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26/06/1991 | CJUE | N°C-152/89

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour du 26 juin 1991., Commission des Communautés européennes contre Grand-Duché de Luxembourg., 26/06/1991, C-152/89


Avis juridique important

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61989J0152

Arrêt de la Cour du 26 juin 1991. - Commission des Communautés européennes contre Grand-Duché de Luxembourg. - Accise sur la bière - Remboursement à l'exportation - Compensation à l'importation. - Affaire C-152/89.
Recueil de jurisprudence 1991 page I-03141
édition

spéciale suédoise page I-00237
édition spéciale finnoise page I-00249

S...

Avis juridique important

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61989J0152

Arrêt de la Cour du 26 juin 1991. - Commission des Communautés européennes contre Grand-Duché de Luxembourg. - Accise sur la bière - Remboursement à l'exportation - Compensation à l'importation. - Affaire C-152/89.
Recueil de jurisprudence 1991 page I-03141
édition spéciale suédoise page I-00237
édition spéciale finnoise page I-00249

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

1 . Recours en manquement - Objet du litige - Détermination par l' avis motivé - Élargissement ultérieur - Inadmissibilité

( Traité CEE, art . 169 )

2 . Dispositions fiscales - Impositions intérieures - Système de taxation de la bière - Perception des droits d' accises sur le moût chaud, sans égard aux pertes subies lors de l' élaboration du produit fini - Compensation de l' accise à l' importation et remboursement à l' exportation calculés forfaitairement - Compatibilité avec les articles 95, alinéa 1, et 96 du traité - Conditions - Application d' un taux de perte supérieur à celui de certains producteurs nationaux - Inadmissibilité

( Traité CEE, art . 95, alinéa 1, et 96 )

Sommaire

1 . Dans le cadre d' un recours en manquement introduit par la Commission sur le fondement de l' article 169 du traité, l' avis motivé délimite l' objet du litige et celui-ci ne peut plus, ensuite, être étendu . En effet, la possibilité pour l' État concerné de présenter ses observations constitue une garantie essentielle voulue par le traité et une forme substantielle de la régularité de la procédure destinée à constater un manquement d' un État membre .

2 . Un système de taxation de la bière, où les droits d' accises ne sont pas perçus sur le produit fini, mais sur le moût chaud, sans égard aux pertes qu' entraînent les stades ultérieurs de fabrication et de conditionnement, et où, dans l' impossibilité technique de vérifier a posteriori les pertes de moût chaud effectivement encourues, la bière importée est taxée sur la base de la quantité de produit fini, laquelle est corrigée de façon forfaitaire pour tenir compte de la quantité présumée de moût
chaud utilisée, tandis que la bière exportée bénéficie d' un remboursement de l' accise calculé forfaitairement, ne peut être considéré comme compatible avec les articles 95, alinéa 1, et 96 du traité que s' il est établi qu' il est aménagé de façon à exclure en toute hypothèse que la bière importée soit taxée plus lourdement que la bière nationale et que les ristournes auxquelles donnent lieu ces exportations de bière soient supérieures aux droits dont a été frappé le produit avant son exportation
.

Manque dès lors aux obligations lui incombant en vertu des articles 95 et 96 du traité un État membre qui, appliquant un tel système de taxation de la bière, retient, aux fins de la perception de l' accise à l' importation et de son remboursement à l' exportation, un taux de perte entre le moût et le produit fini dépassant celui de certaines brasseries nationales .

Parties

Dans l' affaire C-152/89,

Commission des Communautés européennes, représentée par M . Henri Étienne, conseiller juridique principal, en qualité d' agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M . Guido Berardis, membre de son service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie requérante,

contre

Grand-duché de Luxembourg, représenté par M . Alphonse Berns, directeur des relations économiques internationales et de la coopération au ministère des Affaires étrangères, assisté de Me André Elvinger, avocat au barreau de Luxembourg, ayant élu domicile en l' étude de ce dernier, 15, Côte d' Eich,

partie défenderesse,

ayant pour objet de faire constater que, en retenant, aux fins de la compensation à l' importation et du remboursement à l' exportation de l' accise sur la bière, un taux de perte entre le moût et le produit fini dépassant celui existant en moyenne dans l' industrie brassicole luxembourgeoise, et dépassant, en tout état de cause, celui de certaines brasseries luxembourgeoises, le grand-duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 95 et 96 du traité CEE,

