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07/03/1990 | CJUE | N°C-87/89

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 7 mars 1990., Société nationale interprofessionnelle de la tomate e.a. contre Commission des Communautés européennes., 07/03/1990, C-87/89


Avis juridique important

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61989C0087

Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 7 mars 1990. - Société nationale interprofessionnelle de la tomate e.a. contre Commission des Communautés européennes. - Agriculture - Aide à la transformation de la tomate - Plainte pour fraudes - Recours en annulation et re

cours en indemnité. - Affaire C-87/89.
Recueil de jurisprudence 1990 pa...

Avis juridique important

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61989C0087

Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 7 mars 1990. - Société nationale interprofessionnelle de la tomate e.a. contre Commission des Communautés européennes. - Agriculture - Aide à la transformation de la tomate - Plainte pour fraudes - Recours en annulation et recours en indemnité. - Affaire C-87/89.
Recueil de jurisprudence 1990 page I-01981

Conclusions de l'avocat général

++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

A - En fait

1 . La présente affaire porte sur un recours en annulation et en responsabilité introduit, contre la Commission, par un groupement d' entreprises françaises du secteur de la tomate ( Sonito ) et par certains de ses adhérents .

2 . La demande en annulation au titre de l' article 173 du traité CEE est dirigée contre la décision de la Commission, qui ressort de sa lettre du 17 janvier 1989 aux représentants des requérantes, de classer une plainte dans laquelle la Sonito avait signalé à la Commission que ses adhérents avaient subi un préjudice en raison d' indications frauduleuses communiquées par des transformateurs de tomates italiens et grecs au sujet de la qualité et surtout du volume de la production qu' ils avaient
obtenue pendant les campagnes 1983/1984 à 1985/1986 . A cause de ces fraudes, notamment la transmission de chiffres surévalués, les aides à la production prévues par le règlement n° 426/86 ( 1 ) auraient en effet, selon les requérantes, été considérablement réduites au cours des campagnes 1984/1985 à 1987/1988 ( 2 ), en application du règlement n° 989/84 ( 3 ) - au détriment des transformateurs de tomates adhérents de la Sonito - car le seuil fixé par ce second règlement avait été dépassé de ce fait
. La Sonito expose que ces entreprises ont, en outre, été victimes d' une distorsion de concurrence dans la mesure où les transformateurs italiens et grecs avaient reçu des aides injustifiées ( lettres de la Sonito à la Commission des 17 octobre 1986 et 19 septembre 1988 ). Elle soutient que, le cas échéant, la Commission est tenue de procéder à des enquêtes, d' engager la procédure en manquement contre les États membres concernés, qui auraient manqué aux obligations de contrôle leur incombant en
vertu du droit communautaire, et aussi de corriger les données inexactes et d' en tirer les conséquences pour l' octroi des aides ( lettre de la Sonito à la Commission du 17 octobre 1986 ). Dans une lettre du 5 mai 1987, la Sonito avait évoqué une réponse de la Commission à une question parlementaire, réponse dans laquelle la Commission avait signalé des irrégularités portant sur un montant de 6,5 millions d' écus . Elle a demandé à la Commission de lui communiquer des précisions sur les cas
constatés dans les différents États membres pendant chaque campagne afin de pouvoir, comme elle l' a indiqué, faire valoir ses droits devant les tribunaux nationaux; la Commission n' a cependant pas fait droit à cette demande .

3 . Après un échange de vues infructueux, la Commission a communiqué à la Sonito la lettre litigieuse du 17 janvier 1989, qui se terminait dans les termes suivants :

"Dans ces circonstances, la Commission, estimant que rien ne permettait de conclure à une infraction des États membres concernés, a procédé au classement des plaintes" ( 4 ).

4 . Les requérantes concluent à ce qu' il plaise à la Cour "annuler ( 5 ) la décision de classement de leur plainte qui leur a été communiquée par lettre de la Commission du 17 janvier 1989", l' estimant illégale pour plusieurs motifs .

5 . Au titre de leur demande en indemnité, les requérantes demandent à la Cour de condamner la Commission à payer les montants suivants, avec les intérêts de droit, aux entreprises plaignantes adhérentes de la Sonito :

- la différence entre l' aide à la transformation qu' elles ont effectivement perçue pendant les campagnes 1984/1985 à 1987/1988 et l' aide qu' elles auraient dû percevoir en l' absence d' abattement;

- un montant supplémentaire correspondant à la réparation du préjudice commercial, dont l' importance est à évaluer avec l' aide d' un expert .

6 . Dans ce cadre, les requérantes demandent, en outre, à la Cour de condamner la Commission à rembourser à la Sonito les frais de procédure qu' elle a été obligée d' exposer en Italie pour faire valoir ses droits .

7 . Les requérantes estiment que la décision de classer la plainte de même que l' ensemble aussi du comportement de la Commission à leur égard constituent une faute de service qui engage la responsabilité de la Commission en vertu de l' article 215, deuxième alinéa, du traité CEE .

8 . La Commission conclut à ce que la requête soit rejetée comme étant irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme étant mal fondée, avec condamnation des requérantes aux dépens, et elle prend position contre les moyens et arguments de ces dernières .

9 . Sur le plan des faits, les parties sont en désaccord sur la question de savoir dans quelle mesure les chiffres de production communiqués par l' Italie et par la Grèce étaient fiables ou, au contraire, faussés par des fraudes . Le détail des autres éléments de fait - par ailleurs non litigieux - de même que les moyens et arguments des parties seront abordés, dans la mesure nécessaire, dans le cadre de la partie en droit . Pour le surplus, nous renvoyons au rapport d' audience .

B - En droit

I - Sur la demande en annulation

10 . 1 . Avant de pouvoir aborder les questions de recevabilité et éventuellement de bien-fondé, nous devons commencer par définir, par la voie d' une interprétation, la demande à laquelle tend la requête sur ce point, c' est-à-dire la teneur du chef de conclusion présenté sur ce point dans l' acte introductif d' instance .

Cette façon de procéder s' impose en l' espèce car, jusqu' à la date fixée pour la procédure orale, le désaccord entre les parties sur ce point n' a pas pu être dissipé, aspect sur lequel nous reviendrons immédiatement .

11 . C' est intentionnellement que nous parlons ici de la conclusion présentée dans l' acte introductif d' instance . En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour, compte tenu de l' article 38, paragraphe 1, sous c ), du règlement de procédure, un requérant ne peut plus modifier ultérieurement ses conclusions; cela s' applique pour le stade de la réplique et, à plus forte raison encore, pour le stade de la procédure orale ( 6 ). Les éléments avancés par les parties au sujet de la teneur de
la conclusion formulée dans la requête, notamment ceux que les requérantes ont présentés en dehors de la requête, ne peuvent donc être pris en compte qu' à titre d' arguments pour la question d' interprétation soulevée .

12 . Comme nous l' avons précédemment mentionné ( 7 ), le libellé du chef de conclusion correspondant à la demande en annulation mentionne explicitement la lettre litigieuse de la Commission du 17 janvier 1989 . De son côté, le passage précédemment cité de cette lettre fait déjà très clairement apparaître l' objet dont traite ladite lettre, qui est la question, précédemment débattue entre les parties, de savoir si la Commission devait engager une procédure en manquement contre l' Italie et contre la
Grèce . La lettre visait "des plaintes déposées au titre de l' article 169 du traité CEE" par la Sonito et par une autre association . Elle indiquait, en outre, expressément que la Commission ne disposait d' aucun élément tendant à démontrer que l' Italie ou la Grèce avait manqué à leurs obligations de contrôle et de vérification . La demande, qui est clairement définie en elle-même par la référence à la lettre en question, ne permet pas non plus à un autre titre d' en venir à un autre résultat que
le suivant : l' objet du recours en annulation est le refus de la Commission d' engager une procédure en manquement contre l' Italie et contre la Grèce .

13 . Un autre résultat serait éventuellement possible s' il ressortait de la requête que, pour autant que la Commission a, en outre, refusé de corriger les chiffres litigieux ou d' assister les requérantes dans le cadre des poursuites nationales, cet autre refus était destiné à constituer lui aussi - ou à la place du refus d' engager la procédure de l' article 169 du traité CEE - l' objet du recours en annulation . Compte tenu de la rédaction parfaitement claire du chef de conclusion correspondant à
la demande en annulation, il aurait fallu des précisions au moins aussi claires en ce sens pour justifier d' admettre qu' il avait malgré tout, en fin de compte, une teneur différente ou plus large . Pareilles précisions font défaut . Au contraire, on relève ce qui suit à la page 2 de la requête : "tendant à l' annulation de la décision de classement de leur plainte communiquée par la Commission par lettre du 17 janvier 1989 ( article 173 du traité CEE )". Lorsqu' il est ensuite question de la
demande de la Sonito tendant à ce que la Commission corrige les données litigieuses et/ou assiste les requérantes dans les procédures pénales mentionnées, la requête ne fait jamais apparaître avec suffisamment de clarté en quoi le comportement dont il est fait grief à la Commission à cet égard présente un rapport avec la lettre en cause, et donc avec la demande en annulation . Au contraire, la requête fait état de ce que, dans la lettre litigieuse, la Commission n' a pas traité le problème de la
pénalisation subie par les transformateurs français du fait du jeu du seuil de garantie ( souligné par nous ). Ce point est complété par la réplique, dans laquelle il est indiqué que la Sonito n' a jamais reçu de réponse à sa demande invitant la Commission à tirer les conséquences des fraudes invoquées pour l' application du seuil de garantie et aussi, par conséquent, pour la fixation du montant de l' aide . Cela confirme à nouveau la limite, d' ailleurs perceptible sans cet élément, de la teneur de
la demande tendant à l' annulation .

14 . Dans ces conditions, il convient, selon nous, de partir de l' idée que la demande en annulation vise uniquement le refus de la Commission d' engager une procédure en manquement contre l' Italie et contre la Grèce . Les requérantes ont qualifié d' inexacte cette interprétation, qui est également celle de la défenderesse, notamment lors de la procédure orale, mais elles n' ont pas retiré la plainte . La carence de la Commission qu' elles invoquent désormais, au motif que celle-ci n' a pas répondu
en partie à la plainte de la Sonito, ne saurait être prise en considération dans le cadre du recours en annulation, cela étant déjà impossible sur le plan des concepts . Dans la mesure où aucun recours en carence au sens de l' article 175 du traité CEE n' a été introduit, il est inutile d' examiner cet argument .

15 . 2 . Dirigée contre le non-engagement de la procédure de manquement, la demande tendant à l' annulation ne répond pas aux conditions de recevabilité de l' article 173, deuxième alinéa, du traité CEE, pour deux raisons . D' une part, comme l' a déclaré la Cour, les demandes d' annulation de cette sorte sont irrecevables dans le principe, "l' ouverture de cette procédure ( la procédure de l' article 169 ) faisant partie de la phase précontentieuse de celle-ci qui ne comporte aucun acte de la
Commission revêtu de force obligatoire" ( 8 ). L' objet du recours en annulation n' est donc pas une décision au sens de l' article 173, deuxième alinéa .

16 . D' autre part, cette disposition présuppose que la mesure attaquée concerne le requérant non seulement directement, mais aussi individuellement . Cette condition n' est pas remplie en cas de recours en annulation dirigé contre un refus d' engager une procédure en manquement, comme la Cour l' a très récemment confirmé ( 9 ).

17 . Les arrêts de la Cour invoqués par les requérantes pendant l' audience ( 10 ) ne conduisent pas non plus à une conclusion différente . Ces arrêts concernaient essentiellement des cas dans lesquels la Cour a admis la qualité pour agir de tiers qui n' étaient pas destinataires de la mesure attaquée lorsque, et parce que, dans la procédure administrative en cause, ils avaient, en raison des circonstances de fait et de droit, une situation particulièrement définie, juridiquement protégée, de sorte
que les mesures en question pouvaient léser leurs intérêts individuels légitimes . Dans ces cas, la Cour est partie de l' idée que les requérants étaient individuellement concernés par lesdites mesures .

18 . En ce qui concerne cet aspect relatif à la procédure, il résulte de l' économie du traité, tel qu' elle ressort des articles 169 et 170 du traité CEE, que seuls la Commission et les États membres sont habilités à introduire un recours juridictionnel ayant pour objet un comportement contraire audit traité . Il serait difficilement compatible avec ce système de reconnaître à des particuliers, dans la procédure précontentieuse de l' article 169, une position protégée de la même nature . Le texte
des dispositions du traité n' offre d' ailleurs aucun élément en ce sens . Cela correspond à la situation matérielle et juridique de ces particuliers, au sujet de laquelle la Cour a déjà déclaré ce qui suit ( 11 ):

"Il résulte toutefois de l' économie de l' article 169 du traité que la Commission n' est pas tenue d' engager une procédure au sens de cette disposition, mais qu' à cet égard elle dispose, au contraire, d' un pouvoir discrétionnaire d' appréciation excluant le droit pour les particuliers d' exiger de cette institution qu' elle prenne position dans un sens déterminé ."

19 . Avec la teneur précédemment définie, la demande tendant à l' annulation est donc à rejeter comme étant irrecevable sans qu' il soit besoin d' examiner la question incertaine de savoir si, dans le cas contraire, la Sonito aurait, elle aussi, comme ses adhérents, qualité pour agir ( 12 ).

20 . 3 . La demande tendant à l' annulation serait également irrecevable dans l' éventualité où elle porterait sur le refus de la Commission d' adapter les aides à la production des campagnes litigieuses sur la base des chiffres de production modifiés . A titre préliminaire, il y a lieu de signaler, à cet égard, les règles sans ambiguïté de l' article 5, paragraphes 5 et 22, du règlement n° 426/86 et de l' article 3, sous c ), du règlement n° 516/77 ( 13 ), d' une part, et, d' autre part, les
articles 11 et suivants du règlement n° 1599/84 ( 14 ) ainsi que l' article 4 du règlement n° 729/70 ( 15 ). Il résulte de ces textes qu' il appartient à la Commission de fixer le montant de l' aide applicable pour tous les opérateurs, tandis que les États membres sont compétents pour l' octroi matériel de l' aide aux divers intéressés ( 16 ). Les requérantes contestent le comportement de la Commission dans son domaine de compétence et estiment que celle-ci est tenue de relever les aides . Pareille
décision devrait être adoptée sous la forme de règlements modificatifs modifiant les règlements par lesquels les aides ont été fixées pour les campagnes 1984/1985 à 1987/1988 ( 17 ). Selon l' objet indiqué des actes juridiques adoptés par la Commission pour fixer les aides, ces règlements modificatifs auraient, conformément à l' article 189, deuxième alinéa, du traité CEE, une portée générale ( 18 ). Comme l' indique à juste titre la Commission, les requérantes ne seraient pas individuellement
concernées par ces actes juridiques, mais seulement en leur qualité objective de producteurs de produits transformés à base de tomate, au même titre que d' autres producteurs de ce secteur dans la Communauté . Nous ne voyons aucun aspect qui les individualiserait à l' intérieur de ce groupe d' une manière analogue à celle d' un destinataire ( 19 ). Il n' est pas nécessaire de trancher la question de savoir si, comme elles l' affirment, les requérantes seraient directement concernées par les
modifications .

21 . En conséquence, l' action en annulation serait irrecevable, même si l' on retenait cette interprétation du chef de demande .

II - Sur la demande en indemnité

22 . 1 . a ) Comme nous l' avons indiqué dans notre exposé des faits, les requérantes demandent réparation de trois types de préjudices distincts et, dans un premier temps, elles ont essentiellement invoqué trois moyens à cet effet . Elles font valoir :

- que c' est à tort que la Commission n' a pas engagé une procédure en manquement;

- qu' elle n' a pas relevé les aides alors que cela s' imposait au vu des chiffres modifiés - tout au moins au profit des transformateurs français;

- qu' elle n' a pas aidé les requérantes aux fins des procédures engagées devant les tribunaux nationaux et, notamment, qu' elle ne leur a communiqué aucune information sur les fraudes dont elle avait acquis connaissance .

23 . En principe, il conviendra donc d' examiner la recevabilité et le bien-fondé de chacune de ces demandes au vu des moyens invoqués à l' appui de chacune d' elles .

24 . b ) Dans ce cadre, il est cependant exclu, a priori, d' examiner le moyen tiré du refus d' engager une procédure en manquement, dont les requérantes font grief à la Commission . Tout comme pour leur demande en annulation, les requérantes ont - entre autres - commencé par soutenir aux fins de leur demande en indemnité qu' il était illégal, de la part de la Commission, de classer la plainte . Comme nous l' avons déjà exposé, elles faisaient ainsi intervenir le moyen tiré du non-engagement d' une
procédure en manquement .

25 . En tout état de cause, la requête, dans un premier temps, ne faisait pas apparaître le rapport censé exister entre ce grief et les préjudices invoqués, dont les requérantes réclament réparation . Dans la réplique, les requérantes ont ensuite indiqué en réponse aux éléments développés dans le mémoire en défense que, s' agissant du grief fait à la Commission d' avoir classé à tort la plainte, il fallait tenir compte du fait que cette plainte revêtait plusieurs aspects . Elles ne fondaient pas
leurs revendications sur l' aspect du non-engagement d' une procédure en manquement . Les arguments présentés par les requérantes à l' audience vont aussi dans le même sens .

26 . Il nous semble donc clair qu' elles ont, en tout cas, abandonné en cours de procédure le moyen qu' elles avaient indiqué - si tant est que la requête réponde, à cet égard, aux exigences de l' article 38, paragraphe 1, sous c ).

Nous ne voyons aucune raison de ne pas accepter cette décision intervenue dans le cadre de la liberté des parties . L' examen de ce moyen est donc superflu .

27 . D' ailleurs, en ce qui concerne ses chances d' être accueilli, nous renvoyons à nos développements au sujet de la recevabilité de la demande tendant à l' annulation, dans le cadre desquels nous avons déjà exposé que la jurisprudence de la Cour refusait aux particuliers le droit d' exiger qu' une procédure en manquement soit engagée .

28 . 2 . Pour ce qui concerne la différence entre les aides effectivement reçues par les requérantes et celles qu' elles auraient perçues sans l' abattement opéré en raison du seuil de garantie ( différence chiffrée à 82 749 312,72 FF ), les requérantes font d' abord valoir, à l' appui de la demande tendant au versement d' un montant correspondant à cette différence, que la Commission aurait commis une faute de service en adoptant les règlements sur le montant des aides à la production . Selon les
requérantes, la Commission aurait dû soit 1 ) corriger les chiffres prétendument faux et ajuster en conséquence les aides auxquelles avaient droit tous les intéressés, soit 2 ) façonner l' aide de telle sorte que les requérantes ne soient pas désavantagées par le dépassement des seuils de garantie dû à des fraudes en Italie et en Grèce . Tout cela ne ressort certes que de façon très vague de la requête . Nous pensons néanmoins que les développements concernant ce point ne peuvent se comprendre qu'
en ce sens .

29 . a ) A cet égard, la recevabilité de la demande pourrait, à la vérité, déjà être mise en doute compte tenu de l' article 178 du traité CEE, en vertu duquel la Cour n' est compétente pour connaître des litiges relatifs à la réparation de dommages que lorsque ceux-ci engagent la responsabilité de la Communauté du fait de dommages causés par ses institutions ou par ses agents .

30 . La Commission a signalé de façon pertinente la répartition des tâches et des compétences entre les producteurs, les États membres et la Commission, telle que cette répartition est définie dans le règlement n° 1599/84 . Selon cette répartition, il incombe aux producteurs de communiquer toutes les informations nécessaires requises par les États membres pour la gestion et le contrôle adéquat du systèmes d' aides . L' article 12 dudit règlement n° 1599/84 décrit dans le détail les indications que
doivent comporter les demandes d' aide, notamment le poids de la matière première et des produits finis et il précise les justificatifs à joindre aux demandes . De plus, son article 4, sous e ) ( 20 ), impose aux producteurs concernés - indépendamment des indications à fournir dans leurs demandes d' aide - de fournir aux États membres certaines communications annuelles, dont l' article 8 du règlement n° 2223/85 ( 21 ) accroît encore la portée dans le cadre du régime de quotas du règlement n° 1320/85
( 22 ). L' article 8 du règlement n° 1599/84 prévoit, en outre, que les transformateurs doivent communiquer des doubles des contrats de transformation aux autorités nationales dans un certain délai . Le titre VII du règlement n° 1599/84 impose aux transformateurs de tenir des registres où figurent les renseignements à prendre en considération aux fins de l' octroi de l' aide et de conserver les preuves correspondantes . Les États membres peuvent procéder à des contrôles individuels et sont tenus d'
effectuer des contrôles annuels des registres . Ils "prennent toute mesure utile pour prévenir et réprimer les fraudes relatives au régime d' aide à la production et en assurer l' application correcte" ( article 14, paragraphe 4, du règlement n° 1599/84 ). L' article 19 dudit règlement n° 1599/84 prévoit que les États membres communiquent ensuite à la Commission certaines données déterminées en vue des fins poursuivies par celle-ci - ces données correspondent, en dernière analyse, à un récapitulatif
des données collectées auprès des transformateurs .

31 . La Commission ne détermine donc pas elle-même les données décisives, mais ne fait, au contraire, que les recevoir . A vrai dire, l' article 9, paragraphe 2, du règlement n° 729/70 lui permet de procéder elle-même à des contrôles sur place; lorsqu' elle estime qu' il s' est produit des irrégularités ou des négligences dans un État membre, elle peut, en application de l' article 6 du règlement n° 283/72 ( 23 ), contraindre les États membres concernés, en leur adressant une communication, à
procéder eux-mêmes à une enquête .

32 . Compte tenu de ce cadre juridique, il se pose la question de savoir si l' illégalité alléguée émane réellement de la Commission, qui est mise en cause, ou si elle émane des autorités nationales . Ce n' est que dans le premier cas que la Cour, en vertu de l' article 178 du traité CEE, est compétente pour connaître de la demande en indemnité ( 24 ). Il s' agit, en définitive, de vérifier sommairement dans quelle mesure le comportement contesté de la Commission peut, sous quelque aspect que ce
soit, être cause du préjudice allégué .

33 . La Commission ne peut procéder à une correction des données déterminantes et donner effet à cette correction pour le montant des aides que si des écarts ont été concrètement constatés . Il ne suffit pas qu' elle ait simplement l' impression, par exemple lorsque les chiffres fournis ne paraissent pas plausibles, que des irrégularités ont été commises . Comme nous l' avons montré, tant les États membres concernés que la Commission sont habilités à procéder aux contrôles voulus . La Commission n'
a pas été en mesure - les requérantes ne le contestent pas - d' établir des irrégularités sur la base de ses propres contrôles ( 25 ). En revanche, les contrôles des États membres ont montré qu' en raison de fraudes certaines aides, dont on ne connaît pas encore avec exactitude le montant ni la campagne à laquelle elles correspondaient, ont été indûment versées ( 26 ).

34 . Les parties sont manifestement d' accord pour admettre que les modifications qui en résultaient ne se sont pas traduites dans les aides qui ont été fixées pour les campagnes 1983/1984 à 1987/1988 . Contrairement au cas de l' affaire Francesconi ( 27 ), qui portait sur les obligations d' information et de surveillance de la Commission et non sur ses compétences législatives, il résulte de la répartition décrite des compétences qu' il incombait à la Commission, et non aux États membres, de tenir
compte de ces découvertes pour procéder à une nouvelle fixation du montant des aides . Logiquement, il n' est donc pas exclu que le préjudice invoqué repose, au moins en partie, sur un comportement illégal de la Commission . Cela doit suffire, selon nous, pour admettre la recevabilité de cette demande . La question de savoir s' il existe effectivement une faute de service et un préjudice, ainsi que l' indispensable lien de causalité entre ces deux éléments, est une question de fond .

35 . Enfin, on ne saurait, selon nous, suivre la Commission lorsque, pour démontrer l' irrecevabilité de la requête, elle invoque les arrêts rendus dans les affaires Krohn ( 28 ) et Plaumann ( 29 ). Il ressort de l' arrêt Plaumann qu' en l' absence d' une faute un recours en indemnité n' est pas fondé lorsque l' acte administratif par lequel le requérant s' estime lésé n' est pas déclaré nul . Dans l' arrêt Krohn, la Cour a ensuite précisé que ces considérations ne concernaient qu' un cas
exceptionnel bien déterminé . Selon cet arrêt, pareil cas exceptionnel n' existe que lorsque le requérant attaque une décision individuelle . Or, en l' espèce, comme nous l' avons montré au sujet de la recevabilité de l' action en annulation, les actes juridiques dont il s' agit sont de portée générale . Au surplus, en ce qui concerne la question de la recevabilité des actions en indemnité lorsqu' elles se trouvent en concurrence avec des actions en annulation, la Cour a confirmé, dans l' arrêt
Krohn, sa jurisprudence constante depuis l' arrêt Schoeppenstedt ( 30 ), en disant pour droit :

"Ainsi qu' il a été rappelé ci-dessus, l' action en indemnité des articles 178 et 215, deuxième alinéa, du traité a été instituée comme voie autonome, ayant sa fonction particulière . Elle se différencie notamment du recours en annulation en ce qu' elle tend non à la suppression d' une mesure déterminée, mais à la réparation du préjudice causé par une institution" ( 31 ).

36 . La demande tendant au versement de la différence entre les aides est donc recevable en ce qu' elle repose sur le défaut d' ajustement des montants de ces aides .

37 . b ) Pour ce qui concerne son bien-fondé, il y a lieu d' observer qu' un droit à réparation au titre de l' article 215, deuxième alinéa, du traité CEE n' existe, d' après les principes de droit généraux auxquels se réfère cette disposition, que si le comportement en cause de l' institution communautaire - en l' espèce, la Commission - est illégal . En ce que les requérantes font valoir que la Commission aurait dû moduler les aides de façon à ce que les inconvénients résultant de fraudes, dans la
mesure où des effets s' en étaient ensuivis sur le dépassement du seuil de garantie, soient uniquement supportés par les transformateurs italiens et grecs, il faut observer que le comportement de la Commission ne saurait, a priori, être considéré comme illégal, compte tenu de l' interdiction de discrimination de l' article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité CEE . Comme celle-ci l' indique à juste titre, pareille modulation discriminerait les producteurs d' Italie et de Grèce qui ont
communiqué des chiffres exacts . Le principe de l' égalité de traitement qu' invoquent les requérantes serait ainsi transformé en son contraire .

38 . En ce qu' elles reprochent à la Commission de ne pas avoir procédé, dans le cadre des règlements précédemment cités concernant les campagnes 1984/1985 à 1987/1988, à un relèvement de l' aide tenant compte des fraudes constatées - pour tous les transformateurs de la Communauté -, les requérantes font intervenir une notion de responsabilité de la Communauté du fait d' actes normatifs . S' agissant d' actes qui impliquent des choix de politique économique, il est nécessaire d' établir une forme d'
illégalité spécifique : de tels actes ne peuvent engager une responsabilité de la Communauté que s' il existe une violation suffisamment caractérisée d' une règle supérieure de droit protégeant les particuliers ( 32 ). Il résulte de l' article 5, paragraphes 1 et 3, du règlement n° 426/86 ainsi que de l' article 2 du règlement n° 1277/84 ( 33 ) que la fixation de l' aide à la production doit, certes, respecter certaines lignes directrices, mais que, dans le cadre de ces dernières, le détail de la
fixation relève cependant du pouvoir discrétionnaire de la Communauté . L' article 5, paragraphe 1, prévoit qu' il est "notamment" tenu compte des facteurs qu' il cite . D' autres formulations sont utilisées à l' article 2, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1277/84 . La première phrase de l' article 5, paragraphe 1, du règlement n° 426/86 trace une limite absolue à ce pouvoir discrétionnaire : "Le montant de l' aide est fixé de manière à permettre l' écoulement du produit communautaire ."

39 . La présente affaire offre, en outre, la particularité de poser le problème de modifications ultérieures des règlements concernés . Nul ne prétend que, lors de l' adoption des différents règlements, la Commission n' a pas tenu compte d' écarts concrètement constatés entre les chiffres de production effectifs et ceux fournis par les transformateurs . Or, en application de l' article 5, paragraphe 5, du règlement n° 426/86, l' aide est à fixer avant le début de chaque campagne . Nous ne pensons
certes pas qu' il soit exclu dans le principe de fixer l' aide après cette date - et, en tout état de cause, cela n' est pas à exclure lorque les aides ( en cas de modification ) sont à relever; cette disposition ne tend certainement qu' à assurer aux opérateurs économiques la possibilité de s' adapter en temps voulu à la situation qui sera celle de la nouvelle campagne . Néanmoins, il résulte de cette situation juridique que le large pouvoir d' appréciation de la Commission s' étend manifestement
aussi à la question de savoir si elle entend tenir compte de modifications ultérieurement communiquées .

40 . L' examen doit donc porter sur le point de savoir si le fait d' avoir négligé pareille modification constitue, de la part de la Commission, une violation caractérisée dans le sens précédemment indiqué . A cet effet, il ne suffit pas de constater une violation de l' interdiction de discrimination de l' article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité CEE, violation que l' on pourrait voir, en l' espèce, dans le rapport entre la situation des transformateurs "honnêtes" et celle des
transformateurs qui ont communiqué des chiffres surévalués au cours de la campagne précédente . Il faut, au contraire, que l' institution concernée ait méconnu de façon manifeste et grave les limites de son pouvoir discrétionnaire ( 34 ).

41 . Selon nous, la condition de "gravité" n' est manifestement déjà pas remplie en l' espèce . Pour autant qu' ils aient existé de façon incontestable, les cas de fraude qui ont été découverts a posteriori, et qui n' ont donc pas été pris en compte à l' origine, concernent, d' une part, un montant de 6,5 millions d' écus portant sur quatre campagnes et, d' autre part, un montant d' environ 9 millions d' écus dont l' imputation n' est pas établie . Le point de vue que formulent les requérantes -
même si cette formulation est en partie vague -, et que conteste la Commission, à savoir que tous les dépassements du seuil de garantie reposaient sur des indications mensongères de transformateurs italiens et grecs, n' est étayé par aucune preuve et il est donc, en définitive, également dépourvu de pertinence puisque, comme nous l' avons indiqué, la Commission ne peut tenir compte que des écarts qui sont établis de façon certaine . A l' appui de leur thèse, les requérantes n' ont pas non plus
fourni de preuve, preuve qui nous paraît pratiquement impossible à rapporter compte tenu de l' ordre de grandeur du pourcentage d' abattement dû aux dépassements, même tel qu' il ressort du tableau présenté dans l' annexe 9 de la requête ( autour de 19 % pendant les campagnes en cause ). Il faut donc partir des montants incontestés précités .

42 . Eu égard à cette situation, il y a lieu de mentionner les arrêts de la Cour du 4 octobre 1979 ( 35 ), qui concernaient la responsabilité de la Communauté du fait d' une réglementation dans le secteur du maïs . La Cour a estimé que la violation dont il était question était grave et manifeste . Il nous paraît clair que la Cour avait admis la "gravité" de la violation considérée en raison, précisément, de la circonstance que, d' une part, le groupe des entreprises concernées était restreint et
nettement délimité et que, d' autre part, le dommage dépassait les limites des risques économiques inhérents aux activités dans le secteur concerné ( 36 ).

43 . Le cas qui nous occupe en l' espèce présente précisément les caractéristiques contraires . Pour autant que nous puissions le savoir, considérée dans l' absolu, l' atteinte portée dans la sphère juridique des personnes concernées est négligeable . Les requérantes, auxquelles il incombait de prouver que les conditions d' une atteinte grave, au sens précité, étaient réunies, n' ont fourni aucun élément tangible en ce sens . Au contraire, on peut même partir de l' idée que les montants des aides
incontestablement obtenues par des fraudes ( 6,5 + 9 millions d' écus ) ne sont nullement du même ordre de grandeur que les montants auxquels les transformateurs de la Communauté auraient eu droit pendant les campagnes en cause sans les dépassements du seuil de garantie ( 37 ). Le risque économique que supportent les transformateurs et que le régime d' aide vise à limiter n' est pas sensiblement augmenté et, en particulier, la situation de la concurrence n' est pas sensiblement modifiée .

44 . Enfin, comme le souligne à juste titre la Commission, tous les transformateurs du secteur considéré sont affectés par l' atteinte en question, et non un groupe nettement délimité . Même si, d' après la réglementation relative au financement de la politique agricole commune, les États membres sont tenus de reprendre les aides indûment octroyées et si ces montants ne sont pas pris en charge par la Communauté à l' apurement des comptes dans le cadre du FEOGA, il est inhérent à la réglementation
des aides - que les requérantes ont, d' ailleurs, elles-mêmes exploitée - que le poids des fraudes soit toujours supporté, dans une certaine mesure, par ceux des intéressés qui agissent honnêtement, ne serait-ce qu' à défaut de découvrir les faits .

45 . Il résulte de tout ce qui précède que les conditions particulières qui doivent être réunies pour qu' une violation du droit susceptible d' engager la responsabilité de la Communauté du fait d' actes normatifs puisse exister ne sont pas remplies . La requête est donc mal fondée en ce que les requérantes réclament le versement d' un montant correspondant au montant de l' abattement opéré en raison du seuil de garantie .

46 . 3 . Les requérantes demandent aussi la réparation de leur préjudice commercial; à cet effet, elles invoquent, d' une part, le comportement contesté de la Commission en ce qui concerne le non-relèvement des montants de l' aide et, d' autre part, elles font grief à la Commission de ne pas avoir aidé la Sonito dans le cadre des poursuites pénales dans lesquelles celle-ci était partie civile ou avait voulu se constituer partie civile .

47 . a ) La recevabilité de cette demande paraît déjà pouvoir être récusée du fait que les requérantes ne l' ont toujours pas chiffrée . Pour ce type d' actions en indemnité, la Cour estime, semble-t-il, que les exigences posées à l' article 38, paragraphe 1, sous c ) et d ), du règlement de procédure quant au dépôt d' une requête en bonne et due forme sont remplies lorsque le requérant a présenté une demande visant à faire constater la responsabilité ( 38 ). On peut déduire des arrêts cités qu' à
titre de condition minimale le requérant doit au moins préciser sa demande, initialement non chiffrée, à un stade ultérieur, dans le sens d' une action en constatation; une demande d' expertise peut ensuite, dans ce cas, être présentée dans le cadre de la procédure qui suit l' arrêt statuant sur le fondement du droit à l' indemnisation . Selon nous, il n' y a pas lieu d' atténuer davantage cette exigence . La demande tendant à la réparation du préjudice commercial est donc déjà irrecevable, ainsi
que la demande de désignation d' un expert dont elle est assortie ( troisième chef de demande ).

48 . b ) Pour le cas où vous ne retiendriez pas ce point de vue, nous vous proposons de rejeter, en tout état de cause, cette demande comme étant mal fondée . Dans la mesure, en effet, où l' on ne saurait, pour les raisons qui ont été indiquées, retenir le moyen tiré de l' illégalité du refus de la Commission de modifier les règlements concernant les aides, il ne reste que le second moyen, tiré du défaut de coopération avec les requérantes dans le cadre des procédures engagées devant les tribunaux
nationaux, qui est reproché à la Commission . A cet égard, on ne voit pas sous quel aspect le comportement de la Commission dont il est fait grief pourrait être cause du dommage que les requérantes prétendent avoir subi . Celles-ci n' ont pas démontré en quoi les informations souhaitées auraient, en tout état de cause, été de nature à les aider à faire valoir des droits en matière civile qu' il était impossible de faire valoir sans cette aide . Les requérantes ont elles-mêmes admis que, dans les
procédures pénales dans lesquelles elles s' étaient constituées partie civile, elles n' avaient pas réussi à obtenir gain de cause . On ne discerne pas en quoi la communication, par la Commission, de certaines informations - quelle qu' en soit la nature - aurait pu modifier cette situation . Ces considérations s' appliquent aussi pour les procédures pénales demeurées inconnues aux requérantes à cause du silence de la Commission .

49 . Enfin, on ne voit pas non plus clairement quelle est la portée de la réparation que les requérantes auraient escomptée pour le préjudice commercial - dont elles demandent à être indemnisées en totalité - qu' elles ont subi en raison des répercussions du seuil de garantie, si elles avaient obtenu les informations souhaitées . Une indemnisation dont la portée serait celle qu' elles laissent supposer, comprenant l' indemnisation du préjudice résultant de l' arrêt de production de diverses usines,
nous semble totalement exclue . Les requérantes n' ont pas présenté une demande en indemnité limitée à la réparation des seuls préjudices précisément causés par le refus de la Commission .

50 . Ce chef de demande est donc, en tout état de cause, mal fondé .

51 . 4 . Enfin, quant à la demande tendant au remboursement des frais de procédure exposés par la Sonito, cette demande n' étant pas chiffrée, elle nous paraît, elle aussi, irrecevable pour les motifs indiqués au sujet de la demande dont il vient d' être question . Elle nous paraît d' autant plus irrecevable qu' il aurait fallu en chiffrer directement le montant, au moins à un stade ultérieur à la requête, puisque, comme l' a fait apparaître l' audience, le montant en question concerne des
procédures qui ont eu lieu dans le passé .

52 . Nous pensons d' ailleurs que cette demande n' est pas fondée, puisque la Sonito a engagé des frais du fait de son propre choix et n' a pas établi ce que la Commission aurait dû faire ou s' abstenir de faire pour les lui éviter . En particulier, on ne distingue pas non plus de rapport entre ces frais et la violation, alléguée par les requérantes, du devoir d' information de la Commission .

53 . La demande tendant à ce remboursement est donc, en tout état de cause, à rejeter .

III - Dépens

54 . La décision sur les dépens résulte de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure .

C - Conclusion

55 . Nous concluons en vous proposant

- de rejeter la demande en annulation ( chef de demande 1 ) comme étant irrecevable,

- de rejeter la demande en indemnité ( chefs de demande 2 et 3 ):

- comme étant mal fondée en ce qu' elle vise la différence entre les aides effectivement octroyées et celles que les requérantes auraient dû percevoir sans l' abattement;

- pour le surplus, comme étant irrecevable ou, en tout état de cause, mal fondée;

- de condamner solidairement les requérantes aux dépens .

(*) Langue originale : l' allemand .

( 1 ) Règlement du Conseil du 24 février 1986 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits transformés à base de fruits et légumes ( JO L 49, p . 1 ).

( 2 ) Ces aides ont été fixées par la Commission

- pour la campagne 1984/1985 : par le règlement n° 1925/84, du 5 juillet 1984 ( JO L 179, p . 15 );

- pour la campagne 1985/1986 : par le règlement n° 2222/85, du 31 juillet 1985 ( JO L 205, p . 16 );

- pour la campagne 1986/1987 : par le règlement n° 2077/86, du 30 juin 1986 ( JO L 179, p . 11 );

- pour la campagne 1987/1988 : par le règlement n° 2160/87, du 22 juillet 1987 ( JO L 202, p . 32 ).

( 3 ) Règlement du Conseil du 31 mars 1984 instaurant un système de seuils de garantie pour certains produits transformés à base de fruits et légumes ( JO L 103, p . 19 ).

( 4 ) La lettre concerne aussi une autre plainte qui vise les produits à base de pêches et qui ne concerne en rien le présent litige .

( 5 ) Souligné par nous .

( 6 ) Arrêt du 25 septembre 1979, Commission/France ( 232/78, Rec . p . 2729 ), et arrêt du 18 octobre 1979, GEMA/Commission ( 125/78, Rec . p . 3173 ).

( 7 ) Sous A .

( 8 ) Sommaire de l' arrêt du 1er mars 1966, Luetticke et autres/Commission ( 48/65, Rec . p . 28 ).

( 9 ) Arrêt du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, point 13 ( 247/87, Rec . p . 0000 ).

( 10 ) Arrêts du 25 octobre 1977, Metro/Commission ( 26/76, Rec . p . 1875 ); du 4 octobre 1983, Fediol/Commission ( 191/82, Rec . p . 2913 ); du 11 octobre 1983, Demo-Studio Schmidt/Commission ( 210/81, Rec . p . 3045 ); du 20 mars 1985, Timex/Conseil et Commission ( 264/82, Rec . p . 849 ); et arrêt du 28 janvier 1986, Cofaz et autres/Commission ( 169/84, Rec . p . 391 ).

( 11 ) Arrêt du 14 février 1989 ( note 9 ), point 11; en ce sens, voir aussi les conclusions qui avaient été présentées par l' avocat général M . Gand dans l' affaire 48/65 ( note 8 ), Rec . 1966, p . 41, 45 .

( 12 ) Voir, à cet égard, l' arrêt de la Cour du 4 décembre 1962, Confédération nationale des producteurs de fruits et légumes et autres/Conseil ( 16/62 et 17/62, Rec . p . 963 ); l' ordonnance du 5 novembre 1986, UFADE/Conseil et Commission ( 117/86, Rec . p . 3255 ); ainsi que l' ordonnance du 18 janvier 1989, OPAGAC et autres/Commission, point 7 ( 167/87, Rec . p . 0000 ).

( 13 ) Règlement du Conseil du 14 mars 1977 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits transformés à base de fruits et légumes ( JO L 73, p . 1 ).

( 14 ) Règlement de la Commission du 5 juin 1984 portant dispositions d' application des règlements sur les aides à la production pour les produits transformés à base de fruits et légumes ( JO L 152, p . 16 ).

( 15 ) Règlement du Conseil du 21 avril 1970 relatif au financement de la politique agricole commune ( JO L 94, p . 13 ).

( 16 ) Voir aussi, à cet égard, l' arrêt du 21 septembre 1983, Deutsche Milchkontor et autres/République fédérale d' Allemagne ( 205/82, 206/82, 207/82, 208/82, 209/82, 210/82, 211/82, 212/82, 213/82, 214/82 et 215/82, Rec . p . 2633 ), selon lequel il résulte du système institutionnel de la Communauté et des dispositions qui régissent les relations entre la Communauté et les États membres qu' en l' absence d' une disposition contraire du droit communautaire il appartient aux États membres d'
assurer, sur leur territoire, l' exécution des réglementations communautaires, notamment dans le cadre de la politique agricole commune ( voir, également, arrêt du 6 juin 1972, Schlueter, 94/71, Rec . p . 307, et arrêt du 7 juillet 1987, L' Étoile commerciale et autres/Commission, 89/86 et 91/86, Rec . p . 3005 ).

( 17 ) Voir ci-dessus, note 2 .

( 18 ) Voir dernière phrase des règlements cités en note 2 .

( 19 ) Exigence résultant de la jurisprudence constante de la Cour; pour la période récente, voir arrêt du 29 juin 1989, RAR/Conseil et Commission, point 9 ( 250/86 et 11/87, Rec . p . 0000 ); voir aussi arrêt du 21 novembre 1989, Les Usines coopératives de déshydradation du Vexin et autres/Commission ( C-244/88, Rec . p . 0000 ).

( 20 ) Dans la rédaction du règlement n° 1455/85 ( JO L 144, p . 69 ).

( 21 ) Règlement de la Commission du 31 juillet 1985 établissant les modalités d' application des mesures temporaires relatives à l' aide à la production de produits transformés à base de tomates ( JO L 205, p . 19 ).

( 22 ) Règlement du Conseil du 23 mai 1985 concernant des mesures temporaires relatives à l' aide à la production de produits transformés à base de tomates ( JO L 137, p . 41 ).

( 23 ) Règlement du Conseil du 7 février 1972 concernant les irrégularités et la récupération des sommes indûment versées dans le cadre du financement de la politique agricole commune ainsi que l' organisation d' un système d' information dans ce domaine ( JO L 36, p . 1 ).

( 24 ) Jurisprudence constante : voir arrêt du 26 février 1986, Krohn/Commission ( 175/84, Rec . p . 753 ), et arrêt du 7 juillet 1987, L' Étoile commerciale et CNTA/Commission ( 89/86 et 91/86, Rec . p . 3005 ).

( 25 ) Voir réponse de la Commission du 30 janvier 1987 à la question parlementaire du député européen Michel Debatisse ( JO C 149, p . 22 ).

( 26 ) Voir note 23 ainsi que la réponse de la Commission, invoquée par les requérantes, au rapport spécial de la Cour des comptes n° 2/89 ( JO C 128, p . 44/76 ).

( 27 ) Arrêt du 4 juillet 1989, Francesconi et autres/Commission ( 326/86 et 66/88, Rec . p . 0000 ).

( 28 ) ibidem ( note 24 ).

( 29 ) Arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission ( 25/62, Rec . p . 213 ).

( 30 ) Arrêt du 2 décembre 1971, Schoeppenstedt/Conseil ( 5/71, Rec . p . 975 ).

( 31 ) Arrêt Krohn, point 32 .

( 32 ) Jurisprudence constante; voir arrêt de principe du 2 décembre 1971 dans l' affaire 5/71, ibidem; confirmé en dernier lieu par l' arrêt du 28 novembre 1989, Epicheiriseon et autres/Commission et Conseil ( C-122/86, Rec . p . 0000 ).

( 33 ) Règlement du Conseil du 8 mai 1984 fixant les règles générales du régime d' aide à la production dans le secteur des fruits et légumes transformés ( JO L 123, p . 25 ).

( 34 ) Arrêt du 25 mai 1978, Bayerische HNL et autres/Conseil et Commission ( 83/76 et 94/76, 4/77, 15/77 et 40/77, Rec . p . 1209 ).

( 35 ) 238/78, Ireks-Arkady/Conseil et Commission, Rec . p . 2955; 241/78, 242/78, 245/78, 246/78, 247/78, 248/78, 249/78 et 250/78, DGV et Rheinische Kraftfutterwerke et autres/Conseil et Commission, Rec . p . 3017; 261/78 et 262/78, Interquell et Diamalt/Conseil et Commission, Rec . 1979, p . 3045 .

( 36 ) Lorsque la Cour relève que l' égalité de traitement a été rompue sans justification suffisante, elle aborde le critère du caractère manifeste que doit présenter la violation considérée; sur cette lecture de la jurisprudence, voir aussi conclusions de l' avocat général M . Darmon du 10 mars 1989 dans l' affaire 20/88, non encore publiées au Recueil ( point 52 ).

( 37 ) Dans un simple but d' exhaustivité, nous présentons le calcul approximatif suivant : les requérantes calculent, dans l' annexe 9 de la requête, une aide d' un montant d' environ 50 millions d' écus qui aurait dû leur être versée, en l' absence de dépassement, pour les campagnes litigieuses . Dans la mesure où, selon les tableaux qui ont été présentés par la Commission et dont les requérantes n' ont, en tout état de cause, pas contesté l' ordre de grandeur, les transformateurs français avaient
une part d' environ 5 % de la production communautaire, le seul montant à considérer comme certain, qui est un montant de 15,5 millions d' écus d' aides octroyées à tort en raison de fraudes, représenterait à peine plus de 1,2 % du total de l' ensemble du montant de l' aide due aux transformateurs de la Communauté ( en l' absence de dépassements ).

( 38 ) Voir arrêt du 14 mai 1975, CNTA/Commission, point 1 ( 74/74, Rec . p . 523 ); arrêt du 2 juin 1976, Kampffmeyer et autres/Commission et Conseil, point 1 ( 56/74, 57/74, 58/74, 59/74 et 60/74, Rec . p . 711 ).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-87/89
Date de la décision : 07/03/1990
Type de recours : Recours en annulation - irrecevable, Recours en responsabilité - non fondé

Analyses

Agriculture - Aide à la transformation de la tomate - Plainte pour fraudes - Recours en annulation et recours en indemnité.

Fruits et légumes transformés

Agriculture et Pêche


Parties
Demandeurs : Société nationale interprofessionnelle de la tomate e.a.
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Lenz
Rapporteur ?: Schockweiler

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1990:106

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