CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. DÁMASO RUIZ-JARABO COLOMER
présentées le 12 mai 2009 ( 1 )
Affaires jointes C-202/08 P et C-208/08 P
American Clothing Associates NV
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI)
contre contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI)
American Clothing Associates NV
«Pourvoi — Propriété intellectuelle — Règlement (CE) no 40/94 — Marque communautaire — Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle — Motifs absolus de refus d’enregistrement d’une marque — Marques de fabrique ou de commerce identiques ou similaires à un emblème d’État — Représentation d’une feuille d’érable — Applicabilité aux marques de services»
I — Introduction
1. Le présent pourvoi, dans lequel les deux parties contestent l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 28 février 2008 ( 2 ), offre à la Cour l’occasion d’étudier la portée de la protection attribuée aux emblèmes nationaux en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement sur la marque communautaire ( 3 ), lu en combinaison avec l’article 6 ter de la convention de Paris ( 4 ).
2. Dans le cadre du pourvoi de l’affaire C-202/08 P, une entreprise fabriquant des vêtements, American Clothing Associates SA (ci-après «American Clothing») critique pour diverses raisons la protection excessivement généreuse que l’arrêt attaqué accorde aux emblèmes nationaux. En revanche, dans l’affaire C-208/08 P, l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) attaque la décision de la première instance communautaire car il estime que celle-ci a donné erronément une interprétation
restrictive de la convention de Paris qui exclut la protection des emblèmes de l’État vis-à-vis des marques de services.
3. L’analyse de ces aspects implique, d’une part, d’éclaircir le taillis complexe du droit international et du droit communautaire et, d’autre part, de se plonger dans les profondeurs de l’héraldique afin de rechercher les limites de la protection conférée aux emblèmes nationaux contre les tentatives visant à se les approprier à des fins mercantiles.
4. Cette science du blason évoque des querelles et des aventures d’une autre époque ( 5 ), à l’instar de celle ayant opposé Don Quijote au Chevalier de Blanche Lune, ainsi nommé en raison de son bouclier, qui arborait cet astre resplendissant. Heureusement, il ne s’agit pas ici de régler des conflits portant sur la «prééminence de beauté» entre deux dames ( 6 ), mais d’utiliser l’art de l’héraldique afin de définir les limites de la protection accordée à un emblème national.
II — Le cadre juridique
A — Le droit international
5. Les présents pourvois traitent de l’interprétation des articles 1, 6, 6 ter, 6 sexies et 7 de la convention de Paris, que nous exposons en détails ci-après.
6. Selon l’article 1:
«[…]
2) La protection de la propriété industrielle a pour objet les brevets d’invention, les modèles d’utilité, les dessins ou modèles industriels, les marques de fabrique ou de commerce, les marques de service, le nom commercial et les indications de provenance ou appellations d’origine, ainsi que la répression de la concurrence déloyale.
[…]»
7. L’article 6 dispose:
«1) Les conditions de dépôt et d’enregistrement des marques de fabrique ou de commerce seront déterminées dans chaque pays de l’Union [constituée par les pays auxquels s’applique la convention de Paris] par sa législation nationale.
[…]»
8. Certains aspects de l’article 6 ter, notamment les paragraphes 1 et 3 prennent une importance particulière.
a) Les pays de l’Union conviennent de refuser ou d’invalider l’enregistrement et d’interdire, par des mesures appropriées, l’utilisation, à défaut d’autorisation des pouvoirs compétents, soit comme marque de fabrique ou de commerce, soit comme élément de ces marques, des armoiries, drapeaux et autres emblèmes d’État des pays de l’Union, signes et poinçons officiels de contrôle et de garantie adoptés par eux, ainsi que toute imitation au point de vue héraldique.
[…]
c) […] Les pays de l’Union ne sont pas tenus d’appliquer lesdites dispositions lorsque l’utilisation ou l’enregistrement visé sous […] a) ci-dessus n’est pas de nature à suggérer, dans l’esprit du public, un lien entre l’organisation en cause et les armoiries, drapeaux, emblèmes, sigles ou dénominations, ou si cette utilisation ou enregistrement n’est vraisemblablement pas de nature à abuser le public sur l’existence d’un lien entre l’utilisateur et l’organisation. […]»
9. De même, l’article 6 sexies de la convention précitée revêt un intérêt certain:
«Les pays de l’Union s’engagent à protéger les marques de service. Ils ne sont pas tenus de prévoir l’enregistrement de ces marques.»
B — Le droit communautaire
10. La marque communautaire est essentiellement régie par le règlement no 40/94, lequel a établi ce titre de propriété industrielle de portée européenne.
11. Le septième considérant de ce texte traite de la protection conférée par la marque communautaire, dont l’objectif primordial est de garantir la fonction d’origine de la marque, et souligne que la protection a un caractère absolu lorsqu’il y a identité entre la marque et le signe et entre les produits ou services. Ce considérant ajoute que la protection s’applique également en cas de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou services.
12. Le neuvième considérant du règlement ajoute que la marque communautaire doit être traitée comme un objet de propriété indépendant de l’entreprise dont elle désigne les produits ou les services.
13. Il convient de relever l’article 1er du règlement no 40/94:
«1. Les marques de produits ou de services enregistrées dans les conditions et selon les modalités prévues par le présent règlement sont ci-après dénommées ‘marques communautaires’.
[…]»
14. L’article 7 du règlement no 40/94 dispose:
«1. Sont refusés à l’enregistrement:
[…]
h) les marques qui, à défaut d’autorisation des autorités compétentes, sont à refuser en vertu de l’article 6 ter de la convention de Paris;
[…]»
III — Les faits du litige
15. Le 23 juillet 2002, la requérante a présenté une demande de marque communautaire à l’OHMI. La marque dont l’enregistrement était demandé, composée de l’image d’une feuille d’érable et du groupe de lettres «rw», en majuscules, placé en dessous de cette image, est reproduite ci après:
Image
16. Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 18, 25 et 40, au sens de l’arrangement de Nice ( 7 ) à savoir:
— «Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes; peaux d’animaux; malles et valises; parapluies, parasols et cannes; fouets et sellerie» (classe 18);
— «Vêtements, chaussures, chapellerie» (classe 25);
— «Services de tailleurs, taxidermie; reliure; travaux, traitement et finissage de peausserie, de cuir, de fourrures et de matières textiles; développement de pellicules photographiques et tirage de photographies; travaux sur bois; pressurage de fruits; meunerie; traitement, trempe et finissage de surfaces de métaux» (classe 40).
17. Par décision du 7 octobre 2005, l’examinateur de l’OHMI a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits et les services concernés sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94, au motif que ladite marque était susceptible de susciter dans l’esprit du public l’impression qu’il existait un lien entre elle et le Canada, dès lors que la feuille d’érable est une imitation de l’emblème de cet État, tel qu’il figure dans la communication du bureau
international de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) aux États parties à la convention de Paris, du 1er février 1967, ainsi que dans la base de données de l’OMPI. Cet emblème est représenté ci-après (en rouge):
Image
18. Par décision du 4 mai 2006 la première chambre de recours a rejeté le recours ( 8 ) introduit par American Clothing contre la décision de l’examinateur et confirmé la décision de ce dernier.
19. La chambre de recours a jugé que la feuille d’érable de couleur rouge correspondait à l’emblème du Canada et, s’inspirant d’un arrêt du Tribunal de première instance ( 9 ), elle a examiné si le signe contesté contenait au point de vue de l’héraldique un élément identique ou une imitation de l’emblème du pays nord-américain. Selon la chambre de recours, l’élément verbal «RW» n’interdisait pas l’application de l’article 6 ter, paragraphe 1, sous a), de la convention de Paris.
20. La chambre de recours a écarté l’argument selon lequel la couleur des feuilles d’érable différenciait ces dernières étant donné que, comme aucune teinte n’avait été précisée sur la demande d’enregistrement, la marque pouvait apparaître sous n’importe quelle couleur, y compris le vermillon de l’emblème canadien.
