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16/05/1991 | CANADA | N°[1991]_1_R.C.S._1059

Canada | Banque Nationale du Canada c. Atomic Slipper Co., [1991] 1 R.C.S. 1059 (16 mai 1991)


Banque Nationale du Canada c. Atomic Slipper Co., [1991] 1 R.C.S. 1059

Banque Nationale du Canada Appelante

c.

Atomic Slipper Co. Ltd. et Gabriel Tardi Intimés

et

Le registrateur de la division d'enregistrement

de Montréal Mis en cause

et

L'Association des banquiers canadiens Intervenant

et entre

Atomic Slipper Co. Ltd. et Gabriel Tardi Appelants

c.

Banque Nationale du Canada Intimée

et

Le registrateur de la division d'enregistrement

de Montréal Mis en cause

Répertorié: Banque

Nationale du Canada c. Atomic Slipper Co.

Nos du greffe: 21177, 21190.

1991: 28 janvier; 1991: 16 mai.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juge...

Banque Nationale du Canada c. Atomic Slipper Co., [1991] 1 R.C.S. 1059

Banque Nationale du Canada Appelante

c.

Atomic Slipper Co. Ltd. et Gabriel Tardi Intimés

et

Le registrateur de la division d'enregistrement

de Montréal Mis en cause

et

L'Association des banquiers canadiens Intervenant

et entre

Atomic Slipper Co. Ltd. et Gabriel Tardi Appelants

c.

Banque Nationale du Canada Intimée

et

Le registrateur de la division d'enregistrement

de Montréal Mis en cause

Répertorié: Banque Nationale du Canada c. Atomic Slipper Co.

Nos du greffe: 21177, 21190.

1991: 28 janvier; 1991: 16 mai.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges La Forest, Gonthier, Stevenson et Iacobucci.

en appel de la cour d'appel du québec

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel du Québec, [1988] R.J.Q. 2087, 16 Q.A.C. 56*, 53 D.L.R. (4th) 703, 70 C.B.R. (N.S.) 1, qui a infirmé un jugement de la Cour supérieure, J.E. 84‑945. Pourvoi accueilli et pourvoi incident rejeté.

Michel Deschamps et Maurice LeBel, pour la Banque Nationale du Canada.

Gabriel Tardi, pour lui même et pour Atomic Slipper Co.

P. Wilbrod Gauthier, c.r., pour l'intervenant.

//Le juge Gonthier//

Le jugement de la Cour a été rendu par

Le juge Gonthier -- Il s'agit d'une action en remboursement de prêts consentis par une banque et assortis entre autres de garanties selon les art. 88 et 89 de la Loi sur les banques, S.R.C. 1970, ch. B-1 (aujourd'hui les art. 178 et 179 de la Loi sur les banques, L.R.C. (1985), ch. B-1). Le jugement de la Cour supérieure du Québec accueillant l'action a été infirmé par la Cour d'appel. Les deux parties se pourvoient contre cette dernière décision. Le litige soulève principalement la validité d'une convention entre un débiteur et une banque pour régir les modalités de la prise de possession et de la vente de marchandises données en garantie.

I -- Faits et procédures

Atomic Slipper Co. Ltd. ("Atomic") était en 1979, une entreprise manufacturière de pantoufles dont le président et principal actionnaire était le coïntimé dans l'appel principal, Gabriel Tardi ("Tardi"). Depuis 1950, le banquier d'Atomic était la Banque Provinciale du Canada, banque à laquelle l'appelante, Banque Nationale du Canada (la "Banque"), a succédé.

Depuis plusieurs années, la Banque assurait les besoins en financement d'Atomic, par un crédit utilisable sous forme d'avances remboursables à demande. Pour couvrir le crédit, la Banque détenait une garantie sur les stocks d'Atomic, en vertu de l'art. 88 de la Loi sur les banques. Tardi avait de plus cautionné personnellement jusqu'à concurrence de 650 000 $, les obligations d'Atomic envers la Banque et il avait garanti ce cautionnement au moyen d'une hypothèque sur deux immeubles.

Entre 1975 et 1979, la Banque commence à s'inquiéter de la baisse des ventes et demande à Atomic de réduire ses stocks. Le 8 février 1979, la dette de l'entreprise s'élève à environ 600 000 $ et c'est à ce moment que la Banque demande à Atomic et à Tardi de fournir de nouvelles garanties. N'ayant satisfait que partiellement à cette demande, Atomic et Tardi reçoivent, le 17 avril 1979, une lettre où la Banque propose aux emprunteurs de se chercher un nouveau banquier. Les débiteurs refusent et le 8 juin 1979, la Banque demande paiement du montant dû dans les 10 jours.

Le 19 juin 1979, paiement n'ayant pas été obtenu, la Banque donne mandat à une firme de comptables agréés Clarkson, Gordon Co. ("Clarkson") de la représenter dans la réalisation des garanties. Le 20 juin, les représentants de Clarkson se présentent à l'établissement d'Atomic aux fins de signifier à Tardi la décision de la Banque et procéder à l'inventaire des biens mis en garantie. Tardi répond qu'il procédera lui-même au décompte. Le lendemain et le surlendemain, Tardi écrit à la Banque deux lettres dans lesquelles il reconnaît à celle-ci le droit de prendre possession des inventaires mais ajoute qu'il n'autorise pas Clarkson à utiliser l'établissement d'Atomic pour disposer des inventaires mais qu'il expédiera ceux-ci à Clarkson aux frais de la Banque.

Une première expédition a lieu le 29 juin 1979, un vendredi après-midi, alors que Clarkson apprend qu'un camion est en route pour livrer un chargement de pantoufles à ses bureaux, au 20e étage d'un édifice situé au centre-ville de Montréal, à l'angle de l'avenue University et du boulevard René-Lévesque. Clarkson fait alors des démarches pour trouver un local, où le chargement est finalement entreposé le 4 juillet 1979. Des expéditions semblables suivent jusqu'au mois d'août 1979; à chaque fois, Tardi refuse d'indiquer à l'avance les dates de ces expéditions.

Clarkson fait publier des avis de demandes de soumissions dans les journaux. De plus, il invite individuellement des détaillants en chaussures à faire des offres. Les biens sont alors vendus pour 210 555 $, soit le montant de l'offre la plus élevée. Déduction faite des frais encourus, le montant net reçu par la Banque est de 182 825 $.

Par la suite, la Banque intente une action contre Atomic et Tardi pour leur réclamer le solde dû, soit 475 194,16 $ plus les intérêts. L'action de la Banque comporte aussi des conclusions hypothécaires à l'égard de Tardi, dont le cautionnement était partiellement garanti par une hypothèque sur deux de ses immeubles. En première instance, les défendeurs plaident surtout que les délais de paiement consentis par la Banque n'étaient pas raisonnables.

II -- Décisions des instances inférieures

Cour supérieure, J.E. 84-945

Le juge Hannan, après examen de la preuve entourant les emprunts de part et d'autre, conclut qu'Atomic devait à la Banque, après déduction du crédit de 182 825 $, valeur nette réalisée des biens saisis, la somme de 452 512,32 $ en capital ainsi que les intérêts. Il considère que Tardi est responsable de ces mêmes montants, en vertu de lettres de cautionnement et que les hypothèques consenties par Tardi sont exécutoires par la Banque.

Statuant sur les défenses soulevées par Atomic et Tardi, il conclut selon la preuve que la Banque n'a pas agi malicieusement et a accordé un délai raisonnable pour l'acquittement des dettes. Il établit que le par. 89(4) de la Loi sur les banques donne le pouvoir à la Banque de vendre les biens donnés en garantie en vertu de l'art. 88 et il considère qu'Atomic et Tardi ont renoncé aux avis prévus par le par. 89(4).

