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15/12/1992 | CJUE | N°T-47/91

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal de première instance, Annick Auzat contre Commission des Communautés européennes., 15/12/1992, T-47/91


Avis juridique important

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61991A0047

Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 15 décembre 1992. - Annick Auzat contre Commission des Communautés européennes. - Fonctionnaire affecté dans un pays tiers - Rémunération - Paiement en monnaie du pays d'affectation - Application du coefficient cor

recteur du pays d'affectation. - Affaire T-47/91.
Recueil de jurisprude...

Avis juridique important

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61991A0047

Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 15 décembre 1992. - Annick Auzat contre Commission des Communautés européennes. - Fonctionnaire affecté dans un pays tiers - Rémunération - Paiement en monnaie du pays d'affectation - Application du coefficient correcteur du pays d'affectation. - Affaire T-47/91.
Recueil de jurisprudence 1992 page II-02535

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

Fonctionnaires - Rémunération - Paiement dans la monnaie du lieu d' affectation - Coefficient correcteur - Dispositions particulières et dérogatoires applicables aux fonctionnaires affectés dans des pays tiers - Directives internes de mise en oeuvre - Légalité - Violation des principes d' équivalence du pouvoir d' achat et d' égalité de traitement - Absence

(Statut des fonctionnaires, art. 63 et 64; annexe X, art. 11 et 12, alinéa 1)

Sommaire

Bien qu' en arrêtant, pour l' application de l' article 12, premier alinéa, de l' annexe X du statut, une directive interne aux termes de laquelle est limitée à 80 % de la rémunération des fonctionnaires affectés dans des pays tiers la partie de celle-ci qui, à la demande des intéressés, est payée dans la monnaie du pays d' affectation avec application du coefficient correcteur de ce pays, mais est réservée la possibilité d' accueillir, dans des cas dûment motivés, des demandes portant sur une
fraction supérieure, l' autorité investie du pouvoir de nomination ait prévu pour lesdits fonctionnaires un régime différent de celui applicable aux fonctionnaires affectés dans la Communauté dont, en vertu des articles 63 et 64 du statut, la rémunération est automatiquement et intégralement payée dans la monnaie du pays d' affectation et affectée du coefficient correcteur correspondant, il n' y a pas violation du principe d' égalité de traitement. En effet, celui-ci exige tout à la fois que des
situations identiques soient traitées de manière identique, mais aussi que des situations différentes soient traitées de manière différente, dans la juste mesure de la différence constatée.

Or, la situation des fonctionnaires affectés dans un pays tiers diffère de celle des fonctionnaires affectés dans la Communauté, notamment quant aux dépenses susceptibles d' être encourues dans le pays d' affectation. Afin de garantir l' équivalence du pouvoir d' achat des fonctionnaires, indépendamment de leur lieu d' affectation, les modalités de paiement de la rémunération doivent tenir compte de cette différence de situation. Le fait de présumer que les fonctionnaires affectés dans un pays tiers
ne sont susceptibles de dépenser dans le pays d' affectation que 80 % de leur rémunération, alors que les fonctionnaires affectés dans la Communauté sont présumés dépenser l' intégralité de celle-ci dans le pays où ils exercent leurs fonctions, constitue une différence de traitement proportionnée à la différence de situation qui existe entre les deux catégories de fonctionnaires. En effet, les fonctionnaires affectés dans un pays tiers n' ont, en vertu de l' annexe X du statut, à faire face sur leur
lieu d' affectation ni à des dépenses de logement ni à des dépenses de santé.

Parties

Dans l' affaire T-47/91,

Annick Auzat, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Genève, représentée par Me G. Vandersanden, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me A. Schmitt, 62, avenue Guillaume,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Griesmar, membre du service juridique, en qualité d' agent, assisté de Me D. Waelbroeck, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. R. Hayder, représentant du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l' annulation de la décision rejetant la demande de la requérante tendant à obtenir le paiement de la totalité de sa rémunération en monnaie et avec application du coefficient correcteur de son pays d' affectation,

LE TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. D. P. M. Barrington, président, K. Lenaerts et A. Kalogeropoulos, juges,

greffier: Mme B. Pastor, administrateur

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 28 octobre 1992,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

Faits à l' origine du litige et procédure

1 La requérante est fonctionnaire de grade B 1 et est affectée à la Délégation permanente de la Commission à Genève depuis le 1er octobre 1989.

2 Le 7 février 1990, elle a sollicité (ainsi que bon nombre de ses collègues) le paiement intégral de sa rémunération dans la monnaie et avec application du coefficient correcteur de son lieu d' affectation.

3 Par note du 3 juillet 1990, le directeur général du personnel et de l' administration a rejeté sa demande.

4 Le 28 août 1990, la requérante a introduit (ainsi que ses collègues) une réclamation, au titre de l' article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après "statut"), contre le rejet de sa demande.

5 Le 4 mars 1991, la requérante s' est vu notifier le rejet de sa réclamation.

6 C' est dans ces circonstances que la requérante a introduit le présent recours, qui a été enregistré au greffe du Tribunal le 17 juin 1991.

7 La Commission a soulevé par mémoire séparé en date du 28 août 1991 une exception d' irrecevabilité sur la base de l' article 113 du règlement de procédure du Tribunal.

8 Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 14 octobre 1991, la requérante a fait valoir ses observations sur l' exception d' irrecevabilité.

9 Par ordonnance du 26 novembre 1991, le Tribunal a joint l' examen de l' exception d' irrecevabilité au fond conformément à l' article 114, paragraphe 4, de son règlement de procédure.

10 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d' ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d' instruction préalables.

Conclusions des parties

11 La requérante conclut à ce qu' il plaise au Tribunal:

- déclarer le présent recours recevable et fondé;

- en conséquence, annuler la décision implicite de rejet (ultérieurement confirmée par une décision explicite de rejet du directeur général du personnel et de l' administration en date du 3 juillet 1990) par laquelle il est refusé à la requérante le versement intégral de sa rémunération en monnaie du lieu d' affectation, soit en francs suisses, avec le coefficient correcteur qui s' y applique;

- accorder en conséquence à la requérante le paiement avec effet rétroactif du complément correspondant à 100 % de son traitement en monnaie locale avec le coefficient correcteur qui s' y applique, augmenté des intérêts de retard fixés à 8 %;

- condamner la défenderesse à l' ensemble des dépens.

La Commission conclut, de son côté, à ce qu' il plaise au Tribunal:

1) rejeter le recours comme irrecevable;

2) rejeter le recours comme non fondé;

3) statuer comme de droit sur les dépens;

4) à titre subsidiaire

- si par impossible votre Tribunal devait déclarer les articles 11 et 12 de l' annexe X au statut et/ou les directives internes de la Commission illégaux, déclarer que: sauf en ce qui concerne les fonctionnaires affectés dans un pays tiers (ci-après "FAPT") qui ont fait valoir antérieurement leurs droits en justice ou par une demande ou réclamation, l' arrêt de votre Tribunal ne pourra être invoqué à l' appui de revendications relatives à des périodes de rémunération antérieures à la date de son
prononcé;

- en ce qui concerne spécifiquement la requérante, il n' y aura lieu pour le passé de ne retenir, lors du calcul des montants qui auraient dû lui être versés en francs suisses avec application du coefficient correcteur suisse, que les montants effectivement versés en BFR à son compte postérieurement à février 1990 et de fixer les intérêts de retard à 6 % l' an.

Sur la recevabilité

12 A l' appui de son recours, la requérante a soulevé deux moyens. Au cours de la procédure écrite, la Commission a soulevé une exception d' irrecevabilité à l' égard de ces deux moyens, motif pris de leur défaut de concordance avec les critiques formulées dans la réclamation.

13 Le Tribunal a pris acte de ce que la Commission s' est désistée de son exception d' irrecevabilité lors de l' audience et considère, au vu du dossier, qu' il y a lieu de déclarer le recours recevable.

Sur le fond

14 Le premier moyen invoqué par la requérante est pris de l' illégalité des articles 11 et 12 de l' annexe X du statut (ci-après "annexe X") en ce qu' ils violeraient le principe de l' équivalence du pouvoir d' achat consacré notamment par l' article 64 du statut, le principe de non-discrimination et l' article 62 du statut. Le second moyen est pris de l' erreur d' interprétation de l' article 12 de l' annexe X qu' aurait commise la Commission en adoptant l' article 1er de ses directives internes
relatives à la fixation des modalités de paiement visées à l' article 12 de l' annexe X du statut (ci-après "directives internes").

15 L' annexe X, ajoutée au statut par le règlement (Euratom, CECA, CEE) n 3019/87 du Conseil, du 5 octobre 1987, établissant des dispositions particulières et dérogatoires applicables aux fonctionnaires des Communautés européennes affectés dans un pays tiers (JO L 286, p. 3), prévoit, en son article 11, que "La rémunération ainsi que les indemnités visées à l' article 10 sont payées en francs belges en Belgique. Elles sont affectées du coefficient correcteur applicable à la rémunération des
fonctionnaires affectés en Belgique", et en son article 12 que "Sur demande du fonctionnaire, l' autorité investie du pouvoir de nomination peut décider de payer la rémunération, en tout ou en partie, en monnaie du pays d' affectation. Elle est alors affectée du coefficient correcteur du lieu d' affectation et convertie selon le taux de change correspondant". L' article 1er des directives internes dispose, quant à lui, que "En application de l' article 12 de l' annexe X du statut et sur demande du
fonctionnaire, l' AIPN procède au paiement, en monnaie du pays d' affectation, d' une partie de sa rémunération jusqu' à concurrence de 80 % de la rémunération nette. Dans des cas dûment motivés, l' AIPN peut accepter de procéder au paiement en monnaie du pays d' affectation d' une partie de la rémunération dépassant ce pourcentage de 80 %".

Premier moyen: illégalité des articles 11 et 12 de l' annexe X

Arguments des parties

16 La requérante fait valoir, en substance, que les articles 11 et 12 de l' annexe X violent le principe supérieur de droit que constitue l' égalité de traitement entre les fonctionnaires. Ce principe aurait été consacré en ce qui concerne la rémunération des fonctionnaires par l' article 64 du statut, qui a pour objet d' assurer un pouvoir d' achat substantiellement équivalent aux fonctionnaires quel que soit leur lieu d' affectation (arrêts de la Cour du 28 juin 1988, Commission/Conseil, 7/87,
Rec. p. 3401, et du 23 janvier 1992, Commission/Conseil, 301/90, Rec. p. I-221).

17 Selon la requérante, les articles 11 et 12 de l' annexe X, tels que mis en oeuvre par l' article 1er des directives internes, aboutissent à réduire artificiellement et arbitrairement son pouvoir d' achat en limitant à 80 % de sa rémunération l' application du coefficient correcteur de son lieu d' affectation et en exigeant une motivation spéciale pour que celui-ci puisse s' appliquer aux 20 % restant. Cette limitation aboutirait pour la requérante à une diminution de traitement de 7,8 %. Ainsi,
la requérante serait victime d' une double discrimination par rapport, d' une part, aux FAPT affectés dans des pays dont le coefficient correcteur est inférieur à 100 et par rapport, d' autre part, aux fonctionnaires affectés dans la Communauté.

18 En ce qui concerne la discrimination dont elle serait victime vis-à-vis des premiers, la requérante explique que ceux-ci bénéficient du régime de l' article 11 de l' annexe X, qui leur est extrêmement favorable puisque le paiement en francs belges avec application du coefficient correcteur de la Belgique, indépendamment du lieu de leurs dépenses effectives et sans devoir avancer de justification, leur assure à leur lieu d' affectation un pouvoir d' achat supérieur à celui des autres
fonctionnaires.

19 La requérante relève, dans sa réplique, que l' invocation par la Commission du système de rotation des FAPT pour justifier la différence de traitement résultant de l' application de l' article 11 de l' annexe X aux FAPT affectés dans les pays dont le coefficient correcteur est inférieur à 100 et de l' article 12 à ceux qui sont affectés dans les autres pays constitue un aveu implicite du caractère discriminatoire du régime appliqué, puisqu' aux années "fastes" succéderaient les années "néfastes".
Elle ajoute que ce système n' aboutit pas au résultat présenté par la Commission pour deux raisons: la première est que la rotation est lente puisque la Commission exige une période minimale d' affectation de quatre ans, la seconde est que les FAPT ne constituent pas un corps stable de fonctionnaires affectés en permanence dans des pays tiers, mais bien des fonctionnaires qui peuvent tantôt être affectés dans la Communauté tantôt dans des pays tiers.

20 En ce qui concerne la discrimination dont elle serait victime vis-à-vis des fonctionnaires affectés dans la Communauté, la requérante expose que ceux-ci bénéficient, en vertu de l' article 64 du statut, d' une application du coefficient correcteur de leur pays d' affectation à la totalité de leur rémunération et sans avoir à apporter la moindre justification.

21 La requérante fait valoir, dans sa réplique, que la Commission ne saurait se prévaloir du caractère dérogatoire des dispositions de l' annexe X par rapport aux autres dispositions statutaires pour justifier leur caractère discriminatoire, puisque c' est au regard d' un principe fondamental de droit, supérieur à des actes du législateur, qu' elle conteste la validité des articles 11 et 12 de l' annexe X.

22 Par ailleurs, la requérante conteste que la Commission puisse justifier ces dispositions statutaires en affirmant qu' il est raisonnable de supposer qu' une proportion non négligeable - évaluée forfaitairement à 20 % - du traitement des FAPT n' est normalement pas utilisée dans le pays d' affectation. Il n' appartiendrait pas, en effet, à la Commission de prendre en compte le lieu où le fonctionnaire dépense effectivement sa rémunération ni même d' établir des présomptions à cet égard. La
structure effective des dépenses et le lieu de celles-ci relèveraient de la vie privée du fonctionnaire. Or, aucun fonctionnaire affecté dans la Communauté ne verrait l' application du coefficient correcteur local liée à la structure effective de ses dépenses personnelles ni a fortiori à la production de la preuve de ces dépenses. L' application intégrale du coefficient correcteur du lieu d' affectation serait d' ailleurs obligatoire. Ce ne serait qu' à titre dérogatoire qu' un fonctionnaire
pourrait faire verser dans son État membre d' origine une partie limitée de son traitement. Rien ne justifierait que ce principe soit écarté, et en fait inversé, pour les FAPT, aboutissant ainsi à une immixtion intolérable dans la vie privée du fonctionnaire au travers de la "vérification" de ses dépenses personnelles.

23 La requérante soutient encore que l' existence des "avantages" dont bénéficieraient les FAPT selon la Commission ne saurait justifier la réduction du pouvoir d' achat découlant du plafonnement à 80 % du traitement de l' application du coefficient correcteur. En effet, lors de l' adoption de l' annexe X, le représentant de la Commission aurait déclaré au Conseil que "le système proposé recherche une transparence et une efficacité plus grande en distinguant les deux éléments de la rémunération, les
conditions de vie étant compensées par une indemnité spécifique et le coefficient correcteur visant à la seule équivalence du pouvoir d' achat. Étant donné que certaines dépenses seraient prises en charge par l' Institution d' après la proposition de règlement, en l' occurrence le loyer, les frais médicaux et les frais de scolarité, ces éléments ne seraient pas pris en compte pour le calcul du coefficient correcteur". Elle en déduit que, pour compenser ces avantages, l' intention des rédacteurs
était de les exclure du calcul du coefficient correcteur et non pas de limiter l' application de celui-ci. C' est pourquoi celui-ci devrait s' appliquer intégralement pour assurer l' équivalence du pouvoir d' achat. La réduction de traitement découlant de l' application partielle d' un coefficient déjà réduit constituerait une double réduction et une double prise en compte des avantages en question.

24 La requérante ajoute, en outre, que c' est à tort que la Commission croit pouvoir fonder sa présomption selon laquelle 20 % de la rémunération des FAPT ne seront pas dépensés au lieu d' affectation sur la mobilité plus grande des FAPT ou sur l' octroi aux FAPT d' avantages liés à leur statut. Selon la requérante, la mobilité des FAPT ne serait pas plus grande que celle des fonctionnaires affectés en dehors du siège, mais dans la Communauté, et tous les prétendus "avantages" soit correspondraient
à une surcharge effective, soit auraient déjà été pris en compte dans le calcul du coefficient correcteur lui-même.

25 La requérante prétend que la discrimination dont elle est ainsi victime constitue également, en raison de l' amputation de sa rémunération, une violation de l' article 62 du statut, selon lequel tout fonctionnaire a droit à sa rémunération, c' est-à-dire à toute sa rémunération, sans avoir le droit d' y renoncer.

26 La requérante conclut que les dispositions incriminées sont contraires aux principes supérieurs de droit qu' elle a invoqués et qu' elles doivent, par voie de conséquence, être déclarées inapplicables en vertu de l' article 184 du traité CEE.

27 La Commission explique le choix du pourcentage de 80 % par le fait qu' il serait raisonnable de supposer qu' une proportion non négligeable - évaluée forfaitairement à 20 % - du traitement des FAPT n' est normalement pas utilisée dans le pays d' affectation. En effet, contrairement aux fonctionnaires affectés dans un État membre, les FAPT seraient amenés à avoir une mobilité beaucoup plus grande et en conséquence une attache relativement moindre avec leurs pays d' affectation successifs. En
outre, la Commission prendrait en charge une fraction importante des dépenses locales des FAPT en payant l' intégralité de leur loyer dans le pays d' affectation, en remboursant la totalité de leurs frais médicaux et en contribuant à une assurance accident spéciale pour les membres de leur famille. Les FAPT n' ayant pas à supporter certaines dépenses essentielles dans leur pays d' affectation, ils dépenseraient normalement les sommes rendues ainsi disponibles soit dans le pays du siège soit dans le
pays où est établi leur centre d' intérêts.

28 La Commission ajoute que, même si la règle des 80 % devait être considérée comme destinée à "compenser" divers "avantages" accordés aux FAPT, quod non, les arguments de la requérante tendant à démontrer que ces "avantages" n' existent pas en réalité sont de toute façon erronés. Le fait que les frais de logement ne soient pas pris en compte pour le calcul du coefficient correcteur ne signifierait pas que la gratuité du logement n' est pas un avantage réel pour les FAPT. L' absence de prise en
compte des frais de logement dans le calcul du coefficient correcteur serait la conséquence logique du fait que les FAPT n' assument pas de tels frais. Il n' en resterait pas moins que les autres frais relatifs au coût de la vie dans le pays d' accueil sont tous pris en considération pour le calcul du coefficient correcteur. La rémunération des FAPT serait donc bien dans tous les cas affectée d' un coefficient correcteur, dont seules les règles de calcul auraient fait l' objet d' une légère
adaptation dans le cas des FAPT. Il apparaîtrait ainsi qu' aucune somme n' est soustraite de la rémunération des FAPT pour tenir compte du fait que leur logement est fourni gratuitement. Quant à l' assurance maladie complémentaire, les FAPT n' en payeraient qu' une quote-part de 50 % au maximum (avec un plafond de 0,6 % de leur traitement de base), le reste étant pris en charge par l' institution, ce qui à nouveau constituerait un avantage non négligeable et une raison de considérer que les dépenses
locales des FAPT pour frais médicaux sont réduites d' autant.

29 La Commission conclut que, dès lors qu' elle a démontré que c' est à bon droit qu' elle avait fixé à 80 % le montant de la rémunération pouvant être payé en monnaie du pays d' affectation avec application du coefficient correcteur de ce pays, il ne saurait être question de violation de l' article 62 du statut.

Appréciation du Tribunal

30 Le Tribunal constate que les deux parties se prévalent, pour justifier leurs prétentions respectives, du principe supérieur de droit qu' est le principe d' égalité de traitement qui, selon une jurisprudence constante de la Cour, est à la base des articles 64 et 65 du statut (voir, en dernier lieu, l' arrêt du 23 janvier 1992, Commission/Conseil, précité, points 15 et 29). En substance, la requérante soutient que la seule voie qui permette d' assurer l' égalité de traitement entre tous les
fonctionnaires, conçue en termes d' équivalence de pouvoir d' achat aux différents lieux d' affectation, est celle des articles 64 et 65 du statut, en vertu desquels la totalité de la rémunération est automatiquement payée dans la monnaie et avec application du coefficient correcteur du lieu d' affectation. La Commission, par contre, expose que l' égalité de traitement, conçue dans les mêmes termes, requiert que le système des coefficients correcteurs soit appliqué différemment aux fonctionnaires
affectés dans la Communauté et aux FAPT, pour tenir compte de la situation spécifique de ceux-ci, et que tel est l' objet de l' annexe X, telle qu' interprétée par l' article 1er des directives internes.

31 Le Tribunal rappelle que le principe d' égalité de traitement exige que des situations identiques soient traitées de manière identique et que des situations différentes soient traitées de manière différente, dans la juste mesure de la différence constatée.

32 Afin d' examiner si l' annexe X du statut, telle qu' interprétée par l' article 1er des directives internes, peut, comme les articles 64 et 65 du statut, assurer l' égalité de traitement, conçue en termes d' équivalence de pouvoir d' achat aux différents lieux d' affectation, le Tribunal considère qu' il y a lieu de résoudre trois questions. En premier lieu, la situation des FAPT, qui sont soumis à l' annexe X, est-elle différente de la situation des fonctionnaires affectés dans la Communauté,
qui sont soumis aux articles 64 et 65 du statut? En second lieu, les FAPT sont-ils traités de manière différente par rapport aux fonctionnaires affectés dans la Communauté? En troisième lieu, s' il y a une différence de traitement, celle-ci est-elle justifiée par d' éventuelles différences de situation entre les FAPT et les fonctionnaires affectés dans la Communauté?

33 En ce qui concerne la première question, le Tribunal constate que la requérante a admis, dans ses mémoires (réplique pages 3 et 4) et lors de l' audience, que la situation des FAPT est différente de celle des fonctionnaires affectés dans la Communauté. En effet, elle a affirmé que les différents avantages qui sont conférés aux FAPT par l' annexe X sont tous destinés à compenser des inconvénients qui leur sont propres. En reconnaissant que les FAPT ont à subir des inconvénients que n' ont pas à
subir les fonctionnaires affectés dans la Communauté, la requérante a reconnu que leur situation est différente de celle des fonctionnaires affectés dans la Communauté. Le caractère différent de ces situations est corroboré par l' exposé des motifs de la proposition faite par la Commission au Conseil, qui a conduit à l' adoption par celui-ci de l' annexe X. En effet, on peut y lire notamment que "les conditions de travail de ce personnel diffèrent par des aspects importants de celles qui prévalent
dans la Communauté: le personnel servant en dehors de la Communauté travaille dans des délégations extérieures et est soumis à une rotation, ce qui signifie qu' il reste rarement très longtemps dans un même endroit; les conditions de vie et les conditions financières dans de nombreux pays tiers sont très différentes de celles que l' on trouve dans la Communauté ... Pour le personnel servant à l' extérieur, la mobilité constitue un aspect essentiel des conditions de service. Le personnel des
délégations doit en principe être muté à des intervalles réguliers, n' excédant généralement pas quatre ans ... La pratique de l' AEC depuis deux décennies est de mettre gratuitement un logement à la disposition de son personnel ... La pratique de certains États membres dans ce domaine est de fournir gratuitement un logement à leur personnel diplomatique à l' étranger ... Cette pratique semble se justifier en elle-même compte tenu des problèmes de mobilité fréquents et de la nécessité de maintenir
une base permanente en Europe ... La politique en matière de frais de scolarité pour le personnel en service à l' extérieur doit respecter le principe déjà reconnu suivant lequel, fondamentalement, l' enseignement doit être gratuit pour les enfants des fonctionnaires de la Communauté, avant tout grâce à l' accès aux écoles européennes et autres par le biais du paiement d' indemnités accrues. Le fait qu' un fonctionnaire exerce ses fonctions à l' extérieur ne devrait pas entraîner une discrimination
sur ce point. Dans de nombreux lieux de travail, les formes d' enseignement disponibles qui conviendraient aux enfants des fonctionnaires sont limitées et très coûteuses. En conséquence, il est proposé de prendre en compte les frais raisonnables réellement supportés par les fonctionnaires servant en dehors de la Communauté pour la scolarisation de leurs enfants ... En raison des coûts très élevés des soins de santé dans certains pays et des risques supplémentaires auxquels ces fonctionnaires et
leurs familles sont exposés, il est prévu qu' une assurance complémentaire couvre à 100 % les frais médicaux ... La moitié de ces frais d' assurance sera à la charge du fonctionnaire ...".

34 Les travaux préparatoires de l' annexe X du statut montrent avant tout que l' intention du législateur communautaire en adoptant ce texte était d' assimiler le statut des FAPT à celui des diplomates nationaux qui travaillent dans des conditions semblables. On peut, en effet, y lire que les FAPT sont au service de la Communauté "dans les délégations qui représentent les institutions de la Communauté dans le monde". Après quoi, de nombreuses références sont faites au statut du personnel
diplomatique des États membres. On peut encore y lire: "pour le personnel des délégations extérieures, l' obligation de mobilité signifie que le centre d' intérêts coïncide rarement avec le lieu de travail ...".

35 Il résulte de ce qui précède que la situation des FAPT est réellement différente de celle des fonctionnaires affectés dans la Communauté.

36 Il convient, dès lors, d' examiner la deuxième question, qui est celle de savoir si les FAPT sont traités de manière différente par rapport aux fonctionnaires affectés dans la Communauté.

37 A cet égard, le Tribunal relève que la requérante fait valoir que la différence de traitement entre les FAPT et les fonctionnaires affectés dans la Communauté réside dans le fait que, pour ces derniers, l' article 64 du statut permet que ceux qui sont affectés en dehors du siège de l' institution soient payés automatiquement et intégralement en monnaie de leur lieu d' affectation et avec application du coefficient correcteur de celui-ci, alors que, pour les FAPT, seuls 80 % de leur rémunération
bénéficient d' un paiement en monnaie de leur lieu d' affectation et d' une application du coefficient correcteur de celui-ci, et ce seulement après qu' ils l' ont demandé.

38 Il convient de rappeler la ratio legis des articles 64 du statut et 12 de l' annexe X, tel qu' interprété par l' article 1er des directives internes. Le mécanisme du coefficient correcteur a pour finalité de garantir le maintien d' un pouvoir d' achat équivalent pour tous les fonctionnaires, quel que soit leur lieu d' affectation. Or, le pouvoir d' achat est la mesure de la quantité de biens et de services que peut procurer une unité monétaire à un moment donné. Le pouvoir d' achat n' a donc de
sens que par rapport à une dépense susceptible d' être encourue. C' est pourquoi l' application dans toute sa rigueur de la règle de l' équivalence du pouvoir d' achat devrait requérir en théorie que ne se voient appliquer le coefficient correcteur du lieu d' affectation que les sommes dont il est prouvé qu' elles sont susceptibles d' être dépensées au lieu d' affectation.

39 Face à l' impossibilité pratique de gérer un système dans lequel, d' un côté, chaque fonctionnaire devrait établir quelles sont les dépenses qu' il est susceptible d' effectuer à son lieu d' affectation et celles qui seront effectuées ailleurs et, de l' autre, l' administration devrait vérifier ces affirmations, le législateur communautaire a mis en place un système de présomptions, qui figure à l' article 64 du statut pour les fonctionnaires affectés dans la Communauté et à l' article 12 de l'
annexe X, tel qu' interprété par l' article 1er des directives internes, pour les FAPT.

40 Pour les premiers, il est présumé que 100 % de leurs dépenses sont susceptibles d' être effectuées à leur lieu d' affectation. Cette présomption est néanmoins réfragable dans la mesure où l' article 17 de l' annexe VII du statut permet au fonctionnaire de faire transférer régulièrement, par l' entremise de l' institution dont il relève, une partie de ses émoluments ne dépassant pas le montant qu' il perçoit au titre de l' indemnité de dépaysement (16 %) ou d' expatriation, pour autant que ces
transferts soient destinés à couvrir des dépenses résultant, notamment, de charges régulières et prouvées que l' intéressé aurait à assumer en dehors du pays du siège de son institution ou du pays où il exerce ses fonctions.

41 Pour les FAPT, la Commission a conclu qu' un traitement différent s' imposait en raison des différences de situation qu' elle avait décrites dans l' exposé des motifs de la proposition d' annexe X du statut, soumise par elle au Conseil (voir les points 33 et 34 ci-avant). Elle a présenté sa conclusion dans les termes suivants: "En conséquence, la Commission considère que le principe régissant le paiement de leur rémunération doit être que la rémunération et les indemnités seront calculées et
versées en FB suivant le coefficient correcteur approprié pour Bruxelles ... Les institutions seront disposées à transférer à tout fonctionnaire servant en dehors de la Communauté les fonds dont il peut avoir besoin sur son lieu de travail, en ajustant ces transferts au moyen d' un coefficient correcteur qui tiendra compte des différents coûts de la vie au taux de change approprié". Le Conseil ayant entériné cette proposition, l' article 11 de l' annexe X du statut prévoit que les FAPT seront, en
principe, payés en francs belges en Belgique et que leur rémunération sera affectée du coefficient correcteur pour la Belgique. Toutefois, étant donné qu' il y a lieu d' assurer dans toute la mesure du possible l' équivalence du pouvoir d' achat des fonctionnaires indépendamment de leur lieu d' affectation, comme le rappelle l' article 13, l' article 12 de l' annexe X dispose que: "Sur demande du fonctionnaire, l' autorité investie du pouvoir de nomination peut décider de payer la rémunération, en
tout ou en partie, en monnaie du pays d' affectation et qu' elle est alors affectée du coefficient correcteur du lieu d' affectation et convertie selon le taux de change correspondant".

42 Pris en application de cette disposition, l' article 1er des directives internes présume, pour les FAPT qui demandent à être payés en monnaie et avec application du coefficient correcteur de leur pays d' affectation, que seuls 80 % de leur rémunération sont susceptibles d' être dépensés au lieu d' affectation. Il est ainsi présumé que 20 % de la rémunération du FAPT ne sont pas susceptibles d' être dépensés au lieu d' affectation. Cette présomption est néanmoins réfragable, comme celle applicable
aux fonctionnaires affectés dans la Communauté, dans la mesure où la dernière phrase de cette disposition permet au FAPT, s' il motive dûment sa demande, d' obtenir le paiement en monnaie du pays d' affectation et avec application du coefficient correcteur de ce dernier d' une partie de sa rémunération dépassant ces 80 %. Ainsi, le FAPT peut-il renverser ladite présomption s' il établit que, pour des raisons qui lui sont propres, il est susceptible de dépenser plus de 80 % de sa rémunération à son
lieu d' affectation.

43 Il s' ensuit que les différences de traitement entre les fonctionnaires affectés dans la Communauté, d' une part, et les FAPT, d' autre part, sont - pour ce qui est du paiement de leur rémunération dans la monnaie et avec application du coefficient correcteur du lieu d' affectation -, en premier lieu, que seuls les seconds doivent introduire une demande pour bénéficier de la présomption de dépense de leur rémunération au lieu d' affectation et, en second lieu, que pour les premiers cette
présomption porte sur 100 % de leur rémunération, alors que pour les seconds elle ne porte que sur 80 % de celle-ci, même si dans les deux cas il s' agit de présomptions réfragables.

44 Il appartient donc au Tribunal de répondre à la troisième question, qui est de savoir si ces différences de traitement sont justifiées au regard des situations différentes dans lesquelles se trouvent les fonctionnaires affectés dans la Communauté et les FAPT.

45 En ce qui concerne, en premier lieu, le caractère automatique du paiement dans la monnaie et en application du coefficient correcteur du lieu d' affectation, d' un côté, et de la nécessité d' une demande, de l' autre, le Tribunal considère que la requérante ne saurait voir dans cette différence de traitement une discrimination. En effet, cette différence de traitement est justifiée, d' une part, par la raison d' être du régime dérogatoire applicable aux FAPT que constitue la volonté du
législateur d' assimiler leur statut à celui des diplomates nationaux et, d' autre part, par la nécessité de protéger les FAPT contre une application automatique du coefficient correcteur lorsqu' ils sont établis dans un pays tiers dont le coefficient correcteur est inférieur à 100.

46 Il s' ensuit que cette première différence de traitement résulte des avantages conférés aux FAPT dans l' annexe X du statut, qui font plus que compenser l' inconvénient que constitue l' obligation pour eux de formuler une demande en signant un formulaire préimprimé. Cette différence de traitement est donc proportionnée à la différence de situation qu' il y a entre les FAPT et les autres fonctionnaires.

47 Par ailleurs, le Tribunal constate que, lors de l' audience, la requérante s' est désistée de son moyen pour autant qu' il est tiré d' une discrimination, en termes de pouvoir d' achat, dont elle serait victime par rapport aux FAPT affectés dans des pays tiers dont le coefficient correcteur est inférieur à 100.

48 En ce qui concerne, en second lieu, la question de savoir s' il est raisonnable de limiter à 80 % de la rémunération des FAPT la partie de celle-ci dont on présume qu' elle est susceptible d' être dépensée à leur lieu d' affectation, le Tribunal considère qu' elle doit être examinée à la lumière d' une comparaison entre les dépenses auxquelles les fonctionnaires affectés dans la Communauté et les FAPT sont susceptibles d' avoir à faire face à leur lieu d' affectation. Sur ce point, il résulte des
articles 5, 18 et 23 de l' annexe X que les FAPT ne peuvent supporter aucune dépense de logement à leur lieu d' affectation dans la mesure où un logement correspondant à la composition de leur famille est mis à leur disposition par l' institution et que, à défaut, ils ont droit soit au remboursement des frais d' hôtel préalablement approuvés par l' AIPN pour eux et leur famille, soit au remboursement du loyer qui leur incombe, à la condition que ce logement corresponde au niveau des fonctions
exercées par eux et à la composition de leur famille à charge. Par contre, les fonctionnaires affectés dans la Communauté encourent à leur lieu d' affectation des dépenses liées à leur logement et à celui de leur famille. En outre, le fait que les FAPT bénéficient d' une couverture intégrale de leurs dépenses de santé par le biais d' une assurance maladie complémentaire, même financée partiellement par eux-mêmes (article 24 de l' annexe X), implique également qu' ils n' ont pas à faire face à des
frais de santé à leur lieu d' affectation, alors que les fonctionnaires affectés dans la Communauté doivent en principe supporter 20 % de ces frais à leur lieu d' affectation (article 72 du statut).

49 En raison de la ratio legis du système, aux termes de laquelle il n' y a lieu d' appliquer le coefficient correcteur qu' à des sommes dont on peut présumer qu' elles sont susceptibles d' être dépensées au lieu d' affectation, il est raisonnable de ne pas appliquer d' office le coefficient correcteur à la partie de la rémunération du FAPT correspondant à la partie de la rémunération du fonctionnaire affecté dans la Communauté qui est consacrée à son logement et à sa santé, puisqu' à la différence
de ce dernier le FAPT ne pourra effectuer ces dépenses à son lieu d' affectation.

50 Il y a lieu de se demander si l' évaluation à 20 % de la rémunération de la partie de celle-ci correspondant à celle qu' un fonctionnaire affecté dans la Communauté est susceptible de dépenser à son lieu d' affectation pour son logement et pour sa santé est raisonnable. A cet égard, c' est à juste titre que la Commission a pu se référer, comme indice du caractère raisonnable de cette évaluation, aux 15 à 20 % de la rémunération des FAPT qui, avant l' entrée en vigueur de l' annexe X,
correspondaient à la contribution logement que les fonctionnaires devaient payer à leur institution pour que celle-ci leur fournisse un logement. Par ailleurs, ce chiffre de 20 % correspond à l' importance de l' élément "logement" dans la structure de pondération de la consommation des fonctionnaires et donc au poids accordé au facteur logement dans le calcul des coefficients correcteurs pour un lieu d' affectation déterminé (voir le point 19 des conclusions de l' avocat général M. Cruz Vilaça dans
l' affaire 7/87, précitée, Rec. p. 3414). Cette évaluation est d' autant plus raisonnable que les FAPT n' ont à supporter à leur lieu d' affectation aucune dépense de santé.

51 Il y a lieu d' ajouter dans le cas d' espèce que le caractère raisonnable de cette présomption se trouve corroboré par le fait que la requérante n' a, à aucun stade de la procédure, prétendu qu' elle devait dépenser plus de 80 % de sa rémunération à son lieu d' affectation et qu' elle n' a pas introduit de demande dûment motivée au sens du second alinéa de l' article 1er des directives internes.

52 Par ailleurs, le Tribunal constate que la requérante soutient que la limitation à 80 % de la présomption de dépense de la rémunération au lieu d' affectation, en raison de la mise à la disposition des FAPT d' un logement gratuit, aboutit à une double prise en compte de la gratuité du logement au détriment des FAPT, étant donné que ce facteur a déjà été retiré du calcul du coefficient correcteur. Le Tribunal considère que cette double prise en compte est entièrement justifiée dans la mesure où,
aucune dépense de logement n' étant susceptible d' être effectuée au lieu d' affectation par les FAPT, le logement ne doit en aucune manière être pris en considération dans le calcul du pouvoir d' achat conféré aux FAPT par leur rémunération (voir ci-avant point 38). En effet, les frais de logement ne font pas partie des biens et services qu' ils seront susceptibles de se procurer avec leur rémunération à leur lieu d' affectation. Ils ne doivent par conséquent pas intervenir dans le calcul du coût
de la vie pour les FAPT à leur lieu d' affectation exprimé par le coefficient correcteur. Ce dernier ne peut, en outre, être appliqué à des sommes dont il est établi qu' elles ne sont pas susceptibles d' être dépensées au lieu d' affectation. C' est pourquoi il n' y a aucune raison que la partie de la rémunération des FAPT qui correspond pour les fonctionnaires affectés dans la Communauté à ces frais de logement se voie appliquer le coefficient correcteur du lieu d' affectation.

53 Il n' y a lieu de prendre en considération, ni pour le calcul du coefficient correcteur ni pour son application, des éléments totalement et nécessairement étrangers à la structure des dépenses des FAPT à leur lieu d' affectation. Il s' ensuit que la différence de traitement constatée est proportionnée à la différence de situation des FAPT par rapport aux fonctionnaires affectés dans la Communauté.

54 Pour le surplus, pour autant que l' argumentation de la requérante tend à comparer la situation des FAPT sous le régime de la contribution logement en vigueur avant que ne soit adoptée l' annexe X avec leur situation après l' entrée en vigueur celle-ci, il importe de souligner que la requérante ne peut se prévaloir du principe d' égalité de traitement pour contester la décision du législateur de modifier à partir d' un moment donné le système de rémunération applicable aux FAPT.

55 En l' espèce, le Tribunal constate que le législateur, en adoptant l' annexe X, a voulu modifier le système antérieurement en vigueur, et notamment le système de la contribution logement. Cette modification du système n' a pu porter atteinte aux droits acquis par la requérante, dans la mesure où l' article 27 de l' annexe X prévoit explicitement que "le fonctionnaire ainsi que l' agent visé au règlement n 3018/87 perçoivent, pendant une période limitée à la durée de leur affectation en cours au
moment de l' entrée en vigueur des présentes dispositions et au maximum pendant cinq ans, une rémunération d' un niveau au moins égal à celui de la rémunération qu' ils percevaient à la veille de l' entrée en vigueur des présentes dispositions".

56 En outre, la requérante ne peut se prévaloir d' un système qui a été modifié avant de lui devenir applicable puisqu' elle n' a acquis aucun droit en vertu de celui-ci. En effet, la requérante a été affectée à Genève à partir du 1er octobre 1989, alors que le régime de l' annexe X et des directives internes est entré en vigueur le 10 octobre 1987.

57 Il résulte de tout ce qui précède que la requérante ne saurait se prévaloir d' une violation du principe de l' égalité de traitement par les articles 11 et 12 de l' annexe X, tel qu' interprétés par l' article 1er des directives internes. Il convient cependant de faire remarquer que tel aurait été le cas si les FAPT avaient dû payer eux-mêmes leur logement et leurs dépenses de santé, sans que ces éléments ne soient pris en considération au niveau du calcul du coefficient correcteur et sans que ce
dernier soit appliqué à la totalité de leur rémunération. Dans ce cas, en effet, les FAPT devraient faire face à de telles dépenses à leur lieu d' affectation, comme les fonctionnaires affectés dans la Communauté, qui devraient alors être doublement prises en compte, comme pour ces derniers.

58 Il s' ensuit que le premier moyen doit être rejeté.

Second moyen: interprétation erronée de l' article 12 de l' annexe X par l' article 1er des directives internes

Arguments des parties

59 La requérante soutient, à titre subsidiaire, que, à supposer que l' article 12 de l' annexe X ne soit pas intrinsèquement illégal, il est possible d' en avancer une interprétation différente de celle qui est inhérente à l' article 1er des directives internes. Selon cette interprétation, le droit de demander à être payé en monnaie locale, avec application du coefficient correcteur s' y rattachant, appartiendrait au fonctionnaire qui en fait la demande, l' autorité investie du pouvoir de nomination
(ci-après "AIPN") devant lui donner satisfaction dans la mesure formulée par la demande. L' expression "peut décider" signifierait que le pouvoir n' appartient pas à l' AIPN d' office, mais ne peut être mis en oeuvre qu' à l' initiative du fonctionnaire intéressé. L' expression "en tout ou en partie" permettrait au fonctionnaire de préciser lui-même l' étendue de la conversion en monnaie locale avec application du coefficient correcteur s' y rattachant qu' il souhaite. Si le fonctionnaire souhaite
le paiement intégral de sa rémunération en monnaie locale avec le coefficient correcteur qui s' y applique, l' AIPN ne pourrait s' y opposer en lui imposant un quelconque pourcentage arbitraire inférieur.

60 La requérante conclut que si le Tribunal devait suivre cette interprétation, il devrait constater l' illégalité de l' article 1er des directives internes et annuler l' acte attaqué.

61 La Commission répond que l' interprétation de l' article 12 de l' annexe X suggérée par la requérante est manifestement contraire au texte de cette disposition, qui prévoit clairement que c' est l' AIPN qui peut décider de payer la rémunération, en tout ou en partie, en monnaie du pays d' affectation. Si le fonctionnaire peut prendre l' initiative de demander à l' AIPN de payer sa rémunération, en tout ou en partie, en monnaie du pays d' affectation, le pouvoir de décision appartiendrait, quant à
lui, à l' AIPN.

62 Pour le surplus, la Commission renvoie à sa réfutation des arguments de la requérante contenus dans son premier moyen.

Appréciation du Tribunal

63 Le Tribunal considère que, étant donné qu' il a constaté, dans son appréciation du premier moyen, que l' article 12 tel qu' interprété par l' article 1er des directives internes était légal, il n' y a pas lieu de statuer sur une autre interprétation de l' article 12.

64 Par conséquent, le second moyen doit également être rejeté.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

65 Aux termes de l' article 87, paragraphe 2, du règlement du procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s' il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l' article 88 du même règlement, les frais exposés par les institutions dans les recours des agents des Communautés restent à la charge de celles-ci.

Dispositif

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté.

2) Chaque partie supportera ses propres dépens.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : T-47/91
Date de la décision : 15/12/1992
Type de recours : Recours de fonctionnaires - non fondé

Analyses

Fonctionnaire affecté dans un pays tiers - Rémunération - Paiement en monnaie du pays d'affectation - Application du coefficient correcteur du pays d'affectation.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Annick Auzat
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:1992:116

Source

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