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27/02/1992 | CANADA | N°[1992]_1_R.C.S._614

Canada | R. c. Green, [1992] 1 R.C.S. 614 (27 février 1992)


R. c. Green, [1992] 1 R.C.S. 614

Sa Majesté la Reine Appelante

c.

John Herbert Green Intimé

Répertorié: R. c. Green

No du greffe: 22277.

1992: 7 février; 1992: 27 février.

Présents: Les juges La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory, Stevenson et Iacobucci.

en appel de la cour suprême de la nouvelle‑écosse, section d'appel

Droit criminel — Ordre de fournir des échantillons de sang — L'ordre doit‑il comprendre les garanties que les échantillons de sang ne seront prélevés que par un médecin qualifiÃ

© ou sous sa direction et ne mettront pas en danger la vie ou la santé de la personne visée? — Code criminel, L.R.C. (1985), ch...

R. c. Green, [1992] 1 R.C.S. 614

Sa Majesté la Reine Appelante

c.

John Herbert Green Intimé

Répertorié: R. c. Green

No du greffe: 22277.

1992: 7 février; 1992: 27 février.

Présents: Les juges La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Gonthier, Cory, Stevenson et Iacobucci.

en appel de la cour suprême de la nouvelle‑écosse, section d'appel

Droit criminel — Ordre de fournir des échantillons de sang — L'ordre doit‑il comprendre les garanties que les échantillons de sang ne seront prélevés que par un médecin qualifié ou sous sa direction et ne mettront pas en danger la vie ou la santé de la personne visée? — Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46, art. 254(3), (4), (5).

L'accusé a été impliqué dans un accident de la circulation et a subi plusieurs blessures. À l'hôpital où il a été conduit pour recevoir des soins, un agent de police l'a informé de son droit de retenir sans délai les services d'un avocat. L'agent, qui avait des motifs raisonnables de croire que l'accusé avait bu, lui a donné l'ordre de fournir des échantillons de sang en vertu du par. 254(3) du Code criminel. L'ordre n'énonçait pas les garanties prévues au par. 254(4) selon lesquelles les échantillons de sang ne seront prélevés que par un médecin qualifié ou sous sa direction et ces prélèvements ne risqueront pas de mettre en danger la vie ou la santé de la personne visée. L'accusé a refusé et a été accusé de refus de fournir des échantillons de sang en contravention du par. 254(5). Il a été acquitté à son procès et la Cour d'appel a confirmé son acquittement.

Arrêt: Le pourvoi est rejeté.

L'ordre de fournir un échantillon de sang donné par un agent de la paix en vertu du par. 254(3) du Code doit énoncer les garanties prévues au par. 254(4) selon lesquelles les échantillons de sang ne seront prélevés que par un médecin qualifié ou sous sa direction et ces prélèvements ne risqueront pas de mettre en danger la vie ou la santé de la personne. Puisque l'ordre donné à l'accusé n'a pas été valablement donné en vertu du par. 254(3), il ne peut pas être reconnu coupable, en vertu du par. 254(5), de refus d'obtempérer à un ordre donné en vertu de l'art. 254.

Lois et règlements cités

Charte canadienne des droits et libertés, art. 10b).

Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46 [mod. ch. 27 (1er suppl.), art. 36], art. 254(3) [mod. ch. 1 (4e suppl.), art. 18 (ann. I, no 6)], (4), (5).

POURVOI contre un arrêt de la Cour suprême de la Nouvelle‑Écosse (1990), 100 N.S.R. (2d) 82, 272 A.P.R. 82, 60 C.C.C. (3d) 362, 25 M.V.R. (2d) 281, qui a rejeté l'appel du ministère public contre l'acquittement de l'accusé relativement à l'accusation de refus d'obtempérer à un ordre de fournir un échantillon de sang. Pourvoi rejeté.

Robert C. Hagell, pour l'appelante.

Douglas L. MacLellan, c.r., et Maurice G. Smith, pour l'intimé.

Version française du jugement de la Cour rendu par

Le juge La Forest — Le 25 juin 1989, l'intimé a été impliqué dans un accident concernant une seule voiture. Il a subi plusieurs blessures, dont une coupure au front et une fracture du fémur au‑dessus du genou droit. Les ambulanciers ont perçu une odeur d'alcool émanant de l'intimé. Il leur a dit avoir bu. L'intimé a été conduit à l'hôpital pour y recevoir des soins. Lorsque les ambulanciers ont quitté la salle d'examen, ils ont parlé au caporal Holmes de la G.R.C. Celui‑ci est entré dans la salle d'examen et a parlé à l'intimé, qui se plaignait de douleurs à la jambe. Le caporal Holmes a informé l'intimé de son droit de retenir sans délai les services d'un avocat. Il lui a alors lu l'ordre suivant:

[traduction] Je vous ordonne de fournir les échantillons de sang qui, de l'avis du médecin ou du technicien qualifié qui fera les prélèvements, sont nécessaires pour déterminer votre alcoolémie. Si vous refusez d'obéir à mon ordre, vous serez accusé de refus de fournir un échantillon.

L'intimé a refusé d'obtempérer à l'ordre donné. Il a été accusé de refus de fournir des échantillons de sang en contravention du par. 254(5) du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46.

