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24/01/2019 | CJUE | N°C-1/18

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. N. Wahl, présentées le 24 janvier 2019., « Oribalt Rīga » SIA contre Valsts ieņēmumu dienests., 24/01/2019, C-1/18


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NILS WAHL

présentées le 24 janvier 2019 ( 1 )

Affaire C-1/18

SIA „Oribalt Rīga”, anciennement SIA „Oriola Rīga”,

autre partie au principal

Valsts ieņēmumu dienests

[demande de décision préjudicielle formée par l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie)]

« Règlement (CEE) no 2913/92 – Code des douanes communautaire – Valeur en douane – Médicaments – Article 30, paragraphe 2, sous b) – Notion de “marchandises similaires” –

léments à prendre en compte – Article 30, paragraphe 2, sous c) – Méthode déductive fondée sur le prix unitaire – Délai de 90 jours – Réductions »

1.  ...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NILS WAHL

présentées le 24 janvier 2019 ( 1 )

Affaire C-1/18

SIA „Oribalt Rīga”, anciennement SIA „Oriola Rīga”,

autre partie au principal

Valsts ieņēmumu dienests

[demande de décision préjudicielle formée par l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie)]

« Règlement (CEE) no 2913/92 – Code des douanes communautaire – Valeur en douane – Médicaments – Article 30, paragraphe 2, sous b) – Notion de “marchandises similaires” – Éléments à prendre en compte – Article 30, paragraphe 2, sous c) – Méthode déductive fondée sur le prix unitaire – Délai de 90 jours – Réductions »

1.  Pour déterminer la valeur en douane de marchandises importées, c’est avant tout la méthode de la « valeur transactionnelle » qui est appliquée. Cette méthode consiste à déterminer le montant des droits de douane [ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à l’importation] sur la base du prix effectivement payé ou à payer au vendeur au moment de l’exportation vers l’Union européenne.

2.  Toutefois, cette méthode ne peut être appliquée que lorsque les marchandises ont déjà fait l’objet d’une vente au moment où a lieu la déclaration en douane. Dans les autres cas, tels que la vente en consignation, la méthode de la valeur transactionnelle ne peut pas être appliquée. Le droit de l’Union prévoit en ces circonstances cinq autres méthodes « subsidiaires », qui doivent être appliquées successivement dans l’ordre établi par la législation pertinente ( 2 ).

3.  L’application de ces méthodes ne va pas toujours sans difficulté. Pour calculer la valeur en douane, de nombreux facteurs doivent être pris en compte. De plus, ces facteurs doivent être pris en compte de manière uniforme dans l’Union européenne pour éviter que les importateurs ne recherchent la législation la plus favorable (« forum shopping »).

4.  Dans la présente affaire, les questions préjudicielles déférées par l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie) portent sur les facteurs pertinents pour calculer la valeur en douane suivant les méthodes d’évaluation subsidiaires prévues à l’article 30, paragraphe 2, du code des douanes, dans le contexte particulier de l’évaluation en douane de médicaments importés. Étant donné la valeur significative des médicaments, selon la méthode d’évaluation qui est appliquée, la valeur en douane ainsi
déterminée peut conduire à des différences importantes dans les droits de douane ou la TVA à l’importation.

I. Le cadre juridique

A.   Le code des douanes

5. C’est l’ancien code des douanes communautaire et, en particulier, le chapitre 3 de celui-ci (« Valeur en douane des marchandises ») qui est applicable au litige devant le juge de renvoi.

6. Aux termes de l’article 29, paragraphe 1, du code des douanes :

« [l]a valeur en douane des marchandises importées est leur valeur transactionnelle, c’est-à-dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de [l’Union européenne], le cas échéant, après ajustement effectué conformément aux articles 32 et 33 […]

[…] »

7. L’article 30 du code des douanes dispose :

« 1.   Lorsque la valeur en douane ne peut être déterminée par application de l’article 29, il y a lieu de passer successivement aux lettres a), b), c) et d) du paragraphe 2 jusqu’à la première de ces lettres qui permettra de la déterminer, sauf si l’ordre d’application des points c) et d) doit être inversé à la demande du déclarant ; c’est seulement lorsque cette valeur en douane ne peut être déterminée par application d’une lettre donnée qu’il est loisible d’appliquer la lettre qui vient
immédiatement après celle-ci dans l’ordre établi en vertu du présent paragraphe.

2.   Les valeurs en douane déterminées par application du présent article sont les suivantes :

a) valeur transactionnelle de marchandises identiques, vendues pour l’exportation à destination de [l’Union européenne] et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ;

b) valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues pour l’exportation à destination de [l’Union européenne] et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ;

c) valeur fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes dans [l’Union européenne] des marchandises importées ou ( 3 ) de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, ainsi faites à des personnes non liées aux vendeurs ;

d) valeur calculée, égale à la somme :

– du coût ou de la valeur des matières et des opérations de fabrication ou autres, mises en œuvre pour produire les marchandises importées,

– d’un montant représentant les bénéfices et les frais généraux égal à celui qui entre généralement dans les ventes de marchandises de la même nature ou de la même espèce que les marchandises à évaluer, qui sont faites par des producteurs du pays d’exportation pour l’exportation à destination de la Communauté,

– du coût ou de la valeur des éléments énoncés à l’article 32 paragraphe 1, point e). […]

[…] »

8. L’article 31, paragraphe 1, qui prévoit la sixième et dernière méthode d’évaluation, dispose :

« Si la valeur en douane des marchandises importées ne peut être déterminée par application des articles 29 et 30, elle est déterminée, sur la base des données disponibles dans [l’Union européenne], par des moyens raisonnables compatibles avec les principes et les dispositions générales :

[…]

– des dispositions du présent chapitre. »

B.   Le règlement d’application

9. Aux termes de l’article 142, paragraphe 1, sous d), du règlement (CEE) no 2454/93 ( 4 ), on entend par « marchandises similaires » des « marchandises produites dans le même pays qui, sans être pareilles à tous égards, présentent des caractéristiques semblables et sont composées de matières semblables, ce qui leur permet de remplir les mêmes fonctions et d’être commercialement interchangeables ; la qualité des marchandises, leur réputation et l’existence d’une marque de fabrique ou de commerce
font partie des éléments à prendre en considération pour déterminer si des marchandises sont similaires ».

