CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. PRIIT PIKAMÄE
présentées le 5 juin 2019 ( 1 )
Affaire C‑641/17
College Pension Plan of British Columbia
contre
Finanzamt München III
[demande de décision préjudicielle formée par le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich, Allemagne)]
« Renvoi préjudiciel – Fiscalité directe – Libre circulation des capitaux – Mouvements de capitaux entre les États membres et les pays tiers – Impôt sur les sociétés – Fonds de pension résident et non-résident – Imposition des dividendes de portefeuilles d’actions – Retenue à la source – Imputation intégrale de la retenue à la source sur l’impôt sur les sociétés – Réduction du résultat imposable par le biais des provisions mathématiques destinées aux versements des pensions – Restriction –
Comparabilité – Prise en compte des provisions mathématiques – Lien entre, d’une part, les provisions mathématiques et autres provisions techniques et, d’autre part, la perception des dividendes – Justification – Conventions tendant à éviter la double imposition – Clause de standstill – Critères temporel et matériel»
1. Par la présente demande de décision préjudicielle, au titre de l’article 267 TFUE, le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich, Allemagne) adresse à la Cour deux questions portant sur l’interprétation des dispositions de droit primaire relatives à la libre circulation des capitaux, à savoir les articles 63 à 65 TFUE ( 2 ). C’est l’articulation entre cette liberté et la teneur de dispositions nationales relatives à la fiscalité directe relatives aux dividendes, qui est au cœur de la
présente affaire préjudicielle.
2. Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le College Pension Plan of British Columbia (ci‑après le « CPP »), un fonds de pension sous forme de trust de droit canadien, au Finanzamt München (Abteilung III) (centre des impôts de Munich, section III, Allemagne). Plus particulièrement, au cours des années 2007 à 2010, ce trust a perçu, par le biais d’un fiduciaire canadien, des dividendes de la part de diverses sociétés anonymes allemandes par rapport auxquels l’administration
fiscale allemande a refusé l’exonération de l’impôt allemand sur les revenus du capital.
3. La Cour est notamment appelée à déterminer si les dispositions relatives à la libre circulation des capitaux figurant au traité FUE doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à la législation allemande en vertu de laquelle les impôts retenus à la source sur les dividendes peuvent être imputés à l’impôt sur les sociétés devant être acquitté par les fonds de pension résidents et en vertu de laquelle des provisions peuvent également être prises en compte dans ce cadre pour diminuer le
résultat imposable, alors qu’un fonds de pension non-résident ne peut pas procéder à une telle imputation. En outre se pose également la question de l’applicabilité de la clause dite de standstill prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE.
4. L’examen du régime fiscal applicable aux dividendes distribués à des fonds de pension partiellement assujettis, au regard de la libre circulation des capitaux, a déjà fait l’objet de plusieurs affaires devant la Cour ( 3 ). Même si la jurisprudence en la matière est déjà riche, les questions de l’existence d’une éventuelle restriction et de la comparabilité des situations des contribuables résidents et non-résidents peuvent s’avérer parfois complexes. La présente affaire en est une bonne
illustration.
I. Le cadre juridique
A. La loi relative au contrôle des organismes d’assurance
5. Il ressort du dossier soumis à la Cour que, au cours des années 2007 à 2010, les fonds de pension et leurs activités étaient régis par le Versicherungsaufsichtsgesetz (loi relative au contrôle des organismes d’assurance), dans sa version publiée le 17 décembre 1992 (ci-après le « VAG 1992 ») ( 4 ). L’article 112 du VAG 1992 contenait une définition des fonds de pension. Selon le dossier soumis à la Cour, le paragraphe 1 de cet article était libellé comme suit :
« Un fonds de pension est une institution de prévoyance dotée de la capacité juridique
« 1. qui fournit, par capitalisation, des prestations de retraite professionnelle pour un ou plusieurs employeurs en faveur de leurs travailleurs,
2. qui ne peut, dans tous les cas de prestation prévus, garantir par des assurances le montant des prestations ou le montant des cotisations futures à verser en vue de ces prestations,
3. qui confère aux travailleurs un droit propre aux prestations vis-à-vis du fonds de pension, et
4. qui est tenue de fournir la prestation de retraite sous la forme d’un paiement à vie. »
6. Le VAG 1992 a été abrogé par la loi sur la modernisation du contrôle financier des assurances du 1er avril 2015 ( 5 ) et remplacé par le VAG 2015. L’article 236, paragraphe 1, du VAG 2015 contient une définition des fonds de pension, qui correspond à celle figurant à l’article 112 du VAG 1992.
B. La législation fiscale relative aux fonds de pension
7. Il ressort du dossier soumis à la Cour que le régime allemand d’imposition des revenus des capitaux découle des dispositions de l’Einkommensteuergesetz (loi relative à l’impôt sur le revenu, ci‑après l’« EStG »), dans sa version publiée le 19 octobre 2002 ( 6 ), combinées, en ce qui concerne l’imposition des personnes morales, avec les dispositions du Körperschaftssteuergesetz (loi relative à l’impôt sur les sociétés, ci‑après le « KStG »), dans sa version publiée le 15 octobre 2002 ( 7 ).
1. Le régime fiscal des fonds de pension ayant leur siège en Allemagne
8. En tant que société de capitaux ayant son siège en Allemagne, un fonds de pension allemand est intégralement assujetti à l’impôt sur les sociétés conformément à l’article 1er, paragraphe 1, point 1, du KStG. Selon l’article 7, paragraphe 1, du KStG, son revenu imposable est soumis à l’impôt sur les sociétés. Conformément à l’article 23 du KStG, le bénéfice des fonds de pension allemands doit être imposé à concurrence de 15 % au titre de l’impôt sur les sociétés.
9. Selon l’article 8, paragraphe 1, première phrase du KStG, le revenu imposable est déterminé conformément aux dispositions de l’EStG. En vertu des dispositions combinées de l’article 8, paragraphe 2, du KStG et de l’article 2, paragraphe 1, point 2, de l’EStG, tous les revenus d’un fonds de pension intégralement assujettis sont à considérer comme des revenus générés par une activité industrielle ou commerciale. Aux termes de l’article 2, paragraphe 2, point 1, de l’EStG, les revenus générés par
une activité industrielle ou commerciale sont le résultat réalisé pendant l’exercice fiscal considéré.
10. Les exonérations fiscales prévues pour les dividendes et les plus-values à l’article 8b, paragraphes 1 et 2, du KStG, ne sont pas applicables aux fonds de pension en vertu de l’article 8b, paragraphe 8, première et cinquième phrases, du KStG.
11. Selon l’article 20, paragraphe 1, de l’EStG, les dividendes distribués sur les bénéfices sont considérés comme des revenus du capital.
12. Conformément aux dispositions des articles 43 et 44 de l’EStG, l’impôt sur le revenu du capital est perçu, par voie de retenue à la source, sur les revenus de capital et est acquitté par la société distributrice des dividendes. Cet impôt s’élève à 25 % des dividendes bruts.
13. L’article 4, paragraphe 1, première phrase, de l’EStG prévoit que « [l]e résultat est égal à la différence entre le patrimoine de l’entreprise à la fin de l’exercice et le patrimoine de l’entreprise à la fin de l’exercice précédent, augmentée de la valeur des prélèvements et diminuée de la valeur des apports ».
14. Conformément à l’article 5 de l’EStG, le patrimoine est évalué par application des principes comptables du droit commercial. Ainsi, cette différence est établie sur la base d’un bilan fiscal qui, lui, est tiré du bilan comptable.
15. En vertu de l’article 31, paragraphe 1, première phrase, du KStG, lu conjointement avec l’article 36, paragraphe 2, point 2, de l’EStG, l’impôt sur le revenu du capital frappant les dividendes, qui a été prélevé sous forme de retenue à la source et qui a déjà été acquitté au cours de l’exercice fiscal, peut être intégralement imputé sur l’impôt sur les sociétés.
16. Aux termes de l’article 36, paragraphe 4, deuxième phrase, de l’EStG, « [s]’il résulte, après décompte, un excédent en faveur de l’assujetti, cet excédent lui est versé après notification de l’avis d’imposition ».
17. Selon les indications fournies dans la décision de renvoi, aux fins du régime fiscal, la législation allemande distingue entre les bénéfices réalisés sur fonds propres (« retours sur investissements comptables ») et ceux réalisés à partir du « panier de couverture» ( 8 ) (« retours sur investissements extra-comptables »).
18. D’une part, en ce qui concerne les retours sur investissements comptables, lorsque les bénéfices financiers sont supérieurs au taux d’intérêt technique pris en compte pour le calcul des cotisations des affiliés au fond de pension, ces bénéfices sont portés directement au crédit des différents contrats du fonds de pension. Ils augmentent non seulement l’actif du bilan fiscal du fonds de pension, mais aussi la valeur des postes figurant au passif dudit bilan et, notamment, les provisions
mathématiques ( 9 ). Dans cette hypothèse, les bénéfices tirés de la perception des dividendes sont intégralement neutralisés et ne se traduisent pas par un résultat imposable.
19. D’autre part, s’agissant des retours sur investissements extra-comptables, lorsque les bénéfices financiers sont supérieurs au taux d’intérêt technique pris en compte pour le calcul des cotisations des affiliés au fond de pension, ces bénéfices sont affectés à concurrence d’au moins 90 % au profit des contrats des affiliés. Cette part de 90 % des bénéfices se traduit par une augmentation de la valeur à la fois des actifs inscrits au bilan fiscal et des postes du passif du bilan fiscal, et
notamment, par l’augmentation de la valeur des provisions mathématiques de ce bilan. Cette partie des bénéfices tirés de la perception des dividendes est intégralement neutralisée et ne se traduit pas par un résultat imposable. En revanche, la part restante de 10 % au maximum des bénéfices n’est pas portée au crédit des différents contrats du fonds de pension et l’augmentation de l’actif à ce titre n’est pas accompagnée par une augmentation corrélative du passif du bilan. Ces bénéfices se
traduisent donc par un résultat qui doit être fiscalement pris en compte.
