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21/11/2018 | CJUE | N°C-558/17

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 21 novembre 2018., OZ contre Banque européenne d'investissement (BEI)., 21/11/2018, C-558/17


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 21 novembre 2018 ( 1 )

Affaire C‑558/17 P

OZ

contre

Banque européenne d’investissement (BEI)

« Pourvoi – Fonction publique – Personnel de la BEI – Harcèlement sexuel – Plainte – Enquête menée dans le cadre du programme “Dignity at work” – Rejet de la plainte – Demande d’annulation de la décision du président de la BEI de rejeter la plainte – Demande de réparation du préjudice causé par le comportement de la

BEI »

I. Introduction

1. Les institutions, organes et organismes de l’Union européenne sont tenues de protéger l...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 21 novembre 2018 ( 1 )

Affaire C‑558/17 P

OZ

contre

Banque européenne d’investissement (BEI)

« Pourvoi – Fonction publique – Personnel de la BEI – Harcèlement sexuel – Plainte – Enquête menée dans le cadre du programme “Dignity at work” – Rejet de la plainte – Demande d’annulation de la décision du président de la BEI de rejeter la plainte – Demande de réparation du préjudice causé par le comportement de la BEI »

I. Introduction

1. Les institutions, organes et organismes de l’Union européenne sont tenues de protéger leur personnel contre toute forme d’intimidation et de harcèlement sur le lieu du travail. À cet effet, la Banque européenne d’investissement (BEI) a adopté une réglementation interne dite « politique en matière de dignité au travail ».

2. En l’espèce, la requérante au pourvoi a introduit une « plainte » en vertu de cette réglementation auprès de la BEI, en raison d’un harcèlement sexuel qu’elle allègue avoir subi de la part de son supérieur hiérarchique à partir de l’année 2011 jusqu’à son changement de fonctions au cours de l’année 2012. Selon la requérante, la procédure interne d’enquête qui avait été ouverte à la suite du dépôt de sa plainte était entachée de plusieurs erreurs qui, en fin de compte, ont conduit au rejet de sa
plainte.

3. Outre une violation de ses droits procéduraux, la requérante invoque notamment l’illicéité de la prise en compte d’éléments relevant de sa vie privée aux seules fins de la remise en cause de sa crédibilité.

4. La difficulté d’apporter la preuve d’un harcèlement est inhérente à la nature et au mode opératoire de ce type de comportement. Une décision administrative visant à établir la réalité d’allégations de harcèlement, prise à l’issue d’une procédure d’enquête, reposera ainsi toujours, au moins dans une certaine mesure, sur des opinions ou des appréciations portant sur des aspects de la vie privée des personnes concernées. Dans ces conditions, le respect des règles de procédure encadrant le processus
décisionnel revêt une importance particulière.

5. Le présent pourvoi donne à la Cour l’occasion de se pencher, pour la première fois, sur la question de savoir à quelles exigences procédurales doit satisfaire une procédure administrative d’enquête pour harcèlement. La présente affaire soulève, dès lors, la question du bien-fondé d’une jurisprudence constante du Tribunal de la fonction publique et du Tribunal, selon laquelle, dans le cadre d’une plainte pour harcèlement, les droits procéduraux qui doivent être reconnus à la personne accusée de
harcèlement se distinguent de ceux, plus limités, dont dispose le plaignant qui estime être la victime d’un harcèlement ( 2 ).

II. Le cadre juridique

A. Le statut des fonctionnaires de l’Union européenne

6. L’article 24, premier alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne tel que modifié par le règlement (UE, Euratom) no 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013, modifiant le statut des fonctionnaires de l’Union européenne et le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « statut ») ( 3 ) énonce :

« L’Union assiste le fonctionnaire, notamment dans toute poursuite contre les auteurs de menaces, outrages, injures, diffamations ou autres contre la personne et les biens, dont il est, ou dont les membres de sa famille sont l’objet, en raison de sa qualité et de ses fonctions. »

B. Le règlement du personnel de la BEI

7. Le règlement du personnel de la BEI, adopté le 20 avril 1960 par le conseil d’administration de la BEI, prévoit, dans sa version révisée par décision du conseil d’administration de la BEI du 4 juin 2013, entrée en vigueur le 1er juillet 2013, à son article 41 :

« Les différends de toute nature d’ordre individuel entre la Banque et les membres de son personnel sont portés devant la Cour de justice de l’Union européenne. Toute action d’un membre du personnel contre une mesure de la Banque susceptible de lui faire grief doit être intentée dans les trois mois.

Outre l’action devant la Cour de justice […] et avant l’introduction de celle-ci, les différends, autres que ceux découlant de la mise en jeu de mesures prévues à l’article 38, font l’objet d’une procédure amiable devant la commission de conciliation de la Banque.

La demande de conciliation doit être formée dans les trois mois [à compter] de la survenance des faits ou de la notification des mesures faisant l’objet du différend. [...] ».

C. La politique de la BEI en matière de respect de la dignité de la personne au travail

8. La réglementation de la BEI sur la politique en matière de respect de la dignité de la personne au travail (ci-après la « politique en matière de dignité au travail »), adoptée par la BEI le 18 novembre 2003 ( 4 ), prévoit :

« Procédure d’enquête

[…]

La procédure d’enquête comporte les dispositions suivantes:

[…]

– il est créé un comité d’enquête composé de trois personnes indépendantes […]

– le comité d’enquête tient un certain nombre d’auditions afin d’entendre séparément les deux parties et leurs témoins éventuels, ainsi que toute autre personne qu’il souhaite interroger,

– les deux parties ont le droit d’être entendues par le comité d’enquête,

– les deux parties ont le droit d’être représentées ou accompagnées,

– les auditions et délibérations du comité d’enquête débouchent sur une recommandation soumise au Président,

– le Président se prononce sur les mesures à prendre.

Tâches et composition du comité d’enquête

La mission du comité consistera à fournir une structure garantissant une enquête objective et indépendante portant sur un ou plusieurs incidents et débouchant sur une recommandation adressée au Président pour décision.

[…]

La procédure

[…]

2. Le DRH, en accord avec les représentants du personnel, propose au Président la composition du comité et fixe une date pour le début de l’enquête, au plus tard 30 jours calendaires après réception de la plainte.

3. Le DRH accuse immédiatement réception de la note de l’agent concerné, confirmant l’ouverture d’une procédure d’enquête […]

4. Lorsque le mémorandum du plaignant a été reçu, le DRH

[…]

d. indique que l’enquête commencera dans les 30 jours calendaires suivant la date à laquelle la plainte a été officiellement déposée auprès du DRH et que les deux parties seront informées de la date, de l’heure et du lieu de leur audition individuelle, de leur droit d’être représentées ou accompagnées et de la composition du comité.

[…]

L’audition

L’audition a pour objectif d’établir précisément ce qui s’est passé et de rassembler des faits, qui permettront de rédiger une recommandation motivée. Les parties n’ont pas le droit d’effectuer de contre-interrogatoire puisqu’elles sont entendues séparément. Elles ne sont pas obligées de répéter des détails pénibles ou embarrassants pour elles dans la mesure où cela n’est pas absolument nécessaire. On rappellera à toutes les parties impliquées dans l’enquête et les auditions, y compris aux
assistants et aux témoins, qu’elles sont soumises au devoir de confidentialité.

[...]Le comité a la faculté d’adopter la manière de procéder qu’il juge appropriée. En règle générale, l’audition se présente sous la forme d’une série d’entretiens séparés, effectués dans l’ordre suivant:

– tout d’abord le plaignant

– les témoins éventuellement cités par le plaignant

– le harceleur présumé

– les témoins éventuellement cités par le harceleur présumé

– si le comité le juge nécessaire, les deux parties pourront être appelées pour de nouvelles auditions séparées.

Si besoin est, le comité pourra également interroger à nouveau les personnes impliquées et convoquer, éventuellement, d’autres membres du personnel ou solliciter des informations ou des copies de documents s’il considère, collégialement, que cela est justifié et utile. En cas de doute, le Président se prononcera en dernier ressort sur les questions relatives à l’accès à des dossiers, à des données ou à d’autres méthodes d’investigation, après avoir consulté, le cas échéant, le délégué à la
protection des données personnelles. Le comité informera le plaignant des investigations supplémentaires.

Résultat de l’enquête

Lorsque toutes les parties auront été entendues et que toutes les autres investigations appropriées éventuelles auront été effectuées, le comité devrait être en mesure de délibérer et de proposer une recommandation motivée. Il n’a pas de pouvoir de décision.

– Le comité peut exprimer différentes recommandations tendant à ce que l’affaire soit abandonnée, les deux parties ayant pu clarifier la situation et une solution pour l’avenir, acceptable pour les deux parties ayant été trouvée,

– l’affaire ne soit pas considérée comme relevant de l’intimidation ou du harcèlement, mais comme étant un conflit du travail qui doit faire l’objet d’un examen plus approfondi ou d’un suivi,

– la plainte soit rejetée,

– les mesures requises soient prises au cas où le comité démontre que la plainte est non fondée et malintentionnée,

– la procédure disciplinaire soit engagée.

La recommandation écrite du comité est élaborée dans les cinq jours suivant la fin de l’enquête et adressée au Président pour décision.

Décision du Président […]

Au plus tard dans les cinq jours ouvrables suivant l’envoi de la recommandation du comité au Président, les deux parties sont informées, par écrit, de la décision motivée du Président, à laquelle est jointe la recommandation du comité. »

III. Les antécédents du litige et la procédure devant le Tribunal

9. Le 1er décembre 2008, la requérante, OZ, a été engagée par la BEI, où elle a travaillé, à partir de la fin de l’année 2009, dans une direction dans laquelle M. F. exerçait la fonction de coordonnateur du personnel. En septembre 2012, la requérante a changé de fonction. En janvier 2014, la requérante a indiqué à son chef de division que ce changement de fonction était lié à un harcèlement sexuel qu’elle estimait subir depuis l’année 2011 de la part de M. F.

10. Le 20 mai 2015, la requérante a déposé une plainte auprès du directeur général de la direction du personnel de la BEI dans laquelle elle affirmait être victime d’un harcèlement sexuel de la part de M. F.

11. Le 18 juin 2015, le directeur général de la direction du personnel a informé la requérante que, à la suite de sa plainte, une procédure formelle d’enquête (ci-après la « procédure d’enquête ») avait été ouverte au titre de la réglementation interne sur la politique en matière de dignité au travail.

12. Le 26 juin 2015, le comité d’enquête a été officiellement nommé et la requérante a été informée du fait que les auditions se tiendraient le 20 juillet suivant.

13. Le 17 septembre 2015, le comité d’enquête a remis son rapport au président de la BEI (ci-après le « rapport du comité d’enquête »).

14. Dans son rapport, le comité exposait les résultats de son enquête comme suit : les allégations de la requérante n’avaient pas pu être confirmées faute de témoins ayant assisté aux actes allégués. En revanche, tous les témoins s’étaient accordés sur le fait qu’il y avait lieu de s’inquiéter sur la santé de la requérante. Elle aurait vécu une rupture traumatisante avec son ancien compagnon et aurait perdu beaucoup de poids par la suite. La requérante serait d’ailleurs impatiente d’avancer dans sa
carrière et aurait un caractère manipulateur susceptible de causer de graves problèmes aux vies d’autres personnes. Elle aurait également des difficultés à accepter toute forme de critique. Finalement, le comité d’enquête avait recommandé à la requérante d’apprendre comment avoir un meilleur esprit d’équipe et de retrouver une attitude positive.

15. Le 16 octobre 2015, le président de la BEI a décidé de rejeter la plainte déposée par la requérante en se fondant sur les recommandations du comité d’enquête (ci-après la « décision du président de la BEI »), le rapport du comité d’enquête ayant été joint à ladite décision.

16. À la suite de la décision du président de la BEI, celui-ci a encore demandé des éclaircissements au comité d’enquête en vue de l’éventuelle ouverture d’une procédure disciplinaire, et le comité a remis ses observations finales le 12 janvier 2016. Par la suite, la requérante a introduit une demande de conciliation, en vertu de l’article 41 du règlement du personnel de la BEI.

17. Le 29 juin 2016, conformément aux conclusions de la commission de conciliation du 22 avril 2016, le président de la BEI a constaté l’échec de la procédure de conciliation.

18. Le 22 juillet 2016, la requérante a introduit un recours devant le Tribunal visant à obtenir, notamment, l’annulation de la décision du président de la BEI ainsi que du rapport du comité d’enquête et la condamnation de la BEI à lui verser une somme de 20000 euros à titre de réparation du préjudice moral qu’elle aurait subi ainsi qu’une somme de 977 euros (TVA comprise) et une provision de 5850 euros en paiement des frais médicaux exposés consécutivement audit préjudice.

19. À l’appui de son recours en première instance, la requérante invoquait, en substance, deux moyens. Le premier moyen était tiré d’une violation des règles de la procédure d’enquête ainsi que des droits procéduraux de la requérante en vertu de l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH ») et de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») du
fait que plusieurs étapes de la procédure d’enquête n’auraient pas été respectées. Le second moyen était tiré d’une violation de l’article 8 de la CEDH ainsi que de l’article 7 de la Charte en raison du fait que le rapport du comité d’enquête ainsi que la décision du président de la BEI contiendraient des éléments de justification relevant de la vie privée de la requérante, notamment concernant sa santé psychologique, qui étaient dénués de pertinence à l’égard de l’objet de l’enquête. La
requérante estimait que ces illégalités étaient de nature à justifier l’annulation de la décision du président de la BEI ainsi que l’engagement de la responsabilité non contractuelle de cette dernière.

20. Dans son arrêt du 13 juillet 2017 (ci-après l’« arrêt attaqué ») ( 5 ), le Tribunal a d’abord rejeté les conclusions indemnitaires de la requérante dans leur ensemble en estimant qu’aucun des griefs exposés par la requérante constituait une illégalité pouvant être reprochée à la BEI. Par suite, étant donné que la requérante soutenait que les illégalités alléguées aux fins des conclusions en annulation correspondaient aux comportements reprochés à la BEI aux fins des conclusions indemnitaires, le
Tribunal a conclu qu’il y avait également lieu de rejeter les conclusions en annulation.

IV. La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

21. Par mémoire du 22 septembre 2017, la requérante a introduit le présent pourvoi contre l’arrêt du Tribunal.

22. La requérante conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

– annuler l’arrêt attaqué dans son intégralité ;

– annuler la décision du président de la BEI du 16 octobre 2015 de ne pas donner suite à la plainte pour harcèlement sexuel déposée par la requérante et annuler le rapport du comité d’enquête de la BEI du 14 septembre 2015 (y compris l’expurgation du rapport comme décrit plus amplement ci-après) ;

– condamner la BEI à lui verser une réparation au titre des frais médicaux exposés en raison du préjudice subi, s’élevant (i) à 977 euros (TVA comprise) à la date d’aujourd’hui et (ii) à un montant provisoire de 5850 euros au titre des frais médicaux à venir ;

– condamner la BEI à lui verser des dommages-intérêts au titre du préjudice moral subi s’élevant à 20000 euros ;

– condamner la BEI au remboursement des dépens exposés dans le cadre de la présente procédure et s’élevant à 35100 euros (TVA comprise) ;

– condamner la BEI au remboursement des dépens de la présente procédure en appel et devant le Tribunal ;

– ordonner le renvoi de l’affaire en vue d’obtenir la réouverture de la procédure au titre de la politique en matière de dignité au travail par la BEI, et/ou une nouvelle décision du président de la BEI.

23. La BEI conclut quant à elle à ce qu’il plaise à la Cour :

– rejeter le pourvoi ;

– condamner la requérante aux dépens.

24. La requérante ainsi que la BEI ont été représentées lors de l’audience du 26 septembre 2018.

V. Appréciation en droit

25. La requérante soulève trois moyens à l’appui de son pourvoi, tirés, premièrement, de la violation de l’article 47 de la Charte ainsi que de l’article 6 de la CEDH, deuxièmement, de la violation de l’article 7 de la Charte ainsi que de l’article 8 de la CEDH, et, troisièmement, d’un déni de justice.

26. Le premier moyen porte, en substance, sur l’appréciation réalisée par le Tribunal au sujet du déroulement de la procédure d’enquête au regard des exigences de la politique en matière de dignité au travail et des droits procéduraux de la requérante en vertu de l’article 47 de la Charte et de l’article 6 de la CEDH. Ce moyen est divisé en quatre branches visant différentes erreurs prétendument commises par le Tribunal : la détermination erronée de l’étendue des droits procéduraux dont dispose un
plaignant, l’absence de conséquences du non-respect des délais régissant la procédure d’enquête, l’appréciation erronée de la juste composition du comité d’enquête et le rejet des arguments de la requérante mettant en cause le traitement confidentiel de sa plainte.

27. Les deuxième et troisième moyens concernent le rejet, par le Tribunal, des arguments de la requérante visant à démontrer l’illégalité, notamment à la lumière de l’article 7 de la Charte et de l’article 8 de la CEDH, de plusieurs éléments contenus dans le rapport du comité d’enquête sur lesquels la décision du président de la BEI se serait fondée en vue de rejeter la plainte comme étant non fondée.

A. Sur la recevabilité

28. En premier lieu, il convient de relever que le recours devant le Tribunal contre la décision du président de la BEI du 16 octobre 2015, bien qu’ayant été introduit le 22 juillet 2016, soit plus de neuf mois après l’adoption de cette décision, n’était pas irrecevable ( 6 ). En effet, il ressort de la jurisprudence que le délai de trois mois prévu à l’article 41, premier alinéa, du règlement du personnel de la BEI ( 7 ) pour l’introduction d’un recours devant le Tribunal était interrompu pendant
la durée de la procédure de conciliation entamée en vertu de l’article 41, troisième alinéa, de ce même règlement ( 8 ). Bien que cette procédure ne soit pas obligatoire, le recours à celle-ci ne saurait porter préjudice au droit de l’intéressé de saisir le juge de l’Union ( 9 ). C’est la raison pour laquelle il convient de considérer que le délai pour l’introduction du recours ne commence à courir qu’à partir de la date de la décision finale constatant l’échec de la procédure de conciliation,
en l’occurrence le 29 juin 2016.

29. En deuxième lieu, la BEI soulève deux exceptions d’irrecevabilité à l’encontre du pourvoi. Elle soutient, premièrement, que le pourvoi ne se réfère à aucun point précis de l’arrêt attaqué, et, deuxièmement, qu’il se borne, pour l’essentiel, à reproduire des arguments déjà exposés dans la requête de première instance.

30. S’agissant de la première exception d’irrecevabilité, il suffit de constater que le grief manque en fait dès lors que la requête en pourvoi se réfère bien, dans les notes en bas de page, à des points précis de l’arrêt attaqué. Par ailleurs, et en tout état de cause, l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour ne pose pas d’obligation formelle de citer des points numérotés de l’arrêt attaqué. Il suffit que les arguments contenus dans la requête en pourvoi permettent à la
Cour d’identifier le raisonnement du Tribunal qui serait entaché d’erreurs de droit de manière à ce qu’elle puisse exercer la mission qui lui incombe dans le domaine considéré et effectuer son contrôle de légalité ( 10 ).

31. En ce qui concerne la deuxième exception d’irrecevabilité, il convient de noter que la plupart des arguments soulevés par la requérante concernent essentiellement l’appréciation en droit faite par le Tribunal. Or, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, dès lors qu’une partie conteste l’interprétation ou l’application du droit de l’Union, faite par le Tribunal, les points de droit examinés en première instance peuvent à nouveau être discutés au cours d’un pourvoi ( 11 ).

32. Il en va toutefois autrement des arguments de la requérante visant le rejet, par le Tribunal, du grief concernant la composition du comité d’enquête et le traitement confidentiel de la plainte (troisième et quatrième branches du premier moyen). À cet égard, la requérante se borne à répéter les arguments d’ordre factuel déjà exposés en première instance. Elle réitère notamment sa critique selon laquelle les personnes nommées ne disposaient pas des qualifications et de l’impartialité requises,
cherchant ainsi à remettre en cause l’appréciation des faits par le Tribunal sans pour autant en invoquer une dénaturation. Partant, ces arguments doivent être rejetées comme irrecevables, conformément à l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE et l’article 58 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne selon lequel le contrôle de légalité effectué par la Cour dans le cadre d’un pourvoi est limité aux questions de droit.

33. En ce qui concerne, en troisième lieu, la demande de la requérante visant l’expurgation des éléments jugés illégaux du rapport du comité d’enquête, il suffit de constater que c’est à bon droit que le Tribunal a jugé, aux points 22 et 23 de l’arrêt attaqué, que les juridictions de l’Union n’ont pas compétence pour adresser des injonctions aux institutions ( 12 ). De surcroît, la requérante n’a pas attaqué cette partie de l’arrêt dans sa requête en pourvoi. Partant, ce chef de conclusions doit
d’emblée être rejetée comme irrecevable.

34. De même, si l’annulation de l’arrêt du Tribunal ainsi que, le cas échéant, de la décision du président de la BEI peuvent certainement donner lieu à l’ouverture d’une éventuelle nouvelle procédure d’enquête au sein de la BEI, il n’incombe toutefois pas à la Cour d’en ordonner la réouverture, étant donné qu’il appartient à l’administration d’adopter les mesures que comporte l’exécution d’un arrêt de la Cour ( 13 ). Il s’ensuit que le dernier chef de conclusions en pourvoi est également
irrecevable.

B. Sur le fond

35. La requérante demande à la Cour aussi bien l’annulation de l’arrêt du Tribunal que l’annulation de la décision du président de la BEI et l’engagement de la responsabilité non contractuelle de celle-ci.

36. Il convient ainsi d’examiner, dans un premier temps, si les erreurs de droit reprochées au Tribunal sont de nature à justifier l’annulation de l’arrêt attaqué (sous 1. et 2.). Dans l’affirmative, il conviendra de s’interroger, dans un second temps, sur la question de savoir si l’affaire est en état d’être jugée et si les erreurs reprochées à la BEI justifient le cas échéant l’annulation de la décision du président de la BEI ainsi que l’engagement de la responsabilité non contractuelle de cette
dernière (sous 3.).

1.   Sur le pourvoi

a)   Sur le premier moyen

37. Par son premier moyen, la requérante fait grief au Tribunal d’avoir conclu, après avoir examiné le déroulement de la procédure d’enquête, que les irrégularités invoquées par la requérante ne constituaient pas une violation de ses droits procéduraux en vertu de l’article 47 de la Charte et de l’article 6 de la CEDH, et ne justifiaient ainsi ni l’annulation de la décision du président de la BEI ni l’engagement de la responsabilité non contractuelle de celle-ci.

1) Sur la première branche du premier moyen, tirée d’une détermination erronée de l’étendue des droits procéduraux de la requérante

38. La requérante reproche au Tribunal d’avoir violé ses droits découlant de l’article 47 de la Charte et de l’article 6 de la CEDH en jugeant, au point 52 de l’arrêt attaqué, que les droits du plaignant dans une procédure d’enquête pour harcèlement sexuel en vertu de la politique en matière de dignité au travail sont plus limités que ceux dont dispose le défendeur. En se fondant sur cette prémisse erronée, le Tribunal aurait à tort écarté les illégalités procédurales invoquées par la requérante.

39. Plus précisément, la requérante soutient, en premier lieu, que le Tribunal a méconnu le principe d’égalité des armes, le principe du contradictoire ainsi que les droits de la défense de la requérante en estimant qu’il était légitime que le comité d’enquête ne lui ait pas communiqué les déclarations de la personne accusée de harcèlement et des personnes entendues au cours de l’enquête qui ont servi de fondement à la décision de rejeter la plainte.

40. En deuxième lieu, la requérante reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en estimant suffisant le fait que le comité d’enquête auditionne seulement deux sur les onze témoins proposés par la requérante au motif que ce dernier n’était nullement tenu d’entendre tous les témoins proposés par une partie à la procédure.

41. En troisième lieu, la requérante reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en jugeant légal le fait que le comité d’enquête a écarté les rapports médicaux fournis par la requérante au soutien de sa plainte puisque ces rapports avaient été rédigés après la survenance des faits litigieux. En limitant, ainsi, ses possibilités d’apporter des éléments de preuve, le Tribunal aurait violé le droit de la requérante d’être entendue et ses droits de la défense.

42. La réponse du Tribunal aux griefs avancés par la requérante en première instance tirés du non-respect de ses droits par la BEI au cours de la procédure d’enquête s’appuie sur une jurisprudence du Tribunal de la fonction publique ( 14 ), confirmée par le Tribunal ( 15 ), selon laquelle la situation d’un plaignant dans le cadre d’une procédure d’enquête pour harcèlement moral ne peut être assimilée à celle de la personne qui fait l’objet de la plainte et que, dès lors, le plaignant ne peut pas se
prévaloir des mêmes droits procéduraux que la personne accusée.

43. Cette jurisprudence ayant été développée dans le contexte d’affaires régies par le statut, il convient, d’abord, de rappeler les principales caractéristiques de la procédure qui est ouverte à la suite d’une demande d’assistance en vertu dudit statut ainsi que celles de la procédure d’enquête dont il est question en l’espèce (sous i). Ensuite, nous en tirerons les conclusions quant aux droits procéduraux qui doivent être reconnus aux différentes personnes concernées dans le cadre d’une telle
procédure (sous ii). Enfin, nous examinerons si ces exigences ont été respectées en l’espèce (sous iii).

i) Les procédures administratives d’enquête pour harcèlement au sein des institutions de l’Union

44. L’obligation de l’administration de l’Union d’intervenir au soutien d’un membre du personnel qui s’estime victime d’un harcèlement ou de toute autre forme d’intimidation découle du devoir d’assistance de ladite administration, visé, pour ce qui est des relations d’emploi régies par le statut, à l’article 24 de ce même statut. L’introduction d’une demande d’assistance statuaire est suivie d’une enquête administrative visant à établir les faits et à en tirer, en connaissance de cause, les
conséquences appropriées. Il s’ensuit que l’enquête administrative n’a pas pour objet la sanction d’un comportement, mais vise tout d’abord à établir si l’administration est tenue d’intervenir au soutien d’un fonctionnaire ( 16 ). À cette fin, il suffit qu’un commencement de preuve de la réalité des allégations soit apporté sans pour autant anticiper le résultat d’une éventuelle procédure disciplinaire ouverte par la suite ( 17 ).

45. De manière similaire, la politique de la BEI en matière de dignité au travail prévoit, pour les relations d’emploi régies par le règlement du personnel de la BEI, une procédure formelle dans le cadre de laquelle la prétendue victime a la possibilité de déposer officiellement une plainte qui déclenche la procédure d’enquête. Il convient toutefois de relever que cette procédure se distingue de la procédure d’enquête qui est ouverte à la suite d’une demande d’assistance statuaire ( 18 ). La
procédure dont il est question en l’espèce prévoit en effet comme issue de la procédure non seulement le rejet de la plainte ou l’ouverture d’une procédure disciplinaire à l’encontre de la personne accusée de harcèlement, mais également l’ouverture d’une telle procédure à l’égard de la prétendue victime si sa plainte est jugée infondée ou malveillante. À cet égard, elle va donc plus loin que la procédure prévue à la suite d’une demande d’assistance statuaire.

ii) Sur les droits procéduraux des intéressés dans une procédure d’enquête pour harcèlement

46. Le Tribunal a récemment eu l’occasion de rappeler le contexte dans lequel la jurisprudence relative aux demandes d’assistance statuaire, mentionnée au point 42 des présentes conclusions, a été développée, ainsi que d’en préciser la portée ( 19 ).

