ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
29 mai 1997 ( *1 )
«Fonctionnaires — Rejet de candidature — Article 19, paragraphe 1, du règlement intérieur du Conseil — Article 45 du statut — Compétence du secrétaire général du Conseil pour adopter les décisions de rejet d'une candidature et d'une réclamation — Avis de vacance — Erreur manifeste d'appréciation — Articles 7 et 27 du statut — Obligation de motivation — Détournement de pouvoir»
Dans l'affaire T-6/96,
Thémistocle Contargyris, ancien fonctionnaire du Conseil de l'Union européenne, demeurant à Bruxelles, représenté par Mes Jean-Noël Louis, Thierry Demaseure et Ariane Tornei, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 1, rue de Cessange,
partie requérante,
contre
Conseil de l'Union européenne, représenté par M. Jean-Paul Jacqué, directeur au service juridique, en qualité d'agent, assisté de Me Denis Waelbroeck, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Bruno Eynard, directeur général de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d'investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,
partie défenderesse,
ayant pour objet l'annulation de la décision du secrétaire général du Conseil, du 3 mai 1995, portant rejet de la candidature du requérant à un emploi de grade A 1 à la direction générale Cohésion économique et sociale - Politique régionale -Politique sociale - Emploi - Dialogue social - Éducation et Jeunesse - Culture - Audiovisuel (DG J), et de la décision du secrétaire général du Conseil du 7 novembre 1995, portant rejet de la réclamation du requérant,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),
composé de MM. R. Garcia-Valdecasas, président, J. Azizi et M. Jaeger, juges,
greffier: M. A. Maier, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 4 mars 1997,
rend le présent
Arrêt
Faits à l'origine du recours
1 Le requérant, M. Thémistocle Contargyris, de nationalité grecque, est entré au service du secrétariat général du Conseil le 1er septembre 1982 et a été affecté à la division «pêche». En 1984, il a été promu directeur de la direction I «politique régionale, sociale; santé; éducation; culture; audiovisuel; jeunesse» de la direction générale G (ci-après «DG G»).
2 Le 9 février 1995, par communication au personnel no 29/95, le secrétariat général du Conseil a publié, sous le titre «relevé mensuel no 2/95 des postes disponibles» de la catégorie A, des avis de vacance concernant cinq emplois de grade A 1, dont, entre autres, un «poste susceptible de devenir disponible» à la direction générale Cohésion économique et sociale — Politique régionale — Politique sociale — Emploi — Dialogue social — Éducation et jeunesse — Culture — Audiovisuel (DG J). Cet avis
était.libellé comme suit:
«Poste susceptible de devenir disponible
Catégorie: A Grade: 1 Nombre: 1
Description des tâches
— Diriger au sein du secrétariat général du Conseil une unité administrative du niveau le plus élevé.
— Conseiller l'institution et effectuer des études du plus haut niveau.
Qualifications requises
— Être fonctionnaire de la catégorie A, grade 1 ou catégorie A, grade 2, avec une ancienneté d'au moins deux ans dans le grade 2 à la date de publication du présent avis.
— Connaissances étendues de la politique générale des Communautés européennes et dans le domaine des relations internationales.
— Avoir dirigé les travaux d'une unité administrative importante pendant cinq années au moins.»
3 Le 16 février 1995, le requérant a posé sa candidature au poste susmentionné.
4 Deux autres fonctionnaires du Conseil, M. A., de nationalité portugaise, et M. L., de nationalité belge, ont également posé leur candidature à ce poste.
5 Pour l'aider à faire un examen comparatif de ces candidatures, le secrétaire général du Conseil a constitué un comité de sélection composé de trois directeurs généraux du Conseil.
6 Le 20 mars 1995, le requérant a été convoqué, pour le 31 mars suivant, à un entretien avec le comité de sélection. Cet entretien s'est déroulé à la date prévue.
7 Le requérant a eu un échange de vues avec le secrétaire général concernant le poste litigieux au cours d'un entretien qui a eu lieu le 28 mars 1995.
8 Le 3 avril 1995, le comité de sélection a établi un rapport à l'intention du secrétaire général ayant pour objet l'examen des candidatures introduites. Le rapport précisait que, «conformément au mandat donné au comité par le secrétaire général [...], les travaux du comité s'étaient basés sur les dossiers des candidats (notamment acte de candidature et curriculum vitae) et les interviews des candidats auxquelles le comité avait procédé». Dans le même rapport, le comité recommandait, entre autres,
de ne pas retenir la candidature du requérant et de retenir la candidature de M. L. pour la DG J.
9 Par note du 4 avril 1995, le secrétaire général a soumis au Comité des représentants permanents (2e partie) (ci-après «Coreper») un projet de décision du Conseil portant nomination de M. L. au grade A 1 et a suggéré au Coreper que le Conseil adopte la décision en tant que point A de l'ordre du jour.
10 L'extrait du projet de compte rendu sommaire, daté du 10 octobre 1995, de la 1649e réunion du Coreper, tenue le 5 avril 1995 à Bruxelles, est formulé comme suit:
«Le [Coreper]:
— convient à l'unanimité d'ajouter à son ordre du jour cinq points additionnels relatifs à la nomination de fonctionnaires de grade A 1 au secrétariat général du Conseil;
— convient à l'unanimité d'ajouter cinq points additionnels correspondants à l'ordre du jour provisoire de la 1844e session du Conseil des 10 et 11 avril 1995;
— convient de suggérer au Conseil d'adopter les propositions de nomination faites à cet égard par le secrétaire général.»
11 Les projets de décision ont été inscrits dans la partie A de l'ordre du jour, daté du 7 avril 1995, de la 1844e session du Conseil, qui s'est tenue à Luxembourg le 10 avril 1995. Celui-ci a alors adopté la décision portant nomination de M. L. au grade A 1, avec effet au 1er juin 1995.
12 Par note du 3 mai 1995, le secrétaire général a indiqué au requérant qu'il avait été décidé de ne pas retenir sa candidature.
13 Par note du 16 mai 1995, le requérant a demandé au secrétaire général de lui communiquer le rapport du comité consultatif de sélection et de lui confirmer que sa candidature avait été rejetée pour des raisons «géopolitiques». Cette note est restée sans réponse.
14 Par note du 12 juillet 1995, le requérant a introduit une réclamation contre la décision portant rejet de sa candidature au poste de grade A 1 de la DG J et contre «toutes les décisions subséquentes qui ont mené à la nomination de M. L. à ce poste».
15 Le secrétaire général, par décision du 7 novembre 1995, a opposé une réponse explicite de rejet à cette réclamation.
16 Par décision du 10 octobre 1996, le requérant a été mis à la retraite avec effet au 31 décembre 1996.
Procédure et conclusions des parties
17 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 janvier 1996, le requérant a introduit le présent recours.
18 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé, d'une part, d'adopter des mesures d'organisation de la procédure au titre de l'article 64 du règlement de procédure, en demandant aux parties de répondre à certaines questions et de produire certains documents, parmi lesquels une déclaration du président du Coreper concernant l'examen préalable par le Coreper des candidatures au poste litigieux, et, d'autre part, d'ouvrir la procédure orale. Le requérant et le Conseil ont
déféré aux demandes du Tribunal le 19 février 1997.
19 Dans sa requête, le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
— annuler la décision de rejet de la candidature du requérant au poste de grade A 1 à la DG J;
— annuler la décision du Conseil portant nomination de M. L. au grade A 1;
— annuler la décision portant affectation de celui-ci à l'emploi de directeur général de la DG J;
— annuler la décision du secrétaire général du Conseil du 7 novembre 1995 portant rejet de la réclamation du requérant;
— condamner la partie défenderesse aux dépens.
20 Dans son mémoire en défense, le Conseil conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
— rejeter le recours comme non fondé,
— statuer sur les dépens comme de droit.
21 Par lettre du 19 février 1997, le requérant, compte tenu de sa mise à la retraite, s'est désisté de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant nomination de M. L. au grade A 1 et de celle portant affectation de ce dernier à la DG J.
22 Par lettre du 19 février 1997, le Conseil, compte tenu de la mise à la retraite du requérant, a conclu à l'irrecevabilité du recours dans son intégralité.
23 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal à l'audience du 4 mars 1997.
Sur la recevabilité
Arguments des parties
24 Dans sa lettre du 19 février 1997, en réponse à une question écrite du Tribunal, le Conseil estime que, conformément à la jurisprudence établie dans l'arrêt du Tribunal du 9 février 1994, Latham/Commission (T-82/91, RecFP p. II-61, point 24), le présent recours doit être déclaré irrecevable pour défaut d'intérêt à agir dans le chef du requérant, suite à sa mise à la retraite, pour autant qu'il vise à l'annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant au poste de directeur général
de la DG J, à celle de la décision portant nomination de M. L. au grade A 1 et à celle de la décision portant affectation de M. L. au poste de directeur général de la DG J.
25 En effet, d'après le Conseil, compte tenu du fait qu'il a été mis à la retraite avec effet au 31 décembre 1996, le requérant ne saurait plus utilement prétendre au poste litigieux ni, par voie de conséquence, à l'annulation de la nomination de M. L. au grade A 1 et à l'affectation de ce dernier à ce poste.
26 A cet égard, le Conseil souligne que, à la différence du requérant dans l'affaire Latham/Commission, le requérant dans la présente affaire n'a pas demandé de dommages-intérêts en réparation du dommage qu'il aurait subi par suite du rejet de sa candidature au poste litigieux et que, par conséquent, il ne justifie pas non plus d'un intérêt à agir par cette voie.
27 Enfin, le Conseil relève que la décision du secrétaire général du 7 novembre 1995, portant rejet de la réclamation du requérant, n'est que purement confirmative des trois premiers actes et qu'elle ne saurait, dès lors, faire l'objet d'un recours en annulation.
28 Le Conseil estime donc que le recours introduit par le requérant doit être rejeté comme irrecevable dans son intégralité.
