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03/10/1978 | CANADA | N°[1979]_1_R.C.S._120

Canada | Association internationale des débardeurs, section locale 273 c. Association des employeurs maritimes, [1979] 1 R.C.S. 120 (3 octobre 1978)


Cour suprême du Canada

Association internationale des débardeurs, section locale 273 c. Association des employeurs maritimes, [1979] 1 R.C.S. 120

Date: 1978-10-03

Association internationale des débardeurs, section locale 273, Association internationale des débardeurs, section locale 1764, Association internationale des débardeurs, section locale 1039, Appelantes;

et

Association des employeurs maritimes, Brunterm Limited et Furness Canada (1975) Limited, compagnies dûment constituées en vertu des lois du Canada et ayant une place d’affaires en la vill

e de Saint-Jean (Nouveau-Brunswick) Intimées.

1977: 14 et 15 décembre; 1978: 3 octobr...

Cour suprême du Canada

Association internationale des débardeurs, section locale 273 c. Association des employeurs maritimes, [1979] 1 R.C.S. 120

Date: 1978-10-03

Association internationale des débardeurs, section locale 273, Association internationale des débardeurs, section locale 1764, Association internationale des débardeurs, section locale 1039, Appelantes;

et

Association des employeurs maritimes, Brunterm Limited et Furness Canada (1975) Limited, compagnies dûment constituées en vertu des lois du Canada et ayant une place d’affaires en la ville de Saint-Jean (Nouveau-Brunswick) Intimées.

1977: 14 et 15 décembre; 1978: 3 octobre.

Présents: Le juge en chef Laskin et les juges Martland, Ritchie, Spence, Pigeon, Dickson, Beetz, Estey et Pratte.

EN APPEL DE LA DIVISION D’APPEL DE LA COUR SUPRÊME DU NOUVEAU-BRUNSWICK

POURVOI à l’encontre d’un arrêt de la Division d’appel de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick qui a rejeté un appel d’une injonction interlocutoire du juge Stratton. Pourvoi rejeté.

Eric L. Teed, c.r., pour les appelantes.

G. Christopher Collier, pour les intimées.

[Page 123]

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE ESTEY — Les principaux motifs invoqués contre la délivrance d’une injonction à l’encontre de trois syndicats accrédités en vertu du Code canadien du travail, 1972 (Can.), chap. 18, sont qu’au moment de la demande d’injonction, aucun des employés des intimées ne refusait de travailler, que le refus des membres des sections locales appelantes de traverser un piquet de grève licite ne constitue pas une grève et qu’en conséquence, il n’y a pas matière à injonction et en outre, qu’aucune injonction ne peut être délivrée contre des syndicats ouvriers qui ne sont pas constitués en corporation. Les questions subsidiaires soulevées dans les plaidoiries seront examinées au fur et à mesure qu’elles se poseront.

Les cours d’instance inférieure ont conclu qu’il y avait grève et qu’elle était illégale. Le juge Limerick de la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick a déclaré:

[TRADUCTION] Les affidavits contiennent suffisamment d’allégations recevables pour que le juge de première instance puisse conclure qu’une grève illégale était en cours.

…En l’espèce, non seulement, il n’y a aucune preuve que les sections locales ont pris des mesures supplémentaires pour inciter leurs membres à retourner au travail, comme des mesures disciplinaires ou des menaces de mesures disciplinaires, mais la preuve démontre que les dirigeants des sections locales, dont certains avaient ordonné le retour au travail, ne se sont pas eux-mêmes présentés au travail, malgré l’engagement pris par le syndicat de fournir toute la main-d’œuvre nécessaire à l’employeur. Ce refus des dirigeants a non seulement impliqué directement les sections locales, mais il a également incité leurs membres à poursuivre la grève.

Aucune preuve n’a été soumise à cette Cour qui permettrait d’écarter ces conclusions sur les faits et, en conséquence, les questions de droit soulevées par le présent pourvoi doivent, à mon avis, être étudiées à la lumière de ces conclusions. Néanmoins, l’examen des questions juridiques exige un exposé sommaire des circonstances de l’espèce. Plusieurs compagnies d’arrimage de Saint-Jean (Nouveau-Brunswick) ont formé, aux fins de leurs relations de travail, une association d’employeurs, l’Association des employeurs maritimes, une des

[Page 124]

demanderesses intimées (appelée ci-après l’«Association»). Les deux autres demanderesses intimées sont des compagnies membres de l’Association. Le dossier ne dit pas si l’Association est constituée en corporation ni si elle a été désignée par le Conseil, en vertu de l’art. 131 du Code, comme «employeur» aux fins de la demande d’accréditation des syndicats appelants à titre d’agents négociateurs des personnes employées par les membres de l’Association. La question de la capacité juridique de l’Association intimée n’a pas été soulevée devant les cours d’instance inférieure. La seule description de l’Association se trouve dans un affidavit dont voici un extrait:

[TRADUCTION] L’Association des employeurs maritimes est une association d’employeurs qui agit, au port de Saint-Jean, au nom de tous ses membres pour toutes les négociations et l’administration des conventions collectives conclues avec chacun des syndicats défendeurs.

L’Association semble être une «association patronale» au sens du par. 107(1) du Code, et chaque convention collective prévoit que l’Association agit pour ses membres et en leur nom en [TRADUCTION] «retenant les services de débardeurs et en prenant en charge les navires… à l’intérieur… du port de Saint-Jean (N.-B.)». On remarque que, dans chacune des trois conventions collectives, la section locale

[TRADUCTION] …reconnaît l’Association des. employeurs maritimes comme le seul agent négociateur pour ses membres au port de Saint-Jean (N.-B.)

Ailleurs, par exemple au par. 2:02b) de la convention de la section locale 273, on parle du travail entrepris [TRADUCTION] «SOUS la direction de l’employeur». Les conventions sont toutes fondées sur la reconnaissance de l’Association comme employeur aux fins de la convention collective et de son application. Dans les conventions, l’Association est parfois appelée «la compagnie» ou «la direction».

Chacun des trois syndicats défendeurs-appelants (appelés ci-après les «sections locales») est un syndicat au sens de la définition du Code et une section locale de l’Association internationale des débardeurs. Chacune de ces trois sections locales a conclu une convention collective avec l’Associa-

[Page 125]

tion. Dans chaque cas, la convention affirme de façon générale, comme dans la convention de la section locale 273:

[TRADUCTION] Cette convention vise à favoriser rétablissement de rapports satisfaisants entre les compagnies, l’Association et le Syndicat, à accroître l’efficacité du travail, à fournir des mécanismes facilitant le règlement rapide des griefs et à instaurer les conditions de travail qui devront être strictement respectées par toutes les parties, de même que les horaires et les taux de salaire de tous les employés assujettis à la présente convention.

Dans chaque convention, les sections locales s’engagent à fournir la main-d’œuvre réclamée par les membres de l’Association et, en contrepartie, l’Association accepte d’attribuer le travail de la manière décrite dans la convention collective aux membres des sections locales, aussi longtemps que ces dernières sont accréditées. La clause 12:01 de la convention collective de la section locale 273 (11:01 de la convention de la section locale 1764 et l’al. Xa) de celle de la section locale 1039) est de première importance en l’espèce:

[TRADUCTION] 12:01

Compte tenu des procédures de règlement des griefs prévues à la convention, le syndicat convient qu’il n’y aura ni grève, ni ralentissement de travail, ni arrêt de travail, complet ou partiel, pendant toute la durée de la convention et la direction convient qu’il n’y aura pas de lockout.

