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24/09/1986 | CJUE | N°80

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 24 septembre 1986., Nederlandse Bakkerij Stichting et autres contre Edah BV., 24/09/1986, 80


CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN MISCHO

présentées le 24 septembre 1986

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

L'Arrondissementsrechtbank d'Almelo dans le cadre d'une procédure en référé commercial ainsi que l'Arrondissementsrechtsbank de Bois-le-Duc dans le cadre d'une procédure pénale, toutes deux dirigées contre l'entreprise Edah, vous demandent de statuer, à titre préjudiciel, au sujet de la compatibilité avec les articles 7 et 30 du traité CEE d'une réglementation nationale instaurant un prix minimal pour la ve

nte au détail du pain.

Pour le pain fabriqué aux Pays-Bas, la réglementation néerlandaise ...

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN MISCHO

présentées le 24 septembre 1986

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

L'Arrondissementsrechtbank d'Almelo dans le cadre d'une procédure en référé commercial ainsi que l'Arrondissementsrechtsbank de Bois-le-Duc dans le cadre d'une procédure pénale, toutes deux dirigées contre l'entreprise Edah, vous demandent de statuer, à titre préjudiciel, au sujet de la compatibilité avec les articles 7 et 30 du traité CEE d'une réglementation nationale instaurant un prix minimal pour la vente au détail du pain.

Pour le pain fabriqué aux Pays-Bas, la réglementation néerlandaise prévoit la fixation par l'autorité compétente d'un prix minimal à un montant déterminé. Cela a pour but d'éviter une concurrence excessive, par des prix promotionnels, entre les magasins à grande surface et les boulangeries traditionnelles.

Au cours d'une première phase qui a duré jusqu'en 1982, le prix du pain importé n'était pas réglementé. Lorsque certains magasins à grande surface se sont mis à attirer la clientèle par des prix très bas en vendant du pain importé, une disposition additionnelle a été insérée dans la réglementation en cause. Elle prescrit que le prix d'achat du pain importé doit être augmenté d'une marge de distribution obligatoire.

Par une modification introduite avec effet au 23 mars 1985, l'application de la marge obligatoire pour le pain importé a été exclue dans les cas où le pain importé est vendu à un prix égal ou supérieur au prix minimal en vigueur pour le pain produit aux Pays-Bas.

Avant d'examiner les questions posées par les deux juridictions nationales, il importe de déterminer si une réglementation du type de celle en vigueur aux Pays-Bas constitue une mesure indistinctement applicable aux produits nationaux et aux produits importés, ou s'il s'agit d'un régime qui traite différemment ces deux types de produits.

Selon votre jurisprudence, l'attitude à adopter est en effet différente selon qu'on se trouve devant l'une ou l'autre de ces hypothèses ( 1 ).

Or, dans le cas d'espèce, la « marge égale au total des coûts de distribution » dont il y a lieu d'augmenter le « prix franco magasin » du pain importé (0,17 HFL par pain de 800 grammes, au moment des jugements de renvoi) est identique à celle comprise, « pour l'ensemble des frais de distribution », dans le prix imposé du pain fabriqué aux Pays-Bas (1,86 HFL).

D'un autre côté cependant, le prix du pain lui-même, fabriqué aux Pays-Bas, est fixé par l'autorité compétente, alors qu'en ce qui concerne la valeur du pain importé on se base sur le « prix franco usine constitué par le montant du prix d'achat réellement payé ou dû », c'est-à-dire un prix librement déterminé par le fabricant (étranger) du pain.

On est donc en présence d'un régime qui traite différemment le produit national et le produit importé.

Venons-en maintenant aux quatre questions posées par les juridictions de renvoi. Constatons tout d'abord qu'il n'y en a, en réalité, que trois, car les deuxièmes questions sont, dans chaque cas, identiques.

Elles concernent l'article 7 du traité et le problème de la discrimination à rebours. Je les traiterai en troisième et dernier lieu.

J'examinerai d'abord la question posée dans l'affaire 159/85 qui vise la réglementation en vigueur avant le 23 mars 1985, et en second lieu celle posée dans le cadre de l'affaire 80/85 qui concerne la réglementation actuelle.

