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14/03/2002 | CJUE | N°C-221/01

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 14 mars 2002., Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique., 14/03/2002, C-221/01


Avis juridique important

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62001C0221

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 14 mars 2002. - Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique. - Directive 97/33/CE - Télécommunications - Interconnexion des réseaux - Interopérabilité des services. - Affaire C-221/01.
Recueil

de jurisprudence 2002 page I-07835

Conclusions de l'avocat général

1. Dans...

Avis juridique important

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62001C0221

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 14 mars 2002. - Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique. - Directive 97/33/CE - Télécommunications - Interconnexion des réseaux - Interopérabilité des services. - Affaire C-221/01.
Recueil de jurisprudence 2002 page I-07835

Conclusions de l'avocat général

1. Dans le présent recours, formé en application de l'article 226 CE, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en ne prenant pas toutes les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 97/33/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 juin 1997, relative à l'interconnexion dans le secteur des télécommunications en vue d'assurer un service universel et l'interopérabilité par l'application des principes
de fourniture d'un réseau ouvert (ONP) (ci-après la «directive»), et, en particulier, aux dispositions des articles 7, paragraphe 5, 9, paragraphe 3, ainsi que 14, paragraphes 1 et 2, le royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.

La directive 97/33

2. La directive «établit un cadre réglementaire assurant dans la Communauté l'interconnexion des réseaux de télécommunications et, en particulier, l'interopérabilité des services, et la fourniture d'un service universel, dans un environnement d'ouverture et de concurrence des marchés. Elle a pour objet l'harmonisation des conditions assurant une interconnexion ouverte et efficace des réseaux publics de télécommunications et des services de télécommunications accessibles au public ainsi que l'accès
ouvert et efficace à ces réseaux et services».

3. Aux fins du présent recours, les éléments essentiels de la directive sont les suivants. Les dispositions spécifiques en cause seront expliquées ci-après lors de l'examen des différents griefs.

4. L'article 3, paragraphe 1, de la directive exige que les États membres éliminent les éventuelles restrictions qui empêchent les organismes de télécommunications agréés de négocier entre eux des accords d'interconnexion. Les modalités commerciales d'interconnexion doivent faire l'objet d'un accord entre les parties concernées, sous réserve des dispositions de la directive et des règles de concurrence établies par le traité CE.

5. L'article 4 prévoit que les organismes de télécommunications agréés ont le droit et, lorsque des organismes de cette catégorie le demandent, l'obligation de négocier entre eux leur interconnexion.

6. L'article 5 stipule que, dans certaines circonstances, les organismes de télécommunications sont tenus de partager le coût des obligations de service universel.

7. L'article 7 établit un certain nombre de principes en matière de tarification de l'interconnexion et des systèmes de comptabilisation des coûts qui doivent être appliqués aux organismes des télécommunications puissants sur le marché au sens de l'article 4, paragraphe 3.

8. L'article 9 définit les responsabilités générales des autorités réglementaires nationales.

9. L'article 10 fixe une série d'exigences essentielles en matière d'interconnexion, relatives à la sécurité de fonctionnement du réseau et au maintien de son intégrité, à l'interopérabilité des services et à la protection des données.

10. Aux termes de l'article 12, les États sont tenus de garantir la fourniture de numéros et de séries de numéros adéquats pour tous les services de télécommunications accessibles au public.

11. L'article 14 prescrit que les informations spécifiées dans certains articles doivent être publiées ou mises à la disposition des parties intéressées, à leur demande.

12. L'article 23 demandait aux États membres de mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive au plus tard le 31 décembre 1997 et d'en informer immédiatement à la Commission.

La procédure précontentieuse

13. Par courrier du 13 janvier 1998, les autorités belges ont notifié à la Commission la loi du 19 décembre 1997 , qui visait à transposer la directive .

14. Le 6 août 1998, la Commission a envoyé aux autorités belges, en application de l'article 169 du traité CE (devenu article 226 CE), une lettre de mise en demeure les informant que la législation notifiée ne transposait pas de façon satisfaisante l'ensemble des dispositions de la directive .