47. Il découle de ces précisions que la jurisprudence du Tribunal ne vise ni à limiter les droits procéduraux d’un plaignant dans une procédure d’enquête pour harcèlement en tant que tels, ni à lui accorder, a priori, une position moins favorable que celle du défendeur, le harceleur présumé ( 20 ). Il s’agit plutôt de faire la distinction entre, d’une part, la procédure administrative d’enquête déclenchée par la demande d’assistance statuaire et, d’autre part, la procédure disciplinaire qui est, le
cas échéant, ouverte par la suite ( 21 ). Alors que la procédure administrative serait régie, selon le Tribunal, en principe, par les droits découlant de l’article 41 de la Charte, les droits de la défense proprement dits ne seraient applicables qu’au stade de la procédure disciplinaire ( 22 ).

48. Certes, le Tribunal reconnaît qu’il est de jurisprudence constante que le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci constitue un principe fondamental du droit de l’Union et doit être assuré même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure en cause ( 23 ). Toutefois, étant donné que le rôle de la personne ayant introduit une demande d’assistance consiste essentiellement en
sa collaboration dans la bonne conduite de l’enquête afin d’établir les faits, le Tribunal en conclut que cette procédure ne peut être considérée comme étant ouverte à l’encontre de cette personne ( 24 ). En revanche, le Tribunal reconnaît que la personne accusée de harcèlement doit, dès le début de la procédure, être en mesure de se défendre contre les accusations la visant ( 25 ). C’est alors en raison de leurs rôles respectifs dans le cadre d’une procédure d’enquête que le Tribunal a jugé,
dans plusieurs arrêts, que les droits procéduraux des personnes concernées se distinguaient.

49. À cet égard, il importe toutefois de constater que, en tout état de cause, l’article 41 de la Charte s’applique à toute procédure administrative indépendamment de son caractère accusatoire ou inquisitoire et consacre notamment le droit de toute personne d’être entendue avant l’adoption d’une mesure défavorable à son encontre. En outre, il convient de rappeler que le principe du contradictoire s’applique également à toute procédure susceptible d’aboutir à une décision affectant de manière
sensible les intérêts d’une personne ( 26 ). Il n’y a, dès lors, pas besoin de trancher de manière définitive la question de savoir si une procédure administrative d’enquête, qu’elle soit régie par les règles du statut ou par celles de la politique en matière de dignité au travail de la BEI, relève du champ d’application des articles 47 et 48 de la Charte ( 27 ).

50. Alors qu’il est, certes, vrai que la personne accusée de harcèlement court le risque de l’adoption d’une mesure défavorable au sens de l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, à savoir la décision de donner suite à la demande d’assistance, dès le début de la procédure, il importe également de noter que la procédure d’enquête peut aussi bien affecter défavorablement la personne qui a introduit cette demande. Cela est notamment le cas lorsqu’il s’avère, en cours de procédure, que la demande
d’assistance sera rejetée ( 28 ). Partant, tout comme la personne accusée de harcèlement doit être en mesure de se défendre contre des accusations la visant, ce qui justifie qu’elle puisse être entendue, éventuellement à plusieurs reprises, dans le cadre de l’enquête, le plaignant doit, de la même manière, être entendu sur les motifs que l’administration entend invoquer au soutien du rejet de sa demande, le cas échéant ( 29 ). Au demeurant, cela a également été reconnu dans la jurisprudence du
Tribunal ( 30 ).

51. Puisque l’administration est tenue d’offrir à toute personne affectée la possibilité de faire connaître utilement ( 31 ) son point de vue, cela implique, à notre sens, que le plaignant doit être en mesure de contester tout élément sur lequel l’autorité compétente entend fonder sa décision de rejet, qu’il s’agisse des déclarations faites par des témoins ou d’autres sources, et de fournir tout élément probant à ce sujet. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence du Tribunal à cet égard, l’on ne peut
notamment pas considérer que la seule prise en compte de la plainte initiale ou des observations antérieures suffit déjà pour conclure au respect du droit du plaignant d’être entendu. Il peut notamment s’avérer nécessaire de donner la possibilité au plaignant de faire valoir ses observations sur un projet du rapport d’enquête ( 32 ).

52. Ces considérations valables pour toute enquête administrative pour harcèlement valent a fortiori pour la procédure d’enquête ouverte en vertu de la réglementation interne de la BEI puisque celle-ci prévoit en effet la possibilité d’adopter plusieurs décisions affectant défavorablement le plaignant au sens de l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, dont sa mise en cause personnelle.

iii) Sur le respect des droits procéduraux de la requérante en l’espèce

– Sur le droit de la requérante d’être entendue sur les déclarations du défendeur et des témoins

53. Il découle de ce qui précède que, au plus tard à partir du moment où il s’avère que la plainte sera rejetée, le plaignant doit disposer, en vertu de l’article 41 de la Charte, des mêmes droits procéduraux que ceux dont dispose la personne accusée de harcèlement ( 33 ). Le plaignant peut dès lors exiger, tout comme la personne accusée de harcèlement, d’être entendu, éventuellement à plusieurs reprises, sur les faits le concernant, notamment dans la mesure où l’autorité compétente porte une
appréciation sur son propre comportement.

54. Partant, et contrairement à ce que le Tribunal a jugé au point 52 de l’arrêt attaqué, la situation du plaignant dans le cadre d’une procédure d’enquête peut, selon les circonstances de l’espèce, tout à fait être assimilée à celle de la personne accusée de harcèlement. Néanmoins, le Tribunal a jugé que le comité d’enquête n’avait pas commis d’illégalité en refusant de communiquer à la requérante le contenu des déclarations de la personne accusée de harcèlement ainsi que celles des témoins afin
qu’elle puisse formuler des observations. À cet égard, le Tribunal s’est notamment appuyé sur le fait que la politique en matière de dignité au travail ne prévoit pas la communication des déclarations de la personne accusée de harcèlement au plaignant ( 34 ). Or, la politique en matière de dignité au travail ne saurait déroger aux principes du droit de l’Union rappelés au point 48 des présentes conclusions. En statuant ainsi, le Tribunal a donc méconnu le contenu du droit de la requérante à être
entendue dans le cadre de la procédure d’enquête ainsi que le principe du contradictoire.

55. De toute évidence, le Tribunal n’a pas pris en considération le fait que le rejet de la plainte est, en lui-même, un acte défavorable qui affecte la requérante, pour en déduire qu’il aurait été nécessaire de communiquer à la requérante les déclarations des témoins et de la personne accusée de harcèlement sur lesquelles le président de la BEI entendait fonder sa décision. Cette absence de prise en considération est d’autant plus surprenante dans la mesure où le Tribunal de la fonction publique
avait pourtant déjà souligné à plusieurs reprises que la reconnaissance éventuelle par l’administration de l’existence d’un harcèlement est en elle-même susceptible d’avoir un effet bénéfique dans le processus thérapeutique de reconstruction de la personne harcelée, de sorte que l’administration doit utilement entendre la personne concernée avant le rejet de sa plainte ( 35 ). Cela vaut à plus forte raison encore dans le cas de la requérante, où le rejet de la plainte était de surcroît
accompagné par des recommandations lui reprochant d’être elle-même à l’origine des problèmes constatés faute d’une attitude positive.

56. À cet égard, il ressort des points 48 et 49 ainsi que des points 69 et 71 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a admis que les déclarations de la personne accusée de harcèlement et des témoins concernant les performances professionnelles de la requérante, son état de santé (psychologique) et ses problèmes privés ont revêtu un caractère décisif qui a conduit à l’affaiblissement de la crédibilité de la requérante et, au final, au rejet de la plainte par le président de la BEI. Or, puisque la
requérante n’a naturellement pas pu connaître ces éléments au moment du dépôt de sa plainte et de son audition, et qu’elle n’a pas non plus pu en prendre connaissance ultérieurement, l’on ne peut pas considérer qu’elle a été entendue utilement avant le rejet de sa plainte.

57. Il s’ensuit que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’admettant pas, dans de telles circonstances, le droit de la requérante de connaître les observations du défendeur ainsi que le contenu des témoignages afin de présenter ses observations ou de nouveaux éléments à l’appui de ses allégations. Cela vaut à plus forte raison encore dans la mesure où le Tribunal a relevé au point 48 de l’arrêt attaqué que l’objet de l’enquête avait véritablement changé au cours de la procédure puisque le
président de la BEI envisageait l’adoption de mesures disciplinaires à l’encontre de la requérante, sans qu’elle ait été entendue sur les faits justifiant ce revirement.

58. Le fait que la procédure disciplinaire n’a finalement pas été engagée ne saurait remettre en cause cette constatation. Contrairement à ce que le mandataire de la BEI a soutenu lors de l’audience, c’est le rejet de la plainte qui affecte défavorablement la requérante au sens de l’article 41 de la Charte, et non seulement l’ouverture d’une procédure disciplinaire ultérieure.

59. En tout état de cause, le Tribunal n’a pas non plus relevé de circonstances qui permettraient d’admettre que la BEI agissait dans un souci de prévenir un risque d’influence des témoins de la part de la requérante ou que d’autres raisons de confidentialité auraient pu, le cas échéant, justifier de restreindre son accès aux déclarations des témoins ( 36 ). Du reste, si tel avait été le cas, il aurait suffi de communiquer à la requérante uniquement le contenu des déclarations des témoins ou bien un
résumé des aspects retenus en vue du rapport d’enquête sans divulguer l’identité des personnes à l’origine de ces témoignages.

