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24/09/1986 | CJUE | N°220/85

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Darmon présentées le 24 septembre 1986., Société anonyme de droit belge Fadex NV contre Commission des Communautés européennes., 24/09/1986, 220/85


CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. MARCO DARMON

présentées le 24 septembre 1986

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1.  Exceptionnellement, le litige qui vous est soumis ne s'inscrit pas dans le cadre général de votre mission d'interprétation du droit communautaire. Du traité CEE, il n'est point ici question, sauf de son article 181 qui vous attribue compétence « pour statuer en vertu d'une clause compromissoire » contenue dans le contrat de droit privé liant la société requérante Fadex à la Commi

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CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. MARCO DARMON

présentées le 24 septembre 1986

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1.  Exceptionnellement, le litige qui vous est soumis ne s'inscrit pas dans le cadre général de votre mission d'interprétation du droit communautaire. Du traité CEE, il n'est point ici question, sauf de son article 181 qui vous attribue compétence « pour statuer en vertu d'une clause compromissoire » contenue dans le contrat de droit privé liant la société requérante Fadex à la Commission.

2.  Les faits sont constants. Le 4 décembre 1979, la société Fadex adresse au service compétent de la Commission une proposition pour la fourniture et la pose d'un revêtement de sol Dex-o-tex pour un studio de télévision situé à Bruxelles. Cette proposition est chiffrée à la somme de 150480 BFR, à laquelle s'ajoute celle de 13230 BFR pour des travaux de finition dont il n'est pas question dans la présente instance.

Le 14 décembre 1979, M. Gibbels, chef de la division « immeubles, services techniques, télécommunications » de la Commission, adresse à Fadex un bon de commande se référant expressément à l'offre précitée et portant la mention suivante: « La présente commande est régie par les dispositions de notre cahier des conditions générales applicables aux marchés de fournitures courantes référence 10.070/IX/69. » Un exemplaire de ce bon, revêtu du cachet et de la signature du fournisseur, est renvoyé par
Fadex à la Commission pour confirmation de la commande.

Le 31 janvier 1980, Fadex adresse une facture du montant prévu pour les travaux exécutés. Malgré une mise en demeure datée du 11 juin 1980, la Commission en refuse le règlement au motif que le revêtement litigieux ne présentait pas la planéité nécessaire à la stabilité des caméras mobiles en service dans le studio. Par lettre du 29 juillet 1980, Fadex proteste auprès de la Commission en déclarant notamment:

« ... votre bon de commande... spécifie exactement le produit que nous avons posé.

Vous ne nous avez jamais fait part de vos exigences dans le domaine de la planéité, ni de la dureté de la surface du revêtement. »

3.  Le défaut de planéité, seul grief invoqué par la Commission à l'encontre de la requérante, n'est pas sérieusement contesté par Fadex qui soutient cependant qu'il ne lui est pas imputable. Vous aurez donc, pour statuer sur sa demande en paiement de la somme de 150480 BFR assortie d'intérêts, à rechercher si les conventions liant les parties mettaient à la charge de Fadex l'obligation d'aplanir le sol préalablement à la pose du revêtement ou, à tout le moins, celle de mettre la défenderesse en
garde contre le risque résultant du défaut de préparation préalable du sol par ses propres soins.

Vous aurez ensuite, si vous déclarez cette demande fondée, à dire si Fadex peut se prévaloir de la clause pénale, figurant dans ses propres conditions de vente, pour réclamer la somme de 30096 BFR à titre d'indemnité forfaitaire.