Il traite ensuite des reproches faits à la Banque quant à la réalisation de la valeur des marchandises vendues. Il note que Tardi et Atomic n'ont pas coopéré avec Clarkson dans l'expédition des biens. Il considère que les procédures entourant la vente des biens étaient adéquates eu égard aux circonstances et à l'attitude de Tardi, et ne trouve rien à reprocher à la Banque dans sa façon d'agir.

Examinant la valeur de l'inventaire, le juge Hannan souligne qu'une des causes de l'insatisfaction de la Banque envers les opérations d'Atomic, était les doutes qu'elle éprouvait face aux représentations de Tardi sur la valeur de l'inventaire. Il fait remarquer que non seulement on avait attribué à l'inventaire sur lequel la Banque avait des droits, une valeur gonflée, mais que celui-ci semblait être invendable par Atomic dans le cours ordinaire de ses affaires. Le juge Hannan déclare en outre que le fardeau de prouver une valeur supérieure au prix obtenu reposait sur Atomic et Tardi qui ne s'en sont pas acquittés. Il constate aussi l'absence d'indications démontrant que le prix accepté était si bas qu'il constituait à lui seul la preuve d'une fraude ou d'actes non conformes à l'usage. Il rejette donc la demande reconventionnelle.

En conclusion, il condamne Tardi et Atomic conjointement et solidairement à payer à la Banque la somme de 475 194,16 $, comprenant capital et intérêts au 30 octobre 1979, avec intérêts depuis. Il déclare hypothéqués en faveur de la Banque deux immeubles de Tardi jusqu'à concurrence de 172 681,84 $ avec intérêts depuis le 19 juin 1979.

Cour d'appel, [1988] R.J.Q. 2087 (les juges Monet, Malouf et Landry (ad hoc))

En Cour d'appel, Atomic et Tardi soutiennent que la Banque n'a aucun pouvoir de prendre possession des marchandises accordées en garantie selon l'al. 88(1)b) de la Loi sur les banques. Ils réitèrent qu'ils n'ont pas reçu d'avis adéquat et que la Banque a agi de manière négligente dans la réalisation des garanties. Pour sa part, tout en contestant les allégations de Tardi, la Banque souligne que ce dernier s'est lui-même chargé de livrer les biens chez les représentants de la Banque.

Le juge Malouf s'interroge sur les pouvoirs de la Banque de prendre possession des biens sans préalablement obtenir une autorisation judiciaire. Il note d'abord que la Loi sur les banques doit être interprétée seulement à la lumière de ses dispositions sans référer au droit provincial et qu'elle nécessite une interprétation restrictive eu égard aux pouvoirs extraordinaires qu'elle procure. Il soutient qu'en promulguant le par. 88(3), le Parlement a établi en termes clairs que les pouvoirs spéciaux qui y sont inscrits ne sont pas applicables aux garanties données en vertu des al. 88(1)a) et 88(1)b). La Banque ne pouvait donc s'autoriser de la Loi pour prendre possession des inventaires.

Quant aux conventions attributives d'un pouvoir de saisie intervenues entre la Banque et les débiteurs, le juge Malouf précise que la dernière convention de 1976 n'a été signée que par Tardi personnellement et ne lie pas Atomic. Il refuse de plus, de donner une application continue au document signé par Atomic et Tardi en 1975. Selon la Cour d'appel, aucune des conventions citées au dossier n'a d'application. De plus, le juge Malouf souligne que lesdites conventions sont sans effet puisqu'il est contraire à l'ordre public de se faire justice à soi-même et que la Banque ne saurait s'accorder le pouvoir de faire indirectement ce que la loi ne lui permet pas de faire directement.

Il note que le document signé le 8 juillet 1978 était une demande de marge de crédit au montant de 700 000 $, en vigueur jusqu'à la date du 8 juillet 1979. Tout en considérant que la Banque n'était pas obligée d'accorder à Atomic la marge de crédit réclamée, il déclare qu'en avançant des sommes en vertu de ce document, la Banque a accepté la demande ou du moins a induit l'emprunteur à croire qu'elle l'acceptait et que le crédit était disponible jusqu'au 8 juillet 1979. Il en conclut que la Banque a agi sans droit en réclamant le paiement total le 9 juin 1979.

Quant à la valeur des biens réalisés par la Banque, le juge Malouf remarque que la Banque a, par l'entremise de ses agents, obtenu approximativement 3 $ par paire de pantoufles. Comme les registres soumis indiquent qu'Atomic aurait été capable de disposer de ces pantoufles dans le cours de ses affaires pour une somme de 4,80 $ la paire, et que la Banque avait mal agi en réclamant paiement, il accorde crédit à la compagnie au taux de 4,80 $ la paire. Atomic et Tardi sont donc condamnés à payer à la Banque, la somme de 76 804 $ avec les intérêts.

Le 21 octobre 1988, le juge Malouf rend un jugement en rectification. Il avait omis en créditant Atomic pour les biens saisis, de tenir compte du fait que la Banque avait déjà soustrait de la dette de la compagnie, la somme de 182 825 $, à même les profits nets de la vente des pantoufles. D'autres questions mineures sont rectifiées, avec le résultat que Tardi et Atomic sont condamnés conjointement et solidairement à payer 256 129,16 $.

III -- Les dispositions législatives pertinentes

Loi sur les banques, S.R.C. 1970, ch. B-1

88. (1) La banque peut prêter de l'argent et consentir des avances

. . .

b) à toute personne faisant des affaires en qualité de fabricant, sur la garantie d'effets, denrées et marchandises qu'elle fabrique ou produit ou qui sont obtenus pour cette fabrication ou production, et sur celle des effets, denrées et marchandises utilisés ou fournis pour l'emballage des effets, denrées et marchandises ainsi fabriqués ou produits;

. . .

et la garantie peut être donnée au moyen de la signature et de la remise à la banque, par ou pour la personne donnant la garantie, d'un document en la forme énoncée à l'annexe appropriée ou en une forme équivalente.

. . .

(3) Lorsqu'une garantie sur des biens est donnée à la banque aux termes de l'alinéa (1)c), d), e), f), g), h) ou i), la banque, en sus de tous autres droits ou pouvoirs qui lui sont dévolus ou conférés, et sans les limiter, a plein pouvoir, droit et autorité, par l'intermédiaire de ses fonctionnaires, employés ou mandataires, en cas

a) de non-paiement de l'un quelconque des prêts ou avances pour lesquels cette garantie a été donnée,

b) d'omission de prendre soin ou de faire la moisson de quelque récolte, ou de prendre soin d'animaux de ferme, affectés à la garantie,

c) d'omission de prendre soin de biens sur lesquels une garantie est donnée aux termes de l'alinéa (1)f), g), h) ou i),

d) de tentative, sans le consentement de la banque, de disposer de biens affectés à la garantie, ou

e) de saisie de biens affectés à la garantie,

de prendre possession des biens affectés à la garantie ou de les saisir, et, à l'égard d'une récolte, d'en prendre soin et d'en faire la moisson ou d'en battre le grain, et, à l'égard d'animaux de ferme, d'en prendre soin; et elle a le droit et l'autorité de pénétrer sur le terrain ou dans les locaux, lorsque la chose est nécessaire à l'une quelconque de ces fins, et de détacher et d'enlever ces biens, sauf les fils, conduits ou tuyaux incorporés à un bâtiment, de tous biens immeubles auxquels ils sont fixés.

