CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. F. G. Jacobs
présentées le 26 mai 2005 (1)
Affaires jointes C-151/04 et C-152/04
Ministère public
contre
Claude Nadin et Nadin-Lux SA
et
Ministère public
contre
Jean-Pascal Durré
[demande de décision préjudicielle formée par le tribunal de police de Neufchâteau (Belgique)]
1. Dans les présentes affaires, le tribunal de police de Neufchâteau (Belgique) a demandé à la Cour de trancher la question de savoir si le droit communautaire s’oppose ou non à ce qu’une législation nationale impose à un résident d’immatriculer un véhicule mis à sa disposition par la société qui l’emploie et qui est établie dans un autre État membre lorsque l’employé est aussi actionnaire, administrateur ou gérant de ladite société et qu’il fait usage du véhicule concerné dans l’exercice de sa
profession.
La législation nationale
2. L’article 3, paragraphe 2, point 2, de l’arrêté royal belge, du 20 juillet 2001, relatif à l’immatriculation des véhicules (2), prévoit, par exception à la règle générale selon laquelle les résidents doivent immatriculer les véhicules qu’ils souhaitent utiliser en Belgique, qu’il n’est pas obligatoire d’immatriculer un véhicule utilisé par une personne pour l’exercice de sa profession, et immatriculé à l’étranger au nom d’un propriétaire étranger auquel cette personne est liée par un contrat
de travail; dans un tel cas, une attestation fournie par l’administration belge en charge de la taxe sur la valeur ajoutée (ci‑après la «TVA») doit se trouver à bord du véhicule.
3. L’article 14 de la circulaire n° 1/2000, du 3 mai 2000 (3), qui semble refléter une pratique administrative, expose les conditions requises pour pouvoir bénéficier de cette exception. En vertu dudit article 14, sous f), ladite attestation ne sera pas délivrée lorsque l’employeur est une société et que l’employé est aussi un dirigeant (gérant ou administrateur) de la société concernée, sauf si l’employé est en mesure de démontrer qu’il existe un réel lien de subordination entre lui et la
société. Ceci implique que l’employé soit en mesure de démontrer qu’il est soumis à l’autorité d’une autre personne représentant la société ou à celle d’un organe de la société (conseil d’administration, comité de direction, conseil de gérance, etc.) disposant d’une position d’autorité envers laquelle l’employé/le dirigeant ne peut exercer aucune influence décisive. Les exploitants d’une société unipersonnelle, les associés fondateurs d’une société et les principaux actionnaires n’ont en aucun cas
droit à une attestation.
Les faits
4. L’affaire C-151/04 concerne M. Nadin, lequel vit en Belgique et travaille en qualité d’administrateur de Nadin-Lux SA, établie à Luxembourg, qui l’emploie. L’affaire C-152/04 concerne M. Durré qui vit également en Belgique et travaille en qualité d’administrateur de la société Delisalade Lux SA qui l’emploie et qui est également établie à Luxembourg. Nous désignerons conjointement MM. Nadin et Durré par l’expression «les défendeurs».
5. En mars 2002, les défendeurs ont, chacun, séparément, fait l’objet d’un contrôle de police en Belgique. M. Nadin conduisait une voiture immatriculée au Grand‑Duché de Luxembourg, propriété de la société Credit Lease SA à Luxembourg, qui l’avait donnée en leasing à Nadin-Lux SA. M. Durré conduisait une voiture immatriculée au nom de Delisalade Lux SA. Aucun des défendeurs n’avait avec lui à bord du véhicule l’attestation de TVA requise; ils ont tous deux déclaré que l’administration belge en
charge de la TVA avait refusé de leur délivrer une telle attestation. Les défendeurs ont été poursuivis pour infraction à l’article 3, paragraphe 2, point 2, de l’arrêté royal du 20 juillet 2001. Les défendeurs ont fait valoir devant le tribunal de police qu’ils devaient être considérés comme étant des travailleurs au sens du droit communautaire et que ledit arrêté royal était incompatible avec le principe de libre circulation des travailleurs. Le tribunal de police de Neufchâteau a déféré à la Cour
de justice la question préjudicielle suivante:
«Les articles 10, 39, 43 et 49 du traité CEE s'opposent-ils à ce qu'un État membre adopte une mesure imposant à un travailleur résidant sur son territoire, d'y immatriculer un véhicule, alors même que ce véhicule appartient à son employeur, société établie sur le territoire d'un autre État membre, société avec laquelle ce travailleur est lié par un contrat de travail mais où il occupe parallèlement une fonction d'actionnaire, d'administrateur, de délégué à la gestion journalière ou une fonction
analogue?»
