CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. EVGENI TANCHEV
présentées le 14 novembre 2018 ( 1 )
Affaire C‑630/17
Anica Milivojević
contre
Raiffeisenbank St. Stefan-Jagerberg-Wolfsberg eGen
[demande de décision préjudicielle formée par l’Općinski sud u Rijeci (tribunal municipal de Rijeka, Croatie)]
« Renvoi préjudiciel – Libre prestation de services – Contrats de crédit conclus avant l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne – Loi nationale rétroactive prévoyant la nullité de tels contrats lorsqu’ils présentent des aspects internationaux – Admissibilité »
I. Introduction
1. La présente demande de décision préjudicielle émanant de l’Općinski sud u Rijeci (tribunal municipal de Rijeka, Croatie) concerne, en substance, la compatibilité avec le droit de l’Union d’une loi croate en vertu de laquelle les contrats de crédit, garantis par des hypothèques sur des biens croates, qui ont été conclus entre des débiteurs croates et des prêteurs étrangers non autorisés à fournir des services de crédit en Croatie par la Hrvatska narodna banka (Banque nationale de Croatie) sont
nuls dès la date de leur conclusion. Les termes du traité d’adhésion de la République de Croatie à l’Union ( 2 ) sont également pertinents, étant donné que la loi en cause vise notamment les contrats de crédit qui ont été conclus avant l’adhésion de la Croatie le 1er juillet 2013.
2. La juridiction de renvoi a posé trois questions qui concernent l’interprétation du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale ( 3 ) et une question qui porte sur l’élément du litige évoqué ci-dessus, lequel implique de prendre en considération la législation de l’Union en matière de libre circulation et la jurisprudence de la Cour sur
l’incidence ratione temporis du droit de l’Union après l’adhésion d’un nouvel État membre. Conformément à la demande de la Cour, les présentes conclusions traiteront uniquement de ces derniers aspects.
A. Le cadre juridique
1. Le droit de l’Union
3. L’article 56, premier alinéa, TFUE est libellé comme suit :
« Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la libre prestation des services à l’intérieur de l’Union sont interdites à l’égard des ressortissants des États membres établis dans un État membre autre que celui du destinataire de la prestation. »
4. L’article 63, paragraphe 1, TFUE est libellé comme suit :
« Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites. »
2. Le droit croate
5. Le Zakon o ništetnosti ugovora o kreditu s međunarodnim obilježjima sklopljenih u Republici Hrvatske s neovlaštenim vjerovnikom (loi relative à la nullité des contrats de crédit présentant des aspects internationaux qui ont été conclus en République de Croatie avec un prêteur non autorisé, ci-après la « loi du 14 juillet 2017 ») ( 4 ) dispose, à l’article 1er, aux articles 2 à 5 et aux articles 7 à 11 :
« Loi relative à la nullité des contrats de crédit présentant des aspects internationaux qui ont été conclus en République de Croatie avec un prêteur non autorisé
Objet de la loi
Article premier
1) La présente loi s’applique aux contrats de crédit présentant des aspects internationaux qui ont été conclus en République de Croatie entre des débiteurs et des prêteurs non autorisés, à l’exception des contrats qui ont été conclus par les débiteurs suivants :
[…]
2) La présente loi s’applique également aux autres actes juridiques établis en République de Croatie entre des débiteurs et des prêteurs non autorisés qui sont induits par un contrat de crédit présentant des aspects internationaux visé au paragraphe 1 du présent article ou qui sont fondés sur un tel contrat.
Définitions
Article 2
Au sens de la présente loi, le terme :
– “débiteur” désigne toute personne physique ou morale à laquelle un crédit a été consenti en vertu d’un contrat de crédit présentant des aspects internationaux, ou toute personne qui s’est engagée au profit de la personne à laquelle un crédit a été consenti en qualité de codébiteur, de débiteur gagiste, de codébiteur gagiste ou de garant ;
– “prêteur non autorisé” désigne toute personne morale qui a consenti un crédit à un débiteur en vertu d’un contrat de crédit présentant des aspects internationaux, dont le siège statutaire est situé hors de la République de Croatie à la date de la conclusion du contrat de crédit présentant des aspects internationaux et qui propose ou fournit des services de crédit en République de Croatie, bien qu’elle ne remplisse pas les conditions auxquelles la réglementation spécifique subordonne la
fourniture de tels services et, plus précisément, qu’elle ne dispose pas des autorisations et/ou agréments des autorités compétentes de la République de Croatie ;
[…]
Nullité des contrats de crédit
Article 3
1) Les contrats de crédit présentant des aspects internationaux qui ont été conclus en République de Croatie entre des débiteurs et des prêteurs non autorisés sont nuls et non avenus.
2) Par dérogation au paragraphe 1 du présent article, la nullité ne peut être invoquée lorsque le contrat a été intégralement exécuté.
Nullité des autres actes juridiques
Article 4
Tout acte notarié établi sur le fondement ou en lien avec un contrat nul et non avenu au sens de l’article 3 de la présente loi est nul et non avenu.
Exclusion de l’exécution forcée
Article 5
Lorsque le jugement constatant la nullité d’un contrat de crédit ou la nullité d’un acte notarié fondé sur un contrat nul et non avenu a acquis force de chose jugée, toute procédure d’exécution engagée à l’encontre du débiteur devant les tribunaux ou devant l’Agence financière est close à la demande du débiteur.
[…]
Effets de la nullité
Article 7
Chaque partie contractante est tenue de restituer à l’autre partie tout ce qu’elle a reçu en vertu du contrat nul et non avenu et, si cela n’est pas possible ou si la nature de ce qui a été exécuté s’oppose à la restitution, une indemnité pécuniaire appropriée doit être versée, laquelle sera fixée en fonction des prix en vigueur à la date à laquelle la décision judiciaire est rendue.
Compétence
Article 8
1) Dans le cadre des litiges relatifs aux contrats de crédit présentant des aspects internationaux, au sens de la présente loi, l’action intentée par le débiteur contre le prêteur non autorisé peut être portée soit devant les juridictions de l’État sur le territoire duquel le prêteur non autorisé a son siège soit, quel que soit le siège du prêteur non autorisé, devant la juridiction du lieu où le débiteur a son domicile ou son siège.
2) L’action intentée contre le débiteur par le prêteur non autorisé, au sens du paragraphe 1 du présent article, ne peut être portée que devant les juridictions de l’État sur le territoire duquel le débiteur a son domicile ou son siège. Le droit applicable aux contrats nuls et non avenus au sens de la présente loi est, à titre exclusif, le droit croate et la juridiction saisie d’un recours en constatation de la nullité d’un contrat appliquera la présente loi à ce recours, sans examiner s’il
existe des présomptions d’applicabilité de la loi du lieu de conclusion du contrat en vertu d’autres instruments législatifs.
Dispositions transitoires et finales
Article 9
La présente loi est sans préjudice des droits conférés au débiteur par des lois spéciales lorsque celles-ci lui sont plus favorables.
Article 10
1) Les contrats de crédit présentant des aspects internationaux, au sens de la présente loi, qui ont été conclus en République de Croatie, avant l’entrée en vigueur de la présente loi, entre des débiteurs et des prêteurs non autorisés sont nuls et non avenus dès le jour de leur conclusion, ce qui entraîne les effets indiqués à l’article 7 de la présente loi.
2) Les autres actes juridiques établis en République de Croatie, avant l’entrée en vigueur de la présente loi, entre des débiteurs et des prêteurs non autorisés, qui sont induits par un contrat de crédit présentant des aspects internationaux visé au paragraphe 1 du présent article ou qui sont fondés sur un tel contrat, sont nuls et non avenus dès le jour de leur établissement, ce qui entraîne les effets indiqués à l’article 7 de la présente loi.
Article 11
La présente loi entre en vigueur huit jours après sa publication au Narodne novine.