15. Par courrier du 8 septembre 1998, les autorités belges ont fait savoir à la Commission qu'elles avaient adopté des textes complémentaires en vue de transposer la directive. Par lettre du 12 octobre 1998, elles ont répondu à la lettre de mise en demeure.

16. La Commission continuant à estimer que le royaume de Belgique n'avait pas transposé la directive de manière satisfaisante, elle lui a adressé, le 15 avril 1999, en application de l'article 169 du traité CE, un avis motivé dans lequel elle déclarait que, à son avis, la législation belge ne reflétait pas certaines dispositions spécifiques de la directive.

17. Par lettres du 26 avril, du 21 juin (qui répondait à l'avis motivé), du 18 octobre et du 10 décembre 1999, les autorités belges ont informé la Commission de l'adoption de dispositions législatives complémentaires.

18. Toutefois, même si la législation en question répondait en partie aux griefs de la Commission, cette dernière n'en continuait pas moins à penser que la transposition de la directive , et notamment de ses articles 7, paragraphe 5, 9, paragraphe 3, et 14, paragraphes 1 et 2, demeurait insuffisante. La Commission a donc introduit le présent recours.

Le grief concernant l'article 7, paragraphe 5, de la directive

19. L'article 7 est intitulé: «Principes de tarification de l'interconnexion et systèmes de comptabilisation des coûts». Il s'applique aux organismes qui ont été notifiés par les autorités réglementaires nationales en qualité d'organismes puissants sur le marché.

20. L'article 7, paragraphe 5, impose à la Commission d'élaborer des recommandations en matière de systèmes de comptabilisation des coûts et de séparation comptable dans le domaine de l'interconnexion. Dans la mesure où elles sont pertinentes, les deux dernières phrases du deuxième alinéa disposent:

«Le respect du système de comptabilisation des coûts est vérifié par les autorités réglementaires nationales ou un autre organisme compétent [...] Une attestation de conformité est publiée annuellement».

21. La Commission fait valoir que la législation belge applicable ne contient aucune méthode qui permette de vérifier le respect du système de comptabilisation des coûts ou de publier une attestation de conformité.

22. Dans son mémoire en défense, le gouvernement belge se réfère à «l'arsenal législatif belge» en citant de nombreuses dispositions qui confèrent différents pouvoirs généraux à l'Institut belge des services postaux et des télécommunications (l'autorité réglementaire nationale, ci-après l'«Institut»). Dans sa duplique toutefois, il reconnaît que sa législation ne contient aucun système d'attestation de conformité répondant aux exigences de l'article 7, paragraphe 5, de la directive, et informe la
Cour qu'il entend combler cette lacune par une législation devant entrer en vigueur prochainement.

23. Dans ces conditions, la demande de la Commission sur ce point est fondée.

L'article 9, paragraphe 3, de la directive

24. L'article 9 est intitulé: «Responsabilités générales des autorités réglementaires nationales».

25. Aux termes de l'article 9, paragraphe 1, les autorités réglementaires nationales «encouragent et garantissent une interconnexion adéquate dans l'intérêt de tous les utilisateurs, en s'acquittant de leur tâche de façon à dégager une efficacité économique maximale et un intérêt maximal pour l'utilisateur final». Elles doivent tenir compte notamment d'un certain nombre de facteurs spécifiques, tels que la nécessité d'encourager un marché compétitif et d'assurer le développement équitable et
approprié d'un marché européen des télécommunications harmonisé, ainsi que des principes de non-discrimination (y compris l'égalité d'accès) et de proportionnalité.

26. L'article 9, paragraphe 3, premier alinéa, est ainsi rédigé:

«Pour réaliser les objectifs visés au paragraphe 1, les autorités réglementaires nationales peuvent intervenir à tout moment de leur propre initiative, et interviennent à la demande d'une des parties, afin de définir les questions qui doivent être couvertes par un accord d'interconnexion, ou de fixer les conditions spécifiques que doivent respecter une ou plusieurs des parties à un tel accord. Les autorités réglementaires nationales peuvent, dans des cas exceptionnels, exiger la modification
d'accords d'interconnexion déjà conclus, lorsque cette modification se justifie pour garantir la concurrence réelle et/ou l'interopérabilité des services pour les utilisateurs».

