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10/03/1992 | CJUE | N°C-178/87

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Minolta Camera Co. Ltd contre Conseil des Communautés européennes., 10/03/1992, C-178/87


Avis juridique important

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61987J0178

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 10 mars 1992. - Minolta Camera Co. Ltd contre Conseil des Communautés européennes. - Droits antidumping sur les photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon. - Affaire C-178/87.
Recueil de jurisprudence 1992 page I-01577
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Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
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Avis juridique important

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61987J0178

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 10 mars 1992. - Minolta Camera Co. Ltd contre Conseil des Communautés européennes. - Droits antidumping sur les photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon. - Affaire C-178/87.
Recueil de jurisprudence 1992 page I-01577

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

1. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Détermination de la valeur normale - Valeur construite - Frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux des filiales de vente - Inclusion - Régime différent de celui applicable lors de la construction du prix à l' exportation - Application éventuelle des ajustements prévus aux fins de la comparaison entre la valeur normale et le prix à l' exportation

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 3, sous b), ii), 8, sous b), 9 et 10, sous c) ))

2. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Détermination de la valeur normale - Valeur construite - Calcul de la marge bénéficiaire - Bénéfice moyen réalisé par les autres exportateurs sur les ventes bénéficiaires de produits similaires

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 3, sous b), ii) ))

3. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Détermination de la valeur normale - Valeur construite - Calcul de la marge bénéficiaire - Marge combinée de l' entité économique formée par le producteur et sa filiale de vente

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 3, sous b), ii) ))

4. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Détermination de la valeur normale - Valeur construite - Rabais pour reprise d' un produit usagé - Inclusion

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 3, sous b), ii) ))

5. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Comparaison entre la valeur normale et le prix à l' exportation - Ajustements - Différences dans les conditions de vente - Prise en compte subordonnée à l' existence d' un lien direct avec les ventes considérées - Frais ne présentant pas un tel lien - Exclusion

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 10, sous c) ))

6. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Comparaison entre la valeur normale et le prix à l' exportation - Ajustements - Différences de stade commercial - Charge de la preuve

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 9 et 10, sous c) ))

7. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Détermination de la valeur normale et du prix à l' exportation - Obligation de recourir à une méthode identique de détermination - Absence - Méthodes de comparaison - Pouvoir d' appréciation des institutions - Méthode transaction par transaction - Recours non limité au cas de dissimulation de pratiques de dumping

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 9 et 13, sous b) ))

Sommaire

1. Lorsqu' il est constaté, pour ce qui est des ventes sur le marché intérieur, qu' un producteur confie des tâches relevant normalement d' un département de vente interne à ses filiales de vente avec lesquelles il forme une entité économique unique, ne constitue pas une violation de l' article 2, paragraphes 3, sous b), ii), et 9, du règlement antidumping de base n 2176/84 le fait d' inclure dans la valeur normale construite les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux des
filiales, alors que tous les frais exposés par ses filiales de vente dans la Communauté ont été déduits lors de la construction du prix à l' exportation, conformément à l' article 2, paragraphe 8, sous b), dudit règlement.

En effet, l' inclusion des frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux des filiales de vente dans la valeur normale construite permet d' éviter que des frais nécessairement englobés dans le prix de vente d' un produit lorsque cette vente est effectuée par un département de vente inséré dans l' organisation du producteur ne le soient plus lorsque ce produit est distribué par une société juridiquement distincte, bien qu' économiquement contrôlée par le producteur.

Par ailleurs, la détermination de la valeur normale et du prix à l' exportation obéissent à des règles distinctes et, dès lors, les frais de vente, généraux et administratifs ne doivent pas nécessairement être traités de la même manière dans l' un et l' autre cas.

Les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux d' une filiale de vente contrôlée par le producteur, qui remplit, sur le marché intérieur, les fonctions d' un département de vente interne de ce producteur, ne peuvent en réalité être comparés qu' à ceux de son service d' exportation, dont les frais analogues ne sont pas déduits du prix à l' exportation, et non à ceux de ses filiales européennes. D' éventuelles différences dans le montant de ces frais pourraient tout au plus être
prises en considération dans le cadre des ajustements prévus à l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n 2176/84.

2. La construction de la valeur normale vise à établir une valeur qui soit le plus proche possible du prix de vente d' un produit tel qu' il serait si ce produit était vendu dans son pays d' origine ou d' exportation au cours d' opérations commerciales normales.

Pour atteindre cet objectif, les institutions peuvent prendre en considération soit la marge bénéficiaire réalisée sur les ventes d' autres modèles du même producteur soit celle réalisée par une autre société. Elles peuvent également recourir au bénéfice moyen réalisé par les autres exportateurs sur ceux de leurs modèles qui, au cours de la période de référence, ont été vendus sur le marché intérieur à un prix en moyenne supérieur à leur coût de production. Cette méthode ne saurait toutefois aboutir
à ce que, pour déterminer le bénéfice moyen, les institutions prennent également en compte les ventes d' un modèle déterminé lorsque globalement aucun bénéfice n' est réalisé, puisque la finalité de la construction de la valeur normale ne pourrait pas être atteinte dans ces circonstances, dès lors qu' en procédant de cette manière, les institutions auraient déterminé une valeur normale qui ne correspondrait pas au prix obtenu au cours d' opérations commerciales normales.

3. Dans le cadre de la construction de la valeur normale, les institutions ne sont pas tenues de choisir comme marge bénéficiaire raisonnable, au sens de l' article 2, paragraphe 3, sous b), ii), du règlement antidumping de base n 2176/84, la marge bénéficiaire du producteur plutôt que celle de sa filiale de vente sur le marché intérieur et elles peuvent licitement retenir les marges bénéficiaires combinées des deux sociétés, étant donné que celles-ci constituent une entité économique unique.

4. Les rabais octroyés sur le prix de vente pour la reprise d' un ancien appareil à l' acheteur d' un nouvel appareil, qui correspondent à la valeur que le producteur attribue au retrait d' appareils usagés du marché, doivent être pris en considération pour déterminer la valeur normale construite conformément à l' article 2, paragraphe 3, sous b), ii), du règlement antidumping de base n 2176/84.

5. Ne peuvent être considérés comme directement liés aux ventes, au sens de l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement antidumping de base n 2176/84, et justifier un ajustement de la valeur normale pour différences dans les conditions de vente ni les salaires versés à des cadres commerciaux ne vendant pas directement les produits considérés à des acheteurs, ni les frais de déplacement ordinaires ainsi que les frais de voyage des vendeurs, ni les frais de stockage, de transport, d' assurance
et de crédit exposés non par la filiale de vente, mais par la société de production.

6. Un producteur qui n' apporte pas la preuve que les ventes sur la base desquelles la valeur normale et le prix à l' exportation ont été déterminés concernent des catégories différentes d' acheteurs et se situent, par conséquent, à des stades commerciaux différents ne justifie pas sa demande d' ajustement au titre des différences de stade commercial, au sens de l' article 2, paragraphes 9 et 10, du règlement antidumping de base n 2176/84.

7. L' article 2, paragraphe 9, du règlement antidumping de base n 2176/84 n' impose pas que la valeur normale et le prix à l' exportation soient calculés selon des méthodes identiques. Le paragraphe 13 du même article se limite à indiquer les différentes possibilités de calculer la marge de dumping sans formuler l' obligation de similitude ou d' identité des méthodes choisies aux fins du calcul de la valeur normale et du prix à l' exportation.

La liberté de choisir l' une des méthodes indiquées à l' article 2, paragraphe 13, sous b), du règlement n 2176/84, dont l' exercice suppose l' appréciation de situations économiques complexes, tend précisément à ce que soit retenue la méthode la plus appropriée à l' objet de la procédure d' institution d' un droit antidumping.

L' application de la méthode transaction par transaction, particulièrement justifiée lorsque l' exportateur s' est rendu coupable de manoeuvres visant à dissimuler le dumping, ne saurait être limitée aux seuls cas où de tels comportements ont été constatés par les institutions.

Parties

Dans l' affaire C-178/87,

Minolta Camera Co. Ltd Osaka, Japon, représentée par MM. Christopher McGonigal et Simon Holmes, solicitors de l' étude Clifford Chance, Londres, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Jean-Claude Wolter, 8, rue Zithe,

partie requérante,

contre

Conseil des Communautés européennes, représenté par MM. Hans-Juergen Lambers, directeur au service juridique, et Erik Stein, conseiller juridique, en qualité d' agents, assistés de Mes Hans-Juergen Rabe et Michael Schuette, avocats respectivement au barreau de Hambourg et à celui de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Joerg Kaeser, directeur de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d' investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer, Kirchberg,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. John Temple Lang, conseiller juridique, et Eric White, membre du service juridique, en qualité d' agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Roberto Hayder, représentant du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie intervenante,

et par

Committee of European Copier Manufacturers (CECOM), Cologne, représenté par Mes Dietrich Ehle et Volker Schiller, avocats au barreau de Cologne, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Mes Arendt et Harles, 4, avenue Marie-Thérèse,

partie intervenante,

ayant pour objet l' annulation du règlement (CEE) n 535/87 du Conseil, du 23 février 1987, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 54, p. 12), dans la mesure où il s' applique à la requérante,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. R. Joliet, président de chambre, Sir Gordon Slynn, MM. F. Grévisse, J. C. Moitinho de Almeida et M. Zuleeg, juges,

avocat général: M. J. Mischo

greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, administrateur principal

vu le rapport d' audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l' audience du 3 octobre 1990,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 13 décembre 1990,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 9 juin 1987, la société Minolta Camera Co. Ltd (ci-après "Minolta"), ayant son siège à Osaka, a, en vertu de l' article 173, deuxième alinéa, du traité CEE, demandé l' annulation du règlement (CEE) n 535/87 du Conseil, du 23 février 1987, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 54, p. 12, ci-après "règlement attaqué"), dans la mesure où il s' applique à la requérante.

2 Minolta est une société qui fabrique des photocopieurs à papier ordinaire (ci-après "PPC"). Dans la Communauté, elle vend ses PPC exclusivement à Minolta Camera Handelsgesellschaft mbH (ci-après "Minolta Allemagne"), son distributeur en Allemagne, qui vend à la fois à des clients indépendants et aux distributeurs exclusifs dans les autres États membres. Au Japon, Minolta vend ses PPC par l' intermédiaire de sa filiale, Minolta Business Equipment Trading Co. Ltd (ci-après "MJS"), qui a différentes
succursales au Japon et vend à des concessionnaires et à des utilisateurs finals.

3 En juillet 1985, Minolta a fait l' objet, avec d' autres producteurs japonais, d' une plainte déposée auprès de la Commission par le comité des fabricants européens d' appareils de copie, qui l' accusait de vendre ses produits dans la Communauté à des prix de dumping.

4 La procédure antidumping engagée par la Commission sur la base du règlement (CEE) n 2176/84 du Conseil, du 23 juillet 1984, relatif à la défense contre les importations qui font l' objet d' un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (JO L 201, p. 1), a conduit à l' adoption du règlement (CEE) n 2640/86 de la Commission, du 21 août 1986, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire
originaires du Japon (JO L 239, p. 5). Le taux du droit antidumping provisoire a été fixé à 15,8 % du prix net franco frontière de la Communauté sur les importations de PPC fabriqués et exportés par Minolta. Par le règlement attaqué, pris sur proposition de la Commission, le Conseil a ensuite fixé le droit antidumping définitif à 20 %.

