Avis juridique important
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61998C0347
Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 23 janvier 2001. - Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique. - Manquement d'Etat - Sécurité sociale - Règlement (CEE) nº 1408/71 - Article 13, paragraphe 2, sous f) - Réglementation d'un Etat membre prévoyant le prélèvement de cotisations de sécurité sociale sur des prestations de maladie professionnelle dont les bénéficiaires ne résident pas dans cet Etat et ne sont plus soumis au régime de sécurité sociale de celui-ci. -
Affaire C-347/98.
Recueil de jurisprudence 2001 page I-03327
Conclusions de l'avocat général
I - L'objet du litige
1. Dans la présente procédure de recours en manquement dirigée contre le royaume de Belgique, la Commission demande à la Cour de justice de constater que, en percevant des cotisations personnelles sur les rentes belges de maladie professionnelle, dont les bénéficiaires ne résident pas en Belgique et ne perçoivent aucune autre prestation sociale belge que lesdites rentes ou qui ne relèvent plus du régime belge de sécurité sociale, le royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en
vertu de l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil (ci-après le «règlement»).
2. Dans les cas mentionnés, le royaume de Belgique ne serait pas habilité à percevoir ces cotisations puisque les personnes concernées sont exclusivement soumises aux dispositions légales de l'autre État membre, c'est-à-dire de l'État de résidence. Les règles belges - et donc les cotisations obligatoires - ne s'appliqueraient pas ou ne pourraient s'appliquer.
3. La Commission indique que l'article 46 des lois coordonnées relatives à la réparation des maladies professionnelles du 3 juin 1970 (ci-après l'«article 46») est contraire à l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement.
4. L'article 46 est libellé comme suit:
«La victime d'une maladie professionnelle, bénéficiaire d'une indemnité ou d'une allocation en vertu des présentes lois, reste tenue au paiement des cotisations dues en application de la législation sur la sécurité sociale.»
5. Comme cela résulte de la lettre de mise en demeure préalable à l'ouverture d'une procédure de recours en manquement, la Commission ne conteste pas en soi l'obligation d'acquitter les cotisations ainsi formulées, mais uniquement la perception de cotisations sociales sur certaines rentes dont les bénéficiaires sont domiciliés dans un autre État membre et y perçoivent une pension servie par ledit État.
II - La procédure
6. À la suite à l'ouverture de la procédure de manquement par la mise en demeure du 24 septembre 1996, le royaume de Belgique a sollicité une prolongation du délai de réponse qui lui a été accordée. La Commission ayant en vain mis en demeure le royaume de Belgique de présenter ses observations, elle a rendu le 6 novembre 1997 un avis motivé dans lequel elle lui fait en substance grief de la perception d'une cotisation personnelle au taux de 13,07 % sur les allocations de maladie professionnelle
auprès de bénéficiaires qui ne perçoivent pas d'autres prestations sociales que les allocations en question et qui sont domiciliés hors de Belgique. Le royaume de Belgique y a répondu par une lettre du 12 mai 1998 dans laquelle il indique que l'article 46 litigieux n'est pas contraire au règlement. Sur ce, la Commission a formé un recours en manquement, inscrit au registre de la Cour de justice le 22 septembre 1998, et conclu à ce qu'il plaise à la Cour:
1) constater que le royaume de Belgique, en prélevant des cotisations personnelles de 13,07 % sur les pensions belges de maladie professionnelle, dont les titulaires ne résident pas en Belgique et ne sont plus soumis au régime belge de sécurité sociale, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1408/71 du Conseil.
2) condamner le royaume de Belgique aux dépens.
7. Le royaume de Belgique a conclu qu'il plaise à la Cour rejeter le recours comme non fondé et statuer sur les dépens comme de droit.
8. Par ordonnance du 1er mars 1999, le royaume des Pays-Bas a été admis à intervenir au soutien des conclusions de l'État membre poursuivi.
9. Aucune audience de plaidoirie ne s'est tenue dans la procédure.
III - Les dispositions applicables
A - Droit communautaire
1) Le règlement n° 1408/71
10. L'article 13, paragraphes 1 et 2, sous a) et f), dispose que:
«1. Sous réserve de l'article 14 quater, les personnes auxquelles le présent règlement est applicable ne sont soumises qu'à la législation d'un seul État membre. Cette législation est déterminée conformément aux dispositions du présent titre.
2. Sous réserve des articles 14 à 17:
a) la personne qui exerce une activité salariée sur le territoire d'un État membre est soumise à la législation de cet État, même si elle réside sur le territoire d'un autre État membre [...]
b) à e) [...]
f) la personne à laquelle la législation d'un État membre cesse d'être applicable, sans que la législation d'un autre État membre lui devienne applicable en conformité avec l'une des règles énoncées aux alinéas précédents ou avec l'une des exceptions ou règles particulières visées aux articles 14 à 17, est soumise à la législation de l'État membre sur le territoire duquel elle réside, conformément aux dispositions de cette seule législation.»
11. L'article 17 se lit comme suit:
«Deux ou plusieurs États membres, les autorités compétentes de ces États ou les organismes désignés par ces autorités peuvent prévoir d'un commun accord, dans l'intérêt de certaines catégories de personnes ou de certaines personnes, des exceptions aux dispositions des articles 13 à 16.»
