CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M ME ELEANOR SHARPSTON
présentées le 19 décembre 2013 ( 1 )
Affaire C‑224/12 P
Commission européenne
contre
Royaume des Pays-Bas et ING Groep NV
«Pourvoi — Aide d’État à une banque comportant un apport en capital en échange de titres — Modification des conditions de rémunération et de rachat des titres — Décision déclarant l’aide compatible avec le marché intérieur, sous réserve du respect de certaines conditions — Application du critère de l’investisseur privé»
1. Dans la présente affaire, la Commission européenne a formé un pourvoi contre l’arrêt du Tribunal ( 2 ) (ci-après l’«arrêt attaqué») annulant partiellement la décision 2010/608/CE ( 3 ) relative à une aide accordée par le Royaume des Pays-Bas (ci-après la «décision attaquée») à la banque ING Groep NV (ci-après «ING»). Par cette décision, la Commission avait notamment estimé qu’une aide à la restructuration consentie sous la forme d’un apport en capital en contrepartie de titres, selon des
conditions de remboursement précises, constituait une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE (aujourd’hui article 107 TFUE), mais que cette aide était compatible avec le marché intérieur compte tenu d’un certain nombre d’engagements de la part d’ING et de l’État néerlandais.
2. La principale question qui se pose porte sur l’application du critère de l’investisseur privé (à savoir, en substance, si l’entreprise bénéficiaire de l’aide aurait obtenu le même avantage que celui dont elle a bénéficié à partir de ressources d’État d’un investisseur privé, agissant dans des conditions de marché normales) ( 4 ) à une modification des conditions de remboursement de l’aide d’État. La Commission conteste également l’évaluation qu’a faite le Tribunal du manque à gagner causé à
l’État par la modification des conditions de remboursement. D’autres questions concernent les conséquences de l’annulation de la décision concluant à l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. De quelle manière l’annulation de cet aspect affecte-t-elle d’autres éléments de la décision attaquée, en particulier ceux concernant les engagements pris par ING et l’État néerlandais?
I – L’aide d’État en cause et la décision attaquée
3. Par décision du 12 novembre 2008 (ci-après la «décision initiale»), la Commission a autorisé une recapitalisation d’urgence en faveur d’ING, en vertu de laquelle l’État néerlandais souscrivait à une émission de titres d’ING à hauteur de 10 milliards d’euros (ci-après l’«apport en capital»). Aux termes des conditions initiales, ING avait le choix entre racheter ces titres au prix unitaire de 15 euros (soit 50 % au-dessus de leur prix d’émission) dans un délai de trois ans ou bien, après cette
période, de les convertir en actions ordinaires. Dans ce dernier cas, les autorités néerlandaises avaient toutefois la faculté d’obtenir de la part d’ING le rachat des titres au prix unitaire de 10 euros, plus les intérêts courus. Un coupon (paiement des intérêts) sur les titres ne devait être payé à l’État néerlandais que si un dividende était mis en paiement par ING sur les actions ordinaires. La Commission a estimé que l’apport en capital constituait une aide d’État au bénéfice d’ING mais l’a
autorisée à titre provisoire. Elle a également indiqué que si les autorités néerlandaises lui présentaient un plan de restructuration d’ING dans les six mois, l’autorisation serait automatiquement prolongée jusqu’à ce qu’elle adopte une décision sur ledit plan. La décision initiale prévoyait également que l’État néerlandais prendrait un certain nombre d’engagements, au nombre desquels, en particulier, celui de limiter la croissance du bilan d’ING.
4. Le 31 mars 2009, la Commission a notifié au Royaume des Pays-Bas sa décision d’ouvrir la procédure prévue par l’article 88, paragraphe 2, CE (ci-après la «décision d’ouverture») ( 5 ), en raison de doutes concernant la conformité de certains aspects d’une mesure relative à des actifs dépréciés (dispositif de soutien des «actifs illiquides», ci-après le «DSAI») avec les principes généraux applicables en matière de mesures de sauvetage des actifs ( 6 ). Cette mesure a toutefois été autorisée pour
une période de six mois. Dans la décision d’ouverture, la Commission a également mentionné que l’État néerlandais s’était engagé à présenter un plan de restructuration couvrant tant l’apport en capital que le DSAI.
5. Le 12 mai 2009, le Royaume des Pays-Bas a présenté ce plan. Après plusieurs réunions avec la Commission, ce dernier lui en a soumis une version révisée le 22 octobre 2009. Ce plan révisé comprenait, d’une part, des engagements relatifs à la mise en œuvre du plan de restructuration et, d’autre part, une modification des conditions de remboursement de l’apport en capital, autorisant ING à racheter jusqu’à 50 % des titres à leur prix d’émission, majoré des intérêts courus sur le coupon annuel de
8,5 % et d’une prime de remboursement anticipé si le cours de l’action ING était supérieur à 10 euros. Selon le niveau du prix de l’action ING, cette prime pouvait varier entre 340 et 705 millions d’euros, assurant un taux de rentabilité interne minimal de 15 %.
6. Le 18 novembre 2009, la Commission a adopté la décision attaquée, décision portant sur l’apport en capital, la modification des conditions de remboursement, le DSAI et les garanties accordées au titre du système national de garantie.
7. Aux termes de l’article 2 de la décision attaquée:
«L’aide à la restructuration consentie par les Pays-Bas au bénéfice d’ING constitue une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité.
L’aide est compatible avec le marché commun, compte tenu des engagements précisés à l’annexe II.
La limitation temporaire de la croissance du bilan, imposée dans la décision de la Commission du 12 novembre 2008 concernant la mesure de recapitalisation consentie à ING, est levée.»
8. L’annexe II contenait 11 séries d’engagements (qualifiés également dans la procédure de «mesures compensatoires») à la charge de l’État néerlandais et/ou d’ING, visant à remédier aux distorsions de concurrence causées par l’aide à la restructuration.
9. Dans sa motivation, la Commission n’a pas appliqué le critère de l’investisseur privé à la mesure d’apport en capital, à la modification des conditions de remboursement ou au DSAI, mais uniquement aux garanties d’engagement. En ce qui concerne la modification des conditions de remboursement, elle a considéré que, compte tenu du fait qu’ING aurait eu à payer antérieurement une prime de remboursement de 2,5 milliards d’euros mais qu’elle n’aurait plus à payer qu’une somme allant de 340
à 705 millions, elle bénéficiait d’un avantage supplémentaire compris entre 1,79 et 2,2 milliards d’euros ( 7 ).
II – L’arrêt attaqué
10. Le Royaume des Pays-Bas et ING ont tous deux contesté la décision attaquée devant le Tribunal.
11. Aux termes du recours ayant donné lieu à l’arrêt du 2 mars 2012, Pays‑Bas/Commission (T‑29/10), le Royaume des Pays-Bas a conclu à ce qu’il plaise au Tribunal «annuler l’article 2, premier alinéa, de la décision attaquée, qui est, entre autres, fondé sur le constat, exposé au considérant 98 de ladite décision, selon lequel la modification des conditions de remboursement de l’apport en capital consenti par les autorités néerlandaises comporte une aide additionnelle à ING de l’ordre de 2 milliards
d’euros».
12. Aux termes du recours ayant donné lieu à l’arrêt du 2 mars 2012, Pays‑Bas/Commission (T‑33/10), précité, ING, soutenue par De Nederlandsche Bank NV (DNB) (banque centrale des Pays-Bas) a conclu, pour sa part, à ce qu’il plaise au Tribunal annuler la décision attaquée, «dans la mesure où celle-ci considère que la modification des conditions de remboursement de l’apport en capital comporte une aide additionnelle à concurrence de 2 milliards d’euros».
13. Le Tribunal a joint les affaires et annulé «l’article 2, premier alinéa, de la [décision attaquée] ainsi que l’article 2, deuxième alinéa, de ladite décision et l’annexe II de cette décision». La motivation pertinente du Tribunal, contenue aux points 95 à 160 de l’arrêt attaqué, peut être résumée très brièvement de la manière suivante.
14. Le Tribunal a considéré, d’abord, que la modification des conditions de remboursement, en vertu de laquelle le Royaume des Pays-Bas a pu s’assurer un rendement qui n’était pas prévu dans les conditions initiales, aurait dû être appréciée au regard du principe de l’investisseur privé. Or, la Commission n’a pas appliqué le critère de l’investisseur privé à cette situation et a ignoré diverses études dont elle disposait ou pouvait disposer en ce qui concerne les rendements prévisibles et le
comportement d’un investisseur privé. Le Tribunal a rejeté les arguments selon lesquels ING était tenue de racheter les titres aux conditions initiales comme peu convaincants.
15. Le Tribunal a considéré, ensuite, qu’en tout état de cause, la Commission avait omis de prendre en compte le versement du coupon qui était devenu obligatoire dans le cadre des conditions de remboursement modifiées, et que le montant de l’aide éventuelle devait, par conséquent, être proportionnellement réduit du montant de ce coupon.
16. La Commission avait donc, selon le Tribunal, commis une erreur dans le calcul du montant de l’aide liée à la modification des conditions de remboursement. Les juges ont en effet estimé que la prise en compte de la rémunération prévue au titre des conditions modifiées aurait pu avoir des effets sur l’appréciation de la Commission, tant au niveau de la qualification de l’aide qu’au niveau de l’examen de sa compatibilité avec le marché intérieur, notamment pour ce qui est d’apprécier la
contribution d’ING ou l’étendue des mesures destinées à remédier aux distorsions de concurrence.
17. Le Tribunal a également considéré que l’aide à la restructuration qualifiée d’aide d’État au premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée comprenait l’aide censée découler des conditions de paiement modifiées, mais sans la distinguer du reste de l’aide. Il a donc estimé que le premier alinéa devait être annulé dans son intégralité.
18. Le Tribunal a enfin constaté que la Commission avait analysé l’ampleur des mesures compensatoires à la lumière, notamment, de l’aide découlant de la modification des conditions de remboursement. Il a ajouté que les erreurs que la Commission avait commises lui interdisaient désormais d’affirmer que l’aide à la restructuration représentait le montant d’aide considérable sur la base duquel les mesures compensatoires ont été appréciées, et que c’était donc à tort qu’elle avait conclu que la
modification des conditions de remboursement avait donné lieu à une aide d’État d’environ 2 milliards d’euros. L’illégalité de ce constat entraînait donc également nécessairement celle de l’article 2, deuxième alinéa, ainsi que de l’annexe II de la décision attaquée, dans la mesure où la compatibilité de l’aide à la restructuration dépendait d’une analyse et d’engagements dont le contenu s’appréciait au regard de l’aide à la restructuration, laquelle comprenait l’aide additionnelle.
III – Le pourvoi et la procédure devant la Cour
19. La Commission conclut qu’il plaise à la Cour:
— annuler l’arrêt attaqué, rejeter les recours de première instance et condamner le Royaume des Pays-Bas et ING aux dépens;
— à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire au Tribunal pour réexamen et réserver les dépens;
— à titre plus subsidiaire encore, annuler l’article 2, troisième alinéa, de la décision attaquée et condamner les requérantes aux dépens du pourvoi.
20. La Commission invoque au soutien de son pourvoi six moyens:
— premièrement, il n’existe aucune obligation juridique d’appliquer le critère de l’investisseur privé à une modification des conditions de remboursement concernant une mesure qui constitue elle-même une aide d’État;
— deuxièmement, le Tribunal a évalué de façon erronée le manque à gagner pour l’État membre résultant des conditions de remboursement modifiées;
— troisièmement, même si la Commission a eu tort de qualifier d’aide d’État les conditions de remboursement modifiées, le Tribunal n’était pas fondé à annuler intégralement l’article 2, premier alinéa, de la décision attaquée;
— quatrièmement, le Tribunal a commis une erreur de droit en déduisant nécessairement l’illégalité de l’article 2, deuxième alinéa, de la décision attaquée, du fait que la Commission avait commis une erreur en qualifiant d’aide d’État les conditions de remboursement modifiées;
— cinquièmement, le Tribunal a statué ultra petita en annulant l’article 2, deuxième alinéa, ainsi que l’annexe II de la décision attaquée;
— sixièmement, et à titre subsidiaire, si le Tribunal était fondé à annuler le premier et le deuxième alinéa de l’article 2 ainsi que l’annexe II de la décision attaquée, il ne pouvait s’abstenir d’annuler le troisième alinéa de l’article 2 de cette décision.
21. Le Royaume des Pays-Bas considère que les six moyens invoqués par la Commission sont dénués de fondement et conclut qu’il plaise à la Cour:
— rejeter tous les moyens de la Commission et condamner cette dernière aux dépens;
— à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire au Tribunal.
22. ING considère que plusieurs des moyens invoqués au soutien du pourvoi sont, en tout ou en partie, irrecevables, inopérants ou dénués de finalité juridique et que le pourvoi dans son ensemble est non fondé. ING conclut donc qu’il plaise à la Cour:
— déclarer le pourvoi non recevable et/ou privé d’effet sur certains points, le rejeter dans sa totalité, et condamner la Commission aux dépens;
— à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire au Tribunal et réserver les dépens.
23. DNB, intervenante en première instance au soutien d’ING, invite la Cour à rejeter les premier et quatrième moyens du pourvoi comme non fondés.
24. La Cour a autorisé les parties à déposer un second jeu de mémoires, mais limité au premier moyen du pourvoi. L’audience qui s’est tenue le 26 septembre 2013 s’est concentrée sur les premier et quatrième moyens du pourvoi.
Développements parallèles
25. Le 11 mai 2012, date à laquelle elle a formé le présent pourvoi, la Commission a adopté une nouvelle décision relative à l’aide à la restructuration accordée à ING ( 8 ). Réexaminant la modification des conditions de remboursement à la lumière du critère de l’investisseur privé, elle a considéré qu’un investisseur privé en économie de marché n’aurait pas accepté ces nouvelles conditions. Elle en a donc conclu que ces modifications constituaient une aide d’État, mais que, compte tenu de certains
engagements pris par le Royaume des Pays-Bas, elles étaient compatibles avec le marché intérieur.
26. Le Royaume des Pays-Bas et ING ont formé un recours en annulation devant le Tribunal au motif, notamment, que la Commission aurait fait une application erronée du critère de l’investisseur privé, mais les deux parties se sont désistées, et les affaires ont été radiées du registre de la Cour ( 9 ).
