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01/12/1981 | CJUE | N°270/80

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Rozès présentées le 1 décembre 1981., Polydor Limited et RSO Records Inc. contre Harlequin Records Shops Limited et Simons Records Limited., 01/12/1981, 270/80


CONCLUSIONS DE MME L'AVOCAT GÉNÉRAL SIMONE ROZÈS,

PRÉSENTÉES LE 1ER DÉCEMBRE 1981

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Vous êtes saisis d'une demande de décision à titre préjudiciel formée par la Court of Appeal, portant sur les conditions d'exercice du droit de propriété artistique au regard du droit communautaire et des dispositions de l'accord CEE-Portugal du 22 juillet 1972.

Les faits sont les suivants :

Le trio popularisé sous le nom «The Bee Gees» a cédé ses droits sur la chanson intitulée «Spirits ha

ving flown» à RSO Records Inc. Cette société a elle-même rétrocédé ces droits pour le Royaume-Uni, État ...

CONCLUSIONS DE MME L'AVOCAT GÉNÉRAL SIMONE ROZÈS,

PRÉSENTÉES LE 1ER DÉCEMBRE 1981

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Vous êtes saisis d'une demande de décision à titre préjudiciel formée par la Court of Appeal, portant sur les conditions d'exercice du droit de propriété artistique au regard du droit communautaire et des dispositions de l'accord CEE-Portugal du 22 juillet 1972.

Les faits sont les suivants :

Le trio popularisé sous le nom «The Bee Gees» a cédé ses droits sur la chanson intitulée «Spirits having flown» à RSO Records Inc. Cette société a elle-même rétrocédé ces droits pour le Royaume-Uni, État membre de la Communauté, à Polydor Ltd et cette dernière fabrique et distribue dans cet État des enregistrements de cette oeuvre.

Des enregistrements de la même œuvre sont également fabriqués et vendus au Portugal, pays tiers, par les sociétés de droit portugais Phonogram et Polygram Discos, titulaires des droits de RSO sur cette chanson dans ce pays. Ces sociétés font partie du même groupe que Polydor Ltd.

Des disques comportant l'enregistrement en question, en provenance du Portugal, ont été importés au Royaume-Uni par Simons Records Ltd et commercialisés par Harlequin Record Shops Ltd sans l'autorisation de Polydor ni de RSO.

Ces deux sociétés ont alors poursuivi Harlequin devant la Chancery Division de la High Court of Justice pour atteinte à leurs droits d'auteur au Royaume-Uni, en vertu de la section 16, paragraphe 2, de la loi de 1956 sur le droit d'auteur. En défense, Harlequin et la société Simons, intervenue à ses côtés, ont fait valoir que cette action constituait une mesure d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation au sens de l'article 14, paragraphe 2, de l'accord international conclu
par règlement n° 2844/72 du Conseil du 19 décembre 1972 entre la Communauté économique européenne et la République portugaise.

Après que la Chancery Division eût interdit à Simons et à Harlequin de distribuer l'enregistrement en question au Royaume-Uni, l'affaire a été portée par ces sociétés devant la Court of Appeal, qui vous a saisis de quatre questions tendant à déterminer si la jurisprudence que vous avez élaborée dans le cadre du traité de Rome à propos de la libre circulation des disques et du droit d'auteur est transposable dans les rapports CEE-Portugal.

Compte tenu des interférences possibles avec toute une série d'accords conclus avec des pays tiers, l'importance du problème n'a pas échappé aux cinq États membres qui ont produit des observations. La notion de «restrictions quantitatives à l'importation» figure en effet à l'article XI de l'accord général sur les tarifs douaniers et la commerce, à l'article 10 de la convention instituant l'Association européenne de libre-échange ainsi que dans six autres accords conclus entre la Communauté
économique européenne et les États faisant encore partie de cette association.

