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27/08/1973 | CANADA | N°[1974]_R.C.S._803

Canada | Pacific Elevators Ltd. c. Canadian Pacific Railway Co., [1974] R.C.S. 803 (27 août 1973)


Cour suprême du Canada

Pacific Elevators Ltd. c. Canadian Pacific Railway Co., [1974] R.C.S. 803

Date: 1973-08-27

Pacific Elevators Limited (Demanderesse) Appelante;

et

La Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique (Défenderesse) Intimée.

1972: le 1er décembre; 1973: le 27 août.

Présents: Les Juges Martland, Hall, Spence, Pigeon et Laskin.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

Cour suprême du Canada

Pacific Elevators Ltd. c. Canadian Pacific Railway Co., [1974] R.C.S. 803

Date: 1973-08-27

Pacific Elevators Limited (Demanderesse) Appelante;

et

La Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique (Défenