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12/06/2008 | CJUE | N°C-16/07

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Bot présentées le 12 juin 2008., Marguerite Chetcuti contre Commission des Communautés européennes., 12/06/2008, C-16/07


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 12 juin 2008 ( 1 )

Affaire C-16/07 P

Marguerite Chetcuti

contre

Commission des Communautés européennes

«Pourvoi — Fonction publique — Concours interne à l’institution — Rejet d’une candidature — Conditions d’admission»

1.  La présente affaire a pour objet le pourvoi formé par Mme Chetcuti, agent auxiliaire, à l’encontre de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 8 nov

embre 2006 ( 2 ), par lequel ce dernier a rejeté le recours en annulation qu’elle a introduit contre la décision de la Commission des...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 12 juin 2008 ( 1 )

Affaire C-16/07 P

Marguerite Chetcuti

contre

Commission des Communautés européennes

«Pourvoi — Fonction publique — Concours interne à l’institution — Rejet d’une candidature — Conditions d’admission»

1.  La présente affaire a pour objet le pourvoi formé par Mme Chetcuti, agent auxiliaire, à l’encontre de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 8 novembre 2006 ( 2 ), par lequel ce dernier a rejeté le recours en annulation qu’elle a introduit contre la décision de la Commission des Communautés européennes qui a rejeté sa candidature à un concours de passage de la catégorie B vers la catégorie A.

2.  Mme Chetcuti invoque trois moyens à l’appui de son pourvoi tirés, respectivement, d’une interprétation erronée par le Tribunal de la notion de concours interne à l’institution, de la violation du principe d’égalité de traitement et de celle de l’obligation de motivation des arrêts.

3.  Dans les présentes conclusions, nous soutiendrons que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en jugeant que la Commission était en droit de réserver le concours litigieux aux fonctionnaires et aux agents temporaires, à l’exclusion des agents auxiliaires et qu’il a motivé son arrêt à suffisance de droit.

I — Le cadre juridique

4. L’article 4 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa version en vigueur jusqu’au 30 avril 2004, applicable aux faits de l’espèce (ci-après le «statut»), prévoit:

«Toute nomination ou promotion ne peut avoir pour objet que de pourvoir à la vacance d’un emploi dans les conditions prévues au présent statut.

Toute vacance d’emploi dans une institution est portée à la connaissance du personnel de cette institution dès que l’autorité investie du pouvoir de nomination a décidé qu’il y a lieu de pourvoir à cet emploi.

S’il n’est pas possible de pourvoir à cette vacance par voie de mutation, promotion ou concours interne, celle-ci est portée à la connaissance du personnel des trois Communautés européennes.»

5. L’article 27, premier alinéa, du statut dispose:

«Le recrutement doit viser à assurer à l’institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutés sur une base géographique aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres des Communautés.»

6. L’article 29, paragraphe 1, du statut prévoit:

«En vue de pourvoir aux vacances d’emploi dans une institution, l’autorité investie du pouvoir de nomination, après avoir examiné:

a) les possibilités de promotion et de mutation au sein de l’institution;

b) les possibilités d’organisation de concours internes à l’institution;

c) les demandes de transfert de fonctionnaires d’autres institutions des trois Communautés européennes

ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves. La procédure de concours est déterminée à l’annexe III.

Cette procédure peut être ouverte également en vue de constituer une réserve de recrutement.»

7. L’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe III du statut intitulée «Procédure de concours» dispose:

«L’avis de concours est arrêté par l’autorité investie du pouvoir de nomination, après consultation de la commission paritaire.

Il doit spécifier:

a) la nature du concours (concours interne à l’institution, concours interne aux institutions, concours général, le cas échéant, commun à deux ou plusieurs institutions);

b) les modalités (concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves);

c) la nature des fonctions et attributions afférentes aux emplois à pourvoir;

d) les diplômes et autres titres ou le niveau d’expérience requis pour les emplois à pourvoir;

[…]»

8. L’article 12, paragraphe 1, premier alinéa, du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes, dans sa version en vigueur jusqu’au 30 avril 2004, applicable aux faits de l’espèce (ci-après le «RAA»), prévoit:

«L’engagement des agents temporaires doit viser à assurer à l’institution le concours de personnes possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutées sur une base géographique aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres des Communautés.»

9. En revanche, le RAA ne contient aucune exigence concernant les qualités de compétence et de rendement attendues des agents auxiliaires pour leur engagement.

II — Les faits à l’origine de la présente affaire

10. Mme Chetcuti a exercé, en qualité d’agent local, la fonction de secrétaire affectée à la délégation de la Commission à Malte du 1er novembre 1991 au 30 avril 2004. Son contrat a pris fin avec l’adhésion de la République de Malte à la Communauté européenne le 1er mai de cette même année.

11. La requérante a ensuite signé un contrat d’agent auxiliaire de catégorie B le 27 avril 2004, pour une période allant du 1er mai 2004 au 31 décembre 2004. L’article 2 de son contrat stipulait qu’elle exercerait des fonctions d’«agent chargé de tâches complexes de rédaction, correction, comptabilité ou de travaux techniques».

12. Le 6 avril 2004, la Commission a publié un «avis de concours interne de passage de catégorie B vers A» (COM/PA/04), relatif à un concours sur épreuves visant à la constitution d’une réserve de recrutement d’administrateurs (A 7/A 6) (ci-après l’«avis de concours»).

13. En vertu du point III de l’avis de concours, étaient éligibles les fonctionnaires et les agents temporaires classés dans l’un des grades de la catégorie B, ainsi que ceux classés dans l’un des grades de la catégorie supérieure et qui, à la date limite d’introduction des candidatures, étaient en position d’activité auprès des services de la Commission, détachés dans l’intérêt du service ou en congé pour service militaire. Toutes ces personnes devaient, en outre, occuper un emploi rémunéré sur les
crédits de fonctionnement ou de recherche.