Aux termes de deux des trois conventions, «grève» s’entend

[TRADUCTION] …a) d’un arrêt de travail ou d’un refus de travailler ou de continuer de travailler ou de se présenter au travail, de la part d’employés agissant conjointement, de concert ou de connivence,…

La troisième ne contient aucune définition du mot «grève». Le par. 107(1) du Code donne, pour l’essentiel, la même définition de ce mot que les conventions susmentionnées.

Avant les incidents qui ont donné naissance aux présentes procédures, les membres de la police du Conseil des ports nationaux du port de Saint-Jean ont déclenché une grève légale et ont établi des piquets de grève à l’entrée du port. Les employeurs de la police n’étaient évidemment pas les employeurs des membres des appelants; le conflit

[Page 126]

en l’espèce est né du fait que les policiers ont placé leurs piquets de grève autour du lieu de travail commun. Les membres des trois sections locales ont refusé de franchir les piquets et de se présenter au travail, et ont ainsi paralysé les activités de transport maritime du port de Saint-Jean.

Les sections locales prétendent qu’à l’époque en cause, l’Association n’avait pas d’employés et donc qu’il ne pouvait y avoir de grève. Cette prétention n’est pas fondée. La structure globale des activités du port de Saint-Jean a apparemment amené toutes les parties aux conventions collectives à adopter le cadre assez inhabituel qui ressort des conventions résumées précédemment. Le Parlement a lui-même reconnu la nature particulière de l’industrie de l’arrimage lorsqu’il a adopté l’art. 132 du Code qui autorise le Conseil, pour le secteur du débardage, à établir des unités habiles à négocier collectivement sur la base de régions géographiques lorsque les régions comptent deux employeurs ou plus et à accréditer un syndicat à titre d’agent négociateur pour cette région.

Le système établi par les conventions est simple: Lorsqu’une entreprise d’arrimage participante a besoin de main-d’œuvre pour décharger les navires, elle en avise la section locale de la façon prévue à la convention et la section locale attribue à cet employeur la main-d’œuvre demandée. Les conventions prévoient en détail la façon de calculer la paye et un système de contrôle des heures de travail de chaque membre de la section locale pour l’employeur. Strictement parlant, la relation employeur-employé reconnue par la common law ne s’établit que lorsque le membre de la section locale commence à travailler au port de Saint-Jean pour le membre de l’Association qui requiert ses services. Mis à part cet aspect, l’argument n’est pas fondé. Lorsque ces conventions collectives ont été signées par les représentants de l’Association et ceux des sections locales, toutes les parties ont reconnu les particularités du secteur de l’arrimage au port de Saint-Jean; la section locale s’engageait pour sa part à fournir la main-d’œuvre demandée et l’Association, au nom de ses membres employeurs, s’engageait à attribuer le travail d’ar-

[Page 127]

rimage uniquement aux membres des sections locales. Les conventions sont entièrement fondées sur ce rapport et sur le fait qu’il n’y a demande de main-d’œuvre que lorsqu’il y a du travail à effectuer et donc que les membres des sections locales ne sont rémunérés que lorsque leurs services sont requis par les membres de l’Association, conformément aux termes des conventions collectives. Aux fins des négociations collectives et des relations de travail sous le régime des conventions collectives en résultant, les membres de l’Association et les membres des sections locales sont respectivement les employeurs et les employés dès l’entrée en vigueur des conventions, quels que puissent être par ailleurs leurs droits et obligations en tant qu’employeurs et employés en common law. Cette Cour a établi ce principe dans l’arrêt McGavin Toastmaster Ltd. c. Ainscough[1], où le juge en chef Laskin déclare (aux pp. 724 et 725):

Malgré la législation sur les relations de travail à l’époque pertinente en Colombie‑Britannique, l’accréditation du syndicat, dont les demandeurs étaient membres, en tant qu’agent négociateur d’une unité déterminée d’employés de la compagnie et malgré la convention collective en vigueur entre le syndicat et la compagnie appelante, je ne crois pas qu’on puisse parler de contrats individuels de travail et considérer la convention collective comme simplement accessoire aux relations individuelles. Le juge Judson, s’exprimant au nom de la majorité de cette Cour dans Syndicat catholique des employés de magasins de Québec Inc. c. Compagnie Paquet Ltée (1959), 18 D.L.R. (2d) 346, aux pp. 353-354, [1959] R.C.S. 206, à la p. 212, a ainsi parlé d’une situation où un syndicat était accrédité comme agent négociateur en vertu de la législation québécoise sur les relations de travail:

[TRADUCTION] Les négociations privées entre employeur et employé n’ont plus leur place. Il est certain qu’au regard des matières visées par la convention collective, la liberté contractuelle entre maître et employé individuel est supprimée. La convention collective dicte à l’employeur ce que seront ses futures relations maître-employé.

La situation est identique en Colombie-Britannique où la législation en vigueur à l’époque pertinente déclarait explicitement qu’une convention collective signée par un syndicat et un employeur liait à la fois le syndicat,

[Page 128]

l’employeur et les employés visés par cette convention: voir Mediation Services Act, 1968 (C.-B.), c. 26, art. 6.

Dans tout le Canada, et ce depuis plusieurs années, les relations individuelles entre employeur et employé n’ont d’importance qu’à l’étape de l’embauchage et même là, elles sont subordonnées aux clauses de sécurité syndicale des conventions collectives. Le droit commun applicable aux contrats individuels de travail ne vaut plus quand les relations employeur-employé sont régies par une convention collective qui traite, comme celle présentement en cause, de licenciement, de cessation d’emploi, d’indemnité de cessation d’emploi et d’une foule d’autres choses qui ont été négociées entre le syndicat et la compagnie en tant que parties principales à la convention.

Ces observations, relatives à la législation du travail de la Colombie-Britannique, s’appliquent également au Code et aux conventions collectives en cause ici.

Les employés, au sens des conventions collectives pertinentes, sont bien sûr les membres de la section locale au nom desquels cette dernière s’est engagée à fournir de la main-d’œuvre à l’Association patronale et à ses membres. On ne peut dire que les conventions ne doivent s’appliquer et ne s’appliquent en fait qu’après que les membres des sections locales se sont présentés au travail. Les conventions prévoient une situation où les deux parties ont des obligations dès la date d’entrée en vigueur de la convention et où l’Association et les sections locales représentent tous leurs membres respectifs. Ceci ne ressort pas uniquement du cadre général des conventions, mais également des dispositions de détail des conventions; par exemple, l’art. 1 de la convention de la section locale 1764 (les conventions des sections locales 273 et 1039 contiennent des dispositions semblables) parle de [TRADUCTION] «tous les employés qui sont assujettis aux dispositions de cette convention». La situation inverse s’est présentée dans l’affaire Re Blouin Drywall Contractors Ltd. and United Brotherhood of Carpenters and Joiners of America, Local 2486[2], où le syndicat et les employés cherchaient à tirer avantage d’une entente similaire prévue dans une convention collective. Parlant au nom de la Cour, le juge Brooke a déclaré (à la p. 208):

[Page 129]

[TRADUCTION] Bien que le par. 37(9) et l’art. 42 de la Labour Relations Act n’étendent pas à ceux qui ne sont pas des «employés» l’application obligatoire d’une convention collective ou d’une décision arbitrale rendue conformément à celle-ci, je ne considère pas que ces articles interdisent aux parties d’accorder les mêmes droits et avantages aux membres du syndicat qui ne sont pas des employés, et ces droits et avantages peuvent alors faire l’objet d’une procédure de grief et relever de la compétence d’un conseil d’arbitrage, en vertu de la convention. Les conventions collectives de ce secteur ont étendu leurs avantages aux membres du syndicat qui ne sont pas des employés. Dans ce secteur, le travail n’est pas continu. Les conventions collectives assurent de la main-d’œuvre à l’entrepreneur, donnent une priorité d’emploi aux membres du syndicat et, tout en établissant les termes et conditions de cet emploi, prévoient d’autres avantages qui peuvent être dus ou exigibles à un moment où le membre du syndicat n’est pas un employé.