29 Dans sa lettre du 19 février 1997, le requérant reconnaît que, depuis le 1er janvier 1997, il ne possède plus d'intérêt à la poursuite de l'action en ce qui concerne la décision portant nomination de M. L. au grade A 1 et la décision portant affectation de ce dernier au poste de directeur général de la DG J.
30 En revanche, se fondant sur l'arrêt Latham/Commission, précité ci-dessus au point 24, il estime qu'il possède toujours un intérêt certain, né et actuel, à la poursuite de l'action en ce qu'elle tend à l'annulation de la décision du 3 mai 1995 portant rejet de sa candidature à l'emploi de directeur général de grade A 1 de la DG J. Il en va de même, de l'avis du requérant, en ce qui concerne la décision du secrétaire général du 7 novembre 1995 portant rejet de sa réclamation.
Appréciation du Tribunal
31 A titre liminaire, le Tribunal relève que, le requérant s'étant désisté de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant nomination de M. L. au grade A 1 et de celles portant affectation de ce dernier au poste de directeur général de la DG J, l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Conseil dans sa lettre du 19 février 1997 ne concerne que les conclusions visant à l'annulation de la décision du secrétaire général portant rejet de la candidature du requérant et de celle
rejetant sa réclamation.
32 A cet égard, il a lieu de rappeler que, ainsi qu'il ressort de la jurisprudence du Tribunal (arrêts du 5 décembre 1990, Marcato/Commission, T-82/89, Rec. p. II-735, point 54, et Latham/Commission, précité ci-dessus au point 24, points 24 à 26) un fonctionnaire mis à la retraite conserve un intérêt personnel à poursuivre un recours en annulation dirigé contre la décision de ne pas le promouvoir, car, dans l'hypothèse où cette décision serait annulée, il aurait la possibilité d'introduire un
recours visant à la réparation du dommage qu'il pourrait avoir subi du fait dudit refus.
33 Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient le Conseil, la recevabilité du recours, en ce qu'il vise à l'annulation tant de la décision du secrétaire général portant rejet de la candidature du requérant que de celle rejetant sa réclamation, ne dépend pas de l'introduction simultanée d'un recours visant à la réparation du dommage que le requérant pourrait avoir subi à la suite de l'adoption de ces deux décisions.
34 Dans ces circonstances, le recours est recevable, dans la mesure où il est dirigé contre la décision du secrétaire général portant rejet de la candidature du requérant et contre celle rejetant sa réclamation.
Sur le fond
35 Le requérant invoque, en substance, les moyens suivants: violation de l'article 19, paragraphe 1, de la décision 93/662/CE du Conseil, du 6 décembre 1993, portant adoption de son règlement intérieur (JO L 304, p. 1, ci-après «règlement intérieur du Conseil»), en liaison avec le point b) de l'article unique de la décision 63/9/CEE du Conseil, du 14 mai 1962, portant détermination de l'autorité investie du pouvoir de nomination pour le secrétariat général des Conseils (JO 1963, 5, p. 34, ci-après
«décision du Conseil du 14 mai 1962»); violation de l'article 4 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut»); violation de l'article 45 du statut; incompétence du secrétaire général du Conseil pour adopter les décisions portant rejet de sa candidature et de sa réclamation; incompétence du secrétaire général pour adopter la décision portant affectation de M. L. au poste de directeur général de la DG J; illégalité de l'avis de vacance; erreur manifeste
d'appréciation; violation des articles 7 et 27 du statut; violation de l'obligation de motivation; détournement de pouvoir.
36 Lors de l'audience, le requérant s'est désisté du moyen tiré de la violation de l'article 4 du statut et de celui tiré de l'incompétence du secrétaire général pour adopter la décision portant affectation de M. L. au poste de directeur général de la DG J.
Sur le premier moyen, tiré d'une violation de l'article 19, paragraphe 1, du règlement intérieur du Conseil en liaison avec le point b) de l'article unique de la décision du Conseil du 14 mai 1962
Cadre réglementaire
37 La décision du Conseil du 14 mai 1962 prévoit, en son article unique, ce qui suit:
«Les pouvoirs dévolus par le statut des fonctionnaires à l'autorité investie du pouvoir de nomination et par le régime applicable aux autres agents à l'autorité habilitée à conclure les contrats d'engagement sont, en ce qui concerne le secrétariat général des Conseils, exercés:
a) [...];
b) par les Conseils, sur proposition du secrétaire général, pour l'application aux agents du grade 1 de la catégorie A des dispositions des articles 1, 13, 15, paragraphe 2, 16, 22, 29, 30, 31, 32, 38, 41, 49, 50, 51, 78, 87, 88, 89 et 90;
c) par le secrétaire général dans les autres cas [...]»
38 L'article 19, paragraphe 1, du règlement intérieur du Conseil est libellé comme suit:
«1. Le Coreper a pour tâche de préparer les travaux du Conseil et d'exécuter les mandats qui lui sont confiés par celui-ci. Tous les points inscrits à l'ordre du jour d'une session du Conseil font l'objet d'un examen préalable du Coreper, sauf décision contraire de ce dernier. Le Coreper s'efforce de trouver un accord à son niveau, qui sera soumis à l'adoption du Conseil. Il assure une présentation adéquate des dossiers au Conseil. En cas d'urgence, le Conseil peut décider à l'unanimité de
délibérer sans que cet examen préalable ait eu lieu.»
Arguments des parties
39 Selon le requérant, le Conseil a violé l'article 19, paragraphe 1, de son règlement intérieur dans la mesure où la décision litigieuse du 10 avril 1995, portant nomination de M. L. au grade Al, n'a pas été approuvée au préalable par le Coreper.
40 A cet égard, le requérant fait valoir que, conformément au point b) de l'article unique de la décision du Conseil du 14 mai 1962, les pouvoirs de l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») sont exercés, pour les fonctionnaires de grade A 1, par le Conseil, sur proposition du secrétaire général.
41 Le requérant précise que, en application de l'article 19, paragraphe 1, de son règlement intérieur, le Conseil ne peut statuer sur un point inscrit à l'ordre du jour d'une session qu'après examen préalable du Coreper. Il conviendrait, dès lors, d'examiner si le Coreper a procédé à un examen effectif des candidatures au poste litigieux dont la vacance avait été annoncée par la communication au personnel no 29/95. Or, il ressortirait de l'ordre du jour, daté du 7 avril 1995, de la 1844e session du
Conseil que, à l'exception des points 6 à 10, tous les autres points figurant dans la partie A avaient été préalablement «approuvés par le Coreper». Le point 10 serait précisément la proposition de nomination au grade A 1 de M. L., reprise à l'ordre du jour sous la référence «doc. 6244/95 STAT 28». La décision de nomination litigieuse n'aurait donc pas été approuvée au préalable par le Coreper. De plus, en adoptant cette décision, le Conseil n'aurait ni invoqué l'urgence ni décidé à l'unanimité
de délibérer sans que le projet de décision ait été examiné au préalable par le Coreper.
42 Le défendeur estime que ce moyen manque en fait. En effet, il ressortirait de l'extrait du projet de compte rendu sommaire, daté du 10 octobre 1995, de la 1649e réunion du Coreper, qui s'est tenue le 5 avril 1995, que le Conseil a produit en annexe à son mémoire en défense (voir point 10 ci-dessus), que le Coreper a examiné préalablement à la session du Conseil du 10 avril 1995 la question de la nomination de cinq fonctionnaires au grade A 1 — dont la nomination litigieuse. Lors de sa réunion du
10 avril 1995, le Conseil aurait adopté les propositions du secrétaire général approuvées par le Coreper.
43 Confronté à ce document, le requérant se demande au stade de la réplique: a) pour quelles raisons il n'a été établi que le 10 octobre 1995, c'est-à-dire après l'introduction de sa réclamation, b) pour quelles raisons l'ordre du jour du 7 avril 1995 de la 1844e session du Conseil omet exceptionnellement d'indiquer que la décision litigieuse a été approuvée par le «Coreper deuxième partie du 5.4.1995», c) pour quelles raisons le secrétaire général n'a pas fait référence à cette décision du Coreper
dans la décision explicite de rejet de sa réclamation et d) pourquoi le Conseil a attendu l'introduction d'un recours en annulation pour produire un document essentiel pour permettre au requérant d'apprécier le bien-fondé de la décision attaquée.
44 Enfin, de l'avis du requérant, le Coreper n'a pu, en fait, procéder à un véritable examen préalable des candidatures. En effet, la note adressée le 4 avril 1995 par le secrétaire général aux membres du Coreper ne fournirait pas les éléments essentiels permettant d'apprécier les candidatures au poste litigieux, du fait qu'elle ne contiendrait aucune indication sur l'emploi à pourvoir, les qualifications requises, l'identité des fonctionnaires concernés, l'avis du comité de sélection et les
critères conduisant à écarter la candidature du requérant.
45 En conséquence, conclut le requérant, la partie défenderesse n'a pas établi que le Coreper a procédé effectivement, dans le respect des garanties conférées par l'article 45 du statut, à l'examen comparatif des mérites des candidats à chacun des cinq emplois de grade A 1 vacants.
46 En réponse aux interrogations du requérant, le Conseil souligne tout d'abord qu'il est de pratique constante pour le Coreper de ne rédiger le projet de compte rendu de ses réunions que plusieurs semaines, voire plusieurs mois, après que celles-ci ont eu lieu. Il ajoute que ces projets de compte rendu ne font pas l'objet d'une approbation explicite par le Coreper lors d'une réunion ultérieure et qu'ils sont supposés implicitement approuvés si aucun membre ne les conteste ou ne suggère de
modification lors de la réunion qui suit leur distribution.
47 Quant à l'absence de mention «approuvé par le Coreper» sous les points 6 à 10 de la partie A de l'ordre du jour, daté du 7 avril 1995, de la 1844e session du Conseil, relatifs aux cinq propositions de nomination de fonctionnaires au grade A 1, le Conseil estime qu'elle n'a pas de signification en elle-même, le Coreper ayant préparé les décisions à prendre par le Conseil.