LA COUR,

composée de MM . O . Due, président, G . F . Mancini, T . F . O' Higgins et G . C . Rodríguez Iglesias, présidents de chambre, Sir Gordon Slynn, MM . R . Joliet, F . A . Schockweiler, F . Grévisse et M . Zuleeg, juges,

avocat général : M . F . G . Jacobs

greffier : M . J.-G . Giraud

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l' audience du 10 janvier 1991,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 28 février 1991,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 27 avril 1989, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l' article 169 du traité CEE, un recours visant à faire constater que, en retenant aux fins de la compensation à l' importation et du remboursement à l' exportation de l' accise sur la bière un taux de perte entre le moût et le produit fini dépassant celui existant en moyenne dans l' industrie brassicole luxembourgeoise, et dépassant, en tout état de cause, celui de
certaines brasseries luxembourgeoises, le grand-duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 95 et 96 du traité CEE .

2 En vertu des règles communes à l' Union économique belgo-luxembourgeoise, l' accise sur la bière, au Luxembourg et en Belgique, n' est pas perçue sur le produit fini, mais sur le moût chaud, sans égard aux pertes qu' entraînent les stades ultérieurs de fabrication et de conditionnement . Dans un tel système, la charge fiscale totale supportée par le produit fini, la bière, dépend des pertes liées au passage du moût à la bière . Elle est d' autant plus faible que les pertes sont elles-mêmes plus
réduites .

3 Pour déterminer le montant de l' accise qu' est supposé supporter le produit fini lorsqu' il est exporté ou importé, il faut remonter à la base d' imposition, à savoir le moût chaud dont provient la bière, en tenant compte des pertes liées au passage du moût à la bière . A l' exportation, cette conversion du produit exporté en moût chaud est faite sur la base d' un taux de perte de 10 % du moût . A l' importation, les quantités de bière effectivement importées sont augmentées de 5 % pour tenir
compte des pertes encourues par les brasseries de l' État membre d' origine, ce qui correspond à un taux de perte de 4,7619 % du moût chaud .

4 Le 12 décembre 1983, la Commission a, en application de l' article 169 du traité CEE, adressé au gouvernement luxembourgeois une lettre de mise en demeure . Selon cette lettre, les pourcentages de perte retenus par le Luxembourg pour percevoir à l' importation et rembourser à l' exportation le montant de l' accise dépassent le niveau réel des pertes à l' intérieur du pays et constituent donc une violation des articles 95 et 96 du traité CEE . La Commission a signalé que, selon les informations
dont elle disposait, les pertes enregistrées dans une brasserie moderne pouvaient descendre jusqu' à 2 % et qu' il n' y avait aucune raison de penser que les pertes subies dans les brasseries luxembourgeoises se situaient à un niveau supérieur . D' après la Commission, dans le système luxembourgeois de taxation de la bière, le remboursement à l' exportation est supérieur au montant de l' impôt qui a effectivement grevé le produit fini et la charge de l' impôt perçu à l' importation est supérieure à
celle qui frappe le produit national similaire .

5 Dans sa réponse, le Luxembourg a expliqué son système de taxation de la bière et a contesté que les taux appliqués à ses frontières représentent une violation des articles 95 et 96 du traité . La Commission a alors demandé une étude à deux experts indépendants, les professeurs Dalgliesh et Narziss, et, sur la base de leurs rapports, elle a procédé, le 2 février 1987, à l' envoi de l' avis motivé, en admettant, pour le Luxembourg, des taux de pertes situés en bas de la fourchette de 3,8 à 5,1 %
pour les bières exportées et de 2,7 à 4 % pour les bières livrées à l' intérieur du pays .

6 Par lettre du 16 octobre 1987, le gouvernement luxembourgeois a répondu que son industrie brassicole était mal équipée et que la freinte subie au cours de la production de bière n' avait pu être réduite au-dessous de 10 %, tandis que les brasseries étrangères étaient mieux équipées et n' accusaient qu' un pourcentage de pertes de 4,7619 %. Jugeant cette explication non satisfaisante, la Commission a introduit le présent recours .

7 Pour un plus ample exposé de la législation en cause, du déroulement de la procédure ainsi que des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d' audience . Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour .

Sur la recevabilité

8 Le gouvernement luxembourgeois conteste la recevabilité du recours en ce que la requête invoque subsidiairement le fait que les taux retenus dépasseraient le taux de perte de "certaines brasseries luxembourgeoises", alors que l' avis motivé reprochait seulement au Luxembourg d' avoir, en ce qui concerne le remboursement de l' accise à l' exportation, retenu un taux de perte dépassant celui qui existe "en moyenne dans l' industrie brassicole luxembourgeoise", et, en ce qui concerne la compensation
de l' accise à l' importation, d' avoir adopté un taux dépassant le plafond des pertes constatées en moyenne au Luxembourg et dans les pays exportant vers le Luxembourg .

9 Il faut signaler, à cet égard, que, dans le cadre d' un recours en manquement ouvert à la Commission par l' article 169 du traité, l' avis motivé délimite l' objet du litige, et celui-ci ne peut plus, ensuite, être étendu . En effet, la possibilité pour l' État concerné de présenter ses observations constitue une garantie essentielle voulue par le traité et une forme substantielle de la régularité de la procédure destinée à constater un manquement d' un État membre .

10 En l' espèce, le débat entre les parties au cours de la procédure précontentieuse a porté, en substance, sur le caractère trop élevé ou non des taux de perte retenus par le Luxembourg en vue de l' imposition des bières importées et des restitutions à l' exportation, ainsi que sur les critères à retenir pour apprécier la compatibilité du système avec les articles 95 et 96 du traité .

11 Dans ces conditions, le fait que l' avis motivé n' ait pas visé expressément comme critère à retenir celui du taux de perte de "certaines brasseries luxembourgeoises", c' est-à-dire des plus performantes, n' a pas privé le gouvernement défendeur de la possibilité de présenter ses observations sur la pertinence de ce critère et ne saurait, dès lors, entraîner l' irrecevabilité du recours .

12 Le gouvernement luxembourgeois fait valoir, encore, que le dispositif et la motivation de l' avis motivé comportaient une contradiction en ce que le dispositif enjoignait au Luxembourg de ne pas dépasser le taux moyen au Luxembourg et dans les pays exportant vers le Luxembourg, alors que le motif déterminant lui interdisait seulement de dépasser le taux de perte supporté lors du processus de fabrication à l' intérieur du Luxembourg . Cette contradiction, ainsi que l' imprécision du dispositif
lui-même, auraient mis le Luxembourg dans l' impossibilité de se conformer à l' avis motivé .

13 A cet égard, il suffit de constater que la réponse du gouvernement défendeur à l' avis motivé, dans laquelle il défend la compatibilité du système mis en cause par la Commission avec les articles 95 et 96, ne fait pas apparaître de problèmes de compréhension quant à la portée de l' avis motivé .

14 Par ailleurs, le gouvernement défendeur avait la possibilité de demander des précisions à cet égard s' il les considérait comme nécessaires .

15 Il résulte de ce qui précède que le recours doit être déclaré recevable .

Sur le fond

a ) En ce qui concerne l' article 95

16 La Commission fait valoir que le Luxembourg applique à la bière importée un système différent de celui qui frappe l' imposition de la bière nationale . Elle relève que, alors que le brasseur luxembourgeois travaillant rationnellement bénéficie d' un avantage dans le montant de l' accise, le produit importé est toujours frappé de façon forfaitaire . Elle considère qu' un tel système ne serait compatible avec l' article 95 que si le Luxembourg était en mesure de prouver que le niveau du taux de
perte de moût chaud forfaitairement retenu pour les bières importées, à savoir 4,7619 %, était toujours atteint par les brasseries luxembourgeoises, même les plus performantes .

17 Le gouvernement luxembourgeois fait observer que, dans un recours en manquement, c' est à la Commission qu' incombe la charge de la preuve, et que celle-ci n' a nullement établi que la compensation de l' accise sur la bière entraînerait une surimposition des bières importées . En outre, d' après lui, la majoration de l' équivalent en moût des bières importées est destinée à tenir compte du meilleur rendement de certaines brasseries établies dans d' autres États membres et a pour seule limite les
taux des pertes effectives de la fabrication à l' étranger, étant donné qu' il y aurait discrimination si on imposait aux bières importées un taux de perte qui n' est pas le leur, mais celui de la fabrication intérieure .