2. Le régime fiscal des fonds de pension étrangers
20. En vertu de l’article 2, point 1, du KStG, un fonds de pension étranger, qui n’a pas sa direction ou son siège en Allemagne, est partiellement assujetti à l’impôt sur les sociétés pour ce qui est de ses revenus perçus sur le territoire national.
21. Il résulte des dispositions combinées de l’article 8, paragraphe 1, du KStG, de l’article 49, paragraphe 1, point 5a, de l’EStG et de l’article 20, paragraphe 1, point 1, de l’EStG, que les dividendes perçus par le fonds de pension étranger sont des revenus de capitaux soumis à une obligation fiscale limitée. Ces dividendes perçus sont pleinement imposables en vertu de l’article 8b, paragraphe 8, cinquième phrase, du KStG.
22. Dans le cas d’un fonds de pension partiellement assujetti, l’impôt est recouvré sous forme d’une retenue à la source et le débiteur des dividendes doit procéder à une retenue de l’impôt sur le revenu du capital qui, en vertu des dispositions de l’article 43, paragraphe 1, point 1 et de l’article 43a, paragraphe 1, point 1, de l’EStG, est en principe de 25 % des dividendes bruts.
23. En vertu de l’article 50d, paragraphe 1, troisième phrase, de l’EStG, lorsque l’imposition des dividendes est limitée à 15 % dans le cadre des conventions fiscales et que le fonds de pension effectue une demande de remboursement au Bundeszentralamt für Steuern (Office central fédéral des impôts, Allemagne), la différence entre l’impôt sur le revenu du capital retenu et le taux d’imposition autorisé en vertu de la convention fiscale en cause est remboursé à ce fonds.
24. Conformément à l’article 32, paragraphe 1, point 2, du KStG, lorsque le titulaire des revenus est partiellement assujetti en Allemagne, l’impôt sur le revenu du capital de 15 % est définitif.
25. Selon la juridiction de renvoi, de ce fait, la possibilité d’imputer l’impôt sur le revenu du capital sur l’impôt sur les sociétés est exclue pour les fonds de pension étrangers qui ne peuvent pas non plus déduire d’éventuelles dépenses professionnelles de l’assiette de leurs revenus imposables. Les conditions de remboursement de l’impôt sur le revenu du capital aux sociétés partiellement assujetties prévues à l’article 32, paragraphe 5, du KStG ne seraient pas réunies.
C. La convention bilatérale sur la double imposition conclue entre la République fédérale d’Allemagne et le Canada
26. La convention entre la République fédérale d’Allemagne et le Canada en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et de certains autres impôts, de prévenir l’évasion fiscale et de fournir une assistance en matière d’impôts, conclue à Berlin le 19 avril 2001 (ci‑après la « convention bilatérale sur la double imposition ») ( 10 ) prévoit, à son article 10, paragraphe 2, sous b), que l’État d’où proviennent les dividendes peut retenir 15 % de leur montant brut.
27. En vertu de l’article 23, paragraphe 1, sous a), de la convention bilatérale sur la double imposition, le Canada, en tant qu’État de résidence, prévient la double imposition des dividendes par le mécanisme de l’imputation.
II. Le litige au principal et les questions préjudicielles
28. L’objet social de CPP est la gestion de capitaux afin d’assurer les paiements de pensions pour les anciens fonctionnaires de la province de Colombie-Britannique. Pour cela, il constitue, dans ses bilans, des provisions techniques correspondant aux engagements de garantie des retraites. CPP détient, par l’intermédiaire d’une société de gestion de portefeuille, des participations dans des sociétés anonymes allemandes. CPP et cette société fiduciaire ont conclu un contrat de fiducie en vertu duquel
la seconde est liée par les directives et les instructions de CPP, le constituant, pour ce qui est des décisions d’investissement. Au Canada, CPP est exempté de toute imposition des bénéfices.
29. CPP détenait des actions de différentes sociétés anonymes allemandes à hauteur de moins de 1 %. Au cours des années 2007 à 2010, ces participations lui ont procuré des dividendes suivant les modalités décrites aux points 17 à 19 des présentes conclusions. Conformément à l’article 10, paragraphe 2, sous b), de la convention bilatérale sur la double imposition, ces dividendes ont été soumis, au titre de l’impôt sur le revenu du capital, à une retenue à la source de 15 %, dont le montant s’est
élevé à 156280,10 euros au total.
30. Le 23 décembre 2011, CPP a demandé au centre des impôts de Munich d’adopter une décision d’exonération de l’impôt sur le revenu du capital et de rembourser ce montant de 156280,10 euros, majoré des intérêts, au motif qu’il était désavantagé par rapport aux fonds de pension allemands, étant donné que l’impôt sur le revenu du capital grevant les dividendes était intégralement remboursé à ces derniers. Par décision du 26 mai 2014, l’administration fiscale allemande a rejeté cette demande.
31. La réclamation introduite à l’encontre de cette décision ayant été également rejetée, CPP a saisi la juridiction de renvoi, le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich).
32. À titre liminaire, cette juridiction indique que CPP est comparable à un fonds de pension allemand au sens de l’article 236 du VAG 2015, sujet sur lequel les parties s’accordent d’ailleurs. En outre, il serait également constant entre les parties au principal que les participations dans des sociétés anonymes allemandes et les revenus que ces participations génèrent doivent être rattachés non pas à la société fiduciaire, mais à CPP qui en est le bénéficiaire effectif.
33. En premier lieu, la juridiction de renvoi explique que s’agissant d’un fonds de pension résident, l’impôt sur les sociétés auquel est assujetti celui-ci est fondé sur le résultat inscrit au bilan de ce fonds. Ce résultat dépendrait notamment de la perception des dividendes et de la constitution des provisions, dès lors que le fonds de pension résident peut déduire du résultat imposable les provisions en vue des versements des pensions. Ainsi, la perception de dividendes ne se traduirait pas
forcément par une augmentation de l’impôt sur les sociétés dû, mais uniquement par une augmentation relativement faible de cet impôt.
34. En revanche, en ce qui concerne un fonds de pension non-résident, la juridiction de renvoi relève que, lorsqu’il perçoit des dividendes, il est partiellement assujetti à l’impôt sur les sociétés allemand. Cet impôt serait recouvré sous forme d’une retenue à la source et la société émettrice des dividendes doit procéder à une retenue de l’impôt sur le revenu du capital qui s’élève, en principe, à 25 % des dividendes bruts, conformément aux dispositions de l’article 43, paragraphe 1, point 1 et de
l’article 43a, paragraphe 1, point 1, de l’EStG. En application de l’article 10, paragraphe 2, sous b), de la convention bilatérale sur la double imposition, l’imposition des dividendes serait limitée à 15 %. La différence résultant entre l’impôt sur le revenu du capital retenu et ce taux de 15 % est remboursée, sur demande, par l’Office central fédéral des impôts.
35. Dans ces conditions, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si la différence de traitement fiscal entre les fonds de pension non‑résidents, qui perçoivent les dividendes faisant l’objet d’une retenue à la source définitive, et les fonds de pension résidents, dont les dividendes perçus font également l’objet de cette retenue mais qui peuvent imputer celle‑ci sur l’impôt sur les sociétés, constitue une restriction à la libre circulation des capitaux.
36. Dans l’hypothèse où la Cour jugerait que ladite différence de traitement fiscal constitue une restriction à la libre circulation des capitaux, la juridiction de renvoi s’interroge sur l’éventuelle justification à une telle restriction.
37. En second lieu, la juridiction de renvoi s’interroge sur l’applicabilité de la clause de standstill, prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE. À cet égard, premièrement, elle souligne que l’article 32, paragraphe 1, point 2, du KStG, en vertu duquel l’impôt sur le revenu du capital de 15 % est définitif à l’égard du titulaire des revenus partiellement assujetti en Allemagne et dont découlerait la différence de traitement entre les fonds de pension résidents et non-résidents, aurait déjà existé
le 31 décembre 1993 sous la forme de la disposition de l’article 50, paragraphe 1, point 2, du KStG de 1991, dont le libellé et le fonctionnement étaient identiques. Deuxièmement, il importerait peu que le taux de 25 % de l’impôt sur le revenu du capital, qui existait déjà le 31 décembre 1993 en vertu des dispositions combinées de l’article 43, paragraphe 1, point 1, et de l’article 43a, paragraphe 1, point 1, de l’EStG, ait été réduit à 20 % le 1er janvier 2001, pour être ramené à 25 % le
1er janvier 2009. La modification législative du 1er janvier 2009 aurait remplacé les différents taux applicables auparavant aux revenus du capital, à savoir 20 %, 25 % et 30 %, par un taux unique de 25 %, sans que le principe de la norme régissant l’impôt sur le revenu du capital retenu ait été modifié. Troisièmement, il se poserait la question de savoir si le critère matériel relatif à la prestation de services financiers est rempli. À cet égard, il conviendrait de déterminer si le lien de
cause à effet entre la prestation de service financier et le mouvement de capitaux, au sens de l’arrêt Wagner-Raith ( 11 ), est présent dans un cas comme celui en cause au principal.
38. Dans ces conditions, le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich, Allemagne) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) La libre circulation des capitaux consacrée par les dispositions combinées de l’article 63, paragraphe 1, et de l’article 65 TFUE s’oppose-t-elle à la législation d’un État membre en vertu de laquelle une institution de retraite professionnelle non-résidente qui est analogue, de par ses composantes essentielles, à un fonds de pension allemand, ne bénéficie d’aucune exonération de l’impôt sur le revenu du capital au titre des dividendes perçus, tandis que des dividendes correspondants versés
à des fonds de pension nationaux ne se traduisent pas par une augmentation de l’impôt sur les sociétés dû ou se traduisent uniquement par une augmentation relativement faible de celui-ci parce qu’ils ont la possibilité de réduire, dans le cadre de la procédure d’établissement de l’impôt par voie de rôle, leur résultat imposable en déduisant les provisions pour engagements de retraite et de neutraliser, par imputation ou – lorsque le montant de l’impôt sur les sociétés devant être acquitté
est inférieur au montant imputé – remboursement, l’impôt sur le revenu du capital acquitté ?
