La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/11/1973 | CJUE | N°31-71

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Reischl présentées le 15 novembre 1973., Antonio Gigante contre Commission des Communautés européennes., 15/11/1973, 31-71


CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. GERHARD REISCHL,

PRÉSENTÉES LE 15 NOVEMBRE 1973 ( 1 )

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Nous devons nous prononcer aujourd'hui sur une affaire qui a pour objet les suites d'un accident survenu à M. Gigante, fonctionnaire à la Commission. Nous désirons présenter tout d'abord les observations liminaires suivantes au sujet des faits qui entre temps sont devenus particulièrement abondants.

M. Gigante est entré en 1960 au service de la Commission de la Communauté économique européenne. AprÃ

¨s l'entrée en vigueur du statut du personnel, il a été titularisé avec effet au 1er janvier ...

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. GERHARD REISCHL,

PRÉSENTÉES LE 15 NOVEMBRE 1973 ( 1 )

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Nous devons nous prononcer aujourd'hui sur une affaire qui a pour objet les suites d'un accident survenu à M. Gigante, fonctionnaire à la Commission. Nous désirons présenter tout d'abord les observations liminaires suivantes au sujet des faits qui entre temps sont devenus particulièrement abondants.

M. Gigante est entré en 1960 au service de la Commission de la Communauté économique européenne. Après l'entrée en vigueur du statut du personnel, il a été titularisé avec effet au 1er janvier 1962. Il était employé à l'origine dans le service de reproduction en qualité d'«opérateur auxiliaire». Il a été nommé commis adjoint de grade C 4 avec effet au 1er juin 1964 dans la direction générale personnel et administration où il doit apparemment effectuer des travaux de photocopie.

Le 13 novembre 1962, M. Gigante a été victime d'un accident alors qu'il se rendait de son lieu de travail à son domicile.

Après son accident, M. Gigante a tout d'abord été dans l'impossibilité de travailler jusqu'au 2 janvier 1963. En 1963, il a travaillé à mi-temps en raison du traitement médical qui demeurait nécessaire. Le 18 décembre 1963, le médecin-conseil de la Commission a constaté que M. Gigante était en mesure d'effectuer des travaux de photocopie à la condition de disposer d'une chaise pendant les arrêts de travail. Il semble que le traitement médical ait continué à cette époque et par la suite.

Comme on le sait sur la base d'autres litiges, la Commission a signé un contrat d'assurance contre les accidents de ses agents et la compagnie d'assurances intéressée a donc été également saisie du cas de M. Gigante. En janvier 1965, elle a informé la Commission que, selon les constatations de son médecin-conseil, les blessures de M. Gigante étaient consolidées et que l'on ne pouvait relever aucune suite de l'accident pouvant justifier la constatation d'une incapacité de travail. Le médecin-conseil
de la Commission s'est également rangé à cet avis auquel M. Gigante a toutefois refusé de souscrire. Les intéressés ont donc été amenés à tenter de résoudre le problème — comme la police d'assurance le prévoit — par voie arbitrale. Cette tentative a toutefois échoué — comme la Commission l'a déclaré — en raison du refus opposé par M. Gigante. En conséquence, la compagnie d'assurances a invoqué en juillet 1968 le délai de prescription stipulé par la police d'assurance et n'a plus effectué de
prestations (tandis qu'apparemment tous les frais médicaux et pharmaceutiques occasionnés par l'accident ont été remboursés jusqu'en janvier 1965).

M. Gigante ayant eu plus de 600 jours d'absence pour raisons de santé entre son accident et la fin de l'année 1967, l'autorité investie du pouvoir de nomination a décidé en octobre 1967 de soumettre le cas de M. Gigante à la commission d'invalidité. Cette procédure a été tout d'abord entravée par divers événements qui maintenant ne retiendront pas notre attention. Mais malgré tout, la commission d'invalidité a déposé son rapport le 7 janvier 1970. Elle est arrivé à la conclusion que l'accident n'a
pas entraîné d'invalidité permanente totale et que M. Gigante n'est pas dans l'impossibilité d'exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière. Cependant, le médicin traitant de M. Gigante n'a pas signé ce rapport mais a au contraire déclaré dans une note du 12 février 1970 que M. Gigante n'était pas en mesure de reprendre son ancien travail et que son taux d'invalidité s'élevait a plus de 10 %.