89. . . .

(4) En cas de non-paiement d'une dette, d'un engagement, d'un prêt ou d'une avance, en garantie du paiement desquels la banque a acquis et détient un récépissé d'entrepôt ou un connaissement, ou a pris quelque garantie prévue à l'article 88, la banque peut vendre la totalité ou une partie des biens y mentionnés ou visés de ce chef et imputer le produit à la dette, l'engagement, le prêt ou l'avance avec intérêts et frais, en en remettant le surplus, s'il en est, à la personne qui a donné cette garantie; mais le pouvoir de vente en question, à moins que cette personne n'ait consenti à leur vente autrement qu'en conformité des présentes, doit être exercé sous réserve des dispositions suivantes, savoir:

a) toute vente de ces biens, autres que les animaux de ferme, doit se faire aux enchères publiques après

(i) que l'avis des temps et lieu de la vente a été envoyé par courrier recommandé à l'adresse inscrite de la personne qui a donné la garantie, au moins dix jours avant la vente, dans le cas de biens de ce genre autres que les produits de la forêt, et au moins trente jours avant la vente, dans le cas de biens de ce genre consistant en produits de la forêt, et

(ii) que l'annonce de la vente a paru, au moins deux jours avant cette vente, dans au moins deux journaux publiés dans l'endroit où la vente doit avoir lieu, ou le plus près de cet endroit, énonçant les temps et lieu de ladite vente; et si la vente a lieu dans la province de Québec, au moins l'un de ces journaux doit être un journal publié en langue anglaise, et un autre, en langue française;

148. Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement d'au plus deux ans, quiconque, ayant la possession ou le contrôle de biens mentionnés ou couverts par un récépissé d'entrepôt, un connaissement ou affectés à une garantie donnée à la banque sous le régime de l'article 88, et ayant connaissance de ce récépissé ou connaissement ou de cette garantie, sans le consentement écrit de la banque, avant que le prêt, l'avance, la dette ou l'engagement ainsi garanti ait été complètement acquitté,

a) volontairement dispose ou se dessaisit de tels biens, ou

b) volontairement soustrait à la possession de la banque de tels biens, si la banque réclame formellement cette possession après qu'il a omis d'acquitter le prêt, l'avance, la dette ou l'engagement.

IV -- Les questions en litige

Il y a deux pourvois dans cette affaire. Le pourvoi principal de la Banque pose la question de la validité de la prise de possession et du défaut de la compagnie envers la Banque. Le pourvoi incident d'Atomic et de Tardi porte sur la valeur attribuée aux inventaires et allègue un préjudice subi par les actes de la Banque. Atomic et Tardi, appelants incidents, ajoutent de nouvelles questions à celles que notre Cour a accepté d'entendre.

À titre préliminaire, je dois noter que Tardi et Atomic ne sont pas représentés par avocat. Tardi peut fort bien plaider en son nom mais il prétend vouloir représenter Atomic. La qualité même de corporation s'oppose à ce qu'elle comparaisse en personne (art. 365 C.c.B.-C.). Elle ne peut plaider que par mandataire. Or, au Québec, seuls les avocats ont le droit de représenter une partie à l'instance (art. 61 C.p.c. et l'art. 128 de la Loi sur le Barreau, L.R.Q., ch. B-1) et il s'ensuit qu'une corporation ne peut ester en justice que par ministère d'avocat (Thomassin v. General Finance Corp., [1953] B.R. 375). Devant notre Cour on ne saurait donc considérer valable la représentation d'une corporation autrement que par un membre en règle du Barreau. Tardi a un intérêt à titre de caution pour traiter de la question principale mais il nous faut considérer qu'Atomic n'a pas comparu valablement au dossier dans le pourvoi principal et n'a pas valablement porté appel dans le pourvoi incident.

Je traiterai des questions principales et incidentes dans l'ordre suivant:

1. Atomic était-elle en défaut envers la Banque?

2. La Banque avait-elle le droit de prendre possession de l'inventaire sans obtenir d'abord une autorisation judiciaire?

3. Quel est le montant dont Atomic et Tardi sont en droit d'obtenir crédit de la part de la Banque pour la valeur de l'inventaire?

4. Atomic et Tardi sont-ils en droit d'être indemnisés pour le préjudice allégué, soit perte de profit, dommages à la réputation, troubles et inconvénients?

5. Qu'en est-il des réclamations entièrement nouvelles de Tardi?

V -- Analyse

1. Atomic était-elle en défaut?

Le juge de première instance a conclu qu'Atomic était clairement en défaut compte tenu du fait que les avances disponibles étaient consenties en vertu de billets promissoires payables à demande. Or, en pareil cas, la seule question à déterminer pour conclure que le débiteur est en défaut est de savoir si le créancier lui a donné un délai raisonnable pour s'exécuter (Houle c. Banque Canadienne Nationale, [1990] 3 R.C.S. 122). Le juge Hannan traite longuement de cette question et juge que les délais étaient plus que raisonnables, d'autant plus qu'Atomic n'a pas respecté un engagement du 8 février 1979 en vue de réduire sa dette et d'accorder des garanties additionnelles à la Banque.

Toutefois, la Cour d'appel estime que la Banque ne pouvait rappeler son prêt avant le 8 juillet 1979 parce qu'elle avait accordé son crédit jusqu'à cette date. Il faut se garder de confondre les billets promissoires et les derniers documents de garantie signés par Atomic qui prévoyaient que la garantie vaudrait pour toutes les avances pouvant être faites jusqu'au 8 juillet 1979. La période d'un an mentionnée sur les documents de garantie ne fait pas perdre au billet promissoire sa véritable nature et ne le transforme pas en emprunt à terme. Y. Goldstein écrit à ce sujet:

[traduction] De même, on doit s'inquiéter de l'analyse que fait le tribunal des documents types prévus à l'art. 178 et qui l'amène à conclure que le délai (habituellement un an) qui est toujours mentionné dans les documents signifie que le prêt garanti aux termes de l'art. 178 devient, en fait, un prêt à terme, perdant sa nature de prêt à vue et rendant virtuellement impossible de recourir à l'art. 178 à titre de disposition prévoyant une garantie convenable lorsque le prêt est remboursable sur demande. Il se peut qu'on n'ait pas porté à l'attention du tribunal le fait que cette disposition a essentiellement pour but d'assurer le renouvellement requis de l'enregistrement plutôt que de modifier la nature du prêt.

(Note sur Atomic Slipper Co. v. Banque Nat. du Can. (1988), 70 C.B.R. (N.S.) 1, à la p. 3.)

Dans les faits, le crédit avait cessé d'être en vigueur le 31 décembre 1978 et ne fut pas renouvelé en 1979. Ceci apparaît nettement des lettres de Tardi, demandant le rétablissement de son crédit, au début de 1979 ainsi que de certains témoignages versés au dossier. On peut lire ce commentaire du juge Hannan, dans la décision de première instance:

[traduction] Le 13 septembre 1978, la Banque, vu l'absence d'états financiers, a recommandé de ne pas renouveler le crédit autorisé jusqu'à cette date (D-15). Ce fait a été communiqué à Atomic et à M. Tardi par M. Bleau, le directeur de la succursale de la Banque. Le 10 janvier 1979, la Banque a refusé toute avance supplémentaire à Atomic, à la connaissance d'Atomic et de M. Tardi. Le 26 janvier 1979, M. Tardi a offert (D-35) de s'occuper de la vente des biens-fonds hypothéqués en faveur de la Banque et a demandé l'appui du président M. Lavoie.