2) En cas de réponse affirmative à la première question, la restriction à la libre circulation des capitaux qui résulte de l’article 32, paragraphe 1, point 2, du [KStG] est-elle licite à l’égard des pays tiers, par application des dispositions combinées de l’article 63 et de l’article 64, paragraphe 1, TFUE, au motif qu’elle implique la prestation de services financiers ? »
III. La procédure devant la Cour
39. Des observations écrites ont été déposées par CPP, par le centre des impôts de Munich, par le gouvernement allemand ainsi que par la Commission européenne. Ils ont, à l’exception du centre des impôts de Munich, été entendus en leurs plaidoiries lors de l’audience qui s’est tenue le 20 mars 2019.
IV. Analyse
40. D’emblée, premièrement, il ne fait pas de doute que la liberté fondamentale qui s’applique au présent litige est la libre circulation des capitaux. D’une part, la Cour a récemment rappelé que constituent des mouvements de capitaux visés à l’article 63 TFUE, notamment, les investissements directs sous forme de participation à une entreprise par la détention d’actions qui confère la possibilité de participer effectivement à sa gestion et à son contrôle (investissements dits « directs ») ainsi que
l’acquisition de titres sur le marché des capitaux effectuée dans la seule intention de réaliser un placement financier sans intention d’influer sur la gestion et le contrôle de l’entreprise (investissements dits « de portefeuille ») ( 12 ). D’autre part, il est désormais de jurisprudence constante que des dispositions nationales qui trouvent à s’appliquer à des participations effectuées dans la seule intention de réaliser un placement financier sans intention d’influer sur la gestion et le
contrôle de l’entreprise doivent être examinées exclusivement au regard de la libre circulation des capitaux ( 13 ), ( 14 ).En l’espèce, il est constant qu’il s’agit de placements financiers sans intention d’influer sur la gestion et le contrôle de l’entreprise, dès lors que le fonds de pension canadien détient des participations, à hauteur de moins de 1 %, dans différentes sociétés anonymes allemandes. Ainsi, ce sont les dispositions relatives à la libre circulation des capitaux, notamment,
celles figurant aux articles 63 à 65 TFUE, qui s’appliquent dans une situation telle que celle en cause au principal.
41. Deuxièmement, il me semble que la question relative à l’applicabilité de la clause de standstill prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE, devrait être analysée après la question de savoir si la législation en cause constitue une restriction à la libre circulation des capitaux, au sens de l’article 63, paragraphe 1, TFUE. En effet, le libellé de l’article 64, paragraphe 1, TFUE renvoie aux « restrictions », ce qui implique que, pour appliquer cette disposition, il convient d’emblée de qualifier
la législation nationale et d’établir si le régime prévu par cette législation constitue une restriction ( 15 ). Ainsi, je propose d’examiner les questions préjudicielles dans l’ordre dans lequel elles ont été posées.
A. Sur la première question préjudicielle
42. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 63 et 65 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation d’un État membre qui impose une retenue à la source pour les dividendes distribués par une société résidente aux fonds de pension résidents et non-résidents, en prévoyant un mécanisme d’imputation intégrale sur l’impôt sur les sociétés uniquement pour les fonds de résidents, alors que pour les fonds de pension
non‑résidents, cette retenue de 25 % constitue, à concurrence de 3/5 (15 %), un impôt définitif, étant donné que 2/5 de cette retenue (10 %) peuvent être remboursés sur demande.
43. Afin de répondre à cette question, je propose d’analyser, en premier lieu, l’existence d’une restriction à la libre circulation des capitaux, au sens de l’article 63 TFUE, et, le cas échéant, en second lieu, le caractère admissible d’une telle restriction.
1. Sur l’existence d’une restriction à la libre circulation des capitaux
44. Les restrictions aux mouvements de capitaux sont, selon une jurisprudence constante, toutes les mesures qui sont de nature à dissuader les contribuables non‑résidents de faire des investissements dans un État membre ou à dissuader les contribuables résidents dudit État membre d’en faire dans d’autres États ( 16 ). Plus particulièrement, un traitement désavantageux par un État membre des dividendes versés à des sociétés non-résidentes, par rapport au traitement réservé aux dividendes versés à des
sociétés résidentes, est susceptible de dissuader les sociétés établies dans un État autre que ce premier État membre de procéder à des investissements dans ce premier État membre et constitue, par conséquent, une restriction à la libre circulation des capitaux prohibée, en principe, par l’article 63 TFUE ( 17 ).
45. En l’espèce, la législation nationale en cause au principal prévoit un traitement fiscal en deux étapes. Dans un premier temps, tant les dividendes distribués à un fonds de pension résident que ceux distribués à un fonds de pension non-résident sont soumis à une retenue à la source. À cet effet, s’agissant des dividendes versés aux fonds de pension non-résidents, selon les indications fournies dans la décision de renvoi, la retenue à la source est prélevée de manière définitive à concurrence de
3/5 (15 %), au titre de l’article 32, paragraphe 1, point 2, du KStG, tandis que les 2/5 (10 %) de cette retenue sont remboursés selon les modalités décrites au point 23 des présentes conclusions. Ainsi, dans la présente affaire au principal, les dividendes en cause ont fait l’objet d’une retenue à la source de 15 %. En revanche, en ce qui concerne la retenue à la source appliquée aux dividendes versés à un fonds de pension résident, il ressort des explications fournies par la juridiction de
renvoi que celle-ci s’élève à concurrence de 25 %.
46. Dans un second temps, les fonds de pension sont soumis, en ce qui concerne les dividendes qui leur sont distribués, à deux régimes d’imposition différents. En effet, l’impôt sur le revenu du capital grevant les dividendes reçus par des fonds de pension non-résidents devient définitif. En revanche, s’agissant des dividendes versés aux fonds de pension résidents, ceux-ci entrent dans le bilan comptable du fonds de pension, qui servira de référence pour établir le résultat imposable et auquel
l’impôt sur les sociétés s’élevant à 15 % ( 18 ) sera appliqué. Lorsque cet impôt devient exigible, l’impôt sur le revenu du capital peut être intégralement imputé sur le montant dû. En effet, la juridiction de renvoi indique que, en vertu des dispositions combinées de l’article 31 du KStG et de l’article 36, paragraphe 2, point 2, de l’EStG, « [l]’impôt sur le revenu du capital qui a été retenu sur les dividendes versés aux fonds de pension est intégralement imputable sur l’impôt sur les
sociétés dû» ( 19 ) et, conformément à l’article 36, paragraphe 4, deuxième phrase, de l’EStG, « [l]orsque l’impôt sur le revenu du capital retenu excède l’impôt sur les sociétés fixé, il est remboursé au fonds de pension national» ( 20 ).
47. Ainsi que la juridiction de renvoi l’explique, le fonds de pension allemand a la possibilité, d’une part, de réduire son résultat imposable de l’impôt sur les sociétés en prenant en compte les provisions pour engagements de retraite et, d’autre part, d’imputer sur l’impôt sur les sociétés l’impôt sur le revenu du capital qui a été retenu. Dès lors, il me semble que, dans la présente affaire, la restriction alléguée à la libre circulation des capitaux peut découler de ces deux mécanismes
d’impositions bien distincts prévus par la législation nationale. En effet, d’une part, elle pourrait provenir du fait que le résultat imposable au titre de l’impôt sur les sociétés dépend, en partie, des provisions constituées par le fonds de pension, qui réduisent le résultat imposable de celui-ci. D’autre part, cette restriction pourrait découler du fait que le fonds de pension résident peut imputer sur l’impôt sur les sociétés dû l’impôt sur le revenu du capital acquitté et obtenir le
remboursement de l’excédent de ce dernier. Je propose d’examiner ces mécanismes afin d’identifier lequel des deux, voire les deux, est à l’origine de la restriction alléguée.
48. En ce qui concerne les provisions constituées par le fonds de pension, la juridiction de renvoi explique que les provisions mathématiques constituent une forme spécifique de provisions pour dettes incertaines, qui anticipent les prestations de retraite professionnelle devant être fournies à l’avenir par le fonds de pension à ses affiliés. Elle indique que, en raison des provisions, qui sont constituées par le fonds de pension et se trouvent dans la colonne du passif d’un bilan comptable et, plus
particulièrement, les provisions mathématiques constituées en vue des engagements de retraite, le résultat imposable, pour déterminer le montant de l’impôt sur les sociétés dû, peut être « relativement faible ».
49. Ainsi, selon les explications figurant dans la demande de décision préjudicielle, le versement des dividendes ne se traduit généralement pas par une augmentation du résultat imposable établi sur la base du bilan comptable, étant donné que le passif de ce bilan et, notamment, les provisions mathématiques y figurant, augmentent autant que l’actif ( 21 ). Le résultat imposable augmente uniquement dans l’hypothèse où les bénéfices ne sont pas portés au crédit des contrats des affiliés, auquel cas
ceux-ci se traduiront par une augmentation de l’actif du fonds de pension, et non par une augmentation corrélative du passif de ce fonds. Il s’agit de l’hypothèse des 10 % des bénéfices non portés au crédit des contrats des affiliés décrite au point 19 des présentes conclusions. Dans ce cas, cette part résiduelle de 10 % de bénéfices ne revient pas aux affiliés, de sorte que les provisions mathématiques ne vont pas augmenter. Cette part résiduelle des bénéfices non affectée aux contrats des
affiliés n’augmentera donc pas non plus le montant des prestations de retraite qui sera versé aux affiliés à l’échéance (c’est-à-dire à leur retraite).
