ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)
15 mars 2018 (*)
« Manquement d’État – Article 49 TFUE – Liberté d’établissement – Notaires – Condition de nationalité – Article 51 TFUE – Participation à l’exercice de l’autorité publique »
Dans l’affaire C‑575/16,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 14 novembre 2016,
Commission européenne, représentée par M. H. Støvlbæk et M^me K. Walkerová, en qualité d’agents,
partie requérante,
contre
République tchèque, représentée par MM. M. Smolek, T. Müller et J. Vláčil ainsi que par M^me A. Kasalická, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LA COUR (sixième chambre),
composée de M. C. G. Fernlund, président de chambre, MM. A. Arabadjiev (rapporteur) et E. Regan, juges,
avocat général : M. M. Wathelet,
greffier : M. M. Aleksejev, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 novembre 2017,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en imposant une condition de nationalité pour l’exercice de la profession de notaire, la République tchèque a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 TFUE.
Le droit tchèque
L’organisation générale de la profession de notaire en République tchèque
2 L’organisation du notariat est régie, dans l’ordre juridique tchèque, par le Zákon č. 358/1992 Sb., o notářích a jejich činnosti (notářský řád) [loi n^o 358/1992 relative aux notaires et leurs activités (code notarial), ci-après le « code notarial »].
3 L’article 2 du code notarial prévoit que la fonction du notaire consiste en l’authentification, en l’attestation de faits et de déclarations juridiquement pertinents ainsi qu’en la conservation de documents et de liquidités en dépôt. Cette disposition prévoit également que le notaire exerce son activité de manière impartiale.
4 Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de ce code, le notaire peut fournir des services juridiques en relation avec son activité. Ces services consistent à fournir des conseils juridiques, à représenter des personnes notamment dans le cadre de certaines procédures, à rédiger des actes sous seing privé et à élaborer des analyses juridiques.
5 En vertu de l’article 3, paragraphe 2, dudit code, le notaire peut être chargé d’une mission de gestion de fortune et agir en tant que représentant dans le cadre de cette activité.
6 Selon l’article 3, paragraphe 3, de ce même code, le notaire est habilité à exercer, dans une procédure d’insolvabilité, les fonctions d’« administrateur d’insolvabilité », d’« administrateur d’insolvabilité provisoire », de « représentant d’un administrateur d’insolvabilité », d’« administrateur d’insolvabilité ad hoc » et d’« administrateur d’insolvabilité spécial ».
7 Aux termes de l’article 4 du code notarial, le notaire peut également procéder à des inscriptions au registre des hypothèques, au registre public ou sur une liste publique.
8 L’article 5, paragraphe 1, de ce code prévoit que le notaire exerce son activité à titre onéreux et, sauf exceptions, de manière indépendante.
9 Conformément à l’article 6 dudit code, les actes notariés et leurs copies, les extraits des actes notariés et les certificats d’authentification établis conformément aux conditions prévues à ce même code sont des actes authentiques.
10 Il résulte de l’article 7, paragraphe 1, du code notarial que seul un ressortissant de la République tchèque peut être nommé notaire dans cet État membre.
11 En vertu de l’article 8, paragraphe 1, de ce code, le notaire est nommé à son office par le ministre de la Justice, sur proposition de la Chambre notariale de la République tchèque.
12 Aux termes de l’article 9, paragraphe 1, sous d), dudit code, afin de pouvoir exercer son activité, le notaire doit souscrire un contrat d’assurance de la responsabilité couvrant les préjudices qui pourraient survenir dans le cadre de cette activité.
13 Dans ce contexte, l’article 57, paragraphe 1, de ce même code prévoit que le notaire est responsable à l’égard d’un demandeur, d’un client ou d’une partie des dommages qu’il cause à ces personnes dans l’exercice de l’activité notariale.
14 En vertu de l’article 57, paragraphe 2, du code notarial, le notaire est exonéré de la responsabilité visée au paragraphe 1 de cet article s’il démontre qu’il ne pouvait éviter un tel dommage, même en mettant tous les efforts que l’on était en droit d’exiger de sa part. Aux termes de l’article 57, paragraphe 3, dudit code, une telle exonération est sans préjudice de l’obligation de l’État de répondre, conformément à une législation spécifique applicable, des dommages qu’il cause.
Les activités notariales en République tchèque
15 L’authentification des actes par les notaires dans l’ordre juridique tchèque est régie par les articles 62 à 71c du code notarial. Aux termes de l’article 63, paragraphe 1, sous g), de ce code, un acte notarié doit contenir l’indication qu’il a été lu et approuvé par les parties.
16 Un acte notarié peut, conformément aux articles 71a et 71b dudit code, contenir, au titre de formule exécutoire, la mention du consentement de l’une des parties de rendre exécutoire l’obligation inscrite dans cet acte.
17 Le notaire atteste, dans les conditions prévues aux articles 72 à 81 de ce même code, de l’authenticité des faits et des déclarations qui pourraient fonder la mise en œuvre de droits ou la démonstration de leur existence ou qui pourraient entraîner des conséquences juridiques.
18 Les notaires sont habilités à recueillir, dans l’ordre juridique tchèque, les protêts de lettres de change, y compris, le cas échéant, de chèques. Les protêts établis par les notaires sont des actes authentiques et le seul moyen de preuve admis par le Zákon č. 191/1950 Sb., zákon směnečný a šekový (loi n^o 191/1950 relative aux lettres de change, aux billets à ordre et aux chèques).
19 L’article 108 du Zákon č. 304/2013 Sb., o veřejných rejstřících právnických a fyzických osob (loi n^o 304/2013 relative aux registres publics des personnes morales et physiques) habilite les notaires à procéder, sur demande de l’ayant droit, à l’inscription de certaines informations dans les registres publics.
20 Aux termes de l’article 100, paragraphe 1, du Zákon č. 292/2013 Sb., o zvláštních řízeních soudních (loi n^o 292/2013 relative aux procédures judiciaires spéciales, ci-après la « loi relative aux procédures judiciaires spéciales »), sauf disposition contraire, les actes de la juridiction de première instance dans le cadre de la procédure de liquidation de la succession sont accomplis, en qualité de commissaire judiciaire, par le notaire nommé à cet effet par cette juridiction.
21 En vertu de l’article 100, paragraphe 2, de cette loi, sont, toutefois, exclus de la compétence du notaire les demandes d’aide juridictionnelle à l’étranger, les décisions interdisant aux notaires, aux candidats notaires, aux stagiaires notaires et aux autres employés d’un notaire d’accomplir des actes de commissaire judiciaire, l’annulation des décisions en matière de succession, l’octroi d’un consentement préalable à la vente des biens d’une succession, les décisions d’affectation des
biens d’une succession à l’État ainsi que la suspension de la liquidation d’une succession.
