R. c. R.N.S., [2000] 1 R.C.S. 149
Sa Majesté la Reine Appelante
c.
R.N.S. Intimé
et
Le procureur général du Canada et
le procureur général de l’Ontario Intervenants
Répertorié: R. c. R.N.S.
Référence neutre: 2000 CSC 7.
No du greffe: 26462.
1999: 25, 26 mai; 2000: 31 janvier.
Présents: Le juge en chef Lamer et les juges L’Heureux‑Dubé, Gonthier, Cory*, McLachlin, Iacobucci, Major, Bastarache et Binnie.
en appel de la cour d’appel de la colombie-britannique
POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique (1997), 121 C.C.C. (3d) 426, 100 B.C.A.C. 120, 163 W.A.C. 120, [1997] B.C.J. No. 2776 (QL), qui a accueilli l’appel de l’accusé contre la peine d’incarcération de neuf mois prononcée par le juge MacArthur de la Cour provinciale. Pourvoi accueilli.
Alexander Budlovsky et Jennifer Duncan, pour l’appelante.
Bruce H. Ralston, pour l’intimé.
S. Ronald Fainstein, c.r., pour l’intervenant le procureur général du Canada.
Kenneth L. Campbell et Gregory J. Tweney, pour l’intervenant le procureur général de l’Ontario.
Version française du jugement du juge en chef Lamer et des juges Iacobucci, Major et Binnie rendu par
1 Le Juge en chef — Le ministère public se pourvoit en l’espèce contre la décision de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique de substituer une ordonnance d’emprisonnement avec sursis à la peine d’incarcération qui avait été infligée par le juge du procès. Le présent pourvoi et les affaires R. c. Proulx, [2000] 1 R.C.S. 61, 2000 CSC 5; R. c. L.F.W., [2000] 1 R.C.S. 132, 2000 CSC 6; R. c. R.A.R., [2000] 1 R.C.S. 163, 2000 CSC 8, et R. c. Bunn, [2000] 1 R.C.S. 183, 2000 CSC 9, ont été entendus ensemble. Tous les pourvois portent sur les principes régissant l’octroi du sursis à l’emprisonnement dans le cadre du nouveau régime établi par la loi. Les présents motifs portent principalement sur l’application des principes énoncés dans l’arrêt Proulx. Tout comme l’affaire R.A.R., le présent pourvoi soulève également la question des conséquences de changements qui surviennent dans le droit entre le prononcé de la peine par le juge du procès et l’audition de l’appel.
I. Les faits
2 L’intimé a été déclaré coupable d’agression sexuelle et d’incitation à des contacts sexuels à la suite d’événements survenus d’octobre 1990 à septembre 1994. Lorsque les infractions visées ont commencé, la plaignante, petite‑fille de l’intimé par remariage, avait 5 ans et l’intimé 46 ans, et, lorsqu’elles ont cessé, elle avait 8 ans et lui 50 ans. Suivant la preuve produite à l’égard du chef d’agression sexuelle, l’intimé a caressé le vagin de la plaignante à plusieurs occasions, sans toutefois qu’il y ait pénétration. Selon la preuve relative au chef d’incitation à des contacts sexuels, l’intimé a offert 5 $ ou une autre somme à la plaignante pour qu’elle touche son pénis, elle a accepté l’offre et l’intimé lui a remis la somme. Il y a eu deux ou trois événements de contacts sexuels. Conformément aux principes examinés par notre Cour dans l’arrêt R. c. Kienapple, [1975] 1 R.C.S. 729, une accusation de contacts sexuels a fait l’objet d’un arrêt conditionnel des procédures.
3 Au moment du prononcé de la peine, l’intimé faisait vie commune avec son épouse. Pendant toute la durée des procédures engagées contre l’intimé et après la déclaration de culpabilité, l’épouse et les deux beaux‑fils de l’intimé n’ont cessé de le soutenir, alors que la victime et sa mère étaient ostracisées par les membres de la famille. L’intimé n’était pas en bon état de santé. Il souffrait de problèmes cardiaques et d’hypertension, et il était agité en raison des poursuites dont il était l’objet. Il n’avait pas de casier judiciaire et disposait de lettres d’appui émanant de membres de sa collectivité. Il a continué de clamer son innocence, même après les déclarations de culpabilité, et il n’a exprimé aucun remords.