6. La question déférée est identique dans les deux affaires malgré la différence tenant au régime de propriété des véhicules concernés. Nous approuvons donc la suggestion du gouvernement belge visant à reformuler légèrement la question de telle sorte qu’elle porte sur le point de savoir si le droit communautaire s’oppose ou non à ce qu’une législation nationale impose à un résident d’immatriculer un véhicule mis à sa disposition par la société qui l’emploie et qui est établie dans un autre État
membre, lorsque l’employé est également actionnaire, administrateur ou gérant de ladite société.
7. En outre, la législation nationale litigieuse ne s’applique qu’à des véhicules utilisés par une personne «pour l’exercice de sa profession». Ni la juridiction nationale, ni les défendeurs ni le gouvernement belge n’évoquent la question de l’usage à titre privé. Nous partons par conséquent du principe que la question de la juridiction de renvoi implique que les employés/les administrateurs concernés utilisent ainsi les véhicules mis à leur disposition.
8. Des observations écrites ont été déposées par chacun des défendeurs, par les gouvernements belge, finlandais et du Royaume-Uni ainsi que par la Commission des Communautés européennes, toutes les parties, à l’exception de M. Nadin, ayant été représentées à l’audience.
Appréciation
9. Les défendeurs et la Commission font valoir qu’il convient de répondre par l’affirmative à la question déférée, les trois gouvernements ayant présenté des observations soutiennent, quant à eux, le point de vue inverse.
10. Les défendeurs font valoir qu’ils devraient être considérés comme étant des «travailleurs» au sens de l’article 39 CE conformément à l’arrêt Lawrie-Blum (4). Sur ce fondement, il résulterait des arrêts Ledoux (5) et Van Lent (6) que la législation nationale est contraire au droit communautaire. Même si les défendeurs n’étaient pas considérés comme étant des travailleurs, la législation demeurerait contraire à l’article 43 CE. En outre, le Conseil d’État a estimé que la législation est
contraire aux articles 39 CE et 43 CE (7).
11. Le gouvernement belge fait tout d’abord valoir que les mesures nationales litigieuses doivent être lues en combinaison avec les articles 12, sous a), et 25, sous c), du code belge de la taxe sur la valeur ajoutée qui sont la transposition de l’article 28 bis, paragraphes 5 à 7, de la sixième directive 77/388/CEE (8). Ces dispositions assimilent à une livraison de biens à titre onéreux «le transfert par un assujetti d’un bien de son entreprise à destination d’un autre État membre» mais excluent
de la catégorie des présumées livraisons, les transferts à destination d’autres États membres effectués notamment pour les besoins d’une «utilisation temporaire pour une période qui ne peut excéder 24 mois, sur le territoire d’un autre État membre à l’intérieur duquel l’importation du même bien en provenance d’un pays tiers, en vue d’une utilisation temporaire, bénéficierait du régime de l’admission temporaire en exonération totale des droits à l’importation». Il ressort en outre clairement de
l’article 561, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 2454/93 (9) que le bénéfice du régime d’admission temporaire est subordonné à la condition que la personne qui utilise le véhicule concerné ait la qualité d’employé. En droit belge, cette condition est reprise dans l’article 14, sous f), de la circulaire n° 1/2000.