27. La Commission fait valoir que la législation d'application belge ne prévoit pas l'intervention «à tout moment de leur propre initiative» des autorités réglementaires dans les négociations, comme l'exige cette disposition.

28. Pour sa défense, le gouvernement belge se réfère d'abord à deux dispositions générales de la loi du 21 mars 1991 . L'article 75, paragraphe 3, de ladite loi prévoit que l'Institut est «chargé d'une mission générale de surveillance et de contrôle» de certaines dispositions de cette loi. L'article 79 bis, paragraphe 1, de la même loi précise que, dans l'accomplissement des missions qui lui sont assignées, l'Institut «peut recueillir tous les renseignements nécessaires auprès des entreprises et des
associations d'entreprises». Le gouvernement belge soutient que ces dispositions confèrent à l'autorité réglementaire un droit général d'intervenir à tout moment s'il apparaît qu'une obligation légale ou les objectifs généraux énoncés dans la législation d'application ne sont pas respectés.

29. Ensuite, le gouvernement belge se réfère à des dispositions complémentaires qu'il avait présentées dans sa réponse à l'avis motivé comme transposant l'article 9, paragraphe 3, de la directive. Ces dispositions sont: i) l'article 109 ter, paragraphes 4 et 5, de la loi du 21 mars 1991 modifiée et ii) les articles 8 et 12 de l'arrêté royal du 20 avril 1999, fixant les délais et principes généraux applicables aux négociations commerciales menées en vue de conclure des accords d'interconnexion et les
modalités de publication de l'offre d'interconnexion de référence, et fixant les conditions à régler dans la convention d'interconnexion .

30. L'article 109 ter, paragraphe 4, premier alinéa, de la loi du 21 mars 1991, tel que modifiée, oblige tout organisme puissant sur le marché à publier une offre d'interconnexion.

31. Les cinquième et sixième alinéas de cette disposition sont ainsi rédigés:

«L'Institut peut imposer les modifications qu'il juge indispensables à l'offre d'interconnexion.

Si des fournisseurs de réseaux publics de télécommunications ou de services de télécommunications offerts au public n'ont pas interconnecté leurs réseaux ou services, alors que l'Institut estime une telle interconnexion indispensable à l'intérêt des utilisateurs, l'Institut peut exiger qu'il soit procédé à une interconnexion. En ce cas, il fixe les conditions d'interconnexion, sauf le droit des parties de conclure une convention conformément au paragraphe 5 du présent article».

32. L'article 109 ter, paragraphe 5, deuxième alinéa, de cette même loi est ainsi rédigé:

«Si cela est indispensable pour garantir l'égalité des conditions de concurrence ou l'interopérabilité, l'Institut peut demander la modification des conventions déjà conclues».

33. L'arrêté royal du 20 avril 1999 concerne les négociations commerciales d'interconnexion. Son article 8 prévoit que, si, à l'expiration du délai fixé à l'article précédent, les parties ne sont pas parvenues à un accord, elles peuvent, ensemble ou séparément, demander l'intervention de la «Chambre pour l'interconnexion, l'accès spécial et les utilisations partagées» . L'article 12 déclare que, si les parties ne parviennent pas à conclure un accord d'interconnexion, la partie à laquelle la demande
d'interconnexion a été adressée doit élaborer une offre d'interconnexion; l'Institut peut décider de modifier cette offre en vue d'atteindre un accord entre les parties.

34. La Commission continue à penser que les dispositions susmentionnées ne permettent pas aux autorités réglementaires d'intervenir dans les négociations «à tout moment de leur propre initiative», comme l'exige l'article 9, paragraphe 3, de la directive.