10. Aux termes de l’article 151 du règlement d’application :

« 1.   Aux fins de l’application de l’article 30, paragraphe 2, point b), du code [des douanes] (valeur transactionnelle de marchandises similaires), la valeur en douane est déterminée par référence à la valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues au même niveau commercial et sensiblement en même quantité que les marchandises à évaluer. En l’absence de telles ventes, il y a lieu de se référer à la valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues à un niveau commercial
différent et/ou en quantité différente, ajustées pour tenir compte des différences que le niveau commercial et/ou la quantité auraient pu entraîner, à la condition que de tels ajustements, qu’ils conduisent à une augmentation ou une diminution de la valeur, puissent se fonder sur des éléments de preuve produits établissant clairement qu’ils sont raisonnables et exacts.

[…]

4.   Aux fins de l’application du présent article, une valeur transactionnelle de marchandises produites par une personne différente n’est prise en considération que si aucune valeur transactionnelle de marchandises identiques, produites par la même personne que les marchandises à évaluer, ne peut être constatée en application du paragraphe 1.

[…] »

11. L’article 152, paragraphe 1, du règlement d’application dispose :

« a) Si les marchandises importées ou des marchandises identiques ou similaires importées sont vendues dans [l’Union européenne] en l’état, la valeur en douane des marchandises importées visée à l’article 30, paragraphe 2, point c), du code [des douanes] est fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, faites à des personnes non liées aux vendeurs au moment ou à peu
près au moment de l’importation des marchandises à évaluer, sous réserve de déductions se rapportant aux éléments suivants :

i) commissions généralement payées ou convenues, ou marges généralement pratiquées pour bénéfices et frais généraux (y compris les coûts directs ou indirects de la commercialisation des marchandises en question) relatifs aux ventes, dans [l’Union européenne], de marchandises importées de la même nature ou de la même espèce ;

ii) frais habituels de transport et d’assurance, ainsi que frais connexes encourus dans [l’Union européenne] ;

iii) droits à l’importation et autres impositions à payer dans [l’Union européenne] en raison de l’importation ou de la vente des marchandises.

b) Au cas où les marchandises importées ou les marchandises identiques ou similaires importées ne sont pas vendues au moment ou à peu près au moment de l’importation des marchandises à évaluer, la valeur en douane des marchandises importées, déterminée en application du présent article, est fondée, sous réserve par ailleurs des dispositions du paragraphe 1, point a), sur le prix unitaire auquel les marchandises importées ou des marchandises identiques ou similaires importées sont vendues dans
[l’Union européenne] en l’état à la date la plus proche suivant l’importation des marchandises à évaluer, mais en tout cas dans les quatre-vingt-dix jours à compter de cette importation. »

12. En outre, l’article 152, paragraphe 3, du règlement d’application dispose :

« […] le prix unitaire correspondant aux ventes de marchandises importées totalisant la quantité la plus élevée est le prix auquel le plus grand nombre d’unités est vendu, lors de ventes à des personnes qui ne sont pas liées aux personnes auxquelles elles achètent les marchandises en question, au premier niveau commercial suivant l’importation auquel s’effectuent ces ventes. »

II. Les faits à l’origine du litige, la procédure et les questions préjudicielles

13. La société SIA Oribalt Rīga (anciennement SIA Oriola Rīga, ci‑après « Oribalt Rīga ») et la société indienne Ranbaxy Laboratories Ltd (ci-après « Ranbaxy Laboratories ») ont conclu en 2005 un contrat de consignation. Aux termes de ce contrat, Oribalt Rīga s’est engagée à fournir à Ranbaxy Laboratories des services de consignation en Lettonie, y compris des espaces d’entreposage et des services de manutention pour honorer les commandes des clients de Ranbaxy Laboratories en Lettonie, Lituanie et
Estonie.

14. En vertu du contrat de consignation, Oribalt Rīga importait les marchandises (des médicaments) en Lettonie aux fins de leur mise en libre pratique dans le marché intérieur. Dans les procédures douanières, Oribalt Rīga se désignait à la fois comme destinataire des marchandises et comme déclarant. Elle calculait la valeur en douane des marchandises importées par application de la méthode de détermination de la valeur transactionnelle figurant à l’article 29, paragraphe 1, du code des douanes, en
soumettant à l’administration douanière des factures pro forma émises à des fins douanières par Ranbaxy Laboratories. Ces factures pro forma indiquaient le type de marchandises importées, l’article, le prix unitaire actuel sur le marché et le prix total.