12. Le Royaume de Belgique soutient, ensuite, que dans la mesure où la législation nationale n’impose pas aux personnes auxquelles elle s’applique d’immatriculer le véhicule en Belgique lorsqu’il existe une relation de travail au sens de la jurisprudence de la Cour (10), et dans la mesure où dans les autres cas, la société qui fournit le véhicule peut l’immatriculer en Belgique, il n’y a pas de restriction de la libre circulation des travailleurs ou de la liberté d’établissement ou de la libre
prestation de services au sens des articles 39 CE, 43 CE et 49 CE. Si la Cour adoptait toutefois le point de vue inverse, le gouvernement belge fait valoir que les restrictions sont pleinement justifiées aux motifs que les États membres ont compétence pour légiférer en matière d’immatriculation automobile (11), que les mesures visent à éviter l’évasion fiscale et qu’elles sont, en outre, proportionnées.
13. Les gouvernements finlandais et du Royaume-Uni font valoir que l’État de résidence permanente de la personne qui utilise le véhicule a le droit d’en exiger l’immatriculation. Ce principe fait obstacle à l’évasion fiscale, facilite le contrôle routier et la sécurité routière et peut constituer un élément d’une stratégie environnementale (12); le gouvernement du Royaume-Uni ajoute qu’il s’agit également d’un moyen de percevoir les recettes fiscales.
14. La Commission fait valoir qu’il incombe à la juridiction nationale de trancher la question de savoir si les défendeurs relèvent des articles 39 CE ou 43 CE. La caractéristique essentielle de la relation de travail est la circonstance qu’une personne est sous la direction d’une autre personne (13) ou a un lien de subordination à son égard (14), auquel cas elle relèvera de l’article 39 CE. En tout cas, les articles 39 CE et 43 CE assurent la même protection juridique aux personnes qui en
relèvent (15). En l’espèce, l’existence d’une restriction résulte clairement de la jurisprudence Van Lent (16); cette restriction ne peut pas être justifiée par référence à la sécurité routière ni à l’érosion des recettes fiscales. Il ressort, en outre, clairement du rapport au Roi joint au projet d’arrêté royal que l’objectif exprès de cet arrêté était d’éviter que des personnes résidant en Belgique puissent échapper à la fiscalité automobile belge, et non de protéger la sécurité routière.
15. Nous indiquons, à titre liminaire, que les trois gouvernements ayant présenté des observations ont relevé que la Commission a reconnu (17) qu’une liberté totale de choix de l’État membre d’immatriculation d’un véhicule ne serait pas acceptable en ce que l’exercice de cette liberté aboutirait à ce que tous les véhicules soient immatriculés dans l’État membre où le niveau de taxation des véhicules est le plus faible, situation que l’agent du gouvernement belge a qualifiée, à l’audience, de
«forum shopping fiscal». Cette préoccupation ne nous semble toutefois pas pertinente au regard de la question qui se pose dans les présentes affaires. Personne n’a soutenu qu’il devrait exister une liberté d’immatriculer dans n’importe quel État membre les véhicules tels que ceux dont il s’agit dans les présentes affaires; la question est simplement de savoir si une société qui possède ou loue un véhicule, qu’elle met à la disposition d’un employé/d’un administrateur afin que celui-ci l’utilise dans
l’exercice de sa profession, doit rester libre d’immatriculer le véhicule concerné dans l’État membre où elle est réellement établie.
16. La législation nationale litigieuse a principalement pour effet d’imposer aux résidents belges employés par une société établie dans un autre État membre, au sein de laquelle ils occupent également un poste à responsabilité «entrepreneuriale», d’immatriculer en Belgique les véhicules qui sont mis à leur disposition par la société et qu’ils utilisent dans l’exercice de leur profession. Nous partageons le point de vue de la Commission selon lequel, afin de déterminer si cette situation est
compatible avec le traité CE, il n’est pas nécessaire de déterminer si, dans les présentes affaires, les défendeurs sont des travailleurs salariés ou indépendants au sens du droit communautaire puisque, selon une jurisprudence constante, les articles 39 CE et 43 CE assurent la même protection juridique et que, ainsi, la qualification d’une activité économique demeure sans conséquence (18). Si une telle qualification devait être effectuée, cette tâche reviendrait en tout état de cause évidemment à la
juridiction nationale.
