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10/03/1992 | CJUE | N°C-174/87

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Ricoh & Co. Ltd contre Conseil des Communautés européennes., 10/03/1992, C-174/87


Avis juridique important

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61987J0174

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 10 mars 1992. - Ricoh & Co. Ltd contre Conseil des Communautés européennes. - Droits antidumping sur les photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon. - Affaire C-174/87.
Recueil de jurisprudence 1992 page I-01335

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Di...

Avis juridique important

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61987J0174

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 10 mars 1992. - Ricoh & Co. Ltd contre Conseil des Communautés européennes. - Droits antidumping sur les photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon. - Affaire C-174/87.
Recueil de jurisprudence 1992 page I-01335

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

1. Recours en annulation - Personnes physiques ou morales - Actes les concernant directement et individuellement - Règlement instituant des droits antidumping - Droits différents imposés à des entreprises différentes - Recevabilité circonscrite pour chaque entreprise aux dispositions la concernant en particulier

(Traité CEE, art. 173, alinéa 2; règlements du Conseil n s 2176/84 et 535/87)

2. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Détermination de la valeur normale - Prix pratiqué au cours d' opérations commerciales normales - Filiales de vente contrôlées par le producteur - Recours aux prix pratiqués par ces filiales - Légalité

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 3, sous a) ))

3. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Détermination de la valeur normale - Prix pratiqué au cours d' opérations commerciales normales - Prix réellement payé ou à payer - Rabais pour reprise d' un produit usagé - Inclusion

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 3, sous a) ))

4. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Comparaison entre la valeur normale et le prix à l' exportation - Ajustements - Différences de stade commercial - Charge de la preuve

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 9 et 10, sous c) ))

5. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Marge de dumping - Comparaison entre la valeur normale et le prix à l' exportation - Ajustements - Différences dans les conditions de vente - Prise en compte subordonnée à l' existence d' un lien direct avec les ventes considérées - Frais ne présentant pas un tel lien - Exclusion

((Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 10, sous c) ))

6. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Préjudice - Production communautaire concernée - Production du produit similaire - Pouvoir d' appréciation des institutions - Absence d' une délimitation claire des segments de classification à l' intérieur de la gamme des produits considérés - Absence d' erreur d' appréciation

(Règlement du Conseil n 2176/84, art. 2, § 12, et 4, § 4)

7. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Préjudice - Production communautaire concernée - Exclusion de certains producteurs en raison de leurs relations avec les entreprises pratiquant le dumping - Pouvoir d' appréciation des institutions - Conditions d' exercice

(Règlement du Conseil n 2176/84, art. 4, § 5)

8. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Préjudice - Impact des importations faisant l' objet de dumping - Évaluation par rapport à la production du produit similaire dans la Communauté - Critères

(Règlement du Conseil n 2176/84, art. 4, § 4)

9. Politique commerciale commune - Défense contre les pratiques de dumping - Appréciation des intérêts de la Communauté par les institutions - Contrôle juridictionnel - Limites

(Règlement du Conseil n 2176/84, art. 12, § 1)

Sommaire

1. Un règlement imposant des droits antidumping différents à une série d' opérateurs économiques ne concerne individuellement l' un d' entre eux que par ses seules dispositions qui lui imposent un droit antidumping particulier et en fixent le montant, et non pas par celles qui imposent des droits antidumping à d' autres sociétés.

2. Lorsqu' il est constaté, pour ce qui est des ventes sur le marché intérieur, qu' un producteur confie des tâches relevant normalement d' un département de vente interne à ses filiales de vente avec lesquelles il forme une entité économique unique, le fait que les institutions se fondent, pour établir la valeur normale, sur les prix payés par le premier acheteur indépendant aux filiales de vente est justifié, étant donné que ces prix peuvent, à juste titre, être considérés comme les prix payés ou
à payer au cours d' opérations commerciales normales au sens de l' article 2, paragraphe 3, sous a), du règlement antidumping de base n 2176/84. La prise en considération des prix du distributeur affilié permet d' éviter que des coûts, qui sont manifestement englobés dans le prix de vente d' un produit lorsque cette vente est effectuée par un département de vente inséré dans l' organisation du producteur, ne le soient plus lorsque la même activité de vente est exercée par une société juridiquement
distincte, bien qu' économiquement contrôlée par le producteur.

3. Les rabais octroyés sur le prix de vente pour la reprise d' un ancien appareil à l' acheteur d' un nouvel appareil, qui correspondent à la valeur que le producteur attribue au retrait d' appareils usagés du marché, doivent être considérés comme une partie du prix réellement payé ou à payer par l' acheteur et doivent, dès lors, être pris en considération pour déterminer la valeur normale conformément à l' article 2, paragraphe 3, sous a), du règlement antidumping de base n 2176/84.

4. Un producteur qui n' apporte pas la preuve que les ventes sur la base desquelles la valeur normale et le prix à l' exportation ont été déterminés concernent des catégories différentes d' acheteurs et se situent, par conséquent, à des stades commerciaux différents ne justifie pas sa demande d' ajustement au titre des différences de stade commercial, au sens de l' article 2, paragraphes 9 et 10, du règlement antidumping de base n 2176/84.

5. Ne sauraient être considérés comme ayant une relation directe avec les ventes, au sens de l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement antidumping de base n 2176/84, et justifier un ajustement à la baisse de la valeur normale pour différences dans les conditions de vente ni les frais de déplacement, de communication, de publicité, de promotion des ventes ou de représentation, qui font partie des frais administratifs et généraux, ni les rabais de reprise accordés à l' acheteur d' un nouvel
appareil pour la reprise d' un ancien appareil.