5 Pour un plus ample exposé des faits du litige, du déroulement de la procédure ainsi que des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d' audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.

6 A l' appui de son recours, Minolta invoque cinq moyens tirés respectivement du calcul erroné de la valeur normale construite, de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l' exportation, du recours erroné à la méthode transaction par transaction pour déterminer le prix à l' exportation, de la violation du principe du contradictoire et de la violation de l' obligation de motivation.

Sur le moyen tiré du calcul erroné de la valeur normale construite

7 Minolta fait valoir que le Conseil a violé l' article 2, paragraphes 3, sous b), ii), et 9, du règlement n 2176/84, dans la mesure où il a inclus dans la valeur normale construite, les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux de ses filiales de vente, une marge bénéficiaire de 14,6 % et certains rabais de reprise octroyés par les filiales japonaises à leurs clients.

8 En ce qui concerne l' inclusion des frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux de ses filiales de vente, Minolta fait valoir que celle-ci a abouti à ce que la valeur normale construite soit déterminée à un stade situé au delà du stade sortie usine, à savoir le stade de détail, alors que le prix à l' exportation a été établi au stade sortie usine. A cet égard, elle souligne que le prix à l' exportation a été construit conformément à l' article 2, paragraphe 8, du règlement n
2176/84, sur la base des prix de vente des filiales directes et indirectes dans la Communauté, prix dont le Conseil a déduit tous les frais exposés par ces filiales se rapportant aux ventes en question.

9 Il y a lieu de relever, tout d' abord, que selon les pièces du dossier, Minolta contrôle économiquement ses filiales de vente au Japon et leur confie des tâches qui relèvent normalement d' un département de vente interne à l' organisation du producteur.

10 Comme la Cour l' a déjà relevé, notamment dans l' arrêt du 5 octobre 1988, Brother/Conseil, point 16 (250/85, Rec. p. 5683), le partage des activités de production et de celles de vente à l' intérieur d' un groupe formé par des sociétés juridiquement distinctes ne saurait rien enlever au fait qu' il s' agit d' une entité économique unique, qui organise de cette manière un ensemble d' activités exercées, dans d' autres cas, par une entité qui est unique aussi du point de vue juridique.

11 Dans ces conditions, l' inclusion des frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux des filiales de vente dans la valeur normale construite permet d' éviter que des frais nécessairement englobés dans le prix de vente d' un produit, lorsque cette vente est effectuée par un département de vente inséré dans l' organisation du producteur, ne le soient plus lorsque ce produit est distribué par une société juridiquement distincte, bien qu' économiquement contrôlée par le producteur
(arrêt du 5 octobre 1988, Tokyo Electric/Conseil, point 29, 260/85 et 106/86, Rec. p. 5855).

12 Il convient de relever ensuite que, selon la jurisprudence de la Cour (voir, entre autres, arrêts du 7 mai 1987, Toyo/Conseil, point 13, 240/84, Rec. p. 1809, Nachi Fujikoshi/Conseil, point 14, 255/84, Rec. p. 1861, Nippon Seiko/Conseil, point 14, 258/84, Rec. p. 1923, et Minebea/Conseil, point 8, 260/84, Rec. p. 1975), la détermination de la valeur normale et celle du prix à l' exportation obéissent à des règles distinctes et que, dès lors, les frais de vente, généraux et administratifs ne
doivent pas nécessairement être traités de la même manière dans l' un et l' autre cas.

13 Il y a lieu d' ajouter que les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux des filiales de vente qui, comme cela a été indiqué ci-avant, ont rempli les fonctions d' un département de vente de Minolta, ne peuvent en réalité être comparés qu' à ceux de son service d' exportation, dont les frais analogues n' ont pas été déduits du prix à l' exportation, et non à ceux de ses filiales européennes. D' éventuelles différences dans le montant de ces frais pourraient être prises en
considération dans le cadre des ajustements prévus à l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n 2176/84.