Les confrontations se sont donc poursuivies. Nous pouvons maintenant en négliger les détails et notamment les examens complémentaires que les médecins des institutions ont effectués à Bruxelles et à Ispra. Nous nous bornerons à signaler, puisque cette circonstance a abouti à l'instance, que M. Gigante a officiellement déposé, le 17 février 1971, une réclamation au sens de l'article 90 du statut des fonctionnaires devant l'autorité investie du pouvoir de nomination. Dans cette réclamation, M. Gigante
faisait valoir, abstraction faite des éléments qui n'ont pas été repris dans l'instance, que les frais exposés entre 1963 et 1970 pour le traitement des suites de son accident ne lui avaient été remboursés qu'en partie; il devait donc lui être encore remboursé un solde de 90391 FB. Il demandait en outre la constitution d'une commission d'invalidité en application de l'article 59, paragraphe 3, du statut des fonctionnaires et l'application de l'article 73, paragraphe 2, lettre c, du même statut,
c'est-à-dire le versement d'un certain capital au titre de l'invalidité permanente partielle consécutive à son accident.

M. Gigante n'a obtenu aucune réponse à ses demandes dans le délai de deux mois visé à l'article 91 du statut. C'est seulement le 29 avril 1971 qu'une lettre de la direction générale personnel et administration lui a proposé la constitution d'une nouvelle commission d'invalidité dont la composition aurait dû être différente de celle qui était intervenue en 1970.

Mais estimant que cette lettre ne constituait pas la réponse qu'appelait sa réclamation, M. Gigante a saisi la Cour le 16 avril 1971.

Après l'introduction de la requête, l'autorité investie du pouvoir de nomination a alors pris la décision de soumettre de nouveau l'affaire à la commission d'invalidité et l'on est ensuite parvenu en août 1971 — comme le prévoit l'article 7 de l'annexe II du statut des fonctionnaires — à la désignation d'un médecin par le président de la Cour de justice. Après que le requérant eut lui aussi désigné un médecin, la direction générale personnel et administration a informé par lettre du 29 septembre
1971 le médecin désigné en premier lieu qu'il devait nommer un médecin-tiers de concert avec le médecin désigné par le requérant. La mission de la commission d'invalidité a été en même temps définie: elle devait déterminer si le requérant était atteint d'invalidité permanente partielle le rendant incapable de remplir les fonctions correspondant à un emploi de sa carrière et si cette invalidité partielle, dont le taux devait être déterminé, était directement imputable à l'accident survenu à
l'intéressé. Le médecin désigné par le requérant reçut une communication analogue le 15 octobre 1971. En janvier 1972, la compétence de la commission d'invalidité a été encore étendue à la suite d'une demande formulée en ce sens par le conseil du requérant. En conséquence, il fallait également examiner si un nouveau traitement médical des suites de l'accident se révélait nécessaire et si l'on pouvait considérer les frais invoqués par le requérant comme imputables à l'accident, la ventilation
adéquate de ces frais devant être effectuée le cas échéant.

C'est ensuite que commencent les efforts tendant à compléter la commission d'invalidité, conformément à l'article 7 de l'annexe II du statut des fonctionnaires. Ces efforts se sont encore poursuivis après la première audience qui s'est déroulée devant la Cour le 14 juin 1972 sans toutefois aboutir, parce que les deux médecins désignés en premier lieu n'ont pu se mettre d'accord. La chambre connaît à cet égard les détails qui ressortent de l'abondante correspondance des médecins qui a été versée au
dossier.

La Commission a informé la Cour de justice de cette situation dans une lettre du 26 avril 1973, dans laquelle elle priait également le président de la première chambre de bien vouloir désigner le médecin-tiers en vue de compléter la commission d'invalidité. Il n'a pas été donné suite à cette demande; bien au contraire, il a été suggéré le 17 mai 1973 aux parties d'adresser au président de la chambre, avec l'assentiment des médecins d'ores et déjà désignés, une demande commune tendant à la nomination
d'un médecin-tiers par le président de la chambre ou par la chambre. Le médecin désigné en premier lieu par le président de la Cour a donné son assentiment à une telle procédure. Par contre, le médecin nommé par le requérant y est opposé, comme il ressort d'une communication du conseil du requérant en date du 15 juin 1973.

Devant cet état de choses, la chambre a décidé de faire plaider à nouveau l'affaire, ce qui fut fait en l'audience du 24 octobre 1973.

A ce stade de la procédure, nous allons également devoir nous prononcer sur l'affaire par voie de conclusions. Qu'il nous soit permis de vous rappeler au préalable les conclusions du requérant.