Zagreb, le 14 juillet 2017. »
II. Les faits au principal et les questions préjudicielles
6. Le 5 janvier 2007, Mme Anica Milivojević (ci-après la « requérante »), une ressortissante de la République de Croatie, et son mari, décédé depuis, ont conclu avec la Raiffeisenbank St. Stefan-Jagerberg-Wolfsberg eGen (ci-après la « défenderesse »), qui a son siège statutaire en Autriche, un contrat de crédit non renouvelable d’un montant de 47000 euros. Cette somme a été remise en espèces dans les bureaux de la défenderesse en Autriche et le contrat en cause a été conclu avec l’aide d’une
intermédiaire, résidant en Croatie, à laquelle une commission a été payée ( 5 ). Le crédit a été contracté en vue de l’agrandissement et de la rénovation de la maison de la requérante, en partie à des fins privées et en partie pour y aménager des appartements destinés à la location touristique ( 6 ). Il est constant que la défenderesse ne disposait pas d’une autorisation délivrée par la Banque nationale de Croatie aux fins de la fourniture de services de crédit, y compris l’octroi de prêts
hypothécaires, sur le territoire de la République de Croatie.
7. Pour garantir le remboursement du prêt, la requérante a signé, le 12 janvier 2007, une déclaration devant notaire relative à la création et à l’inscription d’une sûreté, après quoi une hypothèque sur ses biens immobiliers a été inscrite au registre foncier.
8. Le 23 avril 2015, la requérante a introduit contre la défenderesse, devant la juridiction de renvoi, un recours visant à la constatation de la nullité du contrat de crédit non renouvelable du 5 janvier 2007 (ci‑après le « contrat ») ainsi que de la déclaration devant notaire du 12 janvier 2007 et visant en outre à la radiation de l’inscription de l’hypothèque au registre foncier.
9. La juridiction de renvoi a clos les débats le 3 juillet 2017, mais elle les a rouverts par une décision du 10 août 2017 du fait de l’entrée en vigueur de la loi du 14 juillet 2017, au motif que les dispositions de celle-ci pourraient être applicables au litige au principal. Le gouvernement croate a déclaré, dans son avis du 25 mai 2017, que ce qui était alors le projet de la loi du 14 juillet 2017 devait pouvoir produire un effet rétroactif, étant donné que l’objectif de la mesure ne pouvait pas
être atteint d’une autre manière.
10. Selon la juridiction de renvoi, il ne ressort pas de l’avis du gouvernement croate qu’il s’agissait de protéger les droits du débiteur en cause (en sa qualité de consommateur ou de petite entreprise) contre les pratiques déloyales, droits qui pourraient être reconnus par le droit de l’Union à titre d’exception à la libre prestation des services. Les contrats en question sont ceux qui ont été conclus entre 2000 et 2010, après quoi la République de Croatie a adhéré à l’Union européenne et les
établissements de crédit étrangers peuvent désormais, à titre temporaire, fournir des services financiers sans être agréés par la Banque nationale de Croatie.
11. L’article 3, paragraphe 1, de la loi du 14 juillet 2017 prévoit la nullité des contrats de crédit présentant des aspects internationaux qui ont été conclus en Croatie entre un débiteur et un prêteur non autorisé. Aux termes de l’article 10, la nullité intervient dès le moment où le contrat a été conclu et s’étend aux autres actes juridiques qui sont induits par ce contrat.
12. En vertu de l’article 2, deuxième tiret, de la loi du 14 juillet 2017, un prêteur non autorisé est une personne morale qui a consenti un crédit à un débiteur en vertu d’un contrat de crédit présentant des aspects internationaux, dont le siège statutaire est situé hors de Croatie à la date de la conclusion dudit contrat et qui propose ou fournit des services incluant l’ouverture de crédits en Croatie, bien qu’elle ne remplisse pas les conditions auxquelles la réglementation spécifique subordonne
la fourniture de tels services ou qu’elle ne dispose pas des autorisations et/ou agréments des autorités compétentes de la République de Croatie.
13. Enfin, la juridiction de renvoi affirme que la jurisprudence croate a établi que les contrats de crédit ne sont pas nuls au regard du droit national en vigueur à l’époque où ces contrats ont été conclus. La juridiction de renvoi cite également le point 3.2 de la conclusion du Vrhovni sud (Cour suprême, Croatie), du 12 avril 2016, qui est antérieure à la loi du 14 juillet 2017 et qui a été rédigée à la suite d’une réunion entre le président de la chambre civile du Vrhovni sud (Cour suprême) et
les présidents des chambres civiles des Županijski sudovi (tribunaux de comitat) ; ce point indique que lesdits contrats ne sont pas nuls, étant donné que cette conséquence n’était prévue ni par le Zakon o bankama (loi relative aux banques) ni par le Zakon o kreditnim institucijama (loi relative aux établissements de crédit) avant le 30 septembre 2015, date à laquelle cette conséquence a été édictée par la loi modifiant le Zakon o potrošačkom kreditiranju (loi relative au crédit à la
consommation).
14. Toutefois, la juridiction de renvoi indique qu’il reste à trancher le point de savoir si, eu égard à l’affirmation du gouvernement croate, dans l’avis susmentionné, selon laquelle l’effet rétroactif de la loi du 14 juillet 2017« permet d’établir un régime juridique unique », un prêteur a subi une discrimination du fait de la modification de sa situation juridique dans le cadre d’un litige en cours et des pertes économiques qu’il a subies sous la forme du manque à gagner dû au non-paiement des
intérêts stipulés par contrat.
15. Si le contrat de crédit et les actes qui y sont liés sont déclarés nuls et non avenus, la défenderesse ne pourra plus continuer à fournir des services financiers. La juridiction de renvoi s’interroge dès lors sur le point de savoir si cela est contraire à la libre prestation des services dans le marché intérieur de l’Union ainsi que, éventuellement, à la libre circulation des capitaux.
16. Les parties sont en désaccord sur le point de savoir si la loi du 14 juillet 2017 est applicable ou non à la défenderesse, sur le point de savoir si c’est la loi croate ou la loi autrichienne qui s’applique au contrat et sur le point de savoir si le fait que l’article 8, paragraphes 1 et 2, de la loi du 14 juillet 2017 attribue compétence aux juridictions croates est conforme au règlement no 1215/2012.
17. L’Općinski sud u Rijeci (tribunal municipal de Rijeka) a dès lors posé à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Les articles 56 et 63 TFUE doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent aux dispositions de la loi relative à la nullité des contrats de crédit présentant des aspects internationaux qui ont été conclus en République de Croatie avec un prêteur non autorisé […] et, en particulier, aux dispositions de l’article 10 de cette loi, qui établissent que les contrats de crédit et les autres actes juridiques induits par un contrat de crédit ou fondés sur un tel contrat, qui ont été
conclus entre des débiteurs (au sens de l’article 1er et de l’article 2, premier tiret, de cette loi) et des prêteurs non autorisés (au sens de l’article 2, deuxième tiret, de cette loi), sont nuls et non avenus dès le jour de leur conclusion même s’ils ont été conclus avant l’entrée en vigueur de ladite loi, avec pour conséquence que chaque partie contractante est tenue de restituer à l’autre partie tout ce qu’elle a reçu en vertu du contrat nul et non avenu et, si cela n’est pas possible
ou si la nature de ce qui a été exécuté s’oppose à la restitution, une indemnité pécuniaire appropriée doit être versée, laquelle sera fixée en fonction des prix en vigueur à la date à laquelle la décision judiciaire est rendue ?