I —

Pour que les sociétés Simons et Harlequin puissent prospérer dans leur défense, il faudrait que chaucune des trois conditions suivantes fût réalisée:

1) que les dispositions combinées des articles 14, paragraphe 2, et 23 de l'accord CEE-Portugal ainsi que du règlement n° 2844/72 confèrent aux justiciables de la Communauté des droits que les juridictions nationales sont tenues de sauvegarder, au sens que votre jurisprudence donne à cette expression (12 décembre 1972, International Fruit, Recueil p. 1220 et suiv.; 24 octobre 1973, Schlüter, Recueil p. 1137 et suiv.; 5 février 1976, Bresciani, Recueil p. 130 et suiv.);

2) que l'action en justice exercée par Polydor et RSO constitue une mesure d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation, au sens de l'article 14 de l'accord, non justifiée par des raisons de protection de la propriété industrielle et commerciale, au sens de l'article 23 dudit accord;

3) et, enfin, il faudrait que, à la supposer justifiée pour de telles raisons, cette mesure constitue un moyen de discrimination arbitraire et une restriction déguisée dans le commerce entre les parties contractantes, au sens de la même disposition.

II —

Le règlement du Conseil n° 2844/72 vise dans ses considérants, notamment, l'article 113 du traité, qui figure au chapitre consacré à la politique commerciale.

Son article 1 dispose:

«Sont conclus, approuvés et confirmés au nom de la Communauté, l'accord entre la CEE et la République portugaise, annexes et protocoles ainsi que les déclarations annexées à l'acte final ...»

Selon son article 5:

«le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre».

La forme réglementaire est l'instrument généralement utilisé pour conclure avec les pays tiers les accords commerciaux visés à l'article 113 du traité et la formule finale du règlement n° 2844/72 ne fait que reproduire le texte de l'article 189 du traité.

Si le règlement est directement applicable dans tout État membre, il n'en résulte toutefois pas nécessairement que les articles 14 et 23 de l'accord aient un «effet direct», c'est-à-dire qu'ils confèrent aux ressortissants communautaires des droits que les tribunaux des États membres sont tenus de sauvegarder.

Le règlement n° 2844/72 ne fait qu'approuver l'accord conclu par le Conseil, seule institution compétente pour «statuer» en vertu de l'article 113 du traité. Il a pour effet de transposer dans l'ordre juridique communautaire les dispositions de l'accord, mais il n'en modifie ni la teneur, ni la portée. Il n'a donc qu'une valeur instrumentale. Cinq États membres ont tenu à intervenir à l'occasion de la présente procédure. Le Conseil, lui, n'a pas présenté d'observations.

Conformément à votre jurisprudence, il faut donc, au-delà de la lettre de ces dispositions, s'attacher à l'«esprit» et à l'«économie» de l'accord dans son entier.

III —

La motivation qui est à la base de l'interprétation que vous avez donnée des articles 30 et 36 du traité — ainsi que de toutes les dispositions à «effet direct» — repose sur la prémisse que le traité a créé un marché commun ou unique.

1. Les sociétés Harlequin et Simons déduisent de la signature de l'accord à la date du 22 juillet 1972, soit après l'arrêt Deutsche Grammophon du 8 juin 1971 (Recueil p. 489 et suiv.) un argument selon lequel la rédaction de l'article 14 de l'accord aurait été différente de celle assez proche de l'article 30 du traité si les rédacteurs avaient eu l'intention d'en exempter l'exercice du droit d'auteur aboutissant à une restriction des échanges. Cette considération nous paraît peu convaincante: on
pourrait au contraire faire valoir que les négociations en cours au sujet de l'adhésion du Portugal à la Communauté économique européenne ont notamment pour objet d'étendre à ce pays le régime communautaire en matière de libre circulation et que reconnaître aux sociétés Harlequin et Simons le droit d'invoquer l'«effet direct» des dispositions en question de l'accord préjugerait des négociations en cours pour l'adhésion du Portugal à la CEE.

2. Selon l'article 234, troisième alinéa, du traité:

«dans l'application des conventions (conclues antérieurement à l'entrée en vigueur du traité entre un État membre et un ou plusieurs États tiers, conventions dont l'alinéa 1 dit que les droits et obligations qui en résultent ne sont pas affectés par les dispositions du traité), les Etats membres tiennent compte du fait que les avantages consentis dans le présent traité par chacun des États membres font partie intégrante de la Communauté et sont, de ce fait, inséparablement liés à la création
d'institutions communes, à l'attribution de compétences en leur faveur et à l'octroi des mêmes avantages par tous les États membres».