14. Par ailleurs, selon cette même disposition, les candidats devaient avoir au moins cinq années d’ancienneté de service dans la catégorie B ou en catégorie supérieure acquise en qualité de fonctionnaire, d’agent temporaire ou d’agent auxiliaire des groupes I à V, auprès de la Commission ou en partie auprès d’autres institutions ou agences dont les personnels sont régis par le statut ou le RAA.

15. Par lettre du 22 juin 2004, la requérante, qui s’était portée candidate, a vu sa candidature rejetée au motif qu’elle ne possédait pas les cinq années d’ancienneté requises et qu’elle ne remplissait pas les conditions d’admission en ce qui concerne sa situation administrative, puisque, aux fins de l’avis de concours, seuls les fonctionnaires ou les agents temporaires étaient éligibles.

III — La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

16. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 31 août 2004, la requérante a saisi cette juridiction d’un recours en annulation à l’encontre de la décision du jury de concours rejetant sa candidature au concours interne de passage de la catégorie B vers la catégorie A (ci-après la «décision attaquée»), ainsi que des actes subséquents de la procédure de concours et, notamment, la liste des candidats qui répondent aux conditions fixées par l’avis de concours, arrêtée par le jury, la décision de la
Commission arrêtant sur cette base le nombre de postes à pourvoir, la liste d’aptitude arrêtée par le jury au terme de ses travaux et les décisions de nomination adoptées par l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’«AIPN»).

17. La requérante a également demandé la condamnation de la Commission aux dépens.

18. À l’appui de son recours, la requérante a invoqué deux moyens tirés l’un et l’autre d’exceptions d’illégalité de l’avis de concours.

19. Par son premier moyen, elle a soutenu que, en ce qu’il réserve l’accès au concours aux seuls fonctionnaires et agents temporaires, en excluant ainsi les agents auxiliaires, le point III.1, premier et deuxième alinéas, ainsi que troisième alinéa, sous a), de l’avis de concours est contraire aux articles 4, 27 et 29, paragraphe 1, sous b), du statut et au principe d’égalité de traitement. La décision attaquée serait, par conséquent, illégale.

20. Par son second moyen, la requérante allègue que les points III.1, troisième alinéa, sous b), III.2 et III.3 de l’avis de concours, en ce qu’ils requièrent une ancienneté de service de cinq années dans la catégorie B ou une catégorie supérieure acquise en tant que fonctionnaire, agent temporaire ou agent auxiliaire des groupes I à V, excluant ainsi l’ancienneté acquise en tant qu’agent local, sont contraires aux articles 27 et 29 du statut ainsi qu’à l’intérêt du service et au principe d’égalité
de traitement. Pour ces raisons, la décision attaquée serait illégale.

21. Par l’arrêt attaqué, la requérante a été déboutée de sa demande et le Tribunal a décidé que chaque partie supportera ses propres dépens.

22. Le Tribunal a rejeté le premier moyen comme non fondé et ce pour les motifs suivants.

23. Il a d’abord jugé que le statut confère un large pouvoir d’appréciation aux institutions en ce qui concerne les procédures de recrutement et que le contrôle du juge communautaire se limite à la question de savoir si l’autorité concernée n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée.

24. Puis, le Tribunal a relevé que les diverses catégories de personnes employées par les Communautés répondent chacune à des besoins légitimes de l’administration communautaire. Il a ajouté que les exigences essentielles fixées pour l’engagement des fonctionnaires et des agents temporaires sont différentes de celles fixées pour les agents auxiliaires.

25. Ensuite, le Tribunal a constaté qu’il découle explicitement de l’avis de concours que ce dernier a essentiellement pour vocation le passage de la catégorie B vers la catégorie A pour les fonctionnaires et les agents temporaires. Le Tribunal a alors jugé que la Commission n’avait pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière erronée en prévoyant au point III.1 de l’avis de concours la condition d’admissibilité tenant à la qualité de fonctionnaire ou d’agent temporaire à l’exclusion de celle
d’agent auxiliaire.

26. En outre, le Tribunal a jugé comme dépourvu de pertinence l’argument de la requérante selon lequel le concours litigieux constituerait non pas seulement un concours de passage de la catégorie B vers la catégorie A, mais aussi un concours interne d’une autre nature, notamment parce qu’il est ouvert, d’une part, aux agents temporaires de la catégorie B ou A et, d’autre part, aux fonctionnaires de la catégorie A. Le Tribunal a considéré que cet argument était sans pertinence, car, contrairement aux
agents auxiliaires, les fonctionnaires et les agents temporaires admissibles au concours ont déjà fait preuve de leurs compétences lors de leurs recrutement et engagement initiaux conformément aux articles 27 du statut et 12 du RAA.

27. Par conséquent, le Tribunal a considéré que, puisque ces deux dernières dispositions ont déjà été appliquées lors des recrutement et engagement initiaux des fonctionnaires et des agents temporaires, l’argument de la requérante selon lequel la Commission aurait méconnu le but de tous recrutement et engagement définis par lesdites dispositions était sans fondement.

28. Le Tribunal a également ajouté que le fait que les agents auxiliaires peuvent exercer tout type de fonctions dans l’institution ne suffit pas à leur donner vocation à être assimilés aux fonctionnaires et aux agents temporaires aux fins des concours de promotion. Dès lors, selon le Tribunal, la Commission a pu réserver le concours en cause à la promotion de la catégorie B vers la catégorie A des fonctionnaires et des agents temporaires ayant déjà répondu aux exigences de recrutement et
d’engagement initiaux conformément aux articles 27 du statut et 12 du RAA.