15. Oribalt Rīga entreposait les marchandises importées mais il n’y avait pas de transfert de propriété avant leur vente aux clients. C’est Ranbaxy Laboratories qui déterminait à qui les marchandises importées seraient vendues, les modalités de la vente, le prix ainsi que les remises applicables. Oribalt Rīga recevait et honorait les commandes des clients de Ranbaxy Laboratories. Dans ce contexte, Oribalt Rīga émettait les factures au prix de vente fixé par Ranbaxy Laboratories dans des commandes
pro forma approuvées.

16. En vertu du contrat de consignation, les marchandises dont la date de péremption était la plus rapprochée devaient être vendues en premier lieu. Plusieurs mois pouvaient donc s’écouler entre l’importation et la vente des marchandises. En conséquence, la valeur des marchandises en cause au moment de la vente pouvait différer de leur valeur de marché au moment de l’importation. Le prix de vente des marchandises pouvait également être affecté par les réductions consenties par Ranbaxy Laboratories à
ses clients.

17. Après la vente, Ranbaxy Laboratories facturait donc les marchandises vendues à Oribalt Rīga.

18. En 2010 et 2011, le Valsts ieņēmumu dienests (administration fiscale lettone, ci-après le « VID ») a effectué des contrôles douaniers et d’autres contrôles fiscaux concernant Oribalt Rīga pour la période allant de 2008 à 2010. Le VID a ensuite adopté la décision qui est attaquée devant le juge de renvoi, par laquelle elle impose à Oribalt Rīga une majoration (un supplément de taxe sur la valeur ajoutée, des intérêts de retard et une amende) pour les marchandises importées pendant cette période.

19. La décision attaquée conclut que la valeur des marchandises en cause devait être déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes, en fonction des informations relatives aux ventes (type de marchandises importées, article, prix à l’unité et prix total) figurant sur les factures que Ranbaxy Laboratories avait adressées à la requérante après la vente de ces marchandises aux clients de Ranbaxy Laboratories. En outre, la décision attaquée conclut que le prix à
prendre en compte devait être le prix de vente des marchandises indiqué sur ces factures, sans tenir compte des réductions que Ranbaxy Laboratories avait consenties à ses clients.

20. L’administratīvā rajona tiesa (tribunal administratif de district, Lettonie) a rejeté le recours en annulation présenté par Oribalt Rīga contre la décision attaquée. L’Administratīvā apgabaltiesa (Cour administrative régionale, Lettonie) a ensuite rejeté l’appel interjeté par Oribalt Rīga contre cette dernière décision. Oribalt Rīga a alors formé un pourvoi devant la juridiction de renvoi.

21. Éprouvant des doutes quant à l’interprétation correcte des dispositions pertinentes du droit de l’Union, l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie) a décidé de surseoir à statuer et de saisir la Cour des questions préjudicielles suivantes :

« 1) Dans les cas où les marchandises importées sont des médicaments, faut-il, pour déterminer la valeur en douane desdites marchandises conformément à l’article 30, paragraphe 2, point b), du [code des douanes] et à l’article 151, paragraphe 4, du règlement [d’application], considérer comme marchandises similaires des médicaments composés d’une substance active et d’une quantité de celle-ci identiques (ou similaires), ou bien faut-il, pour identifier des marchandises similaires, tenir compte
également de la position de marché du médicament importé concerné et de son fabricant, c’est-à-dire de la popularité et de la demande ?

2) Faut-il, pour déterminer la valeur en douane des marchandises importées conformément à l’article 30, paragraphe 2, point c), [du code des douanes], appliquer avec souplesse le délai de 90 jours figurant à l’article 152, paragraphe 1, point b), du règlement [d’application] ?

3) Si le délai prescrit doit être appliqué avec souplesse, quelles sont alors, dans la présente affaire, les données à privilégier ? S’agit-il des données concernant les transactions portant sur des marchandises identiques ou similaires les plus proches du moment de l’importation des marchandises à évaluer, vendues en quantité totale suffisante pour déterminer le prix unitaire, ou bien des données concernant les transactions plus éloignées portant concrètement sur les marchandises importées ?

4) Faut-il, pour déterminer la valeur en douane des marchandises importées conformément à l’article 30, paragraphe 2, point c), du [code des douanes], appliquer les réductions accordées qui ont déterminé le prix de vente réel des marchandises ? »

22. Oribalt Rīga, le gouvernement letton ainsi que la Commission européenne ont présenté des observations écrites dans cette affaire. Toutes les parties ont présenté des observations orales lors de l’audience qui a eu lieu le 29 novembre 2018.

III. Analyse

23. Même si les questions présentées par l’Augstākā tiesa (Cour suprême) peuvent paraître assez techniques à première vue, elles concernent, en fait, les principes fondamentaux de l’évaluation en douane.

24. C’est pourquoi il sera utile de présenter d’abord un bref aperçu de la raison d’être de l’évaluation en douane dans le code des douanes. J’examinerai ensuite les questions préjudicielles l’une après l’autre.

A.   Remarque liminaire

25. Il convient de rappeler au préalable que, selon une jurisprudence constante de la Cour, le droit de l’Union relatif à l’évaluation en douane vise à établir un système équitable, uniforme et neutre qui exclut l’utilisation de valeurs en douane arbitraires ou fictives. La valeur en douane doit donc refléter la valeur économique réelle d’une marchandise importée et tenir compte de l’ensemble des éléments de cette marchandise qui présentent une valeur économique ( 5 ).

26. Ce principe est consacré à l’article 29 du code des douanes. Cette disposition prévoit que les marchandises importées sont évaluées sur la base de leur valeur transactionnelle. La « méthode de la valeur transactionnelle » prend en compte le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union européenne.

