La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/1990 | CJUE | N°C-83/89

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Openbaar Ministerie et Minister van Financïen contre Vincent Houben., 22/03/1990, C-83/89


Avis juridique important

|

61989J0083

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 22 mars 1990. - Openbaar Ministerie et Minister van Financïen contre Vincent Houben. - Demande de décision préjudicielle: Hof van Beroep te Antwerpen - Belgique. - Libre circulation des marchandises - Biens en libre pratique - Charge de la pr

euve. - Affaire C-83/89.
Recueil de jurisprudence 1990 page I-01161...

Avis juridique important

|

61989J0083

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 22 mars 1990. - Openbaar Ministerie et Minister van Financïen contre Vincent Houben. - Demande de décision préjudicielle: Hof van Beroep te Antwerpen - Belgique. - Libre circulation des marchandises - Biens en libre pratique - Charge de la preuve. - Affaire C-83/89.
Recueil de jurisprudence 1990 page I-01161

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

1 . Libre circulation des marchandises - Produits en libre pratique - Notion

( Traité CEE, art . 9 et 10 )

2 . Libre circulation des marchandises - Transit communautaire -Caractère communautaire des marchandises - Moyens de preuve - Transport de marchandises non destinées à des fins commerciales

( Règlement du Conseil n 222/77, tel que modifié par le règlement n 983/79, art . 49 )

Sommaire

1 . Les marchandises importées d' un pays tiers dans la Communauté sont considérées comme se trouvant en libre pratique lorsque les formalités d' importation ont été accomplies et les différents droits acquittés, sans qu' il y ait lieu de distinguer entre le cas des marchandises qui circulent dans un État membre où les formalités d' importation ont été accomplies et les différents droits acquittés et le cas des marchandises qui, après l' accomplissement régulier des formalités d' importation et le
paiement des différents droits dans un État membre, sont par la suite importées dans un autre État membre .

2 . La réglementation en matière de transit communautaire, telle qu' elle résulte du règlement n 222/77, modifié par le règlement n 983/79, doit être interprétée en ce sens que, dans le cas d' un transport de marchandises non destinées à des fins commerciales, la déclaration du voyageur qui les accompagne ou dans les bagages duquel elles sont contenues suffit pour que ces marchandises soient considérées comme communautaires . Toutefois, le voyageur doit présenter un document de transit communautaire
interne lorsqu' il existe, quant à la sincérité de cette déclaration, un doute fondé sur des éléments objectifs .

Parties

Dans l' affaire C-83/89,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l' article 177 du traité CEE, par le Hof van beroep te Antwerpen et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Openbaar Ministerie et Minister van Financiën

et

Vincent Houben,

une décision à titre préjudiciel sur l' interprétation de certaines dispositions du droit communautaire relatives aux biens se trouvant en libre pratique,

LA COUR ( sixième chambre ),

composée de MM . C . N . Kakouris, président de chambre, T . Koopmans, G . F . Mancini, T . F . O' Higgins et M . Díez de Velasco, juges,

avocat général : M . M . Darmon

greffier : M . H . A . Ruehl, administrateur principal

considérant les observations écrites présentées :

- pour le gouvernement belge, par Me Koen Lenaerts, avocat au barreau de Bruxelles,

- pour la Commission, par M . René Barents, membre du service juridique, en qualité d' agent,

vu le rapport d' audience,

ayant entendu les observations orales du Minister van Financiën, représenté par Me I . Maselis, avocat au barreau de Bruxelles et de la Commission, à l' audience du 12 décembre 1989,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 23 janvier 1990,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par arrêt du 10 mars 1989, parvenu à la Cour le 14 mars suivant, le Hof van beroep te Antwerpen a posé, en vertu de l' article 177 du traité CEE, plusieurs questions préjudicielles relatives à l' interprétation de certaines dispositions du droit communautaire concernant des marchandises circulant dans la Communauté . Les questions portent en particulier sur la signification de l' expression "marchandises étant en libre pratique" au sens des articles 9, paragraphe 2, et 10, paragraphe 1, du traité
CEE, et sur la charge de la preuve concernant l' accomplissement des formalités d' importation dans la Communauté de telles marchandises et du paiement des droits de douane éventuellement dus .