4 Le 31 juillet 1996, l’intimé a été condamné à neuf mois d’emprisonnement. Le régime d’octroi du sursis à l’emprisonnement est entré en vigueur en septembre de la même année. L’intimé a interjeté appel des déclarations de culpabilité et de la peine. L’appel relatif aux déclarations de culpabilité a été rejeté. Celui visant la peine a été entendu le 6 octobre 1997. La Cour d’appel a accueilli l’appel et a substitué à la peine initiale une ordonnance de sursis à l’emprisonnement d’une durée de neuf mois.
5 L’intimé a fini de purger sa peine d’emprisonnement avec sursis le 12 septembre 1998, et il est sous le coup d’une ordonnance de probation jusqu’au 12 septembre 2000.
II. Les dispositions législatives pertinentes
6 Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46
718. Le prononcé des peines a pour objectif essentiel de contribuer, parallèlement à d’autres initiatives de prévention du crime, au respect de la loi et au maintien d’une société juste, paisible et sûre par l’infliction de sanctions justes visant un ou plusieurs des objectifs suivants:
a) dénoncer le comportement illégal;
b) dissuader les délinquants, et quiconque, de commettre des infractions;
c) isoler, au besoin, les délinquants du reste de la société;
d) favoriser la réinsertion sociale des délinquants;
e) assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité;
f) susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants, notamment par la reconnaissance du tort qu’ils ont causé aux victimes et à la collectivité.
718.1 La peine est proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant.
718.2 Le tribunal détermine la peine à infliger compte tenu également des principes suivants :
a) la peine devrait être adaptée aux circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l’infraction ou à la situation du délinquant; sont notamment considérées comme des circonstances aggravantes des éléments de preuve établissant:
(i) que l’infraction est motivée par des préjugés ou de la haine fondés sur des facteurs tels que la race, l’origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l’âge, la déficience mentale ou physique ou l’orientation sexuelle,
(ii) que l’infraction perpétrée par le délinquant constitue un mauvais traitement de son conjoint ou de ses enfants;
(iii) que l’infraction perpétrée par le délinquant constitue un abus de la confiance de la victime ou un abus d’autorité à son égard;
(iv) que l’infraction a été commise au profit ou sous la direction d’un gang, ou en association avec lui;
b) l’harmonisation des peines, c’est‑à‑dire l’infliction de peines semblables à celles infligées à des délinquants pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables;
c) l’obligation d’éviter l’excès de nature ou de durée dans l’infliction des peines consécutives;
d) l’obligation, avant d’envisager la privation de liberté, d’examiner la possibilité de sanctions moins contraignantes lorsque les circonstances le justifient;
e) l’examen de toutes les sanctions substitutives applicables qui sont justifiées dans les circonstances, plus particulièrement en ce qui concerne les délinquants autochtones.
742.1 Lorsqu’une personne est déclarée coupable d’une infraction -‑ autre qu’une infraction pour laquelle une peine minimale d’emprisonnement est prévue ‑- et condamnée à un emprisonnement de moins de deux ans, le tribunal peut, s’il est convaincu que le fait de purger la peine au sein de la collectivité ne met pas en danger la sécurité de celle‑ci et est conforme à l’objectif et aux principes visés aux articles 718 à 718.2, ordonner au délinquant de purger sa peine dans la collectivité afin d’y surveiller le comportement de celui‑ci, sous réserve de l’observation des conditions qui lui sont imposées en application de l’article 742.3.
III. L’historique des procédures judiciaires
A. Cour provinciale de la Colombie‑Britannique (motifs justifiant la peine)
7 L’intimé s’est vu infliger sa peine le 31 juillet 1996. À cette date, les modifications apportées à la partie XXIII du Code criminel (Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d’autres lois en conséquence, L.C. 1995, ch. 22 (le «projet de loi C‑41»)), n’étaient pas encore en vigueur. Par conséquent, le juge du procès, le juge MacArthur de la Cour provinciale, n’avait pas la faculté de rendre une ordonnance de sursis à l’emprisonnement.
8 Le juge MacArthur a exposé les principes de la détermination de la peine. Il a affirmé que l’objectif essentiel était la protection du public et qu’une attention particulière devait être accordée à l’objectif de dissuasion générale dans les affaires de contacts sexuels avec des enfants. Il a ajouté que la Cour suprême du Canada avait souligné que l’objectif de dénonciation devait être pris en considération dans le processus de détermination de la peine. Enfin, il a dit qu’il devait tenir compte également de la réinsertion sociale du délinquant.