6. Les institutions communautaires n' ont pas commis d' erreur d' appréciation en considérant, aux fins de l' évaluation du préjudice subi par l' industrie communautaire, comme "production du produit similaire dans la Communauté", au sens de l' article 4, paragraphe 4, du règlement antidumping de base n 2176/84, celle de l' ensemble des photocopieurs, tous segments confondus, à l' exclusion des appareils pour lesquels il n' y avait pas de production communautaire, dès lors que, selon les études de
marché, sur lesquelles les institutions se sont basées, il n' existe pas de délimitation claire des segments de classification des photocopieurs, dans la mesure où, d' une part, certains photocopieurs peuvent être classés dans plusieurs segments différents, compte tenu de leurs caractéristiques et données techniques, et où, d' autre part, il existe une concurrence tant entre les appareils relevant de segments adjacents qu' entre ceux classés dans des segments non adjacents.

7. Il résulte de l' article 4, paragraphe 5, du règlement antidumping de base n 2176/84 qu' il appartient aux institutions, dans l' exercice de leur pouvoir d' appréciation, d' examiner si elles doivent, pour la détermination de l' existence d' un préjudice, exclure de la production communautaire les producteurs ayant des liens avec les exportateurs ou les importateurs ou qui sont eux-mêmes importateurs du produit faisant l' objet d' un dumping. Ce pouvoir d' appréciation doit être exercé cas par
cas, sous le contrôle de la Cour, en fonction de tous les faits pertinents.

8. Les institutions communautaires ne sont pas tenues, dans le cadre de la détermination de l' existence d' un préjudice, de prendre en considération les bénéfices ou pertes que les producteurs communautaires ont réalisés sur l' ensemble de leurs activités dans le domaine en cause. En effet, conformément à l' article 4, paragraphe 4, du règlement antidumping de base n 2176/84, l' effet des importations qui font l' objet d' un dumping doit être évalué par rapport à la production du produit similaire
dans la Communauté.

9. La question de savoir si, dans l' hypothèse de l' existence d' un préjudice résultant de pratiques de dumping, les intérêts de la Communauté nécessitent une action communautaire suppose l' appréciation de situations économiques complexes. Le contrôle juridictionnel d' une telle appréciation doit être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l' exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l' absence d' erreur manifeste dans l' appréciation de ces
faits ou de l' absence de détournement de pouvoir.

Parties

Dans l' affaire C-174/87,

Ricoh Co. Ltd, Tokyo, Japon, représentée par Me Wolfgang Knapp, avocat au barreau de Bonn, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Mes Elvinger & Hoss, 15, côte d' Eich,

partie requérante,

contre

Conseil des Communautés européennes, représenté par MM. Hans-Juergen Lambers, directeur au service juridique, et Erik Stein, conseiller juridique, en qualité d' agents, assistés de Mes Hans-Juergen Rabe et Michael Schuette, avocats respectivement au barreau de Hambourg et à celui de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Joerg Kaeser, directeur de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d' investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer, Kirchberg,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. John Temple Lang, conseiller juridique, et Eric White, membre du service juridique, en qualité d' agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Roberto Hayder, représentant du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie intervenante,

et par

Committee of European Copier Manufacturers (CECOM), Cologne, représenté par Mes Dietrich Ehle et Volker Schiller, avocats au barreau de Cologne, ayant élu domicile à Luxembourg, en l' étude de Mes Arendt et Harles, 4, avenue Marie-Thérèse,

partie intervenante,

ayant pour objet l' annulation du règlement (CEE) n 535/87 du Conseil, du 23 février 1987, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 54, p. 12), dans sa totalité ou, subsidiairement, dans la mesure où il s' applique à la requérante,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. R. Joliet, président de chambre, Sir Gordon Slynn, MM. F. Grévisse, J. C. Moitinho de Almeida et M. Zuleeg, juges,

avocat général: M. J. Mischo

greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, administrateur principal

vu le rapport d' audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l' audience du 3 octobre 1990, au cours de laquelle Ricoh a été représentée par M. Ian Stewart Forrester, QC, et Me Marc Hansen, avocat au barreau de Bruxelles,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 13 décembre 1990,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 9 juin 1987, la société Ricoh Co. Ltd (ci-après "Ricoh"), ayant son siège à Tokyo, a, en vertu de l' article 173, deuxième alinéa, du traité CEE, demandé l' annulation du règlement (CEE) n 535/87 du Conseil, du 23 février 1987, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 54, p. 12, ci-après "règlement attaqué"), dans sa totalité ou, subsidiairement, dans la mesure où il s'
applique à la requérante.

2 Ricoh est une société qui fabrique des photocopieurs à papier ordinaire (ci-après "PPC") qu' elle commercialise, d' une part, dans la Communauté par l' intermédiaire de ses filiales de vente Ricoh UK Limited, Ricoh Nederland BV et Ricoh Deutschland GmbH et, d' autre part, au Japon où elle opère par l' intermédiaire de neuf succursales et de 52 filiales dont la plupart lui appartiennent en pleine propriété.

3 En juillet 1985, Ricoh a fait l' objet, avec d' autres producteurs japonais, d' une plainte déposée auprès de la Commission par le comité des fabricants européens d' appareils de copie qui l' accusait de vendre ses produits dans la Communauté à des prix de dumping.

4 La procédure antidumping engagée par la Commission sur la base du règlement (CEE) n 2176/84 du Conseil, du 23 juillet 1984, relatif à la défense contre les importations qui font l' objet d' un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (JO L 201, p. 1), a conduit à l' adoption du règlement (CEE) n 2640/86 de la Commission, du 21 août 1986, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire
originaires du Japon (JO L 239, p. 5). Le taux du droit antidumping provisoire a été fixé à 15,8 % du prix net franco frontière de la Communauté pour les importations de PPC fabriqués et exportés par Ricoh. Par le règlement attaqué, pris sur proposition de la Commission, le Conseil a ensuite fixé le droit antidumping définitif à 20 %.

5 Pour un plus ample exposé des faits du litige, du déroulement de la procédure ainsi que des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d' audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.