Je passe maintenant à la capacité juridique des parties aux conventions collectives. La question n’a été soulevée ni en première instance ni en Cour d’appel en ce qui concerne l’Association, mais devant cette Cour l’avocat des sections locales a soutenu que celle-là n’était pas un employeur et n’avait donc pas capacité pour présenter la demande d’injonction accordée par les tribunaux d’instance inférieure. L’histoire du mouvement ouvrier canadien en général, et du droit du travail en particulier, est celle d’une lutte engagée pour faire reconnaître le statut particulier des syndicats sans pour autant exposer les représentants des employés, les syndicats, à des incursions devant les tribunaux qui pourraient les affaiblir, sinon les paralyser. C’est en grande partie pour cette raison qu’on a évité de les constituer en corporation, même si cela aurait facilité l’acquisition et la possession de biens, et l’établissement d’une responsabilité limitée des membres. Une des premières lois adoptées en législation du travail dans ce pays, l’Acte concernant les associations ouvrières (1872, 35 Vict., chap. 30) et, au Royaume-Uni, la Trade Unions Act de 1871, visaient à permettre au syndicat de recourir à la constitution en corporation sans risquer de perdre les ressources accumulées à même les contributions personnelles des membres du syndicat.

La législation canadienne actuelle est parvenue à cette solution par une autre voie. Le Code et les

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diverses lois provinciales sur les relations de travail accordent au syndicat des obligations et des droits différents et distincts de ceux de ses membres. L’accréditation en est un exemple. Seuls un syndicat ou un conseil de syndicats, tels que définis au Code, peuvent demander et obtenir l’accréditation. En revanche, seuls les employés peuvent participer à un scrutin subséquent de représentation. Par suite de l’accréditation, les art. 136 et 146 du Code accordent au syndicat, à titre d’agent négociateur, le droit exclusif de représenter tous les employés de l’unité de négociation dans les négociations collectives avec l’employeur ou l’association patronale. Des dispositions complexes régissent la substitution d’un syndicat à un autre comme agent négociateur des employés, la fusion de syndicats et le transfert de compétences entre des syndicats. Ces lois ont créé la notion d’une convention collective à laquelle seuls un syndicat ou un conseil de syndicats et un employeur ou une association patronale peuvent être parties. Dans le cas des conventions collectives, on a développé des concepts inconnus en droit contractuel pour leur renouvellement et pour réglementer la période de transition entre une convention expirée et une nouvelle convention. Aux termes de la loi, la convention collective devient un pacte tripartite car elle lie non seulement l’employeur signataire et l’agent négociateur, mais également les employés de l’unité de négociation, qu’ils soient ou non membres du syndicat négociateur (voir l’art. 154), ainsi que tout employeur membre d’une association patronale désignée par le Conseil en vertu de l’art. 131. La convention collective peut aussi exiger que l’employeur retienne sur le salaire des employés les cotisations syndicales et verse ces sommes au syndicat. Cette disposition (art. 162) délimite nettement les droits et devoirs connexes mais distincts des deux parties, ainsi que ceux du syndicat et des employés représentés.

En ce qui concerne les grèves et les lockouts, les relations entre l’employeur et l’agent négociateur sont définies par le Code (ainsi que ses équivalents provinciaux). Bien d’autres points du domaine des relations de travail prévus au Code, qu’il n’est pas

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nécessaire d’examiner ici, illustrent également la nature de l’«entité juridique» créée par le Parlement et les rapports entre les diverses entités du monde des relations de travail. Mon dernier commentaire sur cet aspect de la question porte sur l’art. 185. Cet article assujettit les parties à une convention collective à plusieurs restrictions que les législateurs ont estimées nécessaires pour maintenir l’équilibre entre les parties au processus de négociation et assurer le bon fonctionnement du système. La violation de ces restrictions entraîne des peines, y compris des peines consécutives à des poursuites intentées contre l’employeur par le syndicat. L’article 193 prévoit que ces poursuites peuvent être

intentées contre une association patronale, un syndicat ou un conseil de syndicats et en leur nom

et, à cette fin, les parties sont censées être des «personnes».

Les tribunaux ont déjà longuement traité de la capacité juridique d’un syndicat. Avant d’examiner quelques arrêts, il convient de rappeler que dans certaines provinces, les actions contre les syndicats sont limitées par des lois comme The Rights of Labour Act de l’Ontario, R.S.O. 1970, chap. 416, dont le par. 3(2) prévoit:

[TRADUCTION] Un syndicat ne peut être partie à une action en justice que s’il peut l’être indépendamment de toute disposition de la présente Loi ou de The Labour Relations Act.

Le juge Spence, siégeant alors en première instance dans l’affaire Nipissing Hotel Limited et al. v. Hotel and Restaurant Employees and Bartenders International Union et al.[3], a étudié cette question et jugé que The Rights of Labour Act empêche de désigner un syndicat comme partie à une action visant à obtenir une injonction, après avoir décidé que The Labour Relations Act fait du syndicat une personne juridique qui, n’eût été l’interdiction prévue à la première loi, aurait pu être désignée comme partie. Ce jugement, et les arrêts précédents de ladite Cour, prennent leur source dans la décision rendue par le juge Farwell dans The Taff Vale Railway Company v. The Amal-

[Page 132]

gamated Society of Railway Servants[4], (à la p. 429) (et adoptée par les lords Halsbury, Macnaghten, Shand et Brampton, aux pp. 436 et suivantes):

[TRADUCTION] Maintenant, bien qu’une corporation et une personne ou des personnes soient les seules entités qui, en common law, peuvent ester en justice, le législateur peut donner à un groupe d’individus qui n’est ni une corporation ni une société ni une personne physique, le pouvoir de posséder des biens et d’agir par des mandataires, et un tel pouvoir, en l’absence d’un texte législatif contraire, implique nécessairement la responsabilité du groupe jusqu’à concurrence de ses biens pour les actes et les omissions de ses mandataires. Dire qu’une telle association n’existe pas en common law n’est pas pertinent. Le législateur l’a légalisée, et les cours doivent traiter de cette question selon l’intention du législateur…

En souscrivant à l’avis du juge Farwell, le lord chancelier Halsbury a déclaré (à la p. 436):

[TRADUCTION] Si le législateur a créé une entité capable de posséder des biens, d’avoir des employés et de causer des préjudices, je pense que le législateur est censé l’avoir rendue justiciable des cours de justice pour les dommages intentionnellement causés avec l’autorisation de cette entité ou par son entremise.