9 Le juge MacArthur a estimé qu’une peine d’incarcération s’imposait en raison du caractère clairement odieux et répréhensible de la conduite de l’intimé. Le juge a concédé que, quoique relativement limités, les actes de l’intimé avaient néanmoins des effets extrêmement préjudiciables pour une si jeune enfant, particulièrement en raison du rapport de confiance qui existait entre elle et ce dernier. Il a souscrit à la recommandation du ministère public qu’une peine de 18 à 24 mois d’emprisonnement était justifiée. Cependant, tenant compte du fait que l’intimé n’était pas en bonne santé au moment du prononcé de la peine, qu’il n’avait plus de vie sociale, qu’il éprouvait des problèmes conjugaux depuis le dépôt des accusations et qu’il n’avait aucun casier judiciaire, le juge MacArthur l’a condamné à purger concurremment des peines de neuf mois d’emprisonnement pour chacun des chefs d’accusation. Il a recommandé l’incarcération de l’intimé à l’établissement de Stave Lake, afin qu’il puisse participer à un programme de traitement pour délinquants sexuels. Enfin, il a ordonné que la peine d’incarcération soit suivie de deux ans de probation.
B. Cour d’appel de la Colombie‑Britannique (1997), 100 B.C.A.C. 120
10 Le projet de loi C‑41 est entré en vigueur en septembre 1996. Le 29 septembre 1997, la Cour d’appel a confirmé les déclarations de culpabilité prononcées contre l’intimé. Le 12 décembre suivant, elle a accueilli l’appel visant la peine et a substitué une ordonnance de sursis à l’emprisonnement d’une durée de neuf mois à la peine d’incarcération infligée par le juge MacArthur.
11 Le juge Lambert de la Cour d’appel a statué que les nouvelles dispositions établissant l’emprisonnement avec sursis s’appliquaient en l’espèce par l’effet de l’al. 44e) de la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I‑21, et de l’arrêt de notre Cour R. c. Dunn, [1995] 1 R.C.S. 226. Il s’est ensuite interrogé sur l’opportunité d’accorder le sursis à l’intimé. Il a expliqué que, vu les modifications apportées à la loi depuis la détermination initiale de la peine, il n’était pas lié par la norme de retenue généralement appliquée par les cours d’appel lorsqu’elles contrôlent la peine infligée par le juge du procès. Il a conclu qu’il fallait traiter le présent cas comme une affaire dans laquelle le juge du procès a commis une erreur de principe en omettant de tenir compte des nouvelles dispositions de la partie XXIII du Code criminel, et que la Cour d’appel pouvait intervenir et considérer que la peine de l’intimé n’avait pas encore été déterminée.
12 Après avoir résumé les principes énoncés par la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique dans R. c. Ursel (1997), 117 C.C.C. (3d) 289, le juge Lambert a conclu que l’emprisonnement avec sursis permet de répondre aux objectifs de dissuasion générale, de dissuasion spécifique et de dénonciation avec autant, sinon plus d’efficacité que l’incarcération, en particulier si les conditions dont l’ordonnance est assortie sont propices à la réalisation de ces objectifs de la détermination de la peine.
13 Examinant les faits de l’espèce, le juge Lambert a signalé qu’aucune peine minimale d’emprisonnement n’était prévue pour les infractions dont l’intimé avait été reconnu coupable. Après s’être penché sur l’exigence de l’art. 742.1 relative à la durée de l’emprisonnement, le juge Lambert a estimé qu’un emprisonnement de moins de deux ans s’imposait et il a accordé un poids considérable à la peine de neuf mois infligée par le juge du procès. Il s’est dit convaincu que la sécurité de la collectivité ne serait pas mise en danger si l’intimé y purgeait sa peine. Malgré la circonstance aggravante que constituait l’abus de confiance, le juge Lambert a estimé qu’il s’agissait d’un cas où l’octroi du sursis l’emprisonnement était justifié étant donné que l’intimé n’avait pas de casier judiciaire, qu’il n’était pas en bonne santé, qu’il était un travailleur autonome et donc que son entreprise se ressentirait considérablement de son incarcération, que ses relations conjugales étaient tendues et qu’il souffrait déjà socialement des stigmates de sa conduite, facteurs auxquels s’ajoutaient un risque minime de récidive.
14 Le juge Lambert a accueilli l’appel de la sentence et a substitué à la peine initiale une ordonnance de sursis à l’emprisonnement d’une durée de neuf mois assortie des conditions suivantes: participation, sur demande en ce sens de son agent de surveillance, à des séances de counseling, y compris des séances destinées aux délinquants sexuels; interdiction de tout contact ou communication avec la plaignante et sa mère; interdiction de se trouver seul avec un enfant de sexe féminin âgé de moins de 14 ans (sauf en présence d’un adulte responsable); détention à domicile, sous réserve d’exceptions limitées. Le juge Lambert n’a pas modifié l’ordonnance de probation rendue par le juge du procès, précisant qu’elle entrerait en vigueur à la fin de l’ordonnance de sursis.