1.  Problème de la compatibilité avec l'article 30 d'une réglementation imposant une majoration du prix du pain importé même lorsque celle-ci aboutit à un prix de vente au détail supérieur au prix minimal prescrit en ce qui concerne les produits de fabrication nationale

La première question posée par l'Arrondis-sementsrechtbank de Bois-le-Duc (affaire 159/85) est rédigée comme suit:

«1) Une réglementation de prix qui, en vertu de la législation d'un État membre, s'applique aux ventes au consommateur final effectuées par des détaillants établis dans cet État membre, est-elle contraire à l'interdiction de mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation prévue par l'article 30 du traité CEE lorsque, pour le produit importé, cette réglementation impose une marge fixe, exprimée en valeur numéraire, qui s'ajoute au prix d'achat, alors que cette marge
ne représente qu'une partie relativement restreinte du prix de vente au détail définitif et que le produit national doit être vendu à un prix minimal nominal fixé par cet État membre? »

Selon votre jurisprudence constante, toute mesure nationale susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement le commerce intracommunautaire est à considérer comme une mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative.

Tel est notamment le cas d'une réglementation nationale qui règle différemment la situation des produits nationaux et celle des produits importés ou qui défavorise, de quelque façon que ce soit, l'écoulement sur le marché des produits importés par rapport aux produits nationaux ( 2 ).

Or, il est évident qu'une réglementation nationale qui avait pour résultat d'imposer dans certaines circonstances une augmentation du prix total du pain importé au-delà du prix minimal applicable au pain de fabrication nationale défavorisait l'écoulement du pain importé par rapport au pain fabriqué dans le pays.

En supposant, par exemple, que le prix de revient du pain impone comme celui du pain de fabrication nationale s'élevait à 1,80 HFL, ce dernier pain pouvait être vendu à 1,86 HFL (même si c'était au prix de l'écrasement de la marge) alors que le pain importé devait être vendu à 1,97 HFL (1,80 + 0,17 HFL).

Le régime en vigueur jusqu'au 23 mars 1985 pouvait donc être à l'origine d'une discrimination du pain importé par rapport au pain de production nationale.

Je vous propose dès lors de répondre à l'Arrondissementsrechtbank de Bois-le-Duc qu'un régime tel que celui décrit dans sa première question est contraire à l'interdiction des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation prévue par l'article 30 du traité CEE.

2.  Probleme de la compatibilité avec l'article 30 d'un régime de prix imposant de majorer le prix du produit importé aussi longtemps que son prix final ne dépasse pas le prix minimal de vente du même produit fabriqué dans le pays

La première question posée par l'Arrondis-sementsrechtbank d'Almelo dans l'affaire 80/85 est libellée comme suit:

« Une disposition légale d'un État membre instaurant une marge qui ne représente qu'une partie relativement restreinte du prix de vente au détail définitif est-elle contraire à l'interdiction des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation prévue par l'article 30 du traité CEE lorsque et dans la mesure où cette disposition s'applique à la vente au consommateur final par un détaillant établi dans l'État membre concerné d'un produit importé, à un prix inférieur au
prrix minimal fixé pour ce produit par ledit État membre, alors que la vente du produit national dans les mêmes conditions est interdite en toutes circonstances? »

Clarifions d'abord un point de terminologie, à savoir les notions de prix inférieur, égal ou supérieur au prix minimal.

Le juge national parle d'un prix du produit importé, inférieur au prix minimal, alors que l'article 2 bis de la réglementation néerlandaise prévoit que « l'interdiction énoncée au paragraphe 1 », c'est-à-dire celle de vendre du pain importé à un prix inférieur au prix d'achat majoré d'une marge égale au total des coûts de distribution, « ne s'applique pas au pain vendu à un prix égal ou supérieur au prix minimal ».

Cela signifie que, si le prix d'achat du produit importé est inférieur au prix minimal, il doit être augmenté de la marge de distribution pour autant que le prix total (prix d'achat + marge) ne dépasse pas un niveau égal à celui du prix minimal, étant entendu que ce prix total peut aussi, par suite d'un prix d'achat particulièrement bas, se situer à un niveau inférieur à celui du prix minimal.

Bien qu'on ne soit pas ici en présence d'une réglementation indistinctement applicable, il me semble que votre arrêt dans l'affaire van Tiggele ( 3 ) nous fournit les critères appropriés pour trancher la question.

Le point 17 de cet arrêt se lit comme suit:

« (attendu) que, en outre, la fixation de la marge bénéficiaire minimale à un montant déterminé, et non pas à un pourcentage du prix de revient, applicable indistinctement aux produits nationaux et aux produits importés, ne saurait non plus avoir pour effet de défavoriser les produits importés, éventuellement moins chers, dans un cas comme celui de l'espèce, où le montant de la marge bénéficiaire constitue une part relativement faible du prix de détail définitif ».

En l'occurrence, nous sommes en présence non pas d'une marge bénéficiaire, mais d'une marge de distribution, mais cela, à mon sens, n'est pas de nature à modifier les données du problème. Cette marge de distribution est bien fixée à un montant déterminé et non pas à un pourcentage du prix de revient. Elle est applicable indistinctement aux produits nationaux et aux produits importés (même si pour le reste les deux régimes ne sont pas identiques) et son montant constitue une part relativement
faible du prix de détail définitif.