50. Il en résulte que les dividendes reçus par un fonds de pension résident, sauf lorsqu’il s’agit de la part résiduelle de 10 % des bénéfices non portés aux crédits des contrats d’affiliés, sont généralement portés auxdits crédits, de sorte que le résultat imposable relatif à l’impôt sur les sociétés n’augmente pas ou augmente très peu.
51. Pour répondre à la question de savoir dans quelle mesure l’augmentation des provisions peut-elle affecter la charge fiscale effective afférente aux dividendes versés, d’emblée, je note que, dans les affaires concernant les dividendes « sortants » et la retenu à la source, la Cour a examiné le traitement réservé aux dividendes et non pas celui réservé au résultat imposable ( 22 ).
52. S’agissant de ce traitement, il convient de déterminer la charge fiscale effective afférente aux dividendes, lorsqu’ils ont été frappés cumulativement par un impôt sur le revenu du capital de 25 % qui est retenu à la source et un impôt sur les sociétés de 15 %. L’approche concernant la détermination d’une restriction à la libre circulation des capitaux en examinant la charge fiscale effective est, selon moi, confortée par la jurisprudence de la Cour. En effet, tout d’abord, dans plusieurs
affaires concernant l’imposition des dividendes, la Cour a déjà laissé au juge national le soin d’établir si les contribuables non-résidents supportaient, en définitive, une charge fiscale effective plus lourde dans l’État qui a procédé à l’application de la retenue à la source que celle supportée par les contribuables résidents pour les dividendes de même nature ( 23 ). Ensuite, dans l’arrêt Hirvonen ( 24 ), la Cour a jugé, en substance, que l’imposition des revenus bruts d’une personne
partiellement assujettie était compatible avec le droit de l’Union si elle n’était pas au final supérieure à celle qui frapperait les revenus nets au taux applicable aux personnes intégralement assujetties ( 25 ). Enfin, récemment, dans l’arrêt Sofina, la Cour a dit pour droit qu’il convenait « de tenir compte de l’exercice fiscal de distribution des dividendes pour comparer la charge fiscale grevant de tels dividendes et celle grevant des dividendes distribués à une société résidente» ( 26 ).
53. En l’espèce, je constate que la décision de renvoi ne comporte aucune donnée chiffrée permettant d’établir la charge fiscale effective afférente aux dividendes lorsqu’ils ont été frappés cumulativement par l’impôt sur le revenu du capital et par l’impôt sur les sociétés.
54. Dans ce contexte, j’ai tenté d’établir cette charge sur la base des éléments figurant dans le dossier. Sur la base de mes calculs, il paraît que la charge fiscale effective afférente aux dividendes perçus par un fonds de pension résident est au maximum de 11,25 % des dividendes bruts ( 27 ). Ainsi, quelle que soit la valeur des provisions, ce taux effectif sera toujours inférieur au taux de 15 % appliqué aux dividendes perçus par un fonds de pension non-résident. Cela implique que la charge
effective fiscale grevant les dividendes versés aux fonds de pension résident et non-résident sera toujours inégale ( 28 ). En conséquence, j’estime que, dans les circonstances de la présente affaire au principal, l’ampleur des provisions n’est pas pertinente afin d’établir la restriction à la libre circulation des capitaux.
55. En d’autres termes, il me semble que le fait de pouvoir procéder à une réduction du résultat imposable par le biais des provisions permet, certes, de réduire le montant dû au titre de l’impôt sur les sociétés. Toutefois, cette réduction ne paraît pas être à l’origine de la restriction à la libre circulation des capitaux, qui existe indépendamment de l’ampleur des provisions constituées par le fonds de pension résident. Or, une telle vérification incombe à la juridiction nationale qui est la
seule à pouvoir déterminer la charge fiscale effective grevant les dividendes versés à un fonds de pension résident et à un fonds de pension non-résident.
56. Par ailleurs, je me demande si cette approche n’est pas confortée par l’argument avancé par CPP qui fait valoir que la réduction du résultat imposable a pour objet d’éviter la double imposition économique des dividendes. En effet, selon CPP, le législateur a adopté l’article 8, paragraphe 8, du KStG en vue de neutraliser et, en pratique, d’exonérer les dividendes par le biais de la prise en compte des provisions techniques au niveau fiscal. Or, il convient de souligner que la « neutralisation »
ou l’« exonération » des dividendes versés au fond de pension ne porte que sur l’imposition au titre de l’impôt sur les sociétés. Ainsi, ce mécanisme ne semble pas affecter l’impôt déjà acquitté au titre de l’impôt sur le revenu du capital et qui est intégralement imputé ( 29 ).
57. À cet égard, il me semble que la présente affaire se distingue des circonstances ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Finlande ( 30 ) évoqué par la juridiction de renvoi. Dans cet arrêt, la Cour a jugé que constituait une restriction à l’article 63 TFUE une réglementation nationale selon laquelle les dividendes perçus par les fonds de pension résidents étaient, en pratique, exonérés ou quasi-exonérés d’impôt sur les revenus par l’effet des dispositions explicites de la législation nationale
prévoyant la déductibilité des provisions, alors que les dividendes perçus par les fonds de pension non-résidents étaient soumis à un taux d’imposition de 19,5 % en vertu de la législation nationale, ou de 15 % ou moins en vertu des conventions préventives de la double imposition conclues par la République de Finlande ( 31 ). Toutefois, dans l’affaire en cause au principal, tant les dividendes distribués aux fonds de pension résidents que non-résidents font l’objet d’une retenue à la source au
titre de l’impôt sur le revenu du capital. L’existence même et la hauteur de cette retenue à la source ne sont pas affectées par la constitution des provisions. En effet, s’il y a une réduction du résultat imposable et, en fait, une quasi-exonération de l’impôt dû sur les dividendes versés au fonds de pension résident, celles-ci ne concernent que l’imposition du résultat du fonds de pension au titre de l’impôt sur les sociétés, mais non pas l’impôt sur le revenu du capital, ce dernier pouvant
être intégralement récupéré.
58. Dès lors, je propose à la Cour de considérer que, en l’espèce, c’est le deuxième mécanisme à l’origine de la restriction alléguée, à savoir l’imputation intégrale de l’impôt sur le revenu du capital sur l’impôt sur les sociétés et le remboursement éventuel de l’excèdent après décompte, qui est constitutif d’une restriction à la libre circulation des capitaux.
59. Comme je l’ai déjà indiqué, j’estime qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’établir si et dans quelle mesure la charge fiscale effective est inférieure à celle que subissent les dividendes versés au fonds de pension non-résident qui se voit appliquer une retenue à la source de 15 %, en application de la convention bilatérale sur la double imposition.
60. Si la juridiction de renvoi parvient à la conclusion que les dividendes perçus par un fonds de pension résident sont quasiment exonérés de l’impôt sur le revenu du capital par le biais de l’imputation intégrale, alors une charge fiscale effective plus lourde à l’égard des dividendes versés à un fonds de pension non-résident semble être établie. Il s’ensuit que ces dividendes sont traités de manière plus avantageuse que ceux versés à un fonds de pension non-résident. Une telle différence de
traitement fiscal des fonds de pension en fonction de leur lieu de résidence est susceptible de dissuader les fonds de pension non-résidents de procéder à des investissements dans des sociétés établies en Allemagne. En effet, dans une telle hypothèse, les fonds de pension non-résidents n’ont pas la possibilité de récupérer l’impôt prélevé à titre de retenue à la source et constitue donc une restriction à la libre circulation des capitaux, laquelle est, en principe, interdite par l’article 63,
paragraphe 1, TFUE.
2. Sur le caractère admissible de la restriction
61. Aux termes de l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE, « [l]’article 63 [TFUE] ne porte pas atteinte au droit qu’ont les États membres [...] d’appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis ».
62. Cette disposition, en tant qu’elle constitue une dérogation au principe fondamental de la libre circulation des capitaux, doit faire l’objet d’une interprétation stricte. Partant, ladite disposition ne saurait être interprétée en ce sens que toute législation fiscale comportant une distinction entre les contribuables en fonction du lieu où ils résident ou de l’État membre dans lequel ils investissent leurs capitaux est automatiquement compatible avec le traité FUE. En effet, la dérogation prévue
à l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE est elle‑même limitée par le paragraphe 3 du même article, qui prévoit que les dispositions nationales visées audit paragraphe 1 « ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux et des paiements telle que définie à l’article 63 [TFUE]» ( 32 ).
63. Il y a lieu, dès lors, de distinguer les différences de traitement permises au titre de l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE des discriminations interdites par l’article 65, paragraphe 3, TFUE ( 33 ). Or, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, pour qu’une législation fiscale nationale, telle que celle en cause au principal, puisse être considérée comme compatible avec les dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux, il faut que la différence de traitement
concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou soit justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général ( 34 ).
a) Sur la comparabilité des situations en cause dans l’affaire au principal
64. Selon une jurisprudence constante, le caractère comparable ou non d’une situation transfrontalière avec une situation interne doit être examiné en tenant compte de l’objectif poursuivi par les dispositions nationales en cause ainsi que de l’objet et du contenu de ces dernières ( 35 ). En outre, seuls les critères de distinction pertinents établis par la législation en cause doivent être pris en compte aux fins d’apprécier si la différence de traitement résultant d’une telle législation reflète
une différence de situation objective ( 36 ).
65. Or, je constate que la demande de décision préjudicielle ne contient pas d’explications quant à l’objectif de la législation en cause au principal. Dans ces circonstances, je propose d’examiner les arguments avancés par les parties de la présente procédure préjudicielle. Compte tenu de ces arguments, cette analyse de la comparabilité des situations entre fonds de pensions résidents et non-résidents portera sur trois points, à savoir l’objectif de la législation allemande en ce qui concerne les
obligations à l’égard des affiliés (1), l’application alléguée des techniques d’imposition différentes aux deux catégories de fonds de pensions (2) et la prise en compte des frais directement liés à la perception des dividendes (3).