12. L'article 27 dispose que:
«Le titulaire de pensions ou de rentes dues au titre des législations de deux ou plusieurs États membres, dont celle de l'État membre sur le territoire duquel il réside, et qui a droit aux prestations au titre de la législation de ce dernier État membre, [...] ainsi que les membres de sa famille, obtiennent ces prestations de l'institution du lieu de résidence et à la charge de cette institution, comme si l'intéressé était titulaire d'une pension ou d'une rente due au titre de la seule législation
de ce dernier État membre.»
13. L'article 33 est libellé comme suit:
«1. L'institution d'un État membre débitrice d'une pension ou d'une rente qui applique une législation prévoyant des retenues de cotisations à la charge du titulaire d'une pension ou d'une rente, pour la couverture des prestations de maladie et de maternité, est autorisée à opérer ces retenues, calculées suivant ladite législation, sur la pension ou la rente dues par elle, dans la mesure où les prestations servies en vertu des articles 27, 28, 28 bis, 29, 31 et 32 sont à la charge d'une institution
dudit État membre.
2. Lorsque, dans les cas visés à l'article 28 bis, le titulaire d'une pension ou d'une rente est soumis, du fait de sa résidence, à cotisations ou retenues équivalentes pour la couverture des prestations de maladie et de maternité en vertu de la législation de l'État membre sur le territoire duquel il réside, ces cotisations ne sont pas exigibles.»
14. L'article 52 dispose que:
«Le travailleur salarié ou non salarié qui réside sur le territoire d'un État membre autre que l'État compétent et qui est victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle bénéficie dans l'État de sa résidence:
a) des prestations en nature servies, pour le compte de l'institution compétente, par l'institution du lieu de résidence selon les dispositions de la législation qu'elle applique, comme s'il y était affilié;
b) des prestations en espèces servies par l'institution compétente selon les dispositions de la législation qu'elle applique. Toutefois, après accord entre l'institution compétente et l'institution du lieu de résidence, ces prestations peuvent être servies par cette dernière institution pour le compte de la première, selon la législation de l'État compétent.»
15. L'article 77 est libellé comme suit:
«1. Le terme prestations, au sens du présent article, désigne les allocations familiales prévues pour les titulaires d'une pension ou d'une rente de vieillesse, d'invalidité, d'accident du travail ou de maladie professionnelle, ainsi que les majorations ou les suppléments de ces pensions ou rentes prévues pour les enfants de ces titulaires, à l'exception des suppléments accordés en vertu de l'assurance accidents du travail et maladies professionnelles.
2. Les prestations sont accordées selon les règles suivantes, quel que soit l'État membre sur le territoire duquel résident le titulaire de pensions ou de rentes ou les enfants:
a) au titulaire d'une pension ou d'une rente due au titre de la législation d'un seul État membre, conformément à la législation de l'État membre compétent pour la pension ou la rente;
b) au titulaire de pensions ou de rentes dues au titre des législations de plusieurs États membres:
i) conformément à la législation de celui de ces États sur le territoire duquel il réside, si le droit à l'une des prestations visées au paragraphe 1 y est ouvert en vertu de la législation de cet État, [...] ou
ii) dans les autres cas, conformément à celle des législations de ces États membres à laquelle l'intéressé a été soumis le plus longtemps, si le droit à l'une des prestations visées au paragraphe 1 est ouvert en vertu de ladite législation [...] ; si aucun droit n'est ouvert en vertu de cette législation, les conditions d'ouverture du droit sont examinées au regard des législations des autres États membres concernés dans l'ordre dégressif de la durée des périodes d'assurance ou de résidence
accomplies sous la législation de ces États membres.»
2) Le règlement (CEE) n° 574/72
16. L'article 10 ter de ce règlement dispose que:
«La date et les conditions auxquelles la législation d'un État membre cesse d'être applicable à une personne visée à l'article 13 paragraphe 2 point f) du règlement sont déterminées conformément aux dispositions de cette législation. L'institution désignée par l'autorité compétente de l'État membre, dont la législation devient applicable à cette personne, s'adresse à l'institution désignée par l'autorité compétente du premier État membre pour connaître cette date.»
B - Droit national
17. L'article 46 litigieux des lois coordonnées relatives à la réparation des maladies professionnelles est déjà énoncé au point 3.
IV - Les arguments des parties
1) La Commission
18. La Commission fait grief à l'État membre poursuivi de la perception de cotisations sociales sur les pensions de maladie professionnelle dont les bénéficiaires résident dans un autre État membre et qui perçoivent également une pension servie par ledit État. Ce prélèvement est contraire à l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement. Cette disposition est l'expression du principe posé à l'article 13, paragraphe 1, du règlement selon lequel les dispositions légales d'un seul État membre
doivent être appliquées. Cette disposition a été adoptée après que l'arrêt Ten Holder a été rendu pour désigner l'État compétent dans le cas où des personnes ont cessé toute activité professionnelle sous la législation d'un État membre et résident sur le territoire d'un autre État membre. Il en résulte selon la Commission que, dans le cas où la législation sur la sécurité sociale d'un État membre n'est plus applicable, la législation de l'État de résidence s'applique conformément à l'article 13,
paragraphe 2, sous f), du règlement.
19. La Commission se réfère aux arrêts Perenboom , Commission/Belgique et Kuusijärvi pour parvenir à la conclusion que les personnes qui n'exercent plus d'activité professionnelle en Belgique et ont transféré leur résidence dans un autre État membre sont uniquement soumises à la législation de ce dernier. Les autorités belges ne sont donc plus habilitées à prélever des cotisations sociales sur les pensions de maladie professionnelle des personnes se trouvant dans une telle situation.