Même en supposant que la Banque se serait engagée à maintenir le crédit jusqu'en juillet 1979, cet engagement aurait été conditionnel aux exigences du crédit. Or, à cet égard, la preuve révèle que les stocks n'avaient pas la valeur que Tardi leur attribuait. Le juge Hannan écrit:

[traduction] La preuve indique qu'en 1965 Atomic avait évalué son inventaire à la fin de l'année à 125 032 $, et que, cette année-là, elle avait réalisé des ventes globales de 509 883 $. En 1979, la valeur de son inventaire avait, dit-on, augmenté à la fin de l'année à 701 354 $ et, cette année-là, elle avait réalisé des ventes de 436 195 $ (P-16). La banque avait conclu que les ventes ne justifiaient pas la production ou que l'inventaire avait été surévalué même s'il était considéré sur la base de son coût, plutôt que, comme l'a laissé entendre M. Tardi dans ses diverses lettres, sur la base du montant plus élevé qu'il espérait tirer de sa vente. (Voir Bleau, 10 février 1984, pp. 99 et suiv.). L'augmentation de la valeur de l'inventaire de 161 pour 100, alors qu'il y avait eu une chute des ventes de 15 pour 100 pendant la période du 31 décembre 1965 au 31 décembre 1978, indiquait que l'inventaire était de toute évidence devenu impossible à gérer et par conséquent peu fiable à titre de garantie pour les avances faites par la Banque. La Banque a perdu confiance dans la valeur qu'Atomic attribuait à l'inventaire.

Le juge de première instance a établi que Tardi exagérait la valeur des inventaires d'Atomic. Il explique ainsi la méthode de calcul mise au point par Tardi:

[traduction] La procédure adoptée par Atomic pour attester la valeur de son inventaire consistait à faire état du prix de revient selon un prix augmenté à tous les mois de janvier par M. Tardi (témoignage de Jean Lalonde). Monsieur Tardi a lui-même expliqué qu'il est arrivé au "prix" indiqué à la Banque par l'utilisation d'un "tableau" qui lui permettait de calculer et ajouter 20 pour 100 au prix de revient ainsi que 25 pour 100 au prix de vente pour établir un "nouveau" prix de revient. Il est apparu essentiellement que, par cette méthode, on a simplement ajouté à un prix de vente proposé un montant d'environ 20 pour 100 de ce prix pour obtenir un nouveau "prix de revient". L'augmentation de ce prix ne peut être qu'estimative, mais il ressort d'une comparaison des états de l'inventaire P-9, du 31 décembre 1977, et de l'inventaire P-10, du 31 décembre 1978, que la valeur de la catégorie de produits désignés "Opera and Mule shearline lined slippers", dont la quantité est presque identique chaque année, a été augmentée, le "prix de revient" de ces produits étant haussé de 30 pour 100. Des comparaisons semblables pour d'autres catégories indiquées sur ces pièces révèlent des augmentations de "prix" de 30 à 34 pour 100 à l'égard de ce qui paraît être les mêmes marchandises.

D'après cet examen et l'ensemble de la preuve, il est évident que la valeur de l'inventaire assujetti aux droits de la Banque a été gonflée et qu'il n'est pas vendable par Atomic dans le cours ordinaire de ses affaires.

L'augmentation des inventaires jumelée à une baisse des ventes, a sérieusement inquiété la Banque et c'est pourquoi elle a réclamé de Tardi et d'Atomic, une réduction des emprunts et une concession de garanties additionnelles. Les débiteurs, après avoir accepté, ont refusé de s'y conformer. Ainsi, la Banque était justifiée de réclamer paiement et compte tenu de la nature des emprunts et de la preuve présentée, a accordé un délai amplement suffisant à ses débiteurs pour s'exécuter. Le juge du procès fait une étude fouillée de la preuve et il n'y a pas lieu de revenir sur l'appréciation qu'il en fait.

2.La Banque avait-elle le droit de prendre possession de l'inventaire sans obtenir une autorisation judiciaire?

La question principale soulevée en Cour d'appel concernait le pouvoir de la Banque de saisir et de prendre possession de garanties données en vertu de l'al. 88(1)b) sans préalablement obtenir une autorisation judiciaire. Le juge Hannan en première instance n'a pas traité spécifiquement de cette question pour décider du litige.

Il ne sera pas nécessaire de répondre à la question de savoir si la garantie accordée en vertu de la Loi sur les banques confère de plein droit à une banque ce pouvoir de prendre possession, sans autorisation judiciaire, d'inventaires donnés en garantie par un fabricant, au cas où ce dernier est en défaut envers la Banque. En effet, dans le cas sous étude, il existait une convention réglant cette question. Le consentement du débiteur à l'enlèvement et à la vente des biens et l'applicabilité d'une convention valable suffisent à décider du litige.

(1)La Banque a-t-elle pris possession de l'inventaire avec le consentement d'Atomic et Tardi?

Il semble que la conclusion de la Cour d'appel, quant à l'invalidité de la prise de possession par la Banque, soit fondée sur une absence de consentement de Tardi à remettre les biens à son créancier. Cependant, nulle part dans ses motifs le juge Malouf ne fait état de faits démontrant l'opposition de Tardi à la prise de possession; il semble l'inférer des circonstances et la prendre pour acquise. La Cour d'appel sous la plume du juge Gendreau a subséquemment fait état dans Rosemex Inc. c. Banque de Montréal, [1990] R.J.Q. 344, à la p. 349 (décision à laquelle le juge Malouf a participé), du motif qui a permis de juger autrement l'action de la banque dans ce dernier pourvoi:

À mon avis, l'arrêt Atomic Slipper Co. n'interdit pas au débiteur de consentir à la prise de possession, par son créancier, des biens qu'il a donnés en garantie de sa dette. La nullité de la prise de possession, sans procédure judiciaire, n'est que relative et elle ne peut être invoquée que par celui qui en souffre préjudice.

Dans l'affaire Atomic Slipper Co., l'emprunteur s'était formellement objecté à la prise de possession et la banque prêteuse avait passé outre à cette opposition.

Il semble donc que la Cour d'appel ait invalidé la possession que la Banque avait des inventaires parce qu'ils avaient été obtenus sans le consentement du débiteur et malgré son opposition. Tout en reconnaissant qu'en cas de contestation, l'autorisation d'un tribunal sera nécessaire pour préserver la paix sociale et éviter abus et conflits, je ne puis partager le point de vue de la Cour d'appel face aux circonstances de l'affaire. Comme en première instance le débat n'a porté que sur la question de savoir si la Banque avait exigé le remboursement des emprunts en offrant un délai raisonnable au débiteur, il ne fut pas mis en preuve que le débiteur ait manifesté une quelconque objection aux actes de la Banque si ce n'est son refus de laisser le créancier utiliser les locaux de la compagnie pour faire le décompte des biens. En fait, il n'y a pas eu prise de possession formelle puisque Tardi a lui-même fait livrer les biens aux mandataires de la Banque. De plus, il a exprimé son assentiment aux droits de la Banque dans diverses missives qu'il a fait parvenir à son créancier dans les jours qui ont précédé la réalisation des actifs par la Banque. Je concède que le consentement manifesté était peu enthousiaste et que Tardi a tenté d'ennuyer la firme mandataire en envoyant les marchandises au bureau de cette dernière de manière sporadique et sans avertissement. Toutefois, ce consentement est présent et ressort nettement de la preuve faite en première instance.