27. Pour que la valeur en douane reflète la valeur économique réelle des marchandises importées, certains éléments doivent être ajoutés à la valeur transactionnelle, tels que les frais d’emballage ou de transport des marchandises dans l’Union européenne, tout service ou tout matériel fourni sans frais par l’acheteur, ou les redevances et droits de licence ( 6 ). Lorsque l’acheteur et le vendeur sont liés et que ces liens peuvent avoir influencé le prix des marchandises importées, une majoration peut
être réclamée afin que la valeur en douane se rapproche de la valeur de marchandises de nature similaire, ce qui permet une évaluation équitable.

28. Étant donné que la méthode de la valeur transactionnelle est celle qui permet de refléter le mieux possible la valeur économique réelle des marchandises importées, c’est la méthode par défaut à appliquer pour déterminer la valeur en douane ( 7 ). Cependant, les articles 30 et 31 du code des douanes prévoient d’autres méthodes de détermination de la valeur en douane lorsque la valeur transactionnelle effective ne peut pas être déterminée. Les quatre méthodes d’évaluation prévues à l’article 30
sont donc des méthodes de « deuxième ligne » qui permettent de déterminer la valeur en douane sur la base de règles claires. Toutefois, l’article 31 fournit une méthode d’évaluation de dernier ressort, qui ne peut être appliquée que s’il n’y a aucune autre possibilité et qui met en œuvre le cadre réglementaire en matière de détermination de la valeur en douane d’une manière plus flexible.

29. De manière générale, les méthodes de détermination de la valeur en douane prévues par le code des douanes sont établies dans un ordre strictement hiérarchique et présentent un lien de subsidiarité entre elles. Elles doivent être appliquées successivement. C’est seulement lorsque la valeur en douane ne peut être déterminée par application d’une méthode donnée qu’il y a lieu de se référer à celle qui vient immédiatement après celle-ci dans l’ordre établi par le code des douanes ( 8 ).

30. Les méthodes subsidiaires prévues aux articles 30 et 31 du code des douanes sont donc appliquées soit lorsque la valeur transactionnelle effective n’existe pas, parce que les marchandises à évaluer n’ont pas encore été vendues à un acheteur dans l’Union européenne, soit lorsque l’authenticité de la valeur transactionnelle ne peut pas être vérifiée.

31. Dans ces circonstances, on se tourne vers d’autres méthodes d’évaluation afin de déterminer une valeur en douane équitable qui reflète le mieux possible la valeur économique réelle des marchandises importées au moment ou à peu près au moment de l’importation. Le législateur de l’Union a compris que, selon la nature des marchandises en cause, la valeur pouvait varier de manière significative dans le temps.

32. Dans l’affaire au principal, la méthode de la valeur transactionnelle ne peut pas être appliquée, parce que les marchandises sont vendues en consignation et qu’il n’y a transfert de propriété qu’après leur importation dans le marché intérieur de l’Union. Les parties au principal ne partagent cependant pas le même avis sur celle des autres méthodes d’évaluation prévues à l’article 30 du code des douanes qui doit être appliquée dans le cas d’espèce.

33. Oribalt Rīga soutient que les marchandises importées devraient être évaluées sur la base de la valeur transactionnelle de marchandises identiques ou similaires vendues pour l’exportation à destination de l’Union européenne au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ( 9 ), tandis que le VID estime que les marchandises devraient être évaluées sur la base du prix unitaire auquel elles sont finalement vendues, mais sans prendre en compte les réductions de prix
accordées aux clients de Ranbaxy Laboratories ( 10 ).

34. Plus précisément, c’est la mise en œuvre des différentes méthodes d’évaluation prévues à l’article 30, paragraphe 2, du code des douanes qui est litigieuse entre les parties. Il incombe donc à la juridiction de renvoi de déterminer quelle est la méthode à appliquer pour évaluer les marchandises importées et la manière dont il y a lieu de l’appliquer.

35. La Cour a donc été saisie des questions préjudicielles que j’examinerai l’une après l’autre ci-dessous.

B.   Sur la première question préjudicielle : les facteurs à prendre en compte pour déterminer la valeur en douane de médicaments par application de l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes

36. Par sa première question, le juge de renvoi demande quels sont les facteurs à prendre en compte pour identifier des « marchandises similaires » appropriées lorsque la méthode déductive de détermination de la valeur en douane prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes est appliquée à des médicaments.

37. Cette question est essentielle pour la solution de l’affaire au principal. En effet, le VID soutient que les marchandises importées ne pouvaient pas être évaluées par application de l’article 30, paragraphe 2, sous b), parce que l’administration douanière lettone ne disposait pas des connaissances ni des informations nécessaires pour déterminer si les médicaments produits par d’autres vendeurs et les marchandises produites par Ranbaxy Laboratories étaient en fait similaires.

38. Pour interpréter l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, le règlement d’application précise qu’on entend par « marchandises similaires » des « marchandises produites dans le même pays qui, sans être pareilles à tous égards, présentent des caractéristiques semblables et sont composées de matières semblables, ce qui leur permet de remplir les mêmes fonctions et d’être commercialement interchangeables ; la qualité des marchandises, leur réputation et l’existence d’une marque de
fabrique ou de commerce font partie des éléments à prendre en considération pour déterminer si des marchandises sont similaires» ( 11 ).

39. Comme le rappelle la Commission, cette disposition montre que les principaux éléments à prendre en compte pour déterminer une valeur en douane sur la base de la valeur en douane de marchandises similaires déterminée précédemment sont les caractéristiques et les composants qui permettent aux marchandises de remplir les mêmes fonctions et d’être interchangeables du point de vue commercial. La qualité des marchandises, leur réputation et l’existence d’une marque sont d’autres éléments à prendre en
considération.