L'intimé a été acquitté à son procès en Cour provinciale de la Nouvelle‑Écosse. L'appel interjeté par le ministère public a été rejeté par la Section d'appel de la Cour suprême de la Nouvelle‑Écosse: (1990), 100 N.S.R. (2d) 82, 272 A.P.R. 82, 60 C.C.C. (3d) 362, 25 M.V.R. (2d) 281. Notre Cour a ensuite accordé une autorisation de pourvoi, [1991] 1 R.C.S. xiii.

Voici les dispositions pertinentes du Code:

254. . . .

(3) L'agent de la paix qui a des motifs raisonnables de croire qu'une personne est en train de commettre, ou a commis au cours des deux heures précédentes, par suite d'absorption d'alcool, une infraction à l'article 253 peut lui ordonner immédiatement ou dès que possible de lui fournir immédiatement ou dès que possible les échantillons suivants:

a) soit les échantillons d'haleine qui de l'avis d'un technicien qualifié sont nécessaires à une analyse convenable pour permettre de déterminer son alcoolémie;

b) soit les échantillons de sang suivant le paragraphe (4), qui, de l'avis d'un technicien ou d'un médecin qualifiés sont nécessaires à l'analyse convenable pour permettre de déterminer son alcoolémie, dans le cas où l'agent de la paix a des motifs raisonnables de croire qu'à cause de l'état physique de cette personne, une de ces conditions se présente:

(i) celle‑ci peut être incapable de fournir un échantillon d'haleine,

(ii) le prélèvement d'un échantillon d'haleine ne serait pas facilement réalisable.

Aux fins de prélever les échantillons de sang ou d'haleine, l'agent de la paix peut ordonner à cette personne de le suivre.

(4) Les échantillons de sang ne peuvent être prélevés d'une personne à la suite d'un ordre de l'agent de la paix en vertu du paragraphe (3) que par un médecin qualifié ou sous sa direction et à la condition qu'il soit convaincu que ces prélèvements ne risquent pas de mettre en danger la vie ou la santé de cette personne.

(5) Commet une infraction quiconque, sans excuse raisonnable, fait défaut ou refuse d'obtempérer à un ordre que lui donne un agent de la paix en vertu du présent article.

La présente affaire soulève la question de savoir si l'ordre de fournir un échantillon de sang faite par un agent de la paix en vertu du par. 254(3) doit comprendre les garanties prévues au par. 254(4) selon lesquelles les échantillons de sang ne seront prélevés que par un médecin qualifié ou sous sa direction et à la condition qu'il soit convaincu que ces prélèvements ne risqueront pas de mettre en danger la vie ou la santé du patient. En d'autres mots, elle soulève la question de savoir si l'expression "suivant le paragraphe (4)", qui figure au par. 254(3), devrait être interprétée comme décrivant ce que l'ordre devrait contenir. À mon avis, elle devrait l'être. Sinon, l'expression serait superflue. Le but recherché par le législateur paraît être de dissiper la crainte que la procédure suivie ne soit pas appropriée ou soit confiée à des personnes non qualifiées. Le danger dans un tel cas est qu'une personne puisse être incitée à refuser le prélèvement de l'échantillon pour des raisons de ce genre. Alors qu'un détenu a le droit de recourir aux services d'un avocat en vertu de l'al. 10b) de la Charte canadienne des droits et libertés, il faut se rappeler que l'échantillon de sang, contrairement à l'échantillon d'haleine, peut être prélevé dans des circonstances où une personne est tout particulièrement vulnérable. Enfin, si le par. 254(3) n'est pas un modèle de clarté, toute ambiguïté devrait être résolue en faveur de l'accusé. Puisque l'ordre donné à l'intimé n'a pas été valablement donné en vertu du par. 254(3) ainsi interprété, l'intimé ne peut pas être reconnu coupable en vertu du par. 254(5) de refus d'obtempérer à un ordre donné en vertu de l'art. 254.

Je souligne qu'à la suite des décisions des cours d'instance inférieure, la G.R.C. a distribué de nouvelles cartes sur lesquelles le texte de l'ordre antérieur est complété par la phrase suivante:

[traduction] Les prélèvements d'échantillons de sang ne seront effectués que par un médecin qualifié ou sous la supervision de celui‑ci, s'il est d'avis que les prélèvements ne risquent pas de mettre en danger votre vie ou votre santé.

Un ordre ainsi libellé serait, à mon avis, conforme aux exigences du par. 254(3).

Le pourvoi est donc rejeté.

Pourvoi rejeté.

Procureur de l'appelante: Le procureur général de la Nouvelle‑Écosse, Halifax.

Procureurs de l'intimé: Douglas L. MacLellan et Maurice G. Smith, Antigonish.


Synthèse
Référence neutre : [1992] 1 R.C.S. 614 ?
Date de la décision : 27/02/1992

Parties
Demandeurs : Sa Majesté la Reine
Défendeurs : Green
Proposition de citation de la décision: R. c. Green, [1992] 1 R.C.S. 614 (27 février 1992)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1992-02-27;.1992..1.r.c.s..614 ?
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