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01/10/1974 | CANADA | N°[1975]_2_R.C.S._449

Canada | Elizabeth Townhouses Ltd. c. Sigurdson, [1975] 2 R.C.S. 449 (1 octobre 1974)


Cour suprême du Canada

Elizabeth Townhouses Ltd. c. Sigurdson, [1975] 2 R.C.S. 449

Date: 1974-10-01

Elizabeth Townhouses Ltd.

et

Harold S. Sigurdson en tant que syndic de la faillite de Elizabeth Townhouses Ltd. (Défendeurs) Appelants;

et

Dieleman Planer Company Ltd. (Demanderesse) Intimée.

1974: les 16 et 17 mai; 1974: le 1er octobre.

Présents: Le juge en chef Laskin et les juges Judson, Spence, Beetz et de Grandpré.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

Cour suprême du Canada

Elizabeth Townhouses Ltd. c. Sigurdson, [1975] 2 R.C.S. 449

Date: 1974-10-01

Elizabeth Townhouses Ltd.

et

Harold S. Sigurdson en tant que syndic de la faillite de Elizabeth Townhouses Ltd. (Défendeurs) Appelants;

et

Dieleman Planer Company Ltd. (Demanderesse) Intimée.

1974: les 16 et 17 mai; 1974: le 1er octobre.

Présents: Le juge en chef Laskin et les juges Judson, Spence, Beetz et de Grandpré.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE


Synthèse
Référence neutre : [1975] 2 R.C.S. 449 ?
Date de la décision : 01/10/1974
Sens de l'arrêt : Le pourvoi doit être rejeté

Analyses

Privilèges de fournisseur - Projet de construction - Cessation des travaux de construction - Faillite du propriétaire - Projet subséquemment vendu et complété - Une réclamation de privilège par un fournisseur de matérieux a-t-elle été déposée dans le délai légal? - Sens de «abandon» - Mechanics’ Lien Act, R.S.B.C. 1960, c. 238, art. 23(2).

Du 1er juillet 1969 au 30 septembre 1970, l’intimée, le fournisseur de matériaux, a fourni du bois de construction à la compagnie appelante pour un projet de construction de maisons en bande et a réclamé un solde dû de $81,340.23. Dès juillet 1970, la compagnie traversait des difficultés financières et d’après la preuve aucun travail n’a été fait sur le projet après le 9 décembre et peu avait été accompli dans les mois précédents. Le 18 décembre 1970, un créancier a déposé une requête en faillite et une ordonnance de séquestre a été rendue le 31 décembre 1970 et un syndic nommé. A ce moment-là la plupart, mais non la totalité des unités des maisons en bande avaient été complétées. Le projet a été vendu plus tard et, conformément aux conditions du contrat de vente, la construction a été complétée en-dedans de la limite de temps fixée, soit le 15 mars 1971. Une réclamation de privilège par le fournisseur de matériaux a été déposée le 8 février 1971.

La question qui s’est posée est de savoir si la réclamation de privilège a été déposée dans le délai légal, c.-à-d., «pas plus tard que trente et un jours après achèvement ou abandon de l’amélioration à laquelle ont été fournis les matériaux.» Les tribunaux d’instance inférieure ont décidé qu’elle l’avait été.

Arrêt: Le pourvoi doit être rejeté.

[Page 450]

La cessation du travail et l’abandon ne sont pas nécessairement coexistants. Pour constituer un abandon une cessation de travail doit être permanente en ce sens qu’on n’avait pas l’intention de mener le projet à achèvement. Un changement de propriétaire de l’amélioration ne constitue pas en soi un abandon, et une simple cessation de travail n’en est pas un non plus.

POURVOI à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique[1] rejetant un appel d’un jugement du juge Harvey de la Cour de comté. Pourvoi rejeté.

R.C. Bray et R.G. Ward, pour les défendeurs, appelants.