22 Selon l’article 100, paragraphe 3, de ladite loi, dans les cas mentionnés à l’article 100, paragraphe 2, de celle-ci, le notaire prépare tous les actes aux fins de la décision à intervenir et des autres actes de la juridiction compétente et, le cas échéant, fournit des propositions de textes à cet effet.
23 L’article 103, paragraphe 1, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales prévoit que les actes du commissaire judiciaire sont accomplis, dans le cadre de la procédure de liquidation d’une succession, par le notaire, sauf disposition contraire.
24 Aux termes de l’article 103, paragraphe 3, de cette loi, le notaire accomplit, dans le cadre de la procédure de liquidation de la succession, les actes au nom de la juridiction de première instance devant laquelle se déroule la procédure de liquidation de la succession.
25 Conformément à l’article 103, paragraphe 4, de ladite loi, le notaire dispose, dans le cadre de la procédure de liquidation de la succession et aux fins de l’exécution des actes en qualité de commissaire judiciaire, de tous les pouvoirs d’une juridiction en tant qu’organe de la puissance publique lorsqu’elle rend la justice.
26 Aux termes de l’article 138, paragraphe 2, de la même loi, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, ouvre la procédure de liquidation de la succession d’office, par voie d’ordonnance, dès qu’il a connaissance du fait qu’une personne physique est décédée ou a été déclarée décédée, à moins que cette procédure ait déjà été ouverte sur demande.
27 En vertu de l’article 162, paragraphe 1, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, en cas de dissolution du mariage en raison du décès de l’un des conjoints, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, fixe, par voie d’ordonnance, la valeur normale des biens relevant de la communauté formée par le de cujus et son conjoint survivant au jour du décès, et il approuve l’accord entre le conjoint survivant et
les héritiers relatif à la liquidation de la communauté de biens, si cet accord n’est pas en contradiction avec les dispositions testamentaires exprimées par le de cujus de son vivant concernant ces biens et, le cas échéant, avec la loi.
28 En vertu de l’article 162, paragraphe 2, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, en l’absence d’un tel accord, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, détermine, par voie d’ordonnance et sur la base des principes figurant dans le code civil, les biens de la communauté formée par le de cujus et son conjoint survivant qui relèvent de la masse successorale et les biens qui appartiennent, en propre, au
conjoint survivant. En l’absence d’accord entre les héritiers et le conjoint survivant sur les faits déterminants permettant d’établir ce qui relève de cette communauté, il n’est pas tenu compte des biens litigieux.
29 Conformément à l’article 169, paragraphe 1, de cette loi, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, si le règlement du litige portant sur les droits successoraux dépend uniquement de l’appréciation de points de droit nés de faits qui n’opposent pas les héritiers, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, détermine, par voie d’ordonnance, les parties avec lesquelles la procédure de liquidation de la succession se poursuit et les parties dont la participation
à la procédure s’achève.
30 Il résulte de l’article 169, paragraphe 2, de ladite loi que les droits successoraux des personnes dont la participation à la procédure s’est achevée ne s’éteignent pas, mais il n’en est plus tenu compte dans le cadre de la procédure et de la décision.
31 L’article 170, paragraphe 1, de cette même loi, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, prévoit que, si le règlement du litige portant sur les droits successoraux requiert l’établissement de faits qui opposent les héritiers, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, invite, par voie d’ordonnance, la partie dont les droits successoraux semblent les plus faibles eu égard aux circonstances de l’espèce à faire valoir ses droits par un recours juridictionnel.
Il fixe un délai pour introduire le recours, lequel délai ne peut être inférieur à deux mois.
32 Selon l’article 172, paragraphe 1, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, détermine les actifs de la succession avant tout sur la base de l’inventaire de la succession ou de la liste des biens de la succession ou de la déclaration commune des héritiers relative aux biens de la succession.
33 Aux termes de l’article 172, paragraphe 2, de cette loi, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, en l’absence d’une détermination des actifs conformément audit article 172, paragraphe 1, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, détermine les actifs compris dans la succession à partir des renseignements fournis par les héritiers et les inscrit dans la liste des actifs. En l’absence d’accord entre les héritiers sur les faits déterminants permettant
d’établir ce qui relève des actifs de la succession, il n’est pas tenu compte, dans le cadre de la procédure et du règlement de la succession, des biens litigieux.
34 Conformément à l’article 173 de ladite loi, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, détermine les éléments du passif de la succession à partir des renseignements fournis par les héritiers et inscrit ces éléments dans la liste du passif. En l’absence d’accord entre les héritiers sur les faits déterminants permettant d’établir ce qui relève du passif de la succession, il n’est pas tenu compte, dans le cadre de la
procédure et du règlement de la succession, des dettes litigieuses.
35 En vertu de l’article 185, paragraphe 1, sous e), de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, dans le cadre de la décision sur la succession, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, opère le partage de la succession, avec effet au jour de la naissance des droits successoraux, entre plusieurs héritiers à la demande de ces derniers, si les conditions fixées à cet effet par la loi sont remplies, et il
confirme, en fonction du partage, les droits successoraux de plusieurs héritiers.
36 Aux termes de l’article 185, paragraphe 3, sous a), de cette loi, lu en combinaison avec l’article 100, paragraphe 1, de celle-ci, dans le cadre de la décision sur la succession, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, se prononce sur la demande de compensation d’un héritier, fondée sur l’ordre de succession légal, en application de l’article 1693, paragraphe 3, du code civil.
37 Il résulte de l’article 189, paragraphe 1, de ladite loi que, dans les cas visés à l’article 162, paragraphe 2, seconde phrase, à l’article 172, paragraphe 2, seconde phrase, et à l’article 173, seconde phrase, de cette même loi, les parties peuvent faire valoir leurs droits en formant un recours juridictionnel.
38 Selon l’article 189, paragraphe 2, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, l’effet de droit de la décision sur la succession est sans préjudice de la possibilité pour quiconque qui ne participait pas à la procédure de liquidation de la succession en tant qu’héritier au moment de l’adoption de cette décision de faire valoir son droit sur la succession.
39 Aux termes de l’article 1693, paragraphe 3, du code civil, en cas d’héritage suivant l’ordre de succession légal, l’héritier a le droit de réclamer des autres héritiers une compensation s’il a longtemps pris soin du de cujus ou s’il a contribué dans une large mesure à l’entretien ou à l’augmentation du patrimoine du de cujus par son travail, par un soutien financier ou d’une manière similaire, sans avoir reçu de contrepartie. La compensation est fournie proportionnellement à la durée et à
l’ampleur de ce qu’a effectué l’héritier et à la valeur de la succession. Sa part héréditaire est augmentée de ce montant.
40 En vertu de l’article 1697, paragraphes 1 et 2, du code civil, la juridiction opère le partage de la succession selon la volonté du de cujus ou, si la volonté du de cujus ne s’y oppose pas, en approuvant l’accord des héritiers. En l’absence d’accord, la juridiction opère le partage de la succession si tous les héritiers le demandent et s’ils ne s’opposent pas sur ce qui relève de la succession.