1) Les obligations à l’égard des affiliés
66. CPP souligne que tous les fonds de pension, résidents et non-résidents, sont tenus d’investir les primes d’assurance sur le marché des capitaux afin de générer des dividendes qui servent aux fonds de pension à remplir leurs obligations à l’égard des assurés. Pour cette raison, l’Allemagne les exonèrerait d’impôt, pour autant que les dividendes versés servent à remplir les obligations à l’égard des assurés. Alors que la législation nationale applicable aux fonds de pension résidents tiendrait
compte du fait que les dividendes perçus reviennent finalement aux assurés et que, pour cette raison, elle exonèrerait d’impôt les dividendes au niveau des fonds de pension, cette législation ignorerait que les fonds de pension dans les États tiers sont, en principe, soumis à la même obligation.
67. La Commission estime que l’exonération des fonds de pension allemands de l’impôt sur le revenu du capital frappant les dividendes qui leur sont distribués aurait pour objectif de leur permettre de se constituer un capital suffisant pour couvrir le versement des pensions à venir. Les dividendes versés seraient ainsi exemptés de l’impôt sur le revenu du capital pourvu qu’ils soient utilisés aux fins de provisions techniques. En revanche, pour un fonds de pension non-résident, à supposer même qu’il
arrive à prouver qu’il emploie les dividendes perçus pour constituer des provisions, il devrait acquitter, de manière définitive en Allemagne, l’impôt sur le revenu du capital à hauteur de ce qui est prévu par la convention bilatérale sur la double imposition en cause.
68. À cet égard, sous réserve des vérifications à effectuer par la juridiction de renvoi, il me semble résulter du dossier soumis à la Cour que la législation allemande en cause au principal, qui a pour effet une quasi-exonération de l’impôt sur les dividendes versés à un fonds de pension résident, répond à l’objectif de garantir l’activité d’assurance des fonds de pension au moyen de constitution d’un capital social suffisant pour couvrir les engagements de retraite dans l’avenir. En revanche,
s’agissant des dividendes distribués à un fonds de pension non-résident, quand bien même ils soient utilisés pour répondre à ce même objectif, l’impôt sur le revenu du capital retenu devient un impôt définitif, sans qu’une telle quasi-exonération ait lieu ( 37 ). Vu sous cet angle, j’estime que les fonds de pension résidents et non-résidents ont des objectifs en commun et doivent donc être considérés comme se trouvant dans des situations similaires.
69. En outre, dans l’hypothèse où la juridiction de renvoi considère que la législation nationale en cause au principal a pour objectif d’assurer une égalité de la charge fiscale effective pesant sur les fonds de pension résidents et les fonds de pension non-résidents investissant dans des sociétés établies en Allemagne, compte tenu notamment du fait que les dividendes versés au fonds de pension résident se voient appliquer deux impôts cumulatifs (l’impôt sur le revenu du capital et l’impôt sur les
sociétés), alors que les dividendes perçus par un fonds de pension non-résident ne sont imposés qu’au titre de l’impôt sur le revenu du capital, il est de jurisprudence constante que, à partir du moment où un État membre, de manière unilatérale ou par voie conventionnelle, assujettit à l’impôt sur le revenu non seulement les sociétés résidentes, mais également les sociétés non-résidentes, pour les revenus qu’elles perçoivent d’une société résidente, la situation desdites sociétés non-résidentes
se rapproche de celle des sociétés résidentes ( 38 ).
70. En effet, c’est le seul exercice, par ce même État, de sa compétence fiscale qui, indépendamment de toute imposition dans un autre État membre, engendre un risque d’imposition en chaîne ou de double imposition économique. En pareil cas, pour que les sociétés bénéficiaires non-résidentes ne soient pas confrontées à une restriction à la libre circulation des capitaux prohibée, en principe, par l’article 63 TFUE, l’État de résidence de la société distributrice doit veiller à ce que, par rapport au
mécanisme prévu par son droit national afin de prévenir ou d’atténuer l’imposition en chaîne ou la double imposition économique, les sociétés non-résidentes soient soumises à un traitement équivalent à celui dont bénéficient les sociétés résidentes ( 39 ).
71. En l’espèce, l’Allemagne ayant choisi d’exercer sa compétence fiscale sur les revenus perçus par les fonds de pension non-résidents, ceux-ci se trouvent par conséquent dans une situation comparable à celle des fonds de pension résidant en Allemagne en ce qui concerne le risque de double imposition économique des dividendes versés par les sociétés résidant en Allemagne ( 40 ).
2) L’application alléguée des techniques d’imposition différentes
72. Le gouvernement allemand fait valoir que les fonds de pension résidents et les fonds de pension non-résidents ne se trouvent pas dans des situations objectivement comparables, au motif que les deux catégories de fonds de pension se verraient appliquer des techniques d’imposition différentes au sens de l’arrêt Truck Center ( 41 ).
73. À cet égard, je note qu’il ressort des points 41 et 46 de cet arrêt qu’une différence de traitement, consistant dans l’application de techniques ou de modalités de perception de l’impôt différentes en fonction du lieu de résidence de la société qui perçoit les revenus en cause, concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables.
74. En l’espèce, je propose à la Cour de s’abstenir de faire application de la jurisprudence issue dudit arrêt Truck Center pour les motifs suivants. Premièrement, cet arrêt est souvent invoqué par les gouvernements des États membres lorsqu’ils défendent des législations nationales qui ont pour effet de traiter des situations de contribuables résidents de manière différente de celles des non-résidents ( 42 ). Or, ce même arrêt n’a été, à ma connaissance, confirmé qu’une seule fois ( 43 ). Récemment,
la Cour a, à nouveau, réduit la portée de cette jurisprudence, en précisant que cette jurisprudence n’était relative qu’aux modalités de perception de l’impôt, qui différaient en fonction du lieu de résidence du bénéficiaire des dividendes d’origine nationale ( 44 ).
75. Deuxièmement, j’observe que cette jurisprudence est fortement critiquée par la doctrine ( 45 ) et ne peut que susciter des difficultés dans l’application ( 46 ).
76. À cet égard, il me semble que le critère relatif à l’application de techniques d’imposition différentes, afin d’établir la comparabilité des situations entre un contribuable résident et un contribuable non-résident, repose sur un raisonnement tautologique. En effet, en règle générale, les résidents et les non-résidents sont soumis à des techniques d’imposition différentes. Cet arrêt ne fait que confirmer que les situations sont différentes puisque les contribuables résidents et non-résidents
sont différents ( 47 ).Ainsi, dans l’affaire au principal, les fonds de pension résidents sont « intégralement assujettis» ( 48 ), alors que les revenus des fonds de pension étrangers ne sont soumis qu’à une obligation fiscale « limitée » ne portant que sur des revenus ayant leur source en Allemagne ( 49 ). À mon avis, les techniques d’imposition différentes ne font que refléter cette différence. Toutefois, cela ne signifie pas que la législation nationale en cause échappe automatiquement au
champ d’application de la libre circulation des capitaux.
77. Par conséquent, je propose à la Cour de s’abstenir de faire application de la jurisprudence Truck Center ( 50 ) dans la présente affaire. La Cour pourrait, en effet, estimer que la législation nationale en cause se limite aux modalités de perception de l’impôt, mais procure un avantage fiscal substantiel aux fonds de pension résidents qui n’est pas accordé aux fonds de pension non-résidents ( 51 ). Cette solution semble également ressortir de l’arrêt récent N Luxembourg 1 e.a. dans lequel la
Cour a considéré que le fait de profiter d’une échéance sensiblement plus lointaine que celle découlant de la retenue à la source opérée en cas de paiement d’intérêts par une société résidente à une société non-résidente constituait un avantage, de sorte que l’arrêt Truck Center ne trouvait pas à s’appliquer ( 52 ).
3) La prise en compte des frais directement liés à la perception des dividendes
78. Tant le centre des impôts de Munich que le gouvernement allemand font valoir, dans leurs observations écrites, qu’il n’existe pas de lien direct entre, d’une part, la perception de revenus tirés de dividendes et, d’autre part, la constitution des provisions mathématiques et d’autres provisions techniques, de sorte que les situations en cause ne sont pas comparables.
79. À cet égard, selon une jurisprudence constante, les contribuables résidents et les contribuables non-résidents sont dans une situation comparable à l’égard des coûts afférant directement à l’activité d’où proviennent les bénéfices imposables ( 53 ). En ce sens, la Cour a jugé que si la méthode d’imposition appliquée aux résidents permettait la déduction des frais directement liés à la perception des dividendes, « la prise en compte de tels frais devrait également être admise pour les [...]
non-résidents» ( 54 ).
80. Or, j’estime que cette jurisprudence n’est pas pertinente aux fins de la présente affaire pour deux raisons. D’une part, ladite jurisprudence se rapporte à des frais, qui sont directement liés à la perception des recettes ( 55 ). En l’espèce, il me semble évident que les provisions constituées par le fonds de pension ne peuvent pas être qualifiés des « frais liés à la perception des recettes ». D’autre part, la jurisprudence relative à la prise en compte des frais directement liés à la
perception des dividendes ne s’applique qu’à des cas où l’octroi de l’avantage fiscal, à savoir l’exonération ou la déduction de la retenue à la source, est lié à l’établissement de la base imposable et, notamment, sous forme de dépenses dans un bilan fiscal, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. En effet, il me semble que, dans la présente affaire, la restriction à la libre circulation des capitaux ne résulte pas de la déduction des provisions dans le cadre de l’établissement d’une telle base,
mais de l’imputation intégrale ayant lieu après cet établissement. Dès lors, je propose à la Cour de juger que cette jurisprudence est dénuée de pertinence dans un régime fiscal prévoyant l’imputation intégrale en cause.
