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24/01/1980 | CJUE | N°67/79

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mayras présentées le 24 janvier 1980., Waldemar Fellinger contre Bundesanstalt für Arbeit, Nuremberg., 24/01/1980, 67/79


CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. HENRI MAYRAS,

PRÉSENTÉES LE 24 JANVIER 1980

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

M. Fellinger — de nationalité allemande — est plâtrier. Il vivait au moment des faits à Rehlingen, non loin de Sarrebruck, et, jusqu'au 10 octobre 1974, a travaillé pour différents employeurs en République fédérale, notamment, du 1er juillet au 10 octobre de cette année là, pour le compte de l'entreprise Siebenhaar, à Mayence-Amöneberg. Son salaire brut s'élevait, au mois de septembre 1974, à 3872 DM.

Du 11 octobre au 10 novembre 1974, M. Fellinger a été admis au chômage. Depuis lors, il a travaillé...

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. HENRI MAYRAS,

PRÉSENTÉES LE 24 JANVIER 1980

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

M. Fellinger — de nationalité allemande — est plâtrier. Il vivait au moment des faits à Rehlingen, non loin de Sarrebruck, et, jusqu'au 10 octobre 1974, a travaillé pour différents employeurs en République fédérale, notamment, du 1er juillet au 10 octobre de cette année là, pour le compte de l'entreprise Siebenhaar, à Mayence-Amöneberg. Son salaire brut s'élevait, au mois de septembre 1974, à 3872 DM.

Du 11 octobre au 10 novembre 1974, M. Fellinger a été admis au chômage. Depuis lors, il a travaillé d'une façon intermittente: au Luxembourg, il a obtenu un emploi du 11 novembre au 19 décembre 1974; il a une nouvelle fois été admis au chômage du 20 décembre 1974 au 12 janvier 1975; il a travaillé à nouveau du 13 janvier au 2 août 1975; il est retombé en état de chômage du 3 au 19 août 1975; il a recommencé à travailler à partir du 20 août jusqu'au 20 novembre 1975. Après quoi, il n'a plus été, à
notre connaissance, employé au Grand-Duché et nous avons appris à l'audience qu'il avait, à l'époque, une occupation salariée en Belgique.

Pendant les périodes durant lesquelles il était en chômage, le requérant au principal a perçu des prestations de l'Office du travail (Arbeitsamt) de Sarrelouis. Tout d'abord, ces prestations se sont élevées au montant hebdomadaire de 264,60 DM, puis, à compter du 1er janvier 1975, de 319,80 DM. Toutefois, pour la période du 3 au 19 août 1975, elles sont retombées à 199,20 DM. Le litige trouve sa source dans une décision de l'Office du travail de Sarrelouis du 5 décembre 1975 en vertu de laquelle la
même somme lui était versée pour la période qui a commencé le 21 novembre 1975.

Il est constant que ce sont les articles 71, paragraphe 1, a), ii), et 68, paragraphe 1, du règlement no 1408/71 qui fondent le droit de M. Fellinger aux prestations de chômage pour la période en cause. Le siège des dispositions compétentes de droit allemand est l'article 112 de la loi sur l'incitation à la mise au travail (Arbeitsförderungsgesetz) selon laquelle les prestations sont calculées sur la base du dernier traitement ou salaire par le chômeur.

L'article 71, paragraphe 1, a), ii), du règlement no 1408/71 dispose que:

«Le travailleur frontalier qui est en chômage complet bénéficie des prestations selon les dispositions de la législation de l'État membre sur le territoire duquel il réside, comme s'il avait été soumis à cette législation au cours de son dernier emploi; ces prestations sont servies par l'institution du lieu de résidence et à sa charge.»

Aux termes de l'article 68, paragraphe 1,

«L'institution compétente d'un État membre dont la législation prévoit que le calcul des prestations repose sur le montant du salaire antérieur tient compte exclusivement du salaire perçu par l'intéressé pour le dernier emploi qu'il a exercé sur le territoire dudit État. Toutefois, si l'intéressé n'a pas exercé son dernier emploi pendant quatre semaines au moins sur ce territoire, les prestations sont calculées sur la base du salaire usuel correspondant, au lieu où le chômeur réside ou séjourne, à
un emploi équivalent ou analogue à celui qu'il a exercé en dernier lieu sur le territoire d'un autre État membre.»

Le raisonnement adopté par l'Office du travail en vue d'octroyer une prestation de chômage au sieur Fellinger semble avoir été le suivant.

Durant les deux premières périodes de chômage, cet office ne tint aucun compte de l'article 68, paragraphe 1, du règlement no 1408/71, mais se fonda seulement sur la loi sur l'incitation à la mise au travail en calculant la prestation sur la base du salaire perçu dans l'entreprise Siebenhaar. Cette méthode était sans doute la bonne pour la période du 11 octobre au 10 novembre 1974 puisque le sieur Fellinger n'était pas alors un travailleur frontalier; mais ceci semble plus hasardeux pour la période
du 20 décembre 1974 au 12 janvier 1975 qui suit sa première période d'emploi au Luxembourg. Aucun argument n'a toutefois été soulevé de ce fait.

D'autre part, la prestation moins élevée payée pour les deux périodes ultérieures de chômage trouve sa cause dans l'application au cas de M. Fellinger de la seconde phrase du paragraphe 1 de l'article 68. L'Office du travail a donné un effet concret au critère du «salaire usuel correspondant, au lieu où le chômeur réside ou séjourne, à un emploi équivalent ou analogue à celui qu'il a exercé en dernier lieu sur le territoire d'un autre État membre», en calculant la prestation, en vertu de l'article
112, paragraphe 7, de la loi sur l'incitation à la mise au travail, sur la base du salaire habituel, fixé par convention collective, de 9,93 DM de l'heure pour les plâtriers travaillant 40 heures par semaine.

Cette conception repose sur deux postulats relatifs à l'interprétation de l'article 68, paragraphe 1. Le premier est qu'en vertu de la phrase initiale du texte la prestation de chômage peut être calculée sur la base du salaire perçu pour le dernier emploi dans l'État membre de l'institution compétente seulement si cet emploi est le dernier exercé avant la période de chômage. A l'évidence, le requérant ne remplissait pas cette condition.

Le second postulat est que l'absence d'emploi avant l'admission au chômage sur le territoire de l'État membre de l'institution compétente doit être considérée comme un exemple d'emploi de moins de quatre semaines sur ce territoire, ce qui permet de mettre en jeu la deuxième phrase du texte.

Le requérant introduisit une réclamation auprès de l'agence fédérale pour l'emploi (Bundesanstalt für Arbeit) contre la décision du 5 décembre 1975, au motif que celle-ci constituait une interprétation erronée de l'article 68, paragraphe 1. Il estimait, à ce stade de la procédure, que la première phrase de l'article 68, paragraphe 1, devait être interprétée d'une manière littérale. La base de calcul de la prestation de chômage devait alors être le salaire perçu pour le dernier emploi dans l'État
membre de l'institution compétente, sans égard au moment où cet emploi avait été rempli. Cette règle ne doit céder le pas à celle de la deuxième phrase que si ce dernier emploi a duré moins de quatre semaines. Dans cette interprétation, la prestation à laquelle le requérant aurait eu droit eût été fondée sur le salaire qu'il avait reçu dans l'entreprise Siebenhaar.

Après l'échec de sa réclamation, le requérant intenta une action devant le Sozialgericht de la Sarre qui la rejeta par jugement du 17 février 1977. Il fit alors appel devant le Landessozialgericht qui admit le bien-fondé de sa thèse par un arrêt du 26 octobre 1977.

Saisi d'un recours en «révision» par le défendeur (Office du travail), le Bundessozialgericht vous a, par ordonnance du 15 février 1979, posé les questions d'interprétation suivantes de l'article 68, paragraphe 1 :

«1. En cas de chômage d'un travailleur frontalier, l'institution compétente du lieu de résidence ne doit-elle, au sens de l'article 68, paragraphe 1, première phrase, du règlement (CEE) no 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971, tenir compte du salaire du ‘dernier emploi’ exercé sur le territoire de l'État auquel elle appartient que si cet emploi est le dernier que le travailleur a exercé avant qu'il demande son inscription au chômage?

2. Dans la négative, faut-il aussi (ou encore) tenir compte du salaire du ‘dernier emploi’ lorsque cet emploi — comme en l'espèce — a pris fin quatorze mois avant la dernière inscription au chômage?

3. Y a-t-il aussi (ou encore) emploi de moins de quatre semaines, au sens de l'article 68, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement précité, lorsqu'aucun emploi quel qu'il soit n'a été exercé sur le territoire de l'État du lieu de résidence ou, en tout cas, aucun emploi susceptible d'être pris en considération selon les réponses données aux questions 1 ou 2?»

Ces questions furent évidemment rédigées à la lumière des deux différentes interprétations de l'article 68, paragraphe 1, sur lequelles s'opposent les parties devant le Bundessozialgericht. Mais, une troisième interprétation fut suggérée par la Commission dans ses observations écrites. Selon elle, le dernier emploi mentionné à l'article 68, paragraphe 1, vise le dernier emploi du point de vue du temps et non simplement le dernier emploi sur le territoire de l'État compétent. Cette disposition doit
être interprétée comme une application du principe suivant lequel les prestations de chômage devraient être calculées sur la base du dernier salaire effectivement perçu avant la perte de l'emploi. L'avocat du requérant a indiqué à l'audience qu'il ne soutenait plus l'interprétation littérale de l'article 68, paragraphe 1, pour s'aligner sur celle de la Commission.

Les réponses aux questions posées par le Bundessozialgericht dépendent du point de savoir laquelle de ces trois interprétations est correcte.

Nous commencerons par l'interprétation littérale.

Vous vous souvenez, Messieurs, que la première phrase de l'article 68, paragraphe 1, dispose que l'institution compétente de l'État membre dont la législation est en cause «tient compte exclusivement du salaire perçu par l'intéressé pour le dernier emploi qu'il a exercé sur le territoire dudit État».

Cette disposition se suffit à elle-même au point de vue grammatical et syntaxique. Ainsi que le fait remarquer le juge de renvoi dans son ordonnance, «la lettre de la disposition paraît accréditer l'idée qu'il faut l'entendre en ce sens que le salaire du dernier emploi exercé à l'intérieur du pays avant la survenance du chômage est déterminant, sans égard à la situation de cette période d'emploi dans le temps». Cependant, le juge de révision éprouve quelques doutes au sujet d'une interprétation qui
n'impose pas de limite à l'intervalle qui pourrait exister entre le dernier emploi dans l'État compétent et le début de la période de chômage.

Lorsque l'interprétation littérale d'une règle de droit écrit conduit à un résultat déraisonnable ou injuste, peut-on admettre que la Cour cherche une autre interprétation qui évite ce résultat? On peut, à notre avis, être guidé sur ce point par les principes généraux d'interprétation et par votre propre jurisprudence.

Les rôles distinctifs du législateur et du juge à l'intérieur d'un ordre juridique ont été décrits avec élégance par Portalis:

«Il y a une science pour les législateurs, comme il y en a une pour les magistrats; et l'une ne ressemble pas à l'autre. La science du législateur consiste à trouver dans chaque matière les principes les plus favorables au bien commun; la science du magistrat est de mettre ces principes en action, de les ramifier, de les étendre, par une application sage et raisonnée, aux hypothèses privées; d'étudier l'esprit de la loi quand la lettre tue; et de ne pas s'exposer au risque d'être tour à tour esclave
et rebelle et de désobéir par esprit de servitude.»

Conformément à la distinction opérée par cet éminent juriste, vous ne pouvez pas substituer votre pouvoir discrétionnaire à celui du législateur communautaire; lorsque le sens d'une loi est clair, il faut l'appliquer suivant celui-ci, même si on peut considérer la solution prescrite comme non satisfaisante. Ce n'est pas à dire cependant, que l'interprétation littérale d'un texte doit toujours être acceptée. Si une telle interprétation conduisait à un résultat absurde à l'égard d'une situation que le
texte entendait couvrir, suivant la conviction de la Cour, on pourrait, à juste raison, nourrir quelques doutes à son égard. En d'autres termes, sens clair et sens littéral ne sont pas synonymes.