35. Nous admettons le bien-fondé de l'argumentation de la Commission sur ce point. Il ressort des termes de l'article 9, paragraphe 3, que les autorités réglementaires nationales doivent être habilitées à intervenir dans les négociations qui conduisent à un accord d'interconnexion . Le législateur communautaire a clairement envisagé que cette faculté devait être distincte du pouvoir d'exiger la modification d'accords d'interconnexion déjà conclus. Or, la législation nationale invoquée par le
gouvernement belge semble conférer soit des pouvoirs de surveillance très généraux, qui à notre sens ne sauraient être considérés comme une mise en oeuvre suffisante d'un pouvoir d'intervention spécifique dans les négociations commerciales, soit des pouvoirs d'intervention spécifiques dans des domaines qui ne correspondent pas exactement à ceux envisagés par l'article 9, paragraphe 3.

36. En particulier, comme l'expose la Commission, l'article 109 ter, paragraphe 5, deuxième alinéa, ne concerne que les accords déjà conclus et ne permet pas aux autorités d'intervenir dans les négociations conduisant à un accord d'interconnexion. L'article 109 ter, paragraphe 4, n'a trait qu'à l'obligation imposée par le droit belge aux organismes puissants sur le marché de publier une «offre de référence» comme le prévoit l'article 7, paragraphe 3, de la directive servant de base à des
négociations ultérieures. C'est cette offre de référence qui peut être modifiée par l'Institut. Toutefois, ce droit est distinct d'un droit pour l'Institut d'intervenir dans toute négociation tendant à la conclusion d'un accord d'interconnexion. L'article 8 de l'arrêté royal du 20 avril 1999 ne s'applique que si les parties demandent l'intervention [des autorités], l'article 12 ne jouant quant à lui que si les parties ne sont pas parvenues à conclure un accord d'interconnexion.

37. Dans sa duplique, le gouvernement belge semble admettre que sa législation ne transpose pas de manière suffisante l'article 9, paragraphe 3, de la directive; il y joint un projet d'arrêté royal modifiant l'arrêté royal du 20 avril 1999 et comportant un nouvel article 7 bis qui, selon lui, reprend mot pour mot les termes employés dans la directive.

38. Dans ces conditions, la demande de la Commission sur ce point est fondée.

L'article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive

39. L'article 14, intitulé «Publication d'informations et accès à ces informations», prévoit, pour autant qu'il est pertinent:

«1. En ce qui concerne les informations définies à l'article 7 paragraphe 3, à l'article 9, paragraphe 2, à l'article 10 et à l'article 12 paragraphe 4, les autorités réglementaires nationales veillent à ce que des informations à jour soient publiées de façon appropriée afin que les parties intéressées y aient aisément accès. Les modalités de publication de ces informations sont spécifiées dans le journal officiel national de l'État membre concerné.

2. En ce qui concerne les informations définies à l'article 4 paragraphe 1, à l'article 5, paragraphes 3 et 5, à l'article 6 point c) et à l'article 9 paragraphe 3, les autorités réglementaires nationales veillent à ce que les informations à jour spécifiquement visées par ces articles soient mises gratuitement à la disposition des parties intéressées, à leur demande, pendant les heures de bureau. Le bulletin officiel national de l'État membre concerné indique le(s) lieu(x) et les heures où ces
informations sont accessibles.»

40. Dans sa requête, la Commission soutient que le royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu: i) de l'article 14, paragraphe 1, en liaison avec les articles 7, paragraphe 3, 9, paragraphe 2, 10 et 12, paragraphe 4, et ii) de l'article 14, paragraphe 2, en liaison avec l'article 9, paragraphe 3.

41. Dans sa réplique, la Commission convient que, à la lumière des explications fournies par le gouvernement belge dans son mémoire en défense, la situation peut être considérée comme satisfaisante en ce qui concerne les articles 7, paragraphe 3, et 9, paragraphe 3. En revanche, elle maintient son grief en ce qui concerne les articles 9, paragraphe 2, 10 et 12, paragraphe 4, qui n'étaient pas mentionnés dans le mémoire en défense.

