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08/03/1988 | CJUE | N°250/85

CJUE | CJUE, Conclusions jointes de l'Avocat général Sir Gordon Slynn présentées le 8 mars 1988., Brother Industries Ltd contre Commission des Communautés européennes., 08/03/1988, 250/85


Avis juridique important

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61985C0056

Conclusions jointes de l'Avocat général Sir Gordon Slynn présentées le 8 mars 1988. - Brother Industries Ltd contre Commission des Communautés européennes. - Droits antidumping provisoires sur machines à écrire électroniques. - Affaire 56/85. - Brother Industries Ltd contre C

onseil des Communautés européennes. - Droits antidumping sur machines à éc...

Avis juridique important

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61985C0056

Conclusions jointes de l'Avocat général Sir Gordon Slynn présentées le 8 mars 1988. - Brother Industries Ltd contre Commission des Communautés européennes. - Droits antidumping provisoires sur machines à écrire électroniques. - Affaire 56/85. - Brother Industries Ltd contre Conseil des Communautés européennes. - Droits antidumping sur machines à écrire électroniques. - Affaire 250/85.
Recueil de jurisprudence 1988 page 05655

Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Le cadre juridique et la procédure

Le cadre juridique de cette affaire et les grandes lignes de la procédure à laquelle elle a donné lieu sont décrits dans nos conclusions dans les affaires jointes 260/85 et 106/86, Tokyo Electric Company/Conseil ( TEC ).

Brother Industries Ltd est un fabricant japonais de machines à écrire ( mécaniques, électriques et électroniques ), qu' elle vend sous son propre nom sur les marchés mondiaux . Elle a commencé à fabriquer des machines à écrire électroniques en 1980 .

Le règlement instituant un droit provisoire a frappé d' un droit antidumping provisoire de 43,7 % les machines à écrire électroniques fabriquées au Japon par Brother Industries Ltd .

Par requête déposée le 25 février 1985, Brother Industries Ltd a formé à l' encontre de la Commission, conjointement avec sept de ses filiales CEE, un recours

visant à l' annulation du règlement instituant un droit provisoire et à l' attribution de dommages-intérêts ( affaire 56/85 ).

Le règlement du 19 juin 1985, instituant un droit définitif, a instauré un droit définitif de 21 % et ordonné que les montants garantis par le droit provisoire fussent perçus au même taux ( 21 %).

Par requête déposée le 12 août 1985, les mêmes requérantes ( ci-après désignées collectivement "Brother", sauf indication contraire résultant du contexte ) ont formé à l' encontre du Conseil et de la Commission un recours ( affaire 250/85 ) visant à l' annulation du règlement instituant un droit définitif, dans la mesure où il s' applique à Brother, à l' attribution de dommages-intérêts d' un montant à déterminer à la date de l' arrêt et à la condamnation conjointe du Conseil et de la Commission aux
dépens . Les moyens présentés dans cette affaire sont semblables à ceux, simplement plus détaillés, présentés dans l' affaire 56/85 .

Par demande déposée le 29 août 1985, Brother a sollicité le sursis à l' exécution du règlement instituant un droit définitif ( affaire 250/85 R ). Cette demande a été rejetée par une ordonnance du président de la Cour du 18 octobre 1985, qui a réservé les dépens de la procédure en référé ( Rec . p . 3459 ).

Dans sa réplique dans l' affaire 250/85, déposée le 26 mars 1986, Brother a renoncé à ses demandes de dommages-intérêts tant dans cette affaire que dans l' affaire 56/85 . Par une lettre en date du 8 avril 1986, Brother a précisé en outre que la demande en annulation formée dans l' affaire 250/85 n' était pas dirigée à l' encontre de la Commission . Il résulte de ces démarches une renonciation totale au recours 250/85, dans la mesure où il était formé à l' encontre de la Commission . En conséquence,
par ordonnance du 16 mai 1986, la Cour a radié le recours 250/85 du registre de la Cour en tant que dirigé contre la Commission et a condamné Brother aux dépens exposés par la Commission en tant que partie défenderesse, y compris ceux de la procédure en référé .