14 Il s' ensuit que l' argument tiré de l' inclusion des frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux dans la valeur normale ne saurait être accueilli.

15 En ce qui concerne l' inclusion d' une marge bénéficiaire de 14,6 % dans la valeur normale, Minolta estime que cette marge est trop élevée, du fait que le Conseil n' aurait pris en considération ni le bénéfice moyen réalisé dans les ventes de tous les modèles pertinents sur le marché japonais ni le chiffre d' affaires réalisé dans les ventes non rentables de certains modèles sur ce même marché et n' aurait pas calculé cette marge au stade sortie usine.

16 A cet égard, il y a lieu de rappeler que la valeur normale a été construite en application de l' article 2, paragraphe 4, du règlement n 2176/84 parce que tous les modèles de PPC de Minolta exportés vers la Communauté ont été vendus au Japon à des prix en moyenne inférieurs à leur coût de production. Comme l' indique le point 10 des considérants du règlement attaqué, pour déterminer la marge bénéficiaire, le Conseil a utilisé le bénéfice moyen réalisé par les autres exportateurs de PPC sur ceux
de leurs modèles qui, au cours de la période de référence, ont été vendus au Japon à un prix en moyenne supérieur à leur coût de production. Ainsi que le Conseil l' a précisé au cours de la procédure, pour le calcul de ce bénéfice il a pris en compte le bénéfice réalisé sur les ventes d' un modèle déterminé même lorsque certaines ventes ont été réalisées à perte.

17 Il y a lieu de souligner à cet égard que si, pour déterminer le bénéfice moyen, le Conseil devait prendre en compte les ventes d' un modèle déterminé, même lorsque globalement aucun bénéfice n' est réalisé, la finalité de la construction de la valeur normale ne serait pas atteinte. En effet, cette construction vise à établir une valeur normale qui soit le plus proche possible du prix de vente d' un produit, tel qu' il serait si le produit en question était vendu dans le pays d' origine ou d'
exportation au cours d' opérations commerciales normales. Tel n' est pas le cas lorsque, notamment pour des raisons de stratégie commerciale, aucun bénéfice n' est réalisé sur les ventes d' un modèle considéré.

18 Pour atteindre cet objectif, les institutions peuvent prendre en considération soit la marge bénéficiaire réalisée sur les ventes d' autres modèles du même producteur, soit celle réalisée par une autre société (voir arrêts du 5 octobre 1988, Canon/Conseil, points 21 et 22, 277/85 et 300/85, Rec. p. 5731, et Sharp Corporation/Conseil, point 8, 301/85, Rec. p. 5813). Il y a lieu d' admettre, par conséquent, qu' elles peuvent également recourir à un bénéfice moyen, selon la méthode exposée au point
16.

19 Il convient d' ailleurs de constater que, dans son règlement (CEE) n 2423/88, du 11 juillet 1988, relatif à la défense contre les importations qui font l' objet d' un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (JO L 209, p. 1), qui a abrogé le règlement n 2176/84, le Conseil s' est clairement exprimé en ce sens. En effet, l' article 2, paragraphe 3, sous b), ii), de ce règlement prévoit expressément que les bénéfices à inclure dans la valeur
normale construite sont calculés par référence aux bénéfices réalisés sur les ventes bénéficiaires de produits similaires, qu' il s' agisse de ventes réalisées par le même producteur ou par d' autres producteurs.

20 L' argument de Minolta, selon lequel le Conseil aurait dû, en tout cas, prendre en considération le chiffre d' affaires réalisé sur toutes les ventes, y compris les ventes non rentables, ne saurait pas davantage être accueilli. En procédant de cette manière, le Conseil aurait, en effet, déterminé une valeur normale qui ne correspondrait pas au prix obtenu au cours d' opérations commerciales normales.