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d' une procédure pénale engagée par l' Openbaar Ministerie et la partie chargée des poursuites Minister van Financiën du royaume de Belgique contre M . Houben, auquel il est reproché d' être entré en Belgique, venant d' Allemagne, alors qu' il était en possession d' une chaîne stéréophonique de fabrication japonaise, encastrée dans sa voiture, sans avoir fait la déclaration légalement requise et sans avoir acquitté les droits de douane dus au titre de
cette importation .

3 Le rechtbank van eerste aanleg te Tongeren devant lequel M . Houben a été poursuivi ayant déclaré les faits non prouvés, l' a, par jugement du 26 novembre 1986, acquitté . Contre ce jugement l' Openbaar Ministerie et la partie chargée des poursuites Minister van Financiën ont interjeté appel devant le Hof van beroep te Antwerpen, qui, en vue de résoudre ce litige, a sursis à statuer et a saisi la Cour des questions suivantes :

"Un bien qui est importé d' un pays tiers dans un État membre peut-il être considéré comme se trouvant en 'libre pratique' lorsqu' il est importé dans un autre État membre, même si le droit d' importation n' a pas été acquitté dans le premier État membre?

Si on admet qu' un bien ne peut se trouver en 'libre pratique' que si les formalités d' importation ont été régulièrement accomplies et si les droits de douane ont été acquittés, faut-il partir de la présomption que ces obligations ont été remplies lorsque les biens sont trouvés dans un État membre, ou faut-il partir de la présomption que ces obligations n' ont pas été remplies, à moins que le détenteur des biens ne prouve qu' elles l' ont été?

Plus généralement : celui qui importe des biens, originaires d' un pays tiers, d' un État membre dans un autre État membre, doit-il fournir la preuve qu' il a acquitté les droits de douane dans le premier État membre pour qu' il soit admis que ces biens se trouvent en libre pratique dans la CEE?"

4 Pour un plus ample exposé des faits du litige au principal, des dispositions communautaires en cause, du déroulement de la procédure et des observations présentées à la Cour, il est renvoyé au rapport d' audience . Ces éléments du dossier ne sont repris ci-dessous que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour .

5 Les questions posées peuvent être résumées dans les deux questions suivantes .

6 La première question vise à savoir s' il est possible, et sous quelles conditions, de considérer qu' une marchandise importée d' un pays tiers se trouve en "libre pratique" dans la Communauté, même si les formalités d' importation n' ont pas été accomplies ni les droits de douane acquittés .

7 La seconde question vise à savoir à qui incombe la charge de prouver, lors de l' importation d' un État membre dans un autre, que les marchandises accompagnant les voyageurs ou contenues dans leurs bagages se trouvent en libre pratique dans la Communauté .

Sur la première question

8 Cette question trouve sa réponse dans la disposition de l' article 10, paragraphe 1, du traité, aux termes de laquelle "sont considérés comme étant en libre pratique dans un État membre des produits en provenance de pays tiers pour lesquels les formalités d' importation ont été accomplies et les droits de douane et taxes d' effet équivalent exigibles ont été perçus dans cet État membre, et qui n' ont pas bénéficié d' une ristourne totale ou partielle de ces droits et taxes ".

9 Ainsi que l' a Cour l' a dit pour droit dans son arrêt du 15 décembre 1976, Donckerwolcke ( 41/76, Rec . p . 1921 ), il faut entendre par produits se trouvant en libre pratique ceux qui, en provenance d' un pays tiers, ont été régulièrement importés dans l' un quelconque des États membres conformément aux exigences posées par l' article 10, précité .