L'article 9, paragraphe 2, de la directive

42. L'article 9, paragraphe 2, de la directive énonce:

«Les conditions générales fixées préalablement par l'autorité réglementaire nationale sont publiées conformément à l'article 14 paragraphe 1.

En ce qui concerne notamment l'interconnexion entre organismes figurant à l'annexe II, les autorités réglementaires nationales:

peuvent fixer des conditions ex ante dans les domaines énumérés à l'annexe VII première partie,

favorisent l'inclusion des questions visées à l'annexe VII deuxième partie dans les accords d'interconnexion».

43. Dans sa duplique, le gouvernement belge déclare que l'article 14, paragraphe 1, en liaison avec l'article 9, paragraphe 2, de la directive est transposé par l'arrêté royal du 20 avril 1999 , et en particulier par ses articles 17 à 21.

44. Les articles 17 à 20 de l'arrêté royal du 20 avril 1999 forment la section 2 du chapitre II dudit arrêté. Le chapitre II est intitulé: «Publication de l'offre d'interconnexion de référence» et la section 2 «Publication de l'offre de référence». L'article 17 oblige les organismes puissants sur le marché à publier une communication relative à l'approbation par l'Institut de l'offre d'interconnexion de référence; l'article 18 prévoit que cette publication doit intervenir avant le 30 décembre de
chaque année; l'article 19 précise que l'offre d'interconnexion de référence est publique et gratuite, et l'article 20 ajoute qu'elle est en principe valable pour l'année civile qui suit l'année de publication.

45. L'article 21 de l'arrêté royal du 20 avril 1999 figure dans le chapitre III, intitulé «Conditions techniques et financières». Il énonce les conditions techniques et financières minimales qui doivent être fixées dans les conventions d'interconnexion en application de l'article 109 ter, paragraphe 5, de la loi du 21 mars 1991.

46. L'article 109 ter, paragraphe 5, premier alinéa, de la loi du 21 mars 1991 prévoit, pour autant qu'il est pertinent:

«L'interconnexion fait l'objet d'une convention entre les parties concernées. Celle-ci détermine les conditions techniques et financières de l'interconnexion. Le Roi arrête, sur avis de l'Institut, les conditions qui doivent au minimum être réglées dans une convention d'interconnexion [...]»

47. Dans le «Rapport au Roi» qui présente l'arrêté royal du 20 avril 1999, ces conditions sont classées, grosso modo, en trois catégories: premièrement, les conditions techniques concernant l'infrastructure du réseau et le type de services à fournir; deuxièmement, les conditions juridiques ou contractuelles et, troisièmement, les conditions financières et commerciales. Ces conditions reprennent presque intégralement les «autres points dont il convient d'encourager l'inclusion dans les accords
d'interconnexion», énumérés dans la deuxième partie de l'annexe VII de la directive en application de l'article 9, paragraphe 3, deuxième alinéa, du même texte.

48. La Commission soutient que les articles 17 à 21 de l'arrêté royal du 20 avril 1999 prévoient la publication de l'approbation par l'Institut de l'offre d'interconnexion de référence, mais nullement la publication ou la communication, sous quelque forme que ce soit, des conditions générales préétablies par l'autorité réglementaire, comme l'exige l'article 9, paragraphe 2, de la directive.

49. À notre sens, l'argument de la Commission est fondé dans la mesure où il concerne les articles 17 à 20 de l'arrêté royal du 20 avril 1999. L'article 21, en revanche, lu à la lumière de l'article 109 ter, paragraphe 5, de la loi du 21 mars 1991, ne semble pas énumérer les conditions générales préétablies par l'autorité réglementaire aux fins de l'article 9, paragraphe 2, de la directive.

50. L'article 14, paragraphe 1, de la directive exige que les autorités réglementaires nationales veillent à ce que les informations visées à l'article 9, paragraphe 2, soient «publiées de façon appropriée afin que les parties intéressées y aient aisément accès», et précise que les «modalités de publication de ces informations [doivent être] spécifiées dans le journal officiel national de l'État membre concerné».

