ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)
17 novembre 1998 ( *1 )
«Fonctionnaires - Retrait d'emploi - Article 50 du statut»
Dans l'affaire T-131/97,
Carmen Gómez de Enterria y Sanchez, ancien fonctionnaire du Parlement européen, représentée par Me Éric Boigelot, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Mc Louis Schütz, 2, rue du Fort Rheinsheim,
partie requérante,
contre
Parlement européen, représenté par M. Manfred Peter, chef de division au service juridique, en qualité d'agent, assisté de Mc Denis Waelbroek, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande d'annulation de la décision adoptée par le Parlement européen lors de sa réunion des 15 et 16 juillet 1996, sur le fondement de l'article 50 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, portant retrait de l'emploi de la requérante et rejet de ses candidatures à deux autres emplois du même grade,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),
composé de MM. B. Vesterdorf, président, R. M. Moura Ramos et P. Mengozzi, juges
greffier: M. A. Mair, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 8 juillet 1998,
rend le présent
Arrêt
Cadre juridique du litige
1 Aux termes de l'article 5, paragraphe 1, premier alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut»), les emplois relevant dudit statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquels ils correspondent, en quatre catégories, désignées dans l'ordre hiérarchique décroissant par les lettres A, B, C et D. La catégorie A comporte, selon l'article 5, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut, huit grades. Au grade A 1 correspond normalement un emploi
de directeur général et au grade A 2 correspond un emploi de directeur (voir l'annexe I dudit statut).
2 L'article 29, paragraphe 1, du statut prévoit que, normalement, les fonctionnaires sont recrutés sur concours. Néanmoins, le paragraphe 2 du même article établit une règle différente pour les grades A 1 et A 2, en précisant:
«Une procédure de recrutement autre que celle du concours peut être adoptée par l'autorité investie du pouvoir de nomination pour le recrutement des fonctionnaires des grades A 1 et A 2, ainsi que, dans des cas exceptionnels, pour des emplois nécessitant des qualifications spéciales.»
3 Les trois premiers alinéas de l'article 50 du statut, concernant le retrait d'emploi dans l'intérêt du service, disposent ce qui suit:
«Tout fonctionnaire titulaire d'un emploi des grades A 1 et A 2 peut se voir retirer cet emploi dans l'intérêt du service par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination.
Ce retrait d'emploi n'a pas le caractère d'une mesure disciplinaire.
Le fonctionnaire ainsi privé de son emploi et qui n'est pas affecté à un autre emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à son grade, bénéficie d'une indemnité calculée dans les conditions fixées à l'annexe IV.»
Faits à l'origine du litige
4 Le 7 juillet 1987, la requérante a été nommée directeur général de la direction générale de la traduction et des services généraux (DG 7) du Parlement européen, poste de grade A 1, sur la base de l'article 29, paragraphe 2, du statut.
5 Lors de sa réunion du 30 novembre 1994, le bureau du Parlement (ci-après «bureau»), en tant qu'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN»), a décidé, dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne et de la réorganisation des services du secrétariat général, d'appliquer l'article 50 du statut à quatre fonctionnaires proposés par le secrétaire général, dont la requérante. Cette décision, communiquée à la requérante par lettre du président du Parlement du 30 novembre
1994, a été confirmée par lettre de ce dernier du 19 décembre 1994, qui en fixait la prise d'effet au 31 mars 1995.
6 Le 2 février 1995, le bureau a décidé de ne pas retenir la candidature de la requérante au poste de directeur général de la direction générale du greffe (DG 1) du Parlement.
7 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 mars 1995, la requérante a introduit un recours en annulation de la décision de retrait de son emploi.
8 Par son arrêt du 14 mai 1996, Gómez de Enterria y Sanchez/Parlement (T-82/95, RecFP p. II-599, ci-après «arrêt du 14 mai 1996»), le Tribunal a annulé la décision portant retrait de l'emploi de la requérante, au motif que l'intéressée n'avait pas eu l'occasion de faire valoir utilement ses intérêts.
9 Entre-temps, en septembre 1995, M. Barrington Wilson, directeur de la traduction au sein de la DG 7, a été nommé directeur général de la traduction et des services généraux, à la place de la requérante.
10 Par lettre du 23 mai 1996, le président du Parlement a informé la requérante que, lors de sa réunion du 20 mai 1996, le bureau avait examiné les conséquences à tirer de l'arrêt du 14 mai 1996 et qu'il avait décidé de reprendre la procédure visant à lui appliquer une mesure de retrait d'emploi, de manière à lui donner l'occasion de faire utilement valoir ses intérêts. Dans sa lettre, le président du Parlement a également précisé à la requérante que, avant d'arrêter une décision définitive, il
serait tenu compte, comme le prévoit l'article 50, paragraphe 3, du statut, de la possibilité de l'affecter à un autre emploi correspondant à son grade. A cet effet, le président du Parlement a invité la requérante, d'une part, à prendre contact dans les meilleurs délais avec le secrétaire général, en soulignant qu'elle pourrait, à cette occasion, faire valoir ses intérêts, et, d'autre part, à lui faire part de ses observations éventuelles avant le 10 juin 1996, afin qu'il puisse les transmettre
au bureau.