Ce principe vaut tout autant pour les conventions conclues postérieurement à l'entrée en vigueur du traité avec un État tiers au nom de la Communauté économique européenne.

Mais, tandis que le traité de Rome établit une «communauté» économique, les parties contractantes à l'accord ont entendu «assurer le développement de leur commerce» et «éliminer progressivement les obstacles pour l'essentiel de leurs échanges». Si, en matière de libre circulation des marchandises, la structure de l'accord est en effet comparable à celle du traité, celui-ci comporte bien d'autres volets que cette libre circulation.

Aucune «institution commune» n'a été créée, hormis le «comité mixte» visé à l'article 32, paragraphe 1, de l'accord; en cas de «difficultés pouvant se traduire par l'altération grave d'une situation économique régionale» ou «si une partie contractante estime que l'autre panie contractante a manqué à une obligation de l'accord», seule est prévue la possibilité d'adopter des «mesures appropriées de sauvegarde» (articles 25 à 29), en respectant une procédure de «consultation» au sein du «comité
mixte» (articles 30 et 32, paragraphe 2). Les modalités de mise en oeuvre des clauses de sauvegarde et mesures conservatoires prévues aux articles 25 à 30 de l'accord ont été fixées par règlement du Conseil n° 2845/72 du 19 décembre 1972.

3. Il faudrait que l'avantage revendiqué par les sociétés Harlequin et Simons fût accordé aux importations au Portugal de produits communautaires protégés dans ce pays par des droits de propriété industrielle et commerciale équivalant à ceux dont ils jouissent dans la Communauté.

Or, nous savons que les juridictions de certains pays membres de l'Association européenne de libre échange (Tribunal fédéral suisse, 25 janvier 1979, Sunlight; Cour suprême d'Autriche, 10 juillet 1979, Austro-Mechana, affaire qui portait sur une importation parallèle de disques) permettent aux titulaires de droits de propriété industrielle ou intellectuelle dans ces pays de se prévaloir de ces droits pour s'opposer à des importations en provenance de la Communauté; la réciprocité n'est donc pas
garantie.

4. Les précédents jurisprudentiels invoqués par les sociétés Harlequin et Simons ne nous paraissent pas décisifs.

La convention de Yaounde de 1963, sur laquelle portait l'affaire Bresciani, ne se fondait pas sur la réciprocité: au. contraire, par cette convention, la Communauté assumait unilatéralement un certain nombre d'obligations vis-à-vis des Etats africains et malgache. Ce «déséquilibre» ne s'opposait donc pas à la reconnaissance d'un «effet direct» à certaines des dispositions de la convention.

En outre, cette affaire portait sur l'interprétation des termes «taxes d'effet équivalant à des droits de douane», employés à l'article 2, paragraphe 1, de la convention, rapprochés de ceux de l'article 13, paragraphe 2, du traité, et non sur la notion de «mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives». Or, sur ce point, cette disposition de la convention renvoyait expressément à l'article 13 du traité de Rome. En d'autres termes, les États membres avaient entendu assumer vis-à-vis
des États africains et malgache les mêmes obligations que celles qu'ils avaient assumées entre eux et c'est en raison de cette référence qu'il vous a été possible de dire que cette disposition créait des droits subjectifs au profit des particuliers.

Au contraire, dans votre arrêt International Fruit du 12 décembre 1972, vous avez jugé que l'article XI de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce — disposition qui a trait également à l'élimination des restrictions quantitatives — n'est pas de nature à engendrer pour les justiciables de la Communauté le droit de s'en prévaloir en justice.

A la différence de cette affaire, il ne s'agit pas en l'espèce de savoir si, de même que le droit communautaire prime en principe le droit national, les engagements internationaux souscrits par la Communauté l'emportent sur les actes de ses organes (un règlement du Conseil de ministres, par exemple), mais si les engagements souscrits par la Communauté avec des États tiers sont de même nature et ont la même portée pour les juridictions nationales que ceux souscrits par les États membres entre eux,
en d'autres termes si l'ordre juridique international classique est identique à l'ordre juridique interne communautaire. La réalité journalière montre qu'il n'en est malheureusement pas ainsi.

Dans le domaine voisin de la protection du droit de marque, votre jurisprudence contient des indications qui sont sans ambiguïté.