L'avantage concurrentiel résultant d'un prix de revient éventuellement inférieur du produit importé peut donc être répercuté sur le prix de vente au consommateur (point 18 de l'arrêt van Tiggele).

En effet, tant que le prix de revient du produit importé est inférieur à celui du produit de fabrication nationale (1,86 HFL — 0,17 HFL = 1,69 HFL), cet avantage se retrouve dans le prix total demandé au consommateur.

Les produits importés ne sont donc pas défavorisés par rapport aux produits nationaux identiques et on n'est, par conséquent, pas en présence d'une mesure d'effet équivalent.

La Cour aura compris que je ne partage pas la thèse défendue par Edah suivant laquelle l'interdiction de l'article 30 ne vise pas seulement les cas de discrimination, à savoir les réglementations qui traitent mieux les produits nationaux que les produits importés, mais toutes les dispositions qui peuvent avoir une influence négative sur les importations.

Avec M. l'avocat général Reischl, je suis d'avis « que seules doivent relever du domaine d'application de l'article 30 les mesures nationales qui sont susceptibles d'entraver les échanges commerciaux entre États membres en défavorisant, lors de la commercialisation, les produits importés par rapport aux produits nationaux » ( 4 ).

Je ne suis donc pas non plus convaincu par la thèse d' Edah (p. 3363) selon laquelle la réglementation empêcherait l'écoulement du produit importé « dans les meilleures conditions possibles » parce que, dans certaines circonstances, le producteur de pain néerlandais « pourrait se contenter » d'une marge inférieure à 0,17 HFL (lorsque son prix de revient est supérieur à 1,69 HFL) alors que le producteur étranger devrait toujours appliquer la marge de 0,17 HFL (tant que le prix final n'excède pas
le prix minimal).

La marge plus réduite du producteur néerlandais ne serait en effet, dans un tel cas, que la conséquence d'un prix de revient plus élevé que celui retenu par les autorités compétentes et elle ne pourrait pas se refléter dans le prix à payer par le consommateur. Le produit importé ne serait donc pas défavorisé du fait de cette marge plus réduite.

Je propose donc à la Cour de répondre par la négative à la première question posée dans le cadre de l'affaire 80/85.

3.  Le problème de la discrimination à rebours

Les deux juridictions de renvoi vous posent toutes les deux une question identique qui est la suivante:

« Une réglementation d'un État membre interdisant la vente au consommateur final par un détaillant établi dans cet État membre d'un certain produit à un prix inférieur à un prix minimal déterminé est-elle contraire à l'interdiction de toute discrimination en raison de la nationalité inscrite à l'article 7 du traité CEE lorsque l'interdiction de vendre à un prix inférieur s'applique (toujours) au produit national mais ne s'applique pas au produit importé? »

Edah soutient qu'on est, en l'occurrence, en présence d'une discrimination à rebours au détriment des fabricants néerlandais, et que le régime de prix est dès lors contraire à l'article 7.

La Nederlandse Bakkerij Stichting, le gouvernement néerlandais et la Commission contestent que tel soit le cas.

A mon avis aussi, la législation incriminée ne viole pas le principe de l'interdiction de toute discrimination exercée en raison de la nationalité figurant à l'article 7 du traite, et cela pour deux raisons:

a) Le régime différent auquel sont soumis les produits importés et les produits fabriqués dans le pays « ne s'applique pas, en fonction de la nationalité des opérateurs économiques mais en fonction du lieu de leur implantation » (voir vos arrêts Bussone, 31/78, Rec. 1978, p. 2445, et Oebel, 155/80, Rec. 1981, p. 2007). Or, vous avez constaté à plusieurs reprises que dans de tels cas le principe énoncé à l'article 7 n'était pas violé.

En l'occurrence, un boulanger étranger, établi aux Pays-Bas, devrait respecter le prix minimal tout comme les boulangers de nationalité néerlandaise, et un fabricant de pain néerlandais établi en Allemagne bénéficierait, pour ses exportations à destination des Pays-Bas, du régime plus favorable réservé par la législation néerlandaise aux produits importés.

b) En second lieu, l'article 7 ne défend pas aux États membres d'arrêter une réglementation qui affecte la capacité concurrentielle des opérateurs qui y sont soumis, du moment que cette réglementation ne distingue pas les assujettis de façon directe ou indirecte en raison de la nationalité (voir le point 8 de l'arrêt Oebel, précité).