51. Le gouvernement belge soutient qu'il s'est conformé à l'obligation de publier les informations en cause, énoncée à l'article 14, paragraphe 1, de la directive, puisque la législation belge est elle-même publiée au Moniteur belge.

52. Si, comme c'est le cas en l'espèce, les informations en question c'est-à-dire, dans le contexte du présent grief, les conditions générales fixées préalablement par l'autorité réglementaire nationale sont elles-mêmes publiées au journal officiel national de l'État membre concerné, nous partageons l'avis du gouvernement belge selon lequel cette manière de procéder vaut publication aux fins de l'article 14, paragraphe 1, de la directive. Comme le souligne le gouvernement belge, il serait absurde
d'exiger qu'il soit fait mention dans le Moniteur belge, où les informations sont publiées, du fait que ces informations y sont publiées.

53. En conséquence, nous estimons que la demande de la Commission tendant à faire constater que le royaume de Belgique n'a pas transposé l'article 14, paragraphe 1, de la directive dans la mesure où il concerne l'article 9, paragraphe 2, est infondée.

L'article 10 de la directive

54. L'article 10, deuxième alinéa, de la directive est ainsi rédigé:

«Lorsque l'autorité réglementaire nationale impose que les accords d'interconnexion contiennent des conditions fondées sur les exigences essentielles, ces conditions sont publiées selon les modalités prévues à l'article 14, paragraphe 1».

55. Dans sa duplique, le gouvernement belge fait état de la correspondance échangée antérieurement avec la Commission, où il serait dit que l'article 14, paragraphe 1, de la directive, a été transposé, dans la mesure où il concerne l'article 10 de la directive, par deux arrêtés royaux du 22 juin 1998: l'arrêté royal relatif aux conditions d'établissement et d'exploitation de réseaux publics de télécommunications et l'arrêté royal fixant le cahier des charges pour le service de téléphonie vocale et
la procédure relative à l'attribution des autorisations individuelles .

56. Ces arrêtés contiennent tous deux des dispositions imposant aux opérateurs de prendre les mesures, qui doivent être précisées dans les conventions d'interconnexion, pour garantir le respect des exigences essentielles, en particulier (dans les deux arrêtés) l'interopérabilité des services et la protection des données ainsi que (dans le cas des réseaux publics de télécommunications) la sécurité de fonctionnement du réseau et le maintien de son intégrité . Les deux arrêtés mentionnent la directive
et l'avis de l'Institut dans leur préambule.

57. Les deux arrêtés royaux du 22 juin 1998, qui semblent ainsi avoir été au moins en partie basés sur l'avis de l'Institut, imposent, dans les accords d'interconnexion, des conditions fondées sur les exigences essentielles et, partant, entrent dans le champ d'application de l'article 10 de la directive. L'article 14, paragraphe 1, de la directive exige que les autorités réglementaires nationales veillent à ce que les informations visées à l'article 10 de la directive soient «publiées de façon
appropriée afin que les parties intéressées y aient aisément accès», et précise que les «modalités de publication de ces informations [doivent être] spécifiées dans le journal officiel national de l'État membre concerné».

58. Le gouvernement belge fait valoir que les informations visées à l'article 10 de la directive sont exposées dans la législation belge; cette législation ayant été elle-même publiée au Moniteur belge, la condition requise à l'article 14, paragraphe 1, de la directive serait respectée.

59. Pour les raisons exposées ci-dessus , nous estimons que cette argumentation est exacte et, partant, que la demande de la Commission tendant à faire constater que le royaume de Belgique n'a pas transposé l'article 14, paragraphe 1, de la directive, dans la mesure où il concerne l'article 10, est infondée.

Article 12, paragraphe 4, de la directive

60. L'article 12, paragraphe 4, dispose:

«Les autorités réglementaires nationales veillent à ce que les éléments essentiels des plans nationaux de numérotation, ainsi que toutes les adjonctions ou modifications ultérieures qui leur sont apportées, soient publiés conformément à l'article 14, paragraphe 1, sous réserve uniquement des restrictions imposées par la sécurité nationale».

