CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. KARL ROEMER,
PRÉSENTÉES LE 29 JUIN 1972 ( 1 )
Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
Le requérant de l'affaire dans laquelle nous présentons aujourd'hui nos conclusions est entré au service de la Commission de la Communauté économique européenne en 1960. Il est fonctionnaire de grade C3 (commis) et il a travaillé, des années durant, comme spécialiste «offset» à l'imprimerie de la Commission. Depuis 1964, M. Vellozzi a, semble-t-il été atteint, à maintes reprises, de maladies des organes respiratoires, qui l'ont tenu éloigné de son service et ont nécessité un traitement médical. A
partir de février 1968, il a également été frappé pendant un certain temps, d'une incapacité de travail qu'il attribue aux conditions de travail dans l'imprimerie (activité dans un sous-sol, manipulation de solutions irritantes) et, en fait, à compter du 5 juillet 1968, il a été muté à la direction générale de la concurrence où il est chargé d'autres travaux (classement de documents, distribution de fournitures de bureau, etc.).
Etant donné les fréquentes maladies du requérant, (de septembre 1965 à septembre 1968, il a été absent pour cause de maladie pendant plus de 12 mois) et vu la disposition de l'article 59, paragraphe 1, alinéa 3, du statut des fonctionnaires, selon laquelle «l'autorité investie du pouvoir de nomination peut saisir la commission d'invalidité du cas du fonctionnaire dont les congés cumulés de maladie excèdent douze mois pendant une période de trois ans», l'autorité investie du pouvoir de nomination a
décidé, en automne 1968, de soumettre la situation de M. Vellozzi à l'appréciation d'une commission d'invalidité. La procédure a été engagée par une lettre du 27 septembre 1968 adressée au président de la Cour de justice, pour lui demander de désigner un médecin, conformément à l'article 7 de l'annexe II au statut des fonctionnaires. Dès qu'elle a été constituée, la commission d'invalidité a été chargée, par lettre du directeur général du personnel et de l'administration du 25 octobre 1968,
d'examiner si «l'intéressé est atteint d'une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l'impossibilité d'exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière». Les résultats des exames effectués à cette fin ont été consignés dans les rapports du 5 décembre 1968 et du 13 janvier 1969, dont il ressort avec certitude que «l'état de santé actuel de M. Vellozzi ne l'empêche pas de travailler». Toutefois, la Commission d'invalidité a également insisté sur le fait qu'il
était nécessaire «que le travail soit effectué à l'abri des intempéries, dans un local salubre et dans une atmosphère exempte de toute substance irritante pour l'appareil respiratoire». Enfin, nous y lisons encore que: «Sans leur attribuer un rôle unique, on peut admettre en toute bonne foi que les conditions de travail qu'a connues pendant huit ans M. Vellozzi, sont intervenues pour une bonne part comme cause de sa bronchite».
Se fondant sur cette dernière constatation, le requérant en est venu à penser que sa maladie devait être considérée comme une maladie professionnelle et qu'il aurait par conséquent des droits au titre de l'article 73 du statut des fonctionnaires, à savoir un droit à indemnité pour invalidité permanente partielle et un droit au remboursement complet des frais médicaux et pharmaceutiques (donc de la partie de ces frais qui n'est pas couverte par la caisse maladie). Il semble qu'il ait déjà soutenu
cette thèse — nous n'en savons pas davantage — dans une lettre du 12 novembre 1970 envoyée à la direction générale du personnel et de l'administration. Cette lettre étant demeurée sans résultat, il a adressé, le 12 février 1971, une réclamation formelle au président de la Commission, conformément à l'article 90 du statut des fonctionnaires. Se référant au rapport de la commission d'invalidité déjà mentionné du 5 décembre 1968, il faisait valoir dans cette réclamation, qu'il avait contracté une
bronchite asthmatique par suite des conditions très mauvaises dans lesquelles il avait dû travailler; il y avait donc lieu de reconnaître qu'il souffrait d'une maladie professionnelle et qu'il devait être remboursé de tous des frais médicaux déjà exposés ou à exposer. En outre, se référant à un certificat de l'Institut de médecine légale des assurances de l'université de Rome, du 15 mai 1970, qui avait constaté une invalidité partielle de 40 %, il demandait la reconnaissance de cette invalidité.