81. Si la Cour décide néanmoins d’examiner l’existence d’un lien entre la constitution des provisions et la perception de revenus tirés de dividendes, je suis d’avis qu’un tel lien ne peut être établi que pour la partie des provisions qui est la conséquence directe de la perception des dividendes. En effet, conformément à la jurisprudence de la Cour, présentent un lien direct avec l’activité ayant généré des revenus imposables les dépenses occasionnées par cette activité et, donc, nécessaires pour
l’exercice de celle-ci ( 56 ). En l’espèce, l’activité ayant généré des revenus est la perception des dividendes et les dépenses occasionnées par cette activité sont les dépenses liées à la perception de ces dividendes. Les provisions constituent une dépense liée à l’activité des assurances.
82. À cet égard, comme l’a soutenu, en substance, le gouvernement allemand, la constitution des provisions doit avoir lieu indépendamment du point de savoir si les recettes sont des revenus de dividendes ou des cotisations versées par les affiliés. En effet, l’existence même des provisions est liée à l’activité des assurances et les provisions doivent permettre de faire face aux obligations au titre de prestations futures du fonds de pension. Les provisions trouvent leur cause dans les engagements
de retraite pris et non dans le volume des revenus générés. Au contraire, lorsque le fonds de pension ne fait pas de bénéfices sur les placements, il n’en demeure pas moins qu’il est obligé, en vertu du droit national, de constituer des provisions pour faire face à ses engagements. Par analogie, en ce qui concerne le régime de provisions des institutions de retraite professionnelle et d’assurance-vie, le législateur de l’Union reconnaît l’importance des provisions, mais laisse néanmoins une
large marge d’appréciation aux États membres quant aux méthodes de leur établissement ( 57 ). En conséquence, j’estime que, en principe, les provisions des fonds de pension ne sont pas en lien direct avec les dividendes perçus.
83. D’ailleurs, je suis particulièrement sensible à l’argument avancé par le centre des impôts de Munich tiré de la jurisprudence nationale concernant une compagnie d’assurance maladie. Selon cette jurisprudence, s’agissant de dépenses résultant de la dotation à des provisions mathématiques et à d’autres provisions, il n’existerait pas de lien de causalité entre ces dépenses et les bénéfices tirés de placements, qui seraient prioritairement rattachés à l’activité d’assurance sur le territoire
national. L’obligation de constituer des provisions mathématiques, ainsi que d’autres provisions techniques, découleraient de la qualité de compagnie d’assurance. Même si cet arrêt concerne les compagnies d’assurance maladie, je ne vois aucune raison pour laquelle la situation des fonds de pension serait différente. Dès lors, j’aurais tendance à penser que cette approche pourrait être appliquée, par analogie, à la présente affaire ( 58 ).
84. En conséquence, il me semble difficile de soutenir que la prise en compte des provisions des fonds de pensions peut constituer, en tant que telle, une restriction à la libre circulation des capitaux.
85. CPP fait valoir que, dans la mesure où les dividendes sont utilisés pour les provisions, ils conduisent à une augmentation de ces provisions qui, à leur tour, diminuent le revenu imposable. À cet égard, ainsi qu’exposé aux points 18 et 19 des présentes conclusions, il ressort de la demande de décision préjudicielle que les investissements comptables et extra-comptables, sauf la part résiduelle de 10 %, font augmenter les provisions. Ainsi, il me semble qu’il est possible qu’une partie de
celles‑ci découle du simple versement des dividendes. Toutefois, il est, à mon avis, impossible pour la Cour de déterminer quelle est cette partie dans le système national. Cette détermination incombe, dès lors, à la juridiction de renvoi, qui doit notamment établir quelle partie de ces provisions est « directement liée » à la perception des dividendes. En tout état de cause, devraient être soustraites de cette détermination les provisions qui n’ont aucun lien avec la perception des dividendes.
86. En conclusion, la législation nationale en cause dans l’affaire au principal ne peut pas, à mon sens, être maintenue au motif qu’elle s’applique à des situations objectivement différentes. Il convient, par conséquent, d’examiner si cette réglementation peut être justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général.
b) Sur l’existence d’une raison impérieuse d’intérêt général
87. Selon la juridiction de renvoi, la différence de traitement qui résulte de la législation allemande ne serait justifiée ni par le principe de territorialité, ni par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal, ni par le souci d’assurer une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membre, ni par l’efficacité des contrôles fiscaux.
88. Certes, il est vrai que, selon une jurisprudence constante, ces justifications peuvent être admises en tant qu’objectifs légitimes reconnus par la Cour ( 59 ). Toutefois, en l’espèce, je considère qu’une différence de traitement entre les fonds de pension résidents et non‑résidents ne peut être justifiée par aucun desdits objectifs. Dès lors que les parties intéressées n’ont pas débattu sur ce sujet, celui-ci ne doit pas être approfondi dans le cadre des présentes conclusions.
89. À la lumière de ce qui précède, je considère que la restriction à la libre circulation des capitaux résultant de la législation allemande, qui exclut pour les seuls non-résidents la déduction des frais directement liés à la perception des dividendes, ne peut être justifiée ni par l’absence de comparabilité des situations en cause ni par une raison impérieuse d’intérêt général.
B. Sur la seconde question préjudicielle
90. Par sa seconde question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande si la restriction résultant de l’application définitive de la retenue à la source aux dividendes perçus par les fonds de pension non-résidents, alors que les fonds de pension allemands en sont, en pratique, quasiment exonérés, pourrait être admise en application de l’article 64, paragraphe 1, TFUE.
91. Selon l’article 64, paragraphe 1, TFUE, un État membre peut appliquer, dans les relations avec les pays tiers, des restrictions aux mouvements de capitaux, qui relèvent du champ d’application matériel de cette disposition, même si elles sont contraires au principe de la libre circulation des capitaux énoncé à l’article 63, paragraphe 1, TFUE, à condition que ces restrictions existaient déjà au 31 décembre 1993 ( 60 ).
92. Ainsi, l’article 64, paragraphe 1, TFUE, dispose que « [l]’article 63 [TFUE] ne porte pas atteinte à l’application, aux pays tiers, des restrictions existant le 31 décembre 1993 en vertu du droit national ou du droit de l’Union en ce qui concerne les mouvements de capitaux à destination ou en provenance de pays tiers lorsqu’ils impliquent des investissements directs, y compris les investissements immobiliers, l’établissement, la prestation de services financiers ou l’admission de titres sur les
marchés de capitaux ». Il importe d’examiner si la législation allemande en cause remplit les deux critères cumulatifs de cette disposition, à savoir le critère temporel et le critère matériel.
93. En premier lieu, en ce qui concerne le champ d’application temporel de l’article 64, paragraphe 1, TFUE, il ressort de la demande de décision préjudicielle que la disposition allemande relative au caractère libératoire de la retenue à la source pour les fonds de pension étrangers et permettant l’imputation intégrale de l’impôt sur le revenu du capital de l’impôt sur les sociétés, à savoir l’article 32, paragraphe 1, point 2, du KStG, est identique, tant du point de vue de son libellé que du
point de vue de ses effets, à la version qui était en vigueur à la date du 31 décembre 1993.
94. À cet égard, je suis d’avis que, afin d’établir si la restriction en cause existe depuis cette date, c’est la substance-même du mécanisme fiscal à l’origine de la restriction qui doit avoir perduré depuis ladite date. Vu sous cet angle, dans l’affaire au principal, le critère temporel semble être rempli.
95. En effet, premièrement, la juridiction de renvoi souligne que « la procédure d’imputation sur l’impôt sur les sociétés était applicable, à la date du 31 décembre 1993, aux contribuables intégralement assujettis ». Deuxièmement, le fait que le taux d’imposition ait varié depuis cette date n’implique pas, me semble-t-il, que la substance même du mécanisme fiscal ait changé. Troisièmement, à mon sens, le fait que le législateur allemand n’ait reconnu l’existence des fonds de pension allemands qu’en
2002, en prévoyant des règles spécifiques pour ceux-ci, importe peu. En effet, le fait de changer le champ personnel dudit mécanisme fiscal, à savoir l’augmentation ou la réduction du nombre d’assujettis soumis audit mécanisme, n’a pas d’importance afin de déterminer si la substance même du mécanisme fiscal a changé. Par conséquent, dans l’affaire au principal, je suis d’avis que la substance même du mécanisme fiscal en cause à l’origine de la restriction, ainsi qu’il résulte de la demande de
décision préjudicielle, n’a pas changé depuis le 31 décembre 1993.
96. En second lieu, en ce qui concerne le champ d’application matériel de l’article 64, paragraphe 1, TFUE, dans l’arrêt X (Sociétés intermédiaires établies dans des pays tiers) ( 61 ), la Cour a récemment rappelé qu’il résulte de son libellé même que, si les restrictions aux mouvements de capitaux, à destination ou en provenance de pays tiers, impliquant des investissements directs, relèvent du champ d’application matériel de cette clause, les investissements de portefeuille ne figurent pas parmi
les mouvements de capitaux visés par celle-ci. Dès lors que l’affaire au principal concerne des investissements de portefeuille ( 62 ), ces derniers ne peuvent pas relever de la notion d’« investissement direct » au sens de cette disposition.
97. Se pose encore la question de savoir si la situation en cause au principal peut relever des « mouvements de capitaux [...] lorsqu’ils impliquent [...] la prestation de services financiers », au sens de l’article 64, paragraphe 1, TFUE.
98. À cet égard, il convient de relever que le critère déterminant pour l’application de l’article 64, paragraphe 1, TFUE porte sur le lien de cause à effet qui existe entre les mouvements de capitaux et la prestation de services financiers et non sur le champ d’application personnel de la mesure nationale litigieuse ou son rapport avec le prestataire, plutôt qu’avec le destinataire, de tels services ( 63 ). En effet, le champ d’application de cette disposition est défini par référence aux
catégories de mouvements de capitaux susceptibles de faire l’objet de restrictions ( 64 ).
