives à l’objet principal du contrat, dans la mesure où elles énoncent des frais spécifiques devant être payés et qu’elles fixent donc partiellement le prix devant être payé pour l’octroi du crédit,
ces clauses sont également régies par la deuxième exception.

53. Cette conclusion n’est remise en question ni par les objectifs poursuivis par l’article 4, paragraphe 2, ni par une interprétation systématique de cette disposition.

54. Concernant leur objectif, il semblerait que les exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 2, reflètent un choix de politique législative de considérer que les parties sont libres de façonner les obligations principales des contrats comme elles l’entendent ( 22 ). En économie de marché, le postulat général est que les particuliers sont présumés rationnels et agissent afin de protéger leurs propres intérêts. Ces derniers sont logiquement supposés se renseigner sur ce qu’ils achètent,
c’est‑à‑dire sur l’objet principal du contrat, ainsi que sur le prix devant être payé en contrepartie ( 23 ). L’idée sous‑jacent du législateur semble dès lors être que, à la différence d’autres clauses contractuelles standardisées qui ne sont pas nécessairement lues par les consommateurs ( 24 ), les clauses relatives à l’objet principal du contrat ou au prix ou à la rémunération sont nettement moins susceptibles de les laisser indifférents. Néanmoins, ces développements supposent que l’objet
principal du contrat, ainsi que le prix ou la rémunération aient été indiqués de manière claire et compréhensible.

55. S’agissant du contexte, dans la mesure où l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 édicte des exceptions à l’appréciation du caractère abusif des clauses telle qu’elle a été prévue dans le régime de protection du consommateur instauré par cette directive, cette disposition est d’interprétation stricte ( 25 ). Le libellé de l’article 4, paragraphe 2, n’établissant pas de distinction selon que le prix ou la rémunération du service en question a été exprimé en tant que frais fixes ou en
tant qu’intérêts fixes, une telle interprétation ne justifierait pas que soient exclues du champ d’application de cette disposition des clauses contractuelles prévoyant le paiement de frais autres que des intérêts.

56. Cette conclusion ne serait pas différente, quand bien même une interprétation plus restrictive de l’article 4, paragraphe 2, ( 26 ) devrait être adoptée, puisque que le prix constitue un élément essentiel de tout contrat pour ainsi dire par définition. Bien entendu, les professionnels sont libres de stipuler que le paiement prendra la forme de frais ou d’intérêts. Cependant, dès que des frais relèvent de la contrepartie de l’octroi du crédit et qu’ils ne sont pas relatifs à un service
accessoire, les clauses prévoyant de tels frais doivent être considérées comme relevant du champ d’application des deux exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 2.

57. Par conséquent, pour notre propos, peu importe que le prix ou la rémunération d’un service se présente sous la forme d’intérêts ou de frais, ou que le contrat spécifie les tâches dont doit s’acquitter le professionnel pour être en mesure de fournir ce service. Ce qui compte, ainsi que je l’expliquerai plus loin, c’est l’aptitude du consommateur à comprendre le prix global qu’il devra payer et ce qu’il a acheté. C’est de cette manière que le consommateur peut déterminer si le contrat répond à ses
besoins et qu’il peut le comparer à toutes les autres offres existant sur le marché.

58. Il résulte de ces développements que, aux fins de l’affaire C‑84/19, pour pouvoir relever de l’une des exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 2, une clause prévoyant des coûts relatifs à un contrat de crédit doit uniquement énoncer de manière claire et compréhensible le montant de ce coût La forme de ce coût est dénuée de pertinence.

59. En outre, je ne pense pas que l’application de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doive être écartée, lorsque le litige concerne l’existence d’une contrepartie du prêteur à une clause de prix spécifique. En effet, questionner l’existence d’une prestation effective du prêteur en contrepartie d’un coût déterminé ou évaluer l’adéquation entre une partie du prix d’un service et les tâches nécessaires à l’accomplissement de ce service revient nécessairement à remettre en question
l’adéquation entre la qualité du service offert et le prix facturé, ce qui est précisément ce que l’article 4, paragraphe 2, de la directive exclut de manière générale.

60. Tout en admettant qu’il existe certaines considérations de la Cour dans les arrêts Matei et Kiss CIB Bank qui, d’un certain point de vue, peuvent sembler indiquer autre chose ( 27 ), je pense, à la lumière de l’article 4, paragraphe 2, que le caractère abusif de toute clause de prix au titre de la directive 93/13 ne dépend pas de l’accomplissement par le prêteur d’une tâche précise en contrepartie de chacune de ces clauses. En effet, une telle interprétation équivaudrait à contourner le libellé
clair de l’article 4, paragraphe 2, et, partant, le choix effectué par le législateur de l’Union : la directive 93/13 ne régit pas le point de savoir si le prix facturé est excessif ou non. Par conséquent, étant donné que la justification du prix est en principe dépourvue de pertinence dans l’appréciation du caractère abusif des clauses au titre de la directive 93/13, l’exigence de transparence prévue par cette directive ne saurait être interprétée comme imposant aux établissements de crédit
d’informer les consommateurs des tâches liées à l’octroi d’un crédit.

61. Les États membres ont bien sûr la faculté, en principe, d’adopter une disposition contraire dans leur propre droit national. L’article 8 de la directive 93/13 prévoit que les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur, pour autant que de telles dispositions soient compatibles avec toutes les dispositions du droit de l’Union
applicables et que l’État membre en question ait respecté l’exigence de notification énoncée à l’article 8 bis de la directive 93/13.

62. Par conséquent, n’est pas contraire en soi à la directive 93/13 le fait que, comme l’a indiqué la juridiction de renvoi, dans la législation nationale, l’adéquation entre le prix et le service ou le bien fourni n’est exclue de l’appréciation du caractère abusif d’une clause que si ce prix est relatif à la prestation principale prévue par le contrat. De même, cette législation ne saurait être considérée comme violant la directive 93/13 pour le seul motif qu’elle énonce qu’une clause relative au
prix ne peut pas porter sur la prestation principale, si le prix facturé ne se présente pas sous la forme d’intérêts.

63. Toutefois, je tiens à souligner que, si la juridiction de renvoi considère de toute évidence que les contrôles de prix instaurés par cette législation nationale ne sont pas suffisamment stricts, il s’agit d’une question qui est soustraite au champ d’application du droit de l’Union et qui, partant, relève manifestement de la compétence non pas de la Cour, mais de la législation polonaise.

64. Par conséquent, je considère, en réponse à la deuxième question dans l’affaire C‑84/19, que l’article 4, paragraphe 2, doit être interprété en ce sens que les clauses d’un contrat de crédit non négocié qui énoncent le prix ou la rémunération de ce crédit sont exclues de l’appréciation de leur caractère potentiellement abusif prévu par cette directive, lorsqu’elles ont été rédigées de manière claire et compréhensible, même si elles prévoient le paiement de frais autres que des intérêts.
Toutefois, les États membres restent libres de prévoir dans leur propre droit national un mécanisme d’appréciation du caractère abusif du prix, à condition que ses dispositions soient compatibles avec le droit de l’Union et que les États membres respectent les exigences de l’article 8 bis de la directive 93/13.

C.   Sur la troisième question dans l’affaire C‑84/19

65. Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande en substance, dans l’affaire C‑84/19, si l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que n’a pas été rédigée de manière claire et compréhensible une clause dans un contrat de crédit non négocié imposant au consommateur de payer certains frais, si cette clause ne spécifie pas les services constituant la contrepartie des frais devant être payés et que les informations fournies dans le contrat ne
permettent pas au consommateur de déterminer les différences entre les coûts.