2) Le règlement no 1215/2012 et, en particulier, l’article 4, paragraphe 1, et l’article 25 de celui-ci doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent aux dispositions de l’article 8, paragraphes 1 et 2, de la loi relative à la nullité des contrats de crédit présentant des aspects internationaux qui ont été conclus en République de Croatie avec un prêteur non autorisé […] qui prévoient que, dans le cadre des litiges relatifs aux contrats de crédit présentant des aspects
internationaux, au sens de cette loi, l’action intentée par le débiteur contre le prêteur non autorisé peut être portée soit devant les juridictions de l’État sur le territoire duquel le prêteur non autorisé a son siège soit, quel que soit le siège du prêteur non autorisé, devant la juridiction du lieu où le débiteur a son domicile ou son siège et que l’action intentée contre le débiteur par le prêteur non autorisé, au sens de cette loi, ne peut être portée que devant les juridictions de
l’État sur le territoire duquel le débiteur a son domicile ou son siège ?
3) Le contrat a-t-il été conclu par un consommateur au sens de l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1215/2012 et des autres dispositions de l’acquis de l’Union européenne lorsque le bénéficiaire du crédit est une personne physique qui a conclu le contrat de crédit en vue d’investir dans des appartements afin d’exercer des activités hôtelières de fourniture de services d’hébergement à des touristes à son domicile ?
4) Les dispositions de l’article 24, point 1, du règlement no 1215/2012 doivent‑elles être interprétées en ce sens que les juridictions croates sont compétentes en matière de constatation de la nullité d’un contrat de crédit ainsi que de la déclaration relative à la création et à l’inscription d’une sûreté et en matière de radiation de l’inscription de cette sûreté au registre foncier lorsque les biens immobiliers du débiteur qui sont constitutifs de la sûreté garantissant la créance découlant
du contrat de crédit sont situés sur le territoire de la République de Croatie ? »
18. Comme je l’ai indiqué ci-dessus, la Cour a uniquement demandé des conclusions en ce qui concerne la première question. Des observations écrites ont été déposées devant la Cour par la défenderesse, par le gouvernement croate et par la Commission. Ces derniers ont tous participé à l’audience qui s’est tenue le 5 septembre 2018.
III. Résumé des observations écrites sur la première question
19. La défenderesse soutient que la loi du 14 juillet 2017 ne lui est pas applicable, et ce pour deux raisons. Premièrement, la défenderesse n’est pas un prêteur non autorisé au sens de l’article 2 de cette loi et, deuxièmement, le contrat a été conclu non en Croatie, mais en Autriche, si bien qu’il échappe au champ d’application de la loi du 14 juillet 2017 conformément à l’article 1er de celle-ci.
20. La défenderesse affirme qu’elle n’a jamais proposé ou fourni de services de crédit sur le territoire croate, si bien qu’elle ne peut pas être considérée comme un prêteur non autorisé. La demande de prêt a été signée par la requérante, puis envoyée à la défenderesse au siège de cette dernière en Autriche. Aux termes du contrat, celui-ci a été conclu en Autriche.
21. La défenderesse exerce uniquement des activités sur le territoire autrichien, en conformité avec le droit autrichien. Le fait que le contrat a été conclu avec des ressortissants croates ne signifie pas que la défenderesse a exercé des activités en Croatie. La défenderesse soutient que le droit croate autorise activement les ressortissants croates à passer des contrats avec des prêteurs étrangers ( 7 ) et que le droit croate prévoit également que les contrats de crédit sont réputés avoir été
conclus au lieu où le fournisseur avait son siège ou son domicile au moment de la présentation de l’offre ( 8 ). La défenderesse relève que la requérante s’est rendue en Autriche et s’interroge sur le point de savoir pourquoi la loi du 14 juillet 2017 est dirigée contre la défenderesse et non contre la requérante.
22. La défenderesse fait valoir en outre que sa position est corroborée par trois arrêts rendus par des juridictions croates après l’entrée en vigueur de la loi du 14 juillet 2017 ( 9 ) et pose, dans ce contexte, la question de savoir si des États membres peuvent déroger aux règles de l’Union en matière de choix de la loi applicable à un contrat ( 10 ).
23. La libre prestation des services interdit tant les restrictions à cette liberté au sein de l’Union que les discriminations à l’encontre des prestataires de services qui ne sont pas établis dans l’État où la prestation est fournie ( 11 ). Les effets de la loi du 14 juillet 2017 sont plus importants pour les prestataires de services de crédit étrangers que pour les prêteurs établis en Croatie, ce qui se traduit par une discrimination indirecte ( 12 ), mais il y a également discrimination directe
du fait de la définition du « prêteur non autorisé » qui figure à l’article 2 de la loi du 14 juillet 2017. En vertu du droit de l’Union, un prestataire de services qui possède toutes les autorisations nécessaires dans l’État membre dans lequel il est établi est également autorisé à fournir des services dans d’autres États membres ( 13 ). La défenderesse soutient par ailleurs que la loi du 14 juillet 2017 rend la prestation de services en Croatie moins attrayante.
24. La défenderesse affirme que le législateur croate n’a expliqué à aucun moment pourquoi il considérait que le régime spécial applicable aux ressortissants étrangers en vertu de la loi du 14 juillet 2017 était justifié par la sauvegarde de l’ordre public, de la sécurité publique et de la santé publique en Croatie et que le principe de proportionnalité n’a pas non plus été respecté ( 14 ). La défenderesse allègue que la loi se traduit par une restriction de la concurrence.
25. Le gouvernement croate conteste la recevabilité des première à troisième questions. En ce qui concerne la première question, le gouvernement fait valoir que la Cour est compétente pour interpréter le droit de l’Union à partir de la date d’adhésion d’un État membre à l’Union européenne ( 15 ). Étant donné que la République de Croatie a adhéré à l’Union européenne le 1er juillet 2013 et que le contrat est nul dès la date de sa conclusion, à savoir le 5 janvier 2007, la Cour n’est pas compétente
pour répondre à la première question.
26. Le gouvernement croate fait également valoir que la première question est hypothétique. La juridiction de renvoi n’a pas encore déterminé que le contrat a été conclu en Croatie ( 16 ).
27. Sur le fond, le gouvernement croate soutient que la loi du 14 juillet 2017 a été adoptée dans le but légitime de protéger les nombreux ressortissants croates qui ont, au cours de la période ayant précédé l’adhésion de la République de Croatie à l’Union, conclu des contrats de crédit avec des prêteurs qui exerçaient leurs activités sans disposer des autorisations requises par les autorités croates.
28. Selon le gouvernement croate, les articles 53 et 63 TFUE peuvent uniquement être invoqués à l’appui d’activités légales et non à l’appui d’activités illégales, et aucun opérateur ne peut se prévaloir d’attentes légitimes en ce qui concerne ces dernières ( 17 ). Le gouvernement croate ajoute que la loi du 14 juillet 2017 a été adoptée après épuisement de toutes les autres voies de droit visant à protéger les ressortissants croates contre ces activités illégales.
29. Enfin, le gouvernement croate relève que la loi du 14 juillet 2017 ne prévoit qu’une « fausse » rétroactivité ou « quasi‑rétroactivité », étant donné qu’elle ne s’applique pas aux situations juridiques éteintes. Il n’existe pas de registre des prêteurs non autorisés en Croatie, si bien que la « quasi-rétroactivité » était la seule manière efficace de protéger les débiteurs. L’absence d’un registre des prêteurs étrangers signifie également qu’il est impossible de leur infliger des sanctions ou de
leur appliquer des mesures administratives d’une manière uniforme.
30. La Commission ne présente pas d’argumentation spécifique quant à la recevabilité de la première question. Toutefois, elle affirme que si la juridiction nationale devait décider que le droit autrichien est applicable, le droit de l’Union ne serait pas pertinent en l’espèce. La Commission répond par conséquent aux questions posées en se plaçant dans l’hypothèse où le contrat serait régi par le droit croate.