Cette Cour, dans l’arrêt International Brotherhood of Teamsters, Chauffeurs, Warehousemen and Helpers, Building Material, Construction and Fuel Truck Drivers, Local No. 213, Vancouver, British Columbia, A.F. of L. c. Henry Therien[5], a étudié, à la lumière de la législation du travail de la Colombie-Britannique, la question de savoir si un syndicat pouvait être poursuivi en dommages-intérêts et faire l’objet d’une injonction; tous les membres de la Cour se sont ralliés aux motifs du juge Locke qui a dit (aux pp. 276 à 278):

[TRADUCTION] Un syndicat qui prétend compter comme membres en règle la majorité des employés d’une unité habile à négocier collectivement peut présenter au Conseil des relations du travail une requête en accréditation à titre d’agent négociateur de ces employés. Une fois accrédité, il peut exiger que l’employeur négocie avec lui et si une entente intervient, conclure avec lui une convention écrite qui sera signée par le syndicat en son propre nom à titre d’agent négociateur. Tout au long de la Loi, ces associations sont désignées sous le nom de syndicats et donc considérées comme des entités juridi-

[Page 133]

ques… L’octroi de tels droits, pouvoirs et immunités à ces associations ou organismes non constitués est tout à fait incompatible avec l’idée qu’on n’avait pas l’intention d’en faire des entités juridiques exerçant ces pouvoirs et jouissant desdites immunités. J’estime que ce qu’a dit le juge Farwell, dans l’extrait précité de l’arrêt Taff Vale, s’applique directement. Pour exercer les pouvoirs qui leur sont accordés, il est nécessaire que ces syndicats aient des dirigeants ou autres mandataires pour agir en leur nom. En leur donnant le droit d’agir à titre de mandataires et de contracter au nom d’autres personnes, le législateur leur a donné deux des caractéristiques essentielles d’une corporation en ce qui a trait à la responsabilité délictuelle, puisqu’une corporation ne peut agir que par ses mandataires.

L’extrait du jugement du juge Blackburn, exposant l’opinion des juges que la Chambre des lords a adoptée dans Mersey Docks v. Gibbs, et auquel se réfère le juge Farwell, énonce la règle d’interprétation qui s’applique. En l’absence de tout élément indiquant une intention contraire, comme c’est le cas ici, on doit comprendre que le législateur a voulu que cette entité créée par la loi ait les mêmes devoirs et que ses fonds soient assujettis aux mêmes obligations que ceux qu’impose le droit général aux individus agissant de la même façon. Celui qui jouit de l’avantage doit aussi subir la charge.

A mon avis, l’appelant est une entité juridique qui peut être passible, en son propre nom, de dommages-intérêts, soit pour violation d’une disposition de la Labour Relations Act soit en vertu de la common law.

La législation de la Colombie-Britannique comprend la Trade Unions Act de 1902 qui prévoit qu’un syndicat ne peut être recherché en dommages-intérêts pour un acte relatif à une grève ou à un conflit de travail que si les membres l’ont autorisé ou approuvé. Nonobstant les dispositions restrictives de cette loi, la Cour a conclu qu’un syndicat, pour les motifs exposés dans l’extrait précité, est passible de poursuites en justice, soit en vertu de la common law soit pour violation d’une disposition de la Labour Relations Act. Le cadre général de la loi de la Colombie-Britannique sur les relations de travail alors soumise à cette Cour créait une situation similaire au système de rapports employeur-employé adopté par le Code.

On doit noter également qu’en 1872, le Parlement du Canada a adopté l’Acte concernant les associations ouvrières, précité, dont l’art. 17 est conforme à la loi britannique promulguée l’année

[Page 134]

précédente. Celle loi s’applique uniquement à un syndicat enregistré sous son régime. Très peu de décisions portent sur la capacité juridique des syndicats aux termes de la loi fédérale. Dans l’arrêt O’Laughlin v. Halifax Longshoremen’s Association[6], la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse a jugé que l’intention du Parlement était qu’un syndicat jouissant des avantages du Code constitue une entité juridique et, sans être une corporation, une personne juridique pouvant être poursuivie au moins à l’égard de certains aspects de ses activités. La Cour devait alors se prononcer sur une demande de dommages-intérêts, présentée contre le syndicat par un de ses membres, pour la perte de salaire subie à la suite de sa suspension du syndicat. Le jugement de la Cour a été rendu par le juge Cooper qui a déclaré (aux pp. 332 et 333):

[TRADUCTION] Je crois qu’en adoptant la Loi sur les relations industrielles et sur les enquêtes visant les différends du travail, le Parlement a clairement indiqué son intention de faire d’un syndicat une entité juridique, même s’il n’est pas un corps constitué en corporation: voir Polymer, précité, à la p. 616 — au moins pour certaines fins, notamment, à mon avis, l’action intentée par un de ses membres suite à son exclusion du syndicat, lorsque celle-ci nuit à son emploi… je suis d’avis que le droit canadien a évolué de telle sorte que ces organismes, parfois très grands et de toute façon d’une importance capitale dans notre société moderne, sont maintenant reconnus comme plus qu’un simple groupement d’individus, et que telle était l’intention des législateurs, si l’on examine les dispositions des lois sur les relations de travail maintenant en vigueur dans ce pays.

Il y est question, à la p. 334, de l’Acte concernant les associations ouvrières:

[TRADUCTION] En dernier lieu, j’ai également examiné l’effet du défaut d’enregistrer l’association en vertu de l’Acte concernant les associations ouvrières. J’estime que les dispositions de la Loi sur les relations industrielles et sur les enquêtes visant les différends du travail suffisent à elles seules à étayer la conclusion à laquelle je suis parvenu.

Les grandes lignes et les principes du système de négociation collective instauré par la loi fédérale et soumis à l’examen des tribunaux de la Nouvelle-Écosse sont pour l’essentiel les mêmes que ceux du Code actuellement en vigueur. On pourrait croire

[Page 135]

à première vue que la Cour d’appel de l’Alberta est arrivée à la conclusion contraire dans l’arrêt General Teamsters Local 362 of International Brotherhood of Teamsters, Chauffeurs, Warehousemen & Helpers of America v. Midland Superior Express Ltd.[7] La Cour a en fait jugé que l’employeur ne pouvait intenter une action contre le syndicat représentant ses employés en vertu de la loi fédérale sur les relations de travail, mais elle l’a fait pour le simple motif que le Code accorde au Conseil canadien des relations du travail la compétence exclusive d’entendre le litige en cause et que l’employeur doit épuiser tous ses recours devant le Conseil en vertu de cette loi. Il semble que ni la majorité ni la minorité n’ont mis en doute que le syndicat soit une entité juridique capable de faire valoir, en son propre nom, ses droits et pouvoirs en vertu de la législation du travail. La Cour n’avait pas à aller plus loin et elle s’en est donc tenue là.