18 A titre liminaire, il convient de relever que le problème de la compatibilité avec l' article 95 du traité du système de taxation litigieux découle du fait que l' assiette prise pour base dans le cas des produits importés est différente de celle qui est utilisée pour les produits nationaux . En effet, la bière nationale est taxée sur la base de la quantité de moût chaud utilisée, sans que soit prise en compte la quantité perdue lors de la transformation du moût chaud en bière, de sorte que le
producteur performant bénéficie d' un avantage fiscal . En revanche, la bière importée est taxée sur la base de la quantité de produit fini, laquelle est corrigée de façon forfaitaire pour tenir compte de la quantité présumée de moût chaud utilisée pour la production de la bière .

19 Il convient de constater, ensuite, que les modalités d' imposition de la bière de production nationale, fondées sur le moût chaud et non sur le produit fini, ne peuvent pas être appliquées à la bière importée, car il est techniquement impossible de vérifier a posteriori les pertes de moût chaud effectivement encourues pendant le processus de fabrication de la bière .

20 Il convient de rappeler que la Cour a déjà jugé qu' il y avait violation de l' article 95, premier alinéa, lorsque l' imposition frappant le produit importé et celle frappant le produit national similaire étaient calculées de façon différente et suivant des modalités différentes aboutissant, ne fût-ce que dans certains cas, à une imposition supérieure du produit importé ( arrêt du 17 février 1976, Rewe, 45/75, Rec . p . 181 ).

21 Il en résulte que le système de taxation litigieux ne peut être considéré comme compatible avec l' article 95, premier alinéa, que s' il est établi qu' il est aménagé de façon à exclure en toute hypothèse que la bière importée soit taxée plus lourdement que la bière nationale .

22 Pour vérifier si cette condition est remplie, la charge fiscale qui frappe la bière importée sur la base du taux de perte de moût chaud établi de façon forfaitaire doit être comparée avec la charge fiscale la plus réduite effectivement supportée par la bière nationale, charge qui ne peut être déterminée qu' en se fondant sur le taux de perte de la brasserie nationale la plus performante .

23 En revanche, contrairement à ce que le gouvernement défendeur a soutenu, le taux de perte dans le pays d' origine de la bière importée est dépourvu, à cet égard, de toute pertinence, car il ne permet d' établir aucune comparaison utile entre la charge fiscale supportée par cette bière et celle qui frappe la bière nationale .

24 L' application des critères dégagés ci-avant aux faits de l' espèce amène la Cour à constater que le système luxembourgeois n' est pas aménagé de façon à exclure, en toute hypothèse, que la bière importée soit taxée plus lourdement que la bière nationale .

25 En effet, compte tenu du défaut de transparence du système de taxation en cause, il incombait au gouvernement défendeur d' apporter la preuve que ce système ne comporte, en aucun cas, des effets discriminatoires .

26 Les rapports d' expertise que la Commission a produits - un rapport du Dr Dalgliesh et deux rapports du professeur L . Narziss - font apparaître qu' il n' est pas possible d' établir un chiffre absolu susceptible de rendre compte des taux de perte encourus lors de la fabrication de la bière dans les différentes brasseries et les différents pays . M . Dalgliesh affirme que, "s' il faut, pour des raisons de commodité administrative, une valeur unique représentative d' une bonne méthode de
fabrication dans une brasserie moderne raisonnablement bien équipée, le chiffre de 5 % serait généreux et celui de 4 % ne serait pas trop bas ". Le premier rapport du professeur Narziss conclut qu' il se peut qu' une brasserie moyenne atteigne un chiffre de 5 % pour de la bière ordinaire, mais cette valeur pourrait être légèrement réduite, bien que cela suppose d' importants perfectionnements techniques .

27 Dans son second rapport, le professeur Narziss indique, pour les différentes phases de la production, différents taux entre lesquels fluctuent les pertes des brasseries . De l' addition des moyennes de ces chiffres pour chaque phase de la production résulte un chiffre de pertes, pour une brasserie moyenne, de 7,35 % pour les bières livrées à l' intérieur du pays et de 7,95 % pour les bières destinées à l' exportation . A partir de ces taux centraux, on peut, toujours selon le professeur Narziss,
constater des divergences de 1,5 % vers le haut ou vers le bas . Cependant, l' addition des chiffres moyens les plus bas pour chaque phase de production fait apparaître un chiffre de 4,25 %.