11 Le 25 juin 1996, la requérante a eu un entretien avec le secrétaire général. Cet entretien a porté sur les motifs qui avaient conduit le bureau à envisager l'adoption d'une mesure de retrait de l'emploi de la requérante ainsi que sur l'examen des possibilités d'affectation de celle-ci à un autre emploi correspondant à son grade (en l'occurrence le poste, de grade A 1, de conseiller spécial à l'Épicentre à Bruxelles, en voie de création).
12 Le 4 juillet 1996, la requérante a adressé une lettre d'observations au président du Parlement, dans laquelle elle exposait qu'elle était disposée à accepter une affectation au poste de conseiller spécial à l'Épicentre à Bruxelles.
13 Par lettre du 11 juillet 1996 la requérante a communiqué au secrétaire général ses observations sur le procès-verbal de leur entretien du 25 juin 1996. Cette lettre a été annexée au procès-verbal de cet entretien pour en faire partie intégrante.
14 Lors de sa réunion des 15 et 16 juillet 1996, le bureau a examiné la question de l'application de l'article 50 du statut à la requérante. Il a, ainsi, pris acte d'une note confidentielle du secrétaire général du 9 juillet 1996 dans laquelle celui-ci retraçait l'historique de l'affaire et a également entendu un exposé de ce dernier, reprenant les points essentiels de sa note précitée et faisant état du contenu de son entretien avec la requérante du 25 juin 1996. Le procès-verbal de cet entretien
ainsi que les observations de la requérante sur ce procès-verbal étaient annexés à la note du secrétaire général du 9 juillet 1996, laquelle comportait également en annexe les observations de la requérante du 4 juillet 1996.
15 A l'issue d'un débat au cours duquel a été soulignée l'intention de procéder à une restructuration de l'ensemble du secrétariat général et, en particulier, des services de traduction, le bureau a adopté une décision (ci-après «décision attaquée») dans laquelle il exprime sa volonté de:
«a) confirmer sa décision du 30 novembre 1994, pour les raisons susmentionnées;
b) ne pas retenir, conformément à sa décision du 2 février 1995, la candidature de Mme Gómez de Enterria au poste de directeur général à la DG 1, qui a été pourvu par le choix du candidat le plus approprié compte tenu du rôle accru de cette direction générale;
c) ne pas donner suite à la demande de Mme Gómez de Enterria d'être nommée au poste de conseiller spécial (grade A 1) à l'Épicentre à Bruxelles, compte tenu du profil professionnel hautement spécialisé que ces fonctions comportent et vu également que ce poste se trouve actuellement bloqué par une précédente décision de l'autorité politique et budgétaire;
d) appliquer en conséquence à Mme Gómez de Enterria la mesure de retrait d'emploi envisagée».
16 Lors de sa réunion du 16 septembre 1996, le bureau a approuvé le procès-verbal de sa réunion des 15 et 16 juillet 1996.
17 Le 9 octobre 1996, le président du Parlement a adressé à la requérante une lettre rédigée dans les termes suivants:
«Me référant à ma lettre du 23 mai 1996 ainsi qu'à l'entretien que vous avez eu avec Monsieur le secrétaire général le 25 juin 1996, j'ai l'honneur de vous communiquer que le bureau du Parlement européen a procédé à un examen approfondi de votre situation et de vos observations, lors de sa réunion des 15 et 16 juillet, et a pris les décisions suivantes:
— de confirmer sa décision du 30 novembre 1994 visant l'application de l'article 50 à votre égard;
— de ne pas retenir, conformément à sa décision du 2 février 1995, votre candidature au poste de directeur général à la DG 1;
— de ne pas donner suite à votre demande d'être nommée au poste de conseiller spécial (grade A 1) à l'Épicentre à Bruxelles;
— d'appliquer en conséquence la mesure de retrait d'emploi à votre égard.
En ce qui concerne votre situation sur le plan administratif et financier, le secrétaire général vous contactera très prochainement.
Pour les détails ainsi que pour la motivation des décisions précitées, je me permets de vous joindre le texte intégral du procès-verbal du bureau. Il vous est fait remarquer que, s'agissant d'une réunion à huis clos, vous devriez réserver à cette pièce un traitement confidentiel.»
18 Lors de sa réunion du 9 octobre 1996, le bureau a décidé que l'application de l'article 50 du statut à la requérante prendrait effet le 1er novembre 1996.
19 Par lettre du 14 octobre 1996, le secrétaire général a procédé à la régularisation de la situation administrative de la requérante en exécution de l'arrêt du 14 mai 1996.
20 Le 29 novembre 1996, la requérante a, sur le fondement de l'article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation contre la décision attaquée. Ladite réclamation a été rejetée par décision du président du Parlement du 19 mars 1997.
Procédure
21 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 avril 1997, la requérante a introduit le présent recours.
22 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans ordonner de mesures d'instruction préalables. Néanmoins, dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, il a invité les parties à répondre à certaines questions. Les parties ont déféré à cette invitation dans le délai qui leur était imparti.