Le paragraphe 123(1) du Code prévoit que lorsqu’une personne a omis de se conformer à une ordonnance ou à une décision du Conseil rendue en vertu du Code «…toute personne ou association concernée» peut déposer à la Cour fédérale du Canada copie du dispositif de l’ordonnance ou de la décision et qu’une fois enregistrée, l’ordonnance a la même force et le même effet que s’il s’agissait d’un jugement émanant de cette cour. Il n’y a aucun doute que la présence de cette disposition dans la loi fédérale a eu une influence sur la décision concernant la validité d’un recours devant la Cour suprême de l’Alberta, dans l’arrêt Midland Superior, précité. Il est significatif que les sections locales aient été respectivement désignées parties défenderesses en leurs propres noms dans ces procédures intentées en vertu du Code et que leur capacité juridique n’ait pas été contestée.

Les tribunaux ont généralement interprété les lois fédérales et provinciales sur les relations de travail de la même façon que le juge Farwell a vu la législation du Royaume-Uni dans l’arrêt Taff Vale, précité. Avec les années, notre droit a admis le concept selon lequel le législateur est censé avoir considéré les syndicats et les associations patronales comme des entités juridiques dans l’exercice de leurs fonctions respectives dans le domaine des

[Page 136]

relations de travail. En l’espèce, les sections locales ont été accréditées à titre d’agents négociateurs des employés en cause et ont ainsi acquis une capacité juridique clairement définie aux termes de la loi. La Cour d’appel de la Colombie-Britannique, dans l’arrêt Vancouver Machinery Depot Ltd. et al. v. United Steelworkers of America et al.[8], et la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse, dans l’arrêt O’Laughlin v. Halifax Longshoremen’s Association, précité, ont jugé que bien que le syndicat international, dans le premier cas, et l’association d’employés, dans le second, n’aient pas été accrédités comme agents négociateurs, ils constituent cependant des entités juridiques aux fins des procédures instituées. Le même raisonnement s’applique évidemment à la capacité juridique de l’Association. Le dossier ne dit pas si l’Association a été désignée par le Conseil aux termes de l’art. 131.

L’Acte concernant les associations ouvrières de 1872 ne s’applique pas en l’espèce parce que, d’après le dossier, aucun des trois syndicats n’a été enregistré sous son régime et, en conséquence, aux fins des présentes, l’Acte n’est pas en vigueur. On peut prétendre qu’implicitement, le Parlement entendait qu’aucune procédure ne puisse être intentée contre un syndicat qui ne s’était pas enregistré et n’avait donc pas recherché la protection des dispositions de l’Acte concernant les associations ouvrières. Je ne suis pas de cet avis. Il n’y a aucun parallèle ni analogie possible entre la loi fédérale et The Ontario Rights of Labour Act, précitée. Cette dernière loi entre dans le cadre général de la législation du travail et s’applique sans qu’il soit nécessaire de l’invoquer. Par contre, l’Acte concernant les associations ouvrières est une loi particulière portant sur un nombre donné de sujets concernant les syndicats; elle ne devient applicable que si le syndicat s’enregistre volontairement en vertu de l’Acte. Au contraire, le Code adopté par le Parlement en 1972 fournit un cadre moderne et global aux relations de travail dans ses aspects qui relèvent de la compétence fédérale. Seuls des groupes constituant des entités juridiques peuvent efficacement exercer les droits et remplir les obligations découlant de cette loi. Le raisonne-

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ment qui a prévalu dans l’arrêt Taff Vale, précité, et les arrêts canadiens ultérieurs, s’applique de façon aussi persuasive dans le cas du Code. Il n’est pas nécessaire de décider, comme quelques arrêts précités l’ont fait, si les tribunaux peuvent entendre une action intentée par ces entités juridiques, ou contre elles, en dehors de ce qui concerne l’exécution de leurs obligations et l’exercice de leurs droits en vertu du Code. A mon avis, s’il ne souhaitait pas que l’agent négociateur et l’employeur soient considérés comme des entités juridiques aux fins des relations de travail, quel que puisse avoir été leur statut juridique aux termes des lois alors existantes ou de la common law, le Parlement l’aurait dit expressément dans le Code. En conséquence, l’Association est une entité juridique parfaitement habile à intenter ces procédures; les trois sections locales sont également des entités juridiques parfaitement habiles en droit à y être jointes comme parties défenderesses. En ce qui concerne l’Association, cette conclusion n’est pas vraiment cruciale puisque deux des employeurs sont co-demandeurs et sont clairement représentés dans les conventions par l’Association; ils peuvent donc prendre part aux procédures à titre de demandeurs, indépendamment du sort de l’Association. Même si, dans certaines provinces, la coutume est depuis longtemps établie de joindre comme parties défenderesses les dirigeants ou mandataires du syndicat, ou les membres qui ont contrevenu à la loi applicable, il n’est pas à mon avis essentiel que cette pratique soit suivie. Les sections locales sont des entités juridiques habiles à être poursuivies en justice et à comparaître devant la Cour pour répondre à la demande d’injonction présentée dans le but de leur interdire de participer à des activités qui ont été jugées constituer une grève illégale.

Les sections locales prétendent devant cette Cour qu’en raison de la doctrine universellement reconnue de la «solidarité syndicale», le Parlement ne peut avoir eu l’intention, en promulguant le Code, de considérer comme une «grève» le refus de franchir un piquet de grève licite entourant le lieu de travail des employés. On peut présumer que les sections locales appliquent le même argument aux dispositions de leurs conventions collectives qui contiennent la même définition de «grève». Ce

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point de vue est étayé par la décision dans MacMillan, Bloedel Packaging Limited v. Pulp, Paper and Woodworkers of Canada, Local 5 and Local 8, et al.[9], où le Conseil des relations du travail de la Colombie-Britannique a interprété la définition statutaire de grève comme incluant un

[TRADUCTION] …élément subjectif: un effort concerté des employés visant spécifiquement à contraindre un employeur à régler un différend portant sur les conditions de travail. C’est justement cette motivation qui est absente dans le cas des employés qui respectent un piquet de grève.

Dans l’arrêt Tramp Shipping Corporation v. Greenwich Marine Inc.[10], lord Denning, Maître des rôles, a adopté une définition similaire de la grève (à la p. 992).

La réponse à cette prétention se trouve dans l’historique même de la législation fédérale du travail. La Loi des enquêtes en matière de différends industriels, S.R.C. 1927, chap. 112, contient à son al. 2e) la définition suivante de grève:

«grève» ou «se mettre en grève», sans restriction du sens ordinaire de l’expression, signifie cessation de travail de la part d’un certain nombre d’employés agissant d’un commun accord, ou refus concerté ou refus réglé par entente mutuelle d’un certain nombre d’employés de continuer à travailler pour un patron, en conséquence d’un différend, dans le but de forcer le patron ou d’aider d’autres employés à forcer leur patron à accepter certaines conditions de travail;

Cette loi a été remplacée en 1948 par la Loi sur les relations industrielles et sur les enquêtes visant les différends du travail, 1948 (Can.), chap. 54, qui retranche la restriction selon laquelle le refus de fournir des services doit avoir pour but de forcer l’employeur à accepter les conditions de travail proposées. Elle contient cette définition:

p) «grève» comprend la cessation du travail, ou le refus de travailler ou de continuer le travail, par des employés, en liaison ou de concert, ou en conformité d’une entente commune;

Le Code actuel reprend la définition de la loi de 1948. Il n’y a maintenant aucun doute que le Parlement a adopté une définition objective de «grève», dont les éléments constitutifs sont l’arrêt

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du travail, conjointement ou de connivence. Que le mobile soit secret ou explicite est sans importance, la seule condition étant qu’il y ait arrêt du travail de connivence. En l’espèce, les conclusions concordantes excluent cet aspect des prétentions.