99. En outre, je suis d’avis que l’expression « les mouvements de capitaux [...] lorsqu’ils impliquent [...] la prestation de services financiers », au sens de l’article 64, paragraphe 1, TFUE, doit recevoir une interprétation stricte, en ce sens qu’elle vise une mesure restrictive portant sur les mouvements de capitaux entraînant la prestation des services mais non sur les services prestés en tant que tels. En effet, ainsi que l’a souligné M. l’avocat général Mengozzi dans ses conclusions
présentées dans le cadre de l’affaire Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company, cette disposition vise, dans son libellé, les mouvements de capitaux lorsqu’ils « impliquent », c’est-à-dire lorsqu’ils entraînent, la prestation de services financiers ( 65 ).
100. En l’espèce, la catégorie des mouvements de capitaux visée est le versement de dividendes à un fonds de pension. Je suis d’avis que lorsqu’un fonds de pension reçoit des dividendes, le lien de cause à effet qui existe entre les mouvements de capitaux et la prestation de services financiers fait défaut, dès lors qu’il s’agit de l’acquisition directe de participations par un investisseur qui souhaite diversifier ses actifs et mieux répartir les risques. Ainsi que l’a souligné la Commission, les
prises de participation d’un fonds de pension et les dividendes qu’il perçoit à ce titre servent prioritairement au maintien des actifs par une diversification accrue et une meilleure répartition des risques ainsi que des provisions qu’il constitue, afin de garantir le respect de ses engagements de retraite à l’égard de ses affiliés.
101. Enfin, la restriction en cause réside dans l’application du mécanisme d’imputation intégrale qui porte sur l’imposition des dividendes perçus par les fonds de pension résidents et dont ne peuvent pas bénéficier les fonds de pension non-résidents. Or, ladite restriction ne porte pas sur les mouvements de capitaux liés à la prestation de services financiers rendue par le fonds de pension à ses affiliés.
102. Par conséquent, je suis d’avis que la clause de standstill prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE ne s’applique pas à la restriction prévue par la législation allemande en cause dans l’affaire au principal.
V. Conclusion
103. Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre de la manière suivante aux questions préjudicielles posées par le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich, Allemagne) :
1) Les articles 63 et 65 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation d’un État membre qui impose une retenue à la source pour les dividendes distribués par une société résidente aux fonds de pension résidents et non-résidents, en prévoyant un mécanisme d’imputation intégrale sur l’impôt sur les sociétés réservé aux fonds de pension de résidents et, de ce fait, a pour effet d’exonérer quasiment ces dividendes de toute charge fiscale, alors que, pour les fonds de
pension non‑résidents, cette retenue constitue un impôt définitif, dans la mesure où la charge fiscale effective relative à ces dividendes supportée, dans cet État, par les fonds de pension non‑résidents est plus lourde que celle qui pèse sur les fonds de pension résidents, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier dans l’affaire au principal.
2) L’article 64, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens qu’une législation nationale, telle que celle en cause dans l’affaire au principal, qui n’a pas fondamentalement été modifiée depuis le 31 décembre 1993 et qui prévoit l’imputation intégrale de l’impôt sur le revenu du capital de l’impôts sur les sociétés, ne relève pas de la prestation de services financiers, au sens de cette disposition.
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( 1 ) Langue originale : le français.
( 2 ) Puisque les questions préjudicielles portent sur les articles 63 à 65 TFUE et que leur contenu est identique à celui des articles 56 à 58 du traité instituant la Communauté européenne (traité CE) les ayant précédés, il leur sera fait référence, même si une partie des faits remonte à une période antérieure au 1er décembre 2009.
( 3 ) Voir, notamment, arrêts du 8 novembre 2012, Commission/Finlande (C‑342/10, EU:C:2012:688) ; du 22 novembre 2012, Commission/Allemagne (C‑600/10, non publié, EU:C:2012:737), et du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402).
( 4 ) BGBl. 1993 I, p. 2.
( 5 ) BGBl. 2015 I, p. 434.
( 6 ) BGBl. 2002 I, p. 4210, et BGBl. 2003 I, p. 179.
( 7 ) BGBl. 2002 I, p. 4144.
( 8 ) Le terme allemand employé dans la demande préjudicielle est « Deckungsstock ».
( 9 ) Les provisions mathématiques constituent une catégorie de provisions correspondant à des réserves constituées par le fonds de pension afin de garantir le paiement des prestations de retraite. Ces provisions doivent être estimées conformément à l’article 341f du Handelsgesetzbuch (code du commerce).
( 10 ) BGBl. 2002 II, p. 670.
( 11 ) Arrêt du 21 mai 2015 (C‑560/13, EU:C:2015:347, points 39 et 44).
( 12 ) Voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2019, X (Sociétés intermédiaires établies dans des pays tiers) (C‑135/17, EU:C:2019:136, point 26 et jurisprudence citée).
( 13 ) Voir, notamment, arrêt du 24 novembre 2016, SECIL (C‑464/14, EU:C:2016:896, point 33 et jurisprudence citée).
( 14 ) Dans une situation analogue à la présente affaire au principal, dans l’arrêt du 10 avril 2014, Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company (C‑190/12, EU:C:2014:249, point 34), la Cour a effectivement précisé que, afin de déterminer si la législation en cause relève de l’application de l’article 63 TFUE, il ne s’agit pas d’examiner la nature de l’exonération prévue par cette législation ni le caractère de l’activité exercée par le fonds d’investissement, mais bien la forme de
participation des fonds d’investissement dans les sociétés résidentes.
( 15 ) À cet égard, je tiens à noter que, dans l’arrêt récent du 26 février 2019, X (Sociétés intermédiaires établies dans des pays tiers) (C‑135/17, EU:C:2019:136), la Cour a choisi d’examiner les questions dans l’ordre inverse, à savoir examiner la réglementation en cause d’abord à la lumière de l’article 64, paragraphe 1, TFUE puis à celle de l’article 63, paragraphe 1, TFUE.
( 16 ) Arrêts du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 15) ; du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, point 44), ainsi que du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 27).
( 17 ) Voir, notamment, arrêt du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 28 et jurisprudence citée).
( 18 ) Dans ses observations écrites, CPP fait valoir qu’un supplément de solidarité à concurrence de 5,5 % s’ajoute à l’impôt sur les sociétés, si bien qu’il en résulte une charge fiscale totale à hauteur de 15,825 %. Toutefois, je constate que, dans la demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi raisonne sur la base d’un impôt sur les sociétés à concurrence de 15 %. Aux fins des présentes conclusions, il sera fait référence à un taux de 15 %
( 19 ) La juridiction de renvoi indique également que « l’impôt sur le revenu du capital est imputé en totalité sur l’impôt sur les sociétés dû par les fonds de pension allemands intégralement assujettis ».
( 20 ) Dans ses observations écrites, CPP souligne que c’est tant l’impôt sur le revenu du capital que le supplément de solidarité prélevés sur les dividendes qui peuvent être imputés sur l’impôt sur les sociétés que le fonds de pension doit acquitter. Or, une telle précision ne figure pas dans la demande préjudicielle. Aux fins des présentes conclusions, il sera fait référence à l’impôt sur le revenu du capital qui peut être imputé de 25 % des dividendes bruts.
( 21 ) La juridiction de renvoi indique que « les produits de dividendes réalisés par les fonds de pension allemands ne se traduisent généralement pas, du fait de l’augmentation simultanée des provisions pour engagements de retraite, par l’apparition d’un résultat imposable » et que, dès lors que ces fonds « sont imposés sur la base de leur résultat (c’est-à-dire après déduction des dépenses professionnelles), ils ne paient normalement qu’un impôt sur les sociétés relativement faible du fait du
parallélisme général entre la perception de dividendes et l’augmentation des provisions ».
( 22 ) Voir, arrêts du 22 novembre 2012, Commission/Allemagne (C‑600/10, non publié, EU:C:2012:737, point 15), et du 8 novembre 2012, Commission/Finlande (C‑342/10, EU:C:2012:688, point 33).
( 23 ) Voir, en ce sens, arrêts du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 34) ; du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, point 48), et du 19 janvier 2006, Bouanich (C‑265/04, EU:C:2006:51, point 33).
( 24 ) Arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765, points 44 et 48).
( 25 ) En outre, la notion de la charge fiscale plus lourde a également été utilisée en matière d’imposition des successions. Dans son arrêt du 31 mars 2011, Schröder (C‑450/09, EU:C:2011:198, point 40), concernant l’imposition des successions, la Cour a dit pour droit que le fait d’octroyer un abattement sur la base imposable du bien immeuble, qui dépendait du lieu de résidence du défunt et du bénéficiaire au moment du décès, aboutirait à une charge fiscale effective plus lourde que celle
impliquant au moins un résident et aurait, partant, pour effet de diminuer la valeur de ladite succession.
( 26 ) Arrêt du 22 novembre 2018, Sofina e.a. (C‑575/17, EU:C:2018:943, point 31).
( 27 ) À supposer que X est la valeur des dividendes bruts versés, la valeur des dividendes nets perçus par le fonds de pension résident est X ‑ (0,25X). L’application d’un taux de 15 % au titre de l’impôt sur les sociétés aura comme résultat [X ‑ (0,25X)] × 0,15 ; ce qui revient à un taux effectif de 11,25 %.
( 28 ) Lors de l’audience, le gouvernement allemand a confirmé, dans sa réponse à une question de la Cour, que, en ce qui concerne la charge fiscale définitive, il existe une différence de traitement entre les fonds de pension résident et non-résident.
( 29 ) En vertu des dispositions combinées de l’article 31 du KStG et de l’article 36, paragraphe 2, point 2, de l’EStG.
( 30 ) Arrêt du 8 novembre 2012 (C‑342/10, EU:C:2012:688).