Dans sa lettre du 28 mai 1979, Atomic reconnaît les droits de la Banque à la prise de possession des marchandises. Tardi écrit:

[traduction] Nous savons qu'en vertu de l'article 88 de la Loi sur les banques, la Banque provinciale a le droit de prendre possession de notre inventaire, de nos produits en voie de fabrication, de nos comptes recevables, de notre matériel brut dans l'éventualité où la Banque juge qu'il est nécessaire de couvrir le prêt et de payer ainsi la valeur marchande de la garantie aux termes de l'article 88. [Je souligne.]

De plus, le 12 juin 1979, après que la Banque eut exigé paiement, Tardi fait parvenir une autre missive reconnaissant les droits de la Banque:

[traduction] Par conséquent, maintenant que vous avez dit dans votre lettre du 8 juin 1979 que la Banque demande le remboursement du prêt bancaire de 622 000 $ dans les dix (10) prochains jours, vous ne laissez à Atomic Slipper Company Limited d'autre choix que de vous accorder la permission de prendre possession, dans les dix (10) prochains jours, de la garantie donnée aux termes de l'article 88 de la Loi sur les banques; . . . [Je souligne.]

Dans cette lettre, Tardi ajoute qu'il tiendra la Banque responsable de la valeur marchande de l'inventaire dont elle est sur le point de prendre possession. Après la nomination par la Banque de la firme Clarkson, Tardi envoie une autre lettre à la Banque le 21 juin 1979:

[traduction] . . . nous acceptons de collaborer avec lui [un représentant de Clarkson] en lui communiquant les renseignements requis, toutefois, nous ne pouvons vous permettre d'utiliser nos locaux ou nos installations et demandons par les présentes que vous preniez pleine possession et cherchiez d'autres installations. [Je souligne.]

À la suite de quoi, Atomic livre ses inventaires à Clarkson. Il ne s'agit manifestement pas d'un cas où une banque a abusé de ses pouvoirs pour envahir les lieux et prendre possession des biens malgré la résistance du débiteur. Même si Tardi n'a pas apprécié devoir se défaire des inventaires d'Atomic et qu'il a subséquemment contesté l'action de la Banque, il a néanmoins accepté au moment du défaut, de livrer les biens et de coopérer avec la firme chargée de la réalisation. Une autorisation judiciaire ne s'avérait d'aucune utilité puisqu'Atomic et Tardi, non seulement ne s'opposaient pas mais consentaient à remettre l'inventaire à la Banque. En fait, Atomic sachant qu'éventuellement la Banque en prendrait possession a offert et permis à cette dernière d'en disposer par l'intermédiaire de la firme Clarkson et les lui a remis à cette fin. Un débiteur peut régler les garanties de son créancier en lui donnant ce qu'il réclame sans l'obliger à se prémunir d'une autorisation judiciaire. En tout temps, il peut consentir à la prise de possession de son créancier même si ce dernier ne dispose pas de pouvoirs légaux ou conventionnels à cet effet.

J'estime, en toute déférence, que la preuve démontre que Tardi et Atomic ont consenti à la prise de possession des inventaires aux fins d'en réaliser la valeur; Tardi a même livré les biens aux mandataires de la Banque. La Banque a dès lors pris possession de manière légitime de l'inventaire et avait, de ce fait, pleins pouvoirs de procéder à la vente.

Ceci suffit pour établir les droits de la Banque à cet égard. Il y a cependant intérêt à traiter de ses droits conventionnels eu égard aux conclusions de la Cour d'appel à ce sujet.

(2)La Banque avait-elle un droit conventionnel de prendre possession de l'inventaire et de le vendre?

Le juge des faits ne s'est pas prononcé sur la validité du droit contractuel à la prise de possession que possédait la Banque. C'est au stade de l'appel, que le juge Malouf a conclu à l'inapplicabilité des conventions signées par Atomic et Tardi pour ensuite s'interroger sur la validité de telles conventions et décider qu'elles étaient contraires à l'ordre public.

Des conventions comportant un pouvoir de prise de possession ont été signées chaque année jusqu'en 1975. À titre d'exemple, je signale une disposition standard de ces conventions qui se lisait ainsi (article 7 de la convention relative aux avances et aux prêts faits par la Banque et aux garanties s'y rapportant du 6 février 1975):

7. La Banque pourra de temps à autre et sans la nécessité d'une demande, entrer de force dans, prendre possession de, occuper, utiliser et exercer, sans charge et à l'exclusion de toutes autres personnes, y compris le Client, tous et chacun des biens et des propriétés (réels et personnels, immobiliers et mobiliers) et des droits, pouvoirs et privilèges appartenant au Client, ou dont il a l'usage, la jouissance ou l'exercice, relativement aux biens ou à quelque partie d'entre eux, ou dans ou sur lesquels ceux-ci peuvent se trouver (non compris l'établissement d'un entreposeur ou d'un voiturier) jusqu'à ce que les biens aient été réalisés en plein, et elle pourra de temps à autre nommer un séquestre ou un agent pour représenter le Client et pour les actes duquel le Client sera seul responsable, et ce dernier n'aura pas le pouvoir de révoquer telle nomination ou de mettre fin à telle agence. Tel séquestre ou agent possédera et pourra exercer tous les pouvoirs, droits et discrétions accordés à la Banque par la présente convention et, de plus, la Banque et tel séquestre ou agent auront le pouvoir d'exercer de temps à autre, au nom du Client, tous et chacun des droits, pouvoirs et privilèges de ce dernier de quelque nature qu'ils soient et de faire tous actes et toutes choses que le Client pourrait faire lui-même, aux fins de compléter, vendre, expédier ou autrement disposer des biens, en la manière que la Banque jugera la plus appropriée à la réalisation des biens (pièce D-33A).

À noter que ce texte comporte un consentement à vente autrement que selon les modalités du par. 89(4) de la Loi sur les banques.

a) L'applicabilité de la convention

Une convention a été signée en 1976 mais la Cour d'appel considère qu'elle ne peut lier Atomic puisqu'elle porte la signature de Tardi, sans mention du nom d'Atomic et que la preuve ne démontre pas que les parties entendaient appliquer cette convention à Atomic. La cour refuse aussi d'appliquer les conventions antérieures considérant qu'il faut présumer que la Banque n'entendait plus bénéficier des droits prévus dans les conventions en question.

Avec déférence, je ne puis accepter cette conclusion. La seule preuve à cet égard sont les conventions elles-mêmes. Or celles-ci furent mises en preuve par Tardi lui-même en première instance et n'ont fait l'objet d'aucune contestation à ce stade.

Il est clair que la convention de 1976 ne pouvait que se rapporter aux garanties consenties par Atomic en vertu de la Loi sur les banques puisque Tardi ne pouvait les offrir personnellement. Quoi qu'il en soit sur l'applicabilité à Atomic du document de 1976 signé par Tardi, il appert du libellé des conventions antérieures qu'elles étaient des conventions continues s'appliquant à toutes les garanties présentes et futures de la Banque. L'article 15 de la convention de 1975 se lit ainsi:

15. Les dispositions de la présente convention vaudront en plus de tous autres recours de la Banque établis par la loi et de tous droits résultant de conventions antérieures, et la présente constituera une convention continue (continuing agreement) et toutes ses dispositions s'appliqueront à tous prêts et avances de la Banque au Client et à toutes obligations du Client envers la Banque existant en tout temps ainsi qu'aux garanties et aux biens tels qu'ils existeront en tout temps et à tous leurs produits; et tous prêts et avances consentis dans le passé, ou présentement ou dans l'avenir, seront censés avoir été faits sujets aux dispositions de la présente convention.