41 L’article 1697, paragraphe 3, de ce code prévoit que, dans les autres cas, la juridiction ne partage pas la succession et confirme les droits à la succession selon les parts successorales.
La procédure précontentieuse
42 Par une lettre du 18 octobre 2006, la Commission a mis en demeure la République tchèque de lui présenter ses observations au sujet de la conformité à l’article 49 TFUE de la condition de nationalité requise par la législation nationale pour l’accès à la profession de notaire dans cet État membre.
43 Ce dernier a répondu à cette lettre de mise en demeure par une lettre du 3 janvier 2007 dans laquelle il a indiqué que, selon lui, l’article 49 TFUE ne s’applique pas aux activités notariales parce que celles-ci participent de l’exercice de l’autorité publique et relèvent ainsi de la dérogation prévue à l’article 51 TFUE.
44 Ne partageant pas l’analyse de la République tchèque, la Commission a, par lettre du 23 octobre 2007, adressé à cet État membre un avis motivé auquel celui-ci a répondu par lettre du 9 janvier 2008.
45 Au cours du mois de février 2008, la Commission a introduit, devant la Cour, des recours en manquement contre, successivement, le Royaume de Belgique, la République française, le Grand-Duché de Luxembourg, la République d’Autriche, la République fédérale d’Allemagne et la République hellénique, ayant pour objet, notamment, la condition de nationalité requise pour l’exercice de la profession de notaire dans ces États membres. La République tchèque est intervenue au soutien desdits États
membres. Dans les arrêts du 24 mai 2011, Commission/Belgique (C‑47/08, EU:C:2011:334) ; Commission/France (C‑50/08, EU:C:2011:335) ; Commission/Luxembourg (C‑51/08, EU:C:2011:336) ; Commission/Autriche (C‑53/08, EU:C:2011:338) ; Commission/Allemagne (C‑54/08, EU:C:2011:339), et Commission/Grèce (C‑61/08, EU:C:2011:340), la Cour a jugé que la condition de nationalité, requise par ces mêmes États membres pour l’accès à la profession de notaire, constitue une discrimination fondée sur la nationalité
interdite par l’article 49 TFUE.
46 La Commission a, par une lettre du 9 novembre 2011, attiré l’attention de la République tchèque sur les arrêts mentionnés au point précédent et lui a demandé de préciser quelles mesures elle avait prises ou envisageait de prendre, sur la base de ces arrêts, afin de rendre sa législation conforme au droit de l’Union.
47 La République tchèque a, par un courrier du 9 janvier 2012, répondu à cette lettre en faisant valoir que les fonctions exercées par les notaires dans l’ordre juridique tchèque différaient de manière importante de celles en cause dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts mentionnés au point 45 du présent arrêt et que, compte tenu du statut du notaire dans l’ordre juridique tchèque, le maintien de la condition de nationalité pour l’exercice de la profession de notaire était justifié.
48 Le 22 novembre 2012, la Commission a adressé un avis motivé complémentaire à la République tchèque, auquel cet État membre a répondu par lettre du 22 janvier 2013.
49 N’ayant pas été informée de modifications apportées à la législation tchèque relative aux activités des notaires dans le cadre de la réforme du droit civil entreprise, entre-temps, par la République tchèque, la Commission a adressé, le 10 juillet 2014, un nouvel avis motivé complémentaire à cet État membre.
50 Par une lettre du 10 septembre 2014, la République tchèque a répondu à cet avis en exposant les motifs pour lesquels elle estimait que la position défendue par la Commission n’était pas fondée.
51 C’est dans ces conditions que la Commission a décidé d’introduire le présent recours.
Sur le recours
Argumentation des parties
52 La Commission précise que son recours concerne uniquement la compatibilité de la condition de nationalité pour l’exercice de la profession de notaire, fixée à l’article 7, paragraphe 1, du code notarial, avec l’article 49 TFUE et ne vise donc pas le statut ou l’organisation de la profession notariale dans l’ordre juridique tchèque ni les autres conditions pour l’exercice de cette profession.
53 La Commission considère que cette condition de nationalité constitue une discrimination entraînant une restriction disproportionnée à la liberté d’établissement consacrée à l’article 49 TFUE et que les activités exercées par le notaire dans l’ordre juridique tchèque ne participent pas à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51, premier alinéa, TFUE, de telle sorte qu’ils ne relèvent pas de la dérogation prévue à cette dernière disposition.
54 À cet égard, la Commission fait valoir que l’article 49 TFUE est applicable à la profession de notaire. Cette disposition viserait à assurer le bénéfice du traitement national à tout ressortissant d’un État membre qui s’établit, ne serait-ce qu’à titre secondaire, dans un autre État membre pour y exercer une activité non salariée. L’article 49 TFUE interdirait ainsi à chaque État membre de prévoir dans sa législation, pour les personnes qui font usage de la liberté de s’établir sur son
territoire, des conditions d’exercice de leurs activités différentes de celles fixées pour ses propres ressortissants.
55 Quant à l’article 51, premier alinéa, TFUE, la Commission soutient qu’il doit faire l’objet d’une interprétation autonome et uniforme. En ce qu’elle prévoit une exception à la liberté d’établissement pour les activités participant à l’exercice de l’autorité publique, cette disposition devrait, en outre, être interprétée de manière stricte, et ladite exception devrait être restreinte aux activités qui, par elles-mêmes, comportent une participation directe et spécifique à l’exercice de
l’autorité publique. Or, la notion d’« autorité publique » impliquerait l’exercice d’un pouvoir décisionnel exorbitant du droit commun se traduisant par la capacité d’agir indépendamment de la volonté d’autres sujets de droit ou même contre cette volonté.
56 S’agissant du statut du notaire dans l’ordre juridique tchèque, la Commission considère que c’est au regard de la nature des activités en cause et non pas au regard de ce statut tel que défini par la législation nationale qu’il convient de vérifier l’applicabilité de la dérogation prévue à l’article 51 TFUE. Le fait que le notaire agit en poursuivant un objectif d’intérêt général n’impliquerait pas, en soi, que l’activité à laquelle il se livre doit être considérée comme participant
directement et spécifiquement à l’exercice de l’autorité publique.
57 Quant au régime de responsabilité du notaire dans l’ordre juridique tchèque, la Commission estime que le fait que les activités dont l’État est responsable sont considérées, dans cet ordre juridique, comme relevant de l’exercice de l’autorité publique ne signifie pas que ces activités constituent une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51, premier alinéa, TFUE.