20. À l'objection du royaume de Belgique, selon laquelle l'article 13, paragraphe 2, sous f), ne serait pas applicable à la situation décrite puisque le bénéficiaire d'une pension de maladie professionnelle continue d'être soumis au régime belge de sécurité sociale et cela tant en ce qui concerne les frais de maladie que les prestations familiales, la Commission réplique que, en vertu de l'article 27 du règlement, l'État de résidence est compétent pour les frais de maladie. Conformément à l'article
33 du règlement, seul l'État qui supporte les charges est habilité à prélever des cotisations . Conformément au chapitre 8 du règlement, l'État membre de résidence est également compétent pour les prestations familiales.
21. À la référence du royaume de Belgique à l'article 52 du règlement, selon lequel les personnes victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle bénéficient des prestations en nature servies, pour le compte de l'institution compétente, par l'institution du lieu de résidence et des prestations en espèces servies par l'institution compétente, la Commission oppose que cette règle ne concerne pas les frais de maladie classiques au sens du chapitre 1 du règlement, mais des prestations
spécifiques servies en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle. La Commission écarte finalement l'objection du royaume de Belgique selon laquelle les cotisations constituent la contrepartie de la couverture par le régime belge de sécurité sociale en indiquant que, conformément à l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement, c'est l'État de résidence, et non plus le royaume de Belgique, qui est compétent.
2) Le gouvernement belge
22. Le royaume de Belgique fait valoir en premier lieu que l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement n'est pas applicable aux cas décrits par la Commission. À titre subsidiaire, il fait valoir que, même dans le cas contraire, la perception des cotisations sociales litigieuses ne serait pas contraire à cette disposition.
23. Dans son argumentation, le royaume de Belgique part du principe que le principe de la «lex loci laboris» est ancré à l'article 13, paragraphe 2, sous a), du règlement et signifie que c'est en principe l'ordre juridique de l'État où est exercée l'activité professionnelle qui est applicable, même lorsque le travailleur réside dans un autre État membre. L'article 13, paragraphe 2, sous f), prévoit une exception de caractère subsidiaire à ce principe. Elle doit donc être interprétée restrictivement
et ce n'est que lorsque ses conditions sont remplies qu'un transfert de compétence de l'État où est exercée l'activité professionnelle à celui de l'État de résidence est possible. Une des conditions à cela est qu'une personne ne soit plus soumise aux dispositions d'un État membre sans que des dispositions légales d'un autre État membre soient pour autant applicables. La question est donc de savoir à quelles conditions des dispositions légales - en l'espèce les dispositions belges sur l'assurance
sociale - cessent d'être applicables à des bénéficiaires de pensions de maladie professionnelle résidant dans un autre État membre où ils perçoivent au demeurant une autre pension.
24. Le titre II du règlement ne substitue pas le droit communautaire aux ordres juridiques des différents États membres, mais comporte des règles qui, comme cela résulte de l'arrêt Kits van Heijningen , permettent de déterminer l'ordre juridique applicable pour éviter la compétence parallèle de plusieurs États membres et pour empêcher que les personnes relevant du champ d'application personnel du règlement ne perdent leur protection sociale faute d'un ordre juridique applicable.
25. En l'espèce, la législation belge sur la sécurité sociale demeure effectivement applicable. Cela se manifeste, d'une part, par l'octroi de prestations en vertu du régime belge des maladies professionnelles et, d'autre part, par des prestations d'autres branches de la sécurité sociale, par exemple des prestations familiales, la prise en charge des frais de maladie et la prise en compte de périodes pour le calcul de la pension de retraite dans tous les cas dans lesquels survient une incapacité
professionnelle de plus de 66 %. Ces personnes conservent le statut d'assurés sociaux.
26. En outre, la question de savoir si l'ordre juridique d'un État membre cesse d'être applicable dépend selon le royaume de Belgique des dispositions nationales conformément à l'article 10 ter du règlement n° 574/72. Le droit communautaire renvoie donc explicitement au droit national. Concernant la compétence d'un État membre pour déterminer les limites de l'applicabilité de son ordre juridique, le royaume de Belgique renvoie aux arrêts Coppola et Ten Holder .
27. En outre, il est selon lui incompatible avec le principe des droits acquis de ne plus appliquer les dispositions légales belges et de ne plus accorder par conséquent les prestations en cause. Le seul changement de son domicile ne saurait avoir pour conséquence de faire relever automatiquement une personne du régime d'assurance sociale de l'État de résidence.
28. La compatibilité du maintien de l'application des dispositions belges avec le droit communautaire est également confirmée par l'article 52 du règlement qui évoque l'«institution compétente» qui prend en charge à la fois les prestations en nature et les prestations en espèce d'une personne résidant dans un autre État membre. En pratique, le bénéficiaire d'une pension de maladie professionnelle résidant dans un autre État membre reçoit le formulaire E 123 du Fonds des maladies professionnelles
(FMP). Sur cette base, l'État de résidence lui accorde les prestations de maladie remboursées par le FMP.
29. En conclusion, il convient de partir du principe que l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement n'est pas applicable, que le droit belge demeure donc applicable et cela tant sur la base de la compétence transférée aux États membres qu'en raison du fait que les victimes de maladies professionnelles demeurent soumises à ce régime d'assurance sociale même lorsqu'elles résident dans un autre État membre, et qu'il n'en résulte finalement aucun conflit avec le droit communautaire.