21. Elle a également affirmé qu’il s’agirait, dans les deux cas, de la même feuille à onze pointes, en forme d’étoile à cinq branches sur une tige, avec un espacement visiblement identique entre les pointes. Elle en a déduit que le public concerné percevrait l’idéogramme comme étant une imitation héraldique de l’emblème canadien. Elle a donc estimé que l’enregistrement de la marque demandée pourrait induire le consommateur en erreur quant à l’origine des produits et services visés pour lesquels elle
avait été déposée, compte tenu également de la grande variété de produits et de services que le Canada peut offrir et promouvoir.
22. La chambre de recours n’a pas non plus accepté la prétendue renommée, en Belgique, de la marque RIVER WOODS, car elle a estimé que l’usage contraire à l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94 est incompatible avec l’acquisition du caractère distinctif par l’usage.
23. Enfin, la chambre de recours a rejeté les autres arguments d’American Clothing, qui faisait valoir qu’elle possédait plusieurs marques nationales similaires, y compris au Canada, et invoquait la pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI en matière des marques contenant un drapeau ou en emblème d’État.
IV — La procédure devant le Tribunal de première instance et l’arrêt attaqué
24. Le 8 août 2006, American Clothing a introduit une requête auprès du Tribunal de première instance qui visait l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 4 mai 2006, en avançant comme seul motif la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94.
25. Cette juridiction communautaire a examiné l’allégation d’invalidité en ce qui concerne les services de la classe 40 et les produits des classes 18 et 25.
Les marques de services et l’article 6 ter de la convention de Paris
26. À titre préliminaire, le Tribunal a analysé l’applicabilité de l’article 6 ter, paragraphe 1, sous a), de la convention de Paris aux marques de services, afin de déterminer si la marque demandée, en se référant à certains services, violait cette disposition. Si tel n’était pas le cas, le refus de l’OHMI d’enregistrer cette marque pour les services aurait constitué une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94 ( 10 ). Le Tribunal a motivé son intention de se prononcer
sur un aspect étranger aux prétentions des parties par la nécessité d’éviter que son jugement ne soit fondé sur des considérations juridiques erronées ( 11 ).
27. Le Tribunal a annulé la décision de la chambre de recours en ce qu’elle concernait l’enregistrement de la marque demandée pour les services de la classe 40, au motif que l’article 6 ter, paragraphe 1, sous a), de la convention de Paris, auquel renvoie l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94, ne s’applique pas aux services en général.
28. À cet effet, le Tribunal a étudié ( 12 ) le contenu des dispositions de ladite convention, en soulignant qu’elle ne mentionnait que les «marques de fabrique ou du commerce». Il a ajouté de même qu’il ressort clairement des articles 1, paragraphe 2, 6, paragraphe 1, et 6 sexies de la convention qu’il existe une distinction entre, d’une part, les «marques de fabrique ou du commerce» et, d’autre part, celles de «service». Étant donné que l’article 6 ter ne mentionne que les marques de fabrique ou
de commerce, c’est-à-dire les marques utilisées pour les produits, le Tribunal a déduit que l’interdiction d’enregistrement et d’utilisation contenue dans cet article ne concerne pas les marques qui désignent des services.
29. En outre, l’arrêt attaqué a mis en relief que l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94 ne fait que renvoyer à l’article 6 ter de la convention de Paris, lorsqu’il précise que «[s]ont refusés à l’enregistrement […] les marques qui [… sont à traiter de la sorte] en vertu de l’article 6 ter de la convention de Paris». Étant donné que l’article 6 ter de cette convention ne concerne pas les marques de services, il ne convient pas de leur appliquer le motif de refus absolu
d’enregistrement de cette règle communautaire. À cet égard, le Tribunal a rejeté l’argument de l’OHMI selon lequel l’article 7 du règlement no 40/94 ne fait pas de distinction entre les marques de produits et celles de services étant donné que, selon la juridiction, la distinction établie par l’article 6 ter de la convention de Paris prévaut, conformément au renvoi à cette disposition par l’article 7 du règlement no 40/94.
30. Le Tribunal a déduit de la combinaison des deux articles la volonté du législateur de ne pas étendre aux services l’interdiction posée à l’article 6 ter de la convention de Paris. En effet, dans le cas contraire, il aurait introduit dans le libellé de l’article 7 du règlement no 40/94 une interdiction similaire, évitant ainsi la distinction qu’il a implicitement créée entre les marques de produits et celle de services du fait du simple renvoi à l’article 6 ter de la convention de Paris.
31. Le Tribunal a ensuite rejeté l’argument que l’on pouvait s’appuyer sur l’arrêt ECA précité, étant donné que celui-ci ne se prononçait pas sur l’applicabilité de l’article 6 ter de la convention de Paris aux marques de services ou sur la nécessité de l’interprétation extensive de l’article 6 ter de la convention de Paris. De fait, ni le document de l’OMPI ( 13 ) présenté par l’OHMI ni l’article 16 du traité sur le droit des marques (ci-après le «TLT») ( 14 ) n’étayaient une telle exégèse de
l’article 6 ter. En outre, bien que la Communauté européenne ait signé ce traité le 30 juin 1995, elle ne l’avait pas ratifié.
32. Enfin, le Tribunal a présumé que, comme il était conscient, au moment de l’adoption du règlement no 40/94, de l’importance dans le commerce moderne des marques de services, le législateur communautaire aurait également pu étendre la protection conférée aux emblèmes étatiques par l’article 6 ter de la convention de Paris à cette catégorie de marques. Considérant que le législateur européen n’a pas jugé utile de procéder de la sorte, le Tribunal a estimé qu’il n’appartenait pas au juge
communautaire de se substituer au législateur ou d’interpréter contra legem les dispositions en cause.
Les produits relevant des classes 18 et 25 ( 15 )
33. Après avoir écarté l’applicabilité de la disposition communautaire en cause aux services, le Tribunal l’a analysée en ce qui concerne les produits. Il a pris pour hypothèse de départ que, pour empêcher l’enregistrement d’une marque complexe en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous h), il suffit que l’un de ses éléments soit la copie d’un emblème étatique ou une imitation au «point de vue héraldique», indépendamment de sa perception globale.
34. Dans ce sens, le Tribunal a examiné les arguments d’American Clothing selon lesquels le dessin controversé ne serait pas perçu comme l’emblème de l’État canadien ou comme une copie au «point de vue héraldique» avant de rejeter les principaux arguments de cette société.
35. Le Tribunal a en effet estimé que, dès lors que la demande d’enregistrement ne spécifiait aucune teinte, l’enregistrement en noir et blanc permettait à l’entreprise de présenter sa marque dans n’importe quelle gamme de couleur, et, par conséquent, aussi avec une feuille d’érable rouge. D’où l’idée que la couleur cramoisie de l’emblème canadien n’est pas pertinente dans le cas d’espèce, car il est vraisemblable que l’emblème de ce pays soit présenté en blanc et noir ( 16 ).
36. Le Tribunal a rejeté les prétendues divergences graphiques entre les tiges, et il a effectué une comparaison d’un «point de vue héraldique» entre la marque demandée et l’emblème du pays nord-américain. Par comparaison au «point de vue héraldique», au sens de l’article 6 ter de la convention de Paris, le Tribunal visait la description héraldique de l’emblème et non une éventuelle explication géométrique laquelle, par nature, serait beaucoup plus détaillée ( 17 ).
37. Il a trouvé quelques variations dans le dessin des tiges des deux feuilles, en particulier les deux échancrures situées de part et d’autre du tiers central de la feuille, lesquelles lui paraissaient être plus profondes dans l’emblème canadien. Néanmoins, il a admis qu’un tel détail ne figurerait jamais dans la description héraldique de l’emblème en question, mais peut être, le cas échéant, dans une description géométrique. Toutefois, cette dernière est dépourvue de pertinence pour la comparaison
au «point de vue héraldique».
38. Le Tribunal a confirmé la décision de la chambre de recours de l’OHMI selon laquelle le grand public, composé de consommateurs moyens, censés être normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés, n’accorde pas une attention particulière aux détails des emblèmes et des marques comme la largeur de la tige des feuilles d’érable.
39. En outre, le Tribunal a écarté l’argument avancé par American Clothing contre l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle l’enregistrement de la marque RW induirait le public en erreur au sujet de l’origine des produits et des services ( 18 ). Il a signalé que l’application de l’article 6 ter, paragraphe 1, sous a), de la convention de Paris n’était pas soumise à la condition de l’existence d’une erreur du public concerné quant à l’origine des produits désignés par la marque demandée
ou quant à l’existence d’un lien entre le titulaire de cette marque et l’État dont l’emblème faisait l’objet d’une tentative d’appropriation. Il a également rejeté l’argument de la notoriété de la marque RIVER WOODS ( 19 ) qui était avancé par American Clothing.