Il y a eu de nombreuses affaires dans lesquelles la Cour a renoncé à une interprétation littérale en faveur d'une autre qu'elle a trouvée plus compatible avec l'objectif et le système d'ensemble de la réglementation en question. Un exemple bien connu est fourni par les trois affaires relatives à l'interdiction, formulée au second paragraphe de l'article 4 de la décision du Conseil du 13 mai 1965, de l'application du système commun de taxe sur le chiffre d'affaires concurremment à des taxes
spécifiques tenant lieu de taxes sur le chiffre d'affaires. Il s'agit des affaires 9/70, Franz Grad/Finanzamt Traunstein (Recueil 1970, p. 825), 20/70, Lesage/Hauptzollamt Freiburg (Recueil 1970, p. 861) et 23/70, Haselhorst/Finanzamt Düsseldorf (Recueil 1970, p. 881). Dans un passage identique aux trois jugements, vous avez indiqué que:

«il est vrai qu'une interprétation littérale de l'article 4, alinéa 2, de la décision pourrait conduire à estimer que cette disposition vise le moment où l'État membre concerné aura mis en vigueur sur son propre territoire le système commun;

une telle interprétation ne serait toutefois pas conforme à l'objectif des directives en cause; en effet, l'objectif que vise ces directives est d'assurer qu'à partir d'une date déterminée le système de la taxe sulla valeur ajoutée soit appliqué dans l'ensemble du marché commun; tant que cette échéance n'est pas atteinte, les États membres restent libres en la matière» (Recueil 1970, p. 841, 877 et 896-897).

Dans le même sens, on peut également mentionner les affaires 6/72, Europamballage et Continental Can Company/Commission (Recueil 1973, p. 215), 6/74, Moulijn/Commission (Recueil 1974, p. 1287) et, dans le domaine de la sécurité sociale, l'affaire 2/67, de Moor/Caisse de pension des employés privés (Recueil 1967, p. 255).

A notre avis, le problème sur lequel la haute juridication allemande a attiré notre attention est suffisamment sérieux pour vous libérer de la nécessité d'appliquer l'article 68, paragraphe 1, de manière strictement littérale. C'est pourquoi nous abordons maintenant les autres interprétations qui ont été avancées par l'Agence fédérale pour l'emploi et la Commission.

La solution de cet organisme implique un effort d'interprétation de certains termes, à la fois dans la première et dans la deuxième phrase de l'article 68, paragraphe 1. D'une part, dans les deux phrases du texte, «le dernier emploi» dans l'État membre compétent doit être compris comme se référant au tout dernier emploi avant que l'intéressé ne devienne chômeur. D'autre part, dans la seconde phrase du texte, un emploi de moins de quatre semaines sur le territoire de l'État membre compétent doit être
compris comme couvrant le cas où le dernier emploi n'a pas été exercé dans cet État, mais dans un autre État membre.

La principale objection à cette interprétation est que, par définition, les travailleurs frontaliers seraient incapables de remplir la condition émise dans la première phrase de l'article 68, paragraphe 1. Il s'ensuivrait que, lorsque, en vertu de la législation de l'État de résidence, le calcul de la prestation de chômage est basé sur le montant du salaire antérieur, un travailleur frontalier ne pourrait jamais faire calculer sa prestation sur la base du salaire qu'il a réellement perçu, mais
seulement sur celle d'un salaire «artificiel». Puisque, comme vous le savez, la base de calcul de ce salaire est «le salaire usuel»au lieu de résidence pour un travail équivalant à celui effectué dans l'Etat membre d'emploi, et puisqu'il est évident que les migrations journalières se font d'habitude des régions de bas salaires vers celles de hauts salaires, le montant des prestations qui seraient dues aux travailleurs frontaliers n'aurait que rarement un rapport avec ce qu'ils gagnent avant d'être
admis au chômage.

Or, il semble invraisemblable que le Conseil ait eu l'intention de traiter les travailleurs frontaliers de manière aussi défavorable par comparaison avec les travailleurs qui vont vivre dans un autre État membre. C'est pourquoi nous estimons erronée l'interprétation de l'Agence nationale pour l'emploi.

Celle qui a été d'abord suggérée par la Commission et fut ensuite reprise à l'audience par l'avocat du requérant est la plus difficile à concilier avec la lettre de l'article 68, paragraphe 1. Si, comme le soutient la Commission, l'élément déterminant est le dernier salaire effectivement perçu par un chômeur, comment expliquer que la première phrase de l'article 68, paragraphe 1, précise qu'il s'agit du salaire perçu pour le dernier emploi exercé sur le territoire de l'État membre de l'institution
compétente?