29. Enfin, le Tribunal a considéré que c’est à tort que la requérante a invoqué la violation du principe d’égalité de traitement, puisque les fonctionnaires et les agents temporaires, d’une part, et les agents auxiliaires, d’autre part, sont dans des situations juridiques qui ne sont pas comparables en raison de la disparité de leurs conditions de recrutement et d’engagement respectives.

30. Au vu de l’ensemble de ces éléments, le Tribunal a estimé qu’il n’était pas nécessaire de statuer sur le second moyen et a rejeté les conclusions dirigées contre les actes subséquents de la procédure de concours.

IV — La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

31. Par requête déposée au greffe de la Cour le 18 janvier 2007, Mme Chetcuti a formé le présent pourvoi.

32. La requérante demande à ce qu’il plaise à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, la décision attaquée, les actes subséquents de la procédure de concours et, notamment, la liste des candidats répondant aux conditions fixées par l’avis de concours, arrêtée par le jury, la décision de la Commission arrêtant sur cette base le nombre de postes à pourvoir, la liste d’aptitude arrêtée par le jury au terme de ses travaux et les décisions de nomination adoptées par l’AIPN sur cette base.

33. La requérante demande également à ce que la Commission soit condamnée aux dépens de la première instance et à ceux de la procédure devant la Cour.

34. La Commission conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de la requérante aux dépens.

V — Appréciation

35. Selon nous, la requérante invoque trois moyens à l’appui de son pourvoi.

36. Par son premier moyen, la requérante soutient que le Tribunal a interprété d’une manière erronée la notion de concours interne et en a, dès lors, tiré des conséquences de droit incorrectes.

37. Par son deuxième moyen, la requérante fait valoir que l’arrêt attaqué viole le principe d’égalité de traitement.

38. Enfin, par son troisième moyen, la requérante estime que le Tribunal n’a pas motivé son arrêt à suffisance de droit.

39. Nous examinerons ces trois moyens successivement.

A — Sur le premier moyen, tiré d’une interprétation erronée de la notion de concours interne

40. À titre liminaire, il convient d’examiner la recevabilité du premier moyen.

41. En effet, la Commission estime que le premier moyen est irrecevable, puisque la requérante conteste la qualification du concours litigieux effectuée par le Tribunal. Or, la Commission considère que, en vertu d’une jurisprudence constante, le Tribunal est seul compétent pour constater les faits et les apprécier.

42. Selon cette jurisprudence, il résulte des articles 225 CE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour que le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits ( 3 ).

43. La Cour a ajouté que, lorsque le Tribunal a constaté ou apprécié les faits, la Cour est compétente pour exercer, en vertu de l’article 225 CE, un contrôle sur la qualification juridique de ces faits et les conséquences de droit qui en ont été tirées par le Tribunal ( 4 ).

44. Il ressort clairement du pourvoi que Mme Chetcuti conteste la conclusion que le Tribunal a faite au point 56 de l’arrêt attaqué et selon laquelle le concours litigieux est un concours «[ayant] essentiellement pour vocation le passage de la catégorie B vers la catégorie A». À l’appui de cette contestation, la requérante invoque plusieurs arguments qui tendent à démontrer que le Tribunal a donné une mauvaise qualification juridique à la notion de concours interne et qu’il en a, par conséquent,
tiré des conclusions juridiques erronées.

45. La qualification juridique d’un fait ou d’un acte opérée par le Tribunal étant une question de droit qui peut être soulevée dans le cadre d’un pourvoi ( 5 ), nous sommes d’avis que le moyen est recevable.

46. Par ce premier moyen, la requérante considère que le Tribunal a violé la notion de «concours interne à l’institution» au sens des articles 4 et 29, paragraphe 1, sous b), du statut et en a, dès lors, tiré des conséquences de droit erronées.

47. Au soutien de ce moyen, elle invoque plusieurs arguments.

48. Premièrement, la requérante reproche au Tribunal de s’être fondé, au point 56 de l’arrêt attaqué, sur un critère subjectif pour définir la nature du concours, à savoir son objectif qui a été assigné par l’intitulé de l’avis de concours. En se basant sur cette qualification, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en considérant les catégories de candidats qui pouvaient légalement être admises ou non au concours. Selon la requérante, la nature du concours litigieux aurait due être définie
en fonction des conditions d’admission objectives stipulées dans l’avis de concours lui-même, conditions qui sont elles-mêmes définies en fonction des exigences des postes à pourvoir.

49. À titre subsidiaire, elle expose que, à supposer même que le concours litigieux ait eu essentiellement pour vocation le passage de la catégorie B vers la catégorie A, il n’en reste pas moins qu’il s’agissait d’un concours de titularisation et qu’il devait être qualifié de concours interne. Dès lors, selon la jurisprudence Rauch/Commission ( 6 ) et Van Huffel/Commission ( 7 ), les agents auxiliaires ne pouvaient pas être légalement exclus de ce concours.

50. Nous sommes d’avis que cet argument n’est pas fondé.

51. Tout d’abord, le Tribunal a commencé par rappeler les principes qui doivent gouverner toute procédure de recrutement.

52. Ainsi, le Tribunal a rappelé, au point 48 de l’arrêt attaqué, que, «afin de respecter le but assigné par l’article 27 du statut à toute procédure de recrutement, à savoir ‘assurer à l’institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité’, il est nécessaire de recruter les fonctionnaires sur une base aussi large que possible. Dès lors, l’expression ‘concours interne à l’institution’ concerne, en principe, toutes les personnes se
trouvant au service de celle-ci, à quelque titre que ce soit».