Sa réclamation étant demeurée sans réponse, il a saisi la Cour de justice d'un recours parvenu au greffe le 9 juin 1971, engageant ainsi la procédure qui nous occupe aujourd'hui. Avec la requête, il a produit le certificat d'un médecin belge qui conclut que: «le pourcentage d'invalidité actuel peut être évalué à 30 % à titre temporaire».
En égard au contenu de la réclamation administrative et du certificat que nous venons de mentionner, le requérant formule dans la requête les conclusions suivantes:
1) déclarer nul et non avenu le refus implicite opposé par la Commission au recours administratif du 12 février 1971;
2) déclarer que le requérant est atteint d'une invalidité de 30 %;
3) condamner la Commission à lui rembourser, conformément à l'article 73 du statut des fonctionnaires, des frais médicaux et pharmaceutiques d'un montant de 100000 FB;
4) condamner la Commission à lui payer, conformément à l'article 73, paragraphe 2, c, du statut des fonctionnaires, une indemnité d'un montant de 100000 FB;
5) subsidiairement: déclarer qu'il y a lieu pour la partie adverse de diligenter la procédure en vue de la réunion d'une commission d'invalidité ou de tout autre collège d'experts et charger cette commission ou ce collège de déterminer le taux d'invalidité provoqué par la maladie professionnelle.
Étant donné les questions médicales débattues (la Commission estime qu'elles ne sont pas encore suffisamment élucidées), et puisque entre temps la maladie a de nouveau tenu le réquérant éloigné de son service pendant un temps considérable (de janvier 1969 à juin 1971, soit environ 300 jours), la Commission a estimé, après l'introduction du recours, qu'il convenait de constituer de nouveau une commission d'invalidité et de la charger d'éclaircir les questions soulevées. A cette fin, elle a adressé le
30 juillet 1971 une lettre au président de la Cour de justice; celui-ci, par une lettre du 18 août 1971, a alors désigné un médecin, conformément à l'article 7 de l'annexe II du statut des fonctionnaires. En réponse à une demande en ce sens, adressée au requérant, celui-ci a, lui aussi, désigné un médecin par une lettre enregistrée le 27 août 1971, dans laquelle il faisait toutefois la remarque suivante: «Je ne peux me déclarer d'accord avec la constitution d'une commission d'invalidité que si
celle-ci a une compétence complète et pourra notamment déterminer le taux de l'invalidité en vue de l'application de l'article 73 du statut.» Par lettres des 29 septembre 1971 et 15 octobre 1971, l'autorité investie du pouvoir de nomination a chargé les médecins ainsi désignés d'examiner si, dans le cas du requérant, il était possible de parler d'invalidité permanente partielle et, le cas échéant, d'en déterminer le taux, afin qu'il soit possible de fixer l'indemnisation due en application de
l'article 73 du statut des fonctionnaires. En outre, par une lettre de la Commission du 10 janvier 1972, les médecins ont été invités à établir «si les frais médicaux et pharmaceutiques dont le remboursement est demandé doivent être considérés comme conséquence de la maladie professionnelle dont souffre M. Vellozzi, et couverts au titre de l'article 73, paragraphe 3, et, si tel n'est pas le cas, procéder à la ventilation de ces frais suivant leur origine (suite de la maladie professionnelle ou
non)».
Une première réunion devait avoir lieu le 23 février 1972, après que la commission d'invalidité eut été entièrement constituée (c'est-à-dire après que les deux médecins désignés en premier lieu eurent nommé «d'un commun accord» un troisième médecin, conformément à l'article 7 de l'annexe II au statut des fonctionnaires). Cependant, le requérant n'a pas obtempéré à l'ordre de se présenter devant cette commission en vue d'un examen, qui lui avait été adressé par lettre du 18 février 1972, il a
prétendu dans une lettre du 21 février 1972, que la mission de la commission d'invalidité n'était pas nettement délimitée, qu'elle devait au préalable être définie comme il l'avait demandé, c'est-à-dire qu'elle devait reconnaître l'existence d'une maladie professionnelle sur la base du certificat du 5 décembre 1968, puis déterminer uniquement le taux d'invalidité et effectuer un décompte des frais médicaux et pharmaceutiques. — De même M. Vellozzi n'a pas donné suite à la demande de consentir à
l'envoi de son dossier médical à la commission d'invalidité, qu'avait exprimée le chef du service médical de la Commission dans une lettre du 25 février 1972. Il a fait justifier son refus par son avocat le 23 mars 1972, lequel a invoqué le caractère confidentiel du dossier et se référait à l'article 26 du statut des fonctionnaires ainsi qu'à l'article 9 de l'annexe II à ce statut.