Sur le premier moyen du pourvoi (l’applicabilité du critère de l’investisseur privé)
27. Aux points 95 à 114 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a souligné que, pour qu’une mesure puisse être qualifiée d’aide d’État, elle doit, notamment, accorder à son bénéficiaire un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché. Dans le cas d’un apport en capital, il convient, selon lui, d’apprécier si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé d’une taille comparable à celle d’une autorité publique aurait pu être amené à
procéder à des apports de capitaux de la même importance. Le Tribunal a estimé, en effet, que dans l’hypothèse où, après avoir décidé de souscrire à un apport en capital émis par une entreprise et soumis à certaines conditions de remboursement, l’État accepte d’en modifier les conditions, tant l’apport en capital que la modification de ces conditions de remboursement sont susceptibles de constituer une aide d’État s’il s’avère que l’État n’a pas agi dans chacune de ces situations comme l’aurait
fait un investisseur privé placé dans une situation similaire. Le Tribunal a ajouté que la Commission ne pouvait pas se dispenser d’examiner la modification des conditions de remboursement au regard du critère de l’investisseur privé au seul motif que l’apport en capital lui-même constituait une aide d’État. Ce n’est, en effet, qu’à l’issue de cet examen que la Commission pouvait conclure ou non à l’octroi d’un avantage supplémentaire.
28. Le Tribunal a, d’abord, examiné, aux points 115 à 125 de l’arrêt attaqué, l’analyse effectuée par la Commission de la modification des conditions de remboursement et est arrivé à la conclusion que la Commission avait méconnu la notion d’aide en omettant d’apprécier si, en acceptant ladite modification, l’État néerlandais avait agi comme l’aurait fait un investisseur privé placé dans une situation similaire, notamment en raison du fait qu’il pouvait être remboursé de manière anticipée et qu’il
bénéficiait à cette occasion d’une plus grande certitude d’être rémunéré de façon satisfaisante compte tenu des conditions de marché existant à ce moment.
29. Le Tribunal a, ensuite, abordé aux points 126 à 134 de l’arrêt attaqué, l’examen de la probabilité qu’ING aurait exercé l’option lui permettant de rembourser le montant de l’apport en capital au cours des trois premières années au regard de l’affirmation de la Commission selon laquelle ING y aurait été de facto obligée, assurant ainsi à l’État des revenus à hauteur de 2,5 milliards d’euros et que, en acceptant les conditions de remboursement modifiées, le Royaume des Pays-Bas y avait renoncé et
avait donc accordé à cette banque une aide supplémentaire. Le Tribunal en a conclu qu’en fait ING n’aurait exercé l’option qu’en présence de circonstances économiques spécifiques qui ne s’étaient pas matérialisées et n’étaient pas susceptibles de le faire.
30. La Commission estime que c’est à tort que le Tribunal a considéré qu’elle aurait dû appliquer le critère de l’investisseur privé à la modification des conditions de remboursement. Elle se fonde essentiellement sur l’affirmation selon laquelle la modification des conditions de remboursement ne pouvait pas être regardée comme une mesure distincte, devant être examinée isolément de l’apport en capital. Elle fait valoir qu’il n’est pas contesté que l’apport en capital était une mesure d’aide d’État,
dont les conditions initiales de remboursement faisaient intégralement partie, et que l’État néerlandais était tenu de prendre en tant qu’autorité publique dans le but d’éviter la grave perturbation de l’économie néerlandaise que n’aurait pas manqué de provoquer la faillite d’une banque nationale d’importance systémique. Aucun investisseur privé ne pouvant se trouver placé dans une telle position, il n’y avait donc pas lieu d’appliquer le critère de l’investisseur privé à l’apport en capital, y
compris aux conditions de son remboursement, les conditions initiales aussi bien que les conditions modifiées. Le seul examen auquel la Commission estime qu’elle était tenue de procéder était de contrôler si la modification apportée aux conditions de remboursement conférait un avantage supplémentaire à ING.
31. Les autres parties considèrent, pour l’essentiel, que la modification des conditions de remboursement était distincte de l’apport en capital initial. Une fois cet apport en capital effectué, l’État se trouvait dans une position dans laquelle un investisseur privé aurait pu se trouver, à savoir celle d’un détenteur de titres, lequel aurait très bien pu souhaiter, pour des motifs économiques rationnels, renégocier les conditions auxquelles ces titres devaient être rachetés. C’est ce qu’a fait le
Royaume des Pays-Bas, en préférant échanger un rendement moins certain, même s’il était potentiellement supérieur, en contrepartie d’un remboursement garanti qui, s’il était inférieur, représentait néanmoins un rendement sur investissement satisfaisant. Cela étant, elles insistent sur le fait que, selon la jurisprudence, il était non pas seulement possible, mais nécessaire d’appliquer le critère de l’investisseur privé pour déterminer si la modification apportée aux conditions de remboursement
constituait une aide ou non.
32. ING ajoute que la Commission invoque un argument de fait irrecevable lorsqu’elle affirme que l’apport en capital et la modification des conditions de remboursement faisaient partie d’une série de mesures connexes.
33. Cette exception d’irrecevabilité ne me convainc pas. Les liens factuels existant entre les mesures ne sont pas en cause. La question qui se pose touche au problème de droit portant sur le point de savoir si, à la lumière de ces liens, c’est à juste titre que le Tribunal a décidé que la Commission aurait dû appliquer le critère de l’investisseur privé lorsqu’elle a évalué les conditions de remboursement.
34. Je souhaite souligner, de plus, que ce moyen ne porte que sur cette question. Il importe peu de savoir à quoi ce critère aurait conduit s’il avait été appliqué. Dans une certaine mesure, la discussion a dérivé vers cette autre question et, dans cette mesure, il n’y a pas lieu d’en tenir compte. De plus, la Commission a maintenant appliqué ce critère et les recours visant la manière dont elle l’a appliqué ont été retirés ( 10 ). Cela ne diminue cependant en rien la nécessité de trancher le
problème de savoir si le Tribunal a eu raison de considérer que la Commission aurait dû appliquer le critère de l’investisseur privé dans la décision attaquée.
35. Il convient, selon moi, de répondre à deux questions lorsque l’on examine le critère de l’investisseur privé: i) celle de savoir si l’action de l’État a été telle qu’elle peut raisonnablement être comparée à celle d’un investisseur privé; et ii) si tel est le cas, celle de savoir si cette action a été déterminée par des considérations uniquement ou, à tout le moins, principalement spécifiques à l’État agissant en tant qu’autorité publique, ou bien si la même action aurait pu être entreprise
«dans les conditions normales du marché par un investisseur privé se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle de l’État» ( 11 ). L’étape i) concerne l’applicabilité du critère, tandis que l’étape ii) porte sur son application. En l’espèce, seule la question de son applicabilité nous importe.
36. La Commission souhaite limiter l’applicabilité du critère de l’investisseur privé. Elle craint, peut-être, que l’application systématique de ce critère n’aboutisse à permettre de considérer qu’une mesure qui, à la lumière de toutes les circonstances, n’aurait pas été prise par un investisseur privé rationnel puisse être considérée comme répondant à ce critère ( 12 ). Si tel est le cas, il s’agit d’un problème général. En l’espèce, cependant, il ne peut être examiné qu’à la lumière des
circonstances dans lesquelles l’apport en capital à ING et la modification des conditions de remboursement ont été réalisés.
37. Il n’est pas contesté que, s’agissant de l’apport en capital lui-même, aucune comparaison pertinente n’était possible entre le comportement de l’État et celui d’un investisseur privé. Afin de «sauver» une banque nationale systémique dans le contexte de la grave crise financière qui a éclaté en 2008, l’État néerlandais a pleinement agi en sa qualité d’autorité publique suprême soucieuse de préserver la stabilité de l’économie nationale dans son ensemble, ce qui n’est tout simplement pas la
qualité en vertu de laquelle un investisseur privé pourrait agir ou souhaiterait le faire. Il est également constant que l’apport en capital proposé dans un premier temps devait être examiné comme un tout, y compris les conditions initiales de remboursement qui faisaient partie intégrante des aides accordées.