53. Puis, au point 49 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rappelé que «[t]outefois, le statut confère un large pouvoir d’appréciation aux institutions pour déterminer les critères de capacité exigés par les emplois à pourvoir et pour déterminer, en fonction de ces critères et, plus généralement, dans l’intérêt du service, les conditions et modalités d’organisation d’un concours» ( 8 ). Le Tribunal a poursuivi en précisant qu’un tel pouvoir peut s’exercer notamment lorsque l’AIPN arrête l’avis de
concours et précise les conditions d’admission au concours ( 9 ).

54. L’exercice du pouvoir d’appréciation conféré à l’AIPN doit, comme l’a rappelé à juste titre le Tribunal au point 50 de l’arrêt attaqué, être compatible avec, notamment, les dispositions impératives des articles 27, premier alinéa, et 29, paragraphe 1, du statut.

55. C’est à la lumière de ces principes que le Tribunal a conclu, au point 56 de l’arrêt attaqué, qu’il découlait explicitement de l’avis de concours qu’il s’agissait d’un concours interne de passage de la catégorie B vers la catégorie A et qu’il avait vocation à permettre aux fonctionnaires et aux agents temporaires, qui, contrairement aux agents auxiliaires, ont déjà fait preuve des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, de passer de la catégorie B vers la catégorie A.

56. Selon nous, le Tribunal a opéré une qualification correcte de la notion de concours interne à l’institution.

57. En effet, le libellé de l’article 29, paragraphe 1, du statut démontre que l’AIPN jouit d’un large pouvoir quant aux modalités d’organisation d’un concours. Selon cette disposition, l’AIPN, après avoir examiné les possibilités de promotion et de mutation au sein de l’institution, les possibilités d’organisation de concours internes à l’institution et les demandes de transfert de fonctionnaires d’autres institutions des trois Communautés européennes, ouvre la procédure de concours sur titres, sur
épreuves ou sur titres et épreuves. Il est, en outre, précisé que cette procédure peut être ouverte également en vue de constituer une réserve de recrutement.

58. Il ressort de la jurisprudence de la Cour que l’utilisation du terme «possibilités» veut clairement dire que l’AIPN n’est pas tenue d’opter pour une procédure donnée, mais a le choix entre plusieurs procédures et peut choisir celle qui lui permettra d’obtenir les meilleures candidatures ( 10 ), l’essentiel étant que la procédure choisie aboutisse, dans chaque cas, à la nomination des personnes possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité ( 11 ).

59. En outre, la Cour a jugé au sujet d’un concours de passage de catégorie que la Commission disposait d’un large pouvoir d’appréciation pour déterminer les critères de capacité exigés par les emplois nouveaux créés et, dès lors, pour déterminer, en fonction de ces critères et dans l’intérêt du service, les conditions du concours ( 12 ).

60. De plus, nous rappelons que, selon une jurisprudence constante, l’AIPN dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour rechercher les candidats possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité ( 13 ).

61. Dans la présente affaire, l’intitulé du concours litigieux est clair, puisqu’il s’agissait d’un concours interne à l’institution de passage de la catégorie B vers la catégorie A.

62. Par ailleurs, ainsi que l’a indiqué le Tribunal au point 56 de l’arrêt attaqué, les personnes éligibles au concours litigieux étaient les fonctionnaires et les agents temporaires, car, conformément aux articles 27 du statut et 12 du RAA, ces personnes ont déjà fait preuve, lors de leurs recrutement et engagement initiaux, des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, contrairement aux agents auxiliaires pour qui aucune de ces qualités n’est requise lors de leur engagement.

63. Dans ces conditions, nous considérons que c’est à juste titre que le Tribunal a pu, aux points 56 et 57 de l’arrêt attaqué, estimer que le concours litigieux est un concours interne de passage de la catégorie B vers la catégorie A pour les fonctionnaires et les agents temporaires et que, en conséquence, la Commission n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière erronée en prévoyant que seules ces deux catégories de personnes étaient admissibles audit concours.

64. Nous ajoutons que la Commission aurait pu également, afin de constituer une liste de réserve d’administrateurs, opter pour un recrutement par voie de promotion, en vertu de l’article 45 du statut, ce qui aurait alors limité le recrutement aux seuls fonctionnaires, puisqu’il n’existe pas d’équivalent dans le RAA pour les agents temporaires.

65. La Commission a, en faisant le choix d’un concours interne de passage de catégorie ouvert aux fonctionnaires et aux agents temporaires, assuré à l’institution le concours des meilleures candidatures, en recrutant sur une base aussi large que possible.

66. Deuxièmement, la requérante considère que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant que l’exclusion des agents auxiliaires du concours litigieux était justifiée, puisque ces derniers, contrairement aux fonctionnaires et aux agents temporaires, n’ont pas eu à prouver, lors de leurs recrutement et engagement initiaux, qu’ils possédaient les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité. La requérante conteste le fait que la condition de posséder de telles qualités
puisse être déduite des exigences des postes à pourvoir et, plus généralement, de l’intérêt du service. Selon elle, les fonctionnaires et les agents temporaires de catégorie B n’auraient démontré posséder lesdites qualités que pour occuper les postes de catégorie B. La preuve des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité devrait résulter du succès aux épreuves de présélection et de sélection.

67. Nous ne sommes pas de cet avis.

68. Nous pensons que le Tribunal a pu valablement considérer aux points 59 et 60 de l’arrêt attaqué que la Commission n’a pas méconnu le but de tous recrutement et engagement définis par les articles 27 du statut et 12 du RAA.

69. Nous rappelons que, en vertu de ces deux dispositions, le recrutement des fonctionnaires et l’engagement des agents temporaires doivent viser à assurer à l’institution le concours de personnes possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité.