21 S' agissant de l' argument de Minolta selon lequel le Conseil aurait, eu égard aux variations de rentabilité d' un modèle dans le temps, dû prendre en considération le bénéfice réalisé pendant toute la durée d' existence des PPC, il y a lieu de relever que l' article 2, paragraphe 4, du règlement n 2176/84 permet d' exclure les ventes à perte, à condition qu' elles se soient échelonnées sur une période assez longue. Or, cette condition a été remplie en l' espèce, puisque de telles ventes ont été
relevées durant toute la période d' enquête qui s' est déroulée entre janvier et juillet 1985 inclus.

22 Enfin, en ce qui concerne l' inclusion du bénéfice réalisé par les filiales de vente au Japon, il suffit de rappeler que les institutions ne sont pas tenues de choisir comme marge bénéficiaire raisonnable, au sens de l' article 2, paragraphe 3, sous b), ii), du règlement n 2176/84, la marge bénéficiaire du producteur plutôt que celle de sa filiale de vente sur le marché intérieur et qu' elles peuvent licitement retenir les marges bénéficiaires combinées des deux sociétés, étant donné que
celles-ci constituent une entité économique unique (arrêt du 5 octobre 1988, Silver Seiko/Conseil, point 17, 273/85 et 107/86, Rec. p. 5927).

23 Il y a donc lieu de considérer qu' en l' espèce le Conseil a déterminé une marge bénéficiaire conformément à l' article 2, paragraphe 3, sous b), ii), du règlement n 2176/84.

24 En ce qui concerne l' inclusion dans la valeur normale de certains rabais de reprise octroyés par les filiales japonaises à leurs clients, Minolta fait valoir que les rabais en question sont des rabais normaux sans rapport avec des opérations de reprise. Ces rabais seraient automatiquement accordés aux membres de la "Minolta Society", club octroyant divers avantages à ses membres et ouvert aux concessionnaires de MJS, sur la base d' un tarif uniforme. Minolta ajoute que, dans la mesure où ces
rabais seraient directement liés aux ventes considérées, au sens de l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n 2176/84, le Conseil n' aurait pas dû les inclure dans la valeur normale.

25 A cet égard, il y a lieu de constater que, selon le point 13 des considérants du règlement attaqué, le rabais de reprise, accordé pour la reprise d' un ancien appareil à l' acheteur d' un nouvel appareil, correspond à l' avantage que tire le producteur de la mise hors circuit des appareils repris et de l' absence d' un marché d' occasion de PPC au Japon. En effet, selon le Conseil "la demande d' appareils nouveaux est maintenue au niveau le plus élevé possible, les prix étant, par voie de
conséquence, également maintenus à un niveau plus élevé que ceux qui se pratiqueraient en présence d' un marché d' occasion" et "cette demande accrue stimule non seulement les prix, mais aussi les niveaux de production, ce qui devrait normalement se traduire par un renforcement des économies d' échelle et un accroissement proportionnel des marges bénéficiaires".

26 Dans ces conditions, les rabais en cause, qui correspondent à la valeur que le fabricant attribue au retrait des PPC usagés du marché, doivent être pris en considération pour déterminer la valeur normale conformément à l' article 2, paragraphe 3, du règlement n 2176/84.

27 Cette constatation ne saurait être infirmée par le fait, invoqué par Minolta, que les rabais sont accordés sur la base d' un tarif uniforme et ne varient pas d' une opération à l' autre.

28 Il s' ensuit que le Conseil a correctement construit la valeur normale en incluant dans cette valeur un montant correspondant aux paiements de reprise.

29 Il résulte de l' ensemble des considérations qui précèdent que le moyen tiré du calcul erroné de la valeur normale construite doit être rejeté dans son ensemble.

Sur le moyen tiré de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l' exportation

30 Minolta soutient que le Conseil a violé l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n 2176/84, au motif qu' il n' a procédé à aucun ajustement pour tenir compte des salaires payés aux vendeurs, de certains frais de transport et de certains autres frais exposés par la société de production de Minolta au Japon (ci-après "MO") et de MJS, alors que ceux-ci sont directement liés aux ventes considérées, au sens de cette disposition.