23 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal à l'audience du 8 juillet 1998, au cours de laquelle la requérante a renoncé à certaines des conclusions de son recours.
Conclusions des parties
24 La partie requérante conclut, en substance, à ce qu'il plaise au Tribunal:
— annuler la décision, adoptée par le Parlement lors de sa réunion des 15 et 16 juillet 1996 sur le fondement de l'article 50 du statut, portant retrait de son emploi et rejet de ses candidatures à deux autres emplois du même grade;
— condamner la partie défenderesse aux dépens.
25 La partie défenderesse conclut, en substance, à ce qu'il plaise au Tribunal:
— rejeter le recours comme irrecevable en tant qu'il vise à l'annulation de la partie du dispositif de la décision attaquée qui confirme que la candidature de la requérante au poste de directeur général de la DG 1 n'a pas été retenue;
— rejeter le recours pour le surplus;
— statuer comme de droit sur les dépens.
Sur la recevabilité
Arguments des parties
26 La partie défenderesse estime que le recours doit être déclaré irrecevable en tant qu'il vise à l'annulation de la partie du dispositif de la décision attaquée qui confirme que la candidature de la requérante au poste de directeur général de la DG 1 n'a pas été retenue. Sur ce point spécifique, la décision attaquée ne serait, en effet, que purement confirmative d'une précédente décision du Parlement du 2 février 1995, communiquée à la requérante le 30 mars 1995 et qui n'a jamais été contestée par
cette dernière.
27 La requérante souligne, au préalable, que la décision du 2 février 1995 ne lui a pas été communiquée le 30 mars 1995, mais qu'elle en a appris l'existence seulement grâce à une note postérieure, émanant d'un chef de division du Parlement. Elle ajoute que, à la date d'adoption de la décision attaquée, le poste de directeur général de la DG 1 n'était plus vacant depuis le mois de février 1995. Cela démontrerait que la procédure ayant abouti à ladite décision ne présente aucune autonomie au regard
de la décision antérieurement annulée par l'arrêt du 14 mai 1996 et expliquerait son intérêt à maintenir ses conclusions sur ce point.
Appréciation du Tribunal
28 L'argumentation du Parlement est fondée. En effet, il est constant entre les parties que le 2 février 1995 le bureau a décidé de ne pas retenir la candidature de la requérante au poste de directeur général de la DG 1, et que cette décision, dont l'existence était connue de la requérante, n'a jamais fait l'objet ni d'une réclamation ni d'un recours en annulation. Il est également constant que la requérante n'a pas présenté de nouvelle candidature au cours de la deuxième procédure de retrait
d'emploi, se contentant de faire part, dans ses observations du 4 juillet 1996, de sa disponibilité pour une affectation au poste de conseiller spécial à 1'Epicentre à Bruxelles. En outre, la requérante elle-même rappelle dans sa requête que le poste de directeur général de la DG 1 n'était plus vacant depuis le mois de février 1995, ce qui aurait rendu sans objet une candidature éventuelle de sa part. Dans ces conditions, la partie du dispositif de la décision attaquée concernant le rejet de la
candidature de la requérante au poste de directeur général de la DG 1 n'est que purement confirmative de la précédente décision du 2 février 1995. Elle n'est donc pas susceptible de faire l'objet d'un recours en annulation.
29 II s'ensuit que le présent recours est irrecevable en tant qu'il vise à l'annulation de la partie du dispositif de la décision attaquée qui confirme que la candidature de la requérante au poste de directeur général de la DG 1 n'a pas été retenue.
Sur le fond
30 La requérante soulève six moyens tirés, respectivement, d'une violation de l'article 176, premier alinéa, du traité CE, d'une violation de ses droits de la défense, d'un défaut de motivation, d'une méconnaissance de l'intérêt du service, d'un détournement de pouvoir et du non-respect d'un délai raisonnable.
Sur le premier moyen, tiré d'une violation de l'article 170, premier alinéa, du traité
Arguments des parties
31 La requérante affirme que, en adoptant la décision attaquée, le Parlement a violé l'article 176, premier alinéa, du traité, aux termes duquel l'institution dont émane l'acte annulé est tenue de prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt d'annulation. En l'espèce, c'est l'arrêt du 14 mai 1996 - par lequel le Tribunal a annulé la première décision de retrait d'emploi prise à son égard, intervenue le 30 novembre 1994 - qui n'aurait pas été correctement exécuté par la partie
défenderesse, en ce sens que:
— la requérante n'aurait pas été réintégrée dans ses fonctions de directeur général;
— la décision attaquée se limiterait à confirmer, en s'y référant explicitement, la décision annulée par l'arrêt du 14 mai 1996.