40. Enfin, le Tribunal n’a pas davantage admis les arguments fondés sur l’enregistrement d’autres marques nationales ou communautaires, identiques ou comparables à la marque demandée ou, de façon plus générale, sur l’enregistrement de marques comportant des représentations de drapeaux ou d’autres emblèmes étatiques. Le Tribunal a rappelé l’autonomie des systèmes nationaux et communautaire d’enregistrement des marques, dans lesquels la décision de l’enregistrement des signes relève d’une compétence
liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. En conséquence, la question de l’enregistrement d’un idéogramme en tant que marque communautaire ne peut être examinée qu’en fonction du règlement no 40/94, en tenant compte de son interprétation par le juge communautaire, mais non en se fondant sur une pratique antérieure des chambres de recours ( 20 ).
V — La procédure devant la Cour et les conclusions des parties
41. Dans l’affaire C-202/08 P (American Clothing Associates/OHMI), le pourvoi a été enregistré au greffe de la Cour le 16 mai 2008 ( 21 ), alors que celui de l’affaire C-208/08 P (OHMI/American Clothing Associates) a été déposé le 20 mai 2008.
42. Dans la première affaire, la requérante demande à la Cour d’annuler l’arrêt du Tribunal de première instance en ce qu’il a déclaré que la première chambre de recours de l’OHMI n’avait pas violé l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94 en adoptant la décision du 4 mai 2006. L’OHMI plaide dans son mémoire en défense pour le rejet du pourvoi.
43. Dans la deuxième affaire, l’OHMI réclame l’annulation du même arrêt du Tribunal de première instance, en ce qu’il a jugé que la disposition précitée du règlement sur la marque communautaire ne s’appliquait pas aux marques de services. American Clothing pour sa part plaide en faveur de la confirmation de cet arrêt.
44. Dans chaque affaire, la requérante demande la condamnation aux dépens de l’autre partie.
45. Par ordonnance du 11 février 2009, après avoir recueilli l’avis des intéressés et entendu l’avocat général, le président de la Cour a ordonné la jonction des deux affaires aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.
46. Les représentants d’American Clothing et de l’OHMI ont comparu à l’audience du 26 mars 2009 pour exposer leurs arguments et répondre aux questions des membres de la chambre.
VI — L’analyse des pourvois
47. Bien que le lien objectif entre les deux affaires soit évident, étant donné que les deux pourvois visent la même décision, les ressemblances s’arrêtent là. Les deux actions sont si différentes que l’on ne détecte plus d’autre convergence que celle relative à l’acte attaqué. Par conséquent, il convient d’étudier chacune des plaintes séparément.
A — Le pourvoi dans l’affaire C-202/08 P
1. Arguments des parties
48. La requérante dans cette affaire n’invoque qu’un seul motif de cassation: la violation par le Tribunal de première instance des articles 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94 et 6 ter de la convention de Paris. Elle fonde sa demande sur les trois arguments résumés ci-après.
49. En premier lieu, la requérante reproche au Tribunal dans l’arrêt attaqué d’avoir commis une erreur d’appréciation quant à la fonction essentielle des emblèmes de l’État, en ne limitant pas l’étendue de leur protection à des situations dans lesquelles leur fonction essentielle est remise en cause. Cela serait logique, étant donné que les emblèmes d’État constitueraient des signes protégés, comme les marques et les appellations d’origine, auxquels sont applicables par analogie les mêmes critères
de protection, tel que le critère concernant l’incidence d’un signe litigieux sur leur fonction essentielle. En ce qui concerne les emblèmes d’un pays, le refus d’enregistrement d’une marque ne saurait être justifié que lorsque celle-ci a une incidence sur le renvoi à l’identité et à la souveraineté nationale de ces derniers.
50. En second lieu, American Clothing reproche au Tribunal dans l’arrêt attaqué d’avoir préféré une description héraldique à une description géométrique, alors que l’article 6 ter de la convention de Paris ne protège pas le symbole, mais son interprétation artistique, en tant qu’œuvre graphique particulière. Par conséquent, les emblèmes arborant peu de caractéristiques héraldiques sont plus faciles à imiter, ainsi quelques petites différences suffiraient à écarter l’existence d’une copie du point de
vue héraldique. Le corollaire de l’arrêt attaqué serait l’octroi aux États d’un monopole quasi absolu sur les signes ne présentant pas de propriétés héraldiques caractéristiques.
51. En troisième lieu, American Clothing critique le Tribunal pour avoir méconnu l’examen de certaines circonstances particulières du signe demandé, comme l’impression d’ensemble produite par les marques complexes, pour lesquelles la répartition des éléments revêt une grande importance. Par conséquent, en méprisant cette impression d’ensemble, l’arrêt attaqué élèverait au rang de dogme absolu la protection des emblèmes nationaux compris dans d’autres marques en tant qu’«éléments» de celles-ci au
sens de l’article 6 ter, paragraphe 1, sous a), de la convention de Paris.
52. À cet égard, il reproche au Tribunal de n’avoir pas accepté l’enregistrement du signe visé, accompagné d’un «disclaimer» tel que prévu à l’article 38 du règlement no 40/94, suivant ainsi la pratique de l’Office canadien des marques. American Clothing estime que, ne prenant pas en considération la pratique de cette autorité nationale, le Tribunal a dénaturé les faits. En effet, ces points avaient suffisamment été établis de manière convaincante. En outre, l’OHMI ne devrait pas protéger les
emblèmes nationaux plus rigoureusement que ne le font les offices nationaux.
53. Enfin, dans l’affaire C-202/08 P, la requérante se plaint de ce que le Tribunal a omis toute référence aux conditions habituelles d’usage de la marque, étant donné que la manière dont elle prétendait l’utiliser n’aurait pas donné lieu à confusion car le public l’aurait perçue comme un ornement, sans aucun lien avec l’emblème national.
54. L’OHMI pour sa part rejette en bloc tous ces arguments et soutient que le Tribunal a correctement interprété les allégations avancées. Il défend la thèse d’une protection absolue des emblèmes sous trois aspects: 1) cette protection n’est pas subordonnée à la condition d’un préjudice causé à la fonction essentielle du signe; 2) le caractère absolu rend inutile de s’interroger sur la perception du public des signes comme élément distinctif ou simplement ornemental, et 3) le degré de protection ne
dépend pas non plus du caractère plus ou moins marqué des caractéristiques héraldiques.
55. L’OHMI nie également toute erreur de droit dans l’arrêt controversé qui découlerait de l’emploi de la description héraldique pour rechercher une éventuelle imitation sous l’angle de la science des blasons. Il réfute la position de la requérante sur le «disclaimer», et indique que l’article 38, paragraphe 2, du règlement no 40/94 ne s’applique que lorsque l’on met en cause le caractère distinctif d’un élément d’une marque. En outre, l’OHMI écarte la thèse en vertu de laquelle il aurait dû se
laisser guider par la pratique des autres offices d’enregistrement des titres de propriété industrielle, tel que l’Office canadien des marques.
56. L’OHMI réfute l’argument de la dénaturation des faits, car il constate que le Tribunal s’est limité à déclarer le manque de preuve relatif à la pratique de l’Office canadien des marques, indépendamment du fait que l’article 6 ter de la convention de Paris ne mentionne même pas l’obligation de se conformer aux habitudes des autorités de propriété industrielle des pays dont les emblèmes sont concernés par un litige. En résumé, le libellé de cette disposition qui enjoint de «refuser ou d’annuler
l’enregistrement» d’un signe incorporant un emblème national interdirait d’apprécier toute situation dans laquelle une marque contournerait l’alternative légalement imposée aux offices des marques.