Par une autre ordonnance en date également du 16 mai 1986, la Cour a admis la Commission à intervenir à l' appui des conclusions du Conseil dans l' affaire 250/85 et a réservé les dépens ( ceux relatifs à l' intervention ). Le Cetma est également intervenu à l' appui des conclusions du Conseil dans l' affaire 250/85 .

Affaire 56/85

En application des articles 11 et 12 du règlement de base, des termes de son propre article 3 et des termes du règlement n° 1015/85 du Conseil portant prorogation de sa durée de validité ( JO 1985, L 108, p . 18 ), le règlement instituant un droit provisoire a cessé d' avoir tout effet, sauf dans la mesure où il a été repris par le règlement instituant un droit définitif, ce qui est par exemple le cas des points 30 à 33 des considérants du règlement instituant un droit provisoire, qui ont été
confirmés par le point 32 des considérants du règlement instituant un droit définitif . Ainsi, les montants garantis par le droit provisoire devaient être perçus au taux de 21 % en vertu de l' article 2 du règlement instituant un droit définitif, et non au taux de 43,7 % fixé provisoirement, et toute différence devait être remboursée en application de l' article 11, paragraphe 7, du règlement de base . Toute partie du règlement instituant un droit provisoire ainsi incorporée dans le règlement
instituant un droit définitif doit à notre avis être attaquée dans le cadre d' un recours formé à l' encontre de ce dernier, ce que Brother a fait dans l' affaire 250/85 . Toute partie du règlement instituant un droit provisoire n' ayant pas été ainsi confirmée est caduque, et il ne reste plus rien à annuler .

Brother a soutenu que, en dépit de la cessation de sa validité, le règlement instituant un droit provisoire a créé une situation juridique restant susceptible de faire l' objet d' un contrôle juridictionnel séparé . Le seul effet de ce règlement ainsi visé par Brother résulte, en réalité, du règlement instituant un droit définitif . Brother soutient que l' approche utilisée dans le règlement instituant un droit provisoire a conduit à des différences injustifiées entre les taux de droit provisoire
appliqués, de sorte que, lors de la perception définitive du droit provisoire, TEC n' a eu à payer le droit qu' au taux de 6,9 %, contre 21 % pour Brother . Cependant, le taux applicable à la perception définitive est fixé à l' article 2 du règlement instituant un droit définitif, qui constitue la décision exécutoire, celle pouvant faire l' objet d' un recours . Il se peut que cette disposition reprenne en partie le règlement instituant un droit provisoire, mais il est faux d' affirmer que l' effet
critiqué est créé par le règlement instituant un droit provisoire .

Brother a également cherché à invoquer la clôture de la procédure à l' égard de Nakajima, résultant de l' article 1er, paragraphe 2, du règlement instituant un droit provisoire . Or, cette décision a été révoquée et remplacée par une série d' autres mesures, qui sont exposées dans nos conclusions dans l' affaire TEC . A notre avis, il est faux d' affirmer que la situation juridique concernant Nakajima a été créée par le règlement instituant un droit provisoire .

Si un effet indépendant quelconque pouvait être attribué au règlement instituant un droit provisoire postérieurement au 19 juin 1985, il est clair qu' une décision de la Cour serait justifiée . De même, si Brother pouvait faire état d' une perte ou d' un préjudice résultant du seul règlement instituant un droit provisoire ( par exemple, une perte d' intérêts sur les montants garantis par le droit provisoire qui ont été ultérieurement remboursés ), une décision en ce sens serait éventuellement
possible, quoiqu' il nous semble qu' il serait difficile d' établir un dommage réparable au titre de l' article 215 du traité CEE; en tout état de cause, Brother a renoncé à sa demande de dommages-intérêts dans l' affaire 56/85 .

En conséquence, le recours 56/85 est à notre avis totalement dépourvu d' objet depuis le 19 juin 1985 et doit être rejeté; Brother doit être condamnée aux dépens exposés par la Commission . Les questions débattues dans cette affaire doivent être tranchées au titre de l' affaire 250/85 .

Affaire 250/85

A l' appui de son recours dans l' affaire 250/85, Brother articule seize moyens, groupés en cinq chapitres : I - Valeur normale; II - Prix à l' exportation; III - Comparaison; IV - Préjudice; et V - Intérêts de la Communauté .