32 En ce qui concerne sa non-réintégration, la requérante expose que la décision portant retrait de son emploi, qui a été annulée par l'arrêt du 14 mai 1996, est censée n'avoir jamais existé, de sorte qu'elle devrait être considérée comme étant, depuis l'origine et sans discontinuité, directeur général. Par conséquent, l'article 176 du traité aurait imposé au Parlement, après l'arrêt du 14 mai 1996, de replacer la requérante dans la situation qui était la sienne au moment où la décision annulée a
été prise. A cet égard, le Parlement ne pouvait se limiter au seul règlement des droits pécuniaires pour la période concernée par l'arrêt d'annulation, car le but de celui-ci ne serait pas de compenser pécuniairement l'illégalité de la décision annulée par l'offre d'une indemnisation. Elle souligne également que la partie défenderesse ne saurait faire valoir que la nomination d'un nouveau directeur général à son ancien poste s'oppose à sa réintégration dans ses fonctions, dans la mesure où c'est
le Parlement lui-même qui a définitivement nommé un tiers au poste litigieux alors que la première décision de retrait d'emploi était attaquée devant le Tribunal.
33 En ce qui concerne le fait que la décision attaquée se limiterait à confirmer, en s'y référant explicitement, la décision annulée par l'arrêt du 14 mai 1996, la requérante souligne qu'il s'agit d'une violation flagrante de l'article 176 du traité, puisque le Parlement démontrerait sa volonté de reproduire un acte désormais dépourvu d'effet. Le fait que le Tribunal ait annulé la décision de retrait d'emploi du 30 novembre 1994 en raison d'une irrégularité dans la procédure suivie ne modifierait en
rien la situation, car les effets d'une annulation seraient exactement les mêmes, que celle-ci soit motivée par une question de forme ou un problème de fond. En tout état de cause, le Tribunal a estimé que le Parlement n'avait pas respecté les droits de la défense, ce qui vicierait l'acte annulé de façon fondamentale et interne, et non uniquement - comme la partie défenderesse le prétend - sur un plan strictement formel et externe, raison pour laquelle il ne serait, en aucune manière, possible de
le confirmer en reprenant son contenu.
34 La partie défenderesse estime avoir adopté toutes les mesures nécessaires pour donner pleine exécution à l'arrêt du 14 mai 1996.
35 En premier lieu, la partie défenderesse souligne que, l'exécution d'un arrêt d'annulation relevant de la compétence et du pouvoir d'appréciation de l'institution dont émane l'acte annulé, aucune obligation de réintégration de la requérante ne pesait sur elle. A cet égard, la solution consistant à régulariser rétroactivement la situation administrative et budgétaire de la requérante, pour la période s'étendant entre la date à laquelle son emploi lui a été retiré, en application de la décision du
30 novembre 1994, et celle de la cessation définitive de ses fonctions, faisant suite à la décision attaquée, permettait un juste équilibre entre les différents intérêts en présence, à savoir ceux de l'intéressée elle-même, ceux du service et ceux du nouveau directeur général nommé à son ancien poste en septembre 1995.
36 En second lieu, le Parlement ne se serait pas contenté de reproduire la décision annulée, mais aurait respecté l'arrêt du 14 mai 1996 en veillant à ce que les droits de la défense de la requérante soient pleinement sauvegardés, comme les différentes étapes de la procédure suivie en vue de l'adoption de la décision attaquée le démontreraient.
Appréciation du Tribunal
37 II convient d'examiner séparément les deux griefs invoqués par la requérante dans le cadre du présent moyen, le premier tiré de ce qu'elle n'aurait pas été réintégrée dans ses fonctions de directeur général, le second tiré de ce que la décision attaquée se limiterait à confirmer, en s'y référant explicitement, la décision annulée par l'arrêt du 14 mai 1996.
38 II convient de relever, en premier lieu, que l'article 176 du traité prévoit «une répartition de compétences entre l'autorité judiciaire et l'autorité administrative, selon laquelle il appartient à l'institution dont émane l'acte annulé de déterminer quelles sont les mesures requises pour exécuter un arrêt d'annulation» (arrêt du Tribunal du 8 octobre 1992, Meskens/Parlement, T-84/91, Rec. p. II-2335, point 73). Pour se conformer à l'arrêt et pour lui donner pleine exécution, l'institution est
tenue de respecter non seulement le dispositif de l'arrêt, mais également les motifs qui ont conduit à celui-ci et qui en constituent le soutien nécessaire (arrêt du Tribunal du 2 février 1995, Frederiksen/Parlement,T-106/92, RecFP p. II-99, point 31). Dans ce cadre, même si la réintégration d'un fonctionnaire ne peut pas être exclue a priori du nombre des mesures visant à la pleine exécution d'un arrêt annulant une décision de retrait de son emploi, le Tribunal estime que, en l'espèce, la
réintégration de la requérante dans son emploi n'était pas la seule mesure possible pour assurer la pleine exécution de l'arrêt du 14 mai 1996. En effet, une solution consistant à obliger l'institution à réintégrer l'intéressée dans ses fonctions, lorsqu'est annulé une décision portant retrait d'un emploi, serait excessive dès lors que l'annulation de la décision portant retrait de l'emploi de la requérante est venue sanctionner une violation de son droit de faire valoir ses intérêts et que
l'adoption de la décision attaquée est intervenue au terme d'une procédure précisément engagée pour y remédier. Dans ce contexte, la solution choisie par la partie défenderesse, et consistant à régulariser rétroactivement la situation administrative et budgétaire de la requérante, permet de concilier tant les intérêts de celle-ci que ceux du service et du nouveau directeur général nommé à son ancien poste en septembre 1995, et correspond aux exigences de la bonne administration.