60. Il résulte de ce qui précède qu’en jugeant, dans de telles circonstances, que le comité d’enquête n’était pas tenu de communiquer à la requérante le contenu des déclarations de la personne accusée de harcèlement et des témoins sur lesquelles il entendait fonder ses recommandations, le Tribunal a commis une erreur de droit. Le premier grief de la première branche du premier moyen doit donc être accueilli.

– Sur le droit de la requérante d’exiger la convocation des témoins proposés

61. La requérante fait encore grief au Tribunal d’avoir jugé que le respect de son droit d’être entendue ainsi que le principe du contradictoire n’exigeaient pas la convocation de tous les témoins proposés par elle.

62. À cet égard, il y a lieu de noter que, selon la jurisprudence du Tribunal de la fonction publique citée au point 55 de l’arrêt attaqué, un comité d’enquête n’est certes pas tenu de convoquer tous les témoins proposés par un plaignant en raison de son pouvoir d’appréciation en ce qui concerne la conduite de l’enquête ( 37 ). Toutefois, ce pouvoir d’appréciation est également encadré par le principe de bonne administration et les droits procéduraux des intéressés consacrés à l’article 41 de la
Charte. Partant, les décisions du comité d’enquête en ce qui concerne le déroulement de l’enquête n’échappent pas, d’emblée, à tout contrôle juridictionnel. Ainsi, le comité d’enquête ne peut notamment pas s’abstenir sans motivation et justification de l’audition de témoins proposés, et doit faire en sorte que les parties soient entendues de manière équitable afin de garantir leur droit d’être entendues.

63. Dans cette optique, le Tribunal de la fonction publique a admis qu’il était justifié de ne pas avoir convoqué de témoins supplémentaires dans une affaire dans laquelle le comité d’enquête avait déjà convoqué quinze des dix-huit témoins proposés par l’intéressé ainsi que vingt autres ( 38 ). Il peut en être déduit qu’il ne saurait exister une obligation de convoquer tous les témoins proposés par une partie lorsque le comité d’enquête s’estime suffisamment éclairé sur les faits et quand les
intéressés ont déjà été entendus de manière adéquate. De même, dans une autre affaire, le Tribunal de la fonction publique s’est appuyé sur le fait que l’enquêteur disposait d’éléments suffisants dans le dossier pour confirmer la décision de cet enquêteur de ne convoquer que douze des 52 témoins proposés par la requérante ( 39 ).

64. Cependant, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal ne s’est pas interrogé sur la question de savoir si le comité d’enquête était déjà suffisamment éclairé ou si la requérante avait déjà été entendue de manière adéquate. Il ressort au contraire de la requête en pourvoi que seule une minorité des témoins proposés par la requérante a été convoquée, d’une part, et qu’elle n’en avait pas non plus été avertie, d’autre part. En se bornant dans ces circonstances à constater que le comité d’enquête n’était
nullement tenu de convoquer tous les témoins de la requérante, le Tribunal a dès lors commis une erreur de droit.

65. Il en résulte que le deuxième grief de la première branche du premier moyen doit également être accueilli.

– Sur le rejet des certificats médicaux

66. Le Tribunal a considéré, au point 58 de l’arrêt attaqué, que la BEI a pu à juste titre écarter les certificats médicaux présentés par la requérante en tant que preuves de l’existence d’actes constitutifs d’un harcèlement, étant donné que les personnes les ayant rédigés n’avaient pas assisté aux prétendus actes en question.

67. Dans ce contexte, il y a lieu de relever que de tels certificats médicaux peuvent certainement apporter un éclairage sur l’existence, voire la nature, d’un préjudice subi par la prétendue victime d’un harcèlement en fonction de leur contenu et de la date de leur établissement. Cela a par ailleurs été reconnu par le Tribunal au point 58 de l’arrêt attaqué. L’on ne peut, en revanche, attribuer à un certificat médical la même force probante qu’à un témoignage direct d’une personne ayant assisté à
l’acte en question. L’objet de l’enquête étant toutefois d’établir la réalité d’actes précis allégués par le plaignant ainsi que leur appréciation à la lumière de la définition du harcèlement sexuel, c’est ainsi à bon droit que le Tribunal a jugé que les certificats médicaux apportés par la requérante ne pouvaient être utilisés pour déterminer la survenance de ces événements ( 40 ).

iv) Conclusion intermédiaire

68. Il résulte de ce qui précède que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que les droits dont pouvait se prévaloir la requérante dans le cadre de l’enquête étaient moins étendus que ceux dont disposait la personne accusée de harcèlement et que la requérante n’avait, par conséquent, pas le droit de se voir communiquer le contenu des déclarations de la personne accusée ainsi que de celles des témoins et de préciser ses observations à ce sujet ou d’exiger la convocation des témoins
supplémentaires dans la mesure où cela aurait été nécessaire pour le respect de son droit d’être entendue.

2) Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de l’absence de conséquences du non-respect des délais régissant la procédure d’enquête

69. La deuxième branche du premier moyen a pour objet l’appréciation par le Tribunal des conséquences du non-respect de certains délais prévus par la politique en matière de dignité au travail. Le Tribunal a jugé, aux points 47 à 49 de l’arrêt attaqué, que, malgré le non-respect desdits délais, aucune illégalité ne saurait être reprochée à la BEI étant donné que la convocation à l’audition ainsi que la décision étaient parvenues à la requérante dans un délai raisonnable et que la BEI avait agi avec
diligence. La requérante, en revanche, est d’avis que le Tribunal aurait dû conclure au caractère strictement contraignant des délais en question.

70. Tout d’abord, il convient de constater que la politique en matière de dignité au travail revêt, comme réglementation interne de la BEI, un caractère juridique contraignant, au demeurant reconnu par le Tribunal au point 33 de l’arrêt attaqué ( 41 ). Partant, et contrairement à ce que le Tribunal semble cependant soutenir au point 47 de l’arrêt attaqué, il n’y a pas lieu de considérer les délais prévus par cette réglementation comme de simples objectifs indicatifs de bonne administration destinés
à favoriser le déroulement de la procédure dans un délai raisonnable ( 42 ).

71. Toutefois, il découle d’une jurisprudence constante que même la violation d’un délai contraignant ne justifie pas en elle-même dans tous les cas l’annulation de l’acte pris à l’issue de la procédure en cause ( 43 ). Dans ces conditions, c’est à bon droit que le Tribunal est parti, au point 47 de l’arrêt attaqué, de la prémisse selon laquelle les conséquences du non-respect d’un délai ne peuvent être appréciées qu’en fonction des circonstances particulières de l’affaire.

72. À cet égard, il y a lieu de relever que la politique en matière de dignité au travail subordonne les différentes étapes de la procédure d’enquête à des délais très courts, parfois aussi brefs que cinq jours ouvrables. Compte tenu de l’incidence potentiellement grave de l’enquête sur les relations au sein de l’équipe et de la position exposée du plaignant, tout comme de l’intérêt de la personne accusée de harcèlement de se disculper de toute accusation dirigée contre elle au plus vite, ces délais
visent à éviter toute prolongation d’une situation d’incertitude. Il s’ensuit que la finalité poursuivie par les délais régissant la procédure d’enquête ne se limite pas à l’encadrement temporel de cette procédure mais est bien de protéger les intérêts des personnes concernées.

73. Cette finalité ne justifie pourtant pas l’annulation d’une décision prise hors délai. Bien au contraire, l’annulation de la décision pour la simple raison qu’elle a été prise hors délai reviendrait précisément à faire perdurer l’état d’incertitude que les délais visent à éviter.

74. En tout état de cause, il découle également d’une jurisprudence constante que le non-respect d’un délai peut ouvrir droit à réparation. Dans ce contexte, le juge de l’Union doit procéder à une appréciation globale de la situation en présence afin de déterminer si la durée d’une procédure était déraisonnable ( 44 ). En l’espèce, force est de constater que le Tribunal, en s’interrogeant sur la question de savoir si la convocation à l’audition et la communication de la décision du président de la
BEI étaient intervenues dans un délai raisonnable compte tenu des circonstances en présence, a fait une application correcte de cette jurisprudence. Il a notamment pris en considération, d’une part, concernant le délai pour l’ouverture de l’enquête, le fait que la requérante avait été informée plusieurs fois sur l’état actuel de sa plainte (point 36 de l’arrêt attaqué) et, d’autre part, concernant le délai pour la communication de la décision du président de la BEI, que l’objet de l’enquête
avait changé en cours de procédure, ce qui rendait nécessaire des renseignements supplémentaires (points 48 et 49 de l’arrêt attaqué).

75. Au-delà de ces constatations, la conclusion du Tribunal selon laquelle le temps écoulé entre le dépôt de la plainte le 20 mai 2015 et la décision du président de la BEI du 16 octobre 2015 n’était pas déraisonnablement long relève de son pouvoir souverain d’appréciation des faits. Dès lors, cette conclusion ne saurait plus être mise en cause au stade du pourvoi.

76. Il s’ensuit que l’argument de la requérante selon lequel le non-respect des délais prévu par la procédure d’enquête aurait dû conduire à l’annulation de la décision du président de la BEI et à l’engagement de la responsabilité non contractuelle de celle-ci doit être rejeté.

b)   Sur les deuxième et troisième moyens, tirés d’une appréciation erronée quant à la légalité de certains éléments de justification dans le rapport du comité d’enquête à la lumière de l’article 7 de la Charte et de l’article 8 de la CEDH

77. Par ses deuxième et troisième moyens, la requérante fait, en substance, grief au Tribunal de n’avoir pas jugé illégal le fait pour le président de la BEI de fonder sa décision sur des témoignages émanant de personnes non qualifiées à cet égard, décrivant la requérante comme une personne ayant des problèmes psychologiques, ayant mal vécu une rupture avec son ancien compagnon, à la suite de laquelle elle aurait perdu beaucoup de poids, ayant des difficultés à accepter toute forme de critique et
présentant un caractère manipulateur, ainsi que laissant entendre que sa plainte était motivée par des raisons autres que le harcèlement sexuel qu’elle aurait prétendument subi.