40. Comme telle, cette définition est assez large et se réfère à une appréciation factuelle des marchandises à évaluer, afin de permettre une application large à tous les types de marchandises. Il apparaît clairement de la définition que les facteurs précis à prendre en compte qui sont mentionnés le sont à titre d’exemple.

41. Dans le même temps, cette définition est conforme à la raison d’être de l’évaluation en douane dans le code des douanes, à savoir déterminer une valeur en douane qui reflète la valeur économique réelle d’une marchandise importée et tienne compte de l’ensemble des éléments de cette marchandise qui présentent une valeur économique ( 12 ).

42. L’administration douanière doit donc vérifier en premier lieu si les marchandises comparées remplissent les mêmes fonctions et sont commercialement interchangeables. Tout autre facteur à prendre en considération aux fins de l’évaluation dépend des marchandises précises à évaluer et doit prendre en compte l’ensemble de tous les éléments de ces marchandises qui sont susceptibles d’influer sur leur valeur économique.

43. Lorsqu’une administration douanière ne dispose pas des connaissances ni des informations nécessaires pour effectuer cette appréciation en ce qui concerne les marchandises à évaluer, plusieurs solutions sont possibles : premièrement, l’administration douanière peut demander au déclarant de fournir tout autre document et information jugé nécessaire pour déterminer la valeur en douane en application de chacune des méthodes d’évaluation prévues aux articles 30 et 31 du code des douanes ( 13 ),
deuxièmement, l’administration douanière peut demander tous documents et informations à toute personne directement ou indirectement intéressée aux opérations concernées effectuées dans le cadre des échanges des marchandises ( 14 ), troisièmement, l’administration douanière peut demander l’assistance des autorités douanières des autres États membres de l’Union afin d’obtenir les informations nécessaires ( 15 ) ou, quatrièmement, l’administration douanière peut demander, aux frais du déclarant,
des analyses ou expertises des marchandises à évaluer ( 16 ).

44. Toute information confidentielle fournie dans le cadre de l’évaluation est couverte par le secret professionnel et ne peut être divulguée par les autorités compétentes sans l’autorisation expresse de la personne ou de l’autorité qui l’a fournie ( 17 ). Le déclarant ne peut donc pas invoquer la nature confidentielle d’une information qui lui est demandée pour se soustraire à l’obligation de fournir cette information.

45. Dans la mesure des possibilités, l’administration douanière doit se baser sur des marchandises similaires, vendues au même niveau commercial et sensiblement en même quantité que les marchandises à évaluer. En l’absence de telles ventes, des ventes effectuées dans d’autres conditions peuvent être utilisées. Dans ce cas, il y a lieu de procéder à des ajustements en fonction des éléments qui sont différents. Il faut souligner que de tels ajustements doivent se fonder sur des éléments de preuve
établissant clairement qu’ils sont raisonnables et exacts. En l’absence d’une telle mesure objective, la valeur en douane ne peut pas être déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes ( 18 ).

46. Étant donné la stricte relation hiérarchique établie entre les dispositions du code des douanes relatives à l’évaluation, l’administration douanière est tenue de procéder à cette évaluation en appliquant d’abord la première disposition avant celles qui la suivent dans le code des douanes.

47. En outre, le droit à une bonne administration, en tant qu’il reflète un principe général du droit de l’Union, impose à l’administration douanière de motiver toutes ses décisions, y compris le choix d’une méthode d’évaluation. Cette obligation met le destinataire en mesure de défendre ses droits dans les meilleures conditions possibles et de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile d’introduire un recours contre celles-ci. Elle est également nécessaire pour permettre aux
juridictions d’exercer le contrôle de la légalité desdites décisions ( 19 ).

48. Dans la mesure où le litige entre les parties pourrait également porter sur l’application de la méthode d’évaluation prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous a), du code des douanes, les mêmes considérations s’y appliquent.

49. En conséquence, si Oribalt Rīga a importé des marchandises identiques (c’est-à-dire, en substance, des marchandises qui sont les mêmes mais portent d’autres numéros de série) au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises en cause et que ces marchandises ont été évaluées sur la base de leur valeur transactionnelle par application de l’article 29 du code des douanes, les marchandises en cause devraient nécessairement être évaluées sur la base de l’article 30, paragraphe 2,
sous a). Si Oribalt Rīga n’a pas importé de telles marchandises, il faut alors appliquer l’article 30, paragraphe 2, sous b), et la valeur en douane doit être déterminée sur la base de la valeur transactionnelle de marchandises similaires.

50. En cas d’application de la méthode d’évaluation prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, je pense que, s’agissant de médicaments génériques, il ne serait pas trop difficile de trouver des marchandises similaires. Si d’autres médicaments génériques sont produits dans le même pays et qu’ils sont considérés comme un substitut équivalent au même médicament de marque que les marchandises à évaluer, ces autres médicaments importés constituent des marchandises similaires aux
fins de l’article 30, paragraphe 2, sous b).

51. Je suggère donc à la Cour de répondre à la première question en ce sens que, lorsque la valeur en douane de marchandises importées, quelle que soit leur nature, est déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes et de l’article 151, paragraphe 4, du règlement d’application, l’administration douanière doit, pour identifier des marchandises similaires, vérifier d’abord si les marchandises remplissent les mêmes fonctions et si elles sont commercialement
interchangeables. À cette fin, il y a lieu de procéder à une appréciation factuelle, en fonction de la nature précise des marchandises en question, en tenant compte de l’ensemble des éléments de cette marchandise qui présentent une valeur économique.