17. Il est également de jurisprudence constante que des dispositions qui empêchent ou dissuadent un ressortissant d’un État membre de quitter son pays d’origine pour exercer son droit à la libre circulation constituent des entraves à cette liberté (19). Dans le cadre de restrictions (engendrées par l’application d’une législation en matière de taxe sur la valeur ajoutée) de l’usage à des fins privées d’une voiture fournie à un employé dans des circonstances similaires à celles des présentes
affaires, la Cour a en outre estimé que de telles restrictions avaient pour conséquence d'«empêcher pratiquement un travailleur frontalier de bénéficier de certains avantages qui lui sont accordés par son employeur, au seul motif que ce travailleur a sa résidence sur le territoire de l'État membre de l'importation temporaire [et il] se trouverait ainsi désavantagé, sur le plan des conditions de travail, par rapport à ses collègues résidant dans le pays de leur employeur, ce qui affecterait
directement l'exercice de son droit de libre circulation à l'intérieur de la Communauté» (20).
18. Cette affirmation nous semble être a fortiori applicable dans la présente affaire où l’obligation de réimmatriculer en Belgique un véhicule fourni par un employeur établi dans un autre État membre et utilisé dans l’exercice de la profession de l’employé/de l’administrateur est susceptible de dissuader les résidents belges d’exercer leur droit de libre circulation, que ce droit doive être correctement analysé comme découlant de l’article 39 CE ou de l’article 43 CE. De plus, ce principe est
encore plus pertinent dans le contexte d’un État membre tel que le Royaume de Belgique qui a des frontières terrestres avec quatre autres États membres et donc un nombre considérable de travailleurs frontaliers.
19. Nous ne voyons pas comment cette conclusion pourrait être infirmée par l’argument du gouvernement belge fondé sur les dispositions en matière d’admission temporaire figurant dans la législation communautaire et nationale en matière de TVA et de douane. Ces régimes sont distincts des systèmes nationaux d’immatriculation de véhicules. Leur application dépend de nombreux facteurs tels que la définition des notions de personne assujettie et d’admission temporaire (21). C’est pourquoi nous ne
pensons pas qu’ils aient une incidence sur la question déférée. Il est à noter, d’ailleurs, qu’aucune autre partie ayant présenté des observations à la Cour n’a examiné ces arguments.
20. En ce qui concerne la question de la justification, aucun des fondements invoqués par les gouvernements ayant présenté des observations ne nous semble défendable.
21. Le Royaume de Belgique invoque tout d’abord la compétence fiscale des États membres en matière d’imposition et d’immatriculation des véhicules, en renvoyant à la reconnaissance de ce principe par la Cour dans l’arrêt Cura Anlagen (22).
22. Dans cette affaire, la Cour a considéré que, puisque la taxation des véhicules automobiles n’avait pas été harmonisée, les États membres étaient libres d’exercer leur compétence fiscale en ce domaine. Toutefois, la Cour a ajouté la condition selon laquelle l’exercice de ces compétences devait avoir lieu «dans le respect du droit communautaire». Si des mesures nationales régissant l’immatriculation de véhicules sont contraires aux articles 39 CE et 43 CE, elles ne respectent manifestement pas
le droit communautaire et les États membres ne sont donc pas libres d’y avoir recours de la sorte.
23. Chacun des trois gouvernements renvoie à la nécessité de lutter contre l’évasion fiscale en tant que motif justificatif.
24. Il est vrai que les États membres peuvent refuser le bénéfice des dispositions en matière de libre circulation aux personnes coupables d’abus ou de fraude. Ceci ne peut toutefois avoir lieu qu’au cas par cas, lorsque la preuve d’un tel comportement est établie. Un simple risque d’abus ou de fraude ne saurait justifier une restriction générale qui empêcherait l’exercice en toute bonne foi de droits communautaires (23). De telles restrictions sont forcément disproportionnées en ce qu’elles
rendent impossible l’exercice légitime de droits communautaires.