Cette convention visant les prêts et avances consentis dans le passé, dans le présent et pour l'avenir, il n'était pas nécessaire pour la Banque de faire signer une convention à chaque année. La convention de 1975 demeurait en vigueur et liait Atomic en l'absence de renonciation de la Banque. La pratique d'une signature annuelle relève d'une politique bancaire nationale attribuable au fait que dans les autres provinces canadiennes, il est possible d'enregistrer les garanties mobilières et qu'il est adéquat de les renouveler à chaque année (voir Goldstein, loc. cit.).

b) La validité de la convention

En sus de la conclusion d'inapplicabilité, la Cour d'appel s'inspirant de la décision St-Louis Automobiles Ltée v. Banque Nationale du Canada (1981), 42 C.B.R. (N.S.) 275, a déclaré qu'il était illégal et contraire à l'ordre public et à la Loi sur les banques, qu'un emprunteur procure par contrat à une banque, un pouvoir de prise de possession de son inventaire.

La Banque soutient que rien dans la Loi sur les banques n'interdit la conclusion de telles conventions. De fait, sauf la décision St‑Louis Automobiles, on n'avait jamais auparavant contesté la validité d'une convention semblable à celle signée par Atomic. Avant cette décision isolée, les tribunaux n'avaient jamais mis en doute la validité d'une telle convention tant au Québec que dans les autres provinces (Banque Canadienne Nationale v. Lefaivre, [1951] B.R. 83, à la p. 89; Canadian Imperial Bank of Commerce v. Heppner (1965), 51 D.L.R. (2d) 254, à la p. 258).

Il apparaît évident, à la lecture des dispositions établissant les facultés de réalisation d'une banque, que le législateur a voulu être permissif et non limitatif. Le paragraphe 88(3) fournit à la banque, "en sus de tous autres droits ou pouvoirs qui lui sont dévolus", des pouvoirs additionnels envers certains types de biens. Il ne saurait être interprété comme limitant les droits accordés par convention. À la lecture du par. 89(4), on remarque qu'en matière de vente, le pouvoir de déroger par convention aux prescriptions légales est spécifiquement inscrit. Les tribunaux appliquent d'ailleurs plusieurs de ces conventions et elles ne sauraient être vues comme contraires à l'objectif législatif. De plus, l'al. 148b) crée une infraction criminelle pour une personne qui soustrait volontairement à la possession de la banque des biens dont cette dernière réclame la possession. Ceci suggère qu'une banque peut prendre possession.

Quant au principe que "nul ne peut se faire justice à soi-même", celui-ci ne vise pas la création ou la reconnaissance de droits par une partie en faveur d'une autre soit par convention ou par son fait mais plutôt leur exécution forcée par volonté unilatérale sans autorité de justice. Il n'y a pas offense à l'ordre public si un débiteur accorde à son créancier un droit à la prise de possession au cas où il est en défaut. Bien avant que les dispositions de la Loi sur la protection du consommateur, L.R.Q., ch. P‑40.1, n'entrent en vigueur, on a reconnu que n'est pas contraire à l'ordre public, la clause d'un contrat de vente conditionnelle permettant à un vendeur de reprendre possession d'un bien vendu sans autorisation judiciaire si l'acheteur ne s'acquitte pas du prix (Canada Motor Car Co. v. Béchard (1924), 37 B.R. 294; Omer Barré Ltd. v. Gravel (1940), 78 C.S. 262). De surcroît, la prohibition expresse d'une telle convention, établie par les art. 136 et 146 de la Loi sur la protection du consommateur laisse entendre que dans les matières où la Loi n'a pas d'application, ces mêmes conventions sont valides et applicables.

La Cour suprême de la Colombie-Britannique, traitant des droits et pouvoirs d'une banque, s'est prononcée dans le même sens dans Gabriola Building Supplies Ltd. v. Lloyds Bank of Canada (1989), 72 C.B.R. (N.S.) 188, à la p. 200. Il y a quelque temps, la Cour d'appel du Québec (Rosemex Inc. c. Banque de Montréal, précité) a restreint la portée de l'opinion émise dans la présente affaire, en précisant que le débiteur peut consentir à la prise de possession au moment du défaut sans qu'il soit nécessaire d'obtenir l'assentiment du tribunal (voir aussi R. A. Macdonald, "Atomic Slipper Co. v. Banque Nat. du Can.: Commercial Practice Meets Constitutional Law" (1989), 73 C.B.R. (N.S.) 1; et Goldstein, loc. cit.).

Finalement, tout récemment, cette Cour a eu à tenir compte d'une convention du même genre et en particulier, les pouvoirs de prise de possession (Houle c. Banque Canadienne Nationale, précité). Ma collègue, le juge L'Heureux-Dubé, après avoir cité les dispositions de la convention accordant à la banque le pouvoir de prise de possession, s'est exprimée comme suit (à la p. 169):

Ainsi, suivant l'entente intervenue entre les parties et conformément à la législation applicable, la banque avait et le droit d'être payée sur demande de paiement, demande qui aurait pu être faite en tout temps, et le droit de réaliser ses garanties sans préavis.

Il n'y a donc rien qui empêche une banque de prendre possession des biens si elle a acquis ce droit par convention et que le débiteur ne s'y oppose pas. En tel cas, elle n'a pas à rechercher une autorisation judiciaire afin de procéder à la réalisation de sa garantie.

3.Quel est le montant dont Atomic et Tardi sont en droit d'obtenir crédit de la part de la Banque pour la valeur des inventaires?

En Cour supérieure, le montant obtenu par la Banque lors de la vente des actifs, ne fut pas remis en question. Après soustraction des frais encourus, cette dernière a crédité Atomic pour un montant de 182 825 $. Toutefois, la Cour d'appel a examiné la valeur des inventaires livrés par Atomic à la Banque et a crédité au bénéfice d'Atomic un montant de 398 390 $. Pour parvenir à cette conclusion, la Cour d'appel a multiplié le nombre de pantoufles livrées par Atomic à la Banque par un prix unitaire moyen obtenu à partir des ventes des années 1977 et 1978, soit 4,80 $ l'unité.

Devant nous, Tardi soutient qu'Atomic doit recevoir crédit pour la valeur qu'il attribue à ses inventaires, soit la somme de 829 511,66 $, plutôt que le montant dont la Banque lui a donné crédit avant de prendre action. Le montant réclamé par Atomic est de beaucoup supérieur à l'évaluation faite par la Cour d'appel. Tardi fonde sa réclamation sur la prétention que la Banque a illégalement pris possession des inventaires d'Atomic et il s'inspire de la décision de cette Cour dans Banque Provinciale du Canada c. Gagnon, [1981] 2 R.C.S. 98.

Cette prétention, nous venons de le voir, n'est pas fondée. Tel n'était pas le cas dans l'affaire Gagnon. Air-Tech Réfrigeration Inc. avait consenti à la Banque Provinciale du Canada une garantie sur ses inventaires, en vertu de l'art. 88 de la Loi sur les banques. Suite au défaut de la compagnie, la banque avait pris possession des biens faisant partie de l'inventaire et les avait vendus pour une somme de 52 000 $. Air-Tech fait faillite peu de temps après et le syndic attaque la validité de la garantie de la Banque Provinciale, au motif qu'Air-Tech est un commerçant en gros de produits manufacturiers et que la Loi sur les banques ne permettait pas, selon son libellé à l'époque, à un grossiste de consentir une garantie en vertu de l'art. 88 sur des biens fabriqués. Notre Cour donne donc raison au syndic et condamne la banque à rembourser à ce dernier la valeur de l'inventaire d'Air-Tech, qui fut établie suivant l'évaluation des biens avant la cessation des opérations de la compagnie. Il fut ainsi décidé qu'en l'absence d'une preuve contraire, les biens seraient évalués suivant la valeur comptable établie par la compagnie. (Voir aussi Banque Nationale du Canada c. Corbeil, [1991] 1 R.C.S. 117.)