38. La question se pose, par conséquent, de savoir si les conditions de remboursement telles que modifiées devaient être examinées sur la même base que les conditions initiales, ou si leur modification devait être considérée comme étant une mesure distincte.
39. Il me semble que deux approches auraient pu être envisagées: réexaminer l’apport en capital comme un tout, en substituant les conditions de remboursement modifiées aux conditions initiales, afin de déterminer à nouveau le montant de l’aide; ou bien examiner la modification apportée aux conditions de remboursement comme une mesure séparée, afin de déterminer si des ressources d’État ont été utilisées pour conférer à ING un avantage, et si tel est bien le cas, dans quelle mesure. Selon la première
approche, l’examen des conditions de remboursement aurait fait partie intégrante de celui de l’apport en capital effectué par l’État en sa qualité d’autorité publique et aucune comparaison pertinente n’aurait été possible avec le comportement d’un investisseur privé. Cependant, la Commission a en fait adopté la seconde approche. Savoir si cette approche était la bonne n’est pas la question qui se pose en l’espèce. Le fait est qu’il s’agit de l’approche adoptée par la Commission.
40. Cela étant, il me semble difficile pour la Commission de soutenir à présent que la modification des conditions de remboursement était inséparable de l’apport en capital et qu’elle ne pouvait être examinée qu’au regard des mêmes critères. Je considère également que, si cette modification est examinée comme une mesure séparée, il devient alors tout à fait possible de comparer le comportement de l’État avec celui d’un investisseur privé.
41. Il est vrai que l’apport en capital initial était une aide d’État et que, par définition, un investisseur privé ne peut jamais se trouver dans la situation d’avoir accordé une aide d’État. Cependant, par l’octroi de l’aide initiale, l’État est devenu détenteur de titres dont le remboursement devait intervenir selon des conditions précises. Un investisseur privé pourrait également se trouver dans cette situation. Que la valeur des titres détenus par l’État soit supérieure à celle que détiendrait
habituellement un investisseur privé ne me semble pas être un élément décisif. Pas plus que ne l’est le point de savoir si les titres étaient d’une nature inhabituelle, ainsi que l’a affirmé la Commission, point qui, en tout état de cause, est une question de fait qui échappe à la compétence de la Cour dans le cadre d’un pourvoi. Tout détenteur de titres, quels qu’en soient le montant et la nature, est en droit de souhaiter ou d’accepter de renégocier les conditions de leur rachat. Il est donc
pertinent de comparer le comportement de l’État à cet égard avec celui qu’aurait adopté un hypothétique investisseur privé dans une situation comparable. La question qui se pose, il me semble, est tout simplement celle de savoir s’il aurait été rationnel pour un investisseur privé qui, pour quelque raison que ce soit, aurait détenu des titres dans les mêmes conditions et aurait été attentif aux paramètres de marché, d’accepter la même modification de ces conditions.
42. Il convient de noter que j’arrive à cette conclusion en considérant que la Commission a effectivement considéré la modification des conditions de remboursement comme une mesure séparée susceptible d’être analysée comme conférant un avantage identifiable à ING à l’aide de ressources d’État. Sans prendre position sur le point de savoir si cette approche est correcte ou appropriée, il me semble que, si la Commission avait, au lieu de cela, réexaminé l’apport en capital comme un tout, y compris les
conditions de remboursement modifiées, tout risque du type de celui auquel j’ai fait allusion au point 36 des présentes conclusions aurait pu être écarté, et ce même si le critère de l’investisseur privé avait été appliqué. Si l’apport en capital dans son ensemble avait été effectué à l’aide de ressources d’État pour conférer un avantage sans compensation économique ou retour adéquats au titre de la transaction spécifique (par opposition à un effet général positif sur l’économie nationale), il
n’aurait sans doute pas satisfait au critère de l’investisseur privé. Or, cet examen n’a pas eu lieu, et la question de l’applicabilité du critère dans ces circonstances ne s’est pas posée. En fait, la modification des conditions de remboursement a été examinée comme une mesure séparée et rien ne justifiait, dès lors, de ne pas appliquer le critère de l’investisseur privé.
43. Je suis donc d’avis qu’il convient de rejeter le premier moyen du pourvoi.
Sur le deuxième moyen du pourvoi (l’évaluation du manque à gagner)
44. Aux points 135 à 142 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, en admettant même que la Commission ait pu conclure que l’État avait subi un manque à gagner, elle n’avait pas correctement déterminé le montant de ce prétendu manque à gagner. Il a estimé que la Commission avait omis de prendre en considération le fait que, suite à la modification des conditions de remboursement, le versement d’un coupon représentant les intérêts échus au moment du remboursement anticipé ne dépendait plus du
versement d’un dividende aux titulaires d’actions ordinaires. La Commission avait connaissance de ce fait et ne pouvait pas l’ignorer. C’est ainsi que l’État néerlandais a perçu la somme de 258,5 millions d’euros à l’occasion du remboursement anticipé intervenu le 21 décembre 2009, un montant qu’il n’aurait pas obtenu en application des conditions de remboursement initiales, aucun dividende n’ayant été payé par ING pour l’année 2009. Si la Commission ne pouvait connaître d’avance le montant de
cette somme lorsqu’elle a adopté la décision attaquée, elle devait toutefois nécessairement s’informer sur l’incidence que pouvait avoir la possibilité d’un tel paiement sur le montant de l’aide additionnelle envisagé dans la décision attaquée. Le Tribunal a donc estimé que la Commission avait surestimé de plusieurs centaines de millions d’euros le montant du manque à gagner éventuel pour l’État néerlandais, et que cette erreur invalidait l’appréciation de la notion d’aide effectuée par elle.
45. La Commission affirme, premièrement, que selon les conditions initiales de remboursement présentées par le Royaume des Pays-Bas, ING était tenue de payer les intérêts courus au moment où elle aurait remboursé l’apport en capital, et que l’État néerlandais l’a informée que les conditions de remboursement étaient restées inchangées. Elle estime donc que c’est à juste titre qu’elle n’a pas déduit les intérêts courus effectivement payés en 2009. Le gouvernement néerlandais et ING contestent cette
affirmation mais considèrent qu’il s’agit d’une question de fait qui ne relève pas du contrôle exercé par la Cour dans le cadre d’un pourvoi.
46. Deuxièmement, la Commission soutient que le montant des intérêts qu’elle n’a pas déduit (à hauteur d’un maximum de 303 millions d’euros) n’a pas pu avoir d’effet sur la qualification de la modification des conditions de remboursement en tant que mesure d’aide ni sur l’appréciation de sa compatibilité avec le marché intérieur ou encore la portée des engagements pris en vue de remédier aux distorsions de concurrence. Le gouvernement néerlandais et ING répliquent à cela que les engagements en
question (qui figurent à l’annexe II de la décision attaquée) n’ont pas été donnés volontairement mais ont été dictés par la Commission compte tenu du montant de l’aide dont elle a constaté l’existence. Si ce montant avait été correctement calculé, la portée des engagements requis en aurait été modifiée.