Compte tenu de cette attitude, la Commission estime maintenant que le requérant n'a plus aucun intérêt à agir. En conséquence, elle vous demande de constater que le recours est devenu sans objet et qu'il doit être rejeté dans son ensemble comme irrecevable et non fondé.
Ce litige appelle de notre part les observations suivantes:
1. Nous devons tout d'abord nous occuper de la demande d'annulation du rejet implicite de la réclamation du requérant du 12 février 1971. Elle se décompose en plusieurs parties, puisque, dans cette réclamation, le requérant a formulé plusieurs demandes.
a) A cet égard, la demande de reconnaissance d'une maladie professionnelle, provoquée par les conditions de travail dans l'imprimerie de la Commission, occupe nettement la première place. Le requérant estime qu'elle se justifie sur la seule base du certificat du 5 décembre 1968, alors que la Commission considère que ce certificat n'est pas une base suffisante et a donc proposé un nouvel examen du requérant.
Pour examiner ce point, il faut tout d'abord étudier les conditions dans lesquelles il est possible de parler de maladie professionnelle dans le droit de la fonction publique de la Communauté. Ce problème n'est pas simple à résoudre parce que le statut des fonctionnaires ne contient pas de définition et parce que les dispositions d'application de l'article 73 du statut, qui fourniront des détails sur ce point, n'ont pas encore été adoptées. Comme toujours, lorsque nous sommes en présence d'une
lacune du droit communautaire, la seule solution est de tenter de recueillir un certain nombre d'indices, sur la base du texte du droit communautaire, en faisant appel au droit national et — en l'espèce — aux recommandations de la Commission en la matière. A cet égard, les systèmes nationaux qui comportent des listes de maladies professionnelles, et établissent une présomption pour la relation de causalité avec l'exercice de la profession, n'entrent certainement pas en ligne de compte, en tant
que moyens auxiliaires; en effet, ces systèmes visent des situations précises et surtout ils font apparaître d'importantes divergences. Abstraction faite de ces systèmes, nous pouvons toutefois avec la Commission (le requérant n'a même pas tenté une définition), nous en tenir, pour l'essentiel, aux faits suivants. On peut parler de maladies professionnelles (notamment de maladies contractées dans le service public), lorsqu'il s'agit de maladies qui sont survenues au cours et à la suite de
l'exercice des fonctions au service des Communautés et quand il est établi que l'exercice des fonctions a constitué la cause essentielle ou prépondérante de l'apparition de la maladie ou de l'aggravation d'une maladie existante. A tout le moins, faut-il exiger une preuve certaine que l'exercice des fonctions intervient en tant que cause, et il est bien entendu que, seuls des médecins experts peuvent émettre un jugement adéquat sur ce point. Nous pouvons ici — comme la Commission l'a fait —
renvoyer à la législation et à la jurisprudence nationale relative aux maladies professionnelles dans le service public (pour autant qu'un système particulier ne soit pas applicable), comme dans le droit allemand de la fonction publique. Nous pouvons également renvoyer à la recommandation de la Commission concernant l'adoption d'une liste européenne des maladies professionnelles (JO 1962, p. 2188) et à la recommandation de la Commission relative aux conditions d'indemnisation des victimes de
maladies professionnelles (JO 1966, p. 2696), car elles affirment, elles aussi, «qu'il doit s'agir de maladies dont le risque est inhérent à l'activité professionnelle» et soulignent qu'il doit être prouvé à suffisance que les maladies ont été causées par la profession. Enfin, il est encore intéressant de savoir que le projet de réglementation d'application relatif à l'article 73 du statut des fonctionnaires semble également s'en tenir à cette orientation.
Si nous appliquons au cas d'espèce les principes ainsi déterminés, la thèse du requérant, selon laquelle le certificat de 1968 constitue une base suffisante pour la reconnaissance d'un lien de causalité entre sa maladie et son activité de service, appelle une série d'objections.