La Commission a cherché à surmonter cette difficulté en invoquant ce qu'elle a décrit comme la «fiction» contenue dans l'article 71, paragraphe 1, a), ii), suivant laquelle un travailleur frontalier en chômage complet est soumis à la législation de l'État membre de sa résidence, «comme s'il avait été soumis à cette législation au cours de son dernier emploi». Elle avance que le «territoire» de'l'État compétent, au sens de l'article 68, paragraphe 1, s'étend, pour les travailleurs frontaliers, au
territoire où la législation de cet État est censée être applicable, c'est-à-dire au territoire de l'État du dernier emploi.

En vérité, cette analyse nous semble inutilement compliquée. Nous sommes cependant d'accord avec la Commission en ce qui concerne le principe sur lequel repose la lettre de l'article 68, paragraphe 1 : la base du calcul de l'indemnité de chômage doit être le dernier salaire effectivement perçu par l'intéressé.

Ce principe peut recevoir effet sur la base de la première phrase de cette disposition dans le cas ordinaire où, en vertu de l'article 13, paragraphe 2, a), du règlement no 1408/71, l'État membre compétent est l'État de emploi. L'objet de cette disposition est précisément d'indiquer clairement qu'il faut prendre en compte le dernier salaire perçu dans cet État, et non les salaires, quels qu'ils soient, perçus pour un emploi antérieurement exercé dans d'autres États membres.

Le défaut d'adaptation de l'article 68 au cas spécial des travailleurs frontaliers ne signifie pas que le rédacteur du texte n'ait pas entendu leur appliquer ce principe. S'il en était autrement, si leurs prestations de chômage devaient être calculées sur la base d'un salaire qu'ils pourraient avoir perçu des années auparavant dans l'État membre de leur résidence, ce serait à l'évidence un frein à la libre circulation des travailleurs. A notre avis.

la première phrase de l'article 68, paragraphe 1, doit être interprétée comme si elle disposait que, pour tous les travailleurs frontaliers en chômage complet, le calcul des prestations doit reposer sur le salaire perçu par l'intéressé dans l'État membre où il a travaillé en dernier lieu. Pour reprendre les paroles de Portalis, nous dirions que toute autre interprétation conduirait à désobéir à l'esprit du règlement no 1408/71 en étant esclave de sa lettre.

Nous sommes conforté dans cette opinion par le fait qu'elle s'accorde avec l'article 81 du règlement no 574/72 au moins aussi bien que l'interprétation avancée par l'agence nationale pour l'emploi.

Nous ne sommes enfin pas convaincu, contrairement, semble-t-il, à la Commission, que cette solution soit incompatible avec le principe consistant à ne pas tenir compte des salaires perçus à l'étranger. Ce principe est, en effet, seulement applicable dans les cas où la prise en compte des salaires perçus à l'étranger est de nature à restreindre la libre circulation, ce qui est le contraire du cas présent.

C'est pourquoi nous pensons que ce serait une erreur de votre part que de répondre directement aux questions posées par la juridiction de renvoi, étant entendu que celles-ci étaient destinées à servir de critère pour choisir entre deux interprétations de l'article 68, paragraphe 1, du règlement no 1408/71 qui se révèlent, à notre avis, toutes deux erronées.

Nous concluons donc à ce que vous disiez pour droit que, dans le cas d'un travailleur frontalier en chômage complet, l'institution compétente du lieu de résidence tienne compte, en vertu de la 1re phrase de l'article 68, paragraphe 1, du salaire perçu par l'intéressé dans l'État membre où il a travaillé durant la période qui a précédé immédiatement le chômage.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 67/79
Date de la décision : 24/01/1980
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Bundessozialgericht - Allemagne.

Sécurité sociale - Allocations de chômage aux travailleurs frontaliers.

Sécurité sociale des travailleurs migrants


Parties
Demandeurs : Waldemar Fellinger
Défendeurs : Bundesanstalt für Arbeit, Nuremberg.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mayras
Rapporteur ?: Bosco

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1980:23

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