70. Or, s’il est vrai que, selon l’article 55, paragraphe 1, sous c), du RAA, les agents auxiliaires doivent, aux fins d’engagement, offrir les garanties de moralité requises pour l’exercice de leurs fonctions, il n’est nullement fait mention dans ce RAA de l’obligation, pour ces agents, de posséder ces mêmes qualités.

71. La requérante avance le fait que le critère relatif aux recrutement et engagement initiaux n’est pas pertinent, puisqu’il ne découlerait pas des exigences des postes à pourvoir et, plus généralement, de l’intérêt du service que les candidats doivent posséder les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité.

72. Il convient de rappeler que l’AIPN jouit d’un large pouvoir d’appréciation concernant l’évaluation de l’intérêt du service. Dès lors, le contrôle du Tribunal doit se limiter à la question de savoir si l’AIPN s’est tenue dans des limites non critiquables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée ( 14 ).

73. Ainsi qu’il ressort du point 15 de l’arrêt attaqué, le concours litigieux est un concours ayant pour vocation de constituer une liste de réserve et non de pourvoir à un emploi déterminé. Nous relevons, à cet égard, l’absence dans l’avis de concours d’exigence de diplômes ou d’aptitudes spécifiques. En effet, lors de la constitution d’une liste de réserve, les conditions d’admission se limitent à exiger des candidats qu’ils possèdent des aptitudes générales ( 15 ). À l’instar de la Commission,
nous estimons que les exigences liées aux recrutement et engagement initiaux, à savoir la preuve des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, constituaient donc un critère approprié pour l’admission des candidats.

74. Par conséquent, nous sommes d’avis que c’est à juste titre que le Tribunal a considéré que la Commission n’avait pas méconnu le but des articles 27 du statut et 12 du RAA.

75. Troisièmement, la requérante estime que c’est à tort que le Tribunal a rejeté son argument selon lequel les agents auxiliaires pouvant, en vertu de l’article 3 du RAA, exercer tout type de fonctions lorsque leur engagement ne vise pas à assurer le remplacement d’un fonctionnaire, ils pouvaient être assimilés aux fonctionnaires et aux agents temporaires. La requérante constate, à cet égard, que les fonctionnaires et les agents temporaires de catégorie B n’avaient pas eux-mêmes fait preuve des
plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité en ce qui concerne les fonctions de catégorie A, mais qu’ils étaient tout de même admis à participer au concours litigieux.

76. Nous relevons que le Tribunal, au point 61 de l’arrêt attaqué, a rejeté l’argument de la requérante au motif que «le fait que les agents auxiliaires peuvent exercer tout type de fonctions dans l’institution ne suffit pas à leur donner vocation à être assimilés aux fonctionnaires et aux agents temporaires aux fins des concours de promotion. Ainsi, la Commission a pu sans illégalité réserver le concours en cause à la promotion vers la catégorie A des fonctionnaires et des agents temporaires qui
ont déjà répondu aux exigences de recrutement initial conformément à l’article 27 du statut et à l’article 12 du RAA, indépendamment des fonctions qu’ils ont exercées».

77. Nous rappelons, en outre, que le Tribunal, aux points 49 et 56 de l’arrêt attaqué, a rappelé que le statut confère un large pouvoir d’appréciation à l’AIPN pour déterminer les critères de capacité exigés par les emplois à pourvoir et que, contrairement aux fonctionnaires et aux agents temporaires, les agents auxiliaires n’avaient pas eu à faire la preuve des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité lors de leur engagement.

78. Par ailleurs, le Tribunal a, à juste titre, rappelé au point 52 de l’arrêt attaqué que chaque catégorie de personnes employées par les Communautés correspond à des besoins légitimes de l’administration communautaire et à la nature des tâches, permanentes ou temporaires, qu’elle a pour mission d’accomplir.

79. Dès lors, nous considérons l’argument de la requérante comme non fondé.

80. Au vu de l’ensemble de ces éléments, nous sommes d’avis que le premier moyen est recevable et non fondé.

B — Sur le deuxième moyen, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement

81. Selon la requérante, le Tribunal aurait jugé à tort, au point 62 de l’arrêt attaqué, que la situation juridique des fonctionnaires et des agents temporaires n’est pas comparable à celle des agents auxiliaires en raison de la disparité de leurs conditions de recrutement et d’engagement respectives et aurait ainsi violé le principe d’égalité de traitement.

82. Ainsi que l’a jugé la Cour, si le principe d’égalité de traitement est une règle de caractère général applicable au droit de la fonction publique communautaire, encore faut-il, pour qu’il y ait discrimination, qu’un traitement inégal soit appliqué à des situations identiques ou comparables ( 16 ).

83. Il y a, notamment, violation du principe d’égalité de traitement lorsque deux catégories de personnes dont les situations factuelles et juridiques ne présentent pas de différence essentielle se voient appliquer un traitement différent lors de leur recrutement ou engagement ( 17 ).

84. La question qui se pose est donc celle de savoir si les fonctionnaires ainsi que les agents temporaires, d’une part, et les agents auxiliaires, d’autre part, sont dans des situations identiques ou comparables.

85. Nous ne le pensons pas.

86. En effet, comme l’a relevé à juste titre le Tribunal au point 53 de l’arrêt attaqué, il découle des articles 27 du statut et 12 du RAA que les exigences essentielles fixées pour le recrutement des fonctionnaires et l’engagement des agents temporaires sont différentes de celles fixées pour les agents auxiliaires, puisque ces derniers n’ont pas, contrairement aux deux autres catégories, à faire preuve, lors de leur engagement, des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité.