IV. La question en litige
15 La question en litige dans le présent pourvoi est de savoir si la Cour d’appel a commis une erreur en substituant une ordonnance de sursis à l’emprisonnement à la peine d’incarcération infligée par le juge du procès.
V. L’analyse
A. Bénéfice en appel du régime d’octroi du sursis à l’emprisonnement
16 Pour les raisons que j’ai exposées aux par. 14 à 16 de mes motifs dans l’arrêt R.A.R., précité, l’intimé avait droit en appel au bénéfice de l’application du régime d’octroi du sursis, puisqu’il s’est vu infliger une peine d’emprisonnement de moins de deux ans à l’issue du procès. En conséquence, la Cour d’appel pouvait procéder à nouveau à la détermination de la peine.
B. Application au présent cas des principes énoncés dans l’arrêt Proulx
17 Comme je l’ai expliqué aux par. 17 à 21 de mes motifs dans l’arrêt R.A.R., précité, notre Cour doit faire montre d’une certaine retenue à l’égard des peines infligées par les cours d’appel. Néanmoins, j’estime que notre Cour est justifiée d’intervenir en l’espèce.
18 En toute déférence, je ne crois pas qu’une ordonnance de sursis à l’emprisonnement d’une durée de neuf mois soit une peine appropriée eu égard aux facteurs pertinents à la détermination de la peine, notamment la gravité des infractions et le degré élevé de culpabilité morale de l’intimé. Les actes reprochés sont survenus de façon répétée sur une période d’environ cinq ans. L’intimé a abusé de la confiance d’une très jeune enfant, malgré le fait que la plaignante lui ait clairement indiqué qu’elle n’aimait pas ce qu’il faisait. Il n’a jamais manifesté de remords et il continue de nier les infractions. L’effet dénonciateur produit par une peine d’emprisonnement avec sursis de neuf mois était nettement insuffisant dans les circonstances pour communiquer la répugnance de la société envers les actes de l’intimé, même si sa liberté était restreinte par les conditions assortissant l’ordonnance de sursis. Il convient de rappeler que, même si l’intimé éprouvait des problèmes conjugaux, il bénéficiait néanmoins de l’appui de sa famille, alors que la victime et sa mère étaient ostracisées par celle‑ci.
19 Lorsqu’elle a procédé à nouveau à la détermination de la peine, la Cour d’appel aurait dû reconnaître que la peine relativement clémente de neuf mois d’emprisonnement infligée par le juge MacArthur de la Cour provinciale découlait de la prise en compte par ce dernier de l’état de santé précaire de l’intimé, de ses problèmes conjugaux et des stigmates sociaux de sa conduite, puisque le juge MacArthur s’était par ailleurs montré enclin à accepter la recommandation du ministère public qu’une peine d’incarcération de 18 à 24 mois était justifiée. En condamnant l’intimé à un emprisonnement avec sursis de neuf mois seulement, la Cour d’appel a transformé une peine déjà clémente en une peine inappropriée. J’ajouterais que la Cour d’appel n’avait pas l’obligation de prononcer un emprisonnement avec sursis d’une durée équivalente à celle de la peine d’incarcération infligée par le juge du procès: voir Proulx, précité, au par. 104.
20 Les erreurs commises par la Cour d’appel justifient notre Cour d’intervenir. Le ministère public demande le rétablissement de la peine prononcée par le juge du procès, savoir neuf mois d’incarcération. Je conviens avec le ministère public qu’une peine d’incarcération de neuf mois aurait été appropriée dans les circonstances. Cela dit, une longue peine d’emprisonnement avec sursis assortie de conditions restrictives aurait également pu convenir.
21 Dans les cas où tant une peine d’incarcération que l’emprisonnement avec sursis seraient des peines appropriées, la seconde sanction devrait généralement être imposée. Cette conclusion découle de l’al. 718.2e) du Code criminel, qui précise que toutes les sanctions substitutives applicables qui sont justifiées dans les circonstances doivent être examinées à l’égard de tous les délinquants. Je tiens toutefois à souligner qu’il pourrait survenir des cas où une courte période d’emprisonnement ferme sera préférable à une longue peine d’emprisonnement avec sursis.