2. L’examen du moyen unique du pourvoi
a) Concernant l’erreur qui consiste à ne pas tenir compte des fonctions essentielles des emblèmes étatiques
57. La requérante reproche d’emblée au Tribunal dans l’affaire C-202/08 P de n’avoir pas traité dans l’arrêt attaqué l’emblème canadien de manière analogue à une marque. En effet, s’il l’avait fait, il aurait suivi des critères de protection similaires, en s’attachant au fait que pour qu’un signe enregistré puisse bénéficier de la protection légale, il faut que sa fonction essentielle soit affectée.
58. L’analyse de ces allégations exige d’enquêter sur la nature des emblèmes nationaux tant à l’extérieur qu’au sein du droit des marques. Par ces vérifications, on approfondit la signification de l’extension de l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94 aux signes nationaux, lequel n’avait pas encore été commenté par la Cour.
i) La marque enregistrée et l’emblème: des tâches différentes
59. En général, par emblème on entend tout glyphe, symbole ou œuvre dans lequel une forme est représentée, soulignant le symbolisme du dessin ( 22 ). En revanche, dans le domaine juridique, les dictionnaires spécialisés associent de manière quasiment unanime ce vocable aux insignes liés à la souveraineté des pays, tels que les drapeaux et les blasons ( 23 ), et lui attribuent même la particularité d’évoquer un État, d’autres collectivités territoriales, des partis politiques ou d’entres entités
publiques ( 24 ).
60. Le droit international fournit un exemple classique du drapeau comme étant le reflet de la soumission à un État; il existe une coutume qui réserve aux États la faculté de conférer leur nationalité aux navires ( 25 ), ce qui autorise ces derniers à arborer le pavillon correspondant à ce pays et dont l’ordre juridique s’applique sur le vaisseau. Cet usage a été codifié dans la convention de Montego Bay ( 26 ).
61. Néanmoins, du point de vue sociologique, l’assimilation d’un insigne ou d’un emblème à une nation déterminée ne touche pas seulement les navires ou les aéronefs, mais également tous les citoyens. Afin d’illustrer cette affirmation, je renvoie à l’image de milliers de personnes agitant les fanions de la Star Banner ( 27 ) au cours de la récente cérémonie d’entrée en fonction de Barack Obama en tant que quarante-quatrième président des États-Unis. Je n’ai néanmoins aucun doute quant au fait que
tout citoyen conserve un souvenir de certaines démonstrations similaires d’adhésion à son lieu d’origine ou d’un athlète, champion olympique, pleurant d’émotion sur le podium pendant que son drapeau est hissé au son de l’hymne patriotique, ou bien des troupes de son armée saluant son drapeau.
62. Les considérations précédentes mettent en relief le fait que les liens entre les emblèmes nationaux et les sujets d’un État plongent leurs racines dans l’histoire, la culture, les traditions, les terres, le développement international et même l’idiosyncrasie caractéristique d’un peuple. En général, ces emblèmes sont les symboles d’une nation, dont ceux qui les portent se sentent plus ou moins fiers. Même lorsque ce n’est pas le cas, toute personne appartenant à ce groupe aperçoit son drapeau
parmi une multitude car son subconscient le reconnaît, indépendamment de ses goûts.
63. À supposer, ainsi que l’avance la requérante, que les emblèmes nationaux aient des «fonctions essentielles», il faudrait mettre en exergue celle de l’identification d’un pays et celle de la représentation de sa souveraineté. Ainsi, au sein d’un État, les emblèmes nationaux auraient une mission de «ciment de la société», alors que, à l’échelle internationale, ils faciliteraient la distinction entre les nationalités.
64. Ainsi donc, les marques remplissent dans le monde commercial un rôle différent de celui des emblèmes. La Cour s’est prononcée de manière réitérée au sujet de la mission des idéogrammes inscrits sur les registres des marques.
65. Selon une jurisprudence constante, le droit des marques constitue un élément essentiel du système de concurrence non faussé que le traité CE entend maintenir. Dans un tel système, les entreprises doivent s’attacher la clientèle par la qualité de leurs produits ou de leurs services, en les individualisant grâce à des signes distinctifs ( 28 ).
66. Dans ce contexte, la marque remplit la fonction essentielle de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’origine du produit ou du service qu’elle désigne, en lui permettant de les distinguer sans confusion possible de ceux qui ont une autre provenance ( 29 ) et en garantissant que tous les produits ou services de cette marque ont été fabriqués ou fournis sous le contrôle d’une entreprise unique à laquelle peut être attribuée la responsabilité de leur qualité ( 30 ).
67. Il n’est pas nécessaire d’insister sur la portée des divergences entre les «fonctions essentielles» des marques commerciales et celles des emblèmes nationaux. Néanmoins, ce contraste entre les fonctions essentielles n’est qu’un indice pour promouvoir un traitement juridique hétérogène, car il convient de rechercher encore si le législateur a voulu leur accorder le même traitement dans le domaine du droit de la propriété industrielle.
ii) Les marques enregistrées et les emblèmes: une protection différente
68. La jurisprudence a déjà formulé des lignes directrices pour la protection des signes enregistrés. Ainsi, en se fondant sur le dixième considérant de la directive 89/104/CEE ( 31 ), qui correspond au septième considérant du règlement no 40/94, la jurisprudence a souligné que la protection conférée par la marque enregistrée a pour objectif premier de garantir l’origine et, en cas de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou les services, le risque de confusion constitue la
condition spécifique de la protection ( 32 ).
69. En outre, selon la Cour, on ne peut invoquer les facultés du titulaire d’une marque enregistrée énumérées à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/104, qui est le pendant de l’article 9, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 que lorsque l’identité ou la similitude tant des marques que des produits ou des services désignés génère une certaine confusion dans l’esprit du consommateur ( 33 ).
70. Dans ces articles, on entend par risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement ( 34 ).
71. Enfin, le risque de confusion doit être apprécié globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents, notamment les éléments distinctifs et dominants, ou la perception que le consommateur moyen a de la marque comme étant un ensemble, sans examiner chaque détail ( 35 ). Afin d’évaluer le degré de similitude entre les marques concernées, il y a lieu de déterminer leur degré de similitude visuelle, auditive et conceptuelle et de pondérer ces éléments en fonction de la catégorie de
produits ou de services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés ( 36 ).
72. Par conséquent, il semble aisé de comprendre que la protection des emblèmes étatiques répond à des critères fondamentalement différents de ceux qui régissent les marques. Néanmoins, en raison du défaut de règles jurisprudentielles communautaires, il convient de chercher une orientation parmi les règles juridiques applicables et dans la doctrine.
73. Au départ, la convention de Paris liait la surveillance des emblèmes nationaux à l’ordre public ( 37 ), peut-être en raison de l’idée que ces symboles appartiennent à tous les citoyens, ce qui implique qu’il n’y a pas lieu de ne pas conférer un droit exclusif les concernant à une entreprise ( 38 ).
74. Dans sa version actuelle, résultant de la révision de Lisbonne, l’article 6 ter de ladite convention internationale établit la protection de manière absolue sur deux plans: d’une part, elle s’applique à tous les produits et, lorsque le droit national le prévoit, elle s’applique également aux services ( 39 ) de la nomenclature de Nice. D’autre part, elle n’est pas subordonnée à la création d’un lien entre la marque dont l’enregistrement est demandé et l’emblème. En effet, l’article 6 ter,
paragraphe 1, sous c), deuxième phrase, de cette convention ( 40 ) autorise l’enregistrement ou l’emploi d’un signe s’il n’induit pas le public en erreur concernant l’existence d’un lien entre l’entreprise qui l’utilise et l’organisation intergouvernementale propriétaire de l’emblème. Par conséquent, a contrario sensu, il peut être déduit que ce lien n’est pas exigé pour les emblèmes étatiques, mais uniquement pour les emblèmes de ces entités internationales ( 41 ).
75. En conséquence, il suffit qu’il y ait une réplique exacte ou une imitation ( 42 ) de l’emblème pour que la protection conférée aux symboles nationaux par l’article 6 ter soit mise en œuvre. Cette dernière comprend non seulement le rejet de la demande d’enregistrement ou l’annulation de l’enregistrement des signes qui tenteraient de s’approprier l’emblème national, mais également l’interdiction de leur utilisation lorsque l’entreprise en cause ne bénéficie pas de l’autorisation obligatoire des
autorités compétentes. Il convient d’observer que, comme motif de refus absolu ( 43 ), l’intervention des offices des marques qui sont liés par la convention de Paris doit être faite d’office, alors que la protection des marques commerciales est toujours attribuée sur demande des parties.