28 Il résulte de ces rapports d' expertise que le taux de perte de 4,7619 % retenu forfaitairement en vue de la taxation des bières importées ne saurait être considéré comme le taux de perte le plus bas susceptible d' être atteint par les brasseries luxembourgeoises les plus performantes .

29 Dans ces conditions, en l' absence de preuve contraire apportée par le gouvernement défendeur, il y a lieu de considérer comme établi que certaines brasseries luxembourgeoises peuvent atteindre un taux de perte inférieur à 4,7619 %.

30 Il résulte de ce qui précède que, en ce qui concerne la violation de l' article 95, le recours est fondé .

b ) En ce qui concerne l' article 96

31 En ce qui concerne les exportations, la Commission fait valoir que le brasseur luxembourgeois qui réduit ses pertes à un taux situé au-dessous de la moyenne de 10 % calculée forfaitairement se voit ristourner la charge d' impôt correspondant à des fractions de moût non utilisées pour la fabrication de la bière exportée, et cela en violation de l' article 96 du traité . La Commission fait observer, à cet égard, que le Luxembourg, loin de prouver, comme cela lui incombait, que ses unités les plus
performantes n' atteignent pas un pourcentage de perte égal ou inférieur à 10 %, n' a même pas été en mesure de prouver que ce chiffre représente le pourcentage moyen des pertes .

32 Le gouvernement défendeur allègue que la Commission n' a pas prouvé que le taux de 10 % soit exagéré . Il estime qu' aucun élément de fait ne permet de faire état d' une présomption en ce sens .

33 Selon le second rapport du professeur Narziss, le taux de perte moyen pour les bières destinées à l' exportation est de 7,95 %, avec une marge de variation de 1,5 %. En prenant le chiffre le plus haut, on arrive donc à 9,45 % de pertes .

34 Il ressort ainsi de ce rapport d' expertise que le taux de 10 % ne constitue pas une limite absolue en dessous de laquelle aucune brasserie luxembourgeoise ne pourrait jamais réduire ses pertes pour les bières d' exportation .

35 Le gouvernement défendeur n' ayant apporté aucune preuve en sens contraire, il y a lieu de considérer comme établi que le remboursement à l' exportation est, dans certains cas, supérieur à la charge fiscale effectivement supportée par la bière exportée .

36 En effet, ainsi que la Cour l' a jugé dans son arrêt du 1er décembre 1965, Commission/Italie ( 45/64, Rec . p . 1057 ), lorsqu' un État membre choisit une méthode forfaitaire pour déterminer le montant des impositions intérieures pouvant faire l' objet d' une ristourne à l' exportation vers un autre État membre, il lui appartient de démontrer que cette méthode reste en tous les cas dans les limites impératives de l' article 96 .

37 Il résulte de ce qui précède que le recours est également fondé en ce qui concerne la violation de l' article 96 du traité .

38 Par conséquent, il y a lieu de constater que le grand-duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 95 et 96 du traité CEE en retenant, aux fins de la perception de l' accise sur la bière à l' importation et de son remboursement à l' exportation, un taux de perte entre le moût et le produit fini dépassant celui de certaines brasseries luxembourgeoises .

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

39 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens . Le grand-duché de Luxembourg ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens .

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête :

1 ) Le grand-duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 95 et 96 du traité CEE en retenant, aux fins de la perception de l' accise sur la bière à l' importation et de son remboursement à l' exportation, un taux de perte entre le moût et le produit fini dépassant celui de certaines brasseries luxembourgeoises .

2 ) Le grand-duché de Luxembourg est condamné aux dépens .


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-152/89
Date de la décision : 26/06/1991
Type de recours : Recours en constatation de manquement - fondé

Analyses

Accise sur la bière - Remboursement à l'exportation - Compensation à l'importation.

Fiscalité

Droits d'accise

Impositions intérieures


Parties
Demandeurs : Commission des Communautés européennes
Défendeurs : Grand-Duché de Luxembourg.

Composition du Tribunal
Avocat général : Jacobs
Rapporteur ?: Rodríguez Iglesias

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1991:272

Source

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