Dans la présente affaire, outre le fait que la réalisation de la garantie n'est pas illégale, la preuve a établi que le montant obtenu par la Banque était d'un même ordre de grandeur que celui qu'Atomic obtenait dans les mois précédant cette réalisation. Atomic et Tardi n'ont pas réussi à faire la preuve d'une quelconque négligence de la Banque. La firme de comptables a pris les moyens raisonnables pour tirer le meilleur prix possible de la vente et, outre les problèmes de désuétude de l'inventaire, la principale difficulté rencontrée par Clarkson fut l'absence de coopération de Tardi.

La valeur des marchandises dont la Banque a pris possession est bien inférieure à celle que réclame Tardi. Le juge Hannan en Cour supérieure a traité de la façon dont Tardi soufflait la valeur de ses inventaires et a conclu que la preuve n'appuyait pas ses prétentions de valeur plus élevée:

[traduction] D'après cet examen et l'ensemble de la preuve, il est évident que la valeur de l'inventaire assujetti aux droits de la Banque a été gonflée et qu'il n'est pas vendable par Atomic dans le cours ordinaire de ses affaires.

Le fardeau de démontrer que la valeur de l'inventaire dépassait ce qui a été obtenu pour celui-ci incombe aux défendeurs; la manière dont la valeur a été attribuée à l'inventaire par les défendeurs est entièrement sans fondement.

En les évaluant sur la base du prix unitaire obtenu par Atomic au cours des mois précédant la réalisation de la sûreté, le montant calculé est inférieur au montant brut obtenu par la Banque et accepté par le juge de première instance. En effet, dans les premiers mois de l'année 1979, Atomic obtenait 2,56 $ à 2,83 $ par paire de pantoufles en moyenne. Ce qui conduit à une valeur globale de 212 475 $ ou 234 884 $ pour l'inventaire remis à Clarkson. En fait, la Banque a réalisé un montant de 3,00 $ l'unité pour une valeur globale de 247 500 $, ce qui est plus performant que les montants obtenus par Atomic elle-même.

J'en viens donc à la conclusion que non seulement la valeur réclamée par Tardi n'est pas justifiée mais qu'il n'y a pas lieu d'intervenir en ce qui a trait à la valeur des biens acceptée par le juge du procès. J'estime que sur ce point le premier juge a eu raison d'accepter la preuve de la Banque puisque Tardi n'a pas réussi à prouver que celle-ci avait mal agi.

4.Atomic et Tardi sont-ils en droit d'être indemnisés pour le préjudice allégué, soit perte de profit, dommages à la réputation, troubles et inconvénients?

Tardi allègue que la Banque a détruit sa réputation et sa crédibilité dans le domaine de la chaussure. Il soutient que dès que Woolco a acheté les pantoufles que la Banque avait mis en vente, de nombreux détaillants ont arrêté de se procurer les produits d'Atomic en attente du prix que Woolco allait leur consentir. Il chiffre sa réclamation à 875 618,62 $. Selon sa formulation, il s'agit plutôt d'une réclamation d'Atomic qui n'est pas devant nous vu l'absence de représentation par avocat. En tout état de cause, vu l'absence de faute, négligence ou de mauvaise foi de la part de la Banque ou de son mandataire, une telle réclamation ne saurait valoir.

Ni le premier juge, ni la Cour d'appel n'ont accordé de dommages-intérêts pour perte de profits. Je suis d'avis de confirmer le rejet de toute réclamation sous ce chef pour les mêmes raisons et il n'y a pas lieu d'accorder de dommages-intérêts.

5. Les réclamations nouvelles et la demande de radiation des hypothèques

Dans son mémoire et à l'audition, Tardi a présenté deux nouvelles réclamations non soulevées antérieurement pour lesquelles il n'avait pas requis la permission d'appeler. Les allégations accompagnant ces nouvelles questions sont assez obscures et ne sont appuyées d'aucune preuve pouvant les justifier.

Tardi réclame le remboursement d'un dépôt au montant de 385 000 $ daté du 17 janvier 1979 et fait au compte d'Atomic ainsi que d'une somme de 75 000 $ qui aurait été utilisée par Atomic pour rembourser un prêt au même montant consenti par la Banque à une autre compagnie contrôlée par Tardi, soit la Bluebird Footwear Inc. Outre qu'elles sont irrecevables et qu'il s'agirait de réclamations d'Atomic qui n'est pas devant nous, n'étant pas représentée par avocat, elles ne sont pas établies. Quant à la demande de radiation d'hypothèques, puisqu'Atomic est toujours endettée envers la Banque, ces garanties doivent subsister. Je rejetterais donc ces demandes.

VI -- Conclusion

J'accueillerais le pourvoi principal, j'infirmerais la décision rendue par la Cour d'appel le 5 juillet 1988, rectifiée par jugement le 21 octobre 1988, et je rétablirais le jugement de la Cour supérieure dans son intégralité avec effet quant au délaissement à compter de ce jour. Je rejetterais le pourvoi incident. Le tout avec dépens à l'encontre de Tardi.

Pourvoi accueilli et pourvoi incident rejeté.

Procureurs de la Banque Nationale du Canada: McCarthy Tétrault, Montréal; Leduc, LeBel, Montréal.

Procureurs de l'intervenant: Ogilvy, Renault, Montréal.

*Jugement en rectification (1988), 21 Q.A.C. 54.


Synthèse
Référence neutre : [1991] 1 R.C.S. 1059 ?
Date de la décision : 16/05/1991
Sens de l'arrêt : Le pourvoi est accueilli et le pourvoi incident est rejeté

Analyses

Banques et opérations bancaires - Pouvoirs des banques - Prêts et garanties - Prise de possession et vente des biens donnés en garantie d'un prêt - Défaut de la débitrice envers la banque - Validité de la prise de possession - Valeur des biens donnés en garantie.

Banques et opérations bancaires - Pouvoirs des banques - Prêts et garanties - Prise de possession et vente des biens donnés en garantie - Conventions entre la débitrice et la banque régissant les modalités de la prise de possession et de la vente des biens - Validité et applicabilité des conventions - Loi sur les banques, S.R.C. 1970, ch. B‑1, art. 88, 89.

Procédure civile - Représentation devant les tribunaux - Compagnies - Compagnie représentée devant le tribunal par son président qui n'est pas un avocat - Représentation d'une compagnie autrement que par avocat non valable - Compagnie considérée comme n'ayant pas comparu au dossier dans le pourvoi principal et comme n'ayant pas interjeté appel dans le pourvoi incident - Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C‑25, art. 61 - Loi sur le Barreau, L.R.Q., ch. B‑1, art. 128.

La banque appelante assurait les besoins en financement d'Atomic par un crédit utilisable sous forme d'avances remboursables à demande. Pour couvrir le crédit, la banque détenait une garantie sur la marchandise fabriquée par Atomic en vertu de l'al. 88(1)b) de la Loi sur les banques. Tardi, président et principal actionnaire d'Atomic, avait de plus cautionné personnellement les obligations de la compagnie envers la banque. Entre 1975 et 1979, la banque a commencé à s'inquiéter de la baisse des ventes et, en février 1979, a demandé à Atomic et à Tardi de réduire les emprunts et de fournir de nouvelles garanties. Ils n'ont pu satisfaire à ces nouvelles exigences et, en juin 1979, la banque a demandé le paiement du montant dû dans les 10 jours. Le paiement n'ayant pas été obtenu, la banque a donné mandat à une firme de comptables agréés de la représenter dans la réalisation des garanties. Tardi a reconnu par écrit le droit de la banque de prendre possession des biens, qu'il a expédiés plus tard au mandataire de la banque. Une fois les biens reçus, la firme a fait publier des avis de demandes de soumissions dans les journaux, invité des détaillants à faire des offres, et vendu la marchandise pour le montant le plus élevé. Par la suite, la banque a intenté une action contre Atomic et Tardi pour leur réclamer le solde dû.