58 En ce qui concerne les activités exercées par le notaire dans l’ordre juridique tchèque, la Commission fait observer, en premier lieu, que l’établissement d’actes authentiques suppose l’existence préalable d’un consentement des parties ou d’un accord de volonté entre celles-ci. La force probante et la force exécutoire dont bénéficient ces actes conféreraient certes à ceux-ci d’importants effets juridiques, mais ne permettraient pas de considérer que l’activité consistant à dresser de tels
actes constitue une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique. L’apposition, par le notaire, de la formule exécutoire sur un titre établissant une créance supposerait, elle aussi, le consentement de la partie qui s’engage à s’acquitter de la dette. La compétence du notaire serait ainsi limitée à la déclaration du caractère incontestable de la créance jusqu’à preuve du contraire, à l’enregistrement du consentement du débiteur et à la vérification de la validité de l’acte
concerné. La compétence pour trancher les litiges relatifs à la créance en tant que telle reviendrait au juge.
59 S’agissant, en deuxième lieu, de l’attestation, par le notaire, de faits et de déclarations juridiquement pertinents, la Commission soutient que cette activité est liée à l’établissement d’actes officiels qui revêtent souvent la forme d’actes authentiques. Or, la vérification préalable par le notaire, dans un objectif d’intérêt général, de la satisfaction des conditions légalement exigées pour l’établissement de l’acte authentique n’impliquerait pas l’exercice de l’autorité publique. Il en
irait de même s’agissant de l’activité du notaire consistant à recueillir les protêts de lettres de change et de chèques.
60 Pour ce qui est, en troisième lieu, de l’inscription par le notaire d’informations dans les registres publics, cette activité serait exercée à la demande d’un ayant droit, après présentation des documents requis, exclusivement sur le fondement d’un acte notarié attestant que la procédure applicable a été observée et que les éléments requis par la législation ont été réunis. Toute partie intéressée pourrait contester cette inscription en justice. L’exercice de cette activité n’impliquerait
aucun pouvoir d’appréciation, de contrainte ou de coercition dans le chef du notaire.
61 En ce qui concerne, en quatrième lieu, les services de conseil juridique que le notaire peut fournir en relation avec l’authentification d’un acte, la gestion de fortune et la représentation dans le cadre des procédures d’insolvabilité, l’exercice de ces activités laisserait intacts l’appréciation de l’autorité judiciaire et le libre exercice du pouvoir juridictionnel.
62 S’agissant, en cinquième lieu, des tâches accomplies par le notaire en tant que commissaire judiciaire dans le cadre de la procédure de liquidation de la succession, la Commission fait valoir que l’encadrement dont les notaires font l’objet dans l’ordre juridique tchèque du point de vue de leur nomination, de la limitation de leur nombre et de leurs compétences territoriales ainsi que de leur régime de rémunération, d’indépendance, d’incompatibilités et d’inamovibilité n’autorise pas la
République tchèque à réserver l’accomplissement de ces tâches aux seuls ressortissants de cet État membre.
63 La Commission soutient, en outre, que, même si le notaire concourt, dans le cadre de la procédure de liquidation de la succession, au fonctionnement des autorités judiciaires et dispose, à cette fin, de certaines compétences juridictionnelles, la législation nationale ne lui reconnaît pas un pouvoir d’appréciation, de décision ou de coercition dont jouissent ces autorités.
64 En effet, la procédure de liquidation de la succession serait une procédure non contentieuse et revêtirait un caractère préventif. Elle serait obligatoire et consisterait en l’accomplissement de différents actes qui se succèdent logiquement, suivant un ordre et un cadre préalablement fixés. La participation du notaire à cette procédure viserait à l’accélérer et à décharger les juridictions de l’accomplissement des actes simples sur le plan administratif et serait de nature auxiliaire.
65 En cas de litige entre les parties à ladite procédure, le notaire, agissant en tant que commissaire judiciaire, n’aurait d’autre choix que de les renvoyer devant le juge. Le notaire ne disposerait dès lors pas du pouvoir d’agir indépendamment de la volonté des parties.
66 L’article 185, paragraphe 1, sous e), de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales n’autoriserait le notaire à procéder au partage de la succession qu’à la demande des héritiers. À défaut d’une telle demande et en l’absence d’accord entre ceux-ci sur le partage de la succession, le notaire serait obligé de confirmer la division de l’héritage selon les parts successorales. Par ailleurs, les éléments que la décision sur la succession doit contenir, en vertu de l’article 185 de cette
loi, ne pourraient porter que sur une succession au sujet de laquelle les faits ne sont pas litigieux entre les héritiers. Si les faits souffrent contestation, le notaire ne disposerait ni d’un pouvoir d’appréciation sur ceux-ci ni d’un pouvoir de contrainte à l’égard des parties.
67 Le pouvoir conféré au notaire, en vertu de l’article 169, paragraphe 1, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, de se prononcer par voie d’ordonnance notamment sur l’indignité successorale d’une personne permettrait tout au plus au notaire d’adopter des mesures visant à assurer le déroulement approprié et rapide de la procédure de liquidation de la succession et ne touchant pas à la substance des droits en cause. Ce pouvoir serait, en outre, limité aux seuls cas où le
règlement du litige portant sur les droits successoraux dépend uniquement de l’appréciation de points de droit nés de faits qui n’opposent pas les héritiers.
68 S’agissant des actes adoptés par le notaire à l’occasion de litiges relatifs à l’imputation des libéralités sur la réserve héréditaire et au partage de la succession, le notaire agirait dans le cadre des règles fixées par la loi, afin de garantir que tous les héritiers reçoivent ce qui leur revient de droit et ne trancherait pas de litige entre ceux-ci.
69 Le fait que l’ordonnance du notaire dans les procédures successorales soit dénommée « ordonnance du tribunal d’arrondissement » et que la décision du notaire devient définitive en l’absence de contestation dans les délais prescrits ne signifierait pas que le notaire exerce un véritable pouvoir décisionnel.
70 La circonstance que, aux fins de la liquidation de la communauté de biens des époux, le notaire agit en vertu du même cadre juridique que celui dans lequel agirait un juge ne signifierait pas pour autant que cette activité participe directement et spécifiquement à l’exercice de l’autorité publique. En cas de litige sur le point de savoir si un bien appartient à la communauté de biens des époux, le notaire ne tiendrait pas compte du bien litigieux. Ce litige serait tranché par les tribunaux.
71 Quant au partage de la succession, les décisions du notaire ne porteraient que sur la partie de la succession au sujet de laquelle les faits ne sont pas contestés entre les héritiers.
72 Pour ce qui est de la liquidation par le notaire de la communauté de biens en cas de dissolution du mariage en raison du décès de l’un des époux et du partage de la succession à la demande des héritiers, les actes du notaire seraient réalisés sur la base d’un consensus.
73 Le fait que le notaire, agissant en qualité de commissaire judiciaire, puisse être considéré comme une « juridiction », au sens de l’article 3, paragraphe 2, du règlement (UE) n^o 650/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen (JO 2012, L 201,
p. 107), ou qu’il remplisse les conditions de « juridiction », au sens de l’article 267 TFUE, ne serait aucunement indicatif de ce que l’activité du notaire en tant que commissaire judiciaire dans la procédure de liquidation de la succession participe directement à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51 TFUE.
