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24/06/1977 | CANADA | N°[1977]_2_R.C.S._817

Canada | Imperial Oil Ltd. c. Nova Scotia Light and Power Co. Ltd., [1977] 2 R.C.S. 817 (24 juin 1977)


Cour suprême du Canada

Imperial Oil Ltd. c. Nova Scotia Light and Power Co. Ltd., [1977] 2 R.C.S. 817

Date: 1977-06-24

Imperial Oil Limited Appelante;

et

Nova Scotia Light and Power Company Limited Intimée;

1977: les 25 et 26 mai; 1977: le 24 juin.

Présents: Les juges Martland, Judson, Ritchie, Spence et Dickson.

EN APPEL DE LA DIVISION D’APPEL DE LA COUR SUPRÊME DE LA NOUVELLE-ÉCOSSE

Cour suprême du Canada

Imperial Oil Ltd. c. Nova Scotia Light and Power Co. Ltd., [1977] 2 R.C.S. 817

Date: 1977-06-24

Imperial Oil Limited Appelante;

et

Nova Scotia Light and Power Company Limited Intimée;

1977: les 25 et 26 mai; 1977: le 24 juin.

Présents: Les juges Martland, Judson, Ritchie, Spence et Dickson.

EN APPEL DE LA DIVISION D’APPEL DE LA COUR SUPRÊME DE LA NOUVELLE-ÉCOSSE


Sens de l'arrêt : Le pourvoi doit être rejeté

Analyses

Contrats - Disposition prévoyant un ajustement du prix en cas de modification des impôts - Interprétation - Portée de la disposition - Applicabilité aux modifications d’impôts étrangers - Applicabilité à l’augmentation du prix coûtant par les compagnies associées - Applicabilité à des droits et impôts canadiens - Droits sur l’importation - Caisse des réclamations de la pollution maritime.

Les parties ont conclu un contrat en vertu duquel Imperial devait approvisionner totalement l’intimée, «Nova Scotia», en combustible de soute du 1er janvier 1970 au 31 décembre 1976. Le contrat prévoyait que toute «augmentation ou réduction des taxes, impôts, charges ou droits applicables au produit ou à sa fabrication, vente ou livraison» ou «toute imposition de quelque nouvel impôt, taxe, droit ou charge à l’égard du produit ou de sa production, fabrication, vente ou livraison», assumée par Imperial se traduirait par un ajustment du prix. La clause ne visait pas un impôt sur le revenu ou sur les bénéfices. Suite à des augmentations de taxes ou de redevances et à l’imposition de nouvelles taxes par le gouvernement du Venezuela sur la production et l’exportation du pétrole brut, le prix du pétrole brut payé par Imperial a augmenté. Imperial a cherché à imputer ces coûts supplémentaires à l’intimée, en vertu du contrat. Tant le juge de première instance que la Division d’appel ont décidé que le contrat ne visait que les impôts canadiens sur le produit, assumés par Imperial et non par d’autres compagnies du groupe Exxon.

Imperial a réclamé également le remboursement des paiements qu’elle a dû faire à la Caisse des réclamations de la pollution maritime en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada, S.R.C. 1970, c. S-9, modifié par S.R.C. 1970, c. 27 (2e Supp.) et le juge de première instance a accueilli cette demande. En appel, «Nova Scotia» a contesté, par appel incident, son obligation relative aux contributions concernant l’importation jusqu’à la raffinerie d’Imperial. La Division d’appel a

[Page 818]

accueilli cet appel incident, jugeant que ces livraisons de pétrole brut ne constituaient pas des livraisons «du produit» et n’étaient en conséquence pas couvertes par la clause.

Arrêt: Le pourvoi doit être rejeté.

Le libellé de la clause ne visait qu’une augmentation (ou réduction) du prix payable par (ou crédité à) «Nova Scotia» à l’égard des taxes, impôts, charges ou droits imposés à Imperial à l’égard du combustible de soute. Elle ne s’appliquait pas aux augmentations du prix coûtant du pétrole acheté par Imperial en vertu des contrats d’approvisionnement avec ses filiales ou compagnies associées.