C.   Sur les deuxième et troisième questions préjudicielles : le délai de 90 jours prévu à l’article 152, paragraphe 1, du règlement d’application

52. Par ses deuxième et troisième questions, le juge de renvoi demande, en substance, si la limitation à 90 jours de la période de référence pour la prise en compte de marchandises similaires, prévue à l’article 152, paragraphe 1, du règlement d’application, doit être appliquée avec souplesse afin de prendre en compte « plus de marchandises similaires », importées en dehors du délai de 90 jours.

53. Le libellé de l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application montre clairement que ce délai de 90 jours constitue une limite stricte. Dans le cas contraire, le législateur de l’Union aurait inclus dans ce libellé un terme tel que « environ ». Une telle interprétation se base sur le principe sous‑jacent qui veut que la détermination d’une valeur en douane reflète la valeur économique réelle des marchandises au moment ou à peu près au moment de l’entrée des marchandises en cause
dans le marché intérieur. Le délai de 90 jours mentionné à l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application est une exception à ce principe et doit faire l’objet d’une interprétation stricte. Ces 90 jours représentent donc la marge de manœuvre maximale dont dispose l’administration douanière pour évaluer des marchandises par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes.

54. Dans l’affaire au principal, le VID a appliqué avec souplesse le délai prévu à l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application pour déterminer la valeur en douane des marchandises importées par Oribalt Rīga en application de l’article 30, paragraphe 2, sous c). À cet égard, tant le juge de renvoi que le gouvernement letton se réfèrent aux notes interprétatives figurant à l’annexe 23 du règlement d’application. La note pertinente suggère que le « délai de quatre‑vingt‑dix jours »
qui figure à l’article 152, paragraphe 1, de ce règlement pourrait être modulé avec souplesse lorsque des valeurs en douane sont déterminées par application des dispositions de l’article 31, paragraphe 1, du code des douanes. Le VID a ainsi étendu cette interprétation à l’application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes.

55. L’article 31 du code des douanes figure en dernière position dans la stricte hiérarchie des méthodes d’évaluation prévues au code des douanes. Il y a donc lieu de souligner que l’évaluation de marchandises importées par application de l’article 31 constitue une méthode résiduelle d’évaluation de la valeur en douane, qui ne doit être utilisée qu’en dernier ressort lorsque la valeur en douane des marchandises importées ne peut pas être déterminée en vertu des articles 29 ou 30 du code des douanes.

56. Dans ces conditions, l’article 31 du code des douanes permet d’appliquer avec souplesse les méthodes d’évaluation figurant aux articles 29 et 30 de ce code. Toutefois, étant donné la stricte hiérarchie établie entre les dispositions relatives à l’évaluation de la valeur en douane, l’administration douanière doit d’abord établir que l’évaluation sur la base de l’article 29 et de l’article 30, paragraphe 2, sous a) à d), n’est pas possible.

57. Toute autre interprétation du délai de 90 jours prévu à l’article 152, paragraphe 1, du règlement d’application rendrait superflu l’article 31 du code des douanes et priverait cette disposition de son effet utile.

58. En conséquence, le délai de 90 jours prévu à l’article 152, paragraphe 1, du règlement d’application doit faire l’objet d’une application stricte.

59. Je suggère donc à la Cour de répondre aux deuxième et troisième questions préjudicielles en ce sens que, lorsque la valeur en douane de marchandises importées est déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes, le délai de 90 jours prévu à l’article 152, paragraphe 1, du règlement d’application doit faire l’objet d’une application stricte.

D.   Sur la quatrième question préjudicielle : les réductions

60. Par sa quatrième question, le juge de renvoi demande si les réductions qui ont été appliquées au prix auquel les marchandises importées ont été effectivement vendues doivent être prises en compte pour déterminer la valeur en douane par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes.

61. L’article 30, paragraphe 2, sous c), prévoit l’évaluation de marchandises importées sur la base du prix unitaire (ou prix catalogue) correspondant aux ventes dans l’Union des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée faites à des personnes non liées aux vendeurs.

62. L’article 152 du règlement d’application fournit des précisions à ce sujet. En vertu de cette disposition, le prix unitaire des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires vendues au moment ou à peu près au moment de l’importation doit être utilisé comme base pour l’évaluation par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes ( 20 ). Cette disposition précise que le « prix unitaire » désigne le prix auquel le plus grand nombre d’unités est vendu,
lors de ventes à des personnes qui ne sont pas liées aux personnes auxquelles elles achètent les marchandises en question, au premier niveau commercial suivant l’importation auquel s’effectuent ces ventes ( 21 ).

63. La méthode d’évaluation prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous c), diffère significativement de la méthode d’évaluation principale prévue à l’article 29 du code des douanes.

64. L’article 29 définit la valeur en douane sur la base de la valeur transactionnelle effective, avec des ajustements en fonction de certains éléments qui affectent la valeur économique réelle des marchandises importées ( 22 ). Dans cette mesure, les réductions peuvent être prises en compte pour déterminer la valeur en douane dans la mesure où elles concernent les marchandises importées et où elles reposent sur un droit contractuel valide au moment de la déclaration en douane ( 23 ).