Sur la recevabilité

6 Le Conseil soutient, en premier lieu, que le recours est irrecevable dans la mesure où il vise l' annulation du règlement attaqué dans son ensemble. Il fait valoir que Ricoh n' est pas concernée directement et individuellement par les dispositions du règlement attaqué, qui imposent des droits antidumping sur les importations de produits fabriqués par des entreprises exportatrices avec lesquelles elle n' a aucun lien. Selon le Conseil, les seules dispositions qui peuvent affecter Ricoh
individuellement sont celles qui concernent les importations de ses produits.

7 A cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, et notamment l' arrêt du 14 mars 1990, Gestetner Holdings/Conseil et Commission, point 12 (C-156/87, Rec. p. 781), un règlement imposant des droits antidumping différents à une série d' opérateurs économiques ne concerne individuellement l' un d' entre eux que par ses seules dispositions qui lui imposent un droit antidumping particulier et en fixent le montant, et non par celles qui imposent des droits antidumping à d'
autres sociétés.

8 Les conclusions principales du recours tendant à l' annulation du règlement attaqué dans son ensemble doivent, dès lors, être rejetées comme irrecevables.

9 Le Conseil estime, en second lieu, que la demande de Ricoh tendant à ce que la Cour ordonne aux institutions la restitution des droits antidumping perçus est irrecevable dans le cadre d' un recours en annulation formé au titre de l' article 173 du traité CEE.

10 Les conclusions formées à cet égard par Ricoh sont, en effet, irrecevables, étant donné que la Cour ne peut, dans le cadre de la procédure de contrôle de légalité établie par l' article 173 prononcer une telle injonction (voir, entre autres, arrêt du 26 avril 1988, Apesco/Commission, point 31, 207/86, Rec. p. 2151).

11 Il résulte de l' ensemble des considérations qui précèdent qu' il y a lieu d' examiner au fond les conclusions subsidiaires du recours qui tendent à l' annulation du règlement attaqué, dans celles de ses dispositions qui concernent individuellement Ricoh.

Sur le fond

12 A l' appui de son recours, Ricoh invoque plusieurs moyens tirés respectivement du calcul erroné de la valeur normale, de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l' exportation, de l' évaluation incorrecte du préjudice subi par l' industrie communautaire, d' une appréciation erronée des intérêts de la Communauté et du calcul erroné du droit antidumping.

Sur le moyen tiré du calcul erroné de la valeur normale

13 Ricoh soutient que les institutions ont violé l' article 2, paragraphes 3, sous a), et 7, du règlement n 2176/84. A cet égard, Ricoh fait valoir, en premier lieu, que, dans la mesure où les institutions ont considéré que les prix demandés par Ricoh à ses filiales commerciales intérieures n' étaient pas pratiqués dans le cadre d' opérations commerciales normales et ont déterminé la valeur normale en fonction des prix facturés par ses filiales aux premiers acheteurs indépendants, elles auraient dû
déduire de la valeur normale certains frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux engagés par ces filiales et dont elles ont tenu compte, en ce qui concerne les filiales européennes, pour déterminer le prix à l' exportation. A cet égard, elle fait valoir que l' article 2, paragraphe 3, sous a), du règlement précité doit être lu en liaison avec l' article 2, paragraphe 9, du même règlement, selon lequel la valeur normale et le prix à l' exportation doivent normalement être
comparés au même stade commercial. Or, en refusant d' opérer ces déductions, les institutions auraient déterminé la valeur normale au niveau du revendeur ou de l' utilisateur final et non au niveau sortie usine auquel a été construit le prix à l' exportation.

14 Il y a lieu de constater, tout d' abord, que, selon les pièces du dossier, Ricoh contrôle économiquement ses filiales de vente au Japon et leur confie des tâches qui relèvent normalement d' un département de vente interne à l' organisation du producteur.

15 Comme la Cour l' a déjà relevé, notamment dans l' arrêt du 5 octobre 1988, Brother/Conseil, point 16 (250/85, Rec. p. 5683), le partage des activités de production et de celles de vente à l' intérieur d' un groupe formé par des sociétés juridiquement distinctes ne saurait rien enlever au fait qu' il s' agit d' une entité économique unique, qui organise de cette manière un ensemble d' activités exercées, dans d' autres cas, par une entité qui est unique aussi du point de vue juridique.

16 Dans ces conditions, le fait que les institutions se soient fondées sur les prix payés par le premier acheteur indépendant aux filiales de vente est justifié, étant donné que ces prix peuvent, à juste titre, être considérés comme les prix payés ou à payer au cours d' opérations commerciales normales au sens de l' article 2, paragraphe 3, sous a), du règlement n 2176/84.

17 Au vu de ces constatations et comme la Cour l' a jugé dans l' arrêt du 5 octobre 1988, Silver Seiko/Conseil, point 14 (273/85 et 107/86, Rec. p. 5927), la prise en considération des prix du distributeur affilié permet d' éviter que des coûts, qui sont manifestement englobés dans le prix de vente d' un produit lorsque cette vente est effectuée par un département de vente inséré dans l' organisation du producteur, ne le soient plus lorsque la même activité de vente est exercée par une société
juridiquement distincte, bien qu' économiquement contrôlée par le producteur.

18 Enfin, en ce qui concerne l' argument de Ricoh selon lequel, en ayant refusé d' opérer les déductions demandées, le Conseil n' aurait pas déterminé la valeur normale à un stade comparable à celui auquel a été calculé le prix à l' exportation, il y a lieu de relever que, comme la Cour l' a affirmé dans l' arrêt du 5 octobre 1988, Canon/Conseil, point 19 (277/85 et 300/85, Rec. p. 5731), l' exigence de comparabilité posée par l' article 2, paragraphe 3, sous a), du règlement n 2176/84 est
satisfaite, dès lors que la valeur normale et le prix à l' exportation sont établis tous deux à partir de la première vente à un acheteur indépendant. Ces éléments doivent alors être comparés tels qu' ils ont été établis, sauf application des ajustements et des déductions expressément prévus aux paragraphes 9 et 10 de l' article 2, précité.