M.I. Catliff et L.W. Perry, pour la demanderesse, intimée.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE JUDSON — La question qui se pose est de savoir si une réclamation de privilège par un fournisseur de matériaux a été déposée dans le délai légal. Les tribunaux de Colombie-Britannique, en première instance et en appel, ont jugé qu’elle l’avait été. Le réclamant de privilège est Dieleman Planer Company Ltd; le propriétaire était Elizabeth Townhouses Ltd., maintenant en faillite.

La disposition prévoyant le dépôt d’un privilège par un fournisseur de matériaux se trouve au par. (2) de l’art. 23 du Mechanics’ Lien Act, R.S.B.C. 1960, c. 238. Elle se lit comme suit:

23. (2) Une réclamation de privilège pour matériaux fournis peut être déposée comme prévu en la présente loi en tout temps après que le contrat de fourniture de matériaux a été fait, mais pas plus tard que trente et un jours après achèvement ou abandon de l’amélioration à laquelle ont été fournis les matériaux, ou autre terminaison du contrat relatif à la construction ou à l’exécution de l’amélioration…

Le texte antérieur, R.S.B.C. 1948, c. 205, art. 20, par. (1), al. b), avait exigé que le privilège soit déposé, dans le cas de matériaux, [TRADUCTION] «après l’expiration des trente et un jours suivant l’achèvement de l’érection, du bâtiment,» etc.

[Page 451]

Le fournisseur de matériaux, la demanderesse Dieleman Planer Company Ltd., entre le 1er juillet 1969 et le 30 septembre 1970 a fourni du bois de construction à la compagnie défenderesse et réclame un solde dû de $81,340.23. La réclamation de privilège a été déposée au bureau d’enregistrement de Kitimat le 8 février 1971, et au bureau d’enregistrement des titres de biens-fonds de Prince Rupert le 10 février 1971. Auxdites dates la plupart, mais non la totalité, des unités du projet de construction de maisons en bandes avaient été complétées.

Dès juillet 1970 il était apparent que Elizabeth Townhouses Ltd. traversait des difficultés financières. La créancière hypothécaire refusait de faire d’autres avances bien que la preuve indique que le projet aurait pu être complété largement par les avances hypothécaires qui restaient à faire. Le 18 décembre 1970, un créancier a déposé une requête en faillite et une ordonnance de séquestre a été rendue le 31 décembre 1970, et un syndic a été nommé.

A la date de l’ordonnance de séquestre, il est clair d’après la preuve et les conclusions des deux cours qu’aucun travail n’avait été fait depuis le 9 décembre et que peu avait été accompli dans les mois précédents. Mais il est également clair que le projet était complété à concurrence de 92 pour cent — 75 unités étaient louées, 10 unités étaient prêtes pour location, et 22 unités étaient incomplètes. Le coût d’achèvement était évalué à $117,000 mais il y avait un solde de $341,237.38 qui restait à verser comme avance par la créancière hypothécaire, la Société centrale d’hypothèques et de logement.

Peu après la nomination du syndic, la créancière hypothécaire a imposé certaines conditions, dont l’une était que le projet devait être vendu à un acheteur qui sur le plan financier et technique avait son agrément. Un contrat d’achat pour la valeur nette de $210,000 du syndic, plus le montant des sommes hypothécaires non encore avancées, a été conclu avec un acheteur qui avait l’agrément de la créancière hypothécaire. Les conditions de la vente exigeaient que la construction soit complétée le 15

[Page 452]

mars 1971 au plus tard. Le contrat de vente a été approuvé par le tribunal. Les bâtiments ont été dûment complétés en-dedans de la limite de temps fixée.

Les deux cours ont statué que la décision doit reposer sur l’interprétation du par. (2) de l’art. 23 de la Loi. Le juge McFarlane, en Cour d’appel, a eu quelques difficultés avec les mots de la fin «ou autre terminaison du contrat relatif à la construction ou à l’exécution de l’amélioration.» Il a déclaré que les appelants eux-mêmes n’avaient pas soulevé cette question en première instance ou en appel; que de toute façon, il n’y avait aucun semblable contrat en l’espèce présente, Elizabeth Townhouses étant son propre entrepreneur; et finalement, que les parties étaient parties du principe que le délai de dépôt afférent à la réclamation Dieleman était régi par les termes

pas plus tard que trente et un jours après achèvement ou abandon de l’amélioration à laquelle ont été fournis les matériaux.