78. Dans ce contexte, la requérante reproche également au Tribunal une erreur de motivation en ce que ce dernier se serait contredit en jugeant, au point 76 de l’arrêt attaqué, que, malgré le fait que la mention de ces éléments ait été « tant superflue que regrettable », elle ne constituait pas une illégalité pouvant être reprochée à la BEI.

79. Pour écarter les arguments de la requérante, le Tribunal s’est appuyé, au point 71 de l’arrêt attaqué, sur le fait que le comité d’enquête ainsi que le président de la BEI ne se seraient pas livrés à des déclarations sur la vie privée ou sur la santé psychologique de la requérante eux-mêmes mais se seraient bornés à reproduire les déclarations des témoins à ce sujet. Le Tribunal semble en conclure que ces propos n’étaient ainsi pas imputables à la BEI.

80. Néanmoins, au point 71 ainsi qu’au point 81 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a souligné que le comité d’enquête s’est bel et bien fondé sur ces mêmes déclarations pour justifier sa recommandation de rejeter la plainte. Dans ce contexte, il y a lieu de noter que cette recommandation mettait davantage en cause la crédibilité de la requérante en tant que personne que celle de ses allégations. Ainsi, le comité d’enquête a fait de l’évaluation de la personnalité de la requérante, prétendument établie
par les témoins, le fondement même du rejet de la plainte. Or, il ne saurait être admis que le comité d’enquête et, par suite, le président de la BEI fondent leur décision affectant de manière défavorable la requérante sur une appréciation qu’ils n’ont pas endossée. En effet, c’est précisément la mission du comité d’enquête d’établir les faits justifiant la décision finale. Lors de l’audience, il a été précisé à cet égard qu’il n’appartenait pas au président de la BEI d’entreprendre des
vérifications factuelles supplémentaires. Dans ces conditions, le Tribunal aurait dû conclure que les observations sur la personnalité et le comportement de la requérante contenues dans le rapport du comité d’enquête étaient imputables à la BEI. A contrario, si le Tribunal était parvenu à la conclusion selon laquelle le comité d’enquête aurait seulement reproduit – mais non fait siennes – les appréciations contenues dans les témoignages, le Tribunal aurait alors dû conclure à un défaut de
motivation de la décision du président de la BEI, qui n’était fondée sur rien d’autre que le rapport du comité d’enquête et les témoignages reproduits par celui-ci. Le raisonnement suivi par le Tribunal quant à l’imputabilité des appréciations contenues dans les déclarations des témoins à la BEI est ainsi entaché d’une erreur de droit.

81. En outre, le Tribunal a écarté les arguments de la requérante visant à démontrer une violation de l’article 7 de la Charte en faisant valoir, aux points 74 et 75 de l’arrêt attaqué, que le rapport du comité d’enquête ainsi que la décision du président de la BEI n’avaient pas fait l’objet d’une diffusion et que les éléments retenus dans ledit rapport n’avaient finalement entraîné aucune conséquence, notamment disciplinaire, sur la situation professionnelle de la requérante.

82. En ce qui concerne le dernier de ces deux arguments, le fait que l’évaluation du comportement et de la personnalité de la requérante n’a pas entraîné de suite disciplinaire est dénué de pertinence pour l’examen de la question de savoir si les déclarations qui ont ainsi été faites constituent une violation de l’article 7 de la Charte, voire de l’article 8 de la CEDH.

83. Partant, il reste à déterminer si le Tribunal a conclu à juste titre qu’une violation de l’article 7 de la Charte pouvait être exclue dans la mesure où le rapport n’a été communiqué qu’à la personne accusée de harcèlement et au président de la BEI.

84. À cet égard, il y a lieu de relever, tout d’abord, que le Tribunal de la fonction publique a considéré, dans un arrêt concernant une enquête pour harcèlement moral, que la divulgation d’informations susceptibles de susciter des rumeurs négatives au sujet de la requérante ainsi que de porter atteinte à sa réputation et sa crédibilité auprès des seules personnes accusées de harcèlement suffisait pour conclure à une illégalité ouvrant droit à réparation ( 45 ).

85. En revanche, dans une affaire concernant le rejet d’une candidature à une promotion par la Commission européenne qui était accompagné de commentaires blessants, la Cour a également tenu compte du fait aggravant que le document concerné avait fait l’objet d’une diffusion au sein de toute la division ( 46 ).

86. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après la « Cour EDH »), la question de savoir si un commentaire jugé blessant ou de nature à discréditer la personne concernée a fait l’objet d’une diffusion peut certainement être prise en considération afin d’établir une violation du droit au respect de la vie privée en vertu de l’article 8 de la CEDH, qui comprend non seulement le respect de la réputation mais également celui de l’honneur d’une personne ( 47 ). En outre,
la Cour EDH a jugé à plusieurs reprises que l’intégrité psychologique relève également du droit au respect de la vie privée consacré à l’article 8 de la CEDH ( 48 ). Néanmoins, afin d’établir une violation de l’article 8 de la CEDH, tant la gravité de la déclaration ( 49 ) que sa finalité ( 50 ), ainsi que d’éventuelles justifications doivent de surcroît être prises en compte. Il s’ensuit qu’une violation de l’article 8 de la CEDH ne peut être appréciée en s’interrogeant uniquement sur la
question de savoir si les propos ont fait l’objet d’une diffusion.

87. Cependant, le Tribunal ne s’est pas livré à une appréciation de la gravité des commentaires et de leur effet sur l’intégrité psychologique de la requérante, telle qu’elle avait essayé de l’établir à l’aide des certificats médicaux. Il n’a pas non plus déterminé si les déclarations pouvaient utilement et objectivement contribuer à une évaluation du caractère malveillant ou non de la plainte. Enfin, s’agissant d’une éventuelle justification, le Tribunal aurait dû s’interroger sur la question de
savoir si l’enquête sur les aspects de la vie privée de la requérante et leur mention dans le rapport du comité d’enquête ainsi que la décision du président de la BEI étaient pertinents eu égard à l’objet de l’enquête, à savoir l’établissement de la réalité des actes commis par la personne accusée de harcèlement.

88. Il résulte de l’ensemble de ces considérations que le raisonnement du Tribunal, selon lequel une violation de l’article 7 de la Charte et de l’article 8 de la CEDH peut être écartée uniquement en raison de l’absence de conséquences disciplinaires des observations sur la personnalité et le comportement de la requérante ainsi que d’une divulgation du rapport au sein de son unité, est entaché d’erreurs de droit.

2.   Sur les conséquences du bien-fondé de la première branche du premier moyen ainsi que du deuxième moyen

89. Le bien-fondé de la première branche du premier moyen concernant l’étendue des droits procéduraux de la requérante justifie, en lui-même, une annulation de l’arrêt attaqué. C’est en effet en s’appuyant sur la prémisse erronée que les droits procéduraux devant être reconnus à la requérante étaient par principe moins étendus que ceux de la personne accusée de harcèlement que le Tribunal a écarté les arguments de la requérante visant à démontrer les illégalités dans le déroulement de la procédure
d’enquête. Dans la mesure où le rejet des conclusions en annulation ainsi que des conclusions indemnitaires avait été entièrement fondé sur l’absence de toute illégalité dans cette procédure, l’arrêt attaqué doit ainsi être annulé.

90. Partant, il n’y a plus lieu de s’interroger sur la question de savoir si le bien-fondé du deuxième moyen concernant les erreurs de droit commises par le Tribunal dans le cadre de l’appréciation d’une violation de l’article 7 de la Charte justifient également l’annulation de l’arrêt attaqué. À la suite de l’annulation de l’arrêt attaqué, ces considérations restent toutefois pertinentes aux fins de l’appréciation des conclusions indemnitaires invoquées en première instance.

3.   Sur le recours devant le Tribunal

91. Aux termes de l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, cette dernière peut, en cas d’annulation de l’arrêt du Tribunal, statuer définitivement sur le litige lorsque celui-ci est en état d’être jugé.

92. Tel est le cas en l’espèce en ce qui concerne l’annulation de la décision du président de la BEI demandée par la requérante en première instance, puisqu’une interprétation correcte de l’étendue des droits procéduraux de la requérante par le Tribunal aurait dû conduire à l’annulation de la décision du président de la BEI.

93. Certes, selon une jurisprudence constante, une violation des droits procéduraux, en particulier du droit d’être entendu, ne justifie l’annulation d’une décision adoptée au terme d’une procédure que si, en l’absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent ( 51 ). Tel n’est notamment pas le cas lorsque l’administration ne dépose d’aucune marge de discrétion quant à la décision à prendre à l’issue de la procédure.