66. Comme je l’ai déjà observé, l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 édicte deux exceptions à l’appréciation du caractère abusif des clauses figurant dans des contrats de crédit non négociés. Ces deux exceptions sont à leur tour soumises à l’exigence de clarté et d’intelligibilité de la rédaction des dispositions contractuelles pertinentes.

67. Selon la jurisprudence de la Cour, cette exigence d’intelligibilité implique que le contrat expose de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme auquel se réfère la clause concernée ainsi que, le cas échéant, la relation entre ce mécanisme et celui prescrit par d’autres clauses, de sorte que ce consommateur soit mis en mesure d’évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui en découlent pour lui ( 28 ).

68. Pour déterminer si une clause est rédigée de manière claire et compréhensible, il convient d’avoir égard à la nature, à l’économie générale et aux stipulations de l’ensemble contractuel auquel elle appartient, ainsi qu’à son contexte juridique et factuel ( 29 ). Outre ces éléments, d’autres facteurs tels que l’intelligibilité des clauses spécifiques, la clarté de leur libellé, la spécificité de la terminologie utilisée ou l’utilisation possible de techniques de visualisation ( 30 ) sont autant
de considérations pertinentes. La place occupée par la clause dans le contrat, ou le fait que les dispositions pertinentes figurent dans plusieurs clauses, paragraphes ou alinéas peuvent également constituer des éléments pertinents.

69. Comme je l’ai expliqué dans mes conclusions dans l’affaire Kiss et CIB Bank, les conditions d’intelligibilité prévues à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 impliquent, par exemple, lorsqu’un contrat est relativement long et que le prix à payer en contrepartie des différents services fournis a été réparti entre plusieurs clauses, que ces différentes clauses soient regroupées dans un même endroit du contrat et que leur effet combiné soit porté à l’attention du consommateur ( 31 ).

70. Dans son arrêt Kásler et Káslerné Rábai, la Cour déduit l’existence d’une obligation plus générale de transparence à la fois de l’article 4, paragraphe 2, et de l’article 5 de cette directive ( 32 ). Par conséquent, les professionnels sont censés fournir aux consommateurs suffisamment d’informations pour leur permettre de prendre des décisions avec prudence et en connaissance de cause ( 33 ).

71. Il en résulte que, si une clause exige qu’un consommateur paie certains frais en contrepartie d’un contrat de crédit non négocié, le caractère abusif du montant de ces frais ne peut pas faire l’objet d’une appréciation par le juge au regard de l’article 4, paragraphe 2, si les dispositions contractuelles sont compréhensibles. En substance, cela signifie que, un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif qui prend en considération tous les éléments du contrat, ainsi que
les informations fournies par l’établissement de crédit, doit être en mesure de comprendre, avant la conclusion du contrat, qu’il devra également payer ces coûts et que, par conséquent, il pouvait correctement évaluer les conséquences économiques de la signature du contrat.

72. C’est dans ce contexte que la juridiction de renvoi se demande en substance, dans l’affaire C‑84/19, si cette exigence de transparence implique que les professionnels détaillent les services en contrepartie desquels les coûts fixés dans un contrat doivent être payés ou, à tout le moins, que le consommateur soit capable de déduire cette information du contrat.

73. À titre liminaire, il convient d’observer que la juridiction de renvoi semble utiliser le terme « service » dans le sens particulier d’une référence aux tâches dont doit s’acquitter le professionnel en vue d’exécuter l’obligation de fournir le service faisant l’objet du contrat.

74. À cet égard, j’estime que l’exigence de clarté et d’intelligibilité de la rédaction de clause contractuelle ne saurait être interprétée comme impliquant que le consommateur soit informé des tâches incombant au professionnel en vertu du contrat. À ce sujet, peu importe que le consommateur ne puisse déduire cette information spécifique des informations portées à son attention, sous réserve que la nature du contrat soit claire. Cette conclusion repose sur les motifs suivants.

75. Premièrement, conformément à la jurisprudence de la Cour, la condition énoncée à l’article 4, paragraphe 2, exige uniquement que les consommateurs soient informés des conséquences des clauses du contrat et non pas de leur raison d’être ( 34 ). En d’autres termes, ce qui importe est qu’aucun frais n’ait été dissimulé au consommateur avant la conclusion du contrat. En revanche, la question de savoir si le consentement du consommateur était juridiquement valable n’est pas régie par la directive
93/13, cette question continuant à relever de la compétence des États membres ( 35 ). Il en va de même des pratiques commerciales déloyales, qui sont régies par la directive 2005/29 ( 36 ). Cette directive envisage les effets ou les conséquences de clauses – en particulier les « clauses imprimées en petits caractères » (« small prints »), si vous voulez – et non pas les clauses qui attirent en général l’attention du consommateur.

76. Deuxièmement, comme l’avocat général Saugmandsgaard Øe l’a relevé dans l’affaire Ibercaja Banco ( 37 ), la tendance générale dans la jurisprudence de la Cour, lorsqu’elle examine l’exigence de transparence énoncée par la directive 93/13, est de veiller à ce que cette exigence n’aille pas au-delà de ce qui peut raisonnablement être attendu d’un professionnel. L’on peut difficilement s’empêcher de penser que le professionnel se verrait imposer une charge excessive et injustifiée s’il devait
spécifier de manière individualisée les tâches en contrepartie desquelles certains frais sont facturés.

77. Troisièmement, mettre une telle obligation à charge du professionnel reviendrait en substance à lui imposer de motiver chaque clause relative au prix. Une telle obligation serait en porte-à-faux avec la raison d’être de la deuxième exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, qui est précisément d’éviter que les professionnels soient tenus de justifier leurs frais, les préservant ainsi de l’ingérence des tribunaux dans les stratégies de fixation de prix de l’entreprise.

78. Quatrièmement, comme je l’ai déjà relevé, en économie de marché, le prix d’un bien ou d’un service n’est pas en tant que tel directement lié aux tâches impliquées par ce bien ou ce service, ni à ses coûts de production, mais à l’offre ou à la demande. Par conséquent, lorsqu’un contrat prévoit un prix global pour le même service, il serait quelque peu artificiel de s’attendre à ce que chaque clause soit le reflet d’une tâche en particulier.

79. Il est encore moins concevable de s’attendre à ce que les professionnels communiquent aux consommateurs des informations dignes de foi sur les coûts spécifiques imputables à chaque composant des biens ou des services fournis. En effet, les professionnels qui exercent plusieurs activités devraient se livrer à un exercice comptable complexe (et onéreux) pour répartir leurs frais généraux entre leurs différentes activités ( 38 ). Ils devraient à tout le moins établir une comptabilité analytique
dont le but est précisément d’identifier et d’évaluer les éléments constitutifs de leur revenu d’exploitation net, alors que le droit de l’Union ne comporte aucune disposition imposant une telle obligation ( 39 ).

80. En tout état de cause, il semble évident que le présent contrat de crédit relève du champ d’application de la directive 2008/48. Les dispositions pertinentes de cette directive doivent également être prises en compte, cette directive ayant, selon la jurisprudence de la Cour, procédé à une harmonisation complète des obligations d’information pouvant être imposées aux établissements de crédit ( 40 ).

81. Premièrement, étant donné que la directive 2008/48 est réputée avoir été transposée par les États membres dans leur législation nationale, l’on peut considérer que les clauses qui en reflètent les dispositions en mentionnant les informations qu’elle a rendues impératives sont nécessairement exclues du champ d’application de la directive 93/13 en vertu de l’article 1er, paragraphe 2, de celle‑ci ( 41 ).