48 Si, dans sa décision de rejet de la réclamation, le secrétaire général n'a pas attiré l'attention du requérant sur son erreur à cet égard, cela tient, selon le Conseil, au fait que ce n'est que de façon tout à fait incidente, et sans en tirer le moindre argument, que, dans l'exposé des faits de sa réclamation, le requérant avait indiqué que le Coreper n'avait pas été saisi de la question. Dans ces conditions, il ne pourrait être reproché au Conseil de ne pas avoir répondu à un grief qui n'était
pas soulevé explicitement dans la réclamation.
49 Le Conseil souligne également que la question de la nomination de cinq fonctionnaires de grade A 1 au secrétariat général a été ajoutée à l'ordre du jour de la réunion du Coreper du 5 avril 1995 lors de cette réunion même. Cela serait conforme à la pratique constante observée par le Coreper lorsque des questions de personnel sont discutées afin d'assurer un maximum de discrétion aux discussions et d'éviter d'éventuelles pressions indésirables.
50 Enfin, selon le Conseil, il est inexact de prétendre que, lors de la réunion du 5 avril 1995, les membres du Coreper ne se sont pas prononcés en pleine connaissance de cause sur la nomination au poste litigieux. Outre le fait qu'ils auraient disposé des avis de vacance concernant chacun des cinq postes à pourvoir, ils auraient été informés par le secrétaire général, lors de la réunion en cause, de l'identité et des qualifications des candidats à ces postes, des résultats des travaux du comité de
sélection ainsi que de ceux de son propre examen des mérites des candidats.
Appréciation du Tribunal
51 A titre liminaire, le Tribunal constate que, dans le cas d'espèce, le Coreper n'a pas décidé de ne pas examiner la proposition du secrétaire général, pas plus que le Conseil n'a invoqué l'urgence ni décidé à l'unanimité de délibérer sans que le projet de décision ait été examiné au préalable par le Coreper, seules hypothèses prévues par l'article 19, paragraphe 1, du règlement intérieur du Conseil où cet examen préalable n'est pas obligatoire.
52 La question qui se pose est donc celle de savoir si le Coreper a effectivement procédé ou non à l'examen préalable des candidatures et de la proposition de nomination au grade A 1 de M. L. faite par le secrétaire général.
53 A cet égard, il y a lieu de constater que, sur demande du Tribunal, le Conseil a produit en annexe à sa lettre du 19 février 1997 une déclaration du président du Coreper, libellée dans les termes suivants:
«Lors de la réunion du 5 avril 1995, que je présidais, le Coreper a examiné la question de la nomination de M. L. à un poste de directeur général (A 1). A cette fin, les membres du Coreper ont été informés par le secrétaire général du Conseil, à l'occasion de ses propositions de nomination, de l'identité et des qualifications des candidats à ces postes, des résultats des travaux du comité de sélection ainsi que de son propre examen des mérites des candidats.»
54 Cette déclaration du président du Coreper constitue un élément probant suffisamment précis de l'examen, réalisé par le Coreper préalablement à la session du Conseil du 10 avril 1995, des candidatures et de la proposition de nomination de M. L.
55 Par ailleurs, il y a lieu de constater que le Conseil a produit l'extrait du projet de compte rendu sommaire, daté du 10 octobre 1995, de la 1649e réunion du Coreper, qui s'est tenue le 5 avril 1995 (voir point 10 ci-dessus), dont il ressort que le Coreper a décidé d'ajouter à son ordre du jour et à celui du Conseil cinq points additionnels relatifs à la nomination de fonctionnaires de grade A 1 au secrétariat général du Conseil et de lui suggérer d'adopter les propositions de nomination faites à
cet égard par le secrétaire général.
56 En ce qui concerne ce dernier document, il convient toutefois d'examiner les objections soulevées par le requérant à son encontre.
57 Pour ce qui est de l'argument tiré du retard qui serait intervenu dans l'établissement du projet de compte rendu, le Tribunal estime que l'explication du Conseil apparaît plausible. En effet, le requérant ne conteste pas, d'une part, qu'il est de pratique constante au sein du Coreper que les projets de compte rendu de ses réunions ne soient rédigés que plusieurs semaines, voire plusieurs mois, après la tenue de celles-ci ni, d'autre part, qu'il est aussi habituel que ces projets de compte rendu
ne fassent pas l'objet d'une approbation explicite par le Coreper lors d'une réunion ultérieure. Par ailleurs, et bien que cette pratique puisse apparaître inhabituelle, elle n'a pas, en l'espèce, porté atteinte aux intérêts du requérant.
58 Quant au prétendu retard avec lequel le Conseil aurait produit le projet en cause, il convient de tenir compte, d'une part, du fait que ledit projet a été établi après l'introduction de la réclamation, mais avant celle du recours et, d'autre part, de ce que, dans sa réclamation, le requérant n'a pas invoqué, du moins explicitement, une violation de l'article 19, paragraphe 1, du règlement intérieur du Conseil. Cette double circonstance est de nature à expliquer que le secrétaire général n'ait pas
mentionné expressément la saisine du Coreper dans la décision explicite de rejet de la réclamation et que le Conseil ait attendu l'introduction d'un recours en annulation pour produire l'extrait de compte rendu.
59 Quant à l'objection du requérant (voir point 44 ci-dessus) selon laquelle le Coreper ne se serait pas prononcé en pleine connaissance de cause sur la nomination au poste litigieux du fait que la note du secrétaire général ne contenait aucune indication à ce sujet, il y a lieu de relever que, selon la déclaration écrite du président du Coreper produite en annexe à la lettre du Conseil du 19 février 1997, les membres du Coreper ont été pleinement informés par le secrétaire général, lors de la
réunion du 5 avril 1995, de l'identité et des qualifications des candidats à ce poste, des résultats des travaux du comité de sélection ainsi que de ceux de son propre examen des mérites des candidats. Étant ainsi établi que le Coreper a été mis en mesure de procéder à un examen comparatif des mérites des candidats au poste litigieux, le caractère plus ou moins motivé de la note, certes assez concise, que le secrétaire général a adressée le 4 avril 1995 aux membres du Coreper ne présente aucune
pertinence.
60 S'agissant de l'absence de la mention «approuvé par le Coreper» sous le point 10 de la partie A de l'ordre du jour, du 7 avril 1995, de la 1844e session du Conseil, relatif à la nomination de M. L., cette omission ne saurait être considérée comme déterminante dans la mesure où il est établi que le Coreper a effectivement procédé à l'examen de la proposition du secrétaire général, conformément à l'article 19, paragraphe 1, du règlement intérieur du Conseil. En effet, le Coreper ayant préparé la
décision à prendre par le Conseil, la présence ou l'absence de la mention «approuvé par le Coreper» n'a donc pas de signification en elle-même.
61 Dès lors, ce moyen doit être rejeté.
Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l'article 45 du statut
Arguments des parties
62 Le requérant fait valoir que, en application de l'article 45 du statut, l'AIPN est tenue de procéder elle-même à l'examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. En l'espèce, ce serait donc le Conseil lui-même, en tant qu'AIPN, qui aurait dû procéder à l'examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Or, selon le requérant, le Conseil n'aurait pas procédé à un tel examen.
63 D'après le requérant, le Conseil n'a été informé, lors de la session à Luxembourg, au cours de laquelle a été adoptée la décision litigieuse, ni de la liste des fonctionnaires candidats à l'emploi litigieux ni des qualifications requises pour exercer les fonctions afférentes à celui-ci. Dès lors, il n'aurait pas eu la possibilité de procéder lui-même à l'examen comparatif prescrit par l'article 45 du statut. En outre, les dossiers personnels des fonctionnaires du Conseil seraient conservés à
Bruxelles et ceux des intéressés n'auraient pas été transférés à cette occasion à Luxembourg.
64 A titre subsidiaire, pour le cas où il conviendrait d'admettre que c'est au secrétaire général qu'il incombait de procéder audit examen comparatif, le requérant fait valoir que cet examen n'a pas été effectué, étant donné que le comité de sélection institué par le secrétaire général a éliminé sa candidature après avoir procédé à un examen global des diverses candidatures et fixé les qualités requises pour exercer les fonctions afférentes à l'emploi à pourvoir.
65 Le requérant relève ensuite que le Conseil, en tant qu'AIPN, n'a jamais créé de comité consultatif de sélection. Or, selon la pratique instituée au Conseil, toutes les décisions de nomination ou de promotion devraient être adoptées dans le respect du principe de transparence et au terme d'un examen comparatif des mérites des candidats effectué par un organe paritaire. Tel ne serait pas le cas en l'espèce, aucun membre du comité consultatif de sélection n'ayant été désigné par le personnel.
66 Le défendeur rappelle que, selon le point b) de l'article unique de sa décision du 14 mai 1962, le Conseil agit en qualité d'AIPN sur proposition du secrétaire général. C'est donc essentiellement à ce dernier qu'il appartiendrait d'effectuer un examen comparatif des mérites respectifs des candidats à un emploi vacant. En l'espèce, le secrétaire général aurait effectivement procédé à cet examen, avec l'aide du comité de sélection qu'il avait constitué à cette fin. Par la suite, les résultats de
cet examen auraient été étudiés par le Coreper, qui a décidé de suggérer au Conseil de suivre la proposition faite par le secrétaire général. Cette procédure serait d'ailleurs conforme au rôle attribué au Coreper par l'article 151 du traité CE.
67 En ce qui concerne le rapport du comité de sélection, le défendeur ajoute que le comité a bien procédé à l'examen comparatif des mérites des différents candidats au regard des qualifications requises pour le poste qu'ils avaient postulé.
Appréciation du Tribunal
68 Aux termes de l'article 45, paragraphe 1, du statut, «la promotion est attribuée par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur de la catégorie ou du cadre auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d'un minimum d'ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion ainsi que des rapports dont ils ont
fait l'objet».
69 Dans un cas comme celui de l'espèce, l'article 45 du statut impose ainsi, d'une part, le respect scrupuleux de la procédure de nomination, telle qu'elle est prévue par le point b) de l'article unique de la décision du Conseil du 14 mai 1962 en liaison avec l'article 151 du traité et les articles 19 et 2, paragraphes 6 et 7, du règlement intérieur du Conseil, et, d'autre part, le respect effectif de l'obligation de procéder à un examen comparatif des mérites respectifs des candidats à un emploi
vacant par les organes compétents.
70 A cet égard, il convient de rappeler que, selon le point b) de l'article unique de la décision du Conseil du 14 mai 1962, les pouvoirs dévolus par le statut des fonctionnaires à l'AIPN sont exercés pour les fonctionnaires de grade A 1 par le Conseil, sur proposition du secrétaire général.
71 Il résulte donc du libellé de cette disposition que c'est au secrétaire général qu'il appartient, en premier lieu, de procéder à l'examen comparatif des mérites respectifs des candidats à un emploi vacant. En effet, la tâche confiée au secrétaire général, qui consiste à formuler des propositions de nomination au Conseil, implique nécessairement de sa part une sélection préalable des candidats sur la base d'un examen comparatif de leurs mérites respectifs.
72 Or, dans le cas d'espèce, le secrétaire général a procédé à un tel examen avec l'aide d'un comité de sélection, composé de trois directeurs généraux, lequel, ainsi qu'il ressort du rapport du 3 avril 1995, qu'il a établi lui-même, a examiné toutes les candidatures au poste litigieux après avoir procédé à des entretiens avec tous les candidats, y compris le requérant.
73 Se fondant sur le point I, page 2, du rapport du comité de sélection, intitulé «candidats que le comité ne recommande pas de retenir», le requérant fait valoir que le comité a procédé à un examen global des candidatures et a fixé les «qualités» requises pour exercer les fonctions aferentes à l'emploi à pourvoir et que, dans ces conditions, le comité de sélection n'a pas procédé à l'examen comparatif des mérites des candidats.
74 Cette interprétation du rapport du comité de sélection ne saurait être retenue. En effet, d'après le rapport en question, le comité s'est fondé dans ses travaux, d'une part, sur les dossiers des candidats, notamment leurs actes de candidature et leurs curriculum vitae, et, d'autre part, sur les entretiens qui ont eu lieu avec les candidats.
75 En ce qui concerne les raisons fondant la proposition de ne pas retenir la candidature du requérant, le comité s'est exprimé de la façon suivante:
«Bien qu'ils possèdent certaines des qualités requises (bonne connaissance du fonctionnement de la Communauté et expérience au secrétariat général), le comité a estimé que les candidats suivants ne possèdent pas toutes les qualités nécessaires et que, en tout état de cause, du fait de leur comparaison avec les autres candidats, ils ne devraient pas être retenus:
— Contargyris Themistocle
— [...]»
76 Il résulte de ce qui précède que le comité de sélection a bel et bien procédé chaque fois à l'examen comparatif des mérites des différents candidats au regard des qualifications requises pour le poste qu'ils avaient postulé. Ce n'est qu'afin de présenter de façon synthétique le résultat de ses travaux que le comité de sélection a regroupé sous un seul titre ses conclusions sur les candidatures qu'il suggérait d'écarter.
77 Ensuite, il résulte, notamment, de la déclaration du président du Coreper, précitée au point 53, que le Coreper a, lui aussi, examiné, le 5 avril 1995, la proposition du secrétaire général à la lumière des explications fournies par ce dernier, concernant notamment l'identité et les qualifications des candidats aux postes en question ainsi que les résultats des travaux du comité de sélection. A l'issue de cette réunion, le Coreper a suggéré au Conseil d'adopter la proposition de nommer M. L. au
grade A 1.
78 A cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l'article 151 du traité, c'est au Coreper qu'il appartient de préparer les travaux du Conseil et d'exécuter les mandats qui lui sont confiés par celui-ci. Cette fonction comprend, entre autres, l'examen de la question des postes à pourvoir par le Conseil en sa qualité d'AIPN. Lorsque, comme en l'espèce, le Coreper désire soumettre une proposition à l'attention du Conseil, celle-ci peut faire l'objet d'un point, inscrit dans la partie A de
l'ordre du jour d'une prochaine session du Conseil. Les points inscrits dans cette partie peuvent être approuvés sans débat par le Conseil. Toutefois, cette procédure n'exclut pas la possibilité pour chacun des membres du Conseil d'exprimer son opinion lors de l'approbation de ces points. Bien plus, au cas où une prise de position au sujet d'un point inscrit dans la partie A est susceptible d'entraîner un nouveau débat ou si un membre le demande, ce point peut être retiré de l'ordre du jour,
conformément à l'article 2, paragraphes 6 et 7, du règlement intérieur du Conseil, ou faire l'objet d'un examen dans le cadre de la partie B de l'ordre du jour.
79 C'est dans ce contexte normatif que, le 10 avril 1995, le Conseil a décidé de procéder à la nomination litigieuse.
80 Il s'ensuit, donc, que le Conseil n'a pas violé l'article 45 du statut dans la mesure où sa décision finale est basée sur une proposition elle-même fondée sur un examen comparatif des mérites respectifs des candidats au poste litigieux.
81 En effet, exiger du Conseil qu'il fasse systématiquement usage, dans toutes les procédures de nomination de fonctionnaires au grade A 1, de ses prérogatives d'examen et de discussion détaillée dans le cadre de ses sessions reviendrait à priver de tout contenu la possibilité prévue par le traité dans son article 151, telle qu'elle a été précisée par les articles 2, paragraphe 6, et 19, paragraphe 1, de son règlement intérieur, d'adopter des décisions sans discussion lorsque le Coreper s'est déjà
prononcé, à la fois sur le bien-fondé de la proposition du secrétaire général et sur l'opportunité de ne pas procéder à une discussion au sein du Conseil en inscrivant ladite proposition sur l'ordre du jour dans la partie A.
82 Enfin, en ce qui concerne l'absence de représentant du personnel dans le comité de sélection, il suffit de constater que le statut ne prévoit pas pareille obligation.
83 Dès lors, ce moyen doit être également écarté.
Sur le troisième moyen, tiré de l'incompétence du secrétaire général du Conseil pour adopter les décisions portant rejet de la candidature et de la réclamation du requérant
Arguments des parties
84 Le requérant considère que les décisions du 3 mai 1995, portant rejet de sa candidature, et du 7 novembre 1995, portant rejet de sa réclamation, ont été adoptées illégalement par le secrétaire général puisque, pour le pourvoi de l'emploi litigieux comme pour l'application de l'article 90 du statut aux agents de grade A 1, les pouvoirs dévolus à l'AIPN ne pouvaient être exercés légalement que par le Conseil. De l'avis du requérant, étant donné que la nomination d'un fonctionnaire de grade A 1
relève de la seule compétence du Conseil, ce dernier doit être également seul compétent, sur proposition du secrétaire général, pour connaître des réclamations introduites contre une telle décision ainsi que contre les décisions de rejet de candidatures prises dans un tel contexte.
85 Le Conseil affirme que c'est au secrétaire général qu'il appartenait, en l'espèce, d'agir en tant qu'AIPN pour l'application de l'article 90 du statut. En effet, il résulte du point b) de l'article unique de la décision du Conseil du 14 mai 1962 que ce n'est que pour l'application aux agents du grade A 1 des dispositions qu'il énonce que le Conseil exerce les fonctions d'AIPN sur proposition du secrétaire général. Or, le requérant est classé au grade A 2.
Appréciation du Tribunal
86 Pour ce qui est de la décision de rejet de la candidature du requérant, il a été jugé aux points 72 à 81 ci-dessus que la nomination de M. L. a été décidée par le Conseil à l'issue d'un examen comparatif des mérites des candidats effectué, d'abord par le secrétariat général avec l'assistance du comité de sélection, puis par le Coreper, et que c'est le Conseil qui a procédé, le 10 avril 1995, à la nomination de M. L. Il s'ensuit nécessairement que, en choisissant M. L. pour le poste en cause, le
Conseil a procédé au rejet implicite de la candidature du requérant. Dès lors, c'est à tort que le requérant fait valoir que c'est le secrétaire général qui aurait adopté cette décision. En effet, malgré son libellé, la note du secrétaire général du 3 mai 1995 doit être considérée comme la communication au requérant de la décision du Conseil de ne pas retenir sa candidature au poste litigieux.
87 En ce qui concerne la décision de rejet de la réclamation, il ressort des points b) et c) de l'article unique de la décision du Conseil du 14 mai 1962 que les pouvoirs dévolus par le statut à l'AIPN sont exercés par les Conseils, sur proposition du secrétaire général, pour l'application aux agents du grade 1 de la catégorie A des dispositions de l'article 90 et par le secrétaire général dans les autres cas.
88 Il en découle que la détermination de l'organe compétent pour exercer les pouvoirs dévolus par le statut à l'AIPN dépend du grade du fonctionnaire destinataire de l'acte administratif attaqué. Le requérant étant classé au grade 2 de la catégorie A, c'est au secrétaire général qu'il incombait d'appliquer l'article 90 à son égard et, de ce fait, d'adopter la décision de rejet de sa réclamation. La décision de rejet de la réclamation du requérant a donc été légalement adoptée par le secrétaire
général. Le fait que la réclamation ait trait à la nomination d'un fonctionnaire de grade A 1 et que celle-ci relève de la seule compétence du Conseil n'est pas de nature à infirmer la conclusion précédente compte tenu de la formulation très claire et inconditionnelle des points b) et c) de l'article unique de la décision du Conseil du 14 mai 1962, qui ne prévoit aucune exception aux pouvoirs dévolus au secrétaire général en matière de rejet de réclamation.
89 Partant, ce moyen doit être écarté.
Sur le quatrième moyen, tiré de l'illégalité de l'avis de vacance
Arguments des parties
90 Le requérant fait valoir que l'avis de vacance concernant l'emploi de directeur général de la DG J était rédigé en termes généraux et ne précisait pas à suffisance de droit les qualifications requises de façon à permettre à l'AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des différents candidats et de justifier, le cas échéant, le rejet de sa candidature. Cette analyse serait corroborée par le fait que l'avis de vacance dont il s'agit était identique à ceux publiés le même jour pour des
emplois de même niveau au sein des DG C, G et I, dont les compétences sont totalement différentes de celles de la DG J. Ainsi, parmi les qualifications requises, il était exigé des connaissances étendues dans le domaine des relations internationales. Or, la DG J serait chargée essentiellement, sinon exclusivement, de politiques internes de la Communauté, telles que les politiques régionale, sociale, culturelle ainsi qu'en matière d'éducation et d'audiovisuel.
91 Se fondant sur l'arrêt du Tribunal du 25 février 1992, Schloh/Conseil (T-11/91, Rec. p. II-203, point 50), dans lequel le Tribunal a relevé que «les tâches essentielles que doit remplir un directeur [...] d'une institution communautaire» consistent notamment à «diriger une unité administrative, conseiller le directeur général, maintenir des contacts et effectuer des études spécialisées de haut niveau», le requérant estime que tous les directeurs possèdent les qualités générales d'analyse et de
jugement à un niveau très élevé jugées déterminantes par le Conseil pour occuper un emploi de directeur général. Or, accepter qu'une institution puisse retenir comme critère déterminant des qualifications que tous les fonctionnaires admis à présenter leurs candidatures, en l'espèce des directeurs et des directeurs généraux seulement, possèdent par définition reviendrait à priver de tout sens la publication d'avis de vacance pour les emplois de grade A 1. L'avis de vacance en cause en l'espèce
aurait donc été illégal en ce qu'il ne fixait pas, à suffisance de droit, le cadre de légalité au regard duquel l'institution était tenue de procéder à l'examen comparatif des mérites des candidats.
92 Le requérant expose que le comité de sélection a d'abord procédé à l'élimination de quatre candidatures, dont la sienne, en estimant que ces candidats ne possédaient pas toutes les qualités nécessaires et que, en tout état de cause, du fait de leur comparaison avec les autres candidats, ils ne devaient pas être retenus. Il apparaîtrait ainsi que le comité de sélection a fixé, après publication des avis de vacance, les qualifications générales nécessaires pour exercer les fonctions afférentes aux
cinq emplois de grade A 1 déclarés vacants. Or, ces critères de sélection n'auraient jamais été communiqués aux candidats.
93 Le Conseil estime que l'avis de vacance en cause n'était entaché d'aucune illégalité. En effet, son libellé aurait été analogue aux avis de vacance qui ont été publiés depuis de très nombreuses années par le secrétariat général du Conseil pour le pourvoi de postes de ce niveau, quelle que soit la DG concernée.
94 Le Conseil estime que ce libellé a permis aux intéressés d'être informés de la nature des conditions requises pour occuper le poste à pourvoir et d'apprécier s'il y avait lieu pour eux de faire acte de candidature, et à l'AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des candidats.
95 Par ailleurs, de l'avis du Conseil, contrairement à ce qu'affirme le requérant, il n'y a rien d'étonnant à ce que tous les avis de vacance publiés le même jour pour le pourvoi de postes de directeur général requéraient des connaissances étendues dans le domaine des relations internationales. Il s'agirait là en effet d'une exigence traditionnelle pour les directeurs généraux du Conseil, ceux-ci étant appelés, dans le cadre de leurs fonctions, à établir de nombreux contacts avec l'extérieur.
96 Enfin, en ce qui concerne l'argument du requérant selon lequel le comité de sélection aurait fixé, après publication des avis de vacance, les qualifications générales requises des candidats, le Conseil estime qu'il doit être rejeté comme manquant totalement en fait.
Appréciation du Tribunal
97 A titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l'AIPN est tenue de respecter l'avis de vacance qu'elle a arrêté, puisqu'un tel avis de vacance, approuvé dans le cadre de l'article 29 du statut, détermine les conditions relatives à l'accès à l'emploi dont il s'agit. Ainsi, la fonction de l'avis de vacance est, d'une part, d'informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible sur la nature des conditions requises pour occuper le poste à pourvoir afin de
les mettre en mesure d'apprécier s'il y a lieu pour eux de faire acte de candidature (voir arrêt de la Cour du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, point 40) et, d'autre part, de fixer le cadre de légalité au regard duquel l'institution entend procéder à l'examen comparatif des mérites des candidats (voir arrêt de la Cour du 7 février 1990, Culin/Commission, C-343/87, Rec. p. I-225, point 19, et arrêts du Tribunal du 11 décembre 1991, Frederiksen/Parlement, T-169/89, Rec. p.
II-1403, point 69, du 18 février 1993, Me Avoy/Parlement, T-45/91, Rec. p. II-83, point 48, et du 18 avril 1996, Kyrpitsis/CES, T-13/95, RecFP p. II-503, point 34).
98 L'AIPN ne respecte pas ce cadre de légalité si elle ne s'avise des conditions particulières requises pour remplir le poste à pourvoir qu'après la publication de l'avis de vacance, au vu des candidats qui se sont présentés, et si elle prend en considération, lors de l'examen des candidatures, d'autres conditions que celles qui figurent dans l'avis de vacance. Une telle démarche priverait en effet l'avis de vacance du rôle essentiel qu'il doit jouer dans la procédure de recrutement, à savoir
informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions pour occuper le poste en question (voir notamment les arrêts du Tribunal du 3 mars 1993, Booss et Fischer/Commission, T-58/91, Rec. p. II-147, point 67, et arrêt Kyrpitsis/CES, précité au point précédent, points 34 et 35).
99 Il y a lieu d'examiner si l'avis de vacance était, comme le prétend le requérant, rédigé en des termes tellement généraux et imprécis qu'il n'a pas permis à l'AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des différents candidats et de justifier, le cas échéant, le rejet de sa candidature.
100 Le Tribunal estime que, s'agissant, comme en l'espèce, d'un poste de haute responsabilité politique au sein du Conseil, l'exigence de qualifications plus détaillées, voire plus techniques, que celles requises dans l'avis de vacance n'était pas indispensable. En effet, ainsi qu'il a été relevé par le Conseil, pour un poste de directeur général, c'est moins la possession d'une expérience spécifique dans le domaine propre de la DG en question qui joue un rôle déterminant que la possession de
qualités générales de direction, d'analyse et de jugement à un niveau très élevé, l'expérience technique pouvant toujours être trouvée au sein même de la DG (arrêt Booss et Fischer/Commission, précité ci-dessus au point 98, point 69).
101 Eu égard à la nature du poste en question, l'avis de vacance en cause énonçait donc des exigences suffisamment précises - à savoir, être déjà fonctionnaire de grade A 1 ou A 2, avoir dirigé une unité administrative importante pendant cinq années au moins et avoir des connaissances étendues de la politique générale des Communautés européennes et dans le domaine des relations internationales - pour permettre à l'AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des différents candidats.
102 Par ailleurs, le fait que l'avis de vacance ait été rédigé en des termes identiques à ceux des autres avis publiés le même jour pour d'autres directions générales, dont les compétences sont différentes de celles de la DG J, ne constitue pas un élément susceptible de l'entacher d'illégalité. En effet, à la lumière des considérations exposées au point 100 ci-dessus, cette pratique n'est pas critiquable eu égard aux caractéristiques du poste concerné et aux responsabilités qu'un directeur général
est appelé à assumer.
103 Le Tribunal ne saurait non plus retenir l'argument du requérant selon lequel l'exigence de connaissances étendues dans le domaine des relations internationales ne serait pas nécessaire eu égard au fait que la DG J est chargée essentiellement, sinon exclusivement, de politiques internes de la Communauté. En effet, ainsi que l'a souligné le Conseil, la possession de connaissances étendues dans le domaine des relations internationales constitue une exigence traditionnelle pour les directeurs
généraux du Conseil, ceux-ci étant appelés, dans le cadre de leurs fonctions, à établir de nombreux contacts avec l'extérieur et, entre autres, à assister, voire parfois même à représenter, la présidence ou le Conseil dans le cadre de relations internationales. Le requérant lui-même l'a confirmé implicitement dans sa réplique, en admettant qu'il a, depuis plus de dix ans, représenté le Conseil à de nombreuses réunions internationales dans tous les domaines relevant de la compétence de la
nouvelle DG J.
104 Enfin, l'argument du requérant selon lequel accepter qu'une institution puisse retenir comme critère déterminant des qualifications que tous les fonctionnaires admis à présenter leurs candidatures, en l'espèce des directeurs et des directeurs généraux, possèdent par définition reviendrait à priver de tous sens la publication d'avis de vacance pour les emplois de grade A 1 ne saurait davantage être accueilli.
105 En premier lieu, la prémisse sur laquelle repose le raisonnement du requérant, à savoir que tous les directeurs réunissent par définition toutes les qualifications requises pour être directeur général, ne peut être déduite de l'arrêt Schloh/Conseil, précité ci-dessus au point 91. En effet, dans cet arrêt, le Tribunal n'a pas jugé que tous les directeurs ont par définition les qualifications nécessaires pour devenir directeur général. Dans cette affaire, le Tribunal s'est borné à souligner que
l'avis de vacance attaqué décrivait avec suffisamment de précision les tâches essentielles que doit remplir un directeur au service juridique d'une institution communautaire, à savoir, notamment, diriger une unité administrative, conseiller le directeur général, maintenir des contacts et effectuer des études spécialisées de haut niveau.
106 En second lieu, et à supposer même que l'avis de vacance ait été formulé dans des termes tels que tous les candidats potentiels réunissaient en principe toutes les qualifications requises, cette circonstance, à elle seule, ne saurait entacher sa légalité. En effet, le fait que tous les candidats potentiels remplissent en principe toutes les conditions de l'avis de vacance ne signifie pas que l'un ou l'autre ne soit pas plus capable que les autres d'exercer les fonctions afférentes au poste en
question. Le but même de l'avis de vacance étant de fixer les conditions nécessaires pour occuper le poste à pourvoir, il n'est pas anormal que tous ou la plupart des fonctionnaires qui posent leurs candidatures, les remplissent. Il revient à l'AIPN, dans l'exercice de son large pouvoir d'appréciation, de choisir le candidat le plus approprié en fonction de l'intérêt du service.
107 En ce qui concerne l'argument du requérant selon lequel le comité de sélection aurait fixe, après publication de l'avis de vacance, les qualifications générales necessaires pour exercer les fonctions afférentes à l'emploi litigieux, le Tribunal rappelle qu'il a été jugé aux points 73 et suivants, que ledit comité s'est fondé dans ses travaux, exclusivement sur les qualifications requises par l'avis de vacance.
108 Dès lors, ce moyen doit être rejeté.
Sur le cinquième moyen, tiré d'une erreur manifeste d'appréciation
Arguments des parties
109 Selon le requérant, le Conseil aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans son évaluation des qualifications de M. L.
110 Après avoir rappelé qu'il a exercé, depuis 1984, les fonctions de directeur à la direction I «politique régionale, sociale; santé; éducation; culture; audiovisuel-jeunesse» au sein de la DG G et que c'est cette direction qui a été élevée à la suite de l'élargissement de la Communauté au 1er janvier 1995, au rang de direction generale, intitulée DG J, le requérant expose qu'il justifiait d'une expérience professionnelle spécifique au regard des fonctions afférentes à l'emploi vacant puisque,
depuis plus de dix ans, il dirigeait l'ensemble des secteurs relevant de la nouvelle DG et que sa contribution au bon aboutissement des projets difficiles, qui ont été traités pendant cette période, est connue de tous ceux qui y ont été impliqués.
111 Le requérant soutient qu'il possède les capacités nécessaires pour diriger une unité administrative importante, entretenir des contacts et réaliser des études spécialisées de haut niveau. De même, ses qualités d'analyse et de jugement ne pourraient être mises en doute. En outre, depuis plus de dix ans, il aurait représenté le Conseil à de nombreuses réunions internationales dans tous les domaines relevant de la compétence de la nouvelle DG J. Par conséquent, eu égard à l'étendue et à la qualité
de son expérience professionnelle et, notamment, de son expérience professionnelle spécifique, il possédait toutes les qualifications requises pour être nommé à l'emploi de directeur général de la DG J.
112 Pour sa part, le candidat choisi n'aurait que quatre ans d'ancienneté au service du Conseil, dans une direction dont l'activité pourrait être qualifiée de faible et qui n'agirait que dans un domaine intergouvememental. Le requérant observe que l'expérience dont justifiait M. L. était celle d'un fonctionnaire national, qui n'avait eu à connaître que de façon ponctuelle de certains dossiers de la DG en question. Ainsi, n'ayant jamais eu à traiter ces questions, le fonctionnaire choisi n'aurait
aucune expérience de certains des domaines d'activités de cette DG, tels que la politique régionale, les fonds structurels et l'audiovisuel.
113 En sa qualité de représentant permanent adjoint du royaume de Belgique auprès des Communautés européennes, le candidat choisi aurait effectivement participé à la première partie des travaux du Coreper. Cependant, il n'aurait pas participé aux travaux du Coreper sur les questions relevant de la politique régionale, des fonds structurels, de l'audiovisuel et de la culture. En outre, à partir de 1991, date à laquelle, à l'exception de dossiers mineurs, les dossiers de politique sociale importants
ont également été traités, M. L. n'aurait plus participé aux travaux de ce comité, ayant été nommé directeur au Conseil. Il ne posséderait donc pas la même expérience spécifique que le requérant ni même une expérience professionnelle générale dans certains domaines relevant de la compétence de la nouvelle DG.
114 Le requérant estime qu'il est totalement impossible qu'un directeur général puisse agir efficacement en tant qu'interlocuteur auprès du secrétaire général, de la présidence ou des membres du Conseil s'il n'a pas une expérience confirmée des domaines qui relèvent de la compétence de sa DG. De même, il lui serait impossible d'insérer dans la politique d'ensemble de la Communauté une politique sectorielle et régionale dont il n'a pas une connaissance suffisante.
115 Se fondant sur la jurisprudence de la Cour et du Tribunal en la matière, le Conseil souligne que le requérant n'apporte aucun élément permettant de conclure à une quelconque erreur manifeste d'appréciation dans le chef de l'AIPN. En réalité, le requérant se contenterait de rappeler ses propres qualifications et de dévaloriser celles du candidat choisi.
116 Selon le Conseil, outre le fait qu'il ne saurait être admis que le requérant substitue sa propre appréciation à celle de l'AIPN, les allégations qu'il avance ne sont nullement fondées. En effet, ce n'est pas parce que le requérant a exercé, pendant plusieurs années, les fonctions de directeur à la direction I, dirigeant celle-ci, selon ses dires, «avec une quasi-autonomie», et que cette direction a été élevée, à la suite de l'adhésion de nouveaux États membres au 1er janvier 1995, au rang de DG,
qu'il aurait droit à occuper le poste de directeur général. Tant l'intérêt du service que les droits des autres fonctionnaires s'opposeraient à ce qu'une pareille prétention soit admise. Le Conseil précise également que, si l'on devait suivre la logique du requérant jusqu'au bout et considérer qu'il était le mieux placé pour occuper le poste à pourvoir en raison de l'expérience professionnelle spécifique qu'il avait acquise au regard de l'emploi vacant, en ce que, depuis plus de dix ans, il
dirigeait l'ensemble des secteurs relevant de la nouvelle DG, les postes de directeurs généraux ne pourraient être pourvus que par voie de promotion à l'intérieur d'une même DG.
117 En outre, le Conseil rappelle les raisons pour lesquelles on ne saurait assimiler les fonctions de directeur à celles de directeur général, les premières étant très différentes des secondes.
118 Le Conseil souligne que le candidat retenu possède les plus hauts mérites et qualifications. En effet, avant d'occuper le poste de directeur de la DG Justice et affaires intérieures, il aurait été, pendant plus de onze ans, représentant permanent adjoint du royaume de Belgique auprès des Communautés européennes. Il aurait acquis, à ce titre, une connaissance et une expérience très vastes des affaires européennes et du fonctionnement du Conseil, exerçant notamment la présidence du Coreper (lre
partie) durant les premiers semestres de 1982 et de 1987. En outre, il aurait assuré un cours d'économie et de politique européenne à l'université de Mons (Belgique), de 1988 à 1992.
119 Le Conseil relève que M. L. possède également une expérience professionnelle spécifique. En sa qualité de représentant permanent adjoint, il aurait traité, entre autres, directement les questions relevant du secteur de la politique sociale — y compris celles concernant le Fonds social européen - et des politiques de la culture, de l'audiovisuel et de l'éducation, ces matières étant de la compétence du Coreper (lre partie).
Appréciation du Tribunal
120 Il est de jurisprudence constante que, pour évaluer l'intérêt du service ainsi que les mérites à prendre en considération dans le cadre d'une décision de promotion prévue à l'article 45 du statut, l'AIPN dispose d'un large pouvoir d'appréciation et que, dans ce domaine, le contrôle de la Cour et du Tribunal doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et moyens qui ont pu conduire l'administration à son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas
usé de son pouvoir de manière manifestement erronée. Le Tribunal ne saurait notamment substituer son appréciation des mérites et qualifications des candidats à celle de l'AIPN, alors qu'aucun élément du dossier ne permet d'affirmer qu'en appréciant les mérites et qualifications des candidats, l'AIPN aurait commis une erreur manifeste (arrêt de la Cour du 21 avril 1983, Ragusa/Commission, 282/81, Rec. p. 1245, points 9 et 13; arrêts du Tribunal du 8 juin 1995, Allo/Commission, T-496/93, RecFP p.
II-405, points 39 et 46, du 6 juin 1996, Baiwir/Commission, T-262/94, RecFP p. II-739, points 66 et 138).
121 Il est aussi de jurisprudence constante que le statut ne confère aucun droit exigible à une promotion, même aux fonctionnaires qui réunissent toutes les conditions pour pouvoir être promus (voir arrêt Baiwir/Commission, précité au point précédent, point 67), et que, pour un candidat, ni le fait d'avoir assuré l'intérim dans l'emploi concerné ni une longue période de service dans le grade inférieur ne constituent des éléments d'appréciation décisifs pouvant l'emporter sur l'intérêt du service,
qui forme le critère déterminant pour le choix parmi les candidats à une promotion (arrêt de la Cour du 5 février 1987, Huybrechts/Commission, 306/85, Rec. p. 629, points 10, 11 et 13).
122 Il y a donc lieu de vérifier, à la lumière des conditions exigées par l'avis de vacance, si, en adoptant la décision de nomination de M. L., l'administration s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée.
123 En l'espèce, outre l'affirmation du requérant, non étayée par des éléments probants, selon laquelle M. L. ne justifierait pas d'une expérience professionnelle générale dans certains domaines relevant de la compétence de la nouvelle DG J, il ressort des explications fournies par le Conseil dans ses mémoires en défense et en duplique, non contestées par le requérant, que le candidat choisi par l'AIPN remplissait les conditions de l'avis de vacance, notamment en ce qui concerne l'exigence tenant à
une connaissance étendue de la politique générale des Communautés européennes et dans le domaine des relations internationales. En effet, avant d'occuper le poste de directeur de la DG Justice et affaires intérieures, il a été, pendant onze ans, représentant permanent adjoint du royaume de Belgique auprès des Communautés européennes et, à ce titre, a pu acquérir une expérience très vaste des affaires européennes et du fonctionnement du Conseil, notamment dans les domaines relevant de la
compétence de la nouvelle DG J, c'est-à-dire, la politique sociale -y compris les questions concernant le Fonds social européen -, les politiques de la culture, de l'audiovisuel et de l'éducation et la politique régionale.
124 En ce qui concerne l'argument du requérant selon lequel le Conseil aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où, compte tenu de son expérience spécifique au regard du poste à pourvoir et de ses connaissances générales, sa candidature aurait dû être préférée à celle de M. L, le Tribunal considère que, une expérience spécifique au regard des fonctions afférentes au poste litigieux ne constituant pas une condition de l'avis de vacance, elle ne saurait jouer un rôle dans
l'existence ou non d'une erreur manifeste d'appréciation dans la décision attaquée.
125 Dans ces conditions, l'on ne saurait considérer que le Conseil a commis une erreur manifeste d'appréciation dans son évaluation des qualifications de M. L. à la lumière des conditions requises par l'avis de vacance et que, de ce fait, l'AIPN a exercé son pouvoir d'appréciation d'une manière déraisonnable ou arbitraire.
126 De surcroît, et à supposer même que le requérant réunissait toutes les conditions requises par l'avis de vacance, rien ne s'opposait à ce que, en cas d'égalité, l'AIPN, dans l'exercice de son large pouvoir d'appréciation, se prononce en faveur d'un candidat plutôt qu'en faveur d'un autre pour des raisons tenant compte de l'intérêt du service. Or, le requérant n'a avancé aucun argument de nature à établir que la décision de nomination a été prise pour des raisons non compatibles avec le choix du
candidat qui répondait le mieux à l'intérêt du service et aux conditions de l'emploi à pourvoir (voir l'arrêt de la Cour du 17 décembre 1981, De Hoe/Commission, 151/80, Rec. p. 3161, point 16, et arrêt du Tribunal du 11 juin 1996, Anacoreta Correia/Commission, T-118/95, RecFP p. II-835, point 75).
127 Dans ces conditions, ce moyen ne saurait être retenu.
Sur le sixième moyen, tiré de la violation des articles 7 et 27 du statut
Arguments des parties
128 Le requérant fait valoir que, en application de l'article 27, troisième alinéa, du statut, aucun emploi ne peut être réservé aux ressortissants d'un État membre déterminé et que l'article 7, paragraphe 1, dispose que «l'autorité investie du pouvoir de nomination affecte, par voie de nomination ou de mutation, dans le seul intérêt du service et sans considération de nationalité, chaque fonctionnaire à un emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à son grade». Or, en violation de ces
dispositions, le secrétaire général aurait retenu comme critère déterminant, en l'espèce, la nécessité d'établir un certain équilibre géographique.
129 A cet égard, le requérant relève que, lors de l'entretien qu'il a eu avec lui le 28 mars 1995, le secrétaire général lui a indiqué que sa candidature ne pourrait être retenue en raison de sa nationalité, un ressortissant grec occupant déjà un poste de directeur général adjoint au sein de l'administration générale du Conseil et qu'il avait fixé son choix sur le candidat belge, se référant à un prochain départ escompté de M. C, directeur général adjoint belge de la DG chargée des relations
extérieures.
130 De l'avis du requérant, dans sa décision de rejet de la réclamation, le secrétaire général a reconnu, en faisant référence au contexte de l'adhésion de nouveaux États membres, que la décision de nomination a été adoptée en prenant en considération une prétendue nécessité d'établir un certain équilibre géographique. Or, le candidat choisi étant de nationalité belge, ce contexte n'aurait pas dû être pris en compte, d'autant plus que les trois candidats à l'emploi litigieux étaient des
fonctionnaires déjà en poste et qu'aucun d'eux n'était ressortissant de l'un des trois pays ayant adhéré, le 1er janvier 1995, à l'Union européenne
131 En outre, si le critère de nationalité n'a pas joué un rôle déterminant, le requérant ne comprendrait pas pour quelles raisons le secrétaire général, avant même son audition par le comité consultatif de sélection, a cru devoir lui rappeler la nécessité d'établir ledit équilibre géographique. De plus, un tel critère ne saurait être pris en considération que pour départager des candidats possédant les mêmes qualités de compétence, de rendement et d'intégrité.
132 Le Conseil conteste l'affirmation du requérant selon laquelle, lors de l'entretien du 28 mars 1995, le secrétaire général lui aurait indiqué que sa candidature ne pourrait être retenue en raison de sa nationalité, un ressortissant grec occupant déjà un poste de directeur général adjoint au sein de l'administration générale du Conseil. Le secrétaire général aurait émis des considérations relatives à l'équilibre géographique et au contexte de l'adhésion, par ailleurs légitimes, dans le cadre d'une
réflexion générale et non dans celui de la procédure de pourvoi du poste en cause.
133 Il ne serait pas exact non plus que, lors de l'entretien précité, le secrétaire général aurait indiqué au requérant qu'il avait fixé son choix sur le candidat belge, à savoir M. L., en se référant à un prochain départ escompté de M. C, directeur général adjoint belge de la DG chargée des relations extérieures. En effet, s'il était notoire, depuis le début de l'année 1995, que le gouvernement belge envisageait de nommer M. C. ambassadeur à Moscou, il aurait été tout aussi connu que ce dernier
n'avait pas, au moment des faits, accepté cette nomination.
Appréciation du Tribunal
134 Selon l'article 27, troisième alinéa, du statut, aucun emploi ne doit être réservé aux ressortissants d'un État membre déterminé. Cette règle doit être respectée dans le cadre de toutes les procédures de recrutement prévues par l'article 29 du statut, même en ce qui concerne le recrutement de fonctionnaires de grade A 1 ou A 2 (voir arrêt Booss et Fischer/Commission, précité ci-dessus au point 98, point 85).
135 Pour sa part, l'article 27, premier alinéa, du statut prévoit que le recrutement doit s'effectuer sur une base géographique aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres. Cette disposition ne permet cependant pas à l'AIPN de réserver un poste à une nationalité déterminée, sans que cela soit justifié par des raisons ayant trait au fonctionnement de ses services (arrêts de la Cour du 4 mars 1964, Lassalle/Parlement, 15/63, Rec. p. 57, p. 73, et du 30 juin 1983,
Schloh/Conseil, 85/82, Rec. p. 2105, point 37).
136 Le Tribunal relève que le requérant n'a pas rapporté à suffisance de droit la preuve de ce que l'emploi litigieux aurait été réservé illégalement au candidat de nationalité belge. En effet, outre le fait que les propos attribués au secrétaire général lors de l'entretien du 28 mars 1995 sont contestés par le Conseil, il ressort tant des explications données par le défendeur, non contredites par le requérant, que du déroulement même de la procédure de nomination que les allégations du requérant
manquent en fait étant donné que le poste de l'ancien directeur général adjoint belge, M. C, a été ultérieurement pourvu par la nomination d'un ressortissant grec, M. E.
137 En ce qui concerne l'allégation du requérant selon laquelle le choix de M. L. aurait été fondé sur le départ escompté du directeur général adjoint belge, M. C, elle a été réfutée par le Conseil, sans que cette réfutation ait été contredite par le requérant. En effet, selon le Conseil, au moment des faits, le départ de M. C. n'était pas acquis du fait qu'il n'avait pas accepté l'offre du gouvernement belge de le nommer ambassadeur à Moscou.
138 Quant à l'allégation du requérant selon laquelle la candidature d'un fonctionnaire grec ne pouvait être retenue parce qu'un poste de directeur général adjoint était occupé par un ressortissant grec à la direction générale de l'administration, le Tribunal constate que, ainsi que l'a fait observer le Conseil, elle est d'autant plus inexacte que c'est précisément un Grec, M. E., qui a succédé à M. C. lorsque celui-ci a quitté ses fonctions.
139 Dans ces conditions, il n'apparaît donc pas que le secrétaire général ait fondé sa proposition sur des considérations tenant à la nationalité des candidats.
140 Ces conclusions sont confortées par le fait que le déroulement de la procédure, marqué par l'intervention d'abord d'un comité de sélection composé de directeurs généraux du Conseil, puis du Coreper et du Conseil lui-même, ne permet pas de déduire que le critère de la nationalité ait joué un rôle quelconque dans la décision de nomination de M. L.
141 Dès lors, ce moyen doit être écarté.
Sur le septième moyen, tiré de la violation de l'obligation de motivation
Arguments des parties
142 Se fondant sur l'article 25 du statut, selon lequel «toute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé» et «toute décision faisant grief doit être motivée», le requérant soutient que, à l'exception d'une simple référence à un examen comparatif des candidatures introduites, la note du 3 mai 1995 l'informant du rejet de sa candidature ne donne aucune indication quant aux raisons pour lesquelles l'AIPN n'a pas
retenu sa candidature. Le libellé de cette note n'aurait pas permis au requérant d'examiner le bien-fondé des décisions attaquées pas plus qu'il ne permettrait au juge communautaire d'exercer son pouvoir de contrôle et, notamment, de vérifier si l'examen comparatif des mérites des candidats a bien eu lieu dans le respect de l'article 45 du statut.
143 Le requérant relève que, au point 1 de la note du 7 novembre 1995 rejetant sa réclamation, le secrétaire général affirme que le candidat qu'il a retenu correspondait mieux au profil exigé par l'intérêt de l'institution, sans préciser ni le profil exigé ni les critères retenus pour procéder à l'examen comparatif. Le secrétaire général n'aurait pas précisé non plus comment peut être concilié avec les intérêts de l'institution le fait, résultant des décisions attaquées, que, désormais, les mêmes
fonctions sont exercées par deux fonctionnaires des grades les plus élevés, alors qu'un seul suffisait auparavant, et que ce dernier, qui avait exercé ses fonctions à la satisfaction générale et au niveau le plus élevé pendant plus de dix ans, est aujourd'hui placé sous l'autorité d'un autre fonctionnaire qui n'a ni sa compétence spécifique ni même une expérience professionnelle générale en ce qui concerne des domaines essentiels gérés par la nouvelle DG.