47. Je conviens que la discussion relative au point de savoir si les conditions de remboursement modifiées ont été ou non correctement décrites dans le plan de restructuration révisé, et dans quelle mesure elles ont pu s’écarter des conditions initiales, est une question qui échappe à la compétence de la Cour dans le cadre d’un pourvoi. Le Tribunal a constaté que les deux séries de conditions étaient différentes, et que la Commission en était informée. Même si la Commission invoque une version des
faits différente, elle ne prétend pas que le Tribunal aurait dénaturé les éléments de preuve.
48. La question juridique de fond est de savoir si le Tribunal était fondé à conclure des faits tels qu’il les a constatés que «ne [pouvait] être écartée l’hypothèse» selon laquelle la prise en compte par la Commission des intérêts additionnels perçus par l’État «aurait pu avoir des effets sur» la qualification de la modification des conditions de remboursement d’aide d’État, l’appréciation de sa compatibilité avec le marché intérieur ou de la portée des mesures compensatoires, et de considérer que
«l’appréciation de la notion d’aide» par la Commission était de ce fait entachée d’une erreur de fait ( 13 ).
49. Il ressort du rappel des faits contenu aux points 14 et suivants de l’arrêt attaqué que, globalement, les engagements pris par le Royaume des Pays-Bas et ING afin de remédier aux distorsions de concurrence leur ont, pour l’essentiel, été imposés par la Commission comme une condition pour que l’aide puisse être considérée comme compatible avec le marché intérieur. Cependant, la modification des conditions de remboursement – dont l’appréciation fait l’objet du présent pourvoi – n’a été notifiée à
la Commission que le 22 octobre 2009, et rien n’indique, dans l’arrêt attaqué, que les engagements auraient été adaptés pour tenir compte de cette modification. Il me semble également peu certain qu’une différence de 303 millions d’euros sur un total d’un montant variant entre 1,79 et 2,2 milliards d’euros (soit une différence de 14 à 17 % environ) aurait influencé la décision de la Commission quant au point de savoir si l’on se trouvait en présence d’une aide d’État ou non et si, le cas
échéant, cette dernière était compatible avec le marché intérieur. Je considère cependant qu’il est à tout le moins plausible que les engagements auraient dû être révisés.
50. La formulation employée par le Tribunal («ne peut être écartée l’hypothèse» selon laquelle l’erreur factuelle relevée «aurait pu avoir des effets sur» l’appréciation de la Commission) n’apparaît pas injustifiable dans ces circonstances. Néanmoins, «l’appréciation de la notion d’aide» par la Commission s’en trouvait-elle pour autant invalidée? Dans la mesure où le Tribunal n’était pas compétent pour substituer sa propre appréciation, il me semble que la seule conclusion à laquelle il pouvait
parvenir était celle selon laquelle la Commission était tenue de procéder à une nouvelle appréciation des faits sur la base des éléments de fait corrects.
51. Je considère donc qu’il y a lieu de rejeter le deuxième moyen du pourvoi.
Sur le troisième moyen du pourvoi (l’annulation dans son intégralité du premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée)
52. Aux points 151 à 153 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que le premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée n’opérait aucune distinction entre les différents éléments de «l’aide à la restructuration» qualifiée d’aide d’État, mais qu’il incluait l’aide additionnelle de l’ordre de 2 milliards d’euros résultant de la modification des conditions de remboursement. Il en a donc conclu que, compte tenu des erreurs qui entachaient la qualification de la modification des conditions de
remboursement en tant qu’aide additionnelle opérée dans la décision attaquée, cet alinéa devait être annulé dans sa totalité.
53. La Commission estime que le Tribunal n’était pas en droit d’annuler le premier alinéa de l’article 2 dans son ensemble. Elle fait valoir qu’étant donné que la qualification des mesures autres que la modification des conditions de remboursement (en particulier, l’apport en capital et le DSAI) en tant qu’aide d’État était dissociable de toute erreur de qualification de ces conditions de remboursement modifiées, le Tribunal a violé le principe de proportionnalité. Elle ajoute que, en outre, le
premier alinéa n’était que purement confirmatif en ce qui concerne ces autres mesures (qui avaient déjà fait l’objet d’une appréciation dans la décision initiale), et qu’un acte purement confirmatif n’est pas susceptible de recours dans le cadre de la procédure en annulation. La Commission demande donc à la Cour de réformer l’annulation du premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée dans la mesure où elle concerne des mesures autres que la modification des conditions de remboursement.
54. Le gouvernement néerlandais et ING relèvent que l’alinéa en question est formé d’une seule phrase, dont il n’était pas possible d’annuler une quelconque partie en laissant formellement intacte la constatation de l’existence d’une aide d’État au titre des mesures autres que la modification des conditions de remboursement. Ils estiment que l’annulation doit cependant être comprise à la lumière de la motivation du Tribunal, motivation dont il ressort clairement que seule la qualification d’aide
d’État résultant de la modification des conditions de remboursement était visée. De plus, ils font valoir que l’annulation de l’article 2, premier alinéa, de la décision attaquée a pour effet de faire revivre la décision initiale, par laquelle la Commission avait constaté que l’apport en capital comportait une aide d’État, et que l’alinéa en question n’était pas «purement» confirmatif dans la mesure où il reposait sur un réexamen des faits, y compris des faits nouveaux relatifs à la modification
des conditions de remboursement.
55. Le problème qui se pose ici est en grande partie formel. Il n’est pas contesté que le Tribunal n’a pas eu l’intention d’annuler, en tant que telle, la qualification d’aide d’État des mesures autres que la modification des conditions du remboursement, pas plus qu’il n’est allégué qu’il aurait dû le faire. Les questions qui se posent sont de déterminer l’effet qu’a eu l’annulation sur le premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée dans son ensemble et de savoir si, après être arrivé à la
conclusion que la qualification de la modification des conditions du remboursement en tant qu’aide d’État était erronée, le Tribunal pouvait procéder autrement.
56. En ce qui concerne l’effet de l’annulation, la Commission relève à juste titre qu’un recours en annulation contre une décision qui se borne à confirmer une décision antérieure qui n’a pas été attaquée dans les délais fixés pour former un recours est irrecevable ( 14 ). Cependant, ce principe, qui concerne la recevabilité d’un recours en annulation, reflète simplement le fait que la décision antérieure ne peut plus être annulée, de sorte que l’annulation de la décision qui la confirme n’aurait
aucun effet sur la situation juridique. Par conséquent, dans la mesure où le premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée a confirmé les décisions antérieures qualifiant des mesures d’aide d’État, son annulation ne pouvait plus produire d’effets sur ces dernières. Cette conclusion s’applique, en tout état de cause, à la qualification de l’apport en capital et du DSAI d’aides d’État ( 15 ). En ce qui concerne les garanties, la situation est moins claire dans la décision attaquée, mais je
n’y relève aucune indication faisant état d’une décision antérieure en vertu de laquelle la Commission aurait constaté que les garanties déjà accordées étaient constitutives d’une aide d’État ( 16 ).
57. L’annulation du premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée dans son ensemble semble donc a) avoir été sans effet sur la qualification de l’apport en capital comme aide d’État intervenue antérieurement, mais b) avoir annulé la qualification en tant qu’aides d’État, dans la décision attaquée, non seulement de la modification des conditions de remboursement, mais également de l’aide octroyée en vertu du régime néerlandais de garantie. La qualification de cette dernière aide n’a cependant
pas été contestée au cours de la procédure de première instance.