82. Deuxièmement, il existe un clair principe d’interprétation selon lequel, lorsque des dispositions de plusieurs instruments de l’Union s’appliquent à la même situation, elles doivent s’interpréter, dans la mesure du possible, d’une manière harmonieuse ( 42 ).

83. Les exigences de transparence et d’intelligibilité de la directive 93/13 sont manifestement des dispositions dont le niveau de généralité est plus élevé que celui des exigences, plus spécifiques, de la directive 2008/48. Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de donner aux termes généraux de la directive 93/13 une interprétation concernant les informations qui doivent être communiquées au consommateur, ce qui dérogerait aux exigences plus spécifiques de la directive 2008/48 ( 43 ).

84. À mon sens, il y a lieu de considérer que la directive 2008/48 spécifie la portée exacte de l’exigence de transparence en ce qui concerne les contrats de crédit qu’elle régit. C’est ainsi qu’il convient de comprendre la relation entre la directive 93/13 et tout autre acte de l’Union énonçant une obligation de fournir des informations plus détaillées, sans préjudicie d’une disposition en sens contraire, si l’on veut éviter qu’une application divergente de la directive 93/13 par les juridictions
nationales cloisonne le marché intérieur et, partant, compromette l’harmonisation que ces autres instruments s’efforcent de réaliser compte tenu de la protection des consommateurs.

85. Or, l’article 10 de la directive 2008/48 qui énonce les informations à mentionner dans les contrats de crédit n’exige pas que les établissements de crédit fournissent des informations détaillées sur leurs coûts. Par conséquent, le fait que des dispositions d’un contrat de crédit ne précisent pas les services spécifiques en contrepartie desquels certains coûts doivent être payés ne suffit pas à considérer que ces dispositions ont été rédigées d’une manière inintelligible aux fins de l’article 4,
paragraphe 2, et de l’article 5 de la directive 93/13.

86. Si la question posée doit être comprise en ce sens qu’elle concerne la nécessité de mentionner les services, au sens habituel de ce terme, qui sont fournis en contrepartie de chaque clause relative au prix, ainsi que les tâches dont le prestataire doit s’acquitter pour fournir le service en cause, il convient de rappeler, au risque de se répéter, que l’exigence de transparence énoncée audit article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 porte, selon la jurisprudence de la Cour, sur les
conséquences économiques du contrat et sur son objet principal et non pas sur la valeur pécuniaire de chaque clause contractuelle. Ainsi, lorsqu’un consommateur achète plusieurs produits ou services étroitement liés, ce qui importe est le prix total qu’il devra payer ( 44 ), ainsi que l’étendue des services fournis en contrepartie afin qu’il puisse comparer, le cas échéant, les différentes offres disponibles pour ce même « lot » de produits ou de services. Il n’est toutefois pas nécessaire que
le prix global de ce « lot » soit ventilé en coûts particuliers distincts.

87. En effet, la notion de service étant assez vague ( 45 ) et, en conséquence, chaque service proposé étant susceptible d’être scindé en une multitude de services distincts, il peut s’avérer impossible en pratique d’exiger des établissements de crédit qu’ils indiquent un prix pour chaque « service ».

88. Par conséquent, j’estime que le principe de transparence figurant audit article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il n’exige pas, en principe, de détailler les coûts spécifiques afférents à des services spécifiques de la manière indiquée par la juridiction de renvoi dans sa question préjudicielle. C’est uniquement dans certaines circonstances spécifiques que de telles informations peuvent être nécessaires au respect de l’exigence de transparence.

89. À mon avis, tel est de toute évidence le cas lorsque le contrat porte sur plusieurs services aisément dissociables ( 46 ), en ce sens que chaque service mentionné pourrait être fourni aux consommateurs indépendamment des autres services.

90. Tel est également le cas lorsque le consommateur a le droit de mettre fin à l’un de ces services avant les autres, hypothèse dans laquelle il doit être en mesure d’évaluer l’incidence commerciale de l’exercice de cette faculté. Il en va de même lorsque le contrat mentionne des services optionnels dont il fixe le prix à l’avance. Dans cette dernière hypothèse, pour que le consommateur puisse évaluer les conséquences économiques du contrat, il est essentiel que le prix de ces services puisse être
déterminés avec précision, ce qui suppose que le consommateur puisse déterminer le montant des frais à payer s’il choisit de recourir à chacun des services spécifiques.

91. Ce type d’information peut encore s’avérer nécessaire lorsque le contrat lui‑même mentionne l’existence de plusieurs services – certains principaux, d’autres accessoires – et que la clause ou les clauses concernées ne fixent pas le prix de l’un de ces services pris isolément, mais qu’elle peut ou qu’elles peuvent avoir une incidence sur ce prix. Puisque la seconde exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 ne s’appliquerait pas dans un tel cas, il pourrait s’avérer
nécessaire de déterminer le service auquel se rapporte la clause pour déterminer si celui-ci ne relève pas néanmoins de l’objet principal du contrat, cas dans lequel cette clause serait toujours susceptible de relever de la première exception prévue à l’article 4, paragraphe 2 ( 47 ).

92. Dans l’affaire C‑84/19 au principal, le contrat de crédit mentionne, certes, un service qu’il qualifie d’accessoire, à savoir « Ton paquet – paquet complémentaire ». Pour ma part, tout en estimant que Profi Credit Polska n’était pas tenue de traiter ce service de manière distincte, je ne pense pas qu’il faille exprimer une opinion à ce sujet, car l’exposé des faits par la juridiction de renvoi montre que, en tout état de cause, le contrat de crédit en cause mentionne un prix distinct pour ce
service ( 48 ).

93. La seule question qui demeure est celle de savoir si le contrat aurait dû préciser plus clairement si le prix total facturé englobait la rémunération de l’intermédiaire. Il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer si le contrat comportait une ambiguïté à ce sujet ou si, en l’absence de référence à l’intermédiaire dans cette clause, il n’est pas sûr que cette commission faisait partie du prix du crédit. Toutefois, quand bien même une telle ambiguïté quant à la rémunération de
l’intermédiaire serait constatée, je ne suis pas sûr que cette circonstance rendrait nécessairement inintelligible le contrat entre l’établissement de crédit et le consommateur au sens dudit article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13. En effet, cet article détermine le champ d’application de l’article 3, paragraphe 1, de cette directive qui prévoit à son tour que toute clause abusive contenue dans un contrat non négocié ne lie pas le consommateur. Dès lors, l’intelligibilité visée audit
article 4, paragraphe 2, doit être imputable à une clause spécifique du contrat. Dans le cas de figure soumis à l’examen en l’espèce, je ne vois pas quelles clauses pourraient être considérées comme étant abusives. De deux choses l’une : soit la commission de l’intermédiaire est comprise dans le prix total, soit elle ne l’est pas. Si elle ne l’est pas, ce qui pourrait éventuellement être considéré comme abusif est non pas le prix mentionné dans le contrat, mais une commission supplémentaire
susceptible d’être facturée au consommateur en sus du prix mentionné dans le contrat.

94. À mon sens, cette question pourrait être résolue par une simple application des principes généraux du droit polonais des obligations. En effet, dans le cas où la rémunération de l’intermédiaire n’est pas comprise dans le prix global, cet intermédiaire ne sera en droit de demander le paiement de frais que si un contrat prévoyant une telle rémunération a été conclu avec ce consommateur (établissant ainsi un « vinculum juris »). Si tel est le cas, le consommateur sait toutefois nécessairement qu’il
devra payer des frais additionnels.