I - Valeur normale

Dans le chapitre consacré à la valeur normale, Brother soutient ce qui suit :

1 . Il y a eu violation de l' article 2, paragraphe 3, du règlement de base, dans la mesure où les autorités communautaires ont comparé des prix sur des marchés où l' offre et la demande étaient totalement différentes, de sorte qu' aucune comparaison valable des prix n' a été possible . Ce moyen doit être rejeté pour les raisons exposées dans nos conclusions dans l' affaire TEC . Le fait que les ventes soient réduites ou inexistantes sur le marché intérieur ne peut constituer un motif permettant d'
échapper aux effets du règlement de base . Une protection efficace contre le dumping est particulièrement nécessaire lorsque, comme en l' espèce, le produit en cause est fabriqué principalement pour l' exportation .

2 . Il y a eu modification d' une pratique établie et violation de l' article 2, paragraphe 3, sous a ), du règlement de base, dans la mesure où les prix intérieurs pris pour base de la valeur normale concernaient des quantités trop faibles pour "permettre" ( c' est-à-dire subventionner ) des exportations à des prix de dumping . A notre avis, la législation actuelle n' exige pas que les ventes intérieures financent les exportations faisant l' objet d' un dumping . Les définitions du dumping données
à l' article VI du GATT, à l' article 2, paragraphe 1, du code et à l' article 2, paragraphe 2, du règlement de base excluent manifestement toutes l' exigence d' une pareille relation . En ce qui concerne la prétendue modification d' une pratique, nous estimons que Brother n' a pas établi l' existence d' une pratique constante antérieure à l' adoption du seuil de 5 % retenu en l' espèce . Au demeurant, nous considérons l' adoption de ce seuil comme légale pour les raisons exposées dans nos
conclusions dans l' affaire TEC et dans les affaires jointes 277 et 300/85 Canon/Conseil .

3 . Il y a eu violation de l' article 2, paragraphe 3, sous b ), du règlement de base, dans la mesure où la valeur normale de la plupart des modèles exportés par la partie requérante a été calculée sur la base du prix de revente pratiqué par son distributeur associé au Japon . Les machines à écrire électroniques de Brother Industries Ltd sont distribuées sur le marché japonais par l' intermédiaire d' une société de vente, Brother Sales Ltd Brother Industries Ltd ne détient qu' environ 15 % du
capital social de Brother Sales Ltd ( la Cour n' ayant cependant pas été informée d' autres moyens pouvant permettre d' exercer un contrôle sur la société de vente, tels que des droits de vote, des administrateurs ou membres du personnel communs, des participations indirectes, des liens contractuels ou une simple pression économique ). Toutefois, à notre avis, il s' agit manifestement d' une société associée au sens de l' article 2, paragraphe 7, du règlement de base, de sorte que les institutions
communautaires étaient en droit de faire abstraction des ventes effectuées par Brother Industries Ltd à Brother Sales Ltd et à baser la valeur normale des modèles vendus en quantités suffisantes sur le marché japonais sur le prix pratiqué à l' occasion de la première vente externe, c' est-à-dire les ventes de Brother Sales Ltd . Pour ces modèles, nous estimons que la valeur normale a été légalement basée sur le prix de vente intérieur effectif de Brother Sales Ltd, ce moyen étant dès lors voué à l'
échec .

4 . Il y a eu violation de l' article 2, paragraphe 3, sous b ), § ii ), du règlement de base, dans la mesure où la valeur construite de certains modèles exportés par Brother Industries Ltd a été calculée sur la base du prix de revente pratiqué par son distributeur japonais associé . Ce moyen est analogue au précédent, à ceci près qu' il s' applique aux modèles que Brother ne vendait pas - ou ne vendait pas en quantités suffisantes - sur le marché japonais et pour lesquels la valeur normale a donc
été construite . Pour les raisons exposées dans nos conclusions dans l' affaire TEC, nous croyons juste d' affirmer, comme le fait le point 15 des considérants du règlement instituant un droit définitif, que la construction de la valeur normale selon l' article 2, paragraphe 3, sous b ), § ii ), du règlement de base tend à établir une valeur normale comme si des ventes avaient eu lieu sur le marché intérieur . Dans la mesure où la valeur normale basée sur le prix intérieur effectif a été, à nos
yeux, correctement basée sur les prix de vente de Brother Sales Ltd, une approche analogue était à notre avis correcte lorsque la valeur normale était construite, ce moyen devant dès lors être rejeté .