31. La Commission fait valoir que le droit de l’Union est applicable ratione temporis au litige au principal parce que, sauf dispositions contraires du traité d’adhésion d’un nouvel État membre, le droit de l’Union s’applique à compter de la date d’adhésion aux effets futurs des situations nées antérieurement à celle-ci ( 18 ). Le traité d’adhésion de la République de Croatie ne prévoit pas une telle dérogation ( 19 ). Étant donné que le contrat en cause n’avait pas épuisé ses effets au 1er juillet
2013, le litige au principal est régi par le droit de l’Union. La Commission s’appuie également, de manière plus générale, sur le fait que la loi du 14 juillet 2017 est entrée en vigueur après l’adhésion de la République de Croatie.
32. La Commission est d’avis que, dans le contexte de la libre prestation des services au titre de l’article 56 TFUE, la loi du 14 juillet 2017 constitue à la fois une mesure discriminatoire en raison de la nationalité ou de l’État membre d’établissement ( 20 ) et une mesure indistinctement applicable restreignant la libre prestation des services ( 21 ).
33. En ce qui concerne le premier aspect, la Commission fait valoir que les prêteurs non autorisés établis hors de Croatie sont traités de manière moins favorable que les prêteurs non autorisés établis en Croatie, parce que la législation applicable à la nullité de certains contrats conclus par des prêteurs non autorisés établis en Croatie n’a pas d’effet rétroactif ( 22 ) et que, en tout état de cause, selon la conclusion du Vrhovni sud (Cour suprême) du 12 avril 2016, la nullité ne peut viser que
les contrats de crédit conclus par des consommateurs.
34. En ce qui concerne le second aspect, la Commission soutient que le fait d’empêcher de futurs prêteurs disposant de toutes les autorisations nécessaires dans leurs États membres d’origine de fournir des services de crédit en Croatie est une violation manifeste du principe de reconnaissance mutuelle et une atteinte à la libre prestation des services ( 23 ). En outre, la nullité dès le jour de la conclusion d’un contrat de crédit et les obligations de restitution qui sont prévues par la loi du
14 juillet 2017 rendent moins attrayante, voire impossible, la prestation des services.
35. La Commission affirme que, si une disposition restrictive est discriminatoire, elle ne peut être justifiée que par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique, prévues à l’article 52 TFUE ( 24 ). Les raisons impérieuses d’intérêt général qui peuvent justifier une restriction des libertés garanties par les articles 49 et 56 TFUE ne sauraient justifier des restrictions discriminatoires ( 25 ).
36. La Commission a reconnu que, pour ce qui est des obstacles indistinctement applicables à la libre prestation des services, la Cour a admis un certain nombre de raisons impérieuses d’intérêt général susceptibles de justifier une restriction de la libre prestation des services, telles que la loyauté des transactions commerciales, la protection des consommateurs, la protection des destinataires des services contre les services fournis par des personnes non qualifiées, le maintien de la bonne
réputation du secteur financier national et le bon fonctionnement des services financiers ( 26 ). Toutefois, la loi du 14 juillet 2017 ne mentionne aucun de ces objectifs, elle ne les sauvegarde pas d’une manière cohérente et elle n’est pas proportionnée, eu égard, en particulier, à son large champ d’application qui vise tous les contrats de crédit comportant un élément d’extranéité. La rétroactivité de la loi du 14 juillet 2017 compromet également la sécurité juridique.
37. Enfin, la Commission admet que la Cour examine la mesure en cause, en principe, au regard de l’une seulement des deux libertés constituées par la libre prestation des services et la libre circulation des capitaux s’il s’avère que, dans les circonstances de l’espèce, l’une d’elles est tout à fait secondaire par rapport à l’autre et peut lui être rattachée ( 27 ). La Commission ajoute que, en tout état de cause, la loi du 14 juillet 2017 est également contraire à la libre circulation des capitaux
prévue à l’article 63, paragraphe 1, TFUE ( 28 ).
IV. Appréciation
A. Observations préliminaires
1. Recevabilité
38. Il convient de rejeter les arguments du gouvernement croate selon lesquels la décision de renvoi est hypothétique parce que la juridiction de renvoi n’a pas encore tranché le point de savoir si le contrat en cause est régi par la loi croate ou par la loi autrichienne. Il n’y a pas lieu d’écarter la présomption de pertinence ( 29 ).
39. Les faits au principal ne sont pas hypothétiques ( 30 ) et les règles du droit de l’Union dont l’interprétation est demandée par la juridiction de renvoi produisent déjà des effets en droit ( 31 ). Le fait que la Cour puisse être contrainte de se fonder sur des prémisses ( 32 ), telles que la prémisse selon laquelle la juridiction de renvoi décidera finalement que le contrat est régi par la loi croate, ne rend pas l’arrêt consultatif ( 33 ), notamment dans la mesure où le règlement no 593/2008
sur la loi applicable aux obligations contractuelles, invoqué par la défenderesse, est étroitement lié au règlement no 1215/2012, au sujet duquel la juridiction de renvoi a posé trois questions préjudicielles.
40. Apporter une réponse à la première question est dès lors nécessaire aux fins de la solution effective d’un litige ( 34 ), notamment dans la mesure où, selon une jurisprudence constante de la Cour, compte tenu de la séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour, « il ne saurait être exigé que, avant de saisir celle‑ci, la juridiction de renvoi procède à la totalité des constatations factuelles et des appréciations de droit qui lui incombent dans le cadre de sa mission
juridictionnelle. Il est en effet suffisant que l’objet du litige au principal ainsi que ses enjeux principaux pour l’ordre juridique [de l’Union] ressortent de la demande de décision préjudicielle afin de permettre aux États membres de présenter leurs observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice [de l’Union européenne] et de participer efficacement à la procédure devant cette dernière» ( 35 ).
41. La première question est dès lors recevable.
2. L’applicabilité ratione temporis du droit de l’Union
42. La Commission a rappelé (voir point 31 des présentes conclusions) la jurisprudence bien établie de la Cour selon laquelle, sauf dispositions contraires du traité d’adhésion d’un nouvel État membre, le droit de l’Union s’applique à compter de la date d’adhésion aux effets futurs des situations nées antérieurement à celle-ci ( 36 ). Il n’est pas apparu à l’audience que la position des débiteurs tels que la requérante avait été abordée lors des négociations avec la République de Croatie. Comme la
Commission le relève dans ses observations écrites, le traité d’adhésion de la République de Croatie ne prévoit pas une telle dérogation ( 37 ).
43. Le contrat en cause n’avait pas épuisé ses effets au 1er juillet 2013, si bien que le litige au principal est régi par le droit de l’Union. L’approche générale en matière d’applicabilité ratione temporis du droit de l’Union lorsqu’un État membre adhère à l’Union est fondée sur la persistance des effets juridiques. Les rapports de droit qui ne sont pas épuisés au moment de l’adhésion d’un État membre « doivent s’adapter au nouveau cadre juridique» ( 38 ). Il ne saurait être contesté que le
contrat en cause a des effets juridiques persistants, étant donné qu’il est toujours garanti par une hypothèque dont la requérante demande la levée au principal et que le contrat lui-même stipule qu’il prend fin le 31 octobre 2021. La Cour a jugé que le défaut de paiement, après l’adhésion, d’une créance au titre d’un contrat conclu avant l’adhésion, était régi par le droit de l’Union ( 39 ).
44. Le droit de l’Union est dès lors applicable ratione temporis au litige au principal.
3. Quelles sont les dispositions pertinentes du droit de l’Union ?
45. Il est de jurisprudence constante que, lorsqu’un domaine a fait l’objet d’une harmonisation exhaustive au niveau de l’Union, toute mesure nationale y relative doit être appréciée au regard des dispositions de cette mesure d’harmonisation et non pas de celles du droit primaire ( 40 ), telles que l’article 56 TFUE, relatif à la libre prestation des services, et l’article 63 TFUE, relatif à la libre circulation des capitaux.