39 Le Tribunal estime, en second lieu, qu'on ne saurait considérer que la décision attaquée est illégale du simple fait qu'elle se réfère explicitement à la décision annulée par l'arrêt du 14 mai 1996. En effet, la décision attaquée ne se limite pas à reproduire la précédente décision de retrait d'emploi, car son dispositif, ainsi que la procédure qui a conduit à son adoption, sont différents. D'une part, la décision attaquée précise clairement la volonté actuelle du Parlement d'appliquer à l'égard
de la requérante «la mesure de retrait d'emploi envisagée», ainsi que le refus d'affecter la requérante aux postes de directeur général de la DG 1 et de conseiller spécial à 1'Epicentre à Bruxelles. D'autre part, les étapes de la procédure suivie en vue de l'adoption de la décision attaquée démontrent que le Parlement a voulu offrir à la requérante la possibilité de faire valoir ses intérêts avant que la décision définitive la concernant ne soit adoptée. Dans ces conditions, le fait que la
décision attaquée contienne une référence explicite à la décision annulée par l'arrêt du 14 mai 1996 ne saurait s'interpréter comme un indice de la volonté du Parlement de violer l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt susmentionné, pour ne constituer, plus simplement, que l'indication de l'existence d'un lien historique avec la première procédure de retrait d'emploi, indication qui n'est pas contraire à l'article 176, premier alinéa, du traité.
40 II s'ensuit que le premier moyen doit être rejeté.
Sur le deuxième moyen, tiré d'une violation des droits de la défense
Arguments des parties
41 La requérante soutient qu'elle n'a pas eu l'occasion de défendre utilement ses intérêts, au motif que sa lettre du 4 juillet 1996, adressée au président du Parlement et contenant ses observations sur la proposition de retrait de son emploi, n'a pas été portée à la connaissance des membres du bureau avant qu'ils ne prennent la décision litigieuse. Selon la requérante, le fait que sa lettre d'observations ait été annexée à la note confidentielle du secrétaire général du Parlement du 9 juillet 1996,
adressée au bureau et mentionnée dans le procès-verbal de sa réunion des 15 et 16 juillet 1996, n'apporterait pas la preuve que les membres du bureau en ont eu connaissance. En effet, le bureau constaterait seulement, dans son procès-verbal, que la lettre d'observations de la requérante du 12 juillet 1996, concernant le procès-verbal de son entretien avec le secrétaire général du 25 juin 1996, figure en annexe de la note confidentielle de ce dernier, et ne constaterait pas que sa lettre
d'observations du 4 juillet 1996 s'y trouve également annexée.
42 La partie défenderesse affirme que la lettre d'observations de la requérante du 4 juillet 1996 était annexée à la note confidentielle du secrétaire général du 9 juillet 1996, à laquelle il est fait référence expresse dans le texte du procès-verbal de la réunion du bureau des 15 et 16 juillet 1996. Cette note confidentielle du 9 juillet 1996 indiquerait expressément que la lettre d'observations de la requérante du 4 juillet 1996 lui est annexée. Par conséquent, les membres du bureau auraient eu à
leur disposition, pour la réunion des 15 et 16 juillet 1996, la lettre d'observations de la requérante du 4 juillet 1996, ce qui démontrerait que le droit de celle-ci à faire valoir ses intérêts n'a pas été violé.
Appréciation du Tribunal
43 II est constant entre les parties que la lettre de la requérante du 4 juillet 1996 était annexée à la note confidentielle du secrétaire général et que cette dernière a été portée à la connaissance des membres du bureau au cours de sa réunion des 15 et 16 juillet 1996. Il est également constant que ladite note confidentielle est mentionnée dans le procès-verbal de cette réunion, de même que certaines de ses annexes (notamment, le procès-verbal de l'entretien du secrétaire général avec la
requérante du 25 juin 1995, ainsi que les observations de cette dernière sur ce procès-verbal), bien qu'aucune référence directe ne soit faite à la lettre de la requérante du 4 juillet 1996.
44 Dans ces circonstances, il appartenait à la requérante de fournir la preuve que ses observations du 4 juillet 1996 n'avaient pas été prises en considération par le bureau. Or, la requérante n'a pas apporté la moindre preuve que, en l'espèce, les membres du bureau ne connaissaient pas le contenu et la portée de ses observations et que, par conséquent, ses droits de la défense avaient été violés.
45 II s'ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.
Sur le troisième moyen, tiré d'un défaut de motivation
Arguments des parties
46 La requérante soutient que la décision attaquée est entachée d'une violation de l'obligation de motivation. Cette décision n'indiquerait qu'une seule raison justifiant le retrait de son emploi, à savoir l'intention ferme du Parlement de procéder à la restructuration de l'ensemble du secrétariat général, et en particulier des services de traduction. Or, cette raison serait contradictoire et ambiguë, car si, d'une part, il est fait référence à l'intention de procéder à la restructuration des
services de traduction, d'autre part, il est précisé, dans la décision explicite de rejet de sa réclamation, que les services de traduction ont déjà fait l'objet d'importantes modifications structurelles engagées au moment de la nomination - intervenue au mois de septembre 1995 - du nouveau directeur général la remplaçant.