Ce qui importe, tout d'abord à cet égard, c'est que la mission de la commission d'invalidité consistait à déterminer si le requérant était atteint d'une invalidité permanente au sens de l'article 78 du statut des fonctionnaires. Aussi, un examen de son état de santé à cette époque (c'est-à-dire en décembre 1968) était-il d'une importance essentielle; en revanche, il n'y avait pas lieu de mettre l'accent sur la détermination des causes d'une maladie éventuelle. C'est pourquoi la commission
d'invalidité n'a alors effectué aucun test systématique concernant la question de l'allergie et des solutions utilisées par le requérant, mais s'est contentée de se référer à des tests effectués en 1964 et 1966 (les résultats du premier test n'étant pas connus et celui de 1966 ayant abouti, semble-t-il à la conclusion que le requérant ne présentait pas une sensibilité particulière). Ainsi s'explique aussi le fait que la commission d'invalidité n'ait pas élucidé la question de savoir si
l'activité du requérant comme chauffeur, au cours des années 1952 à 1958 (activité qui l'a également mis en contact avec des solutions irritantes) n'aurait pas pu déjà constituer la cause de la maladie affectant ses organes respiratoires. Dans ce contexte, il est également compréhensible que les remarques plutôt accessoires de la commission d'invalidité, concernant les causes de la maladie constatée, soient formulées d'une manière prudente et vague. C'est ainsi par exemple que la commission
d'invalidité a déclaré: «quant à l'étiologie de cette bronchite, il est malaisé de la déterminer». Ou encore, à propos de l'opinion d'autres médecins «qui mettent en doute les produits à base de solvants utilisés dans son travail par M. Vellozzi pendant plusieurs années», il y a lieu de noter que «cette hypothèse ne peut pas être écartée»; de même il est dit dans le rapport: «D'autre part, d'après les déclarations de l'intéressé, son travail s'effectuait dans un local humide et mal ventilé, ce
qui peut avoir contribué à l'éclosion de la bronchite dont il souffre». C'est à l'aide de ces remarques qu'il convient d'apprécier la conclusion que le requérant a tirée de ce rapport et de déterminer l'importance de cette phrase: «sans leur attribuer un rôle unique, on peut admettre, en toute bonne foi, que les conditions de travail qu'a connues pendant huit ans M. Vellozzi sont intervenues pour une bonne part comme cause de sa bronchite». Mais si l'on aperçoit bien ce lien, il est en réalité
difficile de dire que le rapport affirme avec netteté que l'activité de service du requérant aurait constitué une cause essentielle de sa maladie.
En outre, il est dit dans le rapport que le «manque de collaboration de l'intéressé» n'a pas permis d'effectuer correctement certains examens. De même, il est dit expressément que le rapport a été rédigé «sans que les médecins soussignés aient pu prendre "connaissance du dossier médical de l'intéressé à la CEE». Nous pouvons donc en déduire que l'examen n'a pas été effectué avec autant de soins qu'il est nécessaire pour déterminer avec certitude la cause d'une maladie.
Enfin, il pourrait être encore intéressant de noter que le rapport d'un autre médecin, du 6 avril 1971, que le requérant a lui-même joint à sa requête, ne parle que d'une manière très imprécise «de probabilités d'allergie» et déclare que le requérant a «un syndrome obstructif de nature allergique, très vraisemblablement en rapport avec ses antécédents professionnels entre 1960 et 1968». C'est pourquoi ce rapport affirme en conclusion que des «investigations plus fines seraient peut-être à même
de préciser la nature exacte du mode de déclenchement de l'affection actuelle».
Ainsi, les faits mentionnes permettent difficilement d'admettre que le certificat du 5 décembre 1968 constitue à lui seul une base suffisante pour reconnaître l'existence d'une maladie professionnelle dans la personne du requérant. Nous devons au contraire approuver la thèse de la Commission, lorsqu'elle affirme que d'autres examens sont encore nécessaires (examens pour lesquels tous les documents médicaux antérieurs sont eux aussi importants pour établir un lien de causalité). Il est donc
clair qu'aucune objection ne peut être élevée contre le rejet du premier point de la réclamation administrative introduite par le requérant.
b) Dans sa réclamation administrative, le requérant demandait, en second lieu, le paiement de l'ensemble des frais médicaux déjà exposés ou à exposer, motif pris de ce qu'il avait dû se soumettre à un traitement par suite d'une maladie professionnelle et devait le poursuivre. Cette demande doit être examinée maintenant à la lumière de la troisième demande de la requête visant à faire condamner la Commission à payer des frais médicaux et pharmaceutiques d'un montant de 100000 FB. Il est donc
manifeste que le requérant a abandonné la partie de la demande initiale relative aux frais qui doivent encore être exposés.