46. La directive 2013/36, qui est entrée en vigueur le 17 juillet 2013, garantit, sous certaines conditions, les prestations transfrontalières de services de crédit ( 41 ). Toutefois, le contrat en cause a été signé le 5 janvier 2007, date à laquelle les fonds ont été versés et, en tout état de cause, la directive 2013/36 n’est pas une mesure d’harmonisation exhaustive.
47. La Cour a jugé récemment qu’il découle « du considérant 15 de [la directive 2013/36] que celle-ci vise à atteindre le degré d’harmonisation nécessaire et suffisant pour assurer la reconnaissance mutuelle des agréments et des systèmes de surveillance prudentielle, en permettant la délivrance d’un agrément unique valable dans toute l’Union et l’application du principe de la surveillance prudentielle par l’État membre d’origine» ( 42 ).
48. Dans ces conditions, le litige au principal doit être tranché en application du droit primaire de l’Union et, plus spécifiquement, de l’article 56 TFUE, relatif à la libre prestation des services, et de l’article 63 TFUE, relatif à l’exclusion des restrictions à libre circulation des capitaux ( 43 ).
49. Selon une jurisprudence constante, pour déterminer si une réglementation nationale relève de l’une ou de l’autre des libertés fondamentales garanties par le traité CE, il convient de prendre en considération l’objet de la réglementation en cause au principal ( 44 ).
50. La Cour a jugé que, « au regard des règles du traité en matière de libre prestation des services, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que l’activité d’un établissement de crédit consistant à octroyer des crédits constitue un service au sens de l’article 56 TFUE» ( 45 ). Une législation nationale « dont l’objet porte principalement sur la prestation de services financiers relève des dispositions du traité relatives à la libre prestation de services, alors même qu’elle pourrait
entraîner ou impliquer des mouvements de capitaux» ( 46 ). En revanche, « relèvent du champ d’application de l’article 64, paragraphe 1, TFUE, les mesures nationales dont l’objet porte, à tout le moins, principalement sur les mouvements de capitaux» ( 47 ).
51. Rien n’indique, dans la loi du 14 juillet 2017, qu’elle a pour but de réglementer les marchés de capitaux. Au contraire, elle vise les relations entre les « débiteurs et prêteurs non autorisés » et se limite aux « contrats de crédit », sans s’appliquer de manière plus générale à l’ensemble du marché des capitaux. Seuls les contrats de crédit doivent être déclarés nuls et non avenus.
52. La loi du 14 juillet 2017 ayant pour effet d’entraver l’accès des sociétés établies hors de Croatie au marché croate de l’octroi de crédits, elle affecte de manière prépondérante la libre prestation des services et il n’est pas possible de soutenir que cet effet est purement secondaire par rapport à toute entrave à la libre circulation des capitaux ( 48 ). Les effets restrictifs dudit régime sur la libre circulation des capitaux ne sont qu’une conséquence inéluctable de la restriction imposée à
l’égard des prestations de services et il n’y a pas lieu d’examiner la compatibilité de ce régime avec l’article 63 TFUE ( 49 ).
53. Il convient de rappeler que, en tout état de cause, les restrictions à la libre circulation des capitaux sont tout autant subordonnées au principe de proportionnalité ( 50 ) que ne le sont les restrictions à la libre prestation des services. Comme l’a relevé l’avocat général Kokott dans ses conclusions dans l’affaire Trustees of the P Panayi Accumulation & Maintenance Settlements, dans des situations purement intracommunautaires, telles que la situation en cause dans l’affaire au principal, la
question du rapport entre la liberté d’établissement et la libre circulation des capitaux, ou encore la libre prestation des services, peut rester ouverte, étant donné que les critères de ces libertés fondamentales sont largement les mêmes ( 51 ).
54. Par conséquent, si la Cour ne souscrivait pas à cet aspect de mon analyse et jugeait que le litige au principal relève de la libre circulation des capitaux et non de la libre prestation des services, la loi du 14 juillet 2017 n’en resterait pas moins incompatible avec le droit de l’Union dans la mesure où elle ne respecte pas le principe de proportionnalité (voir mon analyse aux points 66 à 69 ci-dessous).
55. Enfin, c’est à tort que la défenderesse soutient qu’elle s’est bornée à fournir des services de crédit en Autriche, en laissant ainsi entendre que l’élément transfrontalier, qui est nécessaire pour que l’article 56 TFUE puisse être applicable, était absent du litige au principal.
56. Il est constant que le prêt a été obtenu par le truchement d’un intermédiaire résidant en Croatie et que le prêt en cause était garanti par une hypothèque sur un bien immobilier situé en Croatie, pays dans lequel réside la débitrice. Cela est suffisant compte tenu du fait que, selon une jurisprudence constante de la Cour, l’applicabilité de l’article 56 TFUE à une situation donnée « exige la présence d’un élément d’extranéité» ( 52 ), au sens où l’article 56 TFUE interdit les restrictions à la
libre prestation de services à l’intérieur de l’Union à l’égard des ressortissants des États membres établis dans un État membre autre que celui du destinataire de la prestation, et que tous les éléments de la situation ne se cantonnent pas à l’intérieur d’un seul État membre ( 53 ).
B. Sur le fond
57. La notion de restriction s’étend aux mesures prises par un État membre qui, quoique indistinctement applicables, affectent l’accès au marché en ce qui concerne les entreprises d’autres États membres et entravent ainsi le commerce au sein de l’Union ( 54 ).
58. La loi du 14 juillet 2017 constitue une restriction parce que les contrats conclus sans autorisation de la Banque nationale de Croatie sont déclarés nuls. Les parties se voient interdire l’exécution des clauses d’un contrat de service concernant des ressortissants d’un État membre (Autriche) qui sont établis dans un État membre (Autriche) autre que celui du destinataire de la prestation (Croatie).
59. Toutefois, la loi du 14 juillet 2017 est discriminatoire à l’encontre des entreprises établies hors de Croatie qui souhaitent fournir des services de crédit dans cet État membre, et ce pour deux raisons.
60. En premier lieu, la définition du « prêteur non autorisé » qui figure à l’article 2 de la loi du 14 juillet 2017 vise « toute personne morale […] dont le siège statutaire est situé hors de la République de Croatie ». Cela implique que la loi n’est pas applicable aux prêteurs établis en Croatie.
61. En second lieu, comme le relève la Commission (voir point 33 des présentes conclusions), il semble que les prêteurs non autorisés établis hors de Croatie soit traités de manière moins favorable que les prêteurs non autorisés établis en Croatie, du fait de l’absence d’effet rétroactif de la législation applicable à la nullité de certains contrats conclus par des prêteurs non autorisés établis en Croatie ( 55 ) et compte tenu de la conclusion du Vrhovni sud (Cour suprême) du 12 avril 2016, selon
laquelle la nullité ne peut viser que les contrats de crédit conclus par des consommateurs.
62. Par conséquent, dans la mesure où la loi du 14 juillet 2017 peut être justifiée, elle ne peut l’être que par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique, prévues à l’article 52, paragraphe 1, TFUE ( 56 ), à l’exclusion d’un certain nombre de raisons impérieuses d’intérêt général susceptibles de justifier des restrictions indistinctement applicables de la libre prestation des services, telles que la loyauté des transactions commerciales, la protection des consommateurs,
la protection des destinataires des services contre les services fournis par des personnes non qualifiées, le maintien de la bonne réputation du secteur financier national et le bon fonctionnement des services financiers ( 57 ) (voir observations de la Commission citées au point 36 des présentes conclusions).
63. À l’audience, le gouvernement croate a invoqué la protection de l’ordre public, la préservation de la réputation du secteur financier et de son bon fonctionnement, la protection des droits fondamentaux des ressortissants croates et, en particulier, de la partie contractante la plus faible, ainsi que la protection des consommateurs. Il a également mentionné le fait que, au cours de la période comprise entre 2000 et 2010, les ressortissants croates avaient contracté 3000 crédits auprès de prêteurs
non autorisés, d’un montant de l’ordre de 360 millions d’euros, mais que des données précises n’étaient pas disponibles en raison de la nature illégale des activités. Ces affirmations visaient à démontrer que l’activité influait sur le fonctionnement des services financiers en Croatie et à prouver la création d’un système parallèle de crédits illicites qui portait préjudice au système financier de l’État et à l’ordre public.