Le refus de franchir un piquet de grève licite d’un autre syndicat ne peut constituer une grève que s’il répond à la définition de grève; heureusement, aux fins du présent pourvoi, elle est essentiellement la même dans la loi et les conventions. Selon cette définition, il doit y avoir arrêt du travail de la part d’employés agissant a) «conjointement» ou b) «de concert» ou c) «de connivence». En l’espèce, ces trois expressions viennent se greffer au même principe syndicaliste fondamental qui interdit de franchir des piquets de grève. Les auteurs de l’al. Xb) de la convention de la section locale 1039, de l’art. 12:02 de la section locale 273 et de la définition du Code semblent avoir visé, compte tenu du sens ordinaire de l’expression «de connivence», le cas où l’«arrêt du travail» résulte d’un principe commun aux employés, comme l’interdiction de franchir les piquets de grève. La convention aurait pu être plus précise et comprendre dans la définition de «grève» un arrêt du travail résultant du refus de franchir un piquet de grève. Néanmoins, la question est simple: l’expression «de connivence» comprend-elle le cas plus spécifique d’un arrêt du travail résultant de l’application du principe syndicaliste généralement accepté que les syndiqués ne doivent pas franchir les piquets de grève? Le problème se complique en l’espèce du fait qu’une des trois conventions collectives ne définit pas le mot «grève» et qu’aucune ne définit «arrêt du travail». Étant donné le sens ordinaire de ces termes, il n’est pas possible d’y mettre une restriction qui exclurait un arrêt du travail dans un seul cas, savoir le respect d’un piquet de grève par les employés de l’unité de négociation.

L’alinéa XIa) de la convention de la section locale 1039 (article 12.01 de la convention de la

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section locale 1764 et article 13:01 de la convention de la section locale 273) prévoit:

[TRADUCTION] Les parties à la présente convention conviennent que cette convention telle que rédigée constitue la seule et unique entente conclue entre elles et contient toutes les conditions de travail qu’elles devront respecter. Elles conviennent également que nulles conditions, pratiques, coutumes, règles ou ententes antérieures n’auront pour effet de modifier les termes de la présente convention.

L’unique différence de terminologie se trouve à l’art. 12.01 de la convention de la section locale 1764 qui prévoit que cette convention collective constitue [TRADUCTION] «la seule entente écrite entre les parties» (c’est moi qui souligne). On retrouve cependant la deuxième phrase dans les trois conventions et elle exclut toutes les «conditions… coutumes, règles ou ententes» antérieures. Vu ces deux dispositions et la clause susmentionnée dans lesquelles les parties ont convenu qu’il n’y aurait pas d’arrêt du travail et que la convention collective ne serait pas modifiée par des pratiques et coutumes antérieures, il faut conclure que les sections locales ont violé leurs conventions collectives respectives. La Cour d’appel du Manitoba a examiné les mêmes situation et argumentation dans l’arrêt Winnipeg Builders’ Exchange et al. c. International Brotherhood of Electrical Workers, Local Union 2085 et al.[11] (à la p. 154), confirmé par cette Cour. Le jugement du juge Ritchie dans E. Gagnon et autres c. Foundation Maritime Limited[12] (aux pp. 438 et 445), rendu en son nom et en celui de deux autres membres de cette Cour, et celui du juge Locke (à la p. 542) vont dans le même sens.

Dans l’arrêt Furness Withy and Company Limited and Maritime Employers Association v. International Longshoremen’s Association, Local 273[13], qui vise aussi une des sections locales impliquées dans le présent pourvoi, la Division du Banc de la Reine de la Cour suprême du Nouveau-Brunswick a conclu que le refus de franchir un piquet de grève licite ne constitue une violation ni du Code, ni de la convention collective. Avec égards, je ne puis convenir que cette conclusion

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s’applique aux circonstances constatées en l’espèce par les cours d’instance inférieure. Le syndicat a convenu, aux termes de la convention collective, qu’il n’y aurait pas de grève et qu’il fournirait toute la main-d’œuvre demandée par les employeurs participants. La convention prévoit également qu’aucune coutume ou règle antérieure ne pourra s’appliquer et qu’elle [TRADUCTION] «constitue la seule et unique entente conclue entre les parties». Dans l’arrêt Furness Withy, précité, le savant juge s’est fondé sur une disposition de la Labour Relations Act du Nouveau-Brunswick qui n’avait pas été invoquée (puisque les procédures étaient intentées en vertu du Code) et qui est inapplicable en l’espèce, pour finalement conclure que certains membres du syndicat avaient refusé de franchir un piquet de grève licite parce qu’ils avaient été [TRADUCTION] «persuadés de ne pas le faire» par le piquet de grève d’un autre syndicat. Les faits de cette affaire diffèrent de l’espèce présente en ce que les deux syndicats représentaient des employés du même employeur, de sorte qu’on pouvait dire qu’un des syndicats bénéficiait, par rapport aux membres de l’autre syndicat, d’une certaine force de persuasion qui était en quelque sorte liée aux intérêts syndicaux de ses propres membres. Ce n’est pas le cas en l’espèce. Aux fins du présent pourvoi, je peux en rester là et dire simplement qu’à la lumière des faits constatés par les cours d’instance inférieure, le raisonnement et les principes appliqués dans l’arrêt Furness Withy, précité, ne s’appliquent pas en l’espèce où il est question d’un situs commun et non d’un employeur commun.

Il reste à examiner un argument avancé indirectement par les sections locales, savoir que l’injonction a pour effet, contrairement à l’equity, de forcer les membres des sections locales à travailler pour l’Association. Cet argument se fonde sur la doctrine établie dans l’arrêt Lumley v. Wagner[14], et peut se diviser en deux points: premièrement, que l’injonction n’aurait pas dû être délivrée contre le syndicat parce que le Code ne reconnaît pas la possibilité pour un syndicat (par opposition à ses membres) de faire la grève et, deuxièmement, que

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l’ordonnance a pour effet de créer une obligation de fournir des services personnels, ce que les tribunaux ont coutume de ne pas faire.

Dans son ordonnance, la Division du Banc de la Reine a précisément dit

[TRADUCTION] que les défendeurs, leurs dirigeants, membres et employés s’abstiennent de poursuivre une grève illégale ou d’y participer…

L’article 107 du Code définit la «grève» comme un refus de travailler «de la part d’employés». L’article 180 du Code prévoit que «nul syndicat ne doit déclarer ni autoriser une grève». Par opposition à cette disposition le par. (2) de l’article prescrit que «nul employé ne doit participer à une grève». On retrouve la même distinction aux art. 182 et 190.

La formulation utilisée par les parties, dans les trois conventions collectives, est cependant tout à fait différente. L’article 11.01 de la convention collective de la section locale 1764 prévoit notamment:

[TRADUCTION] …le syndicat convient avec les compagnies qu’il n’y aura pas de grève pendant la durée de la présente convention…

La même disposition est reprise en termes presque identiques à l’al. Xa) de la convention de la section locale 1039 et à l’art. 12:01 de la convention de la section locale 273. La situation juridique d’un syndicat lié par une telle convention a été étudiée en détail dans l’affaire Re Polymer Corporation Ltd.,[15] où un conseil d’arbitrage, sous la présidence du professeur Laskin, tel était alors son titre, a conclu que:

[TRADUCTION] L’essentiel était de montrer qu’il y avait officiellement rejet de la grève illégale, en séparant les représentants du syndicat des manifestants.