25. Plus particulièrement, selon une jurisprudence constante, bien que l’objectif de prévenir l’évasion fiscale puisse justifier des mesures restrictives ayant pour objet spécifique d’exclure d’un avantage fiscal les montages purement artificiels dont le but serait de contourner la législation fiscale nationale, cet objectif ne peut pas justifier une législation visant de manière générale des opérations pouvant être effectuées par tout contribuable pour quelque raison que ce soit (24). On peut
remarquer, à cet égard, que l’agent du gouvernement belge a déclaré à l’audience qu’il y avait probablement des situations où l’immatriculation au Grand‑Duché de Luxembourg d’un véhicule fourni dans des circonstances semblables à celles en débat est parfaitement licite.
26. En ce qui concerne l’argument selon lequel ladite mesure est justifiée pour des raisons ayant trait à la sécurité routière, nous ne partageons pas l’avis des gouvernements ayant présenté des observations, selon lequel seule une immatriculation nationale et donc une prise en compte des contrôles techniques nationaux, est appropriée pour parvenir à cette fin. Comme la Commission l’indique, l’article 3, paragraphe 2, de la directive 96/96/CE (25) prévoit une reconnaissance mutuelle du certificat
justifiant des contrôles techniques.
27. En tout cas, en ce qui concerne la mesure nationale en débat, il ressort du rapport au Roi joint au projet d’arrêté royal que l’objectif exprès de cet arrêté était d’éviter que des personnes résidant en Belgique puissent échapper à la fiscalité automobile belge et non d’assurer la sécurité routière.
28. En outre, il est difficile de justifier l’argument selon lequel la mesure est nécessaire dans l’intérêt de la sécurité routière par le fait qu’elle dispense de l’obligation d’immatriculation les véhicules mis à disposition d’employés, qui ne sont ni des gérants ni des actionnaires majoritaires, par une société établie dans un autre État membre.
29. Nous n’acceptons pas non plus l’argument, invoqué par les gouvernements finlandais et du Royaume-Uni, selon lequel l’immatriculation nationale permet à elle seule une identification fiable des propriétaires des véhicules. Dans la mesure où tous les États membres ont un système d’immatriculation de véhicules, il devrait être possible de retrouver le propriétaire d’un véhicule quel que soit l’endroit de la Communauté où il est immatriculé. Ceci est sans doute le cas lorsqu’un véhicule conduit
par un touriste ou un visiteur temporaire est impliqué dans un accident de la route.
30. L’argument selon lequel la mesure nationale peut être justifiée par une perception de recettes fiscales peut être rapidement examiné. En effet, selon une jurisprudence constante, la perte de recettes fiscales ne peut jamais constituer une justification d'une restriction à l'exercice d'une liberté fondamentale (26).
31. Enfin, nous nous référons à l’argument avancé par les gouvernements finlandais et du Royaume-Uni selon lequel l’immatriculation peut constituer un élément d’une stratégie environnementale, vraisemblablement en appliquant, par exemple, différents taux d’imposition de sorte à refléter l’impact sur l’environnement du type de véhicule concerné. Il peut certainement en être ainsi et il est constant que l’objectif de protection de l’environnement peut en principe justifier des mesures nationales qui
seraient sinon contraires à une liberté fondamentale garantie par le traité (27). Cependant, la présente affaire porte sur la légalité d’une obligation d’immatriculation dans un État membre donné. Le taux d’imposition du véhicule n’a pas été mis en doute; il n’a pas non plus été suggéré que cette taxe serait progressive afin de favoriser les véhicules respectueux de l’environnement. C’est pourquoi nous considérons qu’il n’y a pas lieu, en la présente affaire, d’invoquer la protection de
l’environnement pour justifier des restrictions à des libertés, consacrées par le traité, résultant de cette obligation.
32. Au vu des considérations qui précèdent, il ne paraît pas nécessaire d’examiner les articles 10 CE et 49 CE, tous deux cités dans la question déférée, l’interprétation des articles 39 CE et 43 CE suffisant pour apporter une réponse utile à la juridiction de renvoi (28). Il convient de relever que parmi les observations reçues par la Cour, aucune ne contient de développements relatifs à l’article 10 CE ou à l’article 49.