Cependant, un examen de la demande fait tout de suite apparaître qu'il est impossible d'y donner suite, même après qu'elle a été modifiée. Il suffit de renvoyer aux développements qui précèdent, et dont il ressort que la question qu'il faut tout d'abord élucider avec certitude est celle de savoir si le requérant est atteint d'une maladie professionnelle. En réalité, l'élément déterminant est de savoir s'il y a lieu d'appliquer l'article 73 du statut des fonctionnaires, c'est-à-dire la
disposition en vertu de laquelle même les frais qui ne sont pas couverts au titre de l'article 72 du statut doivent être remboursés au fonctionnaire atteint d'une maladie professionnelle. Il faut dire en outre que même si l'existence d'une maladie professionnelle était reconnue, il n'est pas certain que l'ensemble des frais réclamés par le requérant aient un rapport avec cette maladie. Même dans ce cas, par conséquent, il serait de toute façon nécessaire que des experts établissent quelles
sont les dépenses inhérentes à son traitement. Ce n'est qu'après, qu'il serait possible de préciser l'étendue de son droit.
C'est donc à bon droit que la Commission n'a pas donné suite à la seconde demande formulée dans la réclamation administrative mais a ordonné un nouvel examen qui doit permettre de résoudre le problème soulevé.
c) Enfin, dans cette même réclamation administrative, le requérant, se référant à un certificat d'un institut de Rome, demandait en troisième lieu, de reconnaître qu'il était atteint d'une incapacité professionnelle de 40 %. Cette demande, doit être examinée, elle aussi, en fonction des demandes formulées dans la requête qui, sur la base d'une autre attestation, visaient seulement à obtenir la constatation d'une incapacité professionnelle de 30 %.
Cependant, il est encore une fois facile de montrer que, même modifiée cette demande ne peut pas aboutir. En réalité, l'autorité investie du pouvoir de nomination ne peut pas être tenue de reconnaître une prétendue incapacité, sur la seule base de certificats présentés par le fonctionnaire. Le statut des fonctionnaires (annexe II, art. 7 et 9) prévoit en effet une commission d'invalidité composée de trois médecins, qui garantit une appréciation émise sur une base plus large, donc objective.
Cette commission ne se limite d'ailleurs pas à constater l'invalidité permanente totale, puisque l'article 59 du statut des fonctionnaires déclare, de manière générale, «qu'elle peut être saisie du cas du fonctionnaire dont les congés cumulés de maladie excèdent douze mois pendant une période de trois ans».
C'est donc à bon droit que la Commission a refusé de reconnaître une incapacité professionnelle partielle sur la seule base des certificats présentés et c'est également à bon droit qu'elle a ordonné l'ouverture d'une nouvelle procédure d'invalidité, compte tenu en premier lieu de ce que le rapport de la commission d'invalidité du 5 décembre 1968 ne parlait que de «signes discrets de bronchite».
d) Dans l'ensemble, nous pouvons donc retenir que la première demande, visant à faire annuler le rejet de la réclamation administrative, doit être rejetée comme non fondée.
2. Cette conclusion montre en même temps que la seconde demande tendant à faire constater une incapacité de 30 % ne peut pas aboutir non plus.
En effet, s'il est certain que l'autorité investie du pouvoir de nomination ne peut pas être obligée d'accorder cette reconnaissance sur la base des certificats produits par le requérant, il est également clair que la Cour de justice ne peut pas davantage faire une telle constatation, en se fondant sur des documents insuffisants.
3. Après tout ce qui précède, il nous reste de même peu à dire au sujet de la troisième demande, qui vise à obtenir le paiement de frais médicaux et pharmaceutiques d'un montant de 100000 FB, en application de l'article 73 du statut des fonctionnaires.