Le gouvernement néerlandais aurait été libre d'arrêter uniquement le système des prix minimaux applicable au pain de fabrication nationale, sans rien prescrire du tout en ce qui concerne les produits importés. Du point de vue du droit communautaire, l'avantage concurrentiel important qu'il aurait ainsi concédé aux produits importés n'aurait pas constitué une discrimination illicite au détriment de ses propres ressortissants.

A fortiori, le régime applicable à l'importation qui a été instauré, et qui limite l'avantage concurrentiel des produits importés, ne constitue-t-il pas une discrimination illicite au regard du droit communautaire.

Les États membres restent en effet libres d'instaurer des réglementations imposant des contraintes à leurs propres producteurs, alors que dans les autres États membres des dispositions moins rigoureuses sont applicables.

Au point 9 de l'arrêt Oebel, précité, la Cour a déclaré « qu'on ne saurait considérer comme contraire au principe de non-discrimination l'application d'une législation nationale en raison de la seule circonstance que prétendument d'autres États membres appliqueraient des dispositions moins rigoureuses ».

Selon l'arrêt Van Dam ( 5 ) qui concerne la pêche, « on ne saurait considérer comme contraire au principe de non-discrimination l'application d'une législation nationale, dont la conformité au droit communautaire n'est par ailleurs pas contestée, en raison de la circonstance que, prétendument, d'autres États membres appliqueraient des dispositions moins rigoureuses » (point 10).

Le même principe a été affirmé au point 27 de l'arrêt Smit ( 6 ) en ce qui concerne le domaine des transports.

Enfin, au point 23 de votre arrêt Jongeneel Kaas ( 7 ), vous avez dit pour droit « qu'un État membre peut légitimement pratiquer une politique de qualité afin de stimuler les ventes, même si cette politique expose ses producteurs au risque d'une concurrence de prix par les producteurs des autres États membres qui ne sont pas tenus aux mêmes exigences de qualité ».

Rappelons aussi votre arrêt Peureux ( 8 ) dans le dispositif duquel vous avez déclaré que « ni l'article 95 ni l'article 37 du traité CEE ne s'opposent à ce qu'un État membre frappe un produit national — en particulier certaines eaux-de-vie —, que ce produit soit ou non soumis à un monopole commercial, d'impositions intérieures supérieures à celles frappant les produits similaires importés des autres États membres ».

On pourrait cependant se demander si en l'occurrence la discrimination à rebours ne doit pas être condamnée parce qu'elle résulte non pas d'une différence entre la législation néerlandaise, d'une part, et la législation des autres États membres, d'autre part, mais de la seule législation néerlandaise.

Dans votre arrêt Smit, précité, vous avez en effet aussi déclaré que « l'article 7 du traité vise à éliminer les discriminations selon la nationalité pouvant résulter de la législation ou des pratiques administratives d'un même Etat membre et non les disparités de traitement qui découlent, pour les entreprises des différents États membres, en l'absence d'une politique commune en matière de transports, de la disparité des législations nationales » (point 27).

Mais à mon avis, même dans ce cas, l'argument a) exposé ci-dessus reste valable: il ne peut pas y avoir de discrimination au sens de l'article 7 tant que le traitement différencié est fondé, non pas sur la nationalité des personnes, mais sur le lieu d'implantation des entreprises.

Il appartient par contre aux juridictions néerlandaises d'examiner si la réglementation litigieuse n'est pas contraire aux principes de l'ordre juridique néerlandais.

Pour être complet, je voudrais encore signaler que le fait que les deux régimes résultent de la législation d'un seul et même État membre n'implique toutefois pas, à mon avis, que l'on puisse appliquer en l'espèce le critère de l'absence d'un « facteur de rattachement à l'une quelconque des situations envisagées par le droit communautaire » ( 9 ).

Ce que les défendeurs au principal critiquent, en effet, ce n'est pas uniquement la disposition de la législation néerlandaise qui vise les produits fabriqués et vendus aux Pays-Bas, mais la différence entre cet aspect de la législation néerlandaise et le régime que celle-ci prévoit en ce qui concerne les produits importés. Or l'importation est incontestablement « une situation envisagée par le droit communautaire ».

Un autre argument qu'on ne saurait, à mon sens, retenir, est celui consistant à dire que l'article 7 du traité CEE ne serait pas directement applicable. Le contraire me semble résulter de votre jurisprudence ( 10 ).

C'est donc uniquement pour les raisons exposées ci-dessus sous a) et b) que je vous propose de répondre par la négative à la deuxième question posée par les deux juridictions de renvoi.

Permettez-moi cependant de faire encore une remarque finale.