10 En effet, cette disposition ne fait pas de distinction entre le cas des marchandises importées d' un pays tiers, qui circulent dans un État membre où les formalités d' importation ont été accomplies et les différents droits acquittés et le cas des marchandises qui, après l' accomplissement régulier des formalités d' importation et le paiement des différents droits dans un État membre, sont par la suite importées dans un autre État membre .

11 Il convient donc de répondre à la première question que les articles 9 et 10 du traité doivent être interprétés en ce sens que les marchandises importées d' un pays tiers dans la Communauté sont considérées comme se trouvant en libre pratique lorsque les formalités d' importation ont été accomplies et les différents droits acquittés .

Sur la seconde question

12 Pour répondre à cette question, il convient d' observer que, au moment où se sont déroulés les faits de l' affaire au principal, ce problème de preuve était régi par le règlement ( CEE ) n° 222/77 du Conseil, du 13 décembre 1976, relatif au transit communautaire ( JO 1977, L 38, p . 1 ) tel que modifié par le règlement ( CEE ) n° 983/79 du Conseil, du 14 mai 1979 ( JO L 123, p . 1 ). Il convient donc de procéder à l' interprétation de cette réglementation .

13 Il y a lieu , d' abord, de rappeler que le règlement n° 222/77 prévoit deux procédures de transit communautaire . L' une, dite procédure de transit communautaire externe, s' applique essentiellement, ainsi qu' il ressort de l' article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 222/77, aux marchandises qui ne remplissent pas les conditions prévues aux articles 9 et 10 du traité, à savoir les marchandises qui proviennent de pays tiers et ne se trouvent pas en libre pratique dans la Communauté; ces
marchandises doivent, selon l' article 12, paragraphe 1, du règlement n° 222/77, faire l' objet d' une déclaration établie sur un formulaire T1 . Ce formulaire, visé par l' autorité douanière compétente, constitue la preuve du caractère non communautaire de ces marchandises .

14 L' autre, dite procédure de transit communautaire interne, s' applique essentiellement, ainsi qu' il ressort de l' article 1er, paragraphe 3, du même règlement, aux marchandises qui remplissent les conditions prévues aux articles 9 et 10 du traité, à savoir les marchandises originaires des États membres ou se trouvant en libre pratique dans la Communauté, dénommées "marchandises communautaires ". Ces marchandises doivent faire, selon l' article 39, paragraphe 1, du règlement précité, l' objet d'
une déclaration établie sur un formulaire T2 . Ce formulaire, visé par l' autorité douanière compétente, constitue la preuve du caractère communautaire de ces marchandises .

15 Il y a lieu, ensuite, de relever que, par des dispositions spécifiques du règlement n° 222/77, il est prévu des cas où des marchandises communautaires ne circulent pas sous la procédure du transit communautaire interne .

16 Pour ces marchandises communautaires qui ne circulent pas sous la procédure du transit communautaire interne, lorsque cette dernière n' est pas obligatoire, le règlement ( CEE ) n° 223/77 de la Commission, du 22 décembre 1976, portant dispositions d' application ainsi que mesures de simplification du régime du transit communautaire ( JO L 38, p . 20 ), prévoit comme moyen de preuve le document T2 L, dont le contenu correspond au document T2 du transit communautaire interne ( voir neuvième
considérant et article 1er, paragraphe 8, du règlement n° 223/77 ).

17 Il découle de ce qui précède que les règlements n°s 222/77 et 223/77 établissent la règle selon laquelle la preuve du caractère communautaire d' une marchandise doit être rapportée, sauf exception prévue, exclusivement par le document T2 ou le document T2 L .

18 Il y a lieu, ensuite, de signaler que l' article 49, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 222/77, tel que modifié par le règlement n° 983/79, précité, dispose :

"1 ) Le régime du transit communautaire n' est pas obligatoire pour les transports de marchandises accompagnant les voyageurs ou contenues dans leurs bagages, pour autant qu' il ne s' agisse pas de marchandises destinées à des fins commerciales .