Les termes du contrat obligeaient le syndicat, par l’entremise de ses dirigeants à tous les niveaux de l’organisation, à manifester, par des actes appropriés, son intention de faire respecter les termes de la convention collective. La preuve au dossier des présentes procédures démontre exactement le contraire. La preuve ne révèle aucune mesure prise par le syndicat, par l’entremise de ses dirigeants,

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pour s’acquitter de l’engagement pris dans les articles susmentionnés. Bien au contraire, les dirigeants des sections locales eux-mêmes ne se sont pas présentés au travail malgré la demande de l’Association, De la même façon, les sections locales ont violé l’engagement pris dans les conventions collectives de fournir, de la façon prévue, le nombre d’employés demandé par les employeurs. Le texte de l’ordonnance reprend généralement celui des procédures dans lesquelles les dirigeants et certains membres du syndicat sont également désignés comme défendeurs, mais il n’y a rien d’invalide, à mon avis, à inclure les termes «poursuivre» et «participer» dans une injonction qui vise non seulement les différentes sections locales mais également [TRADUCTION] «leurs dirigeants, membres et employés…». On peut dire que la mention des «dirigeants, membres et employés» est superflue, puisque les sections locales, comme les autres entités juridiques, ne peuvent agir que par l’intermédiaire de ces personnes. Dans ces circonstances, il serait plus approprié d’adopter la formule précise proposée par la Chambre des lords pour l’ordonnance délivrée dans Marengo v. Daily Sketch and Sunday Graphic, Ltd.[16] (lord Uthwatt, à la p. 407):

[TRADUCTION] A mon avis, la formulation courante peut soulever des objections puisqu’elle implique qu’une ordonnance a été rendue contre les employés, les ouvriers et les dirigeants. Ce n’est pas, je l’ai dit, le but de l’ordonnance. L’essentiel de l’affaire est d’interdire aux défendeurs tout moyen de commettre les actes prohibés. Il n’est pas nécessaire de mentionner les employés, les ouvriers et les mandataires, mais il peut être souhaitable de souligner la portée de l’ordonnance en y faisant allusion. Je suggère (ma suggestion constitue peut-être un compromis unilatéral avec la tradition) que les juges devraient voir si l’injonction doit utiliser la formule interdisant «aux défendeurs, eux-mêmes ou par l’intermédiaire de leurs employés, ouvriers, mandataires ou autres», de commettre les actes prohibés. En l’espèce, les défendeurs sont une société à responsabilité limitée qui ne peut agir que par l’intermédiaire des autres. J’invite donc Vos Seigneuries à se demander si l’injonction ne devrait pas, en l’espèce, se présenter sous la formule interdisant «aux défendeurs, eux-mêmes ou par l’intermédiaire de leurs employés, ouvriers, mandataires ou autres», de commettre les actes prohibés.

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Toutefois, cette formulation a été adoptée dans les injonctions depuis plusieurs années (voir Re Tilco Plastics Ltd. v. Skuvjat et al.[17]; Mitchell Bros. Truck Lines v. General Truck Drivers & Helpers Union, Local 31 and Walcott[18] sans aucun doute pour la bonne raison que la portée et le sens de l’ordonnance apparaissent ainsi clairement aux personnes qui sont vraisemblablement visées. De toute façon, on ne saurait dire que cette formulation cause un préjudice aux personnes visées en droit par l’ordonnance.

En ce qui concerne la deuxième partie de l’argument, je souscris aux propos du juge en chef Cartwright de cette Cour dans l’arrêt Winnipeg Builders’ Exchange et al. c. International Brotherhood of Electrical Workers, Local Union 2085 et al., précité (à la p. 251):

[TRADUCTION] Il existe une différence réelle entre l’ordre donné à une personne de travailler pour une autre et l’ordre donné à un groupe, lié par une convention collective, de n’entreprendre aucune action concertée pour violer ce contrat et enfreindre la loi de la Province. Sans aucun doute, comme l’a dit le juge Freedman, l’ordonnance confirmée par la Cour d’appel dans la présente cause exigeait des employés en grève qu’ils retournent au travail. A mon avis, il n’y a pas là d’erreur de droit; en décider autrement rendrait illusoire la protection accordée aux parties par la convention collective et par la loi.

Dans l’arrêt Pacific Press Ltd. v. Vancouver Typographical Union Local 226 et al.[19], la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a délivré une injonction interdisant au syndicat d’«approuver ou permettre» une grève. Le juge Robertson a déclaré (à la p. 225):

[TRADUCTION] En l’espèce, chacun des syndicats a convenu avec l’intimé que ce dernier «sera à l’abri des débrayages, grèves ou boycottages des membres du syndicat et de toute autre action concertée de leur part perturbant les opérations régulières habituelles de ses services». Si la Cour ne fait qu’ordonner au syndicat de ne pas «provoquer» ces situations, on est bien loin d’exiger qu’il respecte son engagement de mettre l’intimé «à l’abri» de ces perturbations; les mots «approuver» et «permettre», ou l’un des deux, car je crois qu’ils sont synonymes dans ce cas-ci, sont essentiels pour obliger le

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syndicat à faire ce qu’il a convenu de faire. Il n’y a aucune raison de ne pas ordonner à chacun des syndicats de faire ce qu’il a accepté de faire.

Mises à part certaines considérations et distinctions juridiques subtiles, l’effet d’une injonction ordonnant la cessation d’une grève illégale est tout à fait différent en fait d’une ordonnance qui enjoint à un chanteur d’opéra de chanter, comme c’était le cas dans Lumley v. Wagner[20].

Pour ces motifs, je suis d’avis de rejeter le pourvoi avec dépens.

Pourvoi rejeté avec dépens.

Procureurs des appelantes: Teed & Teed, St-Jean, N.-B.

Procureurs des intimées: Nason & Collier, St-Jean, N.-B.

[1] [1976] 1 R.C.S. 718.

[2] (1975), 57 D.L.R. (3d) 199.

[3] (1963), 38 D.L.R. (2d) 675.

[4] [1901] A.C. 426.

[5] [1960] R.C.S. 265.

[6] (1972), 28 D.L.R. (3d) 315.

[7] (1974), 43 D.L.R. (3d) 540.

[8] [1948] 2. W.W.R. 325.

[9] (1976), C.L.L.C. 16,017.

[10] [1975] 2 All E.R. 989.

[11] (1966), 57 D.L.R. (2d) 141 conf. [1967] R.C.S. 628.

[12] [1961] R.C.S. 435.

[13] (1973), 9 N.B.R. (2d) 533.

[14] (1852), 1 De G.M. & G. 604.

[15] (1958), 59 C.L.L.C., para. 18,158.

[16] [1948] 1 All E.R. 406.

[17] (1966), 57 D.L.R. (3d) 413.

[18] [1974] 4 W.W.R. 449.

[19] (1971), 15 D.L.R. (3d) 212.

[20] (1852), 1 De G.M. & G. 604.