19 Ricoh fait valoir, en second lieu, que le Conseil a déterminé la valeur normale en fonction du prix brut payé aux filiales commerciales intérieures de Ricoh, sans déduire de ce prix les remises pour reprise. Ce faisant, le Conseil n' aurait pas tenu compte du "prix réellement payé ou à payer" pour les PPC vendus au Japon, comme l' exige l' article 2, paragraphe 3, sous a), du règlement n 2176/84.

20 A cet égard, il y a lieu de constater que, selon le point 13 des considérants du règlement attaqué, le rabais de reprise, accordé pour la reprise d' un ancien appareil à l' acheteur d' un nouvel appareil, correspond à l' avantage que tire le producteur de la mise hors circuit des appareils repris et de l' absence d' un marché d' occasion de PPC au Japon. En effet, selon le Conseil "la demande d' appareils nouveaux est maintenue au niveau le plus élevé possible, les prix étant, par voie de
conséquence, également maintenus à un niveau plus élevé que ceux qui se pratiqueraient en présence d' un marché d' occasion" et "cette demande accrue stimule non seulement les prix, mais aussi les niveaux de production, ce qui devrait normalement se traduire par un renforcement des économies d' échelle et un accroissement proportionnel des marges bénéficiaires".

21 Dans ces conditions, les rabais en cause, qui correspondent à la valeur que le fabricant attribue au retrait des PPC usagés du marché, doivent être considérés comme une partie du prix réellement payé ou à payer par l' acheteur et doivent, dès lors, être pris en considération pour déterminer la valeur normale conformément à l' article 2, paragraphe 3, du règlement n 2176/84.

22 Il résulte de l' ensemble des considérations qui précèdent que le moyen tiré du calcul erroné de la valeur normale doit être rejeté.

Sur le moyen tiré de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l' exportation

23 Ricoh fait valoir que le Conseil a violé l' obligation, mentionnée à l' article 2, paragraphe 9, du règlement n 2176/84, d' établir une comparaison valable entre la valeur normale et le prix à l' exportation en ce que, dans le cadre de la construction du prix à l' exportation, il a déduit tous les coûts et bénéfices de chacune des filiales commerciales de Ricoh dans la Communauté, alors qu' il a refusé de déduire de la valeur normale des dépenses équivalentes engagées par les filiales
commerciales de Ricoh au Japon. Selon Ricoh, le refus d' autoriser ces déductions aurait eu pour effet que, contrairement à la disposition susmentionnée du règlement n 2176/84, le prix à l' exportation et la valeur normale, établis respectivement au stade sortie usine et au stade du distributeur ou même de l' utilisateur final, n' ont pas été comparés au même stade commercial.

24 Ricoh reproche en particulier au Conseil de ne pas avoir déduit de la valeur normale, d' une part, certains frais administratifs et généraux dont, notamment, les frais de déplacement, de communication, de publicité, de promotion, de ventes, de représentation et d' utilisation des voitures de la société et, d' autre part, les rabais de reprise. De l' avis de Ricoh, le fait que certains de ces frais ou rabais ne soient pas expressément mentionnés à l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement
n 2176/84 n' exclut pas la possibilité de procéder aux ajustements correspondants qui étaient nécessaires à l' établissement d' une comparaison valable au sens de l' article 2, paragraphe 9, du règlement n 2176/84.

25 Il convient d' observer, à cet égard, que la valeur normale et le prix à l' exportation ont été établis tous deux sur la base du prix auquel le produit a été vendu pour la première fois à un acheteur indépendant.

26 Il y a lieu de souligner ensuite que Ricoh n' a pas apporté la preuve que les ventes, sur la base desquelles la valeur normale et le prix à l' exportation ont été déterminés, concernaient des catégories différentes d' acheteurs et se situaient, par conséquent, à des stades commerciaux différents de nature à justifier les ajustements demandés. Dès lors, les institutions n' étaient pas tenues de les accorder.

27 Pour ce qui concerne les ajustements demandés au titre de certains frais administratifs et généraux, il suffit, d' une part, de rappeler que l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n 2176/84 exclut, en règle générale, tout ajustement à ce titre et, d' autre part, de constater que Ricoh n' a prouvé l' existence d' aucune circonstance particulière de nature à justifier une dérogation à la règle ainsi posée.

28 S' agissant des remises pour reprise, Ricoh fait valoir que celles-ci représentent des coûts qui ont une relation directe avec les ventes et qui réduisent effectivement son bénéfice net, puisqu' elle détruit les photocopieurs usagés repris, lesquels ne sont pas inclus dans sa comptabilité.

29 A cet égard, il y a lieu de relever que les frais inhérents auxdits rabais présentent une analogie avec les frais administratifs et généraux, y compris les frais de recherche et de développement ou de publicité, pour lesquels l' article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n 2176/84 exclut, en général, tout ajustement. En effet, tous ces frais se traduisent par des avantages qui se répercutent sur l' ensemble de l' activité du producteur. Les rabais en cause ne sauraient, dès lors, être
considérés comme directement liés à des ventes en particulier et c' est donc à juste titre que les institutions ont refusé de procéder aux ajustements demandés.

30 Il résulte de l' ensemble des considérations qui précèdent que le moyen tiré de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l' exportation doit être rejeté.

Sur les moyens tirés de l' évaluation incorrecte du préjudice subi par l' industrie communautaire

A - Sur l' appréciation erronée de la similarité des PPC

31 Il convient de souligner à titre liminaire que les institutions ont conclu que tous les PPC, au moins ceux relevant de segments adjacents, depuis le photocopieur personnel jusqu' au segment 5 du classement Dataquest, devaient être considérés comme produits similaires, les appareils relevant du segment 6, pour lesquels il n' y a pas eu de production communautaire, ayant été exclus de l' enquête (point 31 des considérants du règlement attaqué).