95. En toute hypothèse, j’observe que l’article 21 de la directive 2008/48 prévoit des obligations spécifiques d’informations, lorsqu’un contrat de crédit a été conclu via un intermédiaire. Par conséquent, en raison de l’harmonisation complète réalisée par cette directive, si ces obligations sont respectées, aucune absence de transparence dans la relation entre l’établissement de crédit et le consommateur ne saurait être constatée.

96. À la lumière de ces développements, je propose de répondre à la troisième question dans l’affaire C‑84/19 que l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que des clauses de contrats de crédit non négociés prévoyant le paiement de frais ne doivent pas, en principe, être considérées comme n’ayant pas été rédigées de manière claire et compréhensible pour l’unique motif qu’elles ne spécifient pas les tâches incombant à l’opérateur, ni les coûts qu’il doit
supporter pour être en mesure de fournir le service convenu. De telles clauses ne peuvent être considérées comme ne remplissant pas cette condition que dans l’hypothèse où les conséquences financières du contrat, considérées dans leur intégralité ou en leur qualité d’objet principal du contrat, ne résultent pas clairement du contrat, notamment en raison de la présence d’un nombre excessif de clauses relatives au prix.

D.   Sur la question posée dans l’affaire C‑222/19

97. Par sa question, la juridiction de renvoi demande en substance, dans l’affaire C‑222/19, si les dispositions de la directive 93/13 en général et celle de l’article 3, paragraphe 1, en particulier, doivent être interprétées en ce sens que la directive fait obstacle à l’instauration par un État membre d’un mécanisme de contrôle de prix basé sur la notion de « coûts maximaux du crédit hors intérêts » dans la mesure où le calcul de ces coûts implique de prendre en considération les frais généraux du
prêteur.

98. Comme il en résulte de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13, les dispositions de cette directive ne visent pas à édicter des règles concernant les dispositions nationales, mais à appréhender les déséquilibres et l’abus potentiellement inclus dans les clauses contractuelles conclues entre un professionnel et un consommateur, lorsque ces contrats n’ont pas été négociés individuellement.

99. Dans ces circonstances, j’estime que, pour donner une réponse utile à la juridiction de renvoi, il convient de reformuler la présente question, qui cherche en réalité à déterminer s’il convient d’interpréter l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 en ce sens que, dans un contrat de crédit non négocié, une clause crée un « déséquilibre significatif » au motif qu’elle prévoit le paiement des frais en sus des intérêts et que ces frais constituent un moyen pour le professionnel de
répercuter sur le consommateur ses frais généraux.

100. Il convient à cet égard de rappeler que, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13, une clause d’un contrat non négocié est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat ( 49 ).

101. Bien que j’estime que l’expression « en dépit de l’exigence de bonne foi » décrit simplement la situation qui aurait prévalu en l’absence d’un déséquilibre significatif et, partant, qu’elle ne constitue pas, en soi, une condition distincte à part entière, il convient de prendre en considération le fait que la Cour a jugé que l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 énonce deux critères pour définir la notion de « clause abusive », à savoir, d’une part, que la clause doit être
« contraire à l’exigence de bonne foi » et, d’autre part, l’« existence d’un déséquilibre significatif, au détriment du consommateur, entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat » ( 50 ).

102. Même si, à cet égard, l’on peut ne pas être convaincu par cette distinction ( 51 ), cela a probablement peu d’importance en pratique. Compte tenu de l’interprétation que la Cour donne, en pratique, de ces deux critères, lorsque le deuxième critère est rempli, le premier l’est aussi nécessairement ( 52 ).

103. En effet, selon la jurisprudence de la Cour, le premier critère implique d’examiner si le professionnel, en traitant de façon loyale et équitable avec le consommateur, pouvait raisonnablement s’attendre à ce que ce dernier accepte une telle clause. En vertu du deuxième critère, il y a lieu de prendre en considération le point de savoir si les obligations établies par la clause ont placé le consommateur dans une situation significativement moins favorable que celle qui aurait prévalu, en droit
national, en l’absence de cette clause, sans compensation de cet inconvénient ( 53 ).

104. Or, un professionnel doit logiquement s’attendre à ce que, en traitant de façon loyale et équitable avec le consommateur, ce dernier refuse d’accepter toute clause le plaçant dans une situation significativement différente de celle qui aurait prévalu en droit national en l’absence de cette clause, sauf si cette différence est compensée, principalement, par des différences appropriées de prix ( 54 ). Par conséquent, si une clause prévoit des tâches ou des obligations qui s’écartent manifestement
des attentes légitimes quant au contenu du contrat, d’un consommateur moyen, généralement avisé et raisonnablement prudent, cette clause peut être déclarée abusive ( 55 ).

105. Cependant, je ne pense pas qu’il soit possible de considérer qu’une clause d’un crédit d’agrément est abusive uniquement parce qu’elle prévoit le paiement de frais en sus d’intérêts, ou parce que ces frais sont susceptibles de constituer un moyen pour le professionnel de répercuter ses frais généraux sur le consommateur.

106. Je souhaiterais cependant relever d’emblée que, dans la mesure où une telle clause porte sur le prix du crédit, en vertu de l’article 4, paragraphe 2, ce n’est que si elle n’a pas été rédigée de manière claire et intelligible, ou qu’elle n’est pas suffisamment explicite quant à ses conséquences économiques que le montant de frais devant être payé par le consommateur peut être soumis à l’appréciation prévue par la directive 93/13.

107. Sous réserve de cette exception, j’estime qu’il est difficile de considérer qu’une clause crée un « déséquilibre significatif »uniquement parce qu’elle prévoit le paiement de frais en sus des intérêts. En effet, comme je l’ai expliqué plus haut, les établissements de crédit sont libres de déterminer les conditions de leur rémunération, pour autant que le consommateur connaisse le prix global. Dans l’hypothèse d’un contrat de crédit relevant du champ d’application de la directive 2008/48, tel
est nécessairement le cas si les obligations fixées dans cette directive et transposées en droit national ont été respectées.

108. De même, à mon avis, un déséquilibre significatif ne saurait simplement résulter du fait que le prix facturé pour un service peut constituer un moyen commode pour son prestataire de répercuter ses frais généraux. En effet, comme je l’ai expliqué dans mes conclusions dans l’affaire Kiss et CIB Bank ( 56 ), le fait que les professionnels répercutent sur les consommateurs tous leurs frais, y compris leurs frais généraux, est simplement une réalité économique. Par conséquent, le prix des services
ou des biens sert en partie à compenser les frais relatifs à l’activité générale du prêteur.

109. Certes, dans son arrêt Constructora Principado ( 57 ), la Cour n’a pas exclu la possibilité de déclarer abusive une clause ayant pour effet de répercuter sur l’acheteur d’un appartement un impôt immobilier municipal et certains frais d’abonnements individuels pour les diverses consommations telles que l’eau, le gaz, l’électricité, les égouts.

110. Cependant, je ne pense pas que ce principe s’applique au contrat de crédit en cause dans l’affaire C‑222/19 au principal, étant donné que la problématique examinée dans l’affaire Constructora Principado concernait non pas la répercussion de certains coûts sur les clients, mais la transparence de la clause litigieuse. En effet, le montant des coûts concernés par cette clause n’avait pas été calculé. Quant à l’impôt immobilier municipal, il n’était même pas déterminable au moment de la conclusion
du contrat, mais devait être calculé ultérieurement par les autorités fiscales. Par conséquent, cette clause ne répercutait pas seulement sur le consommateur certains coûts supportés par le vendeur, mais elle transférait aussi au consommateur l’incertitude quant au montant total de ces coûts, une incertitude qui constituait un risque incombant au vendeur en sa qualité d’entrepreneur ( 58 ).