Synthèse
Référence neutre : [1979] 1 R.C.S. 120 ?
Date de la décision : 03/10/1978
Sens de l'arrêt : Le pourvoi doit être rejeté

Analyses

Droit du travail - Injonctions - Grève illégale - Piquet de grève - Arrimage - Refus de franchir le piquet de grève - Code canadien du travail, 1972 (Can.), chap. 18, art. 107, 123(1), 180, 182, 190 - Acte concernant les associations ouvrières, 1872 (Can.), chap. 30, art. 17.

Les appelantes sont trois syndicats accrédités en vertu du Code canadien du travail. Une injonction interlocutoire ordonnant que celles-ci, leurs dirigeants, membres et employés s’abstiennent de poursuivre une grève illégale ou d’y participer a été délivrée. L’injonction a fait suite au refus des employés de se présenter au travail le 11 août 1976. Les motifs invoqués contre l’injonction sont qu’au moment de la demande d’injonction, aucun des employés des intimées ne refusait de travailler, que le refus des membres des sections locales appelantes de traverser un piquet de grève licite ne constitue pas une grève et que de toute façon aucune injonction ne pouvait être délivrée contre des syndicats ouvriers qui ne sont pas constitués en corporation.

Arrêt: Le pourvoi doit être rejeté.

La prétention qu’à l’époque en cause l’Association n’avait pas d’employés n’est pas fondée. La structure globale des activités d’arrimage du port de Saint-Jean a amené l’adoption d’un cadre assez inhabituel où la relation normale employeur-employé ne s’établit pas ou ne s’établit que lorsqu’un membre de la section locale commence un travail particulier. Les conventions sont entièrement fondées sur ce principe. En vertu des conventions, les membres de l’Association et les membres des sections locales sont respectivement les employeurs

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et les employés, quels que puissent être par ailleurs leurs droits et obligations en tant qu’employeurs et employés en common law. Les sections locales se sont engagées à fournir de la main-d’œuvre à l’association patronale et à ses membres. On ne peut donc dire que les conventions ne doivent s’appliquer et ne s’appliquent en fait qu’après que les membres des sections locales se sont présentés au travail.

En ce qui concerne la capacité juridique des parties, le Code et les diverses lois provinciales sur les relations de travail accordent aux syndicats des obligations et des droits différents et distincts de ceux de leurs membres. Depuis l’arrêt Taff Vale, [1901] A.C. 426, notre droit a admis le concept selon lequel le législateur est censé avoir considéré les syndicats et les associations patronales comme des entités juridiques dans l’exercice de leurs fonctions respectives dans le domaine des relations de travail. Bien que l’Acte concernant les associations ouvrières, 1872 (Can.), chap. 30, ne s’applique pas en l’espèce, les sections locales sont des entités juridiques habiles à être poursuivies en justice et à comparaître devant la Cour pour répondre à la demande d’injonction présentée dans le but de leur interdire de participer à des activités qui ont été jugées constituer une grève illégale.

Le refus de franchir un piquet de grève d’un autre syndicat ne peut constituer une grève que s’il répond à la définition de «grève». Le Parlement a adopté une définition de «grève» qui prévoit qu’il doit y avoir arrêt du travail de la part d’employés agissant «conjointement» ou «de concert» ou «de connivence». Le mobile est sans importance, la seule condition étant qu’il y ait arrêt du travail de connivence. En l’espèce, la définition est essentiellement la même dans les conventions et la loi. L’expression «de connivence» vient se greffer au principe de la solidarité syndicale qui interdit de franchir les piquets de grève. La convention aurait pu être plus précise et comprendre dans la définition de grève un arrêt de travail résultant du refus de franchir un piquet de grève, mais il n’est pas possible, étant donné le sens ordinaire des termes utilisés dans les conventions, d’y mettre une restriction qui exclurait un arrêt du travail résultant du respect d’un piquet de grève par les employés de l’unité de négociation.

La formulation utilisée par la Division du Banc de la Reine dans son ordonnance, «que les défendeurs, leurs dirigeants, membres et employés s’abstiennent de poursuivre une grève illégale ou d’y participer…», est valable et, même s’il serait plus approprié d’adopter la formule précise proposée dans l’arrêt Marengo v. Daily Sketch and Sunday Graphic, Ltd., [1948] 1 All E.R. 406, à la p. 407, cette formulation a été adoptée dans les injonctions depuis plusieurs années, sans aucun doute

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pour la bonne raison que la portée et le sens de l’ordonnance apparaissent ainsi clairement aux personnes qui sont vraisemblablement visées. L’effet d’une injonction ordonnant la cessation d’une grève illégale est tout à fait différent en fait d’une ordonnance qui enjoint à un chanteur d’opéra de chanter, comme c’était le cas dans Lumley v. Wagner, (1852) 1 De G.M. & G. 604.


Parties
Demandeurs : Association internationale des débardeurs, section locale 273
Défendeurs : Association des employeurs maritimes

Références :

Jurisprudence: McGavin Toastmaster Ltd. c. Ainscough, [1976] 1 R.C.S. 718

Re Blouin Drywall Contractors Ltd. and United Brotherhood of Carpenters and Joiners of America, Local 2486 (1975), 57 D.L.R. (3d) 199

Nipissing Hotel Limited et al. v. Hotel and Restaurant Employees and Bartenders International Union et al. (1963), 38 D.L.R. (2d) 675

The Taff Vale Railway Company v. The Amalgamated Society of Railway Servants, [1901] A.C. 426

International Brotherhood of Teamsters c. Therien, [1960] R.C.S. 265

O’Laughlin v. Halifax Longshoremen’s Association (1972), 28 D.L.R. (3d) 315

Vancouver Machinery Depot Ltd. et al. v. United Steelworkers of America et al., [1948] 2 W.W.R. 325

MacMillan, Bloedel Packaging Limited v. Pulp, Paper and Woodworkers of Canada, Local 5 and Local 8, et al. (1976), C.L.L.C. 16, 017, Tramp Shipping Corporation v. Greenwich Marine Inc., [1975] 2 All E.R. 989

Winnipeg Builders’ Exchange et al. c. International Brotherhood of Electrical Workers, Local Union 2085 et al. (1966), 57 D.L.R. (2d) 141 confirmé par [1967] R.C.S. 628

E. Gagnon et autres c. Foundation Maritime Limited [1961] R.C.S. 435

Furness Withy and Company Limited and Maritime Employers Association v. International Longshoremen’s Association, Local 273, (1973), 9 N.B.R. (2d) 533

Lumley v. Wagner (1852), 1 De G.M. & G. 604

Re Polymer Corporation Ltd. (1958), 59 C.L.L.C. para. 18158

Marengo v. Daily Sketch and Sunday Graphic, Ltd., [1948] 1 All E.R. 406

Re Tilco Plastics Ltd. v. Skuvjat et al. (1966), 57 D.L.R. (3d) 413

Mitchell Bros. Truck Lines v. General Truck Drivers and Helpers Union, Local 31 and Walcott, [1974] 4 W.W.R. 449

Pacific Press Ltd. v. Vancouver Typographical Union Local 226 et al. (1971), 15 D.L.R. (3d) 212.

Proposition de citation de la décision: Association internationale des débardeurs, section locale 273 c. Association des employeurs maritimes, [1979] 1 R.C.S. 120 (3 octobre 1978)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1978-10-03;.1979..1.r.c.s..120 ?
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