La conclusion de la Division d’appel sur l’appel incident était également fondée. Toutefois, la déduction du prix payable par «Nova Scotia» du montant de certains droits sur l’importation qui existaient à l’époque de la conclusion du contrat et avaient été supprimés, n’était pas appropriée à la lumière du raisonnement appliqué à l’égard de la Caisse des réclamations de la pollution maritime.

POURVOI interjeté d’un arrêt de la Division d’appel[1] de la Cour suprême de la Nouvelle‑Écosse qui a rejeté un appel et a accueilli un appel[2] incident d’un jugement de première instance prononcé par le juge Hart. Le pourvoi est rejeté et l’arrêt de la Division d’appel est confirmé sous réserve d’une modification.

J.J. Robinette, c.r., G.D. Finlayson, c.r., et J.A. Keefe, pour l’appelante.

W.B. Williston, c.r., R.N. Pugsley, c.r., E.A. LeBlanc, c.r., W.C. Graham, J.G. Godsoe, et R.K. Jones, pour l’intimée.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE MARTLAND — Ce pourvoi attaque un arrêt de la Division d’appel de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse rejetant un appel interjeté par l’appelante, ci-après appelée «Imperial», du jugement de première instance qui a rejeté son action contre l’intimée, ci-après appelée «Nova Scotia». Le jugement rendu par la Division d’appel a également accueilli l’appel incident de Nova Scotia.

Imperial et Nova Scotia ont conclu un contrat daté du 23 mars 1970, en vertu duquel Imperial

[Page 819]

consentait à approvisionner totalement Nova Scotia en combustible de soute du 1er janvier 1970 au 31 décembre 1976.

Voici les clauses pertinentes du contrat:

[TRADUCTION] 1. Le vendeur consent à vendre et à livrer tout le combustible de soute (ci-après appelé «le produit») dont l’acheteur aura besoin du 1er janvier 1970 au 31 décembre 1976, et l’acheteur consent à l’acheter, à en accepter la livraison et à en payer le prix.

3. Le prix à la livraison du produit est de $1.748 le baril (34,972 gallons impériaux).

9. Advenant une augmentation ou une réduction du montant des taxes, impôts, charges et droits applicables au produit ou à sa production, fabrication, vente ou livraison, ou advenant l’imposition de quelque nouvel impôt, taxe, charge ou droit à l’égard du produit ou de sa production, fabrication, vente ou livraison, qui est ou sera assumée par le vendeur, ce dernier modifiera le prix du produit en conséquence. Cette clause ne vise pas un impôt sur le revenu ou sur les bénéfices.

11. Le présent contrat devra être interprété conformément aux lois de la province de la Nouvelle-Écosse.

Le litige porte sur l’interprétation de la clause 9.

Les deux parties avaient prévu que la plus grande partie du combustible de soute proviendrait de la raffinerie de Imperial à Dartmouth en Nouvelle-Écosse. A cet endroit, Imperial raffine le pétrole brut et obtient du gaz de pétrole liquéfié (butane et propane), de l’essence brute ou du naphta, des distillats moyens (kérosène, lubrifiant pour moteur Diesel, huile de chauffe) et des résidus, c.-à-d. ce qui reste après l’évaporation de l’essence et des distillats moyens. A Dartmouth le résidu est réduit à du brai que l’on convertit en fuel-oil lourd en y ajoutant du distillat. L’objet du contrat porte précisément sur ce fuel-oil lourd.

Le pétrole brut raffiné par Imperial à Dartmouth est produit au Venezuela, en grande partie par Creole Petroleum Corporation, une filiale, comme Imperial, de Exxon Corporation. Pendant un certain temps Imperial a acheté le pétrole brut dont elle avait besoin à sa filiale, Albury Company

[Page 820]

Limited, sise aux Bermudes, qui elle-même l’achetait à Creole et à Exxon International, une branche de Exxon. Par la suite, Imperial a fait ses achats directement sans passer par Albury.