61. Le gouvernement belge soutient que cette disposition est correctement transposée par l'article 2, paragraphe 2, de l'arrêté royal du 10 décembre 1997, relatif à la gestion du plan de numérotation , qui dispose:

«L'institut est chargé de la constatation, l'ajout et l'éventuelle modification des plans de numérotation dans le cadre des dispositions des chapitres trois à neuf.

Les éléments principaux définis à l'alinéa précédent sont publics et disponibles auprès de l'Institut sur simple demande. L'Institut fait référence à ces éléments principaux au Moniteur belge [...]»

62. Le gouvernement belge explique que la «référence» publiée au Moniteur belge contient une mention de la publication des éléments essentiels sur le site Internet de l'Institut. Pour lui, il s'agit donc bel et bien d'une référence aux «modalités de publication de ces informations» au sens de l'article 14, paragraphe 1, de la directive.

63. Toutefois, le gouvernement belge conclut sa duplique en mentionnant un projet d'arrêté royal modifiant l'article 2, paragraphe 2, deuxième alinéa, de l'arrêté royal du 10 décembre 1997 de manière à y incorporer le texte même de l'article 14, paragraphe 1, de la directive. Après modification, la deuxième phrase du deuxième alinéa dudit arrêté serait ainsi rédigée: «l'Institut fait publier au Moniteur belge les modalités de publication de ces éléments».

64. Rappelons que l'article 14, paragraphe 1, de la directive exige que les autorités réglementaires nationales veillent «à ce que des informations à jour soient publiées de façon appropriée afin que les parties intéressées y aient aisément accès». Aucune indication complémentaire n'est fournie quant au mode de publication envisagé, bien que la disposition précitée exige que les modalités de publication de ces informations soient spécifiées dans le journal officiel national de l'État membre
concerné.

65. Même si nous sommes prêt à convenir que, dans le secteur des télécommunications modernes, la publication par Internet est «appropriée» au sens de l'article 14, paragraphe 1, de la directive, il ne ressort malheureusement pas clairement des déclarations du gouvernement belge dans sa duplique ce qu'il entend précisément par la «référence» publiée au Moniteur belge, ni même si une référence à une publication sur le site Internet de l'Institut a bien été publiée; de plus, le gouvernement belge n'a
fourni aucun élément de preuve en ce sens à la Cour.

66. Dans ces conditions, la demande de la Commission tendant à faire constater que le gouvernement belge n'a pas transposé l'article 14, paragraphe 1, de la directive est fondée en ce qui concerne l'article 12, paragraphe 4, du même texte.

Dépens

67. La Commission ayant obtenu gain de cause sur l'essentiel de son recours, il y a lieu de condamner le royaume de Belgique aux dépens.

Conclusion

68. Eu égard aux observations qui précèdent, nous estimons que la Cour devrait dire pour droit:

«1) En s'abstenant de transposer correctement les articles 7, paragraphe 5, 9, paragraphe 3, ainsi que 14, paragraphe 1, de la directive 97/33/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 juin 1997, relative à l'interconnexion dans le secteur des télécommunications en vue d'assurer un service universel et l'interopérabilité par l'application des principes de fourniture d'un réseau ouvert (ONP), le royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.

2) Le royaume de Belgique est condamné aux dépens.»


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-221/01
Date de la décision : 14/03/2002
Type de recours : Recours en constatation de manquement - fondé, Recours en constatation de manquement - non fondé

Analyses

Directive 97/33/CE - Télécommunications - Interconnexion des réseaux - Interopérabilité des services.

Rapprochement des législations

Télécommunications


Parties
Demandeurs : Commission des Communautés européennes
Défendeurs : Royaume de Belgique.

Composition du Tribunal
Avocat général : Jacobs
Rapporteur ?: Gulmann

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2002:177

Source

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