64. Le gouvernement croate a ajouté que cela affectait le sort de plusieurs milliers de ressortissants croates et que la loi du 14 juillet 2017 avait été adoptée en dernier recours ; le gouvernement croate a également indiqué que des débiteurs potentiels à la solvabilité douteuse avaient été contactés dans le but d’acquérir leurs biens, comme cela est démontré par le fait que, sur l’Île de Rab, 220 propriétés avaient changé de mains de cette manière et que 344 procédures avaient été engagées.
65. Comme je l’ai déjà mentionné (voir point 62 des présentes conclusions), des raisons impérieuses d’intérêt général ne peuvent être invoquées à l’appui de restrictions discriminatoires de la libre prestation des services. Les considérations évoquées par le gouvernement croate ne suffisant pas non plus à justifier la loi du 14 juillet 2017 conformément à l’article 52, paragraphe 1, TFUE, que ce soit au titre de l’ordre public, de la sécurité publique ou de la santé publique, eu égard au large champ
d’application de la loi.
66. Aucun de ces éléments n’est suffisant pour constituer une raison politique légitime de mettre en place une loi qui prévoit la nullité de tous les contrats de crédit présentant des aspects internationaux et qui s’applique rétroactivement aux contrats conclus à une date pouvant remonter à 17 ans. Les difficultés alléguées de manière générale et répétée dans les observations écrites du gouvernement croate (voir point 27 des présentes conclusions) n’ont pas été suffisamment étayées à l’audience pour
prouver qu’elles sont un motif de dérogation légitime lorsqu’elles sont mises en balance avec l’échelle de l’entrave à la libre prestation des services qui résulte de la loi du 14 juillet 2017.
67. En outre, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que des exigences spécifiques en matière de qualifications ou d’autorisations qui sont imposées par l’État membre dans lequel les services sont fournis doivent être objectivement nécessaires et ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs ( 58 ).
68. Du fait de son caractère général, la loi du 14 juillet 2017 va manifestement au-delà de ce qui était nécessaire pour atteindre un éventuel but légitime qu’elle aurait poursuivi.
69. Il n’aurait pu être justifié de réduire le préjudice (d’ordre public) au moyen d’une règle discriminatoire et générale déclarant nuls et non avenus des contrats de crédit présentant des aspects internationaux qui existent parfois depuis 17 ans (et qui ont produit leurs effets pendant de nombreuses années, en dépit de l’absence d’autorisation par la Banque nationale de Croatie) que si le gouvernement croate avait présenté des éléments de preuve convaincants d’un problème urgent nécessitant des
mesures extrêmes. Selon une jurisprudence constante, « c’est à l’État membre cherchant à se prévaloir d’un objectif propre à légitimer l’entrave à la liberté de prestation des services qu’il incombe de fournir à la juridiction appelée à se prononcer sur cette question tous les éléments de nature à permettre à celle-ci de s’assurer que ladite mesure satisfait bien aux exigences découlant du principe de proportionnalité» ( 59 ). De tels éléments n’ont pas été présentés.
70. En outre, lorsque des États membres tentent de justifier une réglementation restreignant la libre prestation des services, ils doivent respecter les principes généraux du droit et, notamment, la sécurité juridique ( 60 ). Selon la formule traditionnelle employée par la Cour dans l’arrêt Fedesa, « si, en règle générale, le principe de la sécurité des situations juridiques s’oppose à ce que la portée dans le temps d’un acte communautaire voie son point de départ fixé à une date antérieure à sa
publication, il peut en être autrement, à titre exceptionnel, lorsque le but à atteindre l’exige et lorsque la confiance légitime des intéressés est dûment respectée» ( 61 ).
71. Le contexte du litige au principal est celui du non-respect de la sécurité juridique par l’État membre dans le cadre de la justification d’une restriction de la libre circulation, mais cela est dénué de pertinence aux fins de l’application de la règle matérielle ( 62 ). Il ne ressort pas du dossier que la confiance légitime de la défenderesse ait été prise en considération, bien que le contrat en cause ait été conclu dix ans avant la décision du législateur croate – qui s’est traduite par la loi
du 14 juillet 2017 – de le déclarer nul et non avenu avec effet rétroactif.
72. Enfin, il convient de rappeler que le droit de l’Union protège effectivement les débiteurs qui ont été traités de manière inéquitable dans le contexte de contrats de crédit à la consommation, y compris ceux qui comportent un élément d’extranéité. Cela est illustré par l’abondante jurisprudence de la Cour en matière d’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ( 63 ) dans un tel contexte
factuel ( 64 ). Si de telles circonstances survenaient en Croatie, cette jurisprudence serait de toute évidence applicable ( 65 ).
V. Conclusion
73. Je propose donc à la Cour de répondre comme suit à la première question posée par l’Općinski sud u Rijeci (tribunal municipal de Rijeka, Croatie) :
Dans les circonstances de l’affaire au principal, l’article 56 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale en vertu de laquelle les contrats de crédit et les autres actes juridiques induits par un contrat de crédit sont nuls, à titre rétroactif, dès la date de leur conclusion, lorsqu’ils ont été conclus avec un prêteur établi dans un État membre autre que celui du destinataire de la prestation, bien que le prêteur n’ait pas été en possession de toutes les
autorisations requises, délivrées par les autorités compétentes de cet État membre, à la date de la conclusion du contrat.
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( 1 ) Langue originale : l’anglais.
( 2 ) JO 2012, L 112, p. 21.
( 3 ) JO 2012, L 351, p. 1.
( 4 ) Narodne novine, no 72/2017.
( 5 ) Selon les observations écrites de la Commission, qui n’ont pas été contestées à cet égard.
( 6 ) Ibid.
( 7 ) La défenderesse renvoie, à cet égard, à l’article 28, paragraphe 3, du Zakon o deviznom poslovanju (loi sur les opérations de change).
( 8 ) La défenderesse renvoie, à cet égard, à l’article 252, paragraphe 2, du Zakon o obveznim odnosima (loi relative aux obligations, Narodne novine, nos 35/2005, 41/2008, 125/2011, 78/2015).
( 9 ) La défenderesse renvoie, à cet égard, à l’arrêt du 26 septembre 2017 rendu par le Županijski sud u Zagrebu (tribunal de comitat de Zagreb) dans l’affaire Gž-3798/15 et aux arrêts rendus le 18 octobre 2017 dans l’affaire Gž-1811/17 et le 30 novembre 2017 dans l’affaire Gž-2459/2017 par le Županijski sud u Splitu (tribunal de comitat de Split), ainsi qu’à divers jugements rendus en première instance, à savoir les jugements rendus par l’Općinski građanski sud u Zagrebu (tribunal municipal civil
de Zagreb) dans les affaires P-7448/14, P-123/17, P-4873/13 et P‑1677/16, le jugement rendu par l’Općinski građanski sud u Zagrebu, Stalna služba u Sesvetama (tribunal municipal civil de Zagreb, antenne permanente de Sesvete), dans l’affaire P-2334/2015 et les jugements rendus par l’Općinski građanski sud u Varaždinu (tribunal municipal civil de Varaždin) dans les affaires P-137/16 et P-1095/14.
( 10 ) La défenderesse renvoie au règlement (CE) no 593/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I) (JO 2008, L 177, p. 6).
( 11 ) La défenderesse renvoie aux arrêts du 3 décembre 1974, van Binsbergen (33/74, EU:C:1974:131, point 22), et du 25 juillet 1991, Collectieve Antennevoorziening Gouda (C‑288/89, EU:C:1991:323, point 10).