Ces conclusions sont exposées comme suit dans la requête :

— déclarer nul et de nul effet le refus implicite de rejet opposé à la réclamation administrative du requérant (dont nous vous avons défini le contenu précédemment) ;

— déclarer nulle et de nul effet la décision du 29 avril 1971 en tant que celle-ci tend à imposer au requérant de ne pas désigner son médecin-traitant comme membre de la commission d'invalidité;

— déclarer qu'il y a lieu pour la défense d'engager une nouvelle procédure d'invalidité, la commission d'invalidité ayant pour compétence de déterminer si le requérant est atteint d'une invalidité permanente totale ou partielle le rendant par conséquent incapable de remplir les fonctions correspondant à un emploi de sa carrière; de déterminer le taux d'invalidité, en vue de l'application de l'article 73, paragraphe 2, c, du statut et quelles sont les thérapeutiques à appliquer pour le traitement des
suites de l'accident ;

— condamner la Commission à rembourser les frais médicaux et pharmaceutiques exposés par le requérant et notamment à verser la somme de 90391 FB.

Les observations présentées en dernier lieu par le requérant nous donnent toutefois l'impression que ces conclusions n'ont pas été maintenues, au moins en ce qui. concerne la dernière de ces conclusions. Nous savons en effet, à la lumière de la correspondance qui a été produite devant nous, que le conseil du requérant a manifesté le 3 novembre 1971 devant la Commission le désir que la commission d'invalidité détermine également si les frais médicaux et pharmaceutiques invoqués par le requérant
devaient lui être remboursés en application de l'article 73, paragraphe 3, du statut du personnel. La Commission a donné une suite favorable à cette demande en définissant la tâche qu'elle a impartie à la commission d'invalidité. On peut donc très bien supposer qu'à cet égard nous ne sommes plus devant une conclusion que la Cour doit directement examiner elle-même.

Il n'y a donc lieu de statuer que sur les conclusions suivantes: d'une part, sur la demande d'annulation de la décision du 29 avril 1971, et, d'autre part, sur la demande tendant à faire constater que la Commission doit engager la procédure d'invalidité et à confier à la commission d'invalidité une mission bien définie, à savoir celle qui a déjà été citée. Nous envisagerons donc uniquement ces points dans nos conclusions.

1. A cet égard, nous pourrons être très bref en ce qui concerne le premier point.

La Commission a fait valoir à ce propos qu'elle n'avait plus maintenu par la suite l'obligation que stipulait sa lettre du 29 avril 1971. En effet, lorsqu'à été ordonnée ultérieurement une nouvelle procédure d'invalidité, il n'a plus été question de la condition mentionnée. Bien au contraire, la Commission était tout de suite disposée — ainsi qu'il ressort des mandats qu'elle a donnés à cet effet — à ce que le médecin-traitant du requérant siège lui aussi à la commission d'invalidité.

Ce point du litige est donc résolu et sans qu'il soit besoin d'annuler expressément la lettre du 29 avril 1971, comme le requérant l'a estimé à tort nécessaire. Au sujet de ce point de la requête, il nous suffira donc de constater que l'instance est devenue sans objet et il y a donc seulement lieu de statuer sur les dépens, point sur lequel nous devrons revenir par la suite.

2. En ce qui concerne la deuxième et manifestement la principale conclusion du requérant, l'ouverture d'une procédure devant la commission d'invalidité et la définition précise de ses compétences, il y a lieu de relever ce qui suit.

On peut tout d'abord laisser ouverte la question de savoir si aux termes du statut des fonctionnaires il est possible d'envisager une procédure devant la commission d'invalidité pour des cas comme celui qui nous occupe actuellement et en dotant la commission des compétences qui ont été décrites.

On pourrait certes affirmer à ce sujet que certaines dipositions du statut (articles 53 et 78 aussi bien que l'article 13 de l'annexe VIII) amènent à penser qu'une commission d'invalidité a pour principale compétence de constater si les conditions posées par l'article 78 (incapacité de travail permanente totale) sont réunies. On peut toutefois objecter que la commission d'invalidité peut en outre intervenir également dans d'autres cas, par exemple — ainsi que le prévoit l'article 1, paragraphe 1,
de l'annexe VIII du statut des fonctionnaires — lorsque l'autorité investie du pouvoir de nomination a décidé de n'«admettre le fonctionnaire au bénéfice des garanties prévues en matière d'invalidité ou de décès qu'à l'issue d'une période de cinq ans à compter de la date de son entrée au service des Communautés», ou — aux termes de l'article 59, paragraphe 2, du statut — lorsqu'un fonctionnaire a été mis en congé d'office à la suite d'un examen pratiqué par le médecin-conseil de l'institution, si
son état de santé l'exige ou si une maladie contagieuse s'est déclarée dans son foyer. Pour sa part, la doctrine (voir Euler, statut des fonctionnaires européens, «Europäisches Beamtensta-tut», p. 130) estime aussi, et en avançant de bons arguments, que la commission d'invalidité peut également intervenir quand il s'agit d'appliquer l'article 24 ou l'article 73, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires. Cependant, ces questions peuvent finalement — comme nous l'avons déjà dit — demeurer
ouvertes en l'espèce. L'élément décisif est en effet que la Commission ait effectivement, comme le requérant l'a demandé, engagé une procédure devant la commission d'invalidité et confié à celle-ci des fonctions dépassant le cadre de ses fonctions habituelles.