Sur la demande en paiement de la somme de 150480 BFR

4. Pour conclure au rejet de cette demande, la Commission soutient que Fadex connaissait parfaitement l'exigence de planéité inhérente à l'utilisation normale de caméras mobiles de télévision, que son attention avait été tout particulièrement attirée sur ce point à l'occasion d'entretiens préalables, qu'elle avait d'ailleurs fait état de travaux exécutés par elle pour le compte de la Radio télévision belge à Bruxelles. Dans son mémoire en duplique, elle met plus particulièrement l'accent sur une
lettre du 3 mars 1980 à elle adressée par Fadex en affirmant que celle-ci n'y contesterait nullement avoir été au courant des exigences spécifiques existant en l'espèce et qu'elle reconnaîtrait s'être contentée de poser le revêtement sans vérifier l'état du support de base, ce qui constituerait manifestement une faute professionnelle grave.

A l'inverse, Fadex fait valoir que les seules obligations mises contractuellement à sa charge consistaient en la fourniture et la pose du revêtement, qu'il incombe à la Commission de prouver que les défauts par elle invoqués résultent d'une faute commise par Fadex dans l'exécution de son contrat, qu'en réalité son offre du 4 décembre 1979 spécifiait que la Commission se chargerait du décapage du revêtement existant, donc de la préparation du sol sur lequel devait être posé le nouveau revêtement,
qu'on ne saurait faire peser sur Fadex la responsabilité d'un vice de conception ou d'exécution imputable à la Commission.

5. Par note interne du 8 novembre 1979, le service utilisateur précisait à M. Gibbels que « le futur revêtement (devrait) être plan sans joint et suffisamment solide pour supporter le poids de caméras avec leur chariot ». L'exigence de planéité était donc connue de la Commission.

Les seuls documents produits ayant valeur contractuelle sont le bon de commande du 14 décembre 1979 et la proposition de Fadex du 4 décembre précédent, à laquelle il se réfère. Ni l'un ni l'autre ne mentionne cette exigence dont rien ne permet d'affirmer qu'elle ait été connue de Fadex ni même qu'elle eût dû l'être. Ni l'un ni l'autre ne met à la charge de cette dernière la préparation préalable du sol, la seule indication figurant à cet égard laissant au contraire à la Commission le soin du «
décapage du revêtement existant ».

En vertu des documents précités, Fadex était tenue de fournir et de poser un revêtement. Sauf en ce qui concerne la planéité du support dont il n'apparaît pas qu'elle ait incombé contractuellement à Fadex, il n'est pas établi ni même sérieusement allégué que celle-ci ait incorrectement exécuté cette prestation. La Commission ne saurait donc lui opposer l'exception « non adimpleti contractus ».

Il y a donc lieu de condamner la défenderesse à verser à la requérante la somme réclamée de 150480 BFR avec intérêts au taux légal prévu par la loi belge, applicable en vertu de l'article 17 du cahier des conditions générales de la Commission, à compter du 11 juin 1980, date de la mise en demeure.

Sur la clause pénale

6. La demande présentée à ce titre par Fadex est fondée sur l'article 13 de ses propres conditions générales de vente. C'est donc à bon droit que l'institution défenderesse vous demande de la rejeter, le bon du 14 décembre 1979 assujettissant expressément la transaction litigieuse aux dispositions du cahier des conditions générales de la Commission, référence 10.070/IX/69, dont l'article 2, paragraphe 1, stipule précisément que

«la remise d'une offre ... entraîne pour le soumissionnaire:

— ...

— la renonciation à ses propres conditions de vente ».

En conséquence, nous concluons à ce que votre Cour

1) condamne la Commission

— à payer à la société anonyme de droit belge Fadex NV la somme de 150480 BFR avec intérêts au taux légal prévu par la loi belge à compter du 11 juin 1980,

— à tous les frais et dépens de l'instance,

2) rejette le surplus de la demande de la requérante.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 220/85
Date de la décision : 24/09/1986
Type d'affaire : Clause compromissoire

Analyses

Clause compromissoire: demande de paiement de fourniture de marchandises et de prestations de services.

Marchés publics de l'Union européenne


Parties
Demandeurs : Société anonyme de droit belge Fadex NV
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Darmon
Rapporteur ?: Moitinho de Almeida

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1986:334

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