( 12 ) La défenderesse renvoie à l’arrêt du 3 février 1982, Seco et Desquenne & Giral (62/81 et 63/81, EU:C:1982:34).
( 13 ) La défenderesse renvoie aux arrêts du 25 juillet 1991, Säger (C‑76/90, EU:C:1991:331, point 12) ; du 26 octobre 1999, Eurowings Luftverkehr (C‑294/97, EU:C:1999:524, point 33), et du 20 octobre 2005, Commission/France (C‑264/03, EU:C:2005:620, point 66).
( 14 ) La défenderesse renvoie à l’arrêt du 13 mai 2003, Müller-Fauré et van Riet (C‑385/99, EU:C:2003:270, point 68).
( 15 ) Le gouvernement croate invoque l’ordonnance du 5 novembre 2014, VG Vodoopskrba (C‑254/14, non publiée, EU:C:2014:2354, point 10 et jurisprudence citée).
( 16 ) Le gouvernement croate renvoie à l’article 1er de la loi du 14 juillet 2017 et à l’arrêt du 10 décembre 2002, British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, EU:C:2002:741, point 35 et jurisprudence citée).
( 17 ) Le gouvernement croate renvoie à l’arrêt du 30 juin 2005, Branco/Commission, (T‑347/03, EU:T:2005:265, point 102).
( 18 ) La Commission renvoie aux arrêts du 2 octobre 1997, Saldanha et MTS (C‑122/96, EU:C:1997:458, point 14) ; du 29 avril 1999, Ciola (C‑224/97, EU:C:1999:212, points 27 à 34), et du 29 janvier 2002, Pokrzeptowicz-Meyer (C‑162/00, EU:C:2002:57, point 50).
( 19 ) Voir note 2 des présentes conclusions.
( 20 ) Dans ce contexte, la Commission renvoie à l’arrêt du 25 juillet 1991, Collectieve Antennevoorziening Gouda (C‑288/89, EU:C:1991:323, point 10).
( 21 ) Dans ce contexte, la Commission renvoie aux arrêts du 10 mai 1995, Alpine Investments (C‑384/93, EU:C:1995:126, points 28 et 34) ; du 15 juin 2006, Commission/France (C‑255/04, EU:C:2006:401, point 37) ; du 25 juin 2009, Commission/Autriche (C‑356/08, non publié, EU:C:2009:401, point 39) ; du 12 juillet 2012, HIT et HIT LARIX (C‑176/11, EU:C:2012:454, point 16), et du 18 janvier 2018, Wind 1014 et Daell (C‑249/15, EU:C:2018:21, point 21).
( 22 ) La Commission renvoie à l’article 19 j de la loi sur le crédit à la consommation (Narodne novine, nos 75/2009, 112/2012, 143/2013, 147/2013, 9/2015, 78/2015, 102/2015 et 52/2016), inséré par la loi modifiant et complétant la loi sur le crédit à la consommation (Narodne novine, no 102/2015).
( 23 ) La Commission renvoie à l’article 33 et à l’annexe 1 de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO 2013, L 176, p. 338), ainsi qu’aux arrêts du 9 mars 2000, Commission/Belgique (C‑355/98, EU:C:2000:113, points 37
et 38), et du 25 juillet 1991, Säger (C‑76/90, EU:C:1991:331, point 14).
( 24 ) La Commission renvoie aux arrêts du 23 septembre 2003, Ospelt et Schlössle Weissenberg (C‑452/01, EU:C:2003:493, point 34), et du 28 janvier 2016, Laezza (C‑375/14, EU:C:2016:60, points 25 et 26).
( 25 ) Arrêt du 28 janvier 2016, Laezza (C‑375/14, EU:C:2016:60, point 25).
( 26 ) La Commission renvoie aux arrêts du 25 juillet 1991, Collectieve Antennevoorziening Gouda (C‑288/89, EU:C:1991:323, point 14) ; du 10 mai 1995, Alpine Investments (C‑384/93, EU:C:1995:126, point 44) ; du 9 juillet 1997, De Agostini et TV-Shop (C‑34/95 à C‑36/95, EU:C:1997:344, point 53) ; du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti (C‑451/03, EU:C:2006:208, point 38), et du 18 juillet 2013, Citroën Belux (C‑265/12, EU:C:2013:498, points 38 à 40), ainsi qu’à l’arrêt de la Cour
AELE du 16 mai 2017, Netfonds (E‑08/16, EFTA Court Report 2017, p. 163, point 113).
( 27 ) Arrêt du 3 octobre 2006, Fidium Finanz (C‑452/04, EU:C:2006:631, points 30 et 34).
( 28 ) La Commission renvoie notamment aux arrêts du 16 mars 1999, Trummer et Mayer (C‑222/97, EU:C:1999:143, point 23) ; du 26 septembre 2000, Commission/Belgique (C‑478/98, EU:C:2000:497, point 18) ; du 4 juin 2002, Commission/France (C‑483/99, EU:C:2002:327, point 40) ; du 4 juin 2002, Commission/Portugal (C‑367/98, EU:C:2002:326, points 44 et 45) ; du 13 mai 2003, Commission/Royaume-Uni (C‑98/01, EU:C:2003:273, point 43) ; du 28 septembre 2006, Commission/Pays-Bas (C‑282/04 et C‑283/04,
EU:C:2006:608, point 18) ; du 8 juillet 2010, Commission/Portugal (C‑171/08, EU:C:2010:412, point 48) ; du 1er juillet 2010, Dijkman et Dijkman-Lavaleije (C‑233/09, EU:C:2010:397, point 31) ; du 26 avril 2012, van Putten (C‑578/10 à C‑580/10, EU:C:2012:246, points 32 à 36) ; du 8 mai 2013, Libert e.a. (C‑197/11 et C‑203/11, EU:C:2013:288, point 44) ; du 3 octobre 2013, Itelcar (C‑282/12, EU:C:2013:629, point 14) ; du 22 octobre 2013, Essent e.a. (C‑105/12 à C‑107/12, EU:C:2013:677, point 39 et
jurisprudence citée), et du 25 janvier 2017, Festersen (C‑370/05, EU:C:2007:59, point 24).
( 29 ) Voir, par exemple, arrêt du 27 octobre 2016, Audace e.a. (C‑114/15, EU:C:2016:813, point 34).
( 30 ) Voir arrêt du 28 septembre 2006, Gasparini e.a. (C‑467/04, EU:C:2006:610, points 44 et 45).
( 31 ) Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire RO (C‑327/18 PPU, EU:C:2018:644, point 34).
( 32 ) Conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire RO (C‑327/18 PPU, EU:C:2018:644, point 36).
( 33 ) Voir point 32 de mes conclusions dans l’affaire Minister for Justice and Equality (Défaillances du système judiciaire) (C‑216/18 PPU, EU:C:2018:517), qui renvoie aux arrêts du 8 septembre 2010, Winner Wetten (C‑409/06, EU:C:2010:503, point 38), et du 27 février 2014, Pohotovosť (C‑470/12, EU:C:2014:101, points 28 et 29).
( 34 ) Arrêt du 8 septembre 2010, Winner Wetten (C‑409/06, EU:C:2010:503, point 38 et jurisprudence citée).
( 35 ) Arrêt du 8 septembre 2010, Winner Wetten (C‑409/06, EU:C:2010:503, point 39 et jurisprudence citée). Voir aussi, récemment, arrêt du 20 septembre 2018, Danko et Danková (C‑448/17, EU:C:2018:745, points 55 à 58), dans lequel une question posée a été jugée recevable par la Cour en dépit du fait qu’il avait été soutenu que la juridiction de renvoi ne se prononcerait pas sur le caractère abusif de la clause contractuelle pertinente si la qualité pour agir devait être reconnue à une organisation
de protection des consommateurs.