Il faut ensuite rappeler, au sujet du point considéré présentement, ce que le statut des fonctionnaires en vigueur en 1971 obligeait la Commission à faire dans un cas comme celui-ci. Elle pouvait en effet seulement décider d'engager une procédure devant la commission d'invalidité et de confier à celle-ci une mission déterminée. En application de l'article 7 de l'annexe II du statut des fonctionnaires qu'il convient de considérer en premier lieu, la compétence de la Commission se limite donc
essentiellement à demander au président de la Cour de justice de désigner un médecin. Par contre, il n'est pas du ressort de la Commission d'effectuer les autres démarches qu'il y a lieu d'accomplir en vue de la constitution de la commission, c'est-à-dire la nomination d'un médecin par le fonctionnaire intéressé et la désignation d'un médecin-tiers à laquelle doivent procéder de concert les deux médecins choisis en premier lieu.

Aussi peut-on être tenté de conclure que la deuxième conclusion de la requête est également devenue sans objet pour la bonne raison que la Commission s'est acquittée de toutes les obligations qui lui incombaient en vertu du statut et n'a pas non plus retiré jusqu'à ce jour les mesures qu'elle avait prises.

Toutefois, chacun ressent bien, après les déclarations qui ont été faites pendant la procédure orale, l'insatisfaction que laisse la simple constatation que la procédure contentieuse est dans cette mesure devenue elle aussi sans objet. Il n'est donc nullement étonnant que l'on ait considéré, dans le cadre de la présente instance, quel moyen permettrait éventuellement de sortir du dilemme que constitue ce blocage manifeste de la procédure d'invalidité.

On pourrait tout d'abord songer à se fonder sur une application par analogie de l'article 7, paragraphe 2, de l'annexe II du nouveau statut des fonctionnaires, c'est-à-dire à faire désigner un médecin par le président de la Cour de justice en lieu et place du requérant, au motif que celui-ci est responsable, par son comportement, de ce que la procédure de fixation de l'invalidité ne peut être engagée. Toutefois, à y regarder de près, des réserves s'imposent aussitôt à ce propos. La solution
envisagée impliquerait en effet la constatation que le requérant n'a pas désigné un médecin capable et supposerait, en d'autres termes, un jugement sur le comportement du médecin désigné par le requérant. Or, un tel jugement n'est certainement pas de notre compétence et cela pour cette raison — qui n'est pas la moindre — qu'au lieu de se refuser simplement à participer à la nomination d'un médecin-tiers, le médecin en question invoque des raisons d'ordre médical à l'appui d'une nomination
déterminée.

Il nous semble également délicat — pour le dire tout de suite — de penser que l'on devrait enjoindre au requérant d'ordonner à son médecin de donner son agrément à la proposition de solution avancée par la Cour de justice le 17 mai 1973. Certes, nous considérons que cette proposition est toujours raisonnable, mais elle n'est pas prévue par le statut du personnel en vigueur et ne saurait par conséquent être imposée au médecin traitant du requérant qui détient en la matière un pouvoir
discrétionnaire.

En définitive, on ne peut donc plus que songer à considérer le fait que l'avocat du requérant a répondu par l'affirmative à la question du président de la chambre qui lui demandait si la Cour de justice devait effectivement, dans l'esprit du requérant, tout entreprendre pour permettre à la commission d'invalidité de remplir son office. Cette réponse peut au fond seulement signifier que le requérant estime opportune la nomination d'un médecin-tiers par la Cour de justice. On pourrait être d'autant
plus disposé à choisir cette voie que la Commission a formulé une demande en ce sens, de sorte qu'à défaut d'un accord, des médecins, on peut au moins parler d'un accord des parties.