Par l'arrêt Emi que vous avez rendu le 15 juin 1976 sur renvoi de la High Court of Justice (Recueil p. 813 et suiv., notamment p. 845 et 846, attendus 8 et 11), vous avez jugé que la règle des articles 30 et suivants du traité s'applique à l'intérieur du marché commun, mais ne doit pas être étendue aux relations avec les États tiers. L'exercice du droit de marque pour limiter la commercialisation de produits de ces États est donc indifferent pour la libre circulation des marchandises entre Etats
membres et échappe en conséquence aux interdictions des articles 30 et suivants, car l'unité du marché commun n'est pas en cause. L'action en justice du titulaire d'une marque dans un État de la Communauté contre l'importation parallèle de produits provenant d'un État tiers et portant la même marque n'est pas contraire au traité.

Vous avez jugé (31 octobre 1974, Centrafarm, Recueil p. 1148) qu'«en matière de brevets l'objet spécifique de la propriété industrielle est notamment d'assurer au titulaire, afin de récompenser l'effort créateur de l'inventeur, le droit exclusif d'utiliser une invention en vue de la fabrication et de la première mise en circulation de produits industriels, soit directement, soit par l'octroi de licences à des tiers, ainsi que le droit de s'opposer à toute contrefaçon» (attendu 9, p. 1162).

Cette jurisprudence vise à empêcher qu'un obstacle à la libre circulation des marchandises puisse résulter de l'existence de dispositions nationales prévoyant que le droit du titulaire du droit de propriété industrielle ou commerciale «n'est pas épuisé» par la commercialisation du produit protégé, de sorte que ce titulaire pourrait s'opposer à l'importation du produit commercialisé ailleurs.

Transposé au cas d'espèce, ce raisonnement pourrait conduire à penser que, si les enregistrements importés au Royaume-Uni ont bien été régulièrement fabriqués et commercialisés au Portugal avec le consentement des compositeurs et de leurs licenciés, la redevance acquittée pour prix de l'octroi du droit de première mise en circulation des enregistrements constitue la «récompense» adéquate que mérite l'effort créateur des auteurs et la contrepartie de l'exclusivité accordée. Ainsi, l'exercice
légitime du droit d'auteur serait «épuisé» par la mise sur le marché au Portugal, et la «substance» de ce droit ne serait pas affectée par la libre commercialisation au Royaume-Uni.

Mais une telle façon de voir viendrait bouleverser complètement l'économie des contrats de licence exclusive du droit de propriété industrielle ou commerciale.

La redevance payée à RSO par Phonogram et Polygram Discos correspond à l'exploitation des droits de reproduction sur le marché portugais. Si RSO avait su, en toute connaissance de cause, que les enregistrements commercialisés avec son consentement au Portugal avaient vocation à être importés librement au Royaume-Uni et dans les autres États membres, cette société aurait certainement exigé une contrepartie beaucoup plus importante. De même, si le licencié anglais Polydor avait pu prévoir que le
droit exclusif d'exploiter commercialement au Royaume-Uni l'oeuvre musicale serait «épuisé» par sa mise sur le marché portugais, cette société n'aurait jamais accepté de payer une nouvelle redevance pour pouvoir fabriquer et mettre en vente au Royaume-Uni cet enregistrement.

Par conséquent, la valorisation d'un droit de propriété industrielle ou commerciale et l'importance de la «récompense» des efforts de l'«inventeur» et de celui qui met le premier en circulation le produit fabriqué à partir de l'invention (récompense et valorisation qui relèvent de l'«objet spécifique» ou de la «substance» de ce droit) dépendent des dimensions et de la nature du marché où le produit peut être écoulé.

La théorie de l'«épuisement» n'a été élaborée que dans les relations entre États membres aux fins de parfaire la libre circulation. Elle suppose, entre autres, que soient simultanément réalisées la liberté de prestation de services (n° 25 de l'arrêt Musik-Vertrieb membran du 20 janvier 1981) et, ajouterons-nous, la liberté d'établissement. Point n'est besoin de dire que la libération des échanges prévue à l'accord CEE-Portugal ne s'accompagne pas de la réalisation de ces autres libertés, qui
présuppose l'établissement d'un marché commun.