47 La partie défenderesse soutient que la motivation de la décision attaquée est suffisante, dès lors qu'elle explique que l'origine du retrait de l'emploi de la requérante réside dans l'intention de procéder à la restructuration des services de traduction.
Appréciation du Tribunal
48 L'obligation de motiver toute décision faisant grief, édictée par l'article 25, deuxième alinéa, du statut, constitue un principe essentiel du droit communautaire auquel il ne saurait être dérogé qu'en raison de considérations impérieuses (voir, par exemple, l'arrêt du Tribunal du 18 mars 1997, Picciolo et Caló/Comité des régions, T-178/95 et T-179/95, RecFP p. II-155, point 33). Elle a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est ou
non bien fondée et, d'autre part, de permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision (voir, par exemple, les arrêts du Tribunal du 19 septembre 1996, Brunagel/Parlement, T-158/94, RecFP p. II-1131, point 106, et du 2 avril 1998, Apostolidis/Cour de justice, T-86/97, RecFP p. II-521, point 73).
49 Dans ce contexte juridique, le Tribunal est appelé à vérifier si la motivation de la décision attaquée permet de connaître l'objectif du retrait de l'emploi de la requérante.
50 En l'espèce, la motivation de la décision attaquée permet d'identifier aisément l'objectif du retrait d'emploi appliqué à la requérante, à savoir «l'intention ferme du bureau de procéder à une restructuration de l'ensemble du secrétariat général et, en particulier, des services de la traduction». L'argument de la requérante selon lequel cette «intention ferme» serait en contradiction avec le fait que les services de traduction avaient déjà fait l'objet d'une importante restructuration au moment
de la nomination, en 1995, du nouveau directeur général la remplaçant n'est pas pertinent dans le cadre de l'examen de la motivation de la décision attaquée.
51 II s'ensuit que la motivation de la décision attaquée est suffisante et que le troisième moyen doit être rejeté.
Sur le quatrième moyen, tiré d'une méconnaissance de l'intérêt du service.
Arguments des parties
52 La requérante fait valoir, en substance, que la décision portant retrait de son emploi n'est pas intervenue dans l'intérêt du service. Elle souligne, à cet égard, que la nécessité de restructurer le secrétariat général et, en particulier, le service de traduction, constituait la justification de la première décision de retrait d'emploi annulée par l'arrêt du 14 mai 1996, alors que la décision attaquée ne fait plus état que d'une intention ferme de restructuration, ce qui marquerait un retrait
évident dans la politique suivie par l'institution. Elle en déduit que le Parlement n'a, en aucune manière, justifié de l'intérêt du service au retrait de son emploi.
53 En particulier le Parlement ne justifierait pas en quoi elle n'aurait pu continuer à occuper son poste et mettre en œuvre la restructuration envisagée, compte tenu de l'expérience qu'elle a accumulée dans l'accomplissement de ses tâches de directeur général. Il ressortirait également de la réponse rejetant explicitement sa réclamation qu'il n'a été procédé à un examen approprié des fonctions des personnes intéressées que dans le cadre de la procédure ayant conduit à l'adoption de la première
décision de retrait d'emploi, annulée par l'arrêt du 14 mai 1996. La requérante souligne que ce même examen scrupuleux et comparatif fait défaut dans le cas de la décision attaquée. Elle en conclut que ce n'est pas dans l'intérêt du service que le retrait de son emploi est intervenu, mais en raison de la seule nécessité, simplement envisagée, des restructurations du secrétariat général.
54 La partie défenderesse souligne que la décision attaquée justifie d'une façon claire de l'existence d'un intérêt du service au retrait de l'emploi de la requérante, dont la situation personnelle aurait fait l'objet d'un examen scrupuleux.
Appréciation du Tribunal
55 La Cour a reconnu dans son arrêt du 30 juin 1971, Almini/Commission (19/70, Rec. p. 623), que, en contrepartie de la liberté réservée aux institutions, par l'article 29, paragraphe 2, du statut en ce qui concerne les nominations [aux grades A 1 et A 2], l'AIPN jouit d'un large pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne le retrait d'emploi et le licenciement des fonctionnaires appartenant aux grades mentionnés (point 9) et que le statut ne limite pas les raisons qui peuvent justifier un retrait
d'emploi en vertu de l'article 50, celles-ci pouvant consister autant dans les exigences objectives du service que dans l'appréciation des qualités individuelles des fonctionnaires au regard de ces exigences (point 10). Évidemment, le large pouvoir discrétionnaire dont l'AIPN jouit suppose simultanément une grande liberté de décision et l'examen scrupuleux des éléments de la cause, ce second élément étant la garantie nécessaire de l'usage dudit pouvoir en toute connaissance de cause (arrêt de la
Cour du 6 mai 1969, Reinarz/Commission, 17/68, Rec. p. 61, points 15 et 16). L'exigence d'un examen scrupuleux des éléments de la cause implique également que le fonctionnaire à l'égard duquel il est envisagé d'adopter une mesure de retrait d'emploi puisse avoir l'occasion de faire valoir ses intérêts (arrêts de la Cour du 28 septembre 1983, Angelini/Commission, 131/82, Rec. p. 2801, point 11, et Renaud/Commission, 148/82, Rec. p. 2823, point 10). La Cour a également jugé que la même exigence
s'impose dans le cas où il est envisagé d'adopter une décision de ne pas réaffecter le fonctionnaire à un autre emploi de son grade, aux sens du troisième alinéa de l'article 50 du statut (voir l'arrêt du 11 mai 1978, Oslizlok/Commission, 34/77, Rec. p. 1099, point 30).