Mais même en ce qui concerne cette proposition, nous nous demandons toutefois si nous pouvons y recourir et la réaliser immédiatement. En disant cela, nous avons présent à l'esprit le fait que le médecin traitant du requérant, qui fait toujours office de membre de la commission d'invalidité, ne consent pas à cette solution. Or, on ne saurait purement et simplement négliger ce point puisqu'aux termes du statut en vigueur, il n'est pas possible d'intervenir dans la décision du médecin. En outre, on
peut également avoir l'impression que les deux médecins d'ores et déjà désignés ne se sont pas encore suffisamment employés à élaborer un compromis et qu'à cet égard la pensée que la Cour de justice était d'ores et déjà disposée à agir en leur lieu et place a pu jouer un rôle. Il semble notamment que les médecins n'aient pas encore considéré qu'ils pouvaient parvenir à un compromis qui peut consister dans la possibilité pour la commission d'invalidité (Euler a notamment indiqué cette solution) de
faire également appel à des experts. Il n'est pas impensable à notre avis que de cette façon, c'est-à-dire à la condition qu'un médecin déterminé et ayant des compétences particulières puisse participer à l'examen du requérant, les médecins, jusqu'à présent en désaccord, parviennent cependant à s'entendre.

Nous partirons donc au fond — telle est la solution que nous proposons — de l'idée qu'aux termes du statut en vigueur il n'existe pas d'autre possibilité que celle de reconnaître que même sur le deuxième point l'instance contentieuse est devenue sans objet et de laisser les intéressés libres de rechercher une solution dans le cadre de la procédure administrative.

Si cependant une telle solution ne devait pas se matérialiser avant l'expiration d'un délai à fixer par la chambre, il ne serait certainement pas exclu, devant le vide juridique actuel auquel la Commission devrait au demeurant consacrer toute son attention indépendamment de la présente espèce, que l'on en revienne à la demande commune des parties et qu'un médecin-tiers soit nommé par voie judiciaire en vue de la constitution de la commission d'invalidité.

3. Permettez-nous enfin de dire quelques mots au sujet des dépens de l'instance et sur lesquels il est, selon nous, d'ores et déjà possible de statuer.

Pour cette décision, il y a lieu de se fonder non seulement sur l'article 70 du règlement de procédure aux termes duquel les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci, mais encore, dans un cas d'espèce comme celui qui nous occupe, c'est-à-dire en cas de non-lieu à statuer, sur l'article 69, paragraphe 5, du règlement de procédure, en vertu duquel la Cour peut régler librement les dépens.

Il y aura lieu de considérer à cet égard que la lettre de la direction générale personnel et administration du 29 avril 1971 n'a perdu tout intérêt qu'après l'ouverture de l'instance contentieuse. De même, il est important que la Commission n'ait décidé qu'après l'ouverture du procès de soumettre à nouveau le cas du requérant à la commission d'invalidité. On peut donc dire que c'est la Commission qui a provoqué l'introduction de la requête.

D'autre part, la requête est déjà devenue sans objet du fait même de la décision par la Commission d'ouvrir la procédure d'invalidité et de la définition de la mission que devait remplir la commission d'invalidité, c'est-à-dire au plus tard en janvier 1972. Il n'y avait plus lieu par la suite de poursuivre l'instance.

Compte tenu de ces éléments et du fait que les institutions défenderesses doivent en tout cas supporter dans les affaires de personnel les frais qu'elles ont exposés, il nous semble donc convenable de mettre à la charge de la Commission une fraction des frais exposés par le requérant. La chambre déterminera librement les modalités de calcul de cette fraction.

4) Résumons-nous encore une fois :

Selon nous, il convient de partir de l'idée que l'instance est devenue sans objet à la suite des actes adoptés par la Commission après l'ouverture de l'instance. Vu qu'il ne serait pas satisfaisant après le déroulement de l'instance de se contenter de cette constatation, on peut envisager d'en revenir, à l'expiration sans résultat d'un délai à déterminer par la chambre et pendant lequel les deux médecins déjà désignés pour siéger à la commission d'invalidité devraient poursuivre leurs efforts
pour parvenir à une entente, à la demande commune des parties, c'est-à-dire de désigner par voie judiciaire un médecin-tiers pour siéger à la commission d'invalidité. En application des articles 69 et 70 du règlement de procédure, la décision sur les dépens devra être rendue en ce sens qu'une fraction des frais exposés par le requérant doit être mise à la charge de la Commission.

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

( 1 ) Traduit de l'allemand.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 31-71
Date de la décision : 15/11/1973
Type de recours : Recours de fonctionnaires - fondé

Analyses

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Antonio Gigante
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Reischl
Rapporteur ?: Donner

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1973:123

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award