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07/02/1990 | CJUE | N°C-315/88

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 7 février 1990., Procédure pénale contre Angelo Bagli Pennacchiotti., 07/02/1990, C-315/88


Avis juridique important

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61988C0315

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 7 février 1990. - Procédure pénale contre Angelo Bagli Pennacchiotti. - Demande de décision préjudicielle: Pretura di Frascati - Italie. - Agriculture - Vin - Réglementation relative à l'élaboration des v.q.p.r.d. et v.m

.q.p.r.d. - Affaire C-315/88.
Recueil de jurisprudence 1990 page I-01323

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Avis juridique important

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61988C0315

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 7 février 1990. - Procédure pénale contre Angelo Bagli Pennacchiotti. - Demande de décision préjudicielle: Pretura di Frascati - Italie. - Agriculture - Vin - Réglementation relative à l'élaboration des v.q.p.r.d. et v.m.q.p.r.d. - Affaire C-315/88.
Recueil de jurisprudence 1990 page I-01323

Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1 . M . Bagli Pennacchiotti a fait, en mars 1987, l' objet de poursuites dans le cadre de la procédure au principal, parce que la cave coopérative qu' il dirige aurait vinifié 1 495 hectolitres de vin, dénomination d' origine contrôlée ( DOC ) Frascati, en dehors de la zone de récolte des raisins, violant ainsi l' article 515 du code pénal italien sur la fraude commerciale et l' article 28 du décret n° 930, du 12 juillet 1963, du président de la République, qui réprime l' utilisation injustifiée de
la dénomination d' origine contrôlée ou contrôlée et garantie .

2 . Le défendeur au principal, faisant valoir l' existence en droit italien d' "actes administratifs discordants" relatifs aux transferts à l' extérieur de la zone de récolte des raisins, a demandé au pretore de saisir la Cour d' une question préjudicielle sur le degré de liberté laissé en la matière aux États membres par la réglementation communautaire, en vertu de laquelle le vin litigieux est classé vin de qualité produit dans une région déterminée ( ci-après "v.q.p.r.d .") ou vin mousseux de
qualité produit dans une région déterminée ( ci-après "v.m.q.p.r.d ."). Faisant droit à cette demande, le pretore di Frascati nous pose la question suivante :

"Les attributions conférées aux États membres par le règlement ( CEE ) n° 822/87 en ce qui concerne les transferts et les limites territoriales de vinification entraînent-elles une interdiction pure et simple ou la faculté d' établir des réglementations différenciées au moyen de mesures adoptées par l' État membre?"

3 . Il importe tout d' abord de préciser, comme l' ont fait la Commission, le gouvernement italien et le gouvernement espagnol, qu' a été adopté, outre le règlement ( CEE ) n° 822/87 du Conseil, du 16 mars 1987, portant organisation commune du marché viti-vinicole ( 1 ), cité par le juge de renvoi, le règlement ( CEE ) n° 823/87 du Conseil, du 16 mars 1987 ( 2 ), établissant des dispositions particulières relatives aux vins de qualité produits dans des régions déterminées, dont fait partie, comme
nous l' avons vu, le vin litigieux . L' article 15 de ce règlement fait d' ailleurs référence aux mentions "dénomination d' origine contrôlée" et "dénomination d' origine contrôlée et garantie" dont l' utilisation abusive est reprochée au défendeur .

4 . Ce règlement a remplacé le règlement ( CEE ) n° 338/79 du Conseil, du 5 février 1979, établissant des dispositions particulières relatives aux vins de qualité produits dans des régions déterminées ( 3 ), auquel se réfère le défendeur au principal .

5 . La question de savoir laquelle de ces deux dispositions s' applique aux faits de l' espèce ne se pose cependant pas, puisque les articles régissant la matière qui nous occupe ici sont identiques .

6 . Il s' agit essentiellement de l' article 6, paragraphe 2, des règlements concernés, en vertu duquel :

"La transformation des raisins visés au paragraphe 1, sous a ), en moûts et du moût en vin est assurée à l' intérieur de la région déterminée où ils ont été récoltés .

L' élaboration d' un v.m.q.p.r.d . ne peut avoir lieu qu' à l' intérieur de la région déterminée visée au premier alinéa .

Toutefois, les opérations visées aux premier et deuxième alinéas, peuvent avoir lieu en dehors de la région déterminée :

a ) si la réglementation de l' État membre sur le territoire duquel les raisins mis en oeuvre ont été récoltés l' autorise,

et

b ) si un contrôle de la production est assuré ."

7 . Le contenu de cette disposition est clair : les vins de qualité produits dans une région déterminée doivent, en principe, être obtenus à partir de raisins récoltés et transformés à l' intérieur des limites de la région déterminée, telle qu' elle est définie par la réglementation, mais les États membres peuvent, toutefois, autoriser la transformation et l' élaboration à l' extérieur de la région en question si un contrôle de la production est assuré .

8 . Ils doivent, cependant, alors respecter, en plus, les dispositions du règlement ( CEE ) n° 1698/70 de la Commission, du 25 août 1970, relatif à certaines dérogations concernant l' élaboration des vins de qualité produits dans des régions déterminées ( 4 ) qui a été adopté sur la base de l' article 5 du règlement ( CEE ) n° 817/70 ( 5 ) et a précisé les modalités selon lesquelles les États membres peuvent autoriser de telles dérogations . Ce règlement prévoit notamment que tout intéressé qui
souhaite profiter de la dérogation doit obtenir une autorisation expresse de la part de l' organisme compétent de l' État membre concerné ( article 2, paragraphe 2 ).

9 . Comme il semblerait que le vin de Frascati soit également susceptible d' être mousseux, je préciserai que je partage l' avis de la Commission selon lequel le règlement n° 1698/70 s' applique également aux v.m.p.q.r.d . En effet, l' article 5 du règlement n° 817/70, équivalant à l' article 6 du règlement n° 823/87, constitue la disposition sur la base de laquelle ce règlement a été adopté, et il concerne tous les vins de qualité . Rien dans les dispositions du règlement n° 1698/70 ne permet de
supposer que son champ d' application matériel serait plus restreint que celui de la disposition qui lui sert de base .

10 . Pour le détail des conditions énoncées dans le règlement n° 1698/70, je me permets de renvoyer au rapport d' audience . Il ressort, en effet, du dossier que, en ce qui concerne le vin de Frascati, la République italienne n' a fait qu' un usage très limité de la possibilité d' autoriser des dérogations à la règle générale, puisqu' elle ne l' a fait que pour une partie de la commune de Montecompatri, non concernée en l' espèce . Au cas, toutefois, où la réglementation italienne prévoirait, en
conformité avec le droit communautaire, une dérogation plus large en ce qui concerne l' élaboration des vins mousseux de Frascati, il appartiendrait au pretore d' en tenir compte pour autant que le litige au principal porterait sur de tels vins, ce qui semble très douteux . Mais, dans cette hypothèse aussi, le défendeur au principal devrait être titulaire d' une autorisation expresse .

11 . Le défendeur au principal fait cependant valoir que l' article 15, paragraphe 2, du règlement n° 822/87 en liaison avec l' annexe VI du même acte permettrait d' effectuer l' aération et les traitements thermiques par des déplacements à des fins climatiques . Cette thèse ne me paraît pas pouvoir être accueillie . Les dispositions en cause qui énoncent la liste des traitements autorisés incluent, certes, parmi ceux-ci l' aération et les traitements thermiques, mais ne se prononcent en rien sur
leur localisation .

12 . Ces opérations relevant indiscutablement de la vinification, il faut leur appliquer le régime que nous avons exposé ci-dessus .

13 . Le défendeur au principal soutient aussi que le droit italien en la matière serait contradictoire . Au vu des observations présentées par le gouvernement italien, cela ne me semble pas être le cas, mais, de toute façon, il s' agit là d' un problème au sujet duquel il n' appartient pas à la Cour de se prononcer dans le cadre du présent renvoi préjudiciel .

14 . Il faut encore noter que la question posée à la Cour mentionne également les "transferts ". Il ressort, toutefois, de l' ordonnance de renvoi qu' est reproché à M . Bagli Pennacchiotti d' avoir accompli des "opérations de vinification à l' extérieur de la zone de production des raisins, prévue par la réglementation de production ". Il semblerait donc que se pose uniquement un problème relevant de la matière des limites territoriales de vinification que nous venons d' examiner .

15 . Dans la mesure, cependant, où cela présenterait un intérêt pour le litige au principal, je précise que je partage en l' espèce l' avis de la Commission, selon lequel ce n' est qu' après que la transformation des raisins en vin, mousseux ou non, est complètement terminée, c' est-à-dire après l' écoulement, le cas échéant, de la période minimale de vieillissement, que d' éventuels transferts en dehors de la "région déterminée" peuvent être effectués sans que cela fasse perdre au vin son droit à
l' appellation v.q.p.r.d . ou v.m.q.p.r.d .

Conclusion

16 . Compte tenu de ce qui précède, je propose de donner la réponse suivante à la question posée par le pretore di Frascati :

"Le droit communautaire, en l' occurrence l' article 6, paragraphe 2, du règlement ( CEE ) n° 823/87 du Conseil, prévoit que, pour la production de vins de qualité, mousseux ou non, produits dans une région déterminée, la transformation des raisins en moût et de celui-ci en vin ainsi que l' élaboration du vin mousseux doivent avoir lieu entièrement à l' intérieur de la région en cause à moins qu' une dérogation à cette règle ne soit prévue, en ce qui concerne cette région précise, par la législation
de l' État membre sur le territoire duquel les raisins ont été récoltés, conformément au règlement ( CEE ) n° 1698/70 ."

(*) Langue originale : le français .

( 1 ) JO L 84, p . 1 .

( 2 ) JO L 84, p . 59 .

( 3 ) JO L 54, p . 48 .

( 4 ) JO L 190, p . 4 .

( 5 ) Règlement ( CEE ) n° 817/70 du Conseil, du 28 avril 1970, établissant les dispositions particulières relatives aux vins de qualité produits dans des régions déterminées ( JO L 99, p . 20 ).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-315/88
Date de la décision : 07/02/1990
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Pretura di Frascati - Italie.

Agriculture - Vin - Réglementation relative à l'élaboration des v.q.p.r.d. et v.m.q.p.r.d.

Agriculture et Pêche

Vin


Parties
Demandeurs : Procédure pénale
Défendeurs : Angelo Bagli Pennacchiotti.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mischo
Rapporteur ?: Grévisse

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1990:53

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