32 Il y a lieu de constater à cet égard que, selon les classements des PPC réalisés par Info-Markt et Dataquest, auxquels les institutions se sont référées dans la présente affaire, le marché des PPC comprend différents segments définis en fonction des caractéristiques techniques et des performances de ces appareils. Comme l' indique toutefois le point 31 des considérants du règlement attaqué, au cours de la période de référence, les producteurs japonais ont exporté des PPC relevant uniquement du
segment des photocopieurs personnels et des segments 1 à 4.

33 Ricoh soutient que c' est à tort que les institutions ont ignoré la segmentation du marché des PPC et considéré tous ces appareils comme des produits similaires au sens de l' article 2, paragraphe 12, du règlement n 2176/84. Pour démontrer l' absence de similitude entre les PPC relevant de segments adjacents, Ricoh observe que l' acheteur d' un PPC du segment 1 n' achèterait pas un PPC personnel, au motif que le coût par photocopie et l' utilité relative de ce dernier diminueraient à mesure que
le volume de copies augmente.

34 Ricoh fait valoir, par ailleurs, qu' il n' existe aucune similitude entre les PPC relevant de segments dits non-adjacents. A cet égard elle se réfère, tout d' abord, à la décision 88/88/CEE de la Commission, du 22 décembre 1987, relative à l' entreprise commune Olivetti/Canon (JO L 52, p. 51), selon laquelle les PPC se répartiraient en trois marchés distincts, à savoir celui de la gamme inférieure (allant des PPC personnels jusqu' au segment 2 de la classification Dataquest), celui de la gamme
moyenne (segments 3 et 4) et celui de la gamme supérieure (segments 4 à 6). Elle souligne, ensuite, que la segmentation du marché, ainsi admise par la Commission, résulterait de la concurrence qui s' opère entre les PPC relevant d' un même segment et qui serait beaucoup plus vive qu' entre PPC de segments différents.

35 Il convient de relever à cet égard qu' aux termes de l' article 4, paragraphe 1, du règlement n 2176/84 "il n' est déterminé de préjudice que si les importations qui font l' objet d' un dumping ou de subventions causent un préjudice, c' est-à-dire causent ou menacent de causer, par les effets du dumping ou de la subvention, un préjudice important à une production établie de la Communauté ou retardent sensiblement l' établissement de cette production". En vertu du paragraphe 4 du même article, "l'
effet des importations qui font l' objet d' un dumping ou de subventions doit être évalué par rapport à la production du produit similaire dans la Communauté ...". En outre, l' article 2, paragraphe 12, de ce même règlement de base dispose que "on entend par produit similaire un produit identique, c' est-à-dire semblable à tous égards au produit considéré, ou, en l' absence d' un tel produit, un autre produit qui présente des caractéristiques ressemblant étroitement à celles du produit considéré".

36 Sur la base des études de marché établies par Info-Markt et Dataquest, les institutions ont conclu que si tous les PPC n' étaient pas similaires, à tout le moins les PPC relevant de segments adjacents, depuis le photocopieur personnel jusqu' à ceux du segment 5 du classement Dataquest, devaient être considérés comme tels. En effet, il résulte du dossier que, dans les études susmentionnées, les segments n' ont pas été clairement délimités, dans la mesure où, d' une part, certains PPC peuvent être
classés dans plusieurs segments différents, compte tenu de certaines de leurs caractéristiques et données techniques, et où, d' autre part, il existe une concurrence tant entre les PPC relevant de segments adjacents qu' entre les PPC classés dans les différents segments mentionnés ci-avant.

37 Les différences entre des PPC relevant d' un seul ou de différents segments, relatives notamment à leur vitesse et à leur capacité de copie, ne sauraient suffire à établir que ces PPC n' ont pas de fonctions identiques ou ne répondent pas aux mêmes besoins. Comme l' indique d' ailleurs le point 30, troisième alinéa, des considérants du règlement attaqué, le fait que le choix des clients peut être déterminé en fonction de facteurs tenant notamment à la décision de centraliser ou de décentraliser
leurs installations de photocopie confirme l' existence d' une concurrence entre appareils de différentes catégories.

38 Il y a lieu de souligner que, compte tenu des chevauchements entre les différents segments, mentionnés ci-avant, la vitesse de copie ne saurait être retenue comme un élément de distinction des PPC. Il résulte, en effet, des pièces du dossier que, notamment, les PPC qui produisent entre 40 et 45 copies par minute peuvent appartenir soit au segment 3 (allant de 31 à 45 copies) soit au segment 4 (allant de 40 à 75 copies). Il en va de même pour les photocopieurs personnels qui produisent jusqu' à 12
copies par minute, alors que ceux des segments 1a et 1b produisent respectivement jusqu' à 20 et de 15 à 20 copies par minute.

39 En ce qui concerne l' argument de Ricoh tiré de la définition des marchés en cause telle qu' elle résulte de la décision 88/88, il convient d' admettre, avec la Commission, que cette définition n' exclut pas une certaine interchangeabilité entre les PPC relevant des trois segments en cause ni le fait que celle-ci soit moindre que celle qui s' opère entre les PPC relevant d' un même segment. Il résulte, en effet, des considérations qui précèdent que les segments définis dans cette décision, comme
ceux résultant des classifications Dataquest et Info-Markt, ne se traduisent pas en des marchés distincts.

40 Compte tenu de ce qui précède, il convient de constater que Ricoh n' a pas établi que les institutions avaient commis une erreur d' appréciation en considérant qu' en l' espèce "la production du produit similaire dans la Communauté", au sens de l' article 4, paragraphe 4, du règlement n 2176/84, était celle de l' ensemble des PPC, tous segments confondus.

41 Le moyen tiré de l' appréciation erronée de la similarité des produits doit, dès lors, être rejeté.

B - Sur la définition erronée de la production de la Communauté

42 Ricoh fait valoir que, compte tenu des nombreuses importations en provenance du Japon effectuées par Rank Xerox, Océ et Olivetti, les institutions n' auraient pas dû intégrer ces sociétés au nombre des producteurs formant la "production de la Communauté", au sens de l' article 4, paragraphe 5, du règlement n 2176/84, et modifier ainsi la position qu' elles avaient adoptée dans plusieurs affaires antérieures. De l' avis de Ricoh, aucun producteur de la Communauté n' était en mesure d' alléguer l'
existence d' un préjudice résultant des importations de petits photocopieurs en provenance du Japon. En tout état de cause la production européenne dans ce domaine était, selon Ricoh, faible ou inexistante.