Conclusion
33. Nous proposons donc à la Cour de répondre aux questions déférées par le tribunal de police de Neufchâteau de la manière suivante:
«Les articles 39 CE et 43 CE s’opposent à ce qu’une législation nationale exige d’un résident qu’il immatricule un véhicule mis à sa disposition par la société qui l’emploie et qui est réellement établie dans un autre État membre, lorsque l’employé concerné est également actionnaire, administrateur ou gérant de ladite société.»
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1 – Langue originale: l’anglais.
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2 – Moniteur belge du 8 août 2001, p. 27022.
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3 – www.fisconet.fgov.be.
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4 – Arrêt du 3 juillet 1986 (66/85, Rec. p. 2121).
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5 – Arrêt du 6 juillet 1988 (127/86, Rec. p. 3741).
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6 – Arrêt du 2 octobre 2003 (C-232/01, Rec. p. I-11525).
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7 – Avis 31.530/4 du comité législatif, Moniteur belge du 8 août 2001.
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8 – Sixième directive du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1), telle que modifiée par la directive 91/680/CEE, du 16 décembre 1991 (JO L 376, p. 1).
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9 – Règlement de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire (JO L 253, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 993/2001 de la Commission, du 4 mai 2001 (JO L 141, p. 1).
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10 – Arrêt du 12 mai 1998, Martínez Sala (C-85/96, Rec. p. I-2691), et arrêt Lawrie-Blum, précité à la note 4.
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11 – Arrêt du 21 mars 2002, Cura Anlagen (C-451/99, Rec. p. I-3193).
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12 – Ibidem, point 59.
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13 – Arrêts Lawrie-Blum, précité à la note 4, point 17, et du 27 juin 1996, Asscher (C‑107/94, Rec. p. I-3089, point 25).
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14 – Arrêt du 20 novembre 2001, Jany e.a. (C-268/99, Rec. p. I-8615, point 34).
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15 – Arrêt du 5 février 1991, Roux (C-363/89, Rec. p. I-273, point 23).
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16 – Arrêt, précité à la note 6.
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17 – Communication interprétative de la Commission concernant les procédures de réception et d'immatriculation de véhicules précédemment immatriculés dans un autre État membre (JO 1996, C 143, p. 4). Il est également fait référence à une constatation d’un effet semblable au point 45 des conclusions que nous avons déposées dans l’affaire Cura Anlagen, précitée à la note 11.
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18 – Arrêt Roux, précité à la note 15, point 23.
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19 – Arrêt Van Lent, précité, point 16.
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20 – Arrêt Ledoux, précité à la note 5, point 18.
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21 – L’article 561, paragraphe 2, du règlement n° 2454/93, invoqué par le gouvernement belge, s’applique en fait lorsque l’employeur de la personne qui utilise le véhicule est établi en dehors du territoire douanier de la Communauté.
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22 – Précité à la note 11.
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23 – Voir, notamment, arrêts du 17 juillet 1997, Leur-Bloem (C-28/95, Rec. p. I-4161, points 39 à 44); du 26 septembre 2000, Commission/Belgique (C-478/98, Rec. p. I‑7587, point 45), et du 21 novembre 2002, X et Y, (C-436/00, Rec. p. I-10829, point 62).
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24 – Pour un exemple récent, voir arrêt du 11 mars 2004, De Lasteyrie du Saillant, (C‑9/02, Rec. p. I‑2409, point 50).
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25 – Directive du Conseil, du 20 décembre 1996, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au contrôle technique des véhicules à moteur et de leurs remorques (JO L 46, p. 1).
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26 – Arrêts du 12 décembre 2002, De Groot, (C-385/00, Rec. p. I-11819, point 103 et la jurisprudence citée), et X et Y, précité à la note 23, point 50.
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27 – Arrêts du 20 septembre 1988, Commission/Danemark (302/86, Rec. p. 4607); du 9 juillet 1992, Commission/Belgique (C-2/90, Rec. p. I-4431), et du 13 mars 2001, PreussenElektra (C-379/98, Rec. p. I-2099).
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28 – Arrêt du 22 janvier 2002, Dreessen (C-31/00, Rec. p. I-663, point 30).