5 . La marge bénéficiaire ( 71,18 %) incluse dans la valeur normale des trois modèles Brother pour lesquels la valeur normale a été construite était excessive et a été établie de manière erronée, ce qui constitue une violation de l' article 2, paragraphe 3, sous b ), § ii ), du règlement de base, et un détournement de pouvoir . En divisant les frais généraux de vente supportés au Japon, par Brother Sales Ltd non pas par le volume de ses ventes au Japon mais par le volume des ventes de tout le groupe
Brother à travers le monde ( ventes n' ayant rien à voir avec Brother Sales Ltd ), le Conseil a nécessairement sous-évalué les frais généraux de Brother Sales Ltd ( au point de les réduire presque à zéro ) et, du même coup, surévalué son profit au Japon .

Il nous semble que, dans la mesure où Brother Sales Ltd vendait uniquement au Japon, il aurait fallu diviser ses frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux par le volume de ses ventes au Japon : les ventes à l' extérieur du Japon ont été effectuées par d' autres sociétés, et il ne nous semble pas qu' il faille les intégrer dans ce calcul particulier . Nous croyons qu' il y a eu sur ce point une erreur, mais Brother n' a pas administré la preuve d' un détournement de pouvoir et
cette allégation doit être rejetée . Toutefois, cette erreur ne change pas le chiffre retenu pour la valeur normale construite . Le poste "marge bénéficiaire" et le poste "frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux" découlent des mêmes données et sont liés; si l' un croît, l' autre décroît . C' est ce que dit Brother elle-même dans son exposé : si le profit a été surévalué, c' est parce que les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux ont été
sous-évalués . En conséquence, si la marge bénéficiaire est réduite pour corriger l' erreur critiquée, les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux doivent être augmentés dans les mêmes proportions, et le chiffre final donnant la valeur normale construite des modèles Brother en cause ne changera pas . En conséquence, ce moyen n' est pas susceptible de justifier l' annulation du règlement .

II - Prix à l' exportation

Dans le chapitre consacré au prix à l' exportation, Brother soutient ce qui suit :

6 . Il y a violation de l' article 2, paragraphe 8, sous b ), du règlement de base, dans la mesure où le Conseil exige que les prix à l' exportation permettent de réaliser un profit "normal" deux fois : un premier profit "normal" sur le prix auquel le fabricant vend à sa filiale CEE et un deuxième profit "normal" sur le prix auquel cette filiale revend à des acheteurs indépendants dans la Communauté . Ainsi que nous l' avons expliqué dans nos conclusions dans l' affaire Canon et dans nos conclusions
dans les affaires jointes 273/85 et 107/86 Silver Seiko/Conseil, les autorités communautaires étaient en droit de faire abstraction, lors de l' établissement du prix à l' exportation, du prix facturé par la société mère japonaise à sa filiale européenne, et, puisque ce prix est un prix de transfert, elles sont également en droit de faire abstraction du montant du profit en résultant pour la filiale européenne et d' utiliser à sa place une "marge bénéficiaire raisonnable" basée sur ce qu' un
importateur indépendant aurait réalisé dans les mêmes conditions . A notre avis, l' approche suivie par les institutions communautaires était conforme à l' article 2, paragraphe 8, sous b ), du règlement de base, ce moyen étant dès lors voué à l' échec .

7 . En violation de l' article 2, paragraphe 8, sous b ), du règlement de base, le coût du crédit consenti à l' acheteur a été pris en compte deux fois : une fois à titre de frais financiers et une fois par voie de déduction sur le prix de revente . Cela a été admis par les institutions communautaires, et une correction des calculs a été faite au cours de la procédure, réduisant la marge de dumping de 1,5 %. Il a été retenu une marge de dumping de 33,6 % pour Brother, un préjudice de 21,9 %, et le
plus bas de ces chiffres - celui du préjudice - a donné le taux du droit ( 21 %). En conséquence, la correction apportée à la marge de dumping n' a pas eu d' incidence sur le taux du droit et, à notre avis, il n' existe plus d' irrégularité susceptible de justifier l' annulation du règlement .

III - Comparaison

Dans le chapitre consacré à la comparaison, Brother soutient ce qui suit :

8 . Il y a eu violation de l' article 2, paragraphe 9, du règlement de base, dans la mesure où des prix à l' exportation sur une base sortie usine ont été comparés à une valeur normale déterminée sur la base du prix de revente de Brother Sales Ltd .

9 . Subsidiairement, il y a eu violation de l' article 2, paragraphe 10, du règlement de base, en raison du refus des autorités communautaires de tenir compte des différences affectant la comparabilité des prix .

10 . Très subsidiairement, il y a eu violation de l' article 2, paragraphe 10, sous c ), du règlement de base, en raison du refus des autorités communautaires de déduire des prix de revente pratiqués par Brother Sales Ltd un pourcentage au titre des frais généraux au moins égal au pourcentage de frais généraux supportés par les filiales Brother dans la CEE .

11 . Il y a eu violation des principes d' égalité et de non-discrimination, dans la mesure où le stade auquel un exportateur opère sur son marché intérieur et sur le marché CEE se trouve ainsi exercer une influence prépondérante sur l' existence et le niveau de la marge de dumping .

12 . Au mépris du principe de la sécurité juridique, le défaut de clarté et les variations de la pratique antidumping des autorités communautaires ont mis Brother dans l' impossibilité totale de procéder, même en théorie, à une fixation des prix de ses exportations vers la CEE qui soit de nature à éviter le dumping .

A notre avis, tous ces moyens concernant la comparaison doivent être rejetés pour les raisons exposées dans nos conclusions dans les affaires TEC et Canon .

IV - Préjudice

Dans le chapitre consacré au préjudice, Brother soutient ce qui suit :

13 . La méthode de calcul du préjudice a été déraisonnable; la comparaison a été faite entre des prix et des coûts; enfin, il y a eu violation des droits de la défense . A notre avis, pour les raisons exposées dans nos conclusions dans les affaires TEC et Canon, le recours à des prix cible pour la détermination de l' importance du préjudice était légal . A notre avis, la comparaison a été manifestement effectuée entre des prix et des prix, contrairement à l' affirmation de Brother; et, en ce qui
concerne les renseignements donnés à Brother à cet égard, nous estimons que les autorités communautaires ont donné à Brother les renseignements demandés, dans toute la mesure où le permettaient les exigences de traitement confidentiel découlant du règlement de base .

14 . La détermination du préjudice a procédé de calculs déraisonnables d' ajustements entre différents modèles et d' une discrimination entre les exportateurs . A notre avis, pour les raisons exposées dans nos conclusions dans l' affaire Canon, il n' a pas été démontré que le choix d' un chiffre à mi-chemin entre les évaluations faites par les exportateurs et celles faites par les producteurs communautaires, décrit au point 34 des considérants du règlement instituant un droit définitif, était
illégal . Brother suggère que, dans la mesure où Olivetti a conclu un contrat de coopération avec Toshiba, la société mère de TEC, le 14 mai 1985, TEC ou Olivetti, ou l' une et l' autre, pourraient avoir fourni des évaluations trompeuses; mais elle dit elle-même qu' elle ignore si elles l' ont effectivement fait . Il n' y a manifestement pas de preuve à l' appui de cette allégation, qui doit donc être rejetée .

15 . L' évaluation des sous-cotations a pris en compte des prix cible relatifs à des modèles vendus par les fabricants communautaires, mais originaires de pays tiers . Le Conseil a répondu et Brother a admis que deux des modèles prétendument fabriqués dans des pays tiers étaient en fait fabriqués dans la Communauté et que deux modèles fabriqués au Japon et vendus dans la Communauté sur une base OEM (" original equipment manufacturer", importateur vendant sous sa propre marque des produits fabriqués
à l' étranger ) n' ont pas été utilisés pour la détermination du préjudice . En ce qui concerne les autres modèles mentionnés par Brother, le Conseil a admis que, bien qu' ils fussent vendus dans la Communauté par Olivetti, ils étaient en fait fabriqués à Singapour, et il a corrigé cette erreur au cours de la procédure par le règlement n° 113/86, du 20 janvier 1986 ( JO 1986, L 17, p . 2 ). Cette correction n' a entraîné aucune modification dans le taux du droit applicable à Brother . Ce moyen est
donc devenu sans objet .