31 S' agissant, en premier lieu, de l' ajustement invoqué au titre des salaires payés aux vendeurs, il y a lieu de constater que le Conseil a procédé à l' ajustement demandé, en excluant toutefois de cet ajustement les salaires des chefs de vente. A cet égard, il convient d' observer qu' il a été démontré, au cours de l' enquête, que les fonctions des chefs de vente consistaient essentiellement à exercer des fonctions générales de gestion et de direction et non pas à vendre directement les PPC à des
acheteurs. Dès lors, c' est à juste titre que le Conseil a considéré que les salaires versés aux chefs de vente n' étaient pas directement liés aux ventes considérées, au sens de l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n 2176/84.

32 S' agissant, en second lieu, des frais de transport, il y a lieu de reconnaître que le Conseil a procédé correctement en octroyant un ajustement à concurrence des deux tiers des frais liés à l' utilisation des véhicules par les vendeurs et en considérant que le tiers restant, relatif à des frais de déplacement ordinaires des vendeurs, n' était pas directement lié aux ventes. Il en est de même en ce qui concerne l' ajustement octroyé au titre des frais de voyage des vendeurs.

33 S' agissant, en troisième lieu, de certains frais supportés, d' une part, par MO, (frais de stockage, de transport, d' assurance et de crédit) et, d' autre part, par MJS (frais de transport de véhicules et de crédit), il suffit d' observer que, ainsi que le Conseil l' a fait valoir, ces frais n' avaient pas de relation directe avec les ventes.

34 S' agissant enfin des ajustements demandés du fait que la valeur normale et le prix à l' exportation auraient été déterminés à des stades commerciaux différents, il convient de constater que cette valeur et ce prix à l' exportation ont été établis tous deux sur la base du prix auquel le produit a été vendu pour la première fois à un acheteur indépendant.

35 Il y a lieu de souligner ensuite que Minolta n' a pas apporté la preuve que les ventes, sur la base desquelles la valeur normale et le prix à l' exportation ont été déterminés, concernaient des catégories différentes d' acheteurs et se situaient, par conséquent, à des stades commerciaux différents de nature à justifier les ajustements demandés. Dès lors, les institutions n' étaient pas tenues de les accorder.

36 Eu égard à cette constatation, il n' y a pas lieu d' examiner la violation, alléguée par Minolta, de l' article VI du GATT et des articles 1er et 2 du code antidumping et qui consisterait dans la comparaison par le Conseil de la valeur normale et du prix à l' exportation à des stades commerciaux différents.

37 Il résulte des considérations qui précèdent que le moyen tiré de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l' exportation doit être rejeté.

Sur le moyen tiré du recours erroné à la méthode transaction par transaction pour déterminer le prix à l' exportation

38 Minolta fait valoir que l' application de la méthode transaction par transaction pour le calcul du prix à l' exportation n' a pas permis d' établir une comparaison valable entre ce prix et la valeur normale, conformément à l' article 2, paragraphes 2, 9 et 13, sous b), du règlement n 2176/84. Minolta estime que, dans la mesure où les valeurs normales ont été calculées pour chaque modèle de PPC, les prix à l' exportation auraient dû être établis selon la méthode des prix moyens pondérés, afin de
permettre une telle comparaison.

39 A cet égard, Minolta soutient qu' il résulte de l' arrêt du 7 mai 1987, Nippon Seiko/Conseil, précité, point 25, que l' exportateur doit avoir commis un acte fautif ou intentionnel, visant à masquer le dumping, pour que l' application de la méthode transaction par transaction soit justifiée. Or, en l' espèce, aucun acte de ce genre n' aurait été commis et, dès lors, il n' y avait pas lieu d' appliquer cette méthode et d' écarter ainsi celle des prix moyens pondérés à l' exportation.