2 ) Les dispositions du traité instituant la Communauté économique européenne concernant la libre circulation des marchandises s' appliquent à celles qui, en vertu du paragraphe 1, ne circulent pas sous le régime du transit communautaire :

a ) lorsqu' elles sont déclarées comme marchandises communautaires, sans qu' il existe aucun doute quant à la sincérité de cette déclaration;

b ) dans les autres cas, sur présentation d' un document de transit communautaire interne, établi en vue de justifier le caractère communautaire de ces marchandises ."

19 Il résulte de cette dernière disposition que, dans le cas de transport de marchandises non destinées à des fins commerciales, il suffit, pour que les marchandises qu' un voyageur accompagne ou qui sont contenues dans ses bagages soient considérées comme communautaires, d' une déclaration ne laissant aucun doute quant à sa sincérité; c' est uniquement en cas de doute de l' autorité douanière que le voyageur doit présenter un document de transit communautaire interne ( T2 ou T2 L ).

20 Il y a lieu, toutefois, de préciser à ce sujet que le fait que la marchandise en cause a été fabriquée dans un pays tiers ne suffit pas à créer à lui seul des doutes au sens de la disposition précitée . Les doutes des autorités douanières quant à la sincérité de la déclaration du voyageur doivent être fondés sur des éléments objectifs résultant, par exemple, des circonstances particulières de l' importation en cause ou des renseignements qu' elles ont reçus au sujet de cette importation . Des
considérations subjectives de la part de fonctionnaires chargés du contrôle ne suffisent pas à obliger le voyageur à présenter un document de transit communautaire interne .

21 Cette interprétation est conforme à la finalité de cette disposition, qui consiste à faciliter le transport des marchandises non destinées à des fins commerciales et accompagnées par des voyageurs ou contenues dans leurs bagages, en exonérant les voyageurs de la charge de la preuve qui les forcerait à accomplir les formalités prévues par le régime du transit communautaire interne .

22 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la seconde question que la réglementation communautaire doit être interprétée en ce sens que, dans le cas d' un transport de marchandises non destinées à des fins commerciales, la déclaration du voyageur qui les accompagne ou dans les bagages duquel elles sont contenues suffit pour que ces marchandises soient considérées comme communautaires . Toutefois, le voyageur doit présenter un document de transit communautaire interne
lorsqu' il existe, quant à la sincérité de cette déclaration, un doute fondé sur des éléments objectifs .

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

23 Les frais exposés par le royaume de Belgique et la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l' objet d' un remboursement . La procédure revêtant, à l' égard des parties au principal, le caractère d' un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens .

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR ( sixième chambre ),

statuant sur les questions à elle soumises par le Hof van beroep te Antwerpen, par arrêt du 10 mars 1989, dit pour droit :

1)Les articles 9 et 10 du traité CEE doivent être interprétés en ce sens que les marchandises importées d' un pays tiers dans la Communauté sont considérées comme se trouvant en libre pratique lorsque les formalités d' importation ont été accomplies et les différents droits acquittés .

2 ) La réglementation communautaire doit être interprétée en ce sens que, dans le cas d' un transport de marchandises non destinées à des fins commerciales, la déclaration du voyageur qui les accompagne ou dans les bagages duquel elles sont contenues suffit pour que ces marchandises soient considérées comme communautaires . Toutefois, le voyageur doit présenter un document de transit communautaire interne lorsqu' il existe, quant à la sincérité de cette déclaration, un doute fondé sur des éléments
objectifs .


Synthèse
Formation : Sixième chambre
Numéro d'arrêt : C-83/89
Date de la décision : 22/03/1990
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Hof van Beroep te Antwerpen - Belgique.

Libre circulation des marchandises - Biens en libre pratique - Charge de la preuve.

Union douanière

Libre circulation des marchandises


Parties
Demandeurs : Openbaar Ministerie et Minister van Financïen
Défendeurs : Vincent Houben.

Composition du Tribunal
Avocat général : Darmon
Rapporteur ?: Kakouris

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1990:132

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award