V - Intérêts de la Communauté

16 . Enfin, Brother soutient que l' appréciation des intérêts de la Communauté aux fins de l' article 12 du règlement de base a été incomplète, dans la mesure où le droit antidumping institué à l' encontre des fabricants japonais bénéficiera à l' exportateur américain IBM plutôt qu' aux producteurs communautaires et où, si des ventes peuvent être effectuées aux prix élevés résultant de l' incorporation du droit antidumping, elles auront un effet inflationniste indésirable pour la Communauté .

A notre avis, la situation des fabricants de pays tiers autres que le Japon ne peut en principe affecter l' issue d' une procédure visant à déterminer si les fabricants japonais ont pratiqué le dumping . S' il est établi que ces derniers ont pratiqué le dumping et qu' il est nécessaire de protéger la production communautaire à l' encontre de ce dumping, le fait qu' un fabricant d' un autre pays tiers pourrait bénéficier indirectement de l' institution d' un droit antidumping n' implique pas en
lui-même une violation du règlement de base . Il peut constituer l' un des facteurs que les autorités communautaires peuvent prendre en considération dans l' appréciation des intérêts de la Communauté . Les autorités communautaires jouissent naturellement d' un large pouvoir d' appréciation à cet égard, et, à notre avis, Brother n' a pas démontré que ce pouvoir d' appréciation a été exercé à mauvais escient pour ce qui concerne les exportateurs de pays tiers autres que le Japon . De même, les
autorités communautaires devaient évaluer les désavantages résultant à court terme pour le consommateur communautaire de prix plus élevés par rapport à la nécessité d' assurer la survie de la production communautaire . C' est ce qu' elles ont fait, comme l' énonce le point 40 des considérants du règlement instituant un droit définitif, et, à notre avis, Brother n' a pas démontré que leur pouvoir d' appréciation a été exercé de manière illégale à cet égard . Nous estimons donc que ce moyen doit être
rejeté .

En conséquence, le recours 250/85 doit être à notre avis rejeté dans son intégralité . Le Conseil et le Cetma sont bien fondés à obtenir une condamnation aux dépens qu' ils ont exposés, y compris ceux de la procédure en référé, comme ils l' ont demandé . La Commission a déjà obtenu, par l' ordonnance du 16 mai 1986, une condamnation aux dépens qu' elle a exposés en tant que partie défenderesse, y compris ceux de la procédure en référé . Elle est à présent bien fondée à obtenir une condamnation aux
dépens qu' elle a exposés en tant que partie intervenante dans la présente affaire .

Conclusion

En conséquence, il y a lieu à notre avis :

- de rejeter le recours 56/85 soit comme étant dépourvu d' objet, soit pour les mêmes raisons, mutatis mutandis, que celles conduisant au rejet du recours 250/85, et de condamner Brother aux dépens exposés par la Commission dans cette affaire, et

- de rejeter le recours 250/85 et de condamner Brother aux dépens exposés par le Conseil et par le Cetma, y compris ceux de la procédure en référé, et aux dépens exposés par la Commission en tant que partie intervenante .

(*) Traduit de l' anglais .


Synthèse
Numéro d'arrêt : 250/85
Date de la décision : 08/03/1988
Type de recours : Recours en annulation - non-lieu à statuer, Recours en annulation - non fondé

Analyses

Droits antidumping provisoires sur machines à écrire électroniques.

Affaire 56/85.

Brother Industries Ltd contre Conseil des Communautés européennes.

Droits antidumping sur machines à écrire électroniques.

Dumping

Relations extérieures

Politique commerciale


Parties
Demandeurs : Brother Industries Ltd
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Sir Gordon Slynn
Rapporteur ?: Bosco

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1988:113

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