76. Enfin, il semble clair que les institutions légales que sont la nullité et la caducité, qui sont caractéristiques aux marques commerciales, n’ont pas d’incidence sur les emblèmes nationaux.
77. Cette esquisse des disparités entre la fonction essentielle des marques et des emblèmes et la protection qui leur est accordée écarte la thèse de la requérante dans l’affaire C-202/08 P, qui défend l’application par analogie des mêmes critères de protection aux deux types de signes.
78. Par conséquent, c’est à juste titre que l’arrêt attaqué n’a pas suivi les allégations d’American Clothing, dont les arguments doivent être rejetés.
b) Concernant l’erreur d’interprétation de l’«imitation au point de vue héraldique»
79. La requérante dans l’affaire C-202/08 P reproche au Tribunal dans l’arrêt attaqué d’avoir erronément interprété l’expression «imitation au point de vue héraldique», en préférant notamment une description héraldique à une description géométrique, ce qui est contraire à l’article 6 ter de la convention de Paris.
80. Cette critique sous-entend donc une divergence d’opinion sur la signification de la périphrase qui figure dans ledit article 6 ter. En l’absence d’une jurisprudence qui pourrait étayer mes explications, il me faut à nouveau faire appel à la doctrine et aux règles essentielles de l’herméneutique juridique.
81. En premier lieu, en vertu de la protection absolue conférée aux emblèmes, les États obtiennent un monopole de l’enregistrement, mais non de l’utilisation ( 44 ), sur ces symboles. Ce monopole est cependant soumis à certaines limites, étant donné qu’il ne comprend pas l’image qui incorpore l’emblème, mais uniquement son expression héraldique, compte tenu du fait que, en de nombreuses occasions, ces signes officiels prennent la forme d’idéogrammes d’utilisation générale, comme un animal, une
plante, des étoiles ou d’autres symboles similaires ( 45 ). En outre, la notion d’«emblème national» exige une interprétation stricte ( 46 ).
82. En second lieu, le point de vue héraldique n’implique pas la description d’un érudit de cette science. Malgré le fait que l’héritage de l’héraldique ne soit pas négligeable, tant en raison de son incidence sur les arts plastiques qu’en raison de la richesse de son vocabulaire technique, il convient de ne pas présumer que le consommateur moyen domine ce lexique, qui est extrêmement complexe pour les non-initiés.
83. Une description géométrique ne répondrait pas davantage aux exigences de l’article 6 ter. Le caractère minutieux inhérent à cette description viderait de sa substance la protection que cet article attribue aux emblèmes, car une nuance suffirait à écarter l’identité entre deux descriptions.
84. C’est donc à juste titre que le Tribunal a fondé la spécification de l’emblème canadien sur la communication que le Canada a présentée à l’office de l’OMPI. En effet, ce texte laissait transparaître les éventuelles similarités et différences entre la marque demandée et le symbole de ce pays. Étant donné que l’inscription mentionnait uniquement le drapeau avec le symbole, sans plus d’indications, le Tribunal n’a pas commis d’erreur dans l’arrêt attaqué en retenant l’explication de l’emblème la
plus simple, une feuille d’érable de couleur rouge ( 47 ), car American Clothing n’a avancé aucun argument relatif à une erreur de fait ou de droit.
85. En troisième lieu, en ce qui concerne l’«imitation», la comparaison n’est pas utile pour déterminer le risque de confusion. Il faut que la copie réunisse les conditions héraldiques qui distinguent l’emblème des autres signes ( 48 ). Ces particularités sont généralement indiquées dans les brèves descriptions que les États qui sont parties de la convention de Paris envoient à l’office de l’OMPI.
86. En résumé, il ressort des explications qui précèdent que je n’aperçois dans l’arrêt attaqué aucune erreur dans l’interprétation de l’expression «imitation au point de vue héraldique». Par conséquent, il y a lieu de rejeter les allégations de la requérante.
c) Concernant les erreurs résultant de l’absence de prise en compte de certaines singularités du signe demandé à l’enregistrement en tant que marque
87. American Clothing reproche au Tribunal de n’avoir pas tenu compte de l’«impression d’ensemble» que génèrent les marques complexes. Il le critique également pour n’avoir pas défendu l’enregistrement de la marque auprès de l’OHMI avec un «disclaimer» dans lequel il aurait ôté toute protection à l’emblème litigieux, suivant en cela la pratique des autorités canadiennes compétentes en matière de marques. En ne procédant pas ainsi, les preuves qu’American Clothing aurait produites sur la pratique du
«disclaimer» au Canada auraient été dénaturées. Cette société se sent également discriminée car l’OHMI aurait, dans des situations similaires, interprété différemment les articles 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94 et 6 ter de la convention de Paris.
88. En ce qui concerne l’impression générale de la marque, la protection absolue des emblèmes nationaux s’étend également, en vertu de l’article 6 ter de la convention de Paris, aux situations dans lesquelles ces symboles ne constituent qu’une partie d’un autre signe. On ne saurait conférer un autre sens audit article lorsque celui-ci ajoute l’expression «soit comme élément de ces marques». Si l’on ne percevait pas ainsi cet article, la protection qu’il confère aux emblèmes serait totalement
dépourvue d’efficacité, car, en les incorporant dans une image comprenant d’autres éléments, il serait possible de contourner l’interdiction à leur enregistrement.
89. La pratique du «disclaimer» est une faculté de l’OHMI qui lui permet de sauvegarder l’enregistrement dans certaines circonstances, mais ce n’est pas une obligation. En tout état de cause, l’agence communautaire n’exerce pas cette faculté car elle applique le principe selon lequel les signes comportant plusieurs éléments ne peuvent pas se prévaloir de la protection d’un seul d’entre eux ( 49 ). Si la requérante demande à la Cour d’enjoindre à l’OHMI d’accepter un disclaimer, il convient de ne pas
oublier que, en vertu de l’article 63, paragraphe 6, du règlement no 40/94, il appartient à l’agence de prendre les dispositions adéquates afin de respecter les décisions prises par les juridictions communautaires.
90. Cependant, contrairement aux affirmations d’American Clothing, le Tribunal ne nie pas la pratique de l’Office canadien des marques; il se limite au point 85 à constater de manière convaincante que cette entreprise n’a pas démontré une série d’allégations portant sur ce point. La requérante ne précise pas la façon dont les preuves ont été dénaturées. Partant, cet argument, qui met en cause l’évaluation des faits réalisée par le Tribunal, espère obtenir un meilleur résultat en cassation.
Cependant, l’article 58 du statut de la Cour de justice interdit à cette dernière toute ingérence dans la détermination des faits. Étant donné que la requérante n’a pas démontré l’argument de la dénaturation, qui était l’unique voie possible pour que la juridiction de céans puisse s’immiscer dans les aspects factuels ( 50 ), il y a lieu de déclarer l’irrecevabilité de l’argument qui vient d’être analysé.
91. À titre surabondant, si l’on devait accueillir cet argument de la requérante en invoquant des litiges passés résolus par l’OHMI, il existe une jurisprudence constante en vertu de laquelle les décisions concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire qui sont prises par les chambres de recours en vertu du règlement no 40/94 relèvent d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque
communautaire ne doit être apprécié que sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non pas sur la base d’une pratique antérieure ( 51 ). Par conséquent, l’argument tiré du caractère discriminatoire de l’arrêt litigieux ne saurait pas non plus prospérer.
92. En ce qui concerne l’expérience d’autres autorités nationales en matière de marques, le Tribunal a rappelé au point 84 de l’arrêt controversé que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles qui lui sont propres, qu’il poursuit des objectifs qui lui sont spécifiques, et qu’il est totalement indépendant de tout système national. Par conséquent, l’OHMI examine uniquement les signes conformément à la règle communautaire, sans être lié par les
décisions des offices des États membres, bien qu’il tienne compte, en tant qu’éléments de faits, des marques déjà enregistrées dans les pays de l’Union ( 52 ).
93. Enfin, la requérante se plaint du fait que le Tribunal a omis d’étudier les conditions habituelles d’utilisation de la marque demandée. Selon elle, la manière dont elle entendait utiliser l’idéogramme n’aurait généré aucune confusion, étant donné que le public l’aurait perçue comme un ornement, sans l’associer à l’emblème canadien.
94. Néanmoins, ainsi que l’affirme le Tribunal au point 77 de l’arrêt attaqué, l’application de l’article 6 ter de la convention de Paris n’est pas soumise à une éventuelle erreur du public concerné quant à l’origine des produits désignés par la marque demandée ou à l’existence d’un lien entre le titulaire de cette marque et l’État dont l’emblème est reproduit. Pour une partie de la doctrine, la raison de l’article 6 ter, sous a), réside dans la nécessité d’éviter que le consommateur ne pense qu’il
existe un lien «officiel» entre le signe et l’État, du fait de la simple présence de l’emblème national sur la marque ( 53 ). Cependant, bien que la règle s’appuie sur l’intérêt d’éviter l’établissement d’un lien avec l’emblème national, il ne s’agit pas d’une condition à son application. Partant, il n’y a pas lieu non plus d’accueillir cet argument.
95. Eu égard aux considérations précédentes, après avoir écarté les prétentions de la requérante dans l’affaire C-202/08 P, il convient de rejeter le motif unique de cassation soulevé par American Clothing et, en conséquence, de rejeter le pourvoi dans sa totalité.
B — Le pourvoi en cassation dans l’affaire C-208/08 P
1. Arguments des parties
96. Dans son pourvoi, l’OHMI demande l’annulation partielle de l’arrêt du Tribunal en ce qu’il a jugé que l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94, lu en combinaison avec l’article 6 ter de la convention de Paris, n’était pas applicable aux marques de services ( 54 ).
97. Sa demande repose sur un unique motif, l’erreur de droit commise par le Tribunal lorsqu’il a interprété littéralement l’article 6 ter de la convention de Paris, sans tenir compte de son esprit ou de son économie. En résumé, l’agence communautaire défend une interprétation extensive de cet article de la convention, en s’appuyant sur les considérations suivantes:
1) la révision de la convention entreprise à Lisbonne en 1958 a étendu aux marques de services l’obligation des États contractants de protéger les marques commerciales et de fabrique, en introduisant l’article 6 sexies ( 55 ). En effet, la réforme cherche à mettre les deux catégories, celle des biens et celle des prestations, sur un pied d’égalité;
2) ainsi qu’il ressort de l’article 29, paragraphe 1, du règlement no 40/94, le législateur ne cherchait pas à établir une différence de traitement entre les marques de commerce et celles de services;
3) l’article 16 du TLT, avec lequel a contrario le Tribunal a confirmé que l’article 6 ter n’était pas applicable aux marques de services, n’apporte qu’une précision sur le champ d’application de la convention, sans le modifier, et
4) la Cour s’est prononcée, au moins implicitement, en faveur d’une égalité de traitement de ces deux catégories de signes. En effet, dans l’affaire connue sous le nom de «Fincas Tarragona» ( 56 ), dans sa réponse à la question préjudicielle, la Cour n’a pas dissipé d’office et de manière préalable le doute relatif à l’applicabilité aux marques de services de l’article 4, paragraphe 2, sous d), de la directive 89/104, lu en combinaison avec l’article 6 bis de la convention de Paris, lequel, tout
comme l’article 6 ter de cette convention, ne mentionne que les marques de commerce ou de fabrique.
98. De son côté, American Clothing relève le caractère clair et inconditionnel de ce même article 6 ter, qui ne serait pas applicable aux marques de services.
99. Selon American Clothing, dans l’arrêt Fincas Tarragona précité, la Cour n’a pas examiné l’article 6 bis de la convention de Paris, indépendamment du fait que le Tribunal avait déjà conclu antérieurement qu’il ne concernait pas les marques de services ( 57 ).
100. Cette partie allègue également que l’article 6 sexies de la convention de Paris n’a pas d’incidence sur l’article 6 ter. En effet, il est déduit de l’acte de Lisbonne que l’idée plus ambitieuse qui tendait à assimiler les marques de services aux marques de commerce n’a pas prospéré au cours de cette conférence.
101. Selon American Clothing, l’article 16 du TLT ne nuance pas l’article 6 ter controversé de la convention de Paris, mais il le complète et étend son champ d’application aux services.
2. L’analyse du pourvoi
102. Bien que je partage l’avis de l’OHMI lorsqu’il dénonce une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94, lu en combinaison avec l’article 6 ter de la convention de Paris, je ne suis pas d’accord avec son affirmation que l’erreur provient de l’interprétation littérale de cet article. Je n’approuve pas non plus l’idée d’appliquer ce dernier de manière extensive en renvoyant à l’article 6 sexies et au TLT, en raison de la distorsion excessive
du sens de tous les articles nommés.
103. Le Tribunal a mal compris la finalité de la convention de Paris et le renvoi à cette convention de l’article 7 du règlement sur la marque communautaire. L’analyse de chacune de ces règles séparément permet de tirer des conclusions utiles.
a) En ce qui concerne l’interprétation correcte de l’article 6 ter de la convention de Paris
104. L’objectif essentiel de la convention de Paris consiste à maintenir le principe du traitement national, en lui adjoignant quelques règles minimales de protection visant les objets de propriété industrielle concernés ( 58 ).
105. La règle du traitement national comprend l’interdiction de discrimination des signes étrangers, en leur attribuant une protection juridique identique à celle dont jouissent les brevets, les marques et les modèles au niveau national. Elle comprend également une règle de conflit selon laquelle, dans les pays qui sont parties à ladite convention, les procès relatifs à la propriété industrielle sont jugés conformément à la lex loci proteccionis, à savoir selon l’ordre juridique de l’État dans
lequel on recherche la protection juridique de l’invention, de la marque ou du dessin, selon le principe de territorialité inhérent à cette convention ( 59 ).
106. En conséquence, les signataires de la convention de Paris s’obligent à appliquer leurs lois en matière de propriété industrielle de manière identique pour les marques de leurs ressortissants et celles des ressortissants des autres États parties à cette convention, ceux-ci pouvant réclamer au minimum la protection conférée dans celle-ci.
107. Partant, c’est à tort que le Tribunal nie partiellement la protection des emblèmes sous prétexte de l’article 6 ter car, bien que cette disposition ne mentionne pas les marques de services, il ne lui appartient pas non plus de s’occuper in extenso de l’étendue du champ d’application de la protection absolue des emblèmes. L’article en question requiert seulement des États parties à la convention de Paris qu’ils n’enregistrent pas de marques de fabrique ou de commerce qui soient identiques ou
contiennent un emblème national. Cependant, les pays signataires restent libres d’étendre le domaine d’application de la règle aux marques de services ( 60 ). En ce sens, c’est à juste titre que l’OHMI invoque le caractère de «réglementation minimale» de la convention de Paris et non celui de «loi uniforme». Le droit communautaire ne manque pas d’exemple de ce type de règlementations qui autorisent les États membres à aller au-delà des conditions établies dans une directive, en recourrant à la
méthode dite de l’«harmonisation minimale».
108. En revanche, contrairement à l’opinion de l’OHMI, l’article 6 sexies de la convention de Paris ne valide pas une interprétation extensive de l’article 6 ter de la même convention. L’article 6 sexies se limite à inviter les États signataires à défendre les marques de services, sans exiger qu’elles soient enregistrées. Partant, il appartient à chaque État de définir les modalités de protection des signes, les États pouvant donc les assimiler aux marques de fabrique et de commerce ou prévoir un
régime spécial. En tout état de cause, à l’exception des mentions concrètes relatives aux services dans ladite convention, telles que celles figurant aux articles 2 et 3 lus en combinaison avec l’article 5 ( 61 ), il appartient au législateur national de déterminer le degré d’équivalence des marques qui désignent des prestations et des marques qui figurent sur les biens de consommation ( 62 ).
109. En résumé, l’extension de la protection des emblèmes nationaux aux marques de service ne découle pas de la convention de Paris, mais du droit national ou communautaire.
b) La portée de l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94
110. La question portant sur le point de savoir si ce motif de refus absolu est également applicable aux marques de service dépend par conséquent du règlement sur la marque communautaire et mérite selon moi une réponse affirmative pour les raisons énumérées ci-après.