111. Pour ma part, s’agissant des clauses prévoyant le paiement d’un coût, je pense, compte tenu de l’articles 4, paragraphe 2, et de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13, que de telles clauses, quelle que soit la forme qu’elles revêtent, ne peuvent être déclarées abusives que si elles remplissent deux conditions, à savoir, premièrement, que ce coût ait été en réalité dissimulé au consommateur, ce qui ménage la possibilité que son adéquation soit appréciée et, deuxièmement, que le prix
global du service ou du bien en cause soit manifestement excessif.

112. En effet, la directive 93/13 ne prévoit qu’un seul critère du caractère abusif de clauses, à savoir celui qui est énoncé à son article 3, paragraphe 1, qui exige l’existence d’un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties ( 59 ). Par conséquent, s’il y a lieu de prendre en considération l’exigence d’intelligibilité et de transparence découlant de l’article 4, paragraphe 2, et de l’article 5 de la directive 93/13 pour apprécier si une clause concrète d’un contrat
est abusive ( 60 ), une absence de clarté ou de transparence ne suffit pas en elle‑même pour déclarer une clause abusive ( 61 ). Cette clause doit, en dépit de l’exigence de bonne foi, créer un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties ( 62 ). Toute autre interprétation reviendrait à priver le critère énoncé à l’article 3, paragraphe 1, de son effet utile.

113. Cependant, dans le cas d’une clause relative au prix qui serait incompréhensible, cette condition peut être aisément établie, un tel déséquilibre significatif pouvant résulter du caractère excessif du montant des coûts payés ( 63 ). En effet, en traitant de façon loyale et équitable avec le consommateur, le professionnel pouvait raisonnablement s’attendre à ce que ce dernier refuse de payer un tel prix.

114. Par conséquent, je propose que la Cour réponde à la question posée dans l’affaire C‑222/19 de la manière suivante : l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, dans un contrat de crédit non négocié, une clause ne crée pas un « déséquilibre significatif » pour les seuls motifs qu’elle prévoit le paiement de frais en sus des intérêts et que ces frais peuvent constituer un moyen pour le professionnel de répercuter ses frais généraux sur le consommateur. En
réalité, un tel caractère abusif au titre de la directive 93/13 n’est établi que si, premièrement, le prix total devant être payé n’est pas transparent, en particulier en raison de la présence d’un nombre excessif de clauses relatives au prix, ménageant ainsi la possibilité d’une appréciation de son caractère abusif de la manière permise, par voie d’exception, par l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 et, deuxièmement, que ce prix est manifestement excessif.

E.   Sur la question dans l’affaire C‑252/19

115. Par sa question, la juridiction de renvoi demande en substance, dans l’affaire C‑252/19, si les dispositions de la directive 2008/48 et, en particulier les articles 3, sous g), et 22, paragraphe 1, de cette directive doivent être interprétées comme faisant obstacle à l’instauration dans la législation nationale de la notion de « coûts maximaux du crédit hors intérêts », prévue à l’article 36-a de la loi sur le crédit à la consommation, dans la mesure où cette notion englobe, pour le calcul de
ces coûts, les coûts de l’intégralité de l’activité économique du créancier.

116. Il convient d’observer à cet égard que l’article 10 de la directive 2008/48 harmonise les dispositions nationales sur les informations à mentionner dans les contrats de crédit. Étant donné que, conformément à l’article 22 de la directive 2008/48, les États membres ne peuvent maintenir ou introduire dans leur droit national d’autres dispositions que celles établies par la présente directive, il y a lieu de considérer cette harmonisation comme étant complète et obligatoire ( 64 ).

117. Comme je l’ai expliqué dans mes conclusions dans l’affaire Mikrokasa et Revenue Niestandaryzowany Sekurytyzacyjny Fundusz Inwestycyjny Zamknięty w Warszawie ( 65 ), et ainsi que la Cour l’a jugé en substance dans cette affaire ( 66 ), cela ne signifie toutefois pas que les États membres ne peuvent pas utiliser, relativement au crédit régi par la directive 2008/48, d’autres notions que celles qui sont prévues par cette directive, comme « les coûts maximaux du crédit hors intérêts » mentionnés à
l’article 36-a de la loi sur le crédit à la consommation. En effet, bien que la directive 2008/48 réalise une harmonisation complète, cette harmonisation est néanmoins limitée aux aspects du contrat de crédit auxquels il est fait référence dans la directive, à savoir les obligations d’information, l’appréciation de la solvabilité, l’accès aux bases de données, le droit de retrait et le droit de procéder à des remboursements anticipés du crédit.

118. Par conséquent, étant donné que l’harmonisation réalisée par la directive 2008/48 ne régit pas les dispositions nationales prévoyant un contrôle du prix ou de la rémunération facturée en échange de l’octroi du crédit, cet aspect demeure de la compétence des États membres. Par conséquent, les États membres peuvent utiliser, dans le cadre d’un tel contrôle réglementaire, d’autres notions que celles qui sont mentionnées à l’article 3 de la directive 2008/48, pour autant que l’usage de ces notions
ne viole pas le droit de l’Union.

119. Il incombe à la juridiction de renvoi de déterminer dans l’affaire C‑252/19 au principal si la notion de « coûts maximaux du crédit hors intérêts » utilisée à l’article 36-a de la loi sur crédit à la consommation conduit à mettre à charge d’un professionnel des obligations relevant du champ d’application de la directive 2008/48.

120. Au regard de ce qui précède, j’estime qu’il convient de répondre à la question dans l’affaire C‑252/19 de la manière suivante : les dispositions de la directive 2008/48 et, en particulier, l’article 3, sous g), et l’article 22, paragraphe 1, de celle‑ci, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne font pas obstacle à l’instauration, dans la législation nationale, de la notion de « coûts maximaux du crédit hors intérêts », même si de tels coûts englobent les frais généraux du prêteur, pour
autant cette notion ne soit pas utilisée aux fins de l’application d’une disposition nationale qui relèverait du champ d’application de la directive 2008/48.

IV. Conclusion

121. Sur la base À la lumière des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles du Sąd Rejonowy Szczecin – Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie – III Wydział Cywilny (tribunal d’arrondissement de Szczecin-Prawobrzeże, Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie, troisième division civile, Pologne) et du Sąd Rejonowy w Opatowie – I Wydział Cywilny (tribunal d’arrondissement d’Opatów, première division civile, Pologne) de la manière suivante :

1) L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs doit être interprété en ce sens que les clauses d’un contrat non négocié, fixant les coûts devant être payés par le consommateur, ne sont pas exclues du champ d’application de cette directive pour l’unique motif que ces coûts, considérés dans leur intégralité, n’excèdent pas un certain plafond fixé par la législation nationale.

2) L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que les clauses d’un contrat de crédit non négocié qui énoncent le prix ou la rémunération de ce crédit sont exclues de l’appréciation de leur caractère abusif, pour autant qu’elles aient été rédigées de manière claire et compréhensible, même si elles prévoient le paiement de frais autres que des intérêts. Toutefois, les États membres restent libres de prévoir dans leur propre droit national un mécanisme
d’appréciation du caractère abusif du prix, à condition que ses dispositions soient compatibles avec le droit de l’Union et que les États membres respectent les exigences de l’article 8 bis de la directive 93/13.