74 La définition du terme « juridiction », au sens dudit article 3, paragraphe 2, serait seulement valable aux fins de l’application du règlement n^o 650/2012 et devrait, compte tenu de l’objectif poursuivi par ce règlement de permettre aux ressortissants des États membres de régler des successions transnationales moyennant l’application d’un seul et même droit par une seule et même autorité, être interprétée largement, tandis que la notion d’« autorité publique », au sens de l’article 51 TFUE,
devrait être interprétée strictement. En outre, les articles 267 et 51 TFUE seraient des dispositions distinctes. Par ailleurs, il serait douteux que le notaire satisfasse aux conditions pour être considéré comme une « juridiction », au sens de l’article 267 TFUE.
75 La République tchèque soutient que, dans l’ordre juridique de cet État membre, la profession de notaire est liée à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51, premier alinéa, TFUE.
76 Ledit État membre considère que la position défendue par la Commission, selon laquelle l’exercice de l’autorité publique implique l’exercice d’un pouvoir décisionnel exorbitant du droit commun, se traduisant par la capacité d’agir indépendamment de la volonté d’autres sujets de droit ou même contre cette volonté, suppose l’exercice d’un pouvoir allant au-delà de la loi. Cette position serait contraire aux principes fondamentaux d’un État de droit démocratique sur lesquels repose l’Union
européenne. L’exercice de l’autorité publique serait caractérisé par l’appréciation libre et le libre exercice du pouvoir juridictionnel.
77 Compte tenu des pouvoirs conférés au notaire dans l’ordre juridique tchèque, l’activité que le notaire exerce en tant que commissaire judiciaire dans le cadre de la procédure de liquidation de la succession serait clairement liée à une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique.
78 Premièrement, le notaire bénéficierait, à cet égard, d’une compétence exclusive, le tribunal ne pouvant confier le règlement des successions à aucune autre autorité. Le notaire disposerait, en principe, du même statut et des mêmes pouvoirs qu’un juge dans une procédure judiciaire civile et serait lié par les mêmes obligations. Les particuliers seraient tenus de se conformer à ses actes comme s’il s’agissait d’actes judiciaires.
79 La République tchèque fait valoir, deuxièmement, que le notaire, lorsqu’il agit en tant que commissaire judiciaire, dispose d’un pouvoir d’appréciation et de décision dans le cadre de la liquidation de la communauté de biens en cas de dissolution du mariage en raison du décès de l’un des époux et dans le cadre du partage de la succession à la demande des héritiers.
80 En effet, il agirait de la même manière qu’un juge et appliquerait les règles que celui-ci serait tenu d’appliquer. Sa décision ferait autorité et affecterait les droits et les obligations des personnes concernées. Le pouvoir du notaire ne serait pas limité à la constatation de la volonté des parties, mais « empiéterait » sur celui du juge.
81 Dans le cadre de la liquidation de la communauté de biens en cas de dissolution du mariage en raison du décès de l’un des époux, le notaire, en sa qualité de commissaire judiciaire, apprécierait les droits et les obligations patrimoniaux des époux. En cas de désaccord entre le conjoint survivant et les héritiers, il distinguerait lui-même, par voie d’ordonnance, conformément aux principes prévus par le code civil, les biens de la communauté relevant de la masse successorale et ceux
appartenant en propre au conjoint survivant.
82 Dans le cadre du partage de la succession à la demande des héritiers, le notaire attribuerait à chacun d’eux un ou plusieurs éléments de la succession et leur imposerait, le cas échéant, de désintéresser les autres héritiers. Le notaire suivrait ainsi la même démarche qu’un juge en cas de liquidation d’une indivision.
83 La République tchèque fait observer, troisièmement, que les activités exercées par le notaire en tant que commissaire judiciaire se distinguent de celles de l’avocat, dans la mesure où celui-ci n’agit jamais au nom d’une juridiction et ne se voit jamais confier des pouvoirs juridictionnels.
84 Toutefois, les activités du notaire ne seraient pas de nature auxiliaire par rapport à l’exercice du pouvoir judiciaire. Quant à l’argument de la Commission selon lequel la participation du notaire à la procédure de liquidation de la succession vise à l’accélérer et à décharger les juridictions de l’accomplissement des actes simples sur le plan administratif, la République tchèque considère que même de tels actes peuvent relever de l’exercice de l’autorité publique.
85 Quatrièmement, cet État membre soutient que, bien que la procédure de liquidation de la succession soit considérée, dans la mesure où elle n’est pas introduite en raison d’un litige entre les parties, comme une procédure non contentieuse, elle peut aboutir à un désaccord entre celles-ci, dont le règlement exige l’adoption d’une décision faisant autorité. Dans le cadre de cette procédure, le notaire se prononcerait selon sa libre appréciation.
86 Le fait que le notaire agit dans une procédure non contentieuse n’exclurait pas une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique. D’autres procédures non contentieuses, telles que les procédures en matière de reconnaissance ou de contestation de la filiation, d’adoption, de tutelle judiciaire des mineurs, de dépôts et de marchés des capitaux, impliqueraient une telle participation de la part du juge. L’exercice de l’autorité publique concernerait les situations
dans lesquelles les rapports entre les personnes sont réglés, indépendamment de la procédure, par voie d’autorité.
87 Par ailleurs, le notaire, lorsqu’il agit en tant que commissaire judiciaire, serait habilité, en vertu de l’article 169 de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, à régler les litiges, portant sur les droits successoraux, dont le règlement dépend uniquement de l’appréciation de points de droit nés de faits qui n’opposent pas les héritiers. À cet égard, le notaire pourrait, notamment, se prononcer sur l’imputation sur la réserve, constater l’indignité successorale et déterminer
le montant de la compensation dans les cas visés à l’article 1693, paragraphe 3, du code civil.
88 Dans le cadre de sa compétence de se prononcer sur l’imputation sur la réserve, le notaire trancherait des litiges d’ordre factuel entre les héritiers.
89 La République tchèque considère, cinquièmement, que le fait que le notaire, en qualité de commissaire judiciaire, doit agir conformément à la loi et appliquer les principes fixés par celle-ci ne signifie pas qu’il ne participe pas directement et spécifiquement à l’exercice de l’autorité publique. En effet, les juges ou les autorités policières seraient soumis aux mêmes contraintes.
90 Cet État membre fait valoir, sixièmement, que le notaire, lorsqu’il agit en tant que commissaire judiciaire, doit être vu comme une « juridiction », au sens du règlement n^o 650/2012, dans la mesure où, dans l’ordre juridique tchèque, les notaires exercent, pour certaines questions successorales, des fonctions juridictionnelles au même titre que les juridictions. La République tchèque fait observer que, le notaire, dans sa fonction de commissaire judiciaire, étant chargé de la mission de
régler les successions, est lié par les règles fixées par ce règlement, dès lors qu’il exerce une fonction juridictionnelle. À ce titre, le notaire remplirait les conditions pour être considéré comme une « juridiction », au sens de l’article 267 TFUE, et pourrait, en application de cette disposition, saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle relative à l’interprétation dudit règlement. Partant, son activité devrait être considérée comme liée à l’exercice de l’autorité publique aux fins
du règlement n^o 650/2012.