87. Nous avons vu que, selon l’article 55, paragraphe 1, sous c), du RAA, les agents auxiliaires doivent uniquement, aux fins d’engagement, offrir les garanties de moralité requises pour l’exercice de leurs fonctions.

88. Par ailleurs, nous ajoutons qu’il existe des différences significatives entre le statut de fonctionnaire ainsi que celui d’agent temporaire, d’une part, et le statut d’agent auxiliaire, d’autre part.

89. En effet, il ressort des articles 6 du statut et 9 du RAA que les emplois des fonctionnaires et des agents temporaires figurent dans un tableau d’effectifs, ce qui n’est pas le cas des agents auxiliaires. La Cour a d’ailleurs jugé que, d’après l’article 3 du RAA, est considéré comme agent auxiliaire l’agent engagé en vue d’exercer des fonctions dans une institution sans être affecté à un emploi compris dans le tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à cette institution ( 18
).

90. La Cour a ajouté que, selon l’article 52 du RAA, la durée effective de l’engagement d’un agent auxiliaire ne peut excéder la durée de l’interim d’un fonctionnaire ou d’un agent temporaire provisoirement hors d’état d’exercer ses fonctions ou la durée d’un an dans tous les cas ( 19 ).

91. La Cour en a conclu que la caractéristique d’un contrat d’agent auxiliaire réside donc dans la précarité de celui-ci dans le temps, étant donné qu’il ne peut être utilisé que pour assurer un remplacement momentané ou pour permettre d’effectuer des tâches administratives présentant un caractère passager ou répondant à une nécessité urgente ou n’étant pas nettement définies ( 20 ).

92. Il convient également de noter qu’il existe des différences entre, d’une part, le statut d’agent auxiliaire et, d’autre part, le statut de fonctionnaire ainsi que celui d’agent temporaire concernant, notamment, la notation, l’avancement d’échelon et les droits à pensions. Alors que les fonctionnaires et les agents temporaires sont notés, peuvent faire l’objet d’un avancement d’échelon et ont droit à une pension d’ancienneté ( 21 ), le RAA ne prévoit rien de tout cela pour les agents auxiliaires.

93. Le statut d’agent auxiliaire a été créé afin de répondre à des besoins ponctuels des institutions communautaires et la fonction d’un tel agent n’a pas vocation à perdurer dans le temps.

94. Aussi, nous sommes d’avis que les fonctionnaires et les agents temporaires se trouvent dans une situation juridique différente de celle des agents auxiliaires.

95. Pour ces raisons, nous estimons que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant, au point 62 de l’arrêt attaqué, que la situation juridique des fonctionnaires et des agents temporaires n’est pas comparable à celle des agents auxiliaires en raison de la disparité de leurs conditions de recrutement et d’engagement respectives.

96. Dès lors, eu égard aux éléments qui précèdent, nous pensons que le deuxième moyen doit être rejeté comme non fondé.

C — Sur le troisième moyen, tiré d’un défaut de motivation de l’arrêt attaqué

97. Nous comprenons, par son troisième moyen, que la requérante soutient que le Tribunal n’a pas répondu à ses arguments visant à réfuter la thèse de la Commission, selon laquelle l’absence, dans l’avis de concours, de conditions d’aptitude générales, telles que les titres académiques, s’explique par le fait que les fonctionnaires et les agents temporaires avaient déjà fait preuve des compétences requises lors de leurs recrutement et engagement initiaux.

98. En première instance, la requérante avait estimé comme erroné l’argument de la Commission selon lequel une telle absence s’expliquait par le fait que les fonctionnaires et les agents temporaires avaient déjà fait preuve des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité lors de leurs recrutement et engagement initiaux.

99. La requérante avait alors soutenu devant le Tribunal que cette absence ne s’expliquait pas par le fait que les fonctionnaires et les agents temporaires avaient déjà fait preuve, lors de leurs recrutement et engagement initiaux, de ces qualités, puisque le concours est ouvert aux fonctionnaires de catégorie B et que l’engagement au sein de cette catégorie ne requiert pas de diplôme.

100. Selon la requérante, l’absence de ces conditions était due au fait que la Commission avait considéré qu’une ancienneté de cinq années en tant que fonctionnaire, agent temporaire ou agent auxiliaire constituait une expérience professionnelle équivalente au sens de l’article 5 du statut. La requérante avait également estimé que l’absence de conditions spécifiques s’expliquait par le fait que la Commission visait non pas à pourvoir des postes vacants directement, mais à constituer une liste de
réserve, dont les conditions d’admission se limitaient à exiger des aptitudes de caractère général.

101. En outre, la requérante avait soutenu que, s’agissant d’un concours dont l’objet est le recrutement de fonctionnaires, il devait impérativement répondre à l’objectif fixé par l’article 27 du statut. Dès lors, peu importait que la satisfaction à cet objectif ait déjà été vérifiée dans le chef des fonctionnaires et agents temporaires et non dans celui des agents auxiliaires, puisque le concours interne litigieux aurait justement permis de le vérifier.

102. Il convient, tout d’abord, de rappeler que la question de savoir si la motivation d’un arrêt du Tribunal est insuffisante constitue une question de droit pouvant, en tant que telle, être invoquée dans le cadre d’un pourvoi ( 22 ).

103. Ensuite, nous rappelons que, en vertu de l’article 36 du statut de la Cour, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53 de ce statut, «[l]es arrêts sont motivés».

104. En outre, selon une jurisprudence constante, la motivation d’un arrêt doit faire apparaître de manière claire et non équivoque le raisonnement du Tribunal, afin que les intéressés puissent connaître les justifications de la décision prise et que la Cour puisse exercer son contrôle juridictionnel ( 23 ).