111. En premier lieu, les septième et neuvième considérants de ce règlement, tout comme son article 1er, paragraphe 1, étayent son importance, à des conditions identiques, pour les marques portant sur des biens et celles désignant les prestations de services. En outre, sous réserve d’erreur ou d’omission, il n’existe aucun article dans ledit règlement qui les différencie, notamment en ce qui concerne leur enregistrement ou les droits de leurs titulaires.
112. En second lieu, le législateur européen, agissant dans l’exercice de ses compétences, a assimilé les deux signes dans le règlement no 40/94. Il serait absurde de lui attribuer la volonté de restreindre la protection des emblèmes nationaux précisément en ce qui concerne les services, qui constituent le secteur d’activités économiques ayant le plus de poids dans le produit intérieur brut de tous les États membres.
113. Dans ces circonstances, je suis persuadé qu’il convient d’interpréter le renvoi de l’article 7, paragraphe 1, sous h), comme étant relatif au refus d’enregistrement de l’article 6 ter de la convention de Paris, mais non à son champ d’application supposé.
114. En troisième lieu, je ne partage pas l’argumentation du Tribunal selon laquelle au moment de la rédaction du règlement no 40/94, le législateur européen était conscient de ce que le renvoi fait dans l’article 7, paragraphe 1, sous h), impliquait de réduire le caractère opposable des emblèmes nationaux aux marques de commerce ou de fabrique, en laissant ces emblèmes sans défenses face aux marques de services ( 63 ). Je soupçonne au contraire que les États membres avaient pleinement conscience de
ce que la convention de Paris n’impliquait pas cette réduction et qu’elle ne rognait pas non plus leur faculté de décider le type de protection qu’ils voulaient assurer pour les marques de services dans l’espace communautaire.
115. Contrairement à ce que suggère l’arrêt attaqué, notamment si l’on tient compte de la sensibilité des gouvernements vis-à-vis de ces emblèmes, il est improbable qu’aucun État membre ne se soit aperçu de la diminution de la protection conférée aux symboles nationaux dans le règlement no 40/94, de caractère tellement novateur, et ayant requis une approbation à l’unanimité conformément à l’article 235 du traité CEE (devenu article 235 du traité CE, lui-même devenu article 308 CE). Selon l’arrêt
attaqué, la réduction de la protection résulte du renvoi fait à l’article 7, paragraphe 1, sous h).
116. En conséquence, il y a lieu d’accueillir le motif unique de cassation avancé par l’OHMI dans l’affaire C-208/08 P, relatif à une erreur de droit concernant l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94, lu en combinaison avec l’article 6 ter de la convention de Paris, et d’annuler l’arrêt visé par le pourvoi introduit par l’agence communautaire.
VII — Les dépens
117. La solution que je suggère impose de condamner American Clothing aux dépens du recours introduit devant le Tribunal, conformément à l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal de première instance.
118. En raison du rejet de toutes ses prétentions dans les affaires C-202/08 P et C-208/08 P, American Clothing doit également supporter les dépens des deux pourvois en cassation en vertu des dispositions de l’article 122, paragraphe 1, lu en combinaison avec l’article 69, paragraphe 2, premier point, du règlement de procédure de la Cour.
VIII — Conclusion
119. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose que la Cour:
1) rejette le pourvoi formé par American Clothing Associates SA dans l’affaire C-202/08 P contre l’arrêt prononcé le 28 février 2008 par la cinquième chambre du Tribunal de première instance des Communautés européennes dans l’affaire T-215/06;
2) accueille l’unique motif de cassation avancé par l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) dans l’affaire C-208/08 P contre l’arrêt prononcé le 28 février 2008 par la cinquième chambre du Tribunal de première instance des Communautés européennes dans l’affaire T-215/06 et annule cet arrêt dans la mesure où il déclare que l’article 7, paragraphe 1, sous h), du règlement no 40/94 sur la marque communautaire, lu en combinaison avec l’article 6 ter
de la convention de Paris, ne s’applique pas aux marques de services;
3) condamne American Clothing Associates SA à supporter la totalité des dépens résultant des procédures engagées devant le Tribunal et devant la Cour, notamment les frais générés par les pourvois dans les deux affaires.
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( 1 ) Langue originale: l’espagnol.
( 2 ) Arrêt rendu dans l’affaire T-215/06, American Clothing Associates/OHMI (Représentation d’une feuille d’érable) (Rec. p. II-303, ci-après l’«arrêt attaqué»).
( 3 ) Règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 3288/94 du Conseil, du 22 décembre 1994 (JO L 349, p. 83), et enfin, par le règlement (CE) no 422/2004 du Conseil, du 19 février 2004 (JO L 70, p. 1, ci-après le «règlement no 40/94»).
( 4 ) Convention pour la protection de la propriété industrielle, signée à Paris le 20 mars 1883, dans sa version révisée et modifiée (Compilation des traités des Nations unies, vol. 828, no 11847, p. 108).
( 5 ) Apparue en Europe au début du XIIe siècle dans les joutes et les tournois, l’héraldique a rapidement perdu sa fonction essentielle qui était d’identifier les chevaliers, pour représenter ensuite les histoires d’alliances de lignées, ainsi que pour décorer des palais et des demeures, ce qui a amené le déclin de sa fonction en raison de la commercialisation des héraldistes. Messía de la Cerda y Pita, L. F., Heráldica Española — El diseño heráldico, Edimat, Madrid, 1998, p. 19 à 22.
( 6 ) Cervantes, Don Quijote de la Mancha, introduction et notes de Martín de Riquer, RBA, Barcelone, 1994, deuxième partie, chapitre LXIV, p. 1106.
( 7 ) Texte concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques du 15 juin 1957, dans sa version révisée et modifiée.
( 8 ) Affaire R 1463/2005-1.
( 9 ) Arrêt du 21 avril 2004, Concept/OHMI (ECA) (T-127/02, Rec. p. II-1113, point 40, ci-après l’«arrêt ECA»).
( 10 ) Point 23 de l’arrêt attaqué.
( 11 ) Voir points 24 et 25 de l’arrêt attaqué, qui se fondent sur les arrêts de la Cour du 27 septembre 2004, UER/M6 e.a. (C-470/02 P, point 69), et du 13 juin 2006, Mancini/Commission (C-172/05 P, point 41).
( 12 ) Aux points 26 à 32 de l’arrêt attaqué.
( 13 ) Notamment, l’article 7 des «Généralités sur l’article 6 ter de la convention de Paris», lesquelles peuvent être consultées sur le site internet de l’OHMI, selon le point 19 de l’arrêt attaqué.
( 14 ) Trademark Law Treaty (TLT), signé à Genève le 27 octobre 1994, afin d’étendre aux marques de services la protection conférée aux marques de produits par la convention de Paris (point 31 de l’arrêt attaqué).
( 15 ) Points 59 et suiv. de l’arrêt attaqué.
( 16 ) Le Tribunal s’appuyait sur les points 45 et 46 de son arrêt ECA, précité.
( 17 ) À cet égard, le Tribunal a de nouveau cité l’arrêt ECA précité, point 44.
( 18 ) Points 76 et suiv. de l’arrêt attaqué.
( 19 ) Arrêt attaqué, point 81.
( 20 ) Points 82 à 85 de l’arrêt attaqué.
( 21 ) Voir télécopie du 8 mai.
( 22 ) Diccionario de la lengua española, Real Academia Española, 21e éd., Espasa Calpe, Madrid, 1992, p. 803. Voir aussi le nouveau petit Robert, Dictionnaire de la langue française, Dictionnaires Le Robert, Paris, 1993, p. 829.
( 23 ) Black’s Law Dictionary, 7rd ed. Ed. West Group, St. Paul, Minneapolis (USA), 1999, p. 540, et Creifelds Rechtswörterbuch, 16e éd., C. H. Beck, Munich, 2000, p. 663 («Hoheitszeichen»).
( 24 ) Voir notamment Cornu, G., Vocabulaire juridique, 8e éd., Presses Universitaires de France, 2000, p. 328.
( 25 ) Dupuy, J.-M., Droit international public, 4e éd., Dalloz, Paris, 1998, p. 72.