Comme nous l'avons vu, l'appréciation positive de cette demande dépend d'une condition: que le requérant soit atteint d'une maladie professionnelle. Mais cette condition ne peut pas être constatée par la Cour sur la base des documents produits; elle ne peut l'être que par une commission d'invalidité, comme celle que la Commission a saisie de nouveau. En outre, il est nécessaire de toute façon de spécifier les frais et de déterminer avec précision s'ils se rapportent, en tout ou en partie
seulement, à une maladie professionnelle existante. Bien entendu, cette tâche elle non plus, ne peut pas être effectuée, au cours d'une procédure judiciaire, elle est au contraire de la compétence des experts de la commission d'invalidité.
Il ne reste donc pas d'autre solution que de rejeter la troisième demande, elle aussi, comme non fondée.
4. Manifestement, il en est de même de la quatrième demande qui vise à faire condamner la Commission à payer une indemnité de 100000 FB, en application de l'article 73 du statut des fonctionnaires. Puisque cette demande, elle aussi, est conditionnée par la constatation de l'existence et de la gravité d'une maladie professionnelle, constatation qui ne peut pas être faite au cours d'une procédure judiciaire mais uniquement au cours d'une procédure d'invalidité, la seule solution possible est de la
rejeter comme non fondée.
5. Il ne nous reste donc plus qu'à étudier la demande subsidiaire par laquelle le requérant vous demande de déclarer qu'il est nécessaire de constituer une commission d'invalidité chargée de déterminer le taux de l'invalidité provoquée par sa prétendue maladie professionnelle.
Puisque, comme nous l'avons appris au cours de la procédure, une commission d'invalidité a effectivement été constituée, la seule question juridique qui se pose encore est de savoir si sa mission doit être définie comme le demande le requérant ou si la Commission l'a, avec raison, chargée d'une mission plus vaste, décrite dans l'exposé des faits. Après tout ce que nous avons dit jusqu'ici, nous pouvons également répondre d'une manière relativement brève à cette question. En effet, une solution
favorable à la thèse du requérant exigerait que l'existence d'une maladie professionnelle soit clairement établie. Or, étant donné que d'après les conclusions auxquelles nous sommes parvenus antérieurement, tel n'est pas le cas, puisqu'il faut au contraire chercher à clarifier ce point, il n'existe en fait pas d'autre possibilité que de donner tort au requérant sur cette question également.
6. En conséquence, le recours ne peut aboutir sur aucun point.
Ce résultat qui, du reste, étant donne le point de vue juridique soutenu par le requérant, ne permet pas de mettre une partie de ses frais à la charge de la Commission, ne s'oppose pas — disons le en terminant — à l'ouverture d'une procédure d'invalidité, comme celle que la Commission a ordonnée; pour la raison surtout que, depuis la clôture de la première procédure d'invalidité, le requérant semble remplir de nouveau les conditions exigées par l'article 59 du statut des fonctionnaires. Il a donc
toutes les raisons d'obtempérer à l'ordre de la commission d'invalidité nouvellement formée, de se soumettre à un examen. Il n'a du reste pas le droit de refuser de consentir à la production de son dossier médical. Comme on peut le constater immédiatement, il n'est pas question d'invoquer ici l'article 26 du statut des fonctionnaires qui concerne d'autres faits. Dans le cadre de la procédure d'invalidité, les dispositions particulières applicables à cet égard (article 9 de l'annexe 2 au statut
des fonctionnaires), selon lesquelles les travaux de la commission sont secrets, garantissent déjà la conservation du secret du dossier. D'autre part, il est certainement indispensable — nous l'avons déjà dit dans nos développements précédents — que la commission d'invalidité dispose de tous les éléments nécessaires à l'accomplissement satisfaisant de ses tâches. Les documents du dossier médical du requérant figurent, eux aussi, parmi ces éléments, surtout lorsqu'il s'agit d'examiner si on est en
présence d'une maladie professionnelle et de procéder en conséquence à une ventilation éventuellement nécessaire des frais médicaux. Dans son propre intérêt, le requérant devrait donc, au cours de la nouvelle procédure qui doit être engagée maintemant, éviter tout ce qui pourrait être considéré comme une violation de l'obligation de loyauté et de coopération dont votre jurisprudence (voir par exemple affaire 3-66) a déjà fait état à diverses reprises.
7. En définitive, nous pouvons donc résumer nos conclusions comme suit:
Le recours introduit par M. Vellozzi doit être intégralement rejeté comme non fondé.
Étant donné l'issue du procès, chacune des parties doit supporter ses propres frais, conformément à l'article 70 du règlement de procédure.
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( 1 ) Traduit de l'allemand.