58. Pour ce qui est de la question de savoir si le Tribunal aurait pu procéder autrement, la Commission invoque un précédent dans lequel celui-ci a effectivement annulé un alinéa comparable d’une décision en matière d’aides d’État en ce qu’il portait sur certains montants couverts par l’alinéa en question mais non identifiés de manière séparée ( 17 ). La Cour a fait pratiquement la même chose dans des circonstances comparables, en annulant, par exemple, une décision ordonnant la récupération d’une
aide accordée à quatre entreprises dans la mesure où le montant sur lequel elle portait couvrait des intérêts échus après que deux d’entre elles, non identifiées de manière spécifique dans le dispositif de la décision, ont été déclarées insolvables ( 18 ). Je ne vois aucune raison pour laquelle le Tribunal n’aurait pas adopté une approche similaire dans l’arrêt attaqué.
59. Je considère donc qu’il y a lieu de faire droit au troisième moyen du pourvoi dans la mesure où, en annulant le premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée dans son ensemble, le Tribunal a annulé cette décision en ce qu’elle constatait que les garanties accordées à ING au titre du régime national néerlandais de garantie étaient constitutives d’une aide d’État.
Sur le quatrième moyen (l’annulation consécutive du deuxième alinéa de l’article 2 de la décision attaquée)
60. Aux points 154 à 160 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que l’aide additionnelle accordée par le biais de la modification des conditions du remboursement faisait partie intégrante de l’aide à la restructuration examinée par la Commission, et que ce montant d’aide additionnelle ne pouvait pas être dissocié du dispositif de la décision attaquée ni de l’examen sous-jacent visant à «la détermination du niveau d’engagements requis pour permettre que l’aide soit déclarée compatible». Il a
estimé que l’illégalité de la constatation de l’existence d’une aide additionnelle de l’ordre de 2 milliards d’euros entraînait nécessairement l’illégalité de l’article 2, deuxième alinéa, de la décision attaquée, aux termes duquel l’aide était compatible avec le marché intérieur «compte tenu des engagements précisés à l’annexe II», et celle de l’annexe II elle-même, dans la mesure où la compatibilité de l’aide à la restructuration dépendait d’une analyse et d’engagements dont le contenu
s’appréciait au regard du montant de l’aide, laquelle comprenait l’aide additionnelle.
61. La Commission fait valoir, pour l’essentiel, que c’est à tort que le Tribunal a adopté cette approche, étant donné que les engagements ont été proposés par ING et l’État néerlandais, et que la Commission n’avait aucun pouvoir de les refuser alors même qu’ils allaient au-delà de ce qui était nécessaire en vue de remédier aux distorsions de concurrence. Ainsi, la Commission considère que même si elle a surestimé le montant total des aides, cela n’a eu aucune conséquence sur les mesures
compensatoires proposées et acceptées, et ne justifiait donc pas d’annuler les parties de la décision attaquée précisant les engagements à la lumière desquels l’aide pouvait être déclarée compatible avec le marché intérieur. La Commission soutient également que dans la mesure où la décision attaquée n’était pas une décision clôturant une procédure formelle d’examen au sens de l’article 7 du règlement (CE) no 659/1999 ( 19 ), elle n’avait pas le pouvoir d’assortir sa décision de conditions
conformément au paragraphe 4 de cet article.
62. Les autres parties se réfèrent aux points 14 à 36 de l’arrêt attaqué, qui montrent que la Commission a effectivement insisté sur les engagements exigés pour que l’aide puisse être considérée comme compatible avec le marché intérieur. Le Tribunal a considéré que le montant de l’aide avait été surestimé. Elles en concluent donc que si cette appréciation n’avait pas été erronée, la Commission n’aurait pas eu à exiger des engagements aussi lourds.
63. Il est nécessaire, selon moi, d’examiner, d’abord, les faits tels que le Tribunal les a constatés concernant la genèse des engagements décrits à l’annexe II de la décision attaquée. À cet égard, l’argument avancé par la Commission selon lequel la décision attaquée n’était pas une décision mettant fin à une procédure formelle d’examen ne me paraît pas pertinent. Ce qui importe c’est de savoir si, d’après les constatations du Tribunal, la Commission a effectivement dicté les conditions des
engagements énumérés à l’annexe II de la décision attaquée. Si tel est le cas, elle ne saurait alors se borner à invoquer l’argument selon lequel elle n’avait pas le pouvoir d’accepter des engagements moindres.
64. Dans le rappel de la procédure administrative figurant aux points 9 à 37 de l’arrêt attaqué, le Tribunal indique clairement que la Commission a exposé à plusieurs reprises les mesures qu’elle considérait comme nécessaires et affirmé que le plan de restructuration ne serait pas approuvé sans ces mesures. Le Tribunal utilise à cet égard des formules telles que «les demandes de la Commission» (point 20), «tels qu’exigés par la Commission» (point 29) et «pour répondre aux attentes de la Commission»
(point 31). Par contraste, il ne fait aucune allusion à un comportement similaire qu’aurait eu la Commission après la notification de la modification des conditions de remboursement le 22 octobre 2009, et la Cour n’est pas compétente pour se prononcer sur le point de savoir si, entre cette date et le 6 novembre 2009, lorsque ont pris fin les échanges de correspondances, un ou plusieurs des engagements contenus à l’annexe II ont été modifiés, que ce soit à la demande de la Commission ou à celle
d’une quelconque autre partie.
65. Le Tribunal n’a cependant pas fondé la conclusion à laquelle il est parvenu, et que la Commission conteste par le présent moyen, sur l’hypothèse que des engagements étaient requis du fait de la modification des conditions de remboursement. Il a considéré, plutôt, que la portée des engagements que la Commission était disposée à accepter, dans leur ensemble, était directement et proportionnellement dépendante du montant de l’aide, encore une fois dans son ensemble et donc en y incluant l’aide
résultant de la modification des conditions de remboursement, dont le Tribunal avait déjà jugé que l’appréciation qui en avait été faite était entachée d’erreurs. C’est dans ce contexte que la Commission oppose qu’elle n’avait aucun pouvoir pour déterminer la portée des engagements et qu’elle considère que la motivation du Tribunal est erronée.
66. Il me semble que la motivation en question est en effet insuffisante, mais non pour les raisons qu’invoque la Commission. La seule conclusion qu’il est possible de tirer des constatations de fait contenues aux points 9 et suivants de l’arrêt attaqué est que la portée des engagements que la Commission était disposée à accepter a été déterminée avant le 20 octobre 2009. Par conséquent, la notification de la modification des conditions de remboursement après cette date n’a pas eu d’effets sur ces
engagements. Rien ne justifiait donc que le Tribunal annule les parties de la décision attaquée reconnaissant la compatibilité de l’aide compte tenu de ces engagements. Si la Commission avait contesté cette partie de l’arrêt attaqué pour ces motifs, j’aurai été disposée à faire droit à ses arguments.
67. Cependant, le moyen invoqué par la Commission dépend de l’affirmation selon laquelle elle n’avait pas le pouvoir d’influencer les engagements proposés volontairement par l’État membre et la banque, ce que contredisent les constatations factuelles du Tribunal. La Commission ne reprochant pas au Tribunal d’avoir dénaturé les faits, je considère que le présent moyen doit être rejeté.