43 En ce qui concerne Rank Xerox, Ricoh rappelle tout d' abord que cette entreprise participe à raison de 50 % au capital de Fuji Xerox, société japonaise auprès de laquelle, d' une part, elle s' est procuré de grandes quantités de PPC, entièrement mis au point et portant l' étiquette Rank Xerox, des "kits" et des composants et, d' autre part, elle a obtenu une assistance technique et une aide à la conception. En achetant dans ces conditions des PPC à Fuji Xerox, Rank Xerox avait tout à la fois la
possibilité de réaliser un bénéfice et d' agir sur le prix de transfert des appareils en cause. L' inclusion de Rank Xerox dans la catégorie des producteurs de la Communauté ne pouvait, dès lors, que fausser l' appréciation du préjudice allégué.

44 Il convient de relever, à cet égard, que, statuant sur le même argument alors invoqué par Gestetner, la Cour a, dans l' arrêt du 14 mars 1990, C-156/87, précité, point 57, relevé que, en ce qui concerne l' importation de PPC provenant du Japon et fournis par Fuji Xerox, les institutions avaient considéré que Rank Xerox n' avait pas apporté la preuve de ce qu' elle avait été conduite à acheter les appareils pour des raisons d' autoprotection. Il s' agissait, selon des renseignements obtenus, d'
une décision de gestion prise dans le cadre du groupe Xerox. Toutefois, le volume de ces importations a été minime par rapport à toute la gamme de PPC produits par Rank Xerox dans la Communauté ainsi que par rapport à l' ensemble du marché communautaire (1 %) et les prix de revente ont été identiques à ceux des appareils correspondants produits par Rank Xerox.

45 Ricoh conteste ensuite le fait que la production de Rank Xerox ait été regardée comme faisant partie de la production communautaire, alors qu' une part de son activité consistait en réalité à assembler ou à fabriquer des produits, dans la Communauté, à partir de pièces ou matériaux originaires du Japon. Elle fait valoir, à cet égard, que l' article 13, paragraphe 10, ajouté au texte du règlement n 2176/84 par le règlement (CEE) n 1761/87 du Conseil, du 22 juin 1987 (JO L 167, p. 9), dit
"règlement tournevis", prévoit la possibilité d' instituer des droits antidumping dans ce type de situation. Elle estime que, en soumettant au champ d' application de cette disposition exclusivement les sociétés installées au Japon et en comptant, par ailleurs, les sociétés établies dans la Communauté qui se livrent aux mêmes activités "tournevis" au nombre des producteurs communautaires, les institutions traiteraient différemment des situations similaires.

46 Cet argument ne peut être retenu. Il convient en effet de relever, à cet égard, que l' article 13, paragraphe 10, du règlement n 2176/84 a été introduit à une date postérieure à celle de l' adoption du règlement attaqué et concerne l' institution d' un droit antidumping sur les produits assemblés ou fabriqués dans la Communauté à partir de pièces ou de matériaux originaires du ou des pays d' exportation en cause et non pas la définition de la production de la Communauté.

47 En ce qui concerne Océ et Olivetti, également importateurs de PPC du Japon, mais en provenance de fournisseurs non apparentés, Ricoh fait valoir que leurs importations représentaient 35 % à 40 % de leurs ventes et de leurs locations de machines dans la CEE et qu' elles auraient de ce fait également dû être exclues de la production de la Communauté.

48 Cet argument ne saurait être accueilli. En effet, comme la Cour l' a jugé dans l' arrêt du 14 mars 1990, C-156/87, précité, point 47, Olivetti et Océ importaient des PPC en provenance du Japon afin de pouvoir offrir à leurs clients une gamme complète de modèles. Les PPC, relevant des segments 1 et 2, étaient vendus à des prix supérieurs à ceux de leurs fournisseurs et représentaient entre 35 % et 40 % des ventes et locations de ces nouveaux appareils sur le marché, au cours de la période comprise
entre 1981 et juillet 1985. Les tentatives de ces deux producteurs visant à mettre au point et à lancer sur le marché une gamme complète de modèles ont cependant échoué, du fait de la dépression des prix du marché imposée par les importations japonaises.

49 L' argument de Ricoh tiré de la pratique antérieure des institutions ne saurait pas davantage être accueilli. En effet, ainsi que la Cour l' a jugé dans le même arrêt, C-156/87, précité, point 43, pour l' application de l' article 4, du règlement n 2176/84, il appartient aux institutions, dans l' exercice de leur pouvoir d' appréciation, d' examiner si elles doivent exclure de la production communautaire les producteurs ayant des liens avec les exportateurs ou les importateurs ou qui sont
eux-mêmes importateurs du produit faisant l' objet d' un dumping. Ce pouvoir d' appréciation doit être exercé cas par cas en fonction de tous les faits pertinents.

50 Or, il y a lieu de constater que, selon les pièces du dossier et les débats menés devant la Cour, c' est dans l' exercice d' un tel pouvoir d' appréciation que, dans chaque cas mentionné par la requérante, un producteur communautaire a été exclu ou inclus dans la production de la Communauté.

51 En ce qui concerne, enfin, l' argument de Ricoh selon lequel la production communautaire dans le domaine des petits photocopieurs serait faible ou inexistante, il suffit de constater qu' en l' espèce les institutions ont correctement considéré comme produit similaire l' ensemble des PPC relevant de segments adjacents, depuis le photocopieur personnel jusqu' à ceux du segment 5 du classement Dataquest, et que, dès lors, la production de la Communauté dans le seul domaine des petits photocopieurs
ne saurait être prise en considération pour la définition de la production de la Communauté.