Suite à des augmentations de taxes ou de redevances et à l’imposition de nouvelles taxes par le gouvernement du Venezuela sur la production et l’exportation du pétrole brut, le prix du pétrole brut payé par Imperial aux vendeurs a commencé à augmenter dès le mois de décembre 1970, hausse qui s’est poursuivie. Imperial a cherché à imputer ces coûts supplémentaires à Nova Scotia, prétendant qu’elle avait le droit de le faire en vertu de la clause 9 du contrat. Nova Scotia a nié cette obligation et, en conséquence, Imperial a Intenté la présente action pour se faire rembourser.

Cette action a été rejetée par le juge de première instance, dont les motifs sont publiés à (1975), 62 D.L.R. (3d) 91, La Division d’appel a confirmé ce jugement dans des motifs publiés à (1976), 16 A.P.R. 488. Les deux tribunaux ont décidé que la clause 9 ne visait que les impôts canadiens sur le produit, le combustible de soute, assumés par Imperial et non pas par d’autres compagnies de groupe Exxon.

Je souscris à cette conclusion et aux motifs prononcés par les tribunaux d’instance inférieure. J’estime que le libellé de la clause 9 ne vise qu’une augmentation (ou réduction) du prix payable par (ou crédité à) Nova Scotia à l’égard des taxes, impôts, charges ou droits imposés à Imperial à l’égard du combustible de soute ou de la production, de la fabrication, de la vente ou de la livraison par Imperial dudit produit. La clause ne s’applique pas aux augmentations du prix coûtant du pétrole brut acheté par Imperial en vertu des contrats d’approvisionnement conclus avec ses filiales ou compagnies associées.

Imperial a réclamé également le remboursement des paiements qu’elle a dû faire à la Caisse des réclamations de la pollution maritime, établie le 15 février 1972, en vertu d’une modification de la Loi sur la marine marchande du Canada, S.R.C. 1970, c. S-9, modifiée par S.R.C. 1970, c. 27 (2e Supp.). En vertu de cette Loi, Imperial devait

[Page 821]

verser 15 cents par tonne, non seulement sur le pétrole importé au Canada, mais également sur le combustible de soute transporté de la raffinerie de Dartmouth aux usines de Nova Scotia.

Le juge de première instance a accueilli cette demande.

Nova Scotia reconnaît la validité de cette réclamation en ce qui concerne le transport «du produit», le combustible de soute, de la raffinerie de Dartmouth à ses usines mais, par appel incident, a contesté son obligation relative aux contributions concernant l’importation jusqu’à la raffinerie d’Imperial. La Division d’appel a accueilli cet appel incident, jugeant que, vu son interprétation de la clause 9 à l’égard de la première réclamation, les livraisons de pétrole brut à la raffinerie ne constituaient pas des livraisons «du produit» et n’étaient en conséquence pas couvertes par la clause. Je partage cette conclusion.

Un dernier point reste à trancher concernant le montant de $7,050.20. La Division d’appel a déduit cette somme du montant que Nova Scotia a reconnu devoir à Imperial pour les contributions à la Caisse des réclamations de la pollution maritime. Le 18 juin 1971, certains droits sur l’importation du pétrole, qui existaient à l’époque de la conclusion du contrat, ont été supprimés. La Division d’appel en a donc accordé la déduction du montant dû par Nova Scotia. A la lumière du raisonnement appliqué à l’égard de la Caisse des réclamations de la pollution maritime, cette déduction ne me semble pas appropriée.

Je suis d’avis de rejeter le pourvoi avec dépens et de confirmer le jugement de la Division d’appel, sous réserve de la suppression de la partie du deuxième alinéa qui suit les chiffres, «$170,621.15».

Jugement en conséquence.

Procureur de l’appelante: Donald McInnes, Halifax.

Procureur de l’intimée: H.B. Rhude, Halifax.

[1] (1975), 62 D.L.R. (3d) 91.

[2] (1976), 16 A.P.R. 488.


Parties
Demandeurs : Imperial Oil Ltd.
Défendeurs : Nova Scotia Light and Power Co. Ltd.

Références :
Proposition de citation de la décision: Imperial Oil Ltd. c. Nova Scotia Light and Power Co. Ltd., [1977] 2 R.C.S. 817 (24 juin 1977)


Origine de la décision
Date de la décision : 24/06/1977
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : [1977] 2 R.C.S. 817 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1977-06-24;.1977..2.r.c.s..817 ?
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