144 Le requérant affirme avoir demandé, dans sa réclamation, que lui soient communiqués les éléments négatifs qui ont conduit au rejet de sa candidature et que le secrétaire général a rejeté cette demande au motif qu'une justification de son choix l'obligerait à lui communiquer des éléments du dossier personnel du candidat retenu. Cette explication ne serait pas pertinente puisqu'un examen comparatif des mérites des candidats ne pourrait se faire que par référence à des critères de sélection établis
avant que l'autorité compétente n'ait eu la possibilité de prendre connaissance des dossiers de candidature. En toute hypothèse, ces explications n'auraient pas permis au requérant d'examiner le bien-fondé des décisions attaquées ni ne permettraient au juge communautaire d'exercer son pouvoir juridictionnel.
145 Enfin, le requérant estime que, le comité de sélection ayant procédé à l'élimination de quatre candidatures, dont la sienne, en fixant des critères de sélection après la publication de l'avis de vacance sans les communiquer aux intéressés, les décisions attaquées sont entachées d'un défaut de motivation.
146 Se référant à la jurisprudence de la Cour et du Tribunal en matière de motivation, le Conseil estime que la décision de rejet de la réclamation introduite par le requérant satisfaisait entièrement aux principes posés par le juge communautaire.
Appréciation du Tribunal
147 Il est de jurisprudence constante que l'AIPN n'est pas tenue de motiver les décisions de promotion à l'égard des candidats évincés (arrêt Grassi/Conseil, précité ci-dessus au point 97, point 12) et il en va de même en ce qui concerne les décisions de l'AIPN de ne pas retenir une candidature (arrêt de la Cour du 13 avril 1978, Ganzini/Commission, 101/77, Rec. p. 915, point 10). Néanmoins, l'AIPN doit motiver sa décision portant rejet d'une réclamation déposée, en vertu de l'article 90, paragraphe
2, du statut, par un candidat non promu, la motivation de cette décision de rejet étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée (arrêt Culin/Commission, précité ci-dessus au point 97, point 13; arrêts du Tribunal du 23 février 1994, Coussios/Commission, T-18/92 et T-68/92, RecFP p. II-171, points 69 à 74, et Kyrpitsis/CES, précité ci-dessus au point 97, points 67 et 68).
148 Il est aussi de jurisprudence constante que, les promotions se faisant, aux termes de l'article 45 du statut, «au choix», la motivation ne saurait concerner que l'existence des conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la promotion. En particulier, l'AIPN n'est pas tenue de révéler au candidat écarté l'appréciation comparative qu'elle a portée sur lui et sur le candidat retenu pour la promotion (arrêts du 25 février 1992, Schloh/Conseil, précité ci-dessus au point 91,
point 73, et Grassi/Conseil, précité ci-dessus au point 97, points 11 à 15) ni d'exposer en détail la façon dont elle a estimé que le candidat nommé remplissait les conditions de l'avis de vacance (arrêt De Hoe/Commission, précité ci-dessus au point 126, point 13, et arrêt du Tribunal du 30 janvier 1992, Schönherr/CES, T-25/90, Rec. p. II-63, point 21).
149 En l'espèce, le secrétaire général indique que le pourvoi du poste litigieux a été effectué dans le plein respect des dispositions statutaires, des principes de l'égalité de traitement et de la vocation à la carrière de tous les fonctionnaires ainsi que de l'intérêt de l'institution, que, afin de pouvoir s'entourer de tous les éléments pertinents, il a constitué un comité de sélection qui, après avoir examiné minutieusement toutes les candidatures reçues et avoir procédé à des entretiens avec
les candidats, a procédé à l'examen comparatif des mérites respectifs de tous les candidats, que, lors de cet examen, les capacités et qualifications du requérant ainsi que la nature de son travail ont été dûment prises en considération, à l'instar de celles de tous les autres candidats, que le candidat finalement retenu est celui qui correspondait le mieux au profil exigé par l'intérêt de l'institution, et, enfin que, dans l'examen comparatif des mérites, le critère de nationalité n'a joué
aucun rôle.
150 Au vu des explications données dans la réponse du secrétaire général à la réclamation et compte tenu du large pouvoir d'appréciation dont disposait l'AIPN du fait qu'il s'agissait d'un poste de haute responsabilité politique, ainsi que des termes nécessairement généraux de l'avis de vacance, force est de constater que la décision du 7 novembre 1995, portant rejet de la réclamation introduite par le requérant, est conforme aux exigences en matière de motivation découlant de la jurisprudence
(arrêt Grassi/Conseil, précité ci-dessus au point 97, points 12 à 16, et arrêt du Tribunal du 28 septembre 1993, Nielsen et Møller/CES, T-84/92, Rec. p. II-949, points 42 et 43).
151 En ce qui concerne l'argument du requérant selon lequel le refus du secrétaire général de communiquer les critères prétendument fixés par le comité de sélection après la publication de l'avis de vacance serait constitutif d'une violation de l'obligation de motivation, il suffit de souligner, d'une part, que, comme il a été jugé aux points 73 et suivants, le comité de sélection ne s'est pas fondé sur des critères de sélection différents de ceux prévus dans l'avis de vacance, tel qu'il avait été
publié, et, d'autre part, que, d'après la jurisprudence de la Cour, l'exigence de motivation n'existe pas en ce qui concerne des propositions d'un organe administratif interne possédant une compétence seulement consultative (arrêt de la Cour du 8 juillet 1965, Fonzi/Commission, 27/64 et 30/64, Rec. p. 615, 638).
152 Dans ces conditions, ce moyen doit également être rejeté.
Sur le huitième moyen, tiré d'un détournement de pouvoir
Arguments des parties
153 Le requérant fait valoir que la publication de l'avis de vacance n'a pas eu pour objet de pourvoir un emploi mais de formaliser la nomination d'un candidat choisi à l'avance. Il souligne que le secrétaire général n'a pas contesté, dans sa note du 7 novembre 1995, qu'il avait eu une conversation avec lui au cours de laquelle il avait fait référence à la nécessité d'établir un certain équilibre géographique au moment du pourvoi de postes vacants, et cela dans le contexte de l'adhésion de nouveaux
États membres. Or, cette conversation aurait eu lieu le 28 mars 1995, soit trois jours avant l'audition du requérant par le comité consultatif de sélection. De l'avis du requérant, la simple référence à la nécessité de maintenir un équilibre géographique ne peut s'interpréter que comme une justification de rejet de sa candidature. En outre, cet équilibre géographique expliquerait la procédure d'«examen global» suivie par le comité de sélection et l'absence d'examen effectif des candidatures par
le Coreper, en violation de l'article 45 du statut.
154 Le Conseil, se référant à la jurisprudence de la Cour et du Tribunal en ce qui concerne la notion de détournement de pouvoir estime que, dans le cas d'espèce, le requérant n'invoque aucun indice pertinent à l'appui de sa thèse selon laquelle la nomination de M. L. serait le résultat d'un détournement de pouvoir. En particulier, les allégations du requérant relatives à l'existence d'un prétendu critère de nationalité ne seraient pas fondées.
155 D'après le Conseil, il est inexact que le secrétaire général se soit référé à la nécessité d'établir un certain équilibre géographique. Contrairement aux affirmations du requérant, le Conseil aurait, en effet, formellement contesté l'existence de tels propos. Même s'il pouvait être établi, ce qui n'est pas le cas, que le secrétaire général a tenu de tels propos, ceux-ci ne constitueraient pas encore la preuve d'un détournement de pouvoir dès lors que le statut lui-même prévoit à l'article 27 que
le recrutement doit se faire sur une base géographique aussi large que possible, ce qui permet par exemple à l'AIPN, en cas d'équivalence des titres des candidats, de se référer à la nationalité pour sauvegarder l'équilibre géographique.
Appréciation du Tribunal
156 A titre liminaire, il convient de rappeler qu'il ressort d'une jurisprudence constante que la notion de détournement de pouvoir a une portée précise, qui se réfère à l'usage de ses pouvoirs par une autorité administrative dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Une décision n'est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base des indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles exigées (voir
arrêt Anacoreta Correia/Commission, précité ci-dessus au point 126, point 25).
157 Or, en l'espèce, le détournement de pouvoir allégué par le requérant est exclusivement fondé sur de prétendues déclarations concernant la nécessité de maintenir un équilibre géographique qu'aurait faites le secrétaire général lors de la conversation qu'il a eue avec le requérant le 28 mars 1995, soit trois jours avant l'audition du requérant par le comité de sélection.
158 Ce moyen ne saurait être retenu. En effet, ainsi qu'il a été jugé aux points 72 à 81 ci-dessus, la nomination de M. L. a été décidée par le Conseil, à l'issue d'un examen comparatif des mérites des candidats, effectué d'abord par le secrétaire général avec l'assistance du comité de sélection, puis par le Coreper, et le requérant n'a pas pu établir que la décision du Conseil, seul responsable en tant qu'AIPN de son adoption, ait été motivée, voire influencée, par un souci autre que celui de
l'intérêt du service.
159 Dans ces conditions, force est de constater que le requérant n'a pas fourni d'indices objectifs, pertinents et concordants de ce que, avant d'entamer l'examen des diverses candidatures, le secrétaire général ou le Conseil, en tant qu'AIPN, avaient déjà procédé à la sélection de M. L. en tant que candidat de nationalité belge.
160 Par conséquent, le moyen tiré d'un détournement de pouvoir doit être rejeté.
161 Il découle de l'ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté comme non fondé dans son intégralité.
Sur les dépens
162 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, aux termes de l'article 88 du règlement de procédure, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé en ses conclusions, chaque partie supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté.
2) Chaque partie supportera ses propres dépens.
Garcia-Valdecasas
Azizi
Jaeger
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 mai 1997.
Le greffier
H. Jung
Le président
R. Garcia-Valdecasas
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( *1 ) Langue de procédure: le français.