94. Or, en l’espèce, il ne peut pas être exclu que la décision du président de la BEI aurait été différente si la requérante avait eu le droit de contester les déclarations de la personne accusée de harcèlement et des témoins ou de produire des éléments nouveaux au soutien de sa plainte. Cela est d’autant plus vrai dans la mesure où l’objet de l’enquête avait changé par rapport au moment du dépôt de la plainte par la requérante et se focalisait, dès lors, sur le comportement de la requérante et sur
sa personnalité, aspects sur lesquels la requérante n’avait pas encore eu l’occasion de faire valoir des observations.

95. Il convient, dès lors, de faire droit à la demande en annulation présentée en première instance et d’annuler la décision du président de la BEI rejetant la plainte de la requérante. Au demeurant, si la Cour suit cette proposition et annule la décision, il appartiendra à la BEI d’adopter les mesures appropriées que comporte l’exécution de cette annulation.

96. Cependant, le litige n’est pas en état d’être jugé en ce qui concerne la demande d’indemnisation ( 52 ).

97. En effet, il résulte des considérations effectuées dans le cadre du deuxième moyen ( 53 ) que le Tribunal doit de nouveau apprécier l’argument tiré d’une violation de l’article 7 de la Charte en tenant compte notamment de la gravité et de la finalité des commentaires contenus dans le rapport du comité d’enquête ainsi que de leur éventuelle justification. De plus, la question de savoir si l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la BEI peut être justifié eu égard au préjudice que la
requérante allègue avoir subi et à son lien avec les illégalités invoquées n’a pas encore été examinée par le Tribunal.

98. Il s’ensuit qu’il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue sur la demande en indemnisation.

C. Sur les dépens

99. L’affaire étant renvoyée devant le Tribunal, il convient de réserver les dépens.

VI. Conclusion

100. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit :

1) L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne (sixième chambre) du 13 juillet 2017, OZ/BEI (T‑607/16) est annulé.

2) La décision du président de la Banque européenne d’investissement (BEI) du 16 octobre 2015 rejetant la plainte de la requérante pour harcèlement sexuel au titre de la « politique en matière de respect de la dignité de la personne au travail » de la BEI est annulée.

3) L’affaire est renvoyée devant le Tribunal pour qu’il statue sur les conclusions indemnitaires.

4) Les dépens sont réservés.

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( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) Voir, notamment, arrêts du Tribunal de la fonction publique du 16 mai 2012, Skareby/Commission (F‑42/10, EU:F:2012:64, points 46 à 48) ; du 23 octobre 2013, BQ/Cour des comptes (F‑39/12, EU:F:2013:158, point 72), et du 16 décembre 2015, De Loecker/SEAE (F‑34/15, EU:F:2015:153, point 43), ainsi qu’arrêt du Tribunal du 23 septembre 2015, Cerafogli/BCE (T‑114/13 P, EU:T:2015:678, point 40).

( 3 ) JO 2013, L 287, p. 15.

( 4 ) Sauf erreur de notre part, ce document, produit par la BEI en langue française à la demande du Greffe de la Cour, n’a pas été publié et est seulement accessible en interne.

( 5 ) Arrêt du Tribunal du 13 juillet 2017, OZ/BEI (T‑607/16, non publié, EU:T:2017:495.

( 6 ) Sur la compétence de la Cour pour soulever d’office, pour la première fois au stade de la procédure de pourvoi, l’irrecevabilité du recours devant le Tribunal, voir arrêt du 23 avril 2009, Sahlstedt e.a./Commission (C‑362/06 P, EU:C:2009:243, point 22).

( 7 ) Ce délai a été ajouté dans le règlement du personnel de la BEI à la suite de l’arrêt du 28 février 2013, Réexamen Arango Jaramillo e.a./BEI (C‑334/12 RX‑II, EU:C:2013:134). Le Tribunal considère toutefois que cette nouvelle version ne s’applique que lorsque le membre du personnel a été recruté après 2013 ; voir, notamment, arrêt du Tribunal du 4 octobre 2018, PD/BEI (T‑615/16, non publié, EU:T:2018:642, point 48). En tout état de cause, il ressort de l’arrêt de la Cour précité en ce qui
concerne la situation avant 2013 que même l’introduction d’un recours contre un acte imputable à la BEI dans un délai supérieur à trois mois ne peut pas, d’emblée, être considéré comme étant introduit dans un délai déraisonnable.

( 8 ) Voir, en ce sens, prise de position de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Réexamen Arango Jaramillo e.a./BEI (C‑334/12 RX‑II, EU:C:2012:733, point 51), et arrêts du Tribunal du 6 mars 2001, Dunnett e.a./BEI (T‑192/99, EU:T:2001:72, point 56), ainsi que du 10 juillet 2014, CG/BEI (F‑95/11 et F‑36/12, EU:F:2014:188, EU:F:2014:188, point 80).

( 9 ) Avant la révision du règlement du personnel de la BEI en 2013 à la suite de l’arrêt du 28 février 2013, Réexamen Arango Jaramillo e.a./BEI (C‑334/12 RX‑II, EU:C:2013:134), le recours à la procédure de conciliation n’était pas obligatoire.

( 10 ) Voir, en ce sens, ordonnance du 19 juin 2014, Cartoon Network/OHMI (C‑670/13 P, non publiée, EU:C:2014:2024, points 42 à 46), et arrêt du 7 novembre 2013, Wam Industriale/Commission (C‑560/12 P, non publié, EU:C:2013:726, point 44). Cette interprétation de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour est d’ailleurs confirmée par le libellé de la disposition dans d’autres versions linguistiques que la version française, telles que les versions allemande, anglaise et
polonaise.

( 11 ) Voir arrêt du 26 octobre 2006, Koninklijke Coöperatie Cosun/Commission (C‑68/05 P, EU:C:2006:674, point 54), et, plus précisément en ce qui concerne l’appréciation du déroulement d’une procédure administrative, nos conclusions dans l’affaire Wunenburger/Commission (C‑362/05 P, EU:C:2007:104, point 77), ainsi que l’arrêt du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission (C‑362/05 P, EU:C:2007:322, point 92).

( 12 ) Arrêt du 23 avril 2002, Campogrande/Commission (C‑62/01 P, EU:C:2002:248, point 43).

( 13 ) L’article 113, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour dispose que, dans le cadre d’un pourvoi, les conclusions du requérant doivent tendre à l’annulation, totale ou partielle, de l’arrêt du Tribunal et, le cas échéant, à ce qu’il soit fait droit, en tout ou partie, aux conclusions présentées en première instance ; voir arrêt du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission (C‑120/06 P et C‑121/06 P, EU:C:2008:476, point 205).

( 14 ) Arrêt du Tribunal de la fonction publique du 16 décembre 2015, De Loecker/SEAE (F‑34/15, EU:F:2015:153, point 43).

( 15 ) Arrêt du Tribunal du 23 septembre 2015, Cerafogli/BCE (T‑114/13 P, EU:T:2015:678, point 40).

( 16 ) Voir arrêts du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, points 68, 71 et 72), du Tribunal de la fonction publique du 16 mai 2012, Skareby/Commission (F‑42/10, EU:F:2012:64, point 46), du 23 octobre 2013, BQ/Cour des comptes (F‑39/12, EU:F:2013:158, point 72), et du 10 juillet 2014, CG/BEI (F‑103/11, EU:F:2014:185, point 148). Cette intervention peut prendre la forme d’une procédure disciplinaire à l’encontre du harceleur présumé mais également d’une mesure
d’éloignement ; voir arrêt du Tribunal de la fonction publique du 9 décembre 2008, Q/Commission (F‑52/05, EU:F:2008:161, points 207 à 213).

( 17 ) Voir arrêt du Tribunal de la fonction publique du 16 décembre 2015, De Loecker/SEAE (F‑34/15, EU:F:2015:153, point 41).

( 18 ) Le Tribunal a récemment souligné la différence en ce qui concerne la terminologie, à savoir la « plainte » prévue par les règles applicables au personnel de la Banque centrale européenne (BCE) (qui ressemble sur ce point à celui de la BEI) et la « demande d’assistance » en vertu du statut dans l’arrêt du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, points 77 et 78).

( 19 ) Voir arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393).

( 20 ) Voir arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, point 69 et 70).

( 21 ) Voir arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, points 71 et 72).

( 22 ) Les similarités entre la procédure disciplinaire et la procédure pénale ont été exposées par l’avocat général Roemer dans ses conclusions dans l’affaire Van Eick/Commission (35/67, non publiées, EU:C:1968:32, p. 510), ainsi que dans les conclusions de l’avocat général Alber dans l’affaire Tzoanos/Commission (C‑191/98 P, EU:C:1999:127, point 27).

( 23 ) Arrêts du 9 novembre 2006, Commission/De Bry (C‑344/05 P, EU:C:2006:710, point 37), et du 14 juin 2016, Marchiani/Parlement (C‑566/14 P, EU:C:2016:437, point 51). Une décision mettant fin à un détachement ne peut pas être considérée comme une procédure ouverte à l’encontre de la personne concernée au sens de cette jurisprudence, voir arrêt du 29 avril 2004, Parlement/Reynolds (C‑111/02 P, EU:C:2004:265, point 57). La procédure disciplinaire doit cependant être considérée comme étant ouverte à
l’encontre de la personne concernée au sens de cette jurisprudence, ce qui justifie l’applicabilité des droits de la défense tels que prévus par l’annexe IX du statut.