65. Au contraire, les méthodes d’évaluation prévues aux articles 30 et 31 du code des douanes permettent de déterminer une valeur en douane qui constitue une approximation, ou plutôt une estimation, de la valeur économique des marchandises importées ( 24 ). Une certaine marge d’erreur par rapport à leur valeur économique réelle est donc inévitable.

66. En effet, la stricte hiérarchie qui est établie au chapitre 3 du code des douanes montre que le législateur de l’Union a considéré que certaines méthodes d’évaluation fournissaient de meilleures estimations de la valeur économique de marchandises importées que d’autres. En conséquence, plus l’administration douanière doit descendre dans la hiérarchie de ces dispositions pour déterminer la valeur en douane, plus cette valeur peut s’éloigner de la valeur économique réelle des marchandises
importées ( 25 ).

67. La valeur en douane déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes est, à cet égard, encore plus éloignée de la valeur économique réelle que celle qui résulte de l’application de l’article 30, paragraphe 2, sous a) ou b) de ce code. Non seulement la méthode d’évaluation prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous c), consiste à déterminer la valeur en douane sur la base d’un prix unitaire théorique, plutôt que sur une transaction commerciale réelle, mais
elle le fait sur la base du prix unitaire de ventes effectuées au premier niveau commercial suivant l’importation. Au contraire, l’article 29 et l’article 30, paragraphe 2, sous a) et b), se réfèrent à la valeur transactionnelle au moment où les marchandises sont vendues à l’exportation, dans le pays d’origine, vers le territoire douanier de l’Union européenne.

68. Le législateur de l’Union a cependant prévu la nécessité d’avoir dans le code des douanes certaines mesures destinées à réduire la marge d’erreur lorsque la valeur en douane est déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c).

69. Par exemple, afin de prendre en compte la différence de valeur potentielle entre une vente effectuée à l’exportation dans un pays tiers, d’une part, et une vente effectuée dans l’Union européenne, d’autre part ( 26 ), la valeur en douane déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), peut faire l’objet de certaines déductions.

70. Peuvent ainsi être déduits de la valeur en douane : i) les commissions généralement payées ou convenues, ou les marges généralement pratiquées pour bénéfices et frais généraux (tels que les coûts de la commercialisation des marchandises en question) relatifs aux ventes, dans l’Union européenne, de marchandises importées de la même nature ou de la même espèce ; ii) les frais habituels de transport et d’assurance, ainsi que les frais connexes encourus dans l’Union européenne, et iii) les droits à
l’importation et autres impositions à payer dans l’Union européenne en raison de l’importation ou de la vente des marchandises ( 27 ).

71. Il apparaît du libellé de la disposition que cette liste de déductions est exhaustive et non simplement indicative. De plus, l’économie du chapitre 3 indique que les déductions visées à l’article 152, paragraphe 1, sous a), du règlement d’application sont destinées à compenser une différence de valeur potentielle entre des marchandises vendues à l’exportation et des marchandises vendues après importation. En conséquence, contrairement à ce que soutient Oribalt Rīga, les déductions mentionnées à
l’article 152, paragraphe 1, sous a), ne peuvent pas être considérées comme incluant les réductions de nature commerciale, telles que celles qui ont été accordées aux clients de Ranbaxy Laboratories.

72. En outre, dès lors qu’il prévoit que l’évaluation se base sur le prix unitaire des ventes de marchandises totalisant la quantité la plus élevée, l’article 30, paragraphe 2, sous c), du codes des douanes prend déjà en compte certaines réductions liées à la quantité ( 28 ). Si les réductions accordées aux clients individuellement étaient prises en compte en plus de ces réductions liées à la quantité, les marchandises importées seraient en fait sous-évaluées.

73. Enfin, la nécessité de recourir aux méthodes d’évaluation subsidiaires se présente souvent lorsque les importateurs ne peuvent pas fournir les informations et documents nécessaires au calcul de la valeur transactionnelle ou s’en abstiennent. Les administrations douanières de l’Union n’ont aucun moyen de contraindre des opérateurs de pays tiers à fournir de telles informations. En conséquence, ne prendre en compte les réductions que pour les évaluations faites par application de l’article 29 du
code des douanes et lorsque ces réductions sont dûment établies par des documents me paraît constituer un encouragement légitime à fournir de telles informations.

74. En fait, je pense que, lorsqu’elle soutient que la valeur en douane déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes devrait prendre en compte les réductions qui ont été accordées et ont déterminé le prix auquel les marchandises ont été effectivement vendues, en ce que ces réductions constituent un élément qui affecte la valeur économique réelle des marchandises importées, Oribalt Rīga confond tout simplement les deux méthodes d’évaluation différentes
prévues, respectivement, à l’article 29 et à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes.

75. Je suggère donc à la Cour de répondre à la quatrième question en ce sens que les réductions accordées, qui ont déterminé le prix de vente réel des marchandises, ne peuvent pas être prises en compte lorsque la valeur en douane des marchandises importées est déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes.

IV. Conclusion

76. Au vu de ce qui précède, je propose à la Cour de répondre comme suit aux questions de l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie) :

Lorsque la valeur en douane de marchandises importées, quelle que soit leur nature, est déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, et de l’article 151, paragraphe 4, du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire,
l’administration douanière doit, pour identifier des marchandises similaires, vérifier d’abord si les marchandises remplissent les mêmes fonctions et si elles sont commercialement interchangeables. À cette fin, il y a lieu de procéder à une appréciation factuelle, en fonction de la nature précise des marchandises en question, en tenant compte de l’ensemble des éléments de cette marchandise qui présentent une valeur économique.