105. Ceci étant rappelé, il convient à présent d’examiner si le Tribunal a omis de répondre à l’argument de la requérante.

106. Le Tribunal, après avoir rappelé au point 48 de l’arrêt attaqué que l’institution doit recruter sur une base aussi large que possible afin de respecter le but assigné par l’article 27 du statut, a considéré, au point 53 de son arrêt, que, «ainsi qu’il découle respectivement de l’article 27 du statut et de l’article 12 du RAA, les exigences essentielles fixées pour l’engagement des fonctionnaires et des agents temporaires sont différentes de celles fixées pour les agents auxiliaires. À la
différence des agents auxiliaires, pour lesquels de telles exigences ne sont pas prévues, les deux dispositions précitées prévoient que le recrutement des fonctionnaires et l’engagement des agents temporaires doivent viser à assurer à l’institution le concours de personnes possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité».

107. Ensuite, après avoir qualifié le concours de «concours interne de passage de la catégorie B vers la catégorie A», le Tribunal a considéré, aux points 59 et 60 de l’arrêt attaqué, que ce concours était uniquement ouvert aux fonctionnaires et aux agents temporaires, parce que, précisément, ces deux catégories de personnes avaient pu faire preuve, lors de leurs recrutement et engagement initiaux, des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, conformément aux articles 27 du
statut et 12 du RAA.

108. L’obligation de motivation n’impose pas au Tribunal de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les arguments articulés par les parties au litige. La motivation du Tribunal peut donc être implicite, à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles les mesures en question ont été prises et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle ( 24 ).

109. Le Tribunal n’a, certes, pas répondu en détails à tous les arguments invoqués par Mme Chetcuti. Cependant, il suffit de constater que le Tribunal a clairement confirmé la thèse de la Commission aux points 59 et 60 de l’arrêt attaqué. Il a expliqué que les fonctionnaires et les agents temporaires, contrairement aux agents auxiliaires, sont tenus, lors de leurs recrutement et engagement initiaux, de démontrer qu’ils possèdent les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité,
conformément aux articles 27 du statut et 12 du RAA.

110. Ainsi que nous avons pu le constater, l’analyse du Tribunal a, notamment, consisté à expliquer les raisons pour lesquelles les fonctionnaires et les agents temporaires étaient seuls éligibles au concours litigieux et à démontrer que le but assigné à tous recrutement et engagement avait été respecté, tout en rappelant que l’AIPN dispose d’un large pouvoir d’appréciation concernant les modalités d’organisation d’un concours.

111. Le Tribunal a ainsi pu en déduire que la Commission pouvait valablement réserver le concours litigieux aux seuls fonctionnaires et agents temporaires et que le but assigné à tous recrutement et engagement, à savoir posséder ces qualités, était atteint.

112. La requérante reproche, en outre, au Tribunal de ne pas avoir répondu à son argument selon lequel l’avis de concours présentait une certaine contradiction interne dans la mesure où il excluait les agents auxiliaires par la première condition d’admission, mais qu’il admettait l’expérience de ces agents pour le décompte de l’expérience professionnelle.

113. Nous estimons que cet argument n’est pas fondé.

114. En effet, nous avons vu que le Tribunal s’est attaché tout au long de son analyse à indiquer les raisons pour lesquelles la Commission n’avait pas excédé ses pouvoirs en admettant les seules candidatures des fonctionnaires et des agents temporaires, au motif, rappelons-le, que ces deux catégories de personnes avaient déjà pu faire preuve des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité.

115. La prise en compte de l’expérience professionnelle des agents auxiliaires dans le décompte de l’ancienneté d’un fonctionnaire ou d’un agent temporaire n’enlève rien au fait que, contrairement aux agents auxiliaires, ces deux dernières catégories de personnes ont, à un moment donné, fait preuve des qualités requises pour leur recrutement et leur engagement en vertu des articles 27 du statut et 12 du RAA.

116. En outre, la prise en compte de l’ancienneté en tant qu’agent engagé sous le RAA constitue un moyen approprié pour poursuivre l’intérêt du service ( 25 ).

117. Ces deux conditions sont donc non pas contradictoires, mais complémentaires. Aussi, le Tribunal a pu valablement juger au point 61 de l’arrêt attaqué que, même si les agents auxiliaires peuvent effectivement exercer tout type de fonctions, cela ne suffit pas à les assimiler aux fonctionnaires et aux agents temporaires, ces deux catégories de personnes ayant, contrairement aux agents auxiliaires, fait preuve des plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité lors de leurs
recrutement et engagement initiaux.

118. Par conséquent, nous proposons à la Cour de rejeter ce moyen comme non fondé.

VI — Sur les dépens

119. Selon l’article 122, premier alinéa, du règlement de procédure de la Cour, celle-ci, en matière de pourvoi, statue sur les dépens.

120. Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, de ce même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

121. En vertu de l’article 70 du règlement de procédure, les frais exposés par les institutions dans les litiges entre les Communautés et leurs agents restent à la charge de celles-ci.

122. Cependant, en vertu de l’article 122, deuxième alinéa, du même règlement, l’article 70 n’est pas applicable au pourvoi formé par un fonctionnaire ou tout autre agent d’une institution contre celle-ci.

123. La Commission ayant conclu à la condamnation de Mme Chetcuti et celle-ci ayant, selon nous, succombé en son pourvoi, nous pensons qu’il y a lieu de la condamner aux dépens.

VII — Conclusion

124. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de décider comme suit:

«1) Le pourvoi est rejeté.

2) Mme Chetcuti est condamnée aux dépens du pourvoi.»

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( 1 ) Langue originale: le français.

( 2 ) Arrêt Chetcuti/Commission (T-357/04, RecFP p. I-A-2-255 et II-A-2-1323, ci-après l’«arrêt attaqué»).