Sur le cinquième moyen (le Tribunal a statué ultra petita en annulant le deuxième alinéa de l’article 2 de la décision attaquée)
68. Aux points 64 et 66 de l’arrêt attaqué, le Tribunal expose les conclusions des parties au litige. Le Royaume des Pays-Bas demande l’annulation «de l’article 2, premier alinéa, de la décision attaquée, qui est, entre autres, fondé sur le constat, exposé au considérant 98 de ladite décision, selon lequel la modification des conditions de remboursement de l’apport en capital consenti par les autorités néerlandaises comporte une aide additionnelle à ING de l’ordre de 2 milliards d’euros». ING
présente, pour sa part, trois chefs de conclusions, dont un seul a été examiné par le Tribunal, à savoir l’annulation de la décision attaquée «dans la mesure où celle-ci considère que la modification des conditions de remboursement de l’apport en capital comporte une aide additionnelle à concurrence de 2 milliards d’euros».
69. Dans le dispositif de l’arrêt attaqué, le Tribunal a annulé l’article 2, premier et deuxième alinéas, ainsi que l’annexe II de la décision attaquée.
70. La Commission fait valoir que, en annulant l’article 2, deuxième alinéa, ainsi que l’annexe II de la décision attaquée, le Tribunal a excédé ses compétences, violé le principe dispositif, statué ultra petita et commis une irrégularité de procédure portant atteinte aux intérêts de la Commission. L’annulation réclamée dans les conclusions que le Tribunal a examinées ne visait que le premier alinéa de l’article 2, et rien dans la formulation des conclusions des parties (en particulier, l’emploi du
terme «notamment») ou dans les réponses fournies par les requérantes aux questions écrites posées par le Tribunal avant l’audience ne permettait de l’étendre à d’autres dispositions de la décision attaquée.
71. Le gouvernement néerlandais expose que, une fois le premier alinéa de l’article 2 annulé (c’est-à-dire la conclusion selon laquelle l’aide à la restructuration constituait une aide d’État), la conclusion contenue dans le deuxième alinéa (à savoir que l’aide était compatible avec le marché intérieur «compte tenu des engagements précisés à l’annexe II») devenait sans objet, tout comme ces engagements eux‑mêmes; le Tribunal n’a donc pas excédé ce qu’il lui était demandé en annulant ces dispositions
de la décision attaquée en réponse à une demande d’annulation du premier alinéa de l’article 2. Selon ING, le moyen serait irrecevable au motif qu’à aucun moment en première instance la Commission n’a contesté la clarté et la précision des conclusions des requérantes. Les deux parties estiment que, dans son deuxième chef de demande (en annulation de la décision attaquée «dans la mesure où la Commission a soumis l’approbation de l’aide à l’acceptation des interdictions de leadership sur les prix,
comme cela est indiqué dans la décision et dans son annexe II»), ING a bien demandé l’annulation du deuxième alinéa de l’article 2.
72. Je ne peux souscrire à l’argument invoqué par ING à l’encontre de la recevabilité du moyen. C’est clairement une fois que le Tribunal a statué que se pose la question de savoir s’il a excédé ses compétences ou non.
73. Sur le fond, je souscris à l’analyse du gouvernement néerlandais. L’annulation de la disposition de la décision attaquée constatant que l’aide à la restructuration constituait une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE – et qu’elle était donc, en principe, par définition incompatible avec le marché intérieur – signifiait qu’elle n’était plus une aide d’État et qu’elle n’était donc plus incompatible avec le marché intérieur. Dans ces conditions, la disposition de la décision
attaquée constatant que l’aide était compatible avec le marché intérieur compte tenu de certains engagements n’avait plus lieu d’être, dans la mesure où elle aurait équivalu à imposer des engagements au titre d’une aide déjà reconnue comme compatible sans ces engagements. L’annulation du deuxième alinéa de l’article 2 de la décision attaquée et de son annexe était donc le corollaire inévitable de l’annulation du premier alinéa du même article, conformément aux conclusions des parties examinées
par le Tribunal.
74. Je conclus donc au rejet du cinquième moyen.
Sur le sixième moyen (à titre subsidiaire: le défaut d’annulation du troisième alinéa de l’article 2 de la décision attaquée)
75. Dans le dispositif de l’arrêt attaqué, le Tribunal a annulé l’article 2, premier et deuxième alinéas de la décision attaquée (considérant, respectivement, que l’aide à la restructuration constituait une aide d’État et que cette aide était compatible avec le marché intérieur, compte tenu des engagements précisés à l’annexe II), sans toucher au troisième alinéa, qui levait la limitation temporaire de la croissance du bilan imposée à ING.
76. À titre subsidiaire et en prévision de l’hypothèse où la Cour écarterait les moyens qu’elle a invoqués précédemment, la Commission fait valoir qu’ayant annulé le premier et le deuxième alinéa de l’article 2 de la décision attaquée, le Tribunal a commis une erreur de droit en n’annulant pas également le troisième alinéa de cette disposition.
77. La Commission fait valoir que, dans sa décision initiale, elle a pris acte de l’engagement d’ING à limiter la croissance de son bilan afin de remédier aux distorsions de concurrence résultant de l’apport en capital dont elle a bénéficié, et qu’elle a donc décidé, compte tenu de cet engagement, qu’elle pouvait approuver l’apport en capital de manière temporaire. Elle ajoute que, le troisième alinéa de l’article 2 de la décision attaquée ayant levé la limitation temporaire de la croissance du
bilan résultant de la décision initiale, la décision de supprimer ces contraintes et la reconnaissance de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur étaient fondées sur la même analyse et les mêmes engagements et formaient un tout indivisible, dont la motivation ne peut être dissociée. Elle considère donc que, si c’est à juste titre que le Tribunal a annulé cette analyse et ces engagements, alors ING n’aurait pas dû être libérée des limitations qui avaient été imposées à la croissance
de son bilan avant l’adoption de la décision attaquée. Pour la Commission, en effet, le fait de maintenir le troisième alinéa de l’article 2 modifie la substance de la décision; en annulant des dispositions de la décision attaquée, le Tribunal ne pouvait donc pas placer ING dans une situation plus favorable que celle dans laquelle elle se trouvait avant l’adoption de cette décision, ni substituer sa propre appréciation à celle de la Commission dans la décision initiale lorsqu’elle a autorisé à
titre provisoire l’apport en capital.
78. Le gouvernement néerlandais pose la question de savoir comment le Tribunal pouvait annuler le troisième alinéa de l’article 2 alors qu’aucun chef de conclusion n’avait été présenté en ce sens. Il estime que cet alinéa n’avait pas perdu sa finalité après l’annulation du premier et du deuxième alinéa. Le point de savoir si leur annulation devait entraîner l’annulation du troisième alinéa exige un examen au fond auquel le Tribunal ne pouvait pas procéder en l’absence de demande en ce sens, et que
la Cour ne peut davantage effectuer dans le cadre d’un pourvoi. Il considère, en outre, que le moyen aurait perdu son objet. En effet, le 11 mai 2012, la Commission a adopté une nouvelle décision constatant une nouvelle fois que la modification des conditions de remboursement constituait une aide d’État (mais sans la quantifier) et l’autorisant aux mêmes conditions. ING invoque des arguments similaires, à savoir que le moyen serait manifestement irrecevable au motif que la Commission ne l’a pas
invoqué en première instance, et qu’il aurait perdu son objet après la décision du 11 mai 2012.