Lorsque la valeur en douane des marchandises importées est déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du règlement no 2913/92, le délai de 90 jours prévu à l’article 152, paragraphe 1, du règlement no 2454/93 doit faire l’objet d’une application stricte.

Lorsque la valeur en douane des marchandises importées est déterminée par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c), du règlement no 2913/92, les réductions accordées, qui ont déterminé le prix de vente réel des marchandises, ne peuvent pas être prises en compte.

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( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Dans sa version applicable aux faits de la procédure au principal, le règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1, ci-après le « code des douanes »).

( 3 ) Note relative à la version en langue anglaise de cette disposition, non pertinente pour sa version en langue française.

( 4 ) Règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire (JO 1993, L 253, p. 1, ci-après le « règlement d’application »).

( 5 ) Voir arrêt du 20 décembre 2017, Hamamatsu Photonics Deutschland (C‑529/16, EU:C:2017:984, point 24 et jurisprudence citée).

( 6 ) Voir article 32 du code des douanes. Voir aussi article 33 du même code pour les éléments qui ne doivent pas être pris en compte dans la valeur en douane.

( 7 ) Voir arrêt du 20 décembre 2017, Hamamatsu Photonics Deutschland (C‑529/16, EU:C:2017:984, point 26 et jurisprudence citée).

( 8 ) Voir arrêt du 9 novembre 2017, LS Customs Services (C‑46/16, EU:C:2017:839, point 43 et jurisprudence citée).

( 9 ) Voir article 30, paragraphe 2, sous a) et b), du code des douanes.

( 10 ) Voir article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes.

( 11 ) Voir article 142, paragraphe 1, sous d), du règlement d’application.

( 12 ) Voir point 25 des présentes conclusions.

( 13 ) Voir article 178 du règlement d’application ainsi que le recueil des textes relatifs à la valeur en douane du Comité du code des douanes (TAXUD/800/2002-FR, ci-après le « recueil des textes »), p. 33.

( 14 ) Code des douanes, article 14.

( 15 ) Règlement (CE) no 515/97 du Conseil, du 13 mars 1997, relatif à l’assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue d’assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole (JO 1997, L 82, p. 1), article 4.

( 16 ) Voir article 11, paragraphe 2, du code des douanes.

( 17 ) Voir article 15 du code des douanes.

( 18 ) Voir article 151 du règlement d’application et les notes interprétatives en matière de valeur en douane figurant à l’annexe 23 du règlement d’application.

( 19 ) Voir article 6, paragraphe 3, du code des douanes ainsi que arrêts du 9 novembre 2017, LS Customs Services (C‑46/16, EU:C:2017:839, points 39 et 40 et jurisprudence citée), et du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary (C‑291/15, EU:C:2016:455, point 35).

( 20 ) Voir article 152, paragraphe 1, sous a), du règlement d’application.

( 21 ) Voir article 152, paragraphe 3, du règlement d’application.

( 22 ) Voir articles 29, 32 et 33 du code des douanes. Voir aussi point 24 des présentes conclusions.

( 23 ) Voir recueil des textes, p. 48. Voir aussi article 145, paragraphe 2, du règlement d’application et, par analogie, arrêts du 20 décembre 2017, Hamamatsu Photonics Deutschland (C‑529/16, EU:C:2017:984, points 34 et 35), et du 6 juin 1990, Unifert (C‑11/89, EU:C:1990:237, point 35).

( 24 ) Voir, sur cette question, arrêt du 28 février 2008, Carboni e derivati (C‑263/06, EU:C:2008:128, point 58).

( 25 ) C’est également la raison pour laquelle même l’article 30, paragraphe 2, sous c), prévoit une hiérarchie entre les méthodes à appliquer. Ainsi, le prix unitaire des marchandises importées à évaluer a la priorité sur le prix unitaire de marchandises identiques ou similaires aux fins de la détermination de la valeur en douane par application de l’article 30, paragraphe 2, sous c). C’est seulement lorsque le prix unitaire des marchandises à évaluer n’est pas clairement déterminé ou ne peut pas
être prouvé que l’administration douanière peut se reporter au prix unitaire de marchandises identiques ou similaires. Voir sur cette question le recueil des textes, p. 78.

( 26 ) Une différence de valeur peut avoir différentes causes, telles que le transfert des risques liés au transport des marchandises vers l’Union européenne ou une différence dans le prix du marché.

( 27 ) Voir article 151, paragraphe 1, sous a), i) à iii), du règlement d’application.

( 28 ) Voir notes relatives à l’article 152, paragraphe 3, dans les notes interprétatives figurant à l’annexe 23 du règlement d’application.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-1/18
Date de la décision : 24/01/2019
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Augstākā tiesa.

Renvoi préjudiciel – Union douanière – Règlement (CEE) no 2913/92 – Article 30, paragraphe 2, sous b) et c) – Règlement (CEE) no 2454/93 – Article 152, paragraphe 1, sous a) et b) – Détermination de la valeur en douane des marchandises – Notion de “marchandises similaires” – Médicaments – Prise en compte de tout élément pouvant avoir une incidence sur la valeur économique du médicament concerné – Délai de 90 jours dans lequel les marchandises importées doivent être vendues dans l’Union européenne – Délai de rigueur – Absence de prise en compte des remises commerciales.

Union douanière

Libre circulation des marchandises


Parties
Demandeurs : « Oribalt Rīga » SIA
Défendeurs : Valsts ieņēmumu dienests.

Composition du Tribunal
Avocat général : Wahl

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2019:64

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