40 Il convient de relever d' abord que l' article 2, paragraphe 9, du règlement n 2176/84 n' impose pas que la valeur normale et le prix à l' exportation soient calculés selon des méthodes identiques. Le paragraphe 13 du même article se limite à indiquer les différentes possibilités de calculer la marge de dumping, sans formuler l' obligation de similitude ou d' identité des méthodes choisies aux fins du calcul de la valeur normale et du prix à l' exportation (voir, entre autres, arrêt du 7 mai
1987, 258/84, précité, points 15 et 18).

41 Il convient de souligner ensuite que la liberté de choisir l' une des méthodes indiquées à l' article 2, paragraphe 13, sous b), du règlement n 2176/84 tend précisément à ce que soit retenue la méthode la plus appropriée à l' objet de la procédure d' institution d' un droit antidumping et que ce choix suppose l' appréciation de situations économiques complexes (voir arrêt du 7 mai 1987 précité, 258/84, points 21 et 24). Or, il ne résulte ni du dossier ni des débats menés devant la Cour que le
Conseil ait commis une erreur manifeste en choisissant la méthode transaction par transaction.

42 L' argument de Minolta, consistant à soutenir que l' application de la méthode transaction par transaction n' est justifiée que lorsque l' exportateur s' est rendu coupable de manoeuvres visant à dissimuler le dumping, ne saurait être retenu. En effet, si cette méthode est adéquate pour faire face à de telles manoeuvres, son adoption n' est toutefois aucunement limitée aux seuls cas où de tels comportements ont été constatés par les institutions.

43 Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du recours erroné à la méthode transaction par transaction pour déterminer le prix à l' exportation doit être rejeté.

Sur le moyen tiré de la violation du principe du contradictoire

44 Minolta fait valoir enfin que, si le Conseil a considéré que l' éventail des prix pratiqués par elle constituait une manoeuvre tendant à dissimuler un dumping et s' est fondé sur cette appréciation pour appliquer la méthode transaction par transaction, il a violé le principe "audi alteram partem" en ce que, à aucun moment, il ne lui a donné l' occasion de faire connaître sa position sur ce point.

45 Il suffit de constater que, dans la mesure où le Conseil a appliqué cette méthode, même en l' absence d' éventuelles manoeuvres visant à dissimuler le dumping, il n' était aucunement tenu d' entendre Minolta sur les éléments de preuve dont il aurait pu disposer à cet égard.

46 Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la violation du principe du contradictoire doit être rejeté.

Sur le moyen tiré de la violation de l' obligation de motivation

47 Minolta fait valoir que le Conseil a violé l' article 190 du traité CEE, dans la mesure où il n' a pas suffisamment motivé le recours à la méthode transaction par transaction pour établir la marge de dumping, prévue à l' article 2, paragraphe 13, sous b), du règlement n 2176/84.

48 Il y a lieu de constater, à cet égard, que le mode de calcul de la marge de dumping a été indiqué dans les points 6 et 29 des considérants du règlement provisoire et confirmé par les points 5 et 26 des considérants du règlement attaqué et, au surplus, que la méthode transaction par transaction est habituellement utilisée par les institutions, ce que les intéressés ne pouvaient pas ignorer.

49 Il s' ensuit que le moyen tiré de la violation de l' obligation de motivation doit être rejeté et, partant, le recours dans son ensemble.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

50 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. La requérante ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens, y compris ceux de la partie intervenante CECOM qui a conclu en ce sens. La Commission supportera, conformément à l' article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure, ses propres dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre)

déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté.

2) La requérante est condamnée aux dépens, y compris ceux exposés par la partie intervenante CECOM.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-178/87
Date de la décision : 10/03/1992
Type de recours : Recours en annulation - non fondé

Analyses

Droits antidumping sur les photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon.

Politique commerciale

Relations extérieures

Dumping


Parties
Demandeurs : Minolta Camera Co. Ltd
Défendeurs : Conseil des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mischo
Rapporteur ?: Moitinho de Almeida

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1992:112

Source

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