( 31 ) Il me semble, en effet, que dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, des dividendes distribués par des sociétés résidentes à des fonds de pension résidents étaient imposés à hauteur de 75 % et étaient soumis à un taux d’imposition de 26 %. Ainsi, ces dividendes étaient de facto imposables dans leur totalité à un taux de 19,5 %. La Cour a estimé que cette même réglementation constituait une restriction au sens de l’article 63 TFUE.
( 32 ) Voir, en ce sens, arrêts du 17 octobre 2013, Welte (C‑181/12, EU:C:2013:662, points 42 et 43 ainsi que jurisprudence citée) ; du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, point 63), et du 22 novembre 2018, Sofina e.a. (C‑575/17, EU:C:2018:943, point 45).
( 33 ) Voir, notamment, arrêts du 22 novembre 2018, Sofina e.a. (C‑575/17, EU:C:2018:943, point 46) ; du 20 septembre 2018, EV (C‑685/16, EU:C:2018:743, point 87) ; du 21 juin 2018, Fidelity Funds e.a. (C‑480/16, EU:C:2018:480, point 48), et arrêt du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, point 64).
( 34 ) Voir, notamment, arrêts du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 23 et jurisprudence citée), ainsi que du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, point 64).
( 35 ) Voir, notamment, arrêts du 20 septembre 2018, EV (C‑685/16, EU:C:2018:743, point 88) ; du 21 juin 2018, Fidelity Funds e.a. (C‑480/16, EU:C:2018:480, point 50), et du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 48 et jurisprudence citée).
( 36 ) Arrêts du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 28), ainsi que du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 49).
( 37 ) Voir, par analogie, arrêt du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 50).
( 38 ) Voir, en ce sens, arrêts du 21 juin 2018, Fidelity Funds e.a. (C‑480/16, EU:C:2018:480, point 54) ; du 25 octobre 2012, Commission/Belgique (C‑387/11, EU:C:2012:670, point 49 et jurisprudence citée), et du 14 décembre 2006, Denkavit Internationaal et Denkavit France (C‑170/05, EU:C:2006:783, point 35).
( 39 ) Voir, par analogie, arrêt du 21 juin 2018, Fidelity Funds e.a. (C‑480/16, EU:C:2018:480, point 55 et jurisprudence citée).
( 40 ) Voir, par analogie, arrêts du 20 octobre 2011, Commission/Allemagne (C‑284/09, EU:C:2011:670, point 58), ainsi que du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 42).
( 41 ) Arrêt du 22 décembre 2008, Truck Center (C‑282/07, EU:C:2008:762).
( 42 ) Voir, notamment, arrêts du 26 février 2019, N Luxembourg 1 e.a. (C‑115/16, C‑118/16, C‑119/16 et C‑299/16, EU:C:2019:134, point 163) ; du 22 novembre 2018, Sofina e.a. (C‑575/17, EU:C:2018:943, point 48) ; du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C-14/14 et C-17/14, EU:C:2015:608) ; du 19 juin 2014, Strojírny Prostějov et ACO Industries Tábor (C‑53/13 et C‑80/13, EU:C:2014:2011) ; du 12 juillet 2012, Commission/Espagne (C‑269/09, EU:C:2012:439) ; du 10 mai 2012, Santander Asset Management
SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286) ; du 1er juillet 2010, Dijkman et Dijkman-Lavaleije (C‑233/09, EU:C:2010:397), et du 3 juin 2010, Commission/Espagne (C‑487/08, EU:C:2010:310).
( 43 ) Arrêt du 18 octobre 2012, X (C‑498/10, EU:C:2012:635, point 26).
( 44 ) Arrêt du 22 novembre 2018, Sofina e.a. (C‑575/17, EU:C:2018:943, point 52).
( 45 ) Voir Beretta, G., « The Brisal and KBC Finance Decision: Once Again the CJEU Assesses the Compatibility with EU Law of Gross Withholding Taxation of Non-residents », EC Tax Review, 2007, p. 193 à 200 ; Lang, M., « Recent Case Law of the ECJ in Direct Taxation: Trends, Tensions, and Contradictions », EC Tax Review, 2009, p. 100 à101 ; CFE ECJ Task Force, « Comment by the CFE Task Force on ECJ Cases on the Judgment in Belgium SPF Finance v. Truck Center SA », no 158, ainsi que De Broe, L.,
Bammens, N., « Truck Center Belgian Withholding Tax on Interest Payments to Non-resident Companies Does Not Violate EC Law: A Critical Look at the ECJ’s Judgment in Truck Center », EC Tax Review, 2009, p. 131 à 137.
( 46 ) L’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549) en constitue une bonne illustration. Dans cette affaire, le Tribunal Administrativo e Fiscal de Sintra (tribunal administratif et fiscal de Sintra, Portugal) a appliqué l’arrêt du 22 décembre 2008, Truck Center (C‑282/07, EU:C:2008:762), alors que, dans sa demande préjudicielle, le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal) a estimé qu’il n’y avait pas
lieu de se référer à cet arrêt.
( 47 ) CFE ECJ Task Force, « Comment by the CFE Task Force on ECJ Cases on the Judgment in Belgium SPF Finance v. Truck Center SA », no 158, point 18.
( 48 ) Conformément à l'article 1er, paragraphe 1, point 1, du KStG.
( 49 ) Conformément aux dispositions combinées de l’article 8, paragraphe 1, du KStG, de l’article 49, paragraphe 1, point 5a, de l’EStG et de l’article 20, paragraphe 1, point 1, de l’EStG.
( 50 ) Arrêt du 22 décembre 2008 (C‑282/07, EU:C:2008:762).
( 51 ) Voir, par analogie, arrêt du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, point 53).
( 52 ) Voir, à cet égard, arrêt du 26 février 2019, N Luxembourg 1 e.a. (C‑115/16, C‑118/16, C‑119/16 et C‑299/16, EU:C:2019:134, points 164 et 165).
( 53 ) Arrêts du 12 juin 2003, Gerritse (C‑234/01, EU:C:2003:340) ; du 3 octobre 2006, FKP Scorpio Konzertproduktionen (C-290/04, EU:C:2006:630), ainsi que du 15 février 2007, Centro Equestre da Lezíria Grande (C-345/04, EU:C:2007:96).
( 54 ) Arrêt du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 65).
( 55 ) Au point 20 de l’arrêt du 22 novembre 2012, Commission/Allemagne (C-600/10, non publié, EU:C:2012:737), concernant la législation allemande relative à la déduction des frais d’exploitation liés à la perception des dividendes et des intérêts perçus en Allemagne, la Cour a précisément relevé que « la Commission n’a pas apporté d’éléments de nature à démontrer que [des frais de banque et des coûts analogues de transaction], si ceux-ci peuvent, le cas échéant, être directement liés à un montant
versé à l’occasion d’une opération de transaction de titres [...], sont également et nécessairement directement liés à la perception, en elle-même, d’un revenu sous forme de dividendes ou d’intérêts ».
( 56 ) Voir, notamment, arrêt du 6 décembre 2018, Montag (C‑480/17, EU:C:2018:987, point 33 et jurisprudence citée).
( 57 ) Ainsi, d’une part, la directive 2003/41/CE du Parlement européen et du Conseil, du 3 juin 2003, concernant les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle (JO 2003, L 235, p. 10), énonce à son considérants 26 qu’un « calcul prudent des provisions techniques est une condition essentielle pour garantir que les obligations de paiement des retraites peuvent être honorées » et que « [l]es taux d’intérêt maximum devraient être choisis avec prudence, conformément aux
règles nationales pertinentes ». Selon le considérant 27 de cette directive, les États membres devraient pouvoir soumettre le calcul des provisions techniques à des règles additionnelles plus détaillées que celles énoncées dans ladite directive. D’autre part, en matière d’assurance-vie, en vertu des considérants 35 et 36 de la directive 2002/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 novembre 2002, concernant l’assurance directe sur la vie (JO 2002, L 345, p. 1), il « est nécessaire, pour la
protection des assurés, que chaque entreprise d’assurance constitue des provisions techniques suffisantes » et que, en matière de limitation du taux d’intérêt utilisé dans le calcul des provisions techniques « il semble approprié de donner aux États membres la possibilité de choisir librement la méthode à utiliser ». La directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009, sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (JO
2009, L 335, p. 1), qui remplace la directive 2002/83, prévoit des principes similaires.
( 58 ) Arrêt du 6 avril 2016 (no I R 61/14) du Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne).
( 59 ) Voir, notamment, arrêt du 12 juillet 2012, Commission/Espagne (C‑269/09, EU:C:2012:439, points 63 à 90 et jurisprudence citée).
( 60 ) Voir, en ce sens, arrêts du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑446/04, EU:C:2006:774, point 187) ; du 24 mai 2007, Holböck (C‑157/05, EU:C:2007:297, point 39) ; du 24 novembre 2016, SECIL (C‑464/14, EU:C:2016:896, point 86), et du 26 février 2019, X (Sociétés intermédiaires établies dans des pays tiers) (C‑135/17, EU:C:2019:136, point 27).
( 61 ) Arrêt du 26 février 2019 (C‑135/17, EU:C:2019:136, point 28).
( 62 ) Point 40 des présentes conclusions.
( 63 ) Voir, en ce sens, arrêt du 21 mai 2015, Wagner-Raith (C‑560/13, EU:C:2015:347, points 39, 43 à 45), dans lequel la Cour a jugé que la mesure nationale doit porter sur les mouvements de capitaux ayant un lien suffisamment étroit avec la prestation de services financiers et que, pour qu’il y ait un lien suffisamment étroit, il est nécessaire qu’il existe un lien de cause à effet entre le mouvement de capitaux et la prestation de services financiers.
( 64 ) Arrêt du 15 février 2017, X (C‑317/15, EU:C:2017:119, point 33 et jurisprudence citée).
( 65 ) Voir, de manière générale, conclusions de M. l’avocat général Mengozzi, du 6 novembre 2013, dans l’affaire Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company (C‑190/12, EU:C:2013:710, points 73 à 80).