Les discriminations à rebours ne sont évidemment pas concevables à la longue au sein d'un véritable marché commun qui doit nécessairement être fondé sur le principe de l'égalité de traitement.

Elles doivent être éliminées à travers le moyen de l'harmonisation des législations.

En attendant, il faudrait veiller à ne pas donner à l'article 30 une interprétation telle qu'un État membre puisse être placé devant le dilemme soit d'opérer une discrimination à rebours, soit de renoncer à poursuivre efficacement un objectif légitime d'intérêt général.

En conclusion, je vous propose de répondre comme suit aux questions qui vous ont été posées:

1) Une réglementation de prix qui, en vertu de la législation d'un Etat membre, s'applique aux ventes au consommateur final effectuées par des détaillants établis dans cet État membre est contraire à l'interdiction de mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation prévue par l'article 30 du traité CEE lorsque, pour le produit importé, cette réglementation impose une marge fixe, exprimée en valeur numéraire, s'ajoutant au prix d'achat, qui a pour résultat d'augmenter le
prix de vente au détail définitif du produit importé au-delà du prix minimal fixé par cet État membre pour les produits fabriqués dans le pays.

2) Une disposition légale d'un État membre instaurant une marge qui ne représente qu'une partie relativement restreinte du prix de vente au détail définitif n'est pas contraire à l'interdiction des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation prévue par l'article 30 du traité CEE lorsque et dans la mesure où cette disposition s'applique à la vente au consommateur final par un détaillant établi dans l'État membre concerné d'un produit importé, à un prix inférieur au
prix minimal fixé pour ce produit par ledit État membre, alors que la vente du produit national dans les mêmes conditions est interdite en toutes circonstances.

3) Une réglementation d'un État membre interdisant la vente au consommateur final par un détaillant établi dans cet État membre d'un certain produit à un prix inférieur à un prix minimal déterminé n'est pas contraire à l'interdiction de toute discrimination en raison de la nationalité inscrite à l'article 7 du traité CEE lorsque l'interdiction de vendre à un prix inférieur s'applique (toujours) au produit national, mais ne s'applique pas au produit importé.

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( 1 ) Voir notamment l'arrêt du 29 novembre 1983, affaire 181/82, Roussel Laboratorio/Pays-Bas, Rec. p. 3849.

( 2 ) Voir notamment votre arrêt du 10 janvier 1985 dans l'affaire 229/83, Association des Centres distributeurs Edouard Leclerc et autres/Sàrl « Au blé vert » et autres, Rec. p. 1, point 23.

( 3 ) Arrêt du 24 janvier 1978, affaire 82/77, Rec. p. 25.

( 4 ) Voir conclusions de M. l'avocat général Reischl dans l'affaire 75/81, Blesgen/Commission, Rec. 1982, p. 1238; voir aussi: Marenco, G.: « Pour une interprétation traditionnelle de la notion de mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative », Cahiers de droit européen, 1984, p. 291 et suiv., et notamment p. 337.

( 5 ) Arrêt du 3 juillet 1979, Van Dam, affaires jointes 185 à 204/78, Rec. p. 2361.

( 6 ) Arrêt du 25 janvier 1983, Smit/Commissie Grensoverschrijdend Beroepsgoederenvervoer, affaire 126/82, Rec. p. 92.

( 7 ) Arrêt du 7 février 1984, Jongeneel Kaas/Pays-Bas, affaire 237/83, Rec. 1984, p. 505.

( 8 ) Arrêt du 13 mars 1979, affaire 86/78, Peureux/Services fiscaux de la Haute-Saône et du territoire de Belfort, Rec. p. 915, points 32 et 33, et dispositif.

( 9 ) Voir arrêt du 27 octobre 1982, affaires jointes 35 et 36/82, Morson et Jhanjan/Staat der Nederlanden, Rec. p. 3736.

( 10 ) Voir aussi la réponse de la Commission à la question écrite n° 2338/82 de M. Bonde, JO C 177 du 4. 7. 1983, p. 13 et 14, qui renvoie au 29 octobre 1980, affaire 22/80, Boussac/Gerstenmeier, Rec. p. 3427.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 80
Date de la décision : 24/09/1986
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demandes de décision préjudicielle: Arrondissementsrechtbank Almelo et Arrondissementsrechtbank s'Hertogenbosch - Pays-Bas.

Mesures d'effet équivalent - Prix du pain.

Restrictions quantitatives

Mesures d'effet équivalent

Libre circulation des marchandises


Parties
Demandeurs : Nederlandse Bakkerij Stichting et autres
Défendeurs : Edah BV.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mischo
Rapporteur ?: Everling

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1986:333

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