3) L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que des clauses de contrats de crédit non négociés prévoyant le paiement de frais ne doivent pas, en principe, être considérées comme n’ayant pas été rédigées de manière claire et compréhensible pour l’unique motif qu’elles ne spécifient pas les tâches incombant à l’opérateur, ni les coûts qu’il doit supporter pour être en mesure de fournir le service convenu. De telles clauses ne peuvent être considérées comme
ne remplissant pas cette condition que dans l’hypothèse où les conséquences financières du contrat, considérées dans leur intégralité ou en leur qualité d’objet principal du contrat, ne résultent pas clairement du contrat, notamment en raison de la présence d’un nombre excessif de clauses relatives au prix.

4) L’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, dans un contrat de crédit non négocié, une clause ne crée pas un « déséquilibre significatif » pour les seuls motifs qu’elle prévoit le paiement de frais, en sus des intérêts, et que ces frais peuvent constituer un moyen pour le professionnel de répercuter ses frais généraux sur le consommateur. En réalité, un tel caractère abusif au titre de la directive 93/13 n’est établi que si, premièrement, le prix
total devant être payé n’est pas transparent, en particulier en raison de la présence d’un nombre excessif de clauses relatives au prix, ménageant ainsi la possibilité d’une appréciation de son caractère abusif de la manière permise, par voie d’exception, par l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 et, deuxièmement, que ce prix total est manifestement excessif.

5) La directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil et, en particulier, l’article 3, sous g), et l’article 22, paragraphe 1, de celle‑ci, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne font pas obstacle à l’instauration, dans la législation nationale, de la notion de « coûts maximaux du crédit hors intérêts », même si de tels coûts englobent les frais généraux du
prêteur, pour autant cette notion ne soit pas utilisée aux fins de l’application d’une disposition nationale qui relèverait du champ d’application de la directive 2008/48.

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( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Directive du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29), telle que modifiée par la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011 (JO 2011, L 304, p. 64).

( 3 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66).

( 4 ) C‑779/18, EU:C:2019:1146, points 10 à 17.

( 5 ) Arrêt du 16 janvier 2014, Constructora Principado (C‑226/12, EU:C:2014:10).

( 6 ) Voir, à cet égard, arrêt du 16 janvier 2014, Constructora Principado (C‑226/12, EU:C:2014:10, point 20).

( 7 ) Voir arrêts du 21 mars 2013, RWE Vertrieb (C‑92/11, EU:C:2013:180, point 28), et du 7 août 2018, Banco Santander et Escobedo Cortés (C‑96/16 et C‑94/17, EU:C:2018:643, point 43).

( 8 ) Voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703, point 31).

( 9 ) Voir arrêts du 3 septembre 2015, Costea (C‑110/14, EU:C:2015:538, point 27), et du 17 mai 2018, Karel de Grote – Hogeschool Katholieke Hogeschool Antwerpen (C‑147/16, EU:C:2018:320, point 59). De façon plus générale, j’estime que l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété à la lumière de l’article 3, paragraphe 1, de cette même directive. Par conséquent je comprends l’article 1er, paragraphe 2, comme visant à exclure du champ d’application de la directive 93/13 des
clauses qui, dans la mesure où elles se bornent à reproduire des dispositions impératives législatives ou réglementaires, ne modifient pas en pratique la situation juridique des parties qui reste entièrement déterminée par la législation nationale. Or, le fait qu’une clause se situe en dessous d’une certaine limite ou, plus généralement, est conforme à une certaine norme législative, n’exclut pas la possibilité qu’une telle clause modifie la situation juridique des parties, et, partant, relève du
champ d’application de la directive 93/13.

( 10 ) Voir également à cet égard, les conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Gómez del Moral Guasch (C‑125/18, EU:C:2019:695, point 83) où il considère que ne relève pas de l’exception prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 une clause contractuelle dans laquelle le fournisseur choisit, parmi plusieurs indices de référence officiels reconnus par la loi, un indice applicable au contrat.

( 11 ) Arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703, point 33).

( 12 ) Voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2015, Matei (C‑143/13, EU:C:2015:127, point 50).

( 13 ) Arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C‑26/13, EU:C:2014:282, points 49 et 51).

( 14 ) Voir, à cet égard, arrêt du 5 juin 2019, GT (C‑38/17, EU:C:2019:461, point 30).

( 15 ) Comme l’énonce le considérant 19 de la directive 93/13, cela exclut les clauses décrivant le rapport qualité/prix de la fourniture ou de la prestation.

( 16 ) Voir mes conclusions dans l’affaire Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:411, note 17 en bas de page) et la communication de la Commission orientations relatives à l’interprétation et à l’application de la directive 93/13/CEE du Conseil concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 2019, C 323, p. 4), point 4.3.1.

( 17 ) Certes, la notion de « prix » au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 ne saurait être déterminée par la notion de « coût total du crédit pour le consommateur » au sens de l’article 3, sous g), de la directive 2008/48, dans la mesure où le coût total couvre également les paiements effectués aux tiers. Voir arrêt du 26 février 2015, Matei (C‑143/13, EU:C:2015:127, point 47). Toutefois, s’il était interdit aux professionnels de se rémunérer autrement qu’en demandant des
intérêts, le législateur de l’Union n’aurait pas été contraint de préciser que la notion de « coût total du crédit pour le consommateur » au sens de cette directive inclut tous les coûts qu’un consommateur est tenu de payer pour le contrat de crédit.

( 18 ) Voir mes conclusions dans l’affaire Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:411, point 37).

( 19 ) Voir, par analogie, arrêt du 29 juillet 2019, Pelham e.a. (C‑476/17, EU:C:2019:624, point 28).

( 20 ) Même si les contrats de travail ne relèvent pas du champ d’application de la directive 93/13. Quant aux notions de « service » et de « bien », elles se réfèrent à ce qui constitue l’objet du contrat, c’est à dire ce qui est acheté par le consommateur, et non pas, comme je l’expliquerai plus loin, aux tâches incombant au professionnel pour vendre le bien ou fournir le service en cause.

( 21 ) Selon la jurisprudence, des clauses qui n’indiquent pas le prix du service ou des biens en cause, mais qui sont relatives, en général « à la contrepartie due par le consommateur au prêteur ou ayant une incidence sur le prix effectif devant être payé à ce dernier par le consommateur » ne relèvent donc pas, en principe, de cette seconde catégorie de clauses, sauf en ce qui concerne la question de savoir si le montant de la contrepartie ou du prix tel que stipulé dans le contrat est en
adéquation avec le service fourni en contrepartie par le prêteur. Voir en ce sens arrêts du 26 février 2015, Matei (C‑143/13, EU:C:2015:127, point 56), et du 3 octobre 2019, Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:820, point 35).

( 22 ) La Cour ne s’est jamais clairement prononcée sur les objectifs de la première exception de l’article 4, paragraphe 2 (« […] définition de l’objet principal du contrat […] »). S’agissant de la deuxième exception de l’article 4, paragraphe 2, (« […] adéquation du prix et de la rémunération […] »), elle a jugé, en substance, que cette exception s’explique par l’absence de critère juridique objectif ou invocable auquel confronter l’adéquation du prix et de la rémunération. Voir en ce sens, arrêt
du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C‑26/13, EU:C:2014:282, point 55).