( 26 ) Convention des Nations unies sur le droit de la mer, signée à Montego Bay (Jamaique) le 10 décembre 1982, en vigueur depuis le 16 novembre 1994. Cette convention a été approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 98/392/CE du Conseil, du 23 mars 1998 (JO L 179, p. 1).
( 27 ) Également appelée affectueusement «Stars and Stripes» et «Old Glory».
( 28 ) Arrêts du 17 octobre 1990, HAG GF (C-10/89, Rec. p. I-3711, point 13); du 4 octobre 2001, Merz & Krell (C-517/99, Rec. p. I-6959, point 21); du 12 novembre 2002, Arsenal Football Club (C-206/01, Rec. p. I-10273, point 47), et du 17 mars 2005, Gillette Company et Gillette Group Finland (C-228/03, Rec. p. I-2337, point 25).
( 29 ) Arrêts du 29 septembre 1998, Canon (C-39/97, Rec. p. I-5507, point 28); du 29 avril 2004, Björnekulla Fruktindustrier (C-371/02, Rec. p. I-5791, point 20), et du 6 octobre 2005, Medion (C-120/04, Rec. p. I-8551, point 23).
( 30 ) Arrêts du 23 mai 1978, Hoffmann-La Roche (102/77, Rec. p. 1139, point 7); du 18 juin 2002, Philips (C-299/99, Rec. p. I-5475, point 30), ainsi que Arsenal Football Club, précité (point 48).
( 31 ) Première directive du Conseil du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1)
( 32 ) Voir arrêt Medion, précité (point 24); du 10 avril 2008, adidas et adidas Benelux (C-102/07, Rec. p. I-2439, point 28), et du 12 juin 2008, O2 Holdings & O2 (UK) (C-533/06, Rec. p. I-4231, point 47).
( 33 ) Arrêt Medion, précité (point 25).
( 34 ) Arrêts du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer (C-342/97, Rec. p. I-3819, point 17); Medion, précité (point 26), et du 12 juin 2007, OHMI/Shaker (C-334/05 P, Rec. p. I-4529, point 33).
( 35 ) Arrêts du 11 novembre 1997, SABEL (C-251/95, Rec. p. I-6191, points 22 et 23); Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité (points 18 et 25); du 22 juin 2000, Marca Mode (C-425/98, Rec. p. I-4861, point 40); du 23 mars 2006, Mülhens/OHMI (C-206/04 P, Rec. p. I-2717, points 18 et 19); et OHMI/Shaker, précité (point 35). Voir également ordonnance du 28 avril 2004, Matrazen Concord/OHMI (C-3/03 P, Rec. p. I-3657, point 28).
( 36 ) Arrêts Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité (point 27); du 12 janvier 2006, Ruiz-Picasso e.a./OHMI (C-361/04 P, Rec. p. I-643, point 37), et OHMI/Shaker, précité (point 36). Voir également ordonnance du 27 avril 2006, L’Oréal/OHMI (C-235/05 P, point 40).
( 37 ) Bogsch, A., «Les cent premières années de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle», La propriété industrielle, OMPI, no 7/8 — juillet/août 1983, p. 224.
( 38 ) Lema Devesa, C., «Artículo 7 — Motivos de denegación absolutos» dans Casado Cerviño, A., et Llobregat Hurtado,.M.-L (Coordinadores), «Commentarios a los reglamentos sobre la marca comunitaria», 2e éd., La Ley, Madrid, 2000, p. 100.
( 39 ) Fernández-Nóvoa, C., ‘Tratado sobre Derecho de Marcas’, Marcial Pons, Madrid, 2001, p. 170; l’idée est implicite dans la note 82 en bas de page.
( 40 ) Point 8 des présentes conclusions.
( 41 ) Bodenhausen, G. H. C., Guide d’application de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, BIRPI, 1969, p. 101.
( 42 ) En suivant ici de nouveau Fernández-Nóvoa, C., op. cit., p. 170, en déplaçant néanmoins au domaine communautaire son juste commentaire sur le droit espagnol.
( 43 ) Lema Devesa, C., op. cit., p. 100, ni le caractère absolu de ce refus en raison de l’éventualité de son autorisation.
( 44 ) La doctrine est unanime et reconnaît la libre commercialisation des emblèmes nationaux dans les limites imposées par les lois de chaque État, voir pour tous, Fezer, K. H., Markenrecht, 2e éd., C. H. Beck, Munich, 1999, p. 476.
( 45 ) Ströbele, P., «Absolute Schutzhindernisse», dans Ströbele, P. et Hacker, F., Markengesetz, 8e éd., Heymans, Munich, 2006, p. 411.
( 46 ) C’est ainsi que nous comprenons l’avis de Fezer, K.-H., op. cit., p. 473.
( 47 ) Point 73 de l’arrêt attaqué.
( 48 ) Bodenhausen, G. H. C., op. cit., p. 100, et Ströbele, P., op. cit., p. 411.
( 49 ) Bender, A., «Der Ablauf des Anmeldeverfahrens», dans Fezer, K.—H., Handbuch der Markenpraxis — Band I Markenverfahrensrecht, C. H. Beck, Munich, 2007, p. 585.
( 50 ) Voir notamment arrêt du 19 septembre 2002, DKV/OHMI (C-104/00 P, Rec. p. I-7561, points 21 et 22), ainsi que mes conclusions dans cette affaire (points 59 et 60); voir également arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C-238/99 P, C-244/99 P, C-245/99 P, C-247/99 P, C-250/99 P à C-252/99 P et C-254/99 P, Rec. p. I-8375, points 330 et 331), ainsi que ordonnance du 5 février 2004, Telefon & Buch/OHMI (C-326/01 P, Rec. p. I-1371, point 35).
( 51 ) Arrêts du 15 septembre 2005, BioID/OHMI (C-37/03 P, Rec. p. I-7975, points 47 à 51), et du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI (C-173/04 P, Rec. p. I-551, point 48); ordonnances du 13 février 2008, Indorata-Serviços e Gestão/OHMI (C-212/07 P, points 43 et 44), et du 12 février 2009, Bild digital (C-39/08 et C-43/08, point 13).
( 52 ) Dans ce sens, voir arrêts du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland (C-363/99, Rec. p. I-1619, points 42 à 44); et Henkel (C-218/01, Rec. p. I-1725, points 61 et 62), tout comme les conclusions lues sur cette affaire (points 23 et 24). Voir également ordonnance Bild digital, précitée (points 14 à 16).
( 53 ) Bodenhausen, G. H. C., op. cit., p. 99; en droit anglais: Kitchin, D., Llewelyn, D., Mellor, J., Meade, R., Moody Stuart, T. & Keeling, D., Kerly’s Law of Trade Marks and Trade Names, 14e éd., Sweet & Maxwell, Londres, 2005, p. 219; en droit espagnol: Marco Arcalá, L. A, «Artículo 5. Prohibiciones absolutas», dans Bercovitz Rodríguez-Cano, A., (director), Comentarios a la Ley de Marcas, 2e éd., Thomson-Aranzadi, Navarra, 2008, tome I, p. 234.
( 54 ) Voir points 22 à 33 de l’arrêt attaqué.
( 55 ) Reproduit au point 9 des présentes conclusions.
( 56 ) Arrêt du 22 novembre 2007, Nieto Nuño (C-328/06, Rec. p. I-10093).
( 57 ) Il renvoie aux arrêts du 11 juillet 2007, Mülhens/OHMI — Conceria Toska (TOSKA) (T-263/03), point 54, et Mülhens/OHMI — Minoronzoni (TOSCA BLU) (T-150/04, Rec. p. II-2353), point 59.
( 58 ) Beier, F.-K., «One Hundred Years of International Cooperation — The Role of the Paris Convention in the Past, Present and Future», dans International Review of Industrial Property and Copyright Law, volume 15, no 1/1984, p. 11; Bodenhausen, G. H. C., op. cit., p. 12 et 13.
( 59 ) Beier, F.-K., op. cit., p. 9 et 10, ainsi que Bodenhausen, G. H. C., op. cit., p. 30.
( 60 ) Bodenhausen, G. H. C., op. cit., p. 99.
( 61 ) Bodenhausen, G. H. C., op. cit., p. 90.
( 62 ) Bogsch, A., op. cit., p. 229.
( 63 ) Voir point 23 de l’arrêt attaqué.