56 Dans ce contexte juridique, le Tribunal est appelé à vérifier si, pour atteindre l'objectif indiqué dans la décision attaquée, le Parlement a effectivement procédé à un examen scrupuleux des différents intérêts en cause.
57 II ressort du dossier que le Parlement a apprécié les capacités de la requérante et qu'il n'a «jamais mis en cause [ses] qualités professionnelles pour le travail [...] fourni jusqu'au moment où [il a] examiné [sa] situation» (transcription du procès-verbal de l'entretien avec le secrétaire général). Dans son mémoire en duplique, le Parlement admet aussi qu'il est vrai «que la requérante avait initié certaines questions en rapport avec les mesures de restructuration intervenues». Dans la décision
de rejet de la réclamation, le Parlement affirme que, «en dépit des efforts que [la requérante avait] accomplis en ce sens, le bureau avait, en effet, considéré que ce secteur devait être renforcé et adapté aux nouvelles exigences du fonctionnement de l'institution, et cela notamment parce qu'il serait confronté à l'application de nouvelles technologies, à l'organisation du travail à distance ou à domicile et au fait d'être le noyau permanent avec l'activité de tiers, de ‘free-lance’. Après quoi,
le Parlement estime «que la restructuration du secrétariat général nécessitait le retrait de [l']emploi» de la requérante (décision de rejet de la réclamation de la requérante).
58 De même, les raisons du refus de nommer la requérante au poste de conseiller spécial à l'Épicentre à Bruxelles, exposées d'une façon concise (le «profil professionnel hautement spécialisé que ces fonctions comportent» et le fait que «ce poste se trouve actuellement bloqué»), sont suffisantes.
59 II s'ensuit que le Parlement n'a pas méconnu l'intérêt du service. Le quatrième moyen doit, dès lors, être rejeté.
Sur le cinquième moyen, tiré d'un détournement de pouvoir
Arguments des parties
60 La requérante soutient que la décision attaquée a été prise pour des motifs autres que l'intérêt du service, ou dans des conditions telles qu'elle serait dénuée de motifs légalement admissibles. Il y aurait, selon la requérante, des indices objectifs, pertinents et concordants, de nature à témoigner que la partie défenderesse a utilisé ses pouvoirs à d'autres fins que celles pour lesquelles ils lui ont été dévolus. En effet, la décision attaquée serait, en réalité, justifiée seulement par des
raisons de convenance politique et d'équilibrage géographique - les mêmes qui avaient conduit à l'adoption de la première décision de retrait d'emploi, annulée par l'arrêt du 14 mai 1996 -, ainsi que par l'hostilité que la méthode de gestion responsable, scrupuleuse et efficace de la requérante avait rencontrée au sein du Parlement.
61 La partie défenderesse estime que la requérante n'a pas apporté la preuve que la décision attaquée est entachée d'un détournement de pouvoir.
Appréciation du Tribunal
62 II ressort de l'examen du quatrième moyen que la requérante n'a pas démontré que la décision attaquée a été adoptée en méconnaissance de l'intérêt du service. Or, il résulte d'une jurisprudence constante que, dès lors qu'une décision n'a pas été jugée contraire à l'intérêt du service, il ne saurait être question de détournement de pouvoir (arrêt du Tribunal du 10 juillet 1992, Eppe/Commission, T-59/91 et T-79/91, Rec. p. II-2061, point 57).
63 Par ailleurs, il y a lieu de relever que la requérante n'a fourni aucun élément de nature à établir que la décision attaquée a été prise à des fins autres que celles invoquées à l'appui de celle-ci. En ce qui concerne les prétendues raisons de convenance politique et d'équilibrage géographique, il faut souligner qu'elles ne sont pas mentionnées dans la décision attaquée. En outre, le critère de l'équilibre géographique est prévu expressément par l'article 27, premier alinéa, du statut, en ce sens
que le recrutement doit s'effectuer sur une base géographique aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres, l'institution pouvant, lors de la nomination à un emploi, faire jouer à la nationalité le rôle de critère préférentiel afin de maintenir ou de rétablir l'équilibre géographique lorsque les titres des candidats sont sensiblement équivalents (arrêt du Tribunal du 22 mars 1995, Kotzonis/CES, T-586/93, RecFP p. II-203, point 86). Quant aux liens que la requérante prétend
établir entre la décision de la licencier et l'hostilité que son attitude scrupuleuse et responsable aurait suscitée, le Tribunal estime que la requérante n'a pas fourni la preuve qu'il s'agit d'indices de nature à témoigner de la volonté du Parlement de lui infliger une sanction dissimulée.