( 23 ) Selon Michael Schillig, l’article 4, paragraphe 2, traduit un compromise entre deux approches (parfois conflictuelles), à savoir l’approche des droits du consommateur et l’approche du libre marché. Schillig, M., (2011) « Directive 93/13 and the “price term exemption”: A comparative analysis in the light of the “market for lemons’ rationale”, vol. 60, International and Comparative Law Quarterly, Cambridge University Press, p. 933‑963.

( 24 ) Comme je l’ai souligné dans mes conclusions dans l’affaire Mikrokasa et Revenue Niestandaryzowany Sekurytyzacyjny Fundusz Inwestycyjny Zamknięty w Warszawie (C‑779/18, EU:C:2019:1146, point 69), des études empiriques montrent que de nombreuses personnes ne lisent pas les contrats en entier et se concentrent plutôt sur les éléments principaux tels que le prix ou sur la partie qu’ils considèrent comme étant la plus importante. Comme le relève Schillig, op. cit., (p. 936) « les consommateurs
acceptent souvent des conditions contractuelles standardisées sans les avoir lues parce que cela ne vaut tout simplement pas la peine de lire, de chercher et de négocier de meilleures conditions ».

( 25 ) Voir arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C‑26/13, EU:C:2014:282, point 42), et du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703, point 34).

( 26 ) Il convient de ne pas confondre l’interprétation stricte et l’interprétation restrictive qui consiste à dégager, à l’aide d’éléments extérieurs au texte, tels que l’objectif et le contexte, une signification plus étroite de cette disposition que celle que permettrait une interprétation simplement stricte (c’est‑à‑dire une interprétation basée uniquement sur le texte).

( 27 ) Arrêts du 26 février 2015, Matei (C‑143/13, EU:C:2015:127, point 70), et du 3 octobre 2019, Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:820, point 40).

( 28 ) Voir, par exemple, arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703, point 45), et du 19 septembre 2019, Lovasné Tóth (C‑34/18, EU:C:2019:764, point 62).

( 29 ) Arrêt 23 avril 2015, Van Hove (C‑96/14, EU:C:2015:262, point 50).

( 30 ) Voir Barton T., Berger-Walliser G., et Haapio H., « Visualization : Seeing Contracts for What They Are, and What They Could Become », Journal of Law, Business & Ethics, 2013, vol. 19, p. 47‑64.

( 31 ) Conclusions de l’avocat général Hogan dans l’affaire Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:411, point 41).

( 32 ) Arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C‑26/13, EU:C:2014:282, point 40). Le premier arrêt qui s’est référé à cette exigence était l’arrêt du 21 mars 2013, RWE Vertrieb (C‑92/11, EU:C:2013:180, point 45). Cependant, la Cour y était interrogée sur l’interprétation combinée de la directive 93/13 et de la directive 2003/55, l’article 3, paragraphe 3, de cette dernière prévoyant explicitement une obligation de transparence. Ce n’est que dans l’affaire Kásler et Káslerné Rábai que la
Cour s’est référée à cette obligation uniquement par rapport à la directive 93/13.

( 33 ) Voir, en ce sens, les arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C‑26/13, EU:C:2014:282, points 73 et 74), et du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703, point 51). Pour ce motif, en vue d’apprécier si une clause remplit l’exigence de transparence, seules les informations fournies au plus tard lors de la signature du contrat doivent être prises en considération.

( 34 ) Voir arrêts du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C‑26/13, EU:C:2014:282, point 75), du 23 avril 2015, Van Hove (C‑96/14, EU:C:2015:262, point 50), et du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703, point 45). L’exigence énoncée à l’article 4, paragraphe 2, implique d’informer le consommateur non pas de ce que, pour exécuter ses obligations, le professionnel devra faire 5, 10 ou 15 photocopies, mais des effets du contrat. La prestation économique du vendeur ou du
fournisseur, c’est‑à‑dire sa capacité à minimiser ses coûts, n’est pas la préoccupation principale des consommateurs. Les considérations économiques qui sous-tendent la motivation des consommateurs est d’obtenir le meilleur prix pour un bien ou un service en particulier. Cela présuppose qu’ils soient informés du prix total qu’ils devront payer pour le bien ou le service qu’ils ont l’intention d’acheter ou, à tout le moins, de la manière dont ce prix sera calculé pour en avoir une idée, et en quoi
consiste ce bien ou ce service.

( 35 ) Voir, à ce sujet, l’article 3, paragraphe 1, et considérant 13 de la directive 2011/83.

( 36 ) Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (la « directive relative aux pratiques commerciales déloyales ») (JO 2005, L 149, p. 22).

( 37 ) Voir conclusions de l’avocat général Saugmandsgaard Øe dans l’affaire Ibercaja Banco (C‑452/18, EU:C:2020:61, note 77 en bas de page).

( 38 ) Voir, par exemple, dans le domaine de la TVA, arrêt du 9 juin 2016, Wolfgang und Dr. Wilfried Rey Grundstücksgemeinschaft GbR (C‑332/14, EU:C:2016:417, points 32 à 34).

( 39 ) Voir mes conclusions dans l’affaire Lexitor (C‑383/18, EU:C:2019:451, point 55).

( 40 ) Voir arrêts du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová (C‑377/14, EU:C:2016:283, point 61), et du 9 novembre 2016, Home Credit Slovakia (C‑42/15, EU:C:2016:842, point 41).

( 41 ) La directive 2008/48 procédant à une harmonisation complète des obligations d’information pesant sur les établissements de crédit, la solution retenue par la Cour dans l’arrêt 6 juillet 2017, Air Berlin (C‑290/16, EU:C:2017:523, points 44 à 46) ne me semble pas transposable. En effet, la législation en cause dans cette dernière affaire, à savoir le règlement (CE) no 1008/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 24 septembre 2008, établissant des règles communes pour l’exploitation de
services aériens dans la Communauté (refonte) (JO 2008, L 293, p. 3) visait uniquement à réaliser une harmonisation minimale.

( 42 ) Voir, en ce sens, arrêt du 19 novembre 2009, Sturgeon e.a. (C‑402/07 et C‑432/07, EU:C:2009:716, point 47).

( 43 ) Voir, en ce sens, arrêt du 7 novembre 2019, Profi Credit Polska (C‑419/18 et C‑483/18, EU:C:2019:930, points 58 à 60).

( 44 ) Voir arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703, point 47), et article 10, sous g), de la directive 2008/48. Voir aussi article 4, paragraphe 1, de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur (JO 2006, L 376, p. 36).

( 45 ) En constitue une parfaite illustration le fait que l’article 2, paragraphe 6, de la directive 2011/83 définit la notion de « contrat de services » comme « tout contrat autre qu’un contrat de vente en vertu duquel le professionnel fournit ou s’engage à fournir un service au consommateur et le consommateur paie ou s’engage à payer le prix de celui‑ci ». L’on peut dès lors en déduire qu’un service est tout simplement ce qui constitue l’objet d’un contrat de services.

( 46 ) Voir, par analogie, arrêt du 19 décembre 2019, Airbnb Ireland (C‑390/18, EU:C:2019:1112, point 53).

( 47 ) Voir arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703 points 37 et 38).

( 48 ) En effet, le service dénommé « Ton paquet » ne constitue pas un « service », puisqu’il ne peut pas être détaché de l’octroi du crédit. Il s’agit plutôt d’une adaptation des conditions d’exécution du crédit qui est présentée à des fins commerciales comme un service.