52 Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de la définition erronée de la production de la Communauté n' est pas fondé et doit, dès lors, être rejeté.

C - Sur l' appréciation erronée des facteurs du préjudice

53 Ricoh conteste l' analyse des différents facteurs à laquelle les institutions ont procédé pour évaluer le préjudice subi par la production communautaire, de même que l' existence même du préjudice ainsi défini, qui, selon Ricoh, résulterait non pas des importations en cause, mais de la politique suivie par les entreprises communautaires et de l' infériorité de leurs appareils par rapport aux PPC japonais.

54 A cet égard, il convient de se référer aux dispositions du règlement n 2176/84, qui indiquent les modalités à suivre pour déterminer le préjudice, et notamment à l' article 4, paragraphe 1, de ce règlement. En vertu de cette disposition, d' une part, il n' y a de préjudice que si les importations qui font l' objet d' un dumping causent ou menacent de causer, par les effets du dumping, un préjudice important à une production établie dans la Communauté et, d' autre part, les préjudices causés par
d' autres facteurs ne doivent pas être attribués aux importations qui font l' objet d' un dumping.

55 L' article 4, paragraphe 2, du règlement n 2176/84 énonce les facteurs sur lesquels doit porter l' examen du préjudice, à savoir: a) le volume des importations faisant l' objet d' un dumping, b) le prix de ces importations, et c) leur impact sur la production concernée. Cette même disposition précise toutefois que ni un seul ni même plusieurs de ces facteurs ne constituent nécessairement une base de jugement déterminante.

56 C' est donc dans l' exercice de leur pouvoir d' appréciation que les institutions sont appelées à analyser les facteurs susmentionnés et à retenir parmi les éléments d' appréciation, énumérés à cette fin dans la disposition précitée, ceux qu' elles jugent pertinents dans chaque cas d' espèce. Dans la présente affaire, les institutions ont procédé à un examen détaillé des facteurs mentionnés par cette disposition.

57 S' agissant du volume des importations japonaises, il y a lieu d' observer que, si les ventes et locations de nouveaux appareils fabriqués par les producteurs communautaires ont augmenté de 74 % entre 1981 et 1984, leur part de marché est tombée de 21 % en 1981 à 11 %, au cours de la période de référence, alors que la part de marché communautaire détenue par les producteurs japonais est passée au cours de la même période de 70 % à 78 %. Les institutions ont, dès lors, pu considérer que les
importations japonaises, qui ont augmenté de plus de 120 % entre 1981 et 1984, avaient empêché une évolution plus favorable des ventes et locations de PPC par les entreprises communautaires.

58 En ce qui concerne la sous-cotation des prix, auxquels ces produits ont été importés, il suffit de constater que, malgré les caractéristiques et performances supplémentaires que présentaient les PPC fabriqués au Japon, par rapport aux PPC comparables fabriqués dans la Communauté, leurs prix étaient égaux ou même inférieurs à ceux des PPC des producteurs communautaires (points 44, 47 et 49 des considérants du règlement attaqué).

59 Pour ce qui est de l' impact que les importations à bas prix ont eu sur la production concernée, il y a lieu de relever, outre la diminution sensible des parts de marché détenues par les producteurs communautaires, mentionnée ci-avant, que la rentabilité des activités des producteurs communautaires concernés a également baissé au cours de la période de référence.

60 Il convient de souligner, à cet égard, que les institutions n' étaient pas tenues, comme le prétend Ricoh, de prendre en considération les bénéfices ou pertes que les producteurs communautaires ont réalisés sur l' ensemble de leurs activités dans le domaine de la photocopie. En effet, conformément à l' article 4, paragraphe 4, du règlement n 2176/84, l' effet des importations qui font l' objet d' un dumping doit être évalué par rapport à la production du produit similaire dans la Communauté. Dès
lors, c' est à juste titre que, tenant compte de cette production, telle que définie ci-avant, le Conseil a évalué l' incidence des importations japonaises sur la rentabilité des producteurs communautaires.

61 Ricoh allègue, par ailleurs, que l' évolution du marché européen des photocopieurs démontrerait que les institutions ont, à tort, attribué aux importations en cause un préjudice qui résulterait d' autres facteurs, et en particulier de la décision des entreprises communautaires de ne pas entreprendre la fabrication des petits photocopieurs, eu égard aux coûts et aux difficultés technologiques qu' aurait impliqué le développement de ces nouveaux modèles.

62 Cet argument ne saurait être accueilli. Ainsi, en ce qui concerne Rank Xerox, le Conseil expose au point 85 des considérants du règlement attaqué que, à partir de 1982/1983, les difficultés rencontrées par cette société pour développer un nouveau modèle ont été résolues et qu' un tel modèle a effectivement été lancé sur le marché. Dès lors, le Conseil n' a commis aucune erreur d' appréciation lorsqu' il a considéré que de telles difficultés étaient étrangères au préjudice causé par ailleurs à
Rank Xerox du fait des importations en provenance du Japon.

63 En ce qui concerne Océ et Olivetti, il y a lieu de rappeler, comme cela a été indiqué ci-avant (point 48), que les tentatives de ces deux producteurs visant à mettre au point et à lancer sur le marché une gamme complète de modèles ont échoué du fait de la dépression des prix du marché entraînée par les importations japonaises.

64 S' agissant, enfin, de l' argumentation relative à la prétendue supériorité des PPC japonais, à la gamme de leurs appareils, à leur qualité et fiabilité, il y a lieu de relever qu' aucun élément de preuve n' a été apporté à cet égard.

65 A la lumière des considérations qui précèdent, le moyen tiré de l' appréciation erronée des facteurs du préjudice doit être rejeté.