22 Je n’ai pas à décider si nous sommes en présence d’un tel cas en l’espèce. L’intimé a terminé de purger entièrement sa peine d’emprisonnement avec sursis en septembre 1998. De plus, dans le cours de ses plaidoiries devant notre Cour, le ministère public a affirmé que, même s’il avait gain de cause, il ne demanderait pas de sanction additionnelle. Par conséquent, que notre Cour prononce une peine d’incarcération ou encore une peine d’emprisonnement avec sursis, cela ne changera rien à la situation de l’intimé. Je suis donc disposé à rendre l’ordonnance demandée par le ministère public. J’accueillerais le pourvoi, je rétablirais la peine d’incarcération de neuf mois infligée par le juge du procès et je surseoirais à l’exécution de la peine d’incarcération de neuf mois.
23 Bien que cette conclusion semble différer de celle que j’ai tirée dans l’affaire L.F.W., précitée, le présent pourvoi se distingue de celle‑ci sous trois rapports. Premièrement, l’ordonnance d’emprisonnement avec sursis rendue dans L.F.W. était considérablement plus longue que l’ordonnance de neuf mois prononcée par la Cour d’appel. Si cette dernière avait prononcé une ordonnance d’une durée beaucoup plus longue, je ne serais pas intervenu étant donné la retenue dont il faut faire montre à l’endroit des peines infligées par les cours d’appel. Deuxièmement, dans L.F.W., il était possible de soutenir que le délinquant était réadapté, comme en témoignait la période de 25 ans qui s’était écoulée sans qu’il ne commette d’autres crimes. Enfin, suivant la norme énoncée dans R. c. M. (C.A.), [1996] 1 R.C.S. 500, au par. 90, et dans Proulx, précité, aux par. 123 à 126, il y avait lieu de faire montre, dans L.F.W., d’une grande retenue à l’égard de la peine d’emprisonnement avec sursis prononcée par le juge du procès (et confirmée par les juges majoritaires de la Cour d’appel). Même s’il convient de faire montre d’une certaine retenue à l’égard de la peine infligée par la Cour d’appel en l’espèce, le degré de retenue applicable n’est pas le même qu’à l’égard des peines prononcées par les juges présidant les procès. Je tiens à ajouter que, dans L.F.W., j’aurais été enclin à infliger une peine d’incarcération, n’eût été de la retenue dont je devais faire montre à l’égard de la peine infligée par le juge du procès (au par. 25).
VI. Le dispositif
24 J’accueillerais le pourvoi, je rétablirais la peine d’incarcération d’une durée de neuf mois infligée par le juge du procès et je surseoirais à l’exécution de cette peine, étant donné que l’intimé a déjà purgé entièrement sa peine d’emprisonnement avec sursis et que le ministère public ne demande pas de sanction additionnelle. L’ordonnance de probation devrait demeurer en vigueur.
Version française des motifs rendus par
25 Le juge L’Heureux‑Dubé — Je suis d’accord avec les motifs exposés par le Juge en chef, sauf en ce qui concerne ses commentaires pour justifier le résultat auquel il arrive dans R. c. L.F.W., [2000] 1 R.C.S. 132, 2000 CSC 6, étant donné ma dissidence dans ce pourvoi.
Version française des motifs rendus par
26 Le juge Gonthier — Je suis d’accord avec les motifs exposés par le Juge en chef, sauf en ce qui concerne ses commentaires pour justifier le résultat auquel il arrive dans R. c. L.F.W., [2000] 1 R.C.S. 132, 2000 CSC 6, étant donné que je souscris aux motifs de dissidence du juge L’Heureux-Dubé dans cette affaire.
Version française des motifs rendus par
27 Le juge McLachlin — Je suis d’accord avec les motifs exposés par le Juge en chef, sauf en ce qui concerne ses commentaires pour justifier le résultat auquel il arrive dans R. c. L.F.W., [2000] 1 R.C.S. 132, 2000 CSC 6, étant donné que je souscris aux motifs de dissidence du juge L’Heureux-Dubé dans cette affaire.
Version française des motifs rendus par
28 Le juge Bastarache — Je suis d’accord avec les motifs exposés par le Juge en chef, sauf en ce qui concerne ses commentaires pour justifier le résultat auquel il arrive dans R. c. L.F.W., [2000] 1 R.C.S. 132, 2000 CSC 6, étant donné que je souscris aux motifs de dissidence du juge L’Heureux‑Dubé dans cette affaire.
Pourvoi accueilli.
Procureur de l’appelante: Le ministère du Procureur général, Vancouver.
Procureur de l’intimé: Bruce Ralston, Surrey (C.-B.).
Procureur de l’intervenant le procureur général du Canada: Le sous-procureur général du Canada, Ottawa.
Procureur de l’intervenant le procureur général de l’Ontario: Le ministère du Procureur général, Toronto.
*Le juge Cory n’a pas pris part au jugement.