91 Septièmement, la République tchèque soutient que le notaire, dans le cadre de sa fonction de commissaire judicaire, n’agit pas sous le contrôle du juge. Son activité ne pourrait pas être considérée comme revêtant un caractère auxiliaire ou préparatoire par rapport à l’activité des juridictions.
92 Huitièmement, selon la République tchèque, le fait que, tout comme le juge, le notaire, en qualité de commissaire judiciaire, est soumis, dans le cadre de la procédure successorale, aux principes constitutionnels applicables à la procédure civile atteste de l’exercice, par celui-ci, de l’autorité publique. En effet, le fait qu’il dispose de tous les pouvoirs qui échoient au juge en tant qu’autorité publique dans le cadre de l’administration de la justice signifierait que le principe de
l’indépendance et celui de l’impartialité des juges lui seraient applicables. La circonstance que le notaire, lorsqu’il agit en tant que commissaire judiciaire, est désigné par le tribunal et que les héritiers ne peuvent pas choisir un autre notaire que celui qui leur a été assigné signifierait que le principe du juge légal lui est applicable.
93 Cet État membre souligne, par ailleurs, que le fait que l’activité du notaire peut engager la responsabilité de l’État constitue le signe d’un transfert de l’exercice de l’autorité publique.
Appréciation de la Cour
94 Il y a lieu de préciser, à titre liminaire et ainsi qu’il ressort du point 52 du présent arrêt, que le recours de la Commission concerne uniquement la compatibilité de la condition de nationalité requise par la réglementation tchèque en vue de l’accès à la profession de notaire au regard de la liberté d’établissement consacrée à l’article 49 TFUE. Ce recours ne porte ni sur le statut et l’organisation du notariat dans l’ordre juridique tchèque ni sur les conditions d’accès, autres que celle
afférente à la nationalité, à la profession de notaire dans cet État membre.
95 À cet égard, il convient de rappeler que la Cour a déjà jugé que la liberté d’établissement, telle que consacrée à l’article 49 TFUE, est applicable à la profession de notaire (arrêt du 10 septembre 2015, Commission/Lettonie, C‑151/14, EU:C:2015:577, point 48 et jurisprudence citée).
96 Il convient encore de rappeler que l’article 49 TFUE vise à assurer le bénéfice du traitement national à tout ressortissant d’un État membre qui s’établit dans un autre État membre pour y exercer une activité non salariée et interdit toute discrimination fondée sur la nationalité résultant des législations nationales en tant que restriction à la liberté d’établissement (arrêt du 10 septembre 2015, Commission/Lettonie, C‑151/14, EU:C:2015:577, point 52 et jurisprudence citée).
97 Or, en l’espèce, l’article 7, paragraphe 1, du code notarial réserve l’accès à la profession de notaire aux seuls ressortissants tchèques, instituant ainsi une différence de traitement en raison de la nationalité, prohibée, en principe, par l’article 49 TFUE.
98 La République tchèque fait cependant valoir que les activités notariales sont soustraites du champ d’application de l’article 49 TFUE, puisqu’elles participent, dans cet État membre, à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51, premier alinéa, TFUE.
99 S’agissant de la notion d’« exercice de l’autorité publique », au sens de cette dernière disposition, il convient de l’interpréter en tenant compte, selon une jurisprudence constante de la Cour, du caractère propre au droit de l’Union des limites posées par ladite disposition aux exceptions permises au principe de la liberté d’établissement, afin d’éviter que l’effet utile du traité en matière de liberté d’établissement ne soit déjoué par des dispositions unilatérales prises par les États
membres (arrêt du 1^er décembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑157/09, non publié, EU:C:2011:794, point 56 et jurisprudence citée).
100 Il résulte également de la jurisprudence constante de la Cour que l’article 51, premier alinéa, TFUE constitue une dérogation à la règle fondamentale de la liberté d’établissement. Comme telle, cette dérogation doit recevoir une interprétation qui limite sa portée à ce qui est strictement nécessaire pour sauvegarder les intérêts que cette disposition permet aux États membres de protéger (arrêt du 1^er décembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑157/09, non publié, EU:C:2011:794, point 57 et
jurisprudence citée).
101 En outre, la Cour a itérativement souligné que la dérogation prévue à l’article 51, premier alinéa, TFUE doit être restreinte aux seules activités qui, prises en elles-mêmes, constituent une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique (arrêt du 1^er décembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑157/09, non publié, EU:C:2011:794, point 58 et jurisprudence citée).
102 À cet égard, la Cour a eu l’occasion de considérer que sont exclues de la dérogation prévue à l’article 51, premier alinéa, TFUE certaines activités auxiliaires ou préparatoires par rapport à l’exercice de l’autorité publique (voir, en ce sens, arrêts du 13 juillet 1993, Thijssen, C‑42/92, EU:C:1993:304, point 22 ; du 29 octobre 1998, Commission/Espagne, C‑114/97, EU:C:1998:519, point 38 ; du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti, C‑451/03, EU:C:2006:208, point 47 ; du
29 novembre 2007, Commission/Allemagne, C‑404/05, EU:C:2007:723, point 38, et du 22 octobre 2009, Commission/Portugal, C‑438/08, EU:C:2009:651, point 36), ou certaines activités dont l’exercice, bien qu’il comporte des contacts, même réguliers et organiques, avec des autorités administratives ou judiciaires, voire un concours, même obligatoire, à leur fonctionnement, laisse intacts les pouvoirs d’appréciation et de décision desdites autorités (voir, en ce sens, arrêt du 21 juin 1974, Reyners, 2/74,
EU:C:1974:68, points 51 et 53), ou encore certaines activités qui ne comportent pas l’exercice de pouvoirs décisionnels (voir, en ce sens, arrêts du 13 juillet 1993, Thijssen, C‑42/92, EU:C:1993:304, points 21 et 22 ; du 29 novembre 2007, Commission/Autriche, C‑393/05, EU:C:2007:722, points 36 et 42 ; du 29 novembre 2007, Commission/Allemagne, C‑404/05, EU:C:2007:723, points 38 et 44, ainsi que du 22 octobre 2009, Commission/Portugal, C‑438/08, EU:C:2009:651, points 36 et 41), de pouvoirs de
contrainte (voir en ce sens, notamment, arrêt du 29 octobre 1998, Commission/Espagne, C‑114/97, EU:C:1998:519, point 37) ou de pouvoirs de coercition (voir, en ce sens, arrêts du 30 septembre 2003, Anker e.a., C‑47/02, EU:C:2003:516, point 61, ainsi que du 22 octobre 2009, Commission/Portugal, C‑438/08, EU:C:2009:651, point 44).