( 36 ) Mise en italique par mes soins. Comme je l’ai indiqué précédemment, la Commission renvoie aux arrêts du 2 octobre 1997, Saldanha et MTS (C‑122/96, EU:C:1997:458, point 14) ; du 29 avril 1999, Ciola (C‑224/97, EU:C:1999:212, points 27 à 34), et du 29 janvier 2002, Pokrzeptowicz-Meyer (C‑162/00, EU:C:2002:57, point 50).
( 37 ) Voir point 31 des présentes conclusions.
( 38 ) Conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Nemec (C‑256/15, EU:C:2016:619, point 40). Voir essentiellement, à cet égard, arrêts du 2 octobre 1997, Saldanha et MTS (C‑122/96, EU:C:1997:458) ; du 14 juin 2007, Telefónica O2 Czech Republic (C‑64/06, EU:C:2007:348) ; du 12 novembre 2009, Elektrownia Pątnów II (C‑441/08, EU:C:2009:698) ; du 15 avril 2010, CIBA (C‑96/08, EU:C:2010:185) ; du 14 février 2012, Toshiba Corporation e.a. (C‑17/10, EU:C:2012:72), et du 12 septembre 2013, Kuso
(C‑614/11, EU:C:2013:544). Je laisse de côté l’arrêt de la grande chambre de la Cour du 10 janvier 2006, Ynos (C‑302/04, EU:C:2006:9), étant donné que les faits pertinents étaient postérieurs au rapprochement de l’ordre juridique hongrois avec la directive applicable, mais antérieurs à l’adhésion de la Hongrie à l’Union le 1er mai 2004.
( 39 ) Voir arrêt du 15 décembre 2016, Nemec (C‑256/15, EU:C:2016:954, points 21 à 27 et notamment point 23).
( 40 ) Arrêt du 22 juin 2017, E.ON Biofor Sverige (C‑549/15, EU:C:2017:490, point 76 et jurisprudence citée).
( 41 ) Article 33 et annexe 1 de la directive 2013/36.
( 42 ) Mise en italique par mes soins. Voir arrêt du 13 septembre 2018, Buccioni (C‑594/16, EU:C:2018:717, point 23).
( 43 ) Il y a lieu de relever qu’à la date du contrat, le 5 janvier 2007, la République de Croatie était tenue, aux termes de l’article 57, paragraphe 1, de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Croatie, d’autre part (JO 2005, L 26, p. 3), de s’abstenir d’adopter une mesure ou d’engager une action « susceptible de rendre les conditions de prestation de services par des ressortissants ou des sociétés de la
Communauté ou de la Croatie établis sur le territoire d’une partie [à l’accord] autre que celle du destinataire des services, nettement plus restrictives qu’elles ne l’étaient le jour précédant celui de l’entrée en vigueur [de l’accord] », à savoir le 1er février 2005 (http://europa.eu/rapid/press-release_IP-05-122_fr.htm?locale=FR). En vertu de l’article 57, paragraphe 2, les désaccords relatifs à l’article 57, paragraphe 1, devaient être réglés par voie de consultations entre les parties.
( 44 ) Voir, récemment, point 17 des conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Fidelity Funds (C‑480/16, EU:C:2017:1015), qui renvoie aux arrêts du 1er juillet 2010, Dijkman et Dijkman-Lavaleije (C‑233/09, EU:C:2010:397, point 26), et du 21 mai 2015, Wagner-Raith (C‑560/13, EU:C:2015:347, point 31).
( 45 ) Arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România (C‑602/10, EU:C:2012:443, point 72 et jurisprudence citée).
( 46 ) Arrêt du 21 mai 2015, Wagner-Raith (C‑560/13, EU:C:2015:347, point 32).
( 47 ) Arrêt du 21 mai 2015, Wagner-Raith (C‑560/13, EU:C:2015:347, point 34).
( 48 ) Voir arrêt du 26 mai 2016, NN (L) International (C‑48/15, EU:C:2016:356, points 39 à 41).
( 49 ) Voir, par analogie, arrêt du 3 octobre 2006, Fidium Finanz (C‑452/04, EU:C:2006:631, point 49).
( 50 ) Voir, par exemple, arrêt du 3 octobre 2013, Itelcar (C‑282/12, EU:C:2013:629, point 32).
( 51 ) Conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Trustees of the P Panayi Accumulation & Maintenance Settlements (C‑646/15, EU:C:2016:1000, point 41). L’avocat général renvoie à ses conclusions dans l’affaire SGI (C‑311/08, EU:C:2009:545, points 37 à 38), dans laquelle la Cour a jugé que seule la liberté d’établissement était applicable – arrêt du 21 janvier 2010, SGI (C‑311/08, EU:C:2010:26, point 36).
( 52 ) Arrêt du 13 juin 2017, The Gibraltar Betting and Gaming Association (C‑591/15, EU:C:2017:449, point 46).
( 53 ) Mise en italique par mes soins. Arrêt du 13 juin 2017, The Gibraltar Betting and Gaming Association (C‑591/15, EU:C:2017:449, points 32 et 33 ainsi que jurisprudence citée).
( 54 ) Point 56 des conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Laezza (C‑375/14, EU:C:2015:788), qui renvoie aux arrêts du 12 décembre 2013, SOA Nazionale Costruttori (C‑327/12, EU:C:2013:827, point 45 et jurisprudence citée), ainsi que du 15 octobre 2015, Grupo Itevelesa e.a. (C‑168/14, EU:C:2015:685, point 67).
( 55 ) La Commission se réfère à l’article 19 j de la loi sur le crédit à la consommation (Narodne novine, nos 75/2009, 112/2012, 143/2013, 147/2013, 9/2015, 78/2015, 102/2015 et 52/2016), inséré par la loi modifiant et complétant la loi sur le crédit à la consommation (Narodne novine, no 102/2015).
( 56 ) Arrêt du 28 janvier 2016, Laezza (C‑375/14, EU:C:2016:60, point 26).
( 57 ) La Commission renvoie aux arrêts du 25 juillet 1991, Collectieve Antennevoorziening Gouda (C‑288/89, EU:C:1991:323, point 14) ; du 10 mai 1995, Alpine Investments (C‑384/93, EU:C:1995:126, point 44) ; du 9 juillet 1997, De Agostini et TV-Shop (C‑34/95 à C‑36/95, EU:C:1997:344, point 53) ; du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti (C‑451/03, EU:C:2006:208, point 38), et du 18 juillet 2013, Citroën Belux (C‑265/12, EU:C:2013:498, points 38 à 40), ainsi qu’à l’arrêt de la Cour
AELE du 16 mai 2017, Netfonds (E-08/16, EFTA Court Report 2017, p. 163, point 113).
( 58 ) Arrêt du 25 juillet 1991, Säger (C‑76/90, EU:C:1991:331, point 15).
( 59 ) Arrêt du 30 avril 2014, Pfleger e.a. (C‑390/12, EU:C:2014:281, point 50 et jurisprudence citée).
( 60 ) Voir, par exemple, arrêt du 20 décembre 2017, Global Starnet (C‑322/16, EU:C:2017:985, points 44 et 45 ainsi que jurisprudence citée).
( 61 ) Arrêt du 13 novembre 1990, Fedesa e.a. (C‑331/88, EU:C:1990:391, point 45).
( 62 ) Voir, par exemple, arrêt du 20 septembre 2018, Motter (C‑466/17, EU:C:2018:758, point 52).
( 63 ) JO 1993, L 95, p. 29.
( 64 ) Voir par exemple, récemment, arrêts du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a. (C‑186/16, EU:C:2017:703) ; du 20 septembre 2018, OTP Bank et OTP Faktoring (C‑51/17, EU:C:2018:750), et du 31 mai 2018, Sziber (C‑483/16, EU:C:2018:367).
( 65 ) Voir aussi, par exemple, directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66) et arrêt du 12 juillet 2012, SC Volksbank România (C‑602/10, EU:C:2012:443).