( 3 ) Voir, notamment, arrêt du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission (C-167/04 P, Rec. p. I-8935, point 106 et jurisprudence citée).

( 4 ) Idem.

( 5 ) Voir arrêt du 29 juin 2000, Politi/Fondation européenne pour la formation (C-154/99 P, Rec. p. I-5019, point 11 et jurisprudence citée).

( 6 ) Arrêt du 31 mars 1965 (16/64, Rec. p. 179).

( 7 ) Arrêt du Tribunal du 15 novembre 2001 (T-142/00, RecFP p. I-A-219 et II-1011).

( 8 ) Arrêts du Tribunal du 8 novembre 1990, Bataille e.a./Parlement (T-56/89, Rec. p. II-597, point 42); du 5 février 1997, Ibarra Gil/Commission (T-207/95, RecFP p. I-A-13 et II-31, point 66), et du 15 février 2005, Pyres/Commission (T-256/01, RecFP p. I-A-23 et II-99, point 36).

( 9 ) Arrêts du Tribunal du 21 novembre 2000, Carrasco Benítez/Commission (T-214/99, RecFP p. I-A-257 et II-1169, point 52), et Van Huffel/Commission, précité (point 51).

( 10 ) Voir, notamment, arrêt du 13 juillet 2000, Parlement/Richard (C-174/99 P, Rec. p. I-6189, point 38). Voir, également, arrêt du Tribunal du 23 avril 2002, Campolargo/Commission (T-372/00, RecFP p. I-A-49 et II-223, points 93 et 98).

( 11 ) Voir arrêts du 31 mars 1965, Ley/Commission (12/64 et 29/64, Rec. p. 143, 161); du 14 juillet 1983, Mogensen e.a./Commission (10/82, Rec. p. 2397, point 9), et du 8 juin 1988, Vlachou/Cour des comptes (135/87, Rec. p. 2901, point 23).

( 12 ) Voir arrêt du 16 octobre 1975, Deboeck/Commission (90/74, Rec. p. 1123, point 29).

( 13 ) Arrêt du Tribunal du 11 novembre 2003, Faita/CES (T-248/02, RecFP p. I-A-281 et II-1365, point 45).

( 14 ) Voir arrêts du Tribunal du 12 juin 1997, Carbajo Ferrero/Parlement (T-237/95, RecFP p. I-A-141 et II-429, point 99), et du 1er mars 2005, Mausolf/Europol (T-258/03, RecFP p. I-A-45 et II-189, point 49).

( 15 ) Arrêt du 6 mars 1997, de Kerros et Kohn-Bergé/Commission (T-40/96 et T-55/96, RecFP p. I-A-47 et II-135, point 43).

( 16 ) Arrêt du 2 décembre 1982, Micheli e.a./Commission (198/81 à 202/81, Rec. p. 4145, point 5).

( 17 ) Arrêt du 11 juillet 1985, Hattet e.a./Commission (66/83 à 68/83 et 136/83 à 140/83, Rec. p. 2459, point 24). Voir, également, arrêts du Tribunal du 7 février 1991, Tagaras/Cour de justice (T-18/89 et T-24/89, Rec. p. II-53, point 68); du 17 décembre 1997, Dricot e.a./Commission (T-159/95, RecFP p. I-A-385 et II-1035, points 83 et 98); du 17 décembre 1997, Chiou/Commission (T-225/95, RecFP p. I-A-423 et II-1135, points 48 et 66), et du 11 juillet 2002, Wasmeier/Commission (T-381/00, RecFP
p. I-A-125 et II-677, point 122).

( 18 ) Arrêt du 1er février 1979, Deshormes/Commission (17/78, Rec. p. 189, point 35).

( 19 ) Ibidem, point 36. Il convient de noter que, en vertu du RAA, la durée maximale d’engagement d’un agent auxiliaire a été portée à trois ans dans tous les cas qui ne concernent pas le remplacement d’un fonctionnaire ou d’un agent temporaire [article 52, sous b), du RAA].

( 20 ) Arrêt Deshormes/Commission, précité (point 37).

( 21 ) Voir, en ce qui concerne les fonctionnaires, articles 43, 44 et 77 du statut et, concernant les agents temporaires, articles 15, 20 et 39 du RAA.

( 22 ) Voir arrêt du 8 février 2007, Groupe Danone/Commission (C-3/06 P, Rec. p. I-1331, point 45 et jurisprudence citée).

( 23 ) Voir, en ce sens, arrêts du 14 mai 1998, Conseil/de Nil et Impens (C-259/96 P, Rec. p. I-2915, points 32 à 34), et du 17 mai 2001, IECC/Commission (C-449/98 P, Rec. p. I-3875, point 70), ainsi que ordonnances du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a. [C-149/95 P(R), Rec. p. I-2165, point 58]; du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission [C-268/96 P(R), Rec. p. I-4971, point 52], et du 25 juin 1998, Antilles néerlandaises/Conseil [C-159/98 P(R), Rec.
p. I-4147, point 70].

( 24 ) Arrêt Groupe Danone/Commission, précité (point 46). Voir, également, arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission (C-204/00 P, C-205/00 P, C-211/00 P, C-213/00 P, C-217/00 P et C-219/00 P, Rec. p. I-123, point 372).

( 25 ) Arrêt de Kerros et Kohn-Bergé/Commission, précité (point 47).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-16/07
Date de la décision : 12/06/2008
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé
Type de recours : Recours de fonctionnaires

Analyses

Pourvoi - Fonction publique - Concours interne à l’institution - Rejet d’une candidature - Conditions d’admission.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Marguerite Chetcuti
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Bot

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2008:340

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