Il a donc défini la difficulté comme étant une question d’abandon et il a été d’accord avec le juge de première instance et les motifs majoritaires rédigés par le juge d’appel Seaton sur ce point. Ces motifs sont les suivants:

[TRADUCTION] Au centre de l’argument principal des appelants il y a la position selon laquelle la situation était absolument sans espoir pour la compagnie appelante, et celle‑ci doit être réputée avoir abandonné le projet. A mon avis cela passe à côté de la question et l’on doit regarder la preuve, non pas pour voir s’il auraient dû abandonner, mais pour voir s’ils ont en fait abandonné.

Il est clair que les travaux avaient cessé, mais à mon avis la cessation du travail et l’abandon ne sont pas nécessairement coexistants. Pour constituer un abandon une cessation de travail doit être permanente en ce sens qu’on n’avait pas l’intention de mener le projet à achèvement. Les travaux sur ce projet ont cessé avant le 10 décembre mais la preuve est claire que l’on avait l’intention de recommencer les travaux lorsque les difficultés financières auraient été surmontées. Il était probable que ces difficultés seraient surmontées parce que le coût de l’achèvement était plus que compensé par les fonds qui restaient à être avancés sur l’hypothèque.

Je suis d’accord avec le juge de première instance qu’il est difficile de déterminer l’intention de la com-

[Page 453]

pagnie et que cette difficulté est rendue plus sévère encore par les divers rôles joués par les administrateurs en tant que créanciers, membres du comité de gestion et ainsi de suite. Je crois qu’il était pleinement fondé à conclure comme il Ta fait:

[TRADUCTION] «Nulle part dans la preuve puis-je discerner chez un de ceux qui étaient capables de contrôler la destinée du projet une intention quelconque d’abandonner l’amélioration, et il n’y a pas eu non plus de tel abandon de la manière que j’interprète ce terme. Il est vrai qu’il y a eu une courte cessation de travail quant à la construction de la partie non complétée de l’amélioration et cela, je pense, est seulement un facteur à considérer et un facteur insignifiant en comparaison du travail de bureau et des autres efforts continus visant à permettre la continuation de la construction comme telle. Un changement de propriétaire de l’amélioration ne constitue pas en soi un abandon, et une simple cessation de travail n’en est pas un non plus.»

Les conclusions de fait justifiées par la preuve infirment la prétention des appelants selon laquelle l’intimée ne peut avoir gain de cause du fait d’un dépôt tardif.

Je souscris à ces motifs. Cette branche de l’appel doit être rejetée.

Sur le montant de la réclamation, le juge de première instance a conclu en faveur de la réclamante pour le plein montant de $81,340.23. La majorité de la Cour d’appel a été d’accord avec le juge de première instance. Le juge d’appel McFarlane aurait réduit ce montant de $17,185. Mon avis est qu’aucune erreur n’a été démontrée dans les motifs de la majorité de la Cour d’appel et que cette branche de l’appel doit également être rejetée.

Je rejetterais l’appel avec dépens.

Appel rejeté avec dépens.

Procureurs des défendeurs, appelants: Bouck, Edwards & Co., Vancouver.

Procureur de la demanderesse, intimée: Laurence W. Perry, Smithers.

[1] [1973] 5 W.W.R. 743, 38 D.L.R. (3d) 595, 18 C.B.R. (N.S.) 105.


Parties
Demandeurs : Elizabeth Townhouses Ltd.
Défendeurs : Sigurdson
Proposition de citation de la décision: Elizabeth Townhouses Ltd. c. Sigurdson, [1975] 2 R.C.S. 449 (1 octobre 1974)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1974-10-01;.1975..2.r.c.s..449 ?
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