103 Il convient dès lors de vérifier, à la lumière de la jurisprudence rappelée aux points 99 à 102 du présent arrêt, si les activités confiées aux notaires dans l’ordre juridique tchèque comportent une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique.
104 S’agissant des activités d’établissement d’actes authentiques, d’apposition de la formule exécutoire, d’attestation de faits et de déclarations juridiquement pertinents, d’inscription d’informations dans les registres publics ainsi que de fourniture de services de conseil juridique en relation avec l’activité du notaire, la République tchèque a reconnu, lors de l’audience, que ces activités ne participent pas à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51, premier alinéa, TFUE.
105 Toutefois, selon une jurisprudence constante de la Cour, il appartient à celle-ci de constater si le manquement reproché existe ou non, même dans la mesure où l’État concerné ne conteste pas le manquement (arrêt du 14 septembre 2017, Commission/Grèce, C‑320/15, EU:C:2017:678, point 21 et jurisprudence citée).
106 Pour ce qui est des activités d’établissement d’actes authentiques et d’apposition de la formule exécutoire, il ressort de l’article 63, paragraphe 1, sous g), du code notarial qu’un acte notarié doit contenir l’indication qu’il a été lu et approuvé par les parties. Conformément aux articles 71a et 71b de ce code, le consentement de l’une des parties à ce que l’obligation inscrite dans l’acte notarié soit rendue exécutoire figure expressément dans la formule exécutoire apposée par le notaire
sur cet acte, lui conférant de ce fait la qualité de titre exécutoire. L’intervention du notaire suppose, ainsi, l’existence préalable d’un consentement des parties ou d’un accord de volonté entre celles-ci.
107 À cet égard, la Cour a jugé que l’activité d’authentification ainsi confiée aux notaires ne comporte pas, en tant que telle, une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51, premier alinéa, TFUE (voir par analogie, notamment, arrêts du 24 mai 2011, Commission/Belgique, C‑47/08, EU:C:2011:334, point 92, et du 1^er février 2017, Commission/Hongrie, C‑392/15, EU:C:2017:73, point 120).
108 La Cour a précisé, en outre, que le fait qu’une activité donnée comporte l’établissement d’actes dotés d’effets tels que la force probante et la force exécutoire ne saurait suffire pour que cette activité soit considérée comme participant directement et spécifiquement à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51, premier alinéa, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 1^er décembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑157/09, non publié, EU:C:2011:794, point 73 et jurisprudence citée).
109 En effet, en ce qui concerne, en particulier, la force probante dont jouit un acte notarié, il convient de préciser que celle-ci relève du régime des preuves consacré par la loi dans l’ordre juridique tchèque. La force probante conférée par la loi à un acte donné n’a donc pas d’incidence directe sur la question de savoir si l’activité comportant l’établissement de cet acte, prise en elle-même, constitue une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique, ainsi que
l’exige la jurisprudence de la Cour (voir, par analogie, arrêt du 1^er décembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑157/09, non publié, EU:C:2011:794, point 74 et jurisprudence citée).
110 La force exécutoire de l’acte authentique ne traduit pas non plus la détention par le notaire de pouvoirs comportant une participation directe et spécifique à l’exercice de l’autorité publique. En effet, si l’apposition par le notaire de la formule exécutoire sur l’acte authentique confère à ce dernier la force exécutoire, celle-ci repose sur la volonté des parties de passer un acte ou une convention, après vérification de leur conformité avec la loi par le notaire, et de leur conférer ladite
force exécutoire (voir, par analogie, arrêt du 24 mai 2011, Commission/Belgique, C‑47/08, EU:C:2011:334, point 103).
111 S’agissant des services de conseil juridique, de représentation des parties dans certains cas, de rédaction d’actes sous seing privé et d’élaboration d’analyses juridiques que le notaire peut fournir en relation avec son activité, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, du code notarial, la Cour a déjà jugé que de telles activités ne sauraient être considérées comme une participation à l’exercice de l’autorité publique, même lorsqu’il existe une obligation légale pour le notaire de les exercer
(voir, en ce sens, arrêts du 24 mai 2011, Commission/Autriche, C‑53/08, EU:C:2011:338, point 104, et du 1^er décembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑157/09, non publié, EU:C:2011:794, point 72 ainsi que jurisprudence citée).
112 Pour ce qui est de l’authentification de faits et de déclarations juridiquement pertinents par le notaire, il ressort du code notarial que cette activité porte en principe sur des faits et des déclarations qui pourraient fonder la mise en œuvre de droits ou la démonstration de l’existence de ceux-ci ou qui pourraient entraîner des conséquences juridiques. Partant, l’intervention du notaire dans ce contexte est susceptible de constituer, tout au plus, une étape préalable à la mise en œuvre
éventuelle d’une procédure judiciaire relative à ces faits et déclarations.
113 Or, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence constante de la Cour visée au point 102 du présent arrêt, les activités préparatoires par rapport à l’exercice de l’autorité publique sont exclues de la dérogation prévue à l’article 51, premier alinéa, TFUE. Par ailleurs, dès lors que l’authentification de faits ou de déclarations ne débouche pas nécessairement sur une procédure impliquant l’exercice de l’autorité publique, une telle activité préparatoire ne saurait, à plus forte raison, relever de
cette dérogation.
114 Quant aux activités consistant à inscrire des informations dans des registres ou des listes publics, exercées en vertu, d’une part, de l’article 4 du code notarial et, d’autre part, de la loi n^o 304/2013 relative aux registres publics des personnes morales et physiques, la Cour a déjà jugé que les activités qui se rapportent aux mesures de publicité des actes ne traduisent pas un exercice direct et spécifique de l’autorité publique par le notaire (voir, par analogie, arrêts du 24 mai 2011,
Commission/Luxembourg, C‑51/08, EU:C:2011:336, point 113, et du 1^er février 2017, Commission/Hongrie, C‑392/15, EU:C:2017:73, point 136).
115 S’agissant des missions du notaire en matière de conservation de documents, de dépôt de liquidités, de gestion de fortune ainsi que d’administration de situations d’insolvabilité, il est constant qu’elles ne comportent pas l’exercice de pouvoirs décisionnels, de contrainte ou de coercition et sont, de surcroît, pour certaines, auxiliaires par rapport à d’autres activités exercées par lui.
116 En ce qui concerne la compétence du notaire de recueillir les protêts de lettres de change, la Cour a déjà jugé que de telles activités sont, en tant que phase préparatoire à d’autres procédures, exclues de la dérogation prévue à l’article 51, premier alinéa, TFUE (arrêt du 24 mai 2011, Commission/Grèce, C‑61/08, EU:C:2011:340, point 102).