( 49 ) L’article 3, paragraphe 3, de la directive 93/13 fait référence à l’annexe de celle‑ci qui contient une « liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives ».

( 50 ) Voir arrêts du 26 janvier 2017, Banco Primus (C‑421/14, EU:C:2017:60, points 59 et 60), et du 3 octobre 2019, Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:820, points 50 et 51).

( 51 ) Pour une critique de cette séparation des deux critères, voir mes conclusions dans l’affaire Lovasné Tóth (C‑34/18, EU:C:2019:245, points 56 à 67). Je note également que, dans certains arrêts, la Cour n’a pas apprécié ces deux éléments séparément de manière distincte. Voir, par exemple, arrêt du 16 janvier 2014, Constructora Principado (C‑226/12, EU:C:2014:10, point 23).

( 52 ) Voir, en ce sens, la position adoptée par la Commission dans ses orientations relatives à l’interprétation et à l’application de la directive 93/13/CEE du Conseil concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, point 3.4.1.

( 53 ) Voir arrêts du 14 mars 2013, Aziz (C‑415/11, EU:C:2013:164, points 68 et 69), du 3 octobre 2019, Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:820, points 50 et 51) et du 7 novembre 2019, Profi Credit Polska (C‑419/18 et C‑483/18, EU:C:2019:930, point 55).

( 54 ) Mais pas uniquement. Par exemple, dans le cas d’une clause conférant au prestataire de services la possibilité de modifier le prix, le consommateur doit en contrepartie se voir octroyer la possibilité de mettre fin au contrat. Voir, par exemple, arrêt du 26 avril 2012, Invitel (C‑472/10, EU:C:2012:242, point 24).

( 55 ) Conformément à l’exigence de transparence à laquelle il est fait référence ci‑dessus, lorsqu’une clause relève de l’objet principal du contrat en ce qu’elle est essentielle au professionnelle, cette clause ne peut demeurer exclue de cette appréciation que si l’attention du consommateur a été spécifiquement attirée sur l’existence de cette clause, conformément à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13. À mon avis, c’est en sens que cette exigence joue un rôle dans l’application de
l’article 3, paragraphe 1, de cette directive. Voir, en ce sens, arrêt du 5 juin 2019, GT (C‑38/17, EU:C:2019:461, point 37).

( 56 ) Conclusions de l’avocat général Hogan dans l’affaire Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:411, point 36).

( 57 ) Arrêt du 16 janvier 2014, Constructora Principado (C‑226/12, EU:C:2014:10).

( 58 ) Dans l’arrêt du 16 janvier 2014, Constructora Principado (C‑226/12, EU:C:2014:10, points 27 et 28), la Cour n’a pas conclu que ce type de clause était abusif, mais a laissé le soin à la juridiction nationale de déterminer si une telle clause constituait « une atteinte suffisamment grave à la situation juridique dans laquelle le consommateur, en tant que partie » et si elle pouvait, partant, être déclarée abusive.

( 59 ) Ce qui explique pourquoi l’exigence de transparence ne concerne que la conséquence ou l’effet de clauses.

( 60 ) Si la transparence du contrat est d’une importance cruciale, cela ne résoudra pas en soi le problème de l’asymétrie du pouvoir de négociation. En effet, il est rare que les consommateurs lisent les contrats, en particulier sur Internet. Par exemple, une société du nom de PC Pitstop a mentionné une disposition dans son contrat de licence d’utilisateur final qui accordait une « contrepartie spéciale pouvant englober une compensation financière à un nombre limité de licenciés qui liraient cette
section du contrat de licence et qui prendraient contact avec PC Pitstop ». Il a fallu attendre quatre mois pour qu’un consommateur remarque la clause et réclame le prix de 1000 dollars américains. Voir Ayres I. and Schwartz A., « The No Reading Problem in Consumer Contract Law », Stanford Law Review, 2014, vol. 66, p. 545‑610. Dans ce contexte, je pense que l’une des avancées majeures de la directive 93/13 qui n’a pas, à mon estime, été reconnue à sa juste value en raison, en partie, de l’excès
d’attention qui a été porté à la transparence, est d’avoir conféré une protection minimale aux consommateur contre les effets inattendus des clauses autres que celles clauses définissant le prix ou l’objet principal du contrat dont les consommateurs pouvaient légitimement s’attendre à ce qu’elles soient standardisées.

( 61 ) Par exemple, à mon sens, une clause ne saurait être déclarée abusive pour le seul motif qu’elle implique l’envoi d’une lettre par la poste et, partant, l’achat d’un timbre, même s’il s’agit d’un coût caché.

( 62 ) Voir la communication de la Commission orientations relatives à l’interprétation et à l’application de la directive 93/13/CEE du Conseil concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 2019, C 323, p. 4), point 3.4.6, et, en ce sens, arrêts du 26 janvier 2017, Banco Primus (C‑421/14, EU:C:2017:60, point 62), et du 14 mars 2019, Dunai (C‑118/17, EU:C:2019:207, point 49). La seule exception dont j’aie connaissance est l’arrêt du 28 juillet 2016, Verein für
Konsumenteninformation (C‑191/15, EU:C:2016:612, point 69), dans lequel la Cour semble avoir admis qu’une clause peut être déclarée abusive en raison d’une absence de transparence. Comme je l’ai expliqué dans mes conclusions dans l’affaire Lovasné Tóth (C‑34/18, EU:C:2019:245, points 87 à 89), si la transparence contractuelle est effectivement fondamentale, je pense que, dans l’arrêt Verein für Konsumenteninformation, la Cour a quelque peu surestimé la portée de l’obligation de transparence au titre
de la directive 93/13. En outre, d’autres instruments de l’Union qui appréhendent également cette problématique prévoient des approches plus nuancées. Voir, par exemple, l’article 7 de la directive 2005/29.

( 63 ) Voir en ce sens, arrêt du 3 octobre 2019, Kiss et CIB Bank (C‑621/17, EU:C:2019:820, point 51).

( 64 ) Voir arrêts du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová (C‑377/14, EU:C:2016:283, point 61), et du 9 novembre 2016, Home Credit Slovakia (C‑42/15, EU:C:2016:842, point 41).

( 65 ) C‑779/18, EU:C:2019:1146.

( 66 ) Voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Mikrokasa et Revenue Niestandaryzowany Sekurytyzacyjny Fundusz Inwestycyjny Zamknięty (C‑779/18, EU:C:2020:236, points 45 à 48).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-84/19,
Date de la décision : 02/04/2020
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demandes de décision préjudicielle, introduites par le Sąd Rejonowy Szczecin – Prawobrzeże i Zachód w Szczecinie et par le Sąd Rejonowy w Opatowie.

Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 93/13/CEE – Article 1er, paragraphe 2 – Champ d’application – Disposition nationale prévoyant le montant maximal des coûts du crédit hors intérêts – Article 3, paragraphe 1 – Clause contractuelle répercutant, sur le consommateur, des coûts de l’activité économique du prêteur – Déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties – Article 4, paragraphe 2 – Obligation de rédaction claire et compréhensible des clauses contractuelles – Clauses contractuelles ne spécifiant pas les services qu’elles visent à rémunérer – Directive 2008/48/CE – Article 3, sous g) – Législation nationale établissant un mode de calcul du montant maximal du coût du crédit hors intérêts pouvant être mis à charge du consommateur.

Protection des consommateurs

Rapprochement des législations


Parties
Demandeurs : Profi Credit Polska SA e.a.
Défendeurs : QJ e.a.

Composition du Tribunal
Avocat général : Hogan

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2020:259

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