( 24 ) Arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, point 66), reprenant la solution retenue par les arrêts du Tribunal de la fonction publique du 16 mai 2012, Skareby/Commission (F‑42/10, EU:F:2012:64, points 46 à 48) ; du 6 octobre 2015, du 6 octobre 2015, CH/Parlement (F‑132/14, EU:F:2015:115, point 57), et du 23 octobre 2013, BQ/Cour des comptes (F‑39/12, EU:F:2013:158, point 72).

( 25 ) Arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, point 69).

( 26 ) Voir arrêts du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a. (C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 50), et du 9 mars 2010, ERG e.a. (C‑379/08 et C‑380/08, EU:C:2010:127, point 54) ; ainsi que, en matière de fonction publique, arrêts du 6 octobre 1982, Alvarez/Parlement (206/81, EU:C:1982:333, point 6), et du 17 novembre 1983, Tréfois/Cour de justice (290/82, EU:C:1983:334, point 19). En ce qui concerne plus précisément le rejet d’une plainte pour harcèlement, voir arrêt du Tribunal du 23 septembre
2015, Cerafogli/BCE (T‑114/13 P, EU:T:2015:678, points 35 et 41).

( 27 ) Dans la mesure où la requérante reproche, en substance, au Tribunal d’avoir violé son droit d’être entendue ainsi que le principe du contradictoire, principes qui sont également consacrés à l’article 41 de la Charte, il est sans pertinence pour la solution du présent litige qu’elle rattache ces principes formellement à l’article 47 de la Charte ainsi qu’à l’article 6 de la CEDH.

( 28 ) Arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, point 73).

( 29 ) Voir, en ce sens, arrêt du 9 novembre 2006, Commission/De Bry (C‑344/05 P, EU:C:2006:710, points 37 et 38).

( 30 ) Arrêts du 24 octobre 1996, Commission/Lisrestal e.a. (C‑32/95 P, EU:C:1996:402, point 21) ; du 22 octobre 2013, Sabou (C‑276/12, EU:C:2013:678, point 38) ; du 14 juin 2016, Marchiani/Parlement (C‑566/14 P, EU:C:2016:437, point 51) ; ainsi qu’arrêts du Tribunal du 23 septembre 2015, Cerafogli/BCE (T‑114/13 P, EU:T:2015:678, point 34), ainsi que du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, points 69 et 74).

( 31 ) Arrêts du Tribunal du 8 décembre 2005, Reynolds/Parlement (T‑237/00, EU:T:2005:437, point 101) ; du 8 mars 2005, Vlachaki/Commission (T‑277/03, EU:T:2005:83, point 64), ainsi qu’arrêt du 20 décembre 2017, Prequ' Italia (C‑276/16, EU:C:2017:1010, point 46). Sur la portée du droit de faire connaître utilement son point de vue, voir conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire Commission/De Bry (C‑344/05 P, EU:C:2006:483, points 44 et suiv.).

( 32 ) Ce qui a également été exigé par le Tribunal dans son arrêt du 23 septembre 2015, Cerafogli/BCE (T‑114/13 P, EU:T:2015:678, point 50), et par le Tribunal de la fonction publique dans l’arrêt du 23 octobre 2013, BQ/Cour des comptes (F‑39/12, EU:F:2013:158, points 73 et 74). Dans l’arrêt du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393), le Tribunal a même jugé insuffisant le fait pour l’administration d’avoir entendu la requérante sur les motifs justifiant le rejet de la demande sans lui
avoir donné accès au rapport du comité consultatif sur le harcèlement et sa prévention sur le lieu de travail.

( 33 ) Voir, également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, point 69).

( 34 ) Voir point 54 de l’arrêt attaqué.

( 35 ) Voir arrêts du Tribunal de la fonction publique du 23 octobre 2013, BQ/Cour des comptes (F‑39/12, EU:F:2013:158, point 72), et du 16 décembre 2015, De Loecker/SEAE (F‑34/15, EU:F:2015:153, point 43) ; voir, désormais également, arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, point 64).

( 36 ) Arrêt du Tribunal de la fonction publique du 23 septembre 2015, Cerafogli/BCE (T‑114/13 P, EU:T:2015:678, point 45). Dans cette affaire, la requérante avait cependant eu accès au projet du rapport du comité d’enquête qui résumait les déclarations des témoins.

( 37 ) Arrêts du Tribunal de la fonction publique du 13 décembre 2012, Donati/BCE (F‑63/09, EU:F:2012:193, point 187), et du 10 juillet 2014, CG/BEI (F‑103/11, EU:F:2014:185, point 157) ; voir, désormais également, arrêt du Tribunal du 29 juin 2018, HF/Parlement (T‑218/17, EU:T:2018:393, points 97 à 101).

( 38 ) Arrêt du Tribunal de la fonction publique du 13 décembre 2012, Donati/BCE (F‑63/09, EU:F:2012:193, point 187).

( 39 ) Arrêt du Tribunal de la fonction publique du 11 juillet 2013, Tzirani/Commission (F‑46/11, EU:F:2013:115, point 125).

( 40 ) Dans cette logique, la Cour a confirmé un arrêt dans lequel le Tribunal a jugé qu’il était justifié pour un comité d’enquête de s’abstenir de la convocation de témoins qui n’ont assisté ni totalement ni partiellement à l’incident en cause ; voir ordonnance du 16 octobre 1997, Dimitriadis/Cour des comptes (C‑140/96 P, EU:C:1997:493, point 38).

( 41 ) Voir, également, arrêt du Tribunal de la fonction publique du 11 novembre 2014, De Nicola/BEI (F‑52/11, EU:F:2014:243, point 143).

( 42 ) Voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 mai 2005, Piro/Commission (T‑193/03, EU:T:2005:164, point 78).

( 43 ) Arrêt du 20 mai 2010, Gogos/Commission (C‑583/08 P, EU:C:2010:287, point 56).

( 44 ) Le caractère raisonnable doit être apprécié dans chaque cas d’espèce en fonction des circonstances de la cause ; voir arrêts du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, points 229 à 235), et du 28 février 2013, Réexamen Arango Jaramillo e.a./BEI (C‑334/12 RX‑II, EU:C:2013:134, points 28 et 29).

( 45 ) Le Tribunal de la fonction publique n’a pas examiné cette illégalité sous l’angle d’une violation de l’article 7 de la Charte de manière expresse mais a reconnu qu’elle avait causé un dommage moral à la requérante ; voir arrêt du 10 juillet 2014, CG/BEI (F‑103/11, EU:F:2014:185, point 151).

( 46 ) Voir arrêt du 7 février 1990, Culin/Commission (C‑343/87, EU:C:1990:49, points 27 à 29).

( 47 ) Cour EDH, 29 juin 2004, Chauvy et autres c. France, (CE:ECHR:2004:0629JUD006491501, § 70), et Cour EDH, 15 novembre 2007, Pfeifer c. Autriche, (CE:ECHR:2007:1115JUD001255603, § 35).

( 48 ) Cour EDH, 9 avril 2009, A. c. Norvège, (CE:ECHR:2009:0409JUD002807006, § 64).

( 49 ) La déclaration doit être de nature à causer une nuisance à la vie privée de la personne concernée ; voir Cour EDH, 9 avril 2009, A. c. Norvège (CE:ECHR:2009:0409JUD002807006, § 64), Cour EDH, 10 juillet 2014, Axel Springer AG c. Allemagne, (CE:ECHR:2012:0207JUD003995408, § 83), et Cour EDH, 16 juillet 2015, Delphi AS c. Estonie, (CE:ECHR:2015:0616JUD006456909, § 137).

( 50 ) Dans un arrêt du 4 octobre 2007, Sanchez Cardenas c. Norvège (CE:ECHR:2007:1004JUD001214803, § 37), la Cour EDH a tenu compte de ce que la déclaration en cause, en l’occurrence faite par une juridiction dans le cadre d’un arrêt, était dénuée de pertinence aux fins de la solution du litige.

( 51 ) Voir, en ce sens, arrêts du 14 février 1990, France/Commission (C‑301/87, EU:C:1990:67, point 31) ; du 1er octobre 2009, Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil (C‑141/08 P, EU:C:2009:598, point 94) ; du 6 septembre 2012, Storck/OHMI (C‑96/11 P, non publié, EU:C:2012:537, point 80) ; du 10 septembre 2013, G. et R. (C‑383/13 PPU, EU:C:2013:533, point 38), ainsi que du 3 juillet 2014, Kamino International Logistics et Datema Hellmann Worldwide Logistics (C‑129/13 et C‑130/13,
EU:C:2014:2041, point 79).

( 52 ) Sur la possibilité pour la Cour de statuer définitivement sur certaines parties du litige et de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour le surplus, voir arrêt du 14 mai 1998, Conseil/de Nil et Impens (C‑259/96 P, EU:C:1998:224).

( 53 ) Voir points 83 et suiv. des présentes conclusions.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-558/17
Date de la décision : 21/11/2018
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé, Pourvoi - fondé, Pourvoi - irrecevable
Type de recours : Recours en responsabilité - non fondé, Recours en responsabilité - non-lieu à statuer, Recours de fonctionnaires - fondé

Analyses

Pourvoi – Fonction Publique – Personnel de la Banque européenne d’investissement (BEI) – Harcèlement sexuel – Enquête menée dans le cadre du programme “Dignity at work” – Rejet d’une plainte pour harcèlement – Demande d’annulation de la décision du président de la BEI rejetant la plainte – Réparation du préjudice.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : OZ
Défendeurs : Banque européenne d'investissement (BEI).

Composition du Tribunal
Avocat général : Kokott

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2018:930

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