Même si la commercialisation ou la fabrication des enregistrements litigieux résultait, tant dans le marché commun que dans le pays tiers, de l'activité d'entreprises qui seraient toutes filiales d'une entreprise unique, même établie dans un État membre, cette communauté d'origine n'aurait d'intérêt que si les droits d'auteur litigieux coexistaient sur le territoire du marché commun, car, en ce cas, l'exercice de ces droits serait susceptible de cloisonner ce marché. Si le principe de la
territorialité du droit d'auteur n'existe plus au plan de chacun des États membres, il subsiste encore dans les rapports de la Communauté avec les États tiers.

5. La société Polydor fait encore observer à juste titre que le dernier considérant du préambule de l'accord CEE-Portugal porte qu'«aucune disposition du présent accord ne peut être interprétée comme exemptant les parties contractantes des obligations qui leur incombent en vertu d'autres accords internationaux». Or, les accords internationaux en matière de propriété industrielle et commerciale (par exemple, la convention d'union pour la protection de la propriété industrielle, signée à Paris en 1883
et révisée en dernier lieu à Stockholm en 1967; la convention de Berne de 1886 pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques) n'impliquent pas l'«épuisement du droit». L'accord international CEE-Portugal ne saurait donc être interprété dans un sens différent des conventions internationales en matière de protection de la propriété industrielle et commerciale.

Dans le domaine voisin des brevets, l'épuisement des droits conférés par le brevet communautaire ne s'étend qu'aux actes concernant le produit couvert par ce brevet, accomplis sur le territoire des États contractants, après que ce produit ait été mis dans le commerce dans l'un de ces États par le titulaire du brevet ou avec son consentement exprès (article 32 de la convention sur le brevet communautaire). De même, les droits conférés par un brevet national dans un État membre ne sont «épuisés»
que lorsque le produit a été mis dans le commerce dans l'un des Etats contractants par le titulaire du brevet ou avec son consentement exprès (article 81, paragraphe 1, de la convention). Il n'y a donc pas «épuisement» lorsque le produit a été mis dans le commerce dans un État tiers constituant avec la Communauté économique européenne une zone de libre-échange. Ce ne pourra être le cas que lorsque cet État participera à cette convention (article 96 de la convention).

Pour toutes ces raisons, la théorie «unioniste» de l'épuisement des droits de propriété industrielle et commerciale dans le cadre communautaire, telle qu'elle résulte notamment de l'arrêt Deutsche Grammophon rendu le 8 juin 1971 en matière de «supports de son», n'est pas transposable aux actes concernant l'oeuvre couverte par le droit d'auteur, accomplis sur le territoire d'un pays tiers, même si l'oeuvre y a été mise dans le commerce par le titulaire du droit ou avec son consentement exprès.

IV —

Dans ces conditions, il ne nous semble pas qu'il y ait lieu d'examiner si les termes de l'article 14 de l'accord («les mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation sont supprimées...») se distinguent de ceux de l'article 30 du traité («les restrictions quantitatives à l'importation, ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites...) et si l'injonction visant à interdire l'importation et la vente des disques en question au Royaume-Uni constitue un «moyen
de discrimination arbitraire ou une restriction déguisée dans le commerce» au sens de l'article 23 de l'accord.

En réponse aux questions posées, nous concluons à ce que vous disiez pour droit qu'une société important dans un Etat membre des enregistrements régulièrement mis en circulation au Portugal ne peut invoquer, devant une juridiction de cet État membre, les dispositions du règlement du Conseil n° 2844/72 du 19 décembre 1972 pour s'opposer à l'exclusivité de commercialisation dont se prévaut, dans ce même État membre, le licencié à titre exclusif pour l'exploitation des droits d'auteur sur ces mêmes
enregistrements.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 270/80
Date de la décision : 01/12/1981
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Court of Appeal (England) - Royaume-Uni.

Libre circulation de disques: droits d'auteur.

Libre circulation des marchandises

Relations extérieures

Mesures d'effet équivalent

Propriété intellectuelle, industrielle et commerciale

Restrictions quantitatives


Parties
Demandeurs : Polydor Limited et RSO Records Inc.
Défendeurs : Harlequin Records Shops Limited et Simons Records Limited.

Composition du Tribunal
Avocat général : Rozès
Rapporteur ?: Koopmans

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1981:286

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