117 Quant aux tâches qu’il accomplit dans le cadre de la procédure de liquidation de la succession en tant que commissaire judiciaire, il convient de relever, en premier lieu, que, ainsi qu’il ressort de l’article 162, paragraphe 2, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, le notaire, dans le cadre de la liquidation de la communauté de bien des époux en cas de dissolution du mariage en raison du décès de l’un des conjoints, détermine les biens de la communauté qui relèvent de la
masse successorale et ceux qui appartiennent, en propre, au conjoint survivant, mais, en l’absence d’accord entre les héritiers et le conjoint survivant sur les faits déterminants établissant ce qui relève de la communauté, il n’est pas tenu compte des biens litigieux.
118 En ce qui concerne, en deuxième lieu, l’établissement de la liste de l’actif et celle du passif de la succession, il découle de l’article 172, paragraphe 2, et de l’article 173, seconde phrase, de cette loi que, en cas de désaccord entre les héritiers, à l’instar de la solution visée au point précédent, il n’est pas tenu compte, dans le cadre de la procédure et du règlement de la succession, des éléments relevant de l’actif ou du passif de celle-ci qui font l’objet de ce désaccord.
119 Par ailleurs, aux termes de 189, paragraphe 1, de ladite loi, dans les cas visés à l’article 162, paragraphe 2, seconde phrase, à l’article 172, paragraphe 2, seconde phrase, et à l’article 173, seconde phrase, de cette même loi, il appartient, le cas échéant, aux parties de faire valoir leurs droits devant les juridictions.
120 En ce qui concerne, en troisième lieu, la mission dévolue au notaire de partager la succession entre les héritiers, il ressort de l’article 1697 du code civil, lu en combinaison avec l’article 185, paragraphe 1, sous e), de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, qu’il exerce cette compétence selon la volonté du de cujus ou, si celle-ci ne s’y oppose pas, selon l’accord des héritiers. En l’absence d’accord entre ces derniers, le notaire ne peut procéder au partage que si tous
les héritiers le demandent et s’ils ne s’opposent pas sur ce qui relève de la succession. Le partage de la succession est donc effectué sur une base consensuelle.
121 Par ailleurs, la procédure de liquidation d’une succession ne débouche pas nécessairement sur un partage de la succession. En effet, il résulte de l’article 1697, paragraphe 3, du code civil que, si ces conditions ne sont pas réunies, le notaire ne partage pas la succession et confirme les droits à la succession selon les parts successorales.
122 En ce qui concerne, en quatrième lieu, la compétence, conférée au notaire en vertu de l’article 169, paragraphe 1, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, de déterminer les parties avec lesquelles la procédure de liquidation de la succession se poursuivra ou non, notamment, ainsi que le prétend la République tchèque, en cas de litiges portant sur la part réservataire, sur l’imputation des libéralités sur la réserve héréditaire et sur l’indignité successorale, il convient de
souligner que, aux termes de cette disposition, cette compétence n’est exercée que si le règlement de ces litiges dépend uniquement de l’appréciation de points de droit nés de faits qui n’opposent pas les héritiers.
123 Par ailleurs, il ressort de l’article 169, paragraphe 2, de cette loi que la décision du notaire sur ce point n’affecte pas les droits successoraux des personnes dont la participation à cette procédure s’est achevée.
124 En outre, il ressort de l’article 170, paragraphe 1, de ladite loi que le règlement des litiges portant sur les droits successoraux qui requiert l’établissement de faits qui opposent les héritiers est de la compétence des juridictions.
125 S’agissant, en cinquième lieu, du pouvoir du notaire, dévolu à celui-ci en vertu de l’article 185, paragraphe 3, sous a), de cette même loi, de se prononcer, dans la décision sur la succession, sur la demande de compensation d’un héritier qui a pris soin du de cujus pendant une période longue ou qui a contribué dans une large mesure à l’entretien ou à l’augmentation du patrimoine du de cujus par son travail, par un soutien financier ou d’une manière similaire, sans avoir été récompensé pour
cela, introduite au titre de l’article 1693, paragraphe 3, du code civil, ainsi que le soutient, en substance, la Commission, sans être contredite sur ce point par la République tchèque, le notaire se prononce sur cette demande sur le fondement de faits qui n’opposent pas les héritiers.
126 Les tâches confiées au notaire en matière successorale étant ainsi exercées sur une base consensuelle et laissant intactes les prérogatives du juge en l’absence d’accord des parties, elles ne sauraient, en conséquence, être considérées comme participant, en tant que telles, directement et spécifiquement à l’exercice de l’autorité publique (voir, par analogie, arrêt du 1^er février 2017, Commission/Hongrie, C‑392/15, EU:C:2017:73, point 116).
127 Pour ce qui est de l’argument de la République tchèque relatif au règlement n^o 650/2012, il suffit de relever que cet acte porte sur la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions ainsi que sur la création d’un certificat successoral européen et n’affecte pas, par conséquent, l’interprétation de l’article 51, premier alinéa, TFUE (voir, par analogie, arrêt du 1^er février 2017,
Commission/Hongrie, C‑392/15, EU:C:2017:73, point 129).
128 S’agissant des activités notariales visées à l’article 100, paragraphe 3, de la loi relative aux procédures judiciaires spéciales, il convient de rappeler que des prestations professionnelles comportant un concours, même obligatoire, au fonctionnement des juridictions ne constituent pas, pour autant, une participation à l’exercice de l’autorité publique (arrêt du 24 mai 2011, Commission/Belgique, C‑47/08, EU:C:2011:334, point 112).
129 En ce qui concerne, enfin, le statut spécifique des notaires dans l’ordre juridique tchèque, il suffit de rappeler que c’est au regard de la nature des activités en cause, prises en elles-mêmes, et non pas au regard de ce statut en tant que tel, qu’il convient de vérifier si ces activités relèvent de la dérogation prévue à l’article 51, premier alinéa, TFUE (arrêts du 1^er décembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑157/09, non publié, EU:C:2011:794, point 84, et du 1^er février 2017,
Commission/Hongrie, C‑392/15, EU:C:2017:73, point 139).
130 Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que les activités notariales, telles qu’elles sont définies dans l’ordre juridique tchèque dans son état à la date d’expiration du délai fixé dans le second avis motivé complémentaire, ne participent pas à l’exercice de l’autorité publique, au sens de l’article 51, premier alinéa, TFUE.
131 Il convient, par conséquent, de constater que la condition de nationalité requise par la réglementation tchèque pour l’accès à la profession de notaire constitue une discrimination fondée sur la nationalité interdite par l’article 49 TFUE.
132 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer que le recours de la Commission est fondé.
133 Par conséquent, il convient de constater que, en imposant une condition de nationalité pour l’accès à la profession de notaire, la République tchèque a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 TFUE.
Sur les dépens
134 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République tchèque et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) déclare et arrête :
1) En imposant une condition de nationalité pour l’accès à la profession de notaire, la République tchèque a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 TFUE.
2) La République tchèque est condamnée aux dépens.
Signatures
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* Langue de procédure : le tchèque.