La Cour supérieure a accueilli l'action mais ce jugement a été infirmé par la Cour d'appel. Cette cour a conclu que la banque n'avait pas le pouvoir, en vertu de la Loi sur les banques, de prendre possession des biens donnés en garantie et que les conventions attributives d'un pouvoir de saisie intervenues entre la banque et Atomic étaient inapplicables et illégales. La cour a également conclu que la banque avait agi sans droit en réclamant le paiement total en juin 1979 puisque le document signé par Atomic et la banque le 8 juillet 1978 était une demande de marge de crédit en vigueur pour un an. En acceptant cette nouvelle demande, la banque avait induit l'emprunteur à croire qu'elle acceptait que le crédit soit disponible jusqu'au 8 juillet 1979. Enfin, la cour a remarqué qu'Atomic aurait été capable de disposer de la marchandise dans le cours de ses affaires pour une somme supérieure à celle reçue par la banque. Puisque cette dernière avait mal agi en réclamant paiement, la cour a accordé crédit à la compagnie pour la différence.

Arrêt: Le pourvoi est accueilli et le pourvoi incident est rejeté.

La Cour d'appel a erré en estimant que la banque ne pouvait rappeler son prêt avant le 8 juillet 1979 parce qu'elle avait accordé son crédit jusqu'à cette date. Il faut se garder de confondre les billets promissoires et le document signé par Atomic qui prévoyait que la garantie vaudrait pour toutes les avances pouvant être faites jusqu'au 8 juillet 1979. La période d'un an mentionnée sur ce document ne fait pas perdre au billet promissoire sa véritable nature et ne le transforme pas en emprunt à terme. En l'espèce, le crédit avait cessé d'être en vigueur le 31 décembre 1978 et ne fut pas renouvelé en 1979. Vu le refus d'Atomic et de Tardi d'obtempérer à la demande de la banque de réduire les emprunts et de concéder des garanties additionnelles à la suite de l'augmentation des stocks et de la baisse des ventes, la banque était justifiée de réclamer le paiement du prêt. Un délai amplement suffisant leur a été accordé pour s'exécuter compte tenu de la nature des emprunts et de la preuve présentée.

Il n'est pas nécessaire de déterminer si la banque avait le droit de saisir et de prendre possession des biens donnés en garantie en vertu de l'al. 88(1)b) de la Loi sur les banques sans préalablement obtenir une autorisation judiciaire. La preuve démontre que même si Tardi n'a pas apprécié devoir se défaire des stocks d'Atomic et qu'il a subséquemment contesté l'action de la banque, il a néanmoins accepté au moment du défaut de livrer les biens à la firme chargée de la réalisation. Une autorisation judiciaire ne s'avérait donc d'aucune utilité puisqu'Atomic et Tardi, non seulement ne s'opposaient pas mais consentaient à remettre les stocks à la banque. La banque a dès lors pris possession de manière légitime des stocks et avait, de ce fait, pleins pouvoirs de procéder à la vente. En tout temps, un débiteur peut consentir à la prise de possession de son créancier même si ce dernier ne dispose pas de pouvoirs légaux ou conventionnels à cet effet.

De plus, rien n'empêche une banque de prendre possession des biens donnés en garantie si elle a acquis ce droit par convention et que le débiteur ne s'y oppose pas. En tel cas, elle n'a pas à obtenir une autorisation judiciaire afin de procéder à la réalisation de sa garantie. Ces conventions ne sont pas contraires à l'ordre public ou à la Loi sur les banques. En l'espèce, la banque avait un droit conventionnel de prendre possession des stocks. Les conventions comportant un pouvoir de prise de possession signées annuellement par Atomic jusqu'en 1975 étaient des conventions continues s'appliquant à toutes les garanties présentes et futures de la banque. Puisque ces conventions visaient les prêts et avances consentis dans le passé, dans le présent et pour l'avenir, il n'était pas nécessaire pour la banque de faire signer une convention à chaque année. La convention de 1975 était toujours en vigueur en 1979 et liait Atomic vu l'absence de renonciation de la banque.

Il n'y a pas lieu d'intervenir en ce qui a trait à la valeur des biens acceptée par le juge du procès. Outre le fait que la réalisation de la garantie n'est pas illégale, la preuve a établi que le montant obtenu par la banque était d'un même ordre de grandeur que celui qu'Atomic obtenait dans les mois précédant cette réalisation. De plus, Atomic et Tardi n'ont pas réussi à faire la preuve d'une quelconque négligence de la banque ou de son mandataire. La firme de comptables a pris les moyens raisonnables pour tirer le meilleur prix possible de la vente. Enfin, la valeur des stocks réclamée par Tardi n'est pas justifiée. Tardi soufflait la valeur des biens donnés en garantie et la preuve n'appuie pas ses prétentions de valeur plus élevée.


Parties
Demandeurs : Banque Nationale du Canada
Défendeurs : Atomic Slipper Co.

Références :

Jurisprudence
Arrêt critiqué: St‑Louis Automobiles Ltée v. Banque Nationale du Canada (1981), 42 C.B.R. (N.S.) 275
arrêts mentionnés: Thomassin v. General Finance Corp., [1953] B.R. 375
Houle c. Banque Canadienne Nationale, [1990] 3 R.C.S. 122
Rosemex Inc. c. Banque de Montréal, [1990] R.J.Q. 344
Banque Canadienne Nationale v. Lefaivre, [1951] B.R. 83
Canadian Imperial Bank of Commerce v. Heppner (1965), 51 D.L.R. (2d) 254
Canada Motor Car Co. v. Béchard (1924), 37 B.R. 294
Omer Barré Ltd. v. Gravel (1940), 78 C.S. 262
Gabriola Building Supplies Ltd. v. Lloyds Bank of Canada (1989), 72 C.B.R. (N.S.) 188
Banque Provinciale du Canada c. Gagnon, [1981] 2 R.C.S. 98
Banque Nationale du Canada c. Corbeil, [1991] 1 R.C.S. 117.
Lois et règlements cités
Code civil du Bas‑Canada, art. 365.
Code de procédure civile, L.R.Q., ch. C‑25, art. 61.
Loi sur la protection du consommateur, L.R.Q., ch. P‑40.1, art. 136 à 146.
Loi sur le Barreau, L.R.Q., ch. B‑1, art. 128.
Loi sur les banques, S.R.C. 1970, ch. B‑1, art. 88, 89, 148.
Doctrine citée
Goldstein, Y. Annotation on Atomic Slipper Co. v. Banque Nat. du Can. (1988), 70 C.B.R. (N.S.) 1.
Macdonald, Roderick A. "Atomic Slipper Co. v. Banque Nat. du Can.: Commercial Practice Meets Constitutional Law" (1989), 73 C.B.R. (N.S.) 1.

Proposition de citation de la décision: Banque Nationale du Canada c. Atomic Slipper Co., [1991] 1 R.C.S. 1059 (16 mai 1991)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1991-05-16;.1991..1.r.c.s..1059 ?
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