79. Il me semble que l’annulation du premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée (et, avec lui, celle du premier alinéa, corollaire inévitable) a eu pour effet (ainsi que le gouvernement néerlandais l’a fait valoir dans le cadre du troisième moyen du pourvoi) de faire revivre la décision initiale ayant qualifié l’apport en capital initial d’aide d’État. L’arrêt attaqué rappelle que, dans cette décision, la Commission a affirmé que, si un plan de restructuration lui était soumis dans un
délai de six mois, la validité de la décision initiale serait automatiquement prolongée jusqu’à ce qu’elle adopte une décision sur ce plan ( 20 ). Sa validité a donc été prolongée jusqu’à l’adoption de la décision attaquée. L’annulation des deux premiers alinéas de l’article 2 de la décision attaquée signifiait qu’il n’existait plus de décision portant sur le plan de restructuration. Conséquence logique de ce fait, la décision initiale, qui imposait une limitation de la croissance du bilan
d’ING, aurait dû bénéficier d’une nouvelle prolongation de sa validité jusqu’à l’adoption d’une décision finale.
80. Or, le Tribunal n’a pas annulé le troisième alinéa de l’article 2 de la décision attaquée, modifiant ainsi le contenu de la décision initiale (sans doute par inadvertance, il est permis de le penser, l’arrêt attaqué ne contenant aucune motivation à cet égard).
81. Sans surprise, les arguments des parties sur ce point contrastent avec ceux qu’elles ont avancés dans le cadre du cinquième moyen. À cette occasion, la Commission a fait valoir que le Tribunal n’était pas compétent pour annuler une disposition de la décision attaquée dont l’annulation n’avait pas été spécifiquement demandée par les parties requérantes, les autres parties estimant, pour leur part, que cette annulation découlait mécaniquement de l’annulation du premier alinéa de l’article 2 de la
décision attaquée. Le présent moyen n’étant invoqué par la Commission qu’à titre subsidiaire, il n’y a aucune incohérence dans son approche, mais plutôt, semble-t-il, dans celle des autres parties.
82. Pour ma part, je considère qu’il est cohérent avec l’analyse que j’ai faite du cinquième moyen de considérer que le Tribunal, après avoir annulé le premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée, n’était pas simplement fondé, mais tenu d’annuler non seulement le deuxième alinéa, mais également le troisième alinéa de cet article, afin de ne pas altérer la substance de la décision initiale, dont la validité avait été restaurée et prolongée par l’annulation du premier alinéa dudit article.
83. Je considère, en outre, que l’exception d’irrecevabilité invoquée par ING à l’encontre de ce moyen du pourvoi n’est pas soutenable. La Commission ne pouvait pas être tenue dès la première instance de présenter les conclusions qui sont les siennes à présent, étant donné que son seul objectif était de maintenir la décision attaquée.
84. Je ferais donc droit au sixième moyen du pourvoi.
IV – Conséquences de l’analyse
85. Je suis arrivée à la conclusion qu’il convient de faire droit au troisième moyen partiellement, et d’accueillir le sixième moyen dans sa totalité. L’arrêt attaqué doit, en conséquence, être annulé dans la mesure où, en annulant le premier alinéa de l’article 2 de la décision attaquée dans son ensemble, il n’en a pas exclu les dispositions reconnaissant que les garanties reçues par ING dans le cadre du régime national de garantie constituaient une aide d’État et dans la mesure où il a omis
d’annuler le troisième alinéa dudit article.
86. Il me semble qu’en se prononçant en ce sens, la Cour statuerait de manière appropriée sur le pourvoi, sans qu’il soit nécessaire de renvoyer l’affaire devant le Tribunal. L’existence d’une décision postérieure de la Commission, du 11 mai 2012, signifie, en outre, que les conséquences pratiques de l’arrêt seront limitées.
87. Conformément aux articles 138, 140 et 184 du règlement de procédure de la Cour, je considère qu’il convient que chacune des parties supporte ses dépens.
V – Conclusion
88. À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose donc à la Cour de:
— annuler l’arrêt rendu par le Tribunal du 2 mars 2012 dans l’affaire T‑29/10 et T‑33/10, Pays-Bas/Commission, dans la mesure où, en annulant le premier alinéa de l’article 2 de la décision 2010/608/CE de la Commission, du 18 novembre 2009, concernant l’aide d’État C 10/09 (ex N 138/09) accordée par les Pays-Bas dans le cadre du dispositif de soutien des actifs illiquides et du plan de restructuration, dans son ensemble, il n’a pas exclu de cette annulation les dispositions de cette décision aux
termes desquelles les garanties reçues par ING dans le cadre du régime néerlandais de garantie constituaient une aide d’État et dans la mesure où il a omis d’annuler le troisième alinéa dudit article 2;
— condamner chacune des parties à supporter ses propres dépens.
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( 1 ) Langue originale: l’anglais.
( 2 ) Arrêt du 2 mars 2012, Pays-Bas/Commission (T‑29/10 et T‑33/10).
( 3 ) Décision de la Commission du 18 novembre 2009 concernant l’aide d’État C 10/09 (ex N 138/09) accordée par les Pays-Bas dans le cadre du dispositif de soutien des actifs illiquides et du plan de restructuration d’ING (JO L 274, p. 139).
( 4 ) Voir, notamment, arrêts du 2 septembre 2010, Commission/Scott (C-290/07 P, Rec. p. I-7763, point 68 et jurisprudence citée), du 5 juin 2012, Commission/EDF (C‑124/10 P, point 78 et jurisprudence citée). Le critère de l’investisseur privé est également désigné comme le principe de l’investisseur privé, ou encore le principe (ou le critère) de l’investisseur privé en économie de marché (parfois abrégé sous le sigle «PIEM»).
( 5 ) JO 2009, C 158, p. 13.
( 6 ) Communication de la Commission concernant le traitement des actifs dépréciés dans le secteur bancaire de la Communauté (JO 2009, C 72, p. 1).
( 7 ) Voir, pour plus de détails, points 1 à 49 de l’arrêt attaqué.
( 8 ) C(2012) 3150 final – Aide d’État SA.28855 (N 373/2009) (ex-C/10/2009 et N528/2009) – Pays-Bas/ING – Aide à la restructuration (voir, en particulier, considérants 114 à 156).
( 9 ) Ordonnance du 6 décembre 2012, Pays-Bas/Commission et ING Groep/Commission (T‑325/12 et T‑332/12).
( 10 ) Voir points 25 et 26 des présentes conclusions.
( 11 ) Arrêt Commission/EDF, précité (point 79).
( 12 ) Il pourrait également y avoir une difficulté pratique dans la mesure où, si l’application du critère de l’investisseur privé nécessite une appréciation économique complexe, son application systématique imposerait une trop grande charge aux ressources de la Commission. Je ne pense pas, cependant, qu’une telle difficulté soit juridiquement pertinente.
( 13 ) Voir points 141 et 142 de l’arrêt attaqué.
( 14 ) Voir, notamment, arrêt du 29 novembre 2012, Royaume-Uni/Commission (C‑416/11 P, point 32).
( 15 ) Voir considérants 97 et 99 de la décision attaquée.
( 16 ) D’éventuelles garanties additionnelles sont également traitées dans la décision attaquée, mais il est précisé qu’elles seront évaluées dans une décision distincte (considérant 47 de la décision attaquée).
( 17 ) Arrêt du 13 septembre 2010, Grèce e.a./Commission (T-415/05, T-416/05 et T-423/05, Rec. p. II-4749).
( 18 ) Arrêt du 12 octobre 2000, Espagne/Commission (C-480/98, Rec. p. I-8717).
( 19 ) Règlement du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (JO 1999, L 83, p. 1).
( 20 ) Point 10 de l’arrêt attaqué. Voir, également, considérants 71 à 74 de la décision initiale.