64 II s'ensuit que le cinquième moyen doit être rejeté.
Sur le sixième moyen, tiré du non-respect d'un délai raisonnable
Arguments des parties
65 La requérante estime que l'article 25, deuxième alinéa, du statut, prévoyant que «toute décision individuelle prise en application du [...] statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé», a été violé du fait que la décision attaquée, adoptée par le bureau les 15 et 16 juillet 1996, ne lui a été communiquée que par lettre du président du Parlement du 9 octobre 1996, à savoir avec presque trois mois de retard. Selon la requérante, le fait que le procès-verbal de la
réunion du bureau des 15 et 16 juillet 1996 n'ait été approuvé que le 16 septembre 1996 ne constituerait pas une justification valable du comportement dilatoire du Parlement. En effet, le respect d'un délai raisonnable aurait exigé une communication immédiate de la décision attaquée, l'approbation du procès-verbal de ladite réunion ne pouvant, en tout état de cause, entraîner une modification de la décision adoptée par le bureau.
66 La partie défenderesse estime que le délai dans lequel la décision attaquée a été portée à la connaissance de la requérante ne saurait être qualifié de déraisonnable. Cette décision ayant, en effet, été adoptée par le bureau lors de sa dernière réunion avant les vacances, le procès-verbal de cette réunion devait encore faire l'objet d'une approbation formelle par le bureau lors de sa première réunion suivante, à savoir le 16 septembre 1996. Sans cette approbation formelle, la décision de retrait
de l'emploi de la requérante n'aurait pu être mise en œuvre. Par ailleurs, et en tout état de cause, le Parlement affirme qu'il est de jurisprudence bien établie qu'un simple retard dans la communication d'une décision à l'intéressé n'entraîne pas l'annulation de celle-ci.
Appréciation du Tribunal
67 Le Tribunal constate que la première décision de retrait d'emploi du 30 novembre 1994 avait été portée à la connaissance de la requérante le jour même de son adoption, tandis que pour la décision attaquée, qui date des 15 et 16 juillet 1996, le Parlement a voulu attendre l'approbation du procès-verbal de la réunion du bureau, qui est intervenue seulement le 16 septembre 1996. En réponse à une question du Tribunal, la partie défenderesse a expliqué qu'il s'est avéré nécessaire d'attendre
l'approbation du procès-verbal de la séance du bureau des 15 et 16 juillet 1996 afin d'éviter que la décision litigieuse ne soit entachée d'un vice similaire à celui ayant conduit à l'annulation.
68 En outre, 23 jours se sont écoulés entre la date d'approbation du procès-verbal (16 septembre 1996) et la date de la lettre du président du Parlement informant la requérante du retrait de son emploi (9 octobre 1996). La partie défenderesse a expliqué, à cet égard, qu'il avait été jugé nécessaire de saisir à nouveau le bureau de la question de la date de prise d'effet de la décision litigieuse et que ce dernier «a pris sa décision lors de sa réunion du 9 octobre 1996, ce qui a permis de
communiquer la décision complète le jour même à la requérante».
69 Si la communication de la décision attaquée est intervenue avec un retard regrettable, il est toutefois important de rappeler la jurisprudence de la Cour selon laquelle un retard dans la communication d'une décision individuelle à l'intéressé ne saurait entraîner l'annulation de celle-ci, étant donné que la communication est un acte postérieur à la décision et, partant, n'exerce aucune influence sur le contenu de celle-ci (voir les arrêts de la Cour du 29 octobre 1981, Arning/Commission, 125/80,
Rec. p. 2539, point 9, et du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement, 111/83, Rec. p. 2323, point 25). Quoi qu'il en soit, ce retard dans la communication de la décision attaquée n'a pas porté atteinte aux droits de la requérante, qui a pu régulièrement introduire une réclamation puis le présent recours en annulation.
70 II ressort des considérations qui précèdent que la décision litigieuse n'est pas entachée d'illégalité du fait du retard pris par le Parlement pour la communiquer à la requérante, et que, par conséquent, le sixième moyen doit être rejeté.
71 II s'ensuit que le recours doit être rejeté dans son ensemble.
Sur les dépens
72 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. En vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent normalement à la charge de celles-ci. Il s'ensuit que chaque partie supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (première chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est irrecevable en tant qu'il vise à l'annulation de la partie du dispositif de la décision adoptée par le Parlement européen lors de sa réunion des 15 et 16 juillet 1996 qui confirme que la candidature de la requérante au poste de directeur général de la direction générale Greffe du Parlement n'a pas été retenue.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) Chaque partie supportera ses propres dépens.
Vesterdorf
Moura Ramos
Mengozzi
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 novembre 1998.
Le greffier
H. Jung
Le président
B. Vesterdorf
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( *1 ) Lingue de procédure: le français