Sur le moyen tiré d' une appréciation erronée des intérêts de la Communauté

66 Ricoh soutient que l' évaluation des intérêts de la Communauté a été faussée, du fait que Rank Xerox, Océ et Olivetti, qui dépendaient et tiraient bénéfice des importations en provenance du Japon, ont été considérées comme faisant partie de l' ensemble des producteurs formant la production de la Communauté et que les institutions n' ont pas comparé leur intérêt avec celui des importateurs OEM, tels que Gestetner, Agfa-Gevaert e.a. A cet égard, elle fait valoir que Rank Xerox, Océ et Olivetti ne
détenaient, avec Tetras, que 3 % du marché communautaire des petits photocopieurs, alors que les importateurs OEM précités, qui employaient un nombre très élevé de personnes, ont été très actifs dans le domaine des petits photocopieurs.

67 Ricoh considère que, vu le caractère très limité de la production de la Communauté et la gamme très réduite des produits offerts dans le domaine des petits photocopieurs, l' appréciation portée par les institutions sur la question de savoir si les intérêts de la Communauté nécessitaient une action communautaire était incorrecte, dans la mesure où, en décidant de protéger les fabricants d' une quantité très réduite de produits, elles n' ont pas tenu compte des conséquences qui en résulteraient.

68 Il convient de rappeler que, comme la Cour l' a jugé, notamment dans l' arrêt du 14 mars 1990, C-156/87, précité, point 63, la question de savoir si les intérêts de la Communauté nécessitent une action communautaire suppose l' appréciation de situations économiques complexes et que le contrôle juridictionnel d' une telle appréciation doit être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l' exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l' absence d'
erreur manifeste dans l' appréciation de ces faits ou de l' absence de détournement de pouvoir.

69 Il convient de relever à cet égard que, selon les institutions, en l' absence de droits antidumping, il serait douteux qu' une production communautaire et indépendante de PPC puisse persister, alors que celle-ci est nécessaire au maintien et au développement des techniques requises pour la fabrication des produits de reprographie ainsi qu' au maintien d' un grand nombre d' emplois. Cette préoccupation résultait notamment du rachat, au cours de l' enquête, de l' entreprise de l' un des producteurs
communautaires par un fabricant japonais. Les institutions ont donc considéré que cette nécessité de protection de l' industrie communautaire était plus importante que la protection des intérêts immédiats des consommateurs, comme le précise le point 99 des considérants du règlement attaqué, et que la protection des importateurs.

70 Les institutions n' ayant commis aucune erreur manifeste dans l' appréciation des intérêts de la Communauté, le moyen invoqué à cet égard doit être rejeté.

Sur le moyen tiré du calcul erroné du droit antidumping

71 Ricoh fait enfin valoir qu' en fixant les droits antidumping définitifs à 20 % du prix net franco frontière les institutions ont violé l' article 13, paragraphe 3, du règlement n 2176/84, selon lequel le montant de ces droits ne peut être supérieur à ce qui est nécessaire pour faire disparaître le préjudice.

72 A cet égard, Ricoh affirme, tout d' abord, que c' est à tort que la Commission a considéré qu' une marge bénéficiaire de 12 % était nécessaire pour assurer un bénéfice ou un revenu raisonnable dans le cadre des ventes des PPC. Cette marge serait manifestement excessive, au motif que les petits photocopieurs sont toujours vendus avec un bénéfice inférieur à celui résultant de l' ensemble des activités liées à la vente des PPC. Elle relève ensuite que le droit a été calculé afin de supprimer la
sous-cotation des prix qui, pour les raisons déjà exposées, n' existerait pas. Ricoh estime, enfin, que la description du mode de calcul du droit contenue au point 107 des considérants du règlement attaqué n' est pas claire.

73 En ce qui concerne l' argument selon lequel la marge bénéficiaire de 12 % serait excessive, il convient d' observer que, selon le point 103 des considérants du règlement attaqué, le taux retenu devait permettre d' assurer à l' ensemble des producteurs communautaires un rendement raisonnable, proportionné au risque correspondant à l' investissement pour la mise au point de nouveaux produits. A cet égard, les institutions ont considéré qu' il n' était pas approprié de prendre en considération les
bénéfices réalisés sur les fournitures ou lors d' autres activités relatives aux photocopieurs.

74 Il ne résulte ni du dossier ni des débats menés devant la Cour que les institutions ont incorrectement exercé leur pouvoir d' appréciation. Ricoh n' a d' ailleurs pas démontré dans quelle mesure une marge inférieure pour les petits photocopieurs aurait eu une incidence sur le montant du droit antidumping institué.

75 L' argument tiré du fait que la sous-cotation des prix, que le droit devait supprimer, n' existait pas ne peut pas être accueilli. En effet, comme l' indique le point 110 des considérants du règlement attaqué, les exportateurs japonais ont indubitablement procédé à une certaine forme de sous-cotation de leurs prix (point 58), mais, compte tenu de l' impossibilité de la quantifier, aucun élément qui en tienne compte n' a été inclus dans les calculs du droit antidumping.

76 S' agissant, enfin, de la description du mode de calcul du droit, il suffit de constater que le point 107 des considérants du règlement attaqué expose d' une manière circonstanciée l' ensemble des opérations du calcul effectué par les institutions et que Ricoh n' a pas précisé les raisons pour lesquelles celles-ci n' étaient pas compréhensibles.

77 Il résulte des considérations qui précèdent que le moyen tiré du calcul erroné du droit antidumping doit être rejeté et, partant, le recours dans son ensemble.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

78 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. La requérante ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens, y compris ceux de la partie intervenante CECOM qui a conclu en ce sens. La Commission supportera, conformément à l' article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure, ses propres dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre)

déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté.

2) La requérante est condamnée aux dépens, y compris ceux exposés par la partie intervenante CECOM.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-174/87
Date de la décision : 10/03/1992
Type de recours : Recours en annulation - non fondé, Recours en annulation - irrecevable

Analyses

Droits antidumping sur les photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon.

Politique commerciale

Relations extérieures

Dumping


Parties
Demandeurs : Ricoh & Co. Ltd
Défendeurs : Conseil des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mischo
Rapporteur ?: Moitinho de Almeida

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1992:108

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