30. Le royaume de Belgique fait donc valoir à titre purement subsidiaire que le prélèvement de cotisations est quoiqu'il en soit conforme au droit communautaire. Il est effectué de manière non discriminatoire, indépendamment du fait que le bénéficiaire réside sur le territoire belge ou dans un autre État membre. Les bénéficiaires conservent - en totalité ou partiellement - la qualité d'assurés sociaux selon que l'incapacité de travail correspond ou non à au moins 66 %. Le paiement de cotisations
constitue la contrepartie des prestations auxquelles les bénéficiaires peuvent prétendre.
31. Pour le cas où la Cour considérerait cependant que le recours est fondé, le royaume de Belgique indique que d'éventuels remboursements de cotisations ne devraient pas être exigés pour la période antérieure à l'entrée en vigueur du règlement n° 2195/91 , c'est-à-dire antérieure au 29 juillet 1991.
3) Le gouvernement néerlandais
32. Le royaume des Pays-Bas, qui est intervenu au soutien des conclusions du royaume de Belgique, défend la thèse selon laquelle les normes de conflits contenues dans le règlement, et en particulier à l'article 13, paragraphe 2, sous f), n'ont pas pour conséquence que celui qui cesse d'exercer une activité professionnelle dans un État membre n'est plus soumis à la législation sur l'assurance sociale de cet État lorsqu'il réside dans un autre État membre ou qu'il a transféré son domicile dans
celui-ci. L'article 13, paragraphe 2, sous f), ne s'oppose pas au maintien des dispositions légales de l'État où était exercée la dernière activité professionnelle dans la mesure où celles-ci le prévoient.
33. Pour justifier son intervention, le royaume des Pays-Bas invoque l'attitude de la Commission à l'égard du régime néerlandais d'assurance obligatoire. L'ordre juridique néerlandais prévoit une assurance obligatoire pour les personnes qui perçoivent une allocation de longue durée pour incapacité professionnelle, vieillesse ou décès, même lorsqu'elles résident en dehors des Pays-Bas. Cette couverture a pour conséquence la perception par les assurés de prestations de vieillesse, de décès et de
prestations familiales ainsi que la prise en charge de certains frais de maladie. Ces assurés doivent, tout comme ceux résidant aux Pays-Bas, verser des cotisations. La Commission a sollicité des informations sur l'échéance de l'assurance obligatoire pour les bénéficiaires de pensions résidant dans un autre État membre. Le royaume des Pays-Bas en a conclu qu'il était compétent pour maintenir le régime de l'assurance obligatoire des bénéficiaires de prestations de longue durée résidant dans un autre
État membre. Il considère cependant que la Commission a pu également modifier sa position sur les dispositions néerlandaises à la suite du recours formé dans la présente affaire.
34. Le royaume des Pays-Bas procède à une analyse de l'arrêt Kuusijärvi ainsi que de la genèse du règlement n° 2195/91 pour conforter sa position selon laquelle les dispositions légales d'un État membre ne cessent d'être applicables au sens de l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement que dans le cas où l'ordre juridique national le prévoit. La possibilité pour un État membre de maintenir l'applicabilité de ses dispositions légales - en faveur de laquelle plaide l'article 10 ter du règlement
n° 574/72 - a pour conséquence que les personnes concernées peuvent conserver leurs droits aux prestations ainsi que d'éviter de faire peser sur l'État de résidence des charges disproportionnées. Cela ne fait donc aucune différence substantielle que le maintien de l'applicabilité des dispositions nationales s'applique à toutes les branches de la sécurité sociale ou seulement à certaines d'entre elles. Enfin, l'article 17 du règlement a également été modifié, dans le cadre de l'adoption du règlement
n° 2195/91, en ce sens que des dispositions dérogatoires peuvent désormais être convenues pour des groupes de personnes qui ne cessent pas une activité professionnelle. Le royaume des Pays-Bas estime qu'il convient de comprendre les règles de conflits de loi du règlement de la manière suivante:
- Aussi longtemps qu'un travailleur exerce son activité sur le territoire d'un État membre, il ne peut lui être opposé une condition de résidence pour le rattachement au régime de sécurité sociale de cet État.
- À compter de la date à laquelle le travailleur met fin à son activité professionnelle sans en reprendre une autre dans un second État membre, les clauses de résidence sont licites.
- Si le premier État membre ne soumet pas l'affiliation à son régime de sécurité sociale à une condition de résidence, cet ordre juridique demeure applicable même si l'ancien salarié réside dans un autre État membre.
- Si, à une date postérieure, le travailleur ne remplit plus les conditions d'affiliation au régime du premier État membre, l'ordre juridique de l'État de résidence est alors applicable à compter de cette date.
- Dans l'intérêt des personnes concernées, l'État membre dans lequel a été exercée la dernière activité professionnelle et l'État de résidence peuvent convenir de dérogations.
35. Le royaume des Pays-Bas soumet les règles de conflit applicables aux prestations de maladie et aux prestations familiales à une analyse plus complète et parvient à la conclusion que - contrairement à ce que soutient la Commission - les dispositions de l'État membre ne doivent pas nécessairement s'appliquer mais uniquement lorsque cela découle des dispositions nationales applicables (voir articles 27, 28 et 77 du règlement. Cela dépend donc à chaque fois des circonstances du cas d'espèce.
36. L'applicabilité des dispositions légales de l'État membre dans lequel a été exercée la dernière activité professionnelle emporte la compétence pour la perception des cotisations sociales. Le royaume des Pays-Bas mentionne dans ce contexte les arrêts Perenboom , De Jaeck et Molenaar .
37. Le royaume des Pays-Bas prend également position sur un éventuel conflit entre les articles 33 et 52 du règlement. Au terme d'une analyse détaillée de ces dispositions et de leurs cas d'application, il parvient à la conclusion que le règlement ne prévoit pas la primauté d'une disposition sur l'autre.
38. Pour finir, le royaume des Pays-Bas prend position sur le problème des effets dans le temps d'un arrêt susceptible de constater un manquement. Il suggère à cet égard de limiter ses éventuels effets à la période postérieure au prononcé de l'arrêt.
39. Dans ses observations sur la demande en intervention du royaume des Pays-Bas, le royaume de Belgique s'est explicitement associé à cette demande de fixation d'un délai pour les effets de l'arrêt.
V - Appréciation
40. Dans son recours, la Commission part manifestement du principe - quelle qu'en soit la raison - que les dispositions légales belges ne s'appliquent plus au bénéficiaire d'une pension de maladie professionnelle à compter de la date à laquelle celui-ci transfère sa résidence dans un autre État membre après la cessation de son activité en Belgique. En cas de résidence dans un autre État membre durant la période d'activité, comme c'est le cas par exemple des travailleurs frontaliers, la seule
cessation de l'activité professionnelle entraînerait l'inapplicabilité des dispositions légales belges. Conformément à l'article 13, paragraphe 2, sous f), les dispositions légales de l'État de résidence seraient alors applicables. L'inapplicabilité des dispositions légales belges entraîne l'illicéité de la perception de cotisations sociales sur les pensions de maladie professionnelle servies par le royaume de Belgique.
41. Le royaume de Belgique part en revanche du principe que les dispositions légales belges demeurent applicables en premier lieu pour les pensions de maladie professionnelle ainsi que, le cas échéant, pour l'octroi d'autres prestations sociales telles que la prise en charge des frais de maladie ou le versement d'allocations familiales. La perception de cotisations sociales serait le corollaire du maintien de la qualité d'assuré social qui implique également la prise en compte de périodes de
cotisation pour l'assurance-retraite.
42. La question est donc de savoir si le transfert du domicile dans les circonstances décrites entraîne l'application du seul article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement qui prévoit l'application des dispositions de l'État de résidence ou s'il appartient à l'État membre dans lequel était exercée la dernière activité de déterminer si, et le cas échéant dans quelles conditions, ses dispositions légales continuent de s'appliquer.
43. La réponse à cette question dépend de l'interprétation donnée à l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement et en particulier à l'expression «la personne à laquelle la législation d'un État membre cesse d'être applicable». Selon l'interprétation de la Commission, cette disposition s'applique immédiatement en cas de disparition de compétence en vertu de l'article 13, paragraphe 2, sous a), c'est-à-dire de disparition du lien de rattachement que constitue l'activité professionnelle. Selon le
royaume de Belgique, il s'agit là d'une condition matérielle qui n'est pas remplie dans le seul contexte du règlement sans contrôle des dispositions nationales.
44. L'article 10 ter du règlement n° 574/72, qui se réfère explicitement à l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1408/71, est significatif à cet égard. Ces deux dispositions ont été intégrées postérieurement aux règlements n° s 1408/71 et 574/72 par le règlement n° 2195/91. Cet article 10 ter renvoie expressément aux dispositions légales des États membres déterminant «la date et les conditions auxquelles la législation d'un État membre cesse d'être applicable à une personne visée à
l'article 13 paragraphe 2 point f) du règlement». Conformément à cela, ce sont donc les dispositions nationales qui sont déterminantes pour apprécier si une personne continue ou non d'y être soumise. Sur ce point, l'argument avancé par le royaume de Belgique selon lequel les bénéficiaires de pensions de maladie professionnelle demeurent sous l'empire du régime belge de sécurité sociale indépendamment de leur résidence est tout à fait exact.
45. Le contexte et la genèse des dispositions montrent que l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement constitue une clause résiduelle au sens d'une attribution de compétence qui ne se manifeste que lorsqu'il est impossible de déduire d'un droit national ou du règlement une autre compétence. C'est seulement l'arrêt Ten Holder - auquel les considérants du règlement n° 2195/91 font explicitement référence et à la suite duquel les articles 13, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1408/71 et 10
bis du règlement n° 574/72 ont été adoptés - qui a mis en évidence une «lacune» dans le titre II du règlement, qui a été comblée par les dispositions mentionnées.
46. Dans le cas de l'article 13, paragraphe 2, sous f), il ne s'agit pas d'une attribution de compétence originaire, mais d'une «compétence de substitution» pour les cas dans lesquels aucune autre compétence n'est prévue au titre II du règlement et où un ordre juridique national, qui a été applicable auparavant conformément à ses propres règles, n'est plus applicable en raison d'une modification des circonstances induites par la personne concernée.
47. La Cour a jugé à cet égard dans son arrêt Kuusijärvi que:
«les dispositions du titre II du règlement n° 1408/71, dont fait partie l'article 13, constituent un système complet et uniforme de règles de conflits de loi. Ces dispositions ont pour but non seulement d'éviter l'application simultanée de plusieurs législations nationales et les complications qui peuvent en résulter, mais également d'empêcher que les personnes entrant dans le champ d'application du règlement n° 1408/71 soient privées de protection en matière de sécurité sociale, faute de
législation qui leur serait applicable» .
48. On peut donc partir du principe que, pour l'applicabilité de l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement, il y a lieu de poser la question préalable, à apprécier en vertu du droit national, de savoir si un ordre juridique qui a été applicable continue de l'être. Le critère «la personne à laquelle la législation d'un État membre cesse d'être applicable» constitue à cet égard une condition matérielle de l'application de la disposition.
49. Dans sa requête, la Commission s'est basée, la première fois dans la perspective de la procédure précontentieuse, sur les titulaires de pensions de maladie professionnelle qui «ne sont plus soumis au régime belge de sécurité sociale». Elle a contourné de manière abstraite la question préalable, qu'il convient d'apprécier en vertu du droit national, relative au maintien de l'application d'un ordre juridique qui a été appliqué auparavant. Dans son avis motivé, elle avait formulé le petitum de
telle manière qu'il concernait les bénéficiaires de pensions de maladie professionnelle qui ne perçoivent pas d'autres prestations sociales que les pensions en question.
50. La formulation de la requête laisse en suspens la question de savoir selon quels critères les personnes concernées ne relèvent plus du régime belge de sécurité sociale. Ce fait présumé, le champ d'application de l'article 13, paragraphe 2, sous f), - et donc l'applicabilité des dispositions de l'État de résidence - peut tout à fait être ouvert. Cependant, le royaume de Belgique a privé cette argumentation de fondement en indiquant que les titulaires de pensions de maladie professionnelle
relèvent toujours du régime belge de sécurité sociale.
51. Dans ce contexte, le point de départ choisi par la Commission dans la procédure précontentieuse et consistant à prendre en compte les personnes qui, en vertu des dispositions belges, ne perçoivent pas d'autres prestations que la pension de maladie professionnelle à accorder est pertinent.
52. L'argument invoqué par le royaume de Belgique, selon lequel l'affiliation au régime de sécurité sociale repose sur le seul octroi d'une pension de maladie professionnelle et selon lequel on ne peut considérer que les dispositions légales belges cessent d'être applicables que lorsque les versements de la pension ont été suspendus, est tout à fait contestable; il s'agit pourtant dans le cas de la rente de maladie professionnelle d'une prestation acquise par des versements de cotisations antérieurs
et pour laquelle les clauses de résidence ont été supprimées conformément à l'article 10 du règlement. Le transfert par le titulaire d'un droit à une rente pour maladie professionnelle de sa résidence dans un autre État membre n'autorise pas à lui seul l'État membre débiteur de la pension à suspendre le versement.
53. Comme le soutient lui-même le royaume de Belgique, cela serait contraire au principe des droits acquis. Une telle pratique serait également en contradiction avec les principes des dispositions communautaires de coordination dans le domaine de la sécurité sociale qui conformément à l'article 42 CE garantissent aux travailleurs migrants:
«a) la totalisation, pour l'ouverture et le maintien du droit aux prestations, ainsi que pour le calcul de celles-ci, de toutes périodes prises en considération par les différentes législations nationales;
b) le paiement des prestations aux personnes résidant sur les territoires des États membres» .
54. L'argument du royaume de Belgique selon lequel les cotisations constitueraient la contrepartie de la pension versée est aussi peu probant pour le maintien de l'application du droit belge. Les cotisations destinées à assurer les accidents du travail et les maladies professionnelles sont généralement acquittées durant la période d'activité, que ce soit par le seul employeur ou par l'employeur et le salarié. Lors de la survenance d'un cas d'assurance, c'est en revanche la solidarité de la
communauté des assurés qui joue.
55. Le royaume de Belgique a cependant fait référence à d'autres prestations sociales accordées aux titulaires d'une pension de maladie professionnelle. À cet égard, il a explicitement mentionné les frais de maladie ainsi que les prestations familiales. Il a en outre indiqué que la qualité d'assuré social perdure en soi avec pour conséquence la possibilité de valider dans le cadre du régime de pension de retraite les périodes de versement de pensions de maladie professionnelle. C'est avant tout ce
dernier aspect qui constitue, tout comme le droit aux prestations de maladie, une caractéristique de l'affiliation à un régime de sécurité sociale. Le royaume de Belgique a certes mentionné une différenciation quant au niveau de protection sociale selon que le taux d'incapacité professionnelle du bénéficiaire d'une pension pour maladie professionnelle se situe en deçà ou au-delà de 66 %. On ne saurait cependant déduire avec certitude des indications fournies par le royaume de Belgique si, et de
quelle manière, les bénéficiaires de pensions de maladie professionnelle dont le taux d'incapacité professionnelle se situe en dessous de 66 % sont affiliés au régime belge de sécurité sociale.
56. La Commission, pour sa part, n'a pas établi dans quelles conditions les dispositions légales belges cessent de s'appliquer au bénéficiaire d'une pension pour maladie professionnelle qui réside dans un autre État membre. Elle n'a pas essayé en particulier de réfuter l'affirmation du royaume de Belgique selon laquelle l'ensemble des dispositions légales sur la sécurité sociale continueraient de s'appliquer à ces personnes.
57. En partant du principe que les conditions dans lesquelles une personne n'est plus soumise aux dispositions légales d'un État membre constituent une condition matérielle de l'application de l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement, les moyens du recours présentés par la Commission ne sont pas probants ou réfutés par les moyens de défense que le royaume de Belgique leur oppose.
58. La supposition de la Commission que, en cas de transfert de la résidence d'une personne entrant dans le champ d'application personnel du règlement dans un autre État membre, les dispositions légales de l'État de résidence sont applicables en vertu du droit communautaire sous la forme de l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement ne semble en outre découler obligatoirement ni de l'article 13, paragraphe 2, sous f), ni de la jurisprudence de la Cour de justice. Il est notable que les
parties au litige invoquent les mêmes arrêts au soutien d'arguments différents. L'article 13, paragraphe 2, sous f), indique cependant explicitement que «la personne [...] est soumise à la législation de l'État membre sur le territoire duquel elle réside, conformément aux dispositions de cette seule législation» , c'est-à-dire en fonction des dispositions de l'État de résidence.
59. Cette formulation renvoie donc aux dispositions de l'État de résidence compétent conformément à l'article 13, paragraphe 2, sous f), quand les conditions de cette disposition sont en outre satisfaites. Ce renvoi ne permet cependant pas encore de répondre à la question de savoir pour quelles branches de la sécurité sociale une compétence est attribuée. Cela dépend plutôt des modalités des dispositions légales des États membres. Il y a donc lieu d'approuver sur ce point l'argument présenté par le
royaume de Belgique selon lequel le simple transfert de résidence ne saurait impliquer l'affiliation à un régime de sécurité sociale. Les efforts du législateur communautaire lors de l'adoption du règlement n° 2195/91 pour éviter de faire peser des charges disproportionnées sur l'État de résidence qui devient compétent en vertu de l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement, évoqués par le royaume des Pays-Bas, vont également dans ce sens.
60. Il reste désormais à vérifier dans quelle mesure les dispositions pertinentes du titre III du règlement - qui énumère les «dispositions particulières aux différentes catégories de prestations» - concordent avec l'interprétation de l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement ébauchée dans les développements précédents ou si l'on peut en déduire que les dispositions légales belges cessent de s'appliquer.
61. L'article 27 du règlement, qui figure à la section V «Titulaires de pensions ou de rentes et membres de leur famille» du chapitre 1 «Maladie et maternité» règle la compétence en matière «prestations de maladie et de maternité» pour les retraités qui ont droit à une pension en vertu des dispositions légales d'au moins deux États membres. Lorsqu'une personne possède un droit à une pension en vertu des dispositions de l'État membre sur le territoire duquel elle réside, et possède en même temps,
conformément aux dispositions de celui-ci, un droit aux prestations du type de celles mentionnées, elle perçoit alors selon ces dispositions des prestations servies par l'organisme de l'État de résidence et à la charge de celui-ci. Si elle n'a aucun droit à ces prestations dans l'État de résidence, l'article 28 du règlement trouve alors application. Le cas spécifique d'un droit aux prestations en nature sans posséder de droit à une pension dans l'État de résidence est réglé par l'article 28 bis du
règlement. Dans ces cas, ce sont les dispositions nationales en vertu desquelles un droit aux prestations existe en principe qui sont déterminantes. Ce n'est qu'à partir de là qu'intervient la répartition des charges prévue par le droit communautaire en vertu des articles 27, 28 et 28 bis du règlement.
62. Ces dispositions ne s'opposent nullement à la possibilité de continuer à appliquer les dispositions sociales d'un État membre accordant une pension. Au contraire, l'organisme de l'État qui sert la rente est et demeure potentiellement tenu de verser les prestations. C'est la raison pour laquelle l'article 28 mentionne à plusieurs endroits «l'institution compétente» et que l'article 28 bis cite «l'institution de l'un des États membres compétents en matière de pensions».
63. La règle de l'article 33 du règlement n'est qu'une conséquence de la répartition des charges qui précède. La disposition règle le droit de percevoir ou de retenir des cotisations pour financer les prestations de maladie. En vertu de celle-ci, l'«institution compétente» est habilitée - en quelque sorte en contrepartie de son obligation de verser les prestations qui va au-delà de celle d'accorder une pension d'incapacité professionnelle - à retenir des cotisations dans la mesure où les
dispositions qui lui sont applicables le lui permettent. Le royaume de Belgique n'invoque donc pas par hasard l'article 33 pour justifier le prélèvement de contributions sociales sur les pensions de maladie professionnelle versées à des retraités résidant dans un autre État membre. Il n'omet pas à cette occasion d'indiquer que dans ces cas c'est en principe l'institution belge qui prend à sa charge les prestations de maladie. Le prélèvement des cotisations est quoi qu'il en soit conforme à l'article
33, paragraphe 1. L'article 33, paragraphe 2, du règlement ne s'y oppose pas non plus. Cette disposition concerne les cas spécifiques, réglementés à l'article 28 bis du règlement, dans lesquels un droit à des prestations en nature existe dans l'État de résidence sans que celui-ci soit débiteur d'une pension. Ce n'est que dans le cas où le bénéficiaire est assujetti, dans les circonstances décrites, à des cotisations ou des déductions de même valeur, que ces cotisations ne seront pas exigibles au
profit de l'État accordant la pension conformément à l'article 33, paragraphe 2. Sans intervenir dans la naissance de l'obligation de cotiser elle-même, le législateur communautaire prévoit cependant en définitive que le droit au prélèvement des cotisations est lié à l'obligation de verser les prestations. La Cour de justice a en outre confirmé cette appréciation dans son arrêt Noij .
64. L'article 52 du règlement comporte en revanche une règle spéciale pour les bénéficiaires de prestations d'accidents du travail ou de maladie professionnelle. Ces personnes reçoivent, conformément à l'article 52, sous a), des prestations en nature dans l'État dans lequel elles résident mais «pour le compte de l'institution compétente». L'institution de l'État de résidence peut même éventuellement accorder des prestations en espèce conformément à l'article 52, sous b), du règlement mais également
pour le compte de l'institution compétente. Le chapitre 4 «Accidents du travail et maladies professionnelles» ne comporte certes aucune règle autonome sur l'obligation de cotiser, mais cela est conforme aux principes généraux selon lesquels l'obligation de cotiser pour l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles existe généralement avant la survenance de l'événement assuré.
65. Quoi qu'il en soit, l'article 52, sous b), du règlement ne s'oppose pas à la supposition que l'institution belge est également en principe, en tant que débiteur d'une pension, l'«institution compétente» tenue en définitive de prendre en charge le versement des prestations. Il n'apparaît donc aucun conflit entre les dispositions du chapitre 1 «Maladie et maternité» et celles du chapitre 4.
66. Le royaume de Belgique renvoie enfin à l'article 77 du règlement pour justifier sa compétence pour les prestations familiales versées aux bénéficiaires de pensions de maladie professionnelle en conformité avec le droit communautaire. Dans la mesure où le royaume de Belgique est le seul État membre à accorder une pension, cette compétence découle de l'article 77, paragraphe 2, sous a), du règlement. En revanche, la Commission part également des cas dans lesquels l'État de résidence est aussi
débiteur d'une pension, et donc d'un cas d'application de l'article 77, paragraphe 2, sous b), du règlement. En vertu de celui-ci, il existe un droit aux prestations familiales conformément au point i) de l'article précité dans l'État de résidence lorsque les dispositions légales de cet État prévoient un droit aux prestations. Là encore c'est le droit national qui est déterminant. Si le droit de l'État de résidence ne prévoit pas un tel droit, l'article 77, paragraphe 2, sous b), point ii),
s'applique. Cette disposition comporte une compétence subsidiaire attribuée aux États membres qui accordent une pension et cela en fonction de la durée d'application des ordres juridiques au bénéficiaire ou des conditions d'application des normes fondant le droit de chaque État membre.
67. Même en application de cette disposition, le royaume de Belgique demeure donc en tout cas en principe compétent à titre subsidiaire pour l'octroi des prestations familiales. Cette disposition est donc apte à corroborer l'argumentation du royaume de Belgique.
68. Il y a finalement lieu de mentionner l'article 17 du règlement modifié dans le cadre de l'adoption du règlement n° 2195/91 modifiant le règlement n° 1408/71. La disposition a toujours autorisé à prévoir des exceptions aux dispositions des articles 13 à 16 du règlement au profit des travailleurs . Cette possibilité a été étendue à «certaines catégories de personnes ou [...] certaines personnes». L'article 17 est donc l'expression d'une relative flexibilité pour réagir de manière appropriée, en
cas de besoin, à certaines situations. La règle dérogatoire s'applique donc également à l'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement, mais ne le remet pas ainsi en question. La disposition est donc bien indifférente au regard de la détermination du domaine d'application de l'article 13, paragraphe 2, sous f).
69. En conclusion, il convient de retenir que la Commission a omis d'exposer à quel moment et dans quelles conditions les dispositions légales belges cessent d'être applicables à des personnes qui bénéficient de pensions de maladie professionnelle en application du droit belge. Il s'agit là d'une condition indispensable à l'application de l'article 13, paragraphe 3, sous f), du règlement et la Commission fait grief au royaume de Belgique de l'avoir méconnue. Le recours ne serait fondé que si les
bénéficiaires d'une pension d'invalidité professionnelle de droit belge ne possédaient aucun droit à une autre prestation du régime belge de sécurité sociale et n'avaient plus au demeurant le statut d'assuré social au regard du droit belge, avec pour conséquence que les périodes d'octroi de pensions de maladie professionnelle ne seraient pas prises en compte dans le cadre du régime belge de sécurité sociale. Ce n'est que dans ces conditions qu'il conviendrait de partir du principe que les
dispositions légales belges cesseraient d'être applicables aux bénéficiaires d'une pension d'incapacité professionnelle. Pour des raisons de sécurité juridique, il appartient à l'État membre de déterminer le moment à partir duquel ses dispositions légales correspondantes cessent de s'appliquer aux personnes en question ainsi que les conditions pour cela conformément à l'article 10 ter du règlement n° 574/72. La Commission n'a pas indiqué que les autorités belges avaient prélevé des cotisations
postérieurement à la date ainsi fixée. Il y a donc lieu de rejeter le recours.
VI - Dépens
70. En vertu de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, elle doit supporter les dépens. Conformément à l'article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Le royaume des Pays-Bas supporte donc ses propres dépens.
VII - Conclusion
71. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons la décision suivante:
«1) Le recours est rejeté.
2) La Commission supporte ses propres dépens ainsi que ceux du royaume de Belgique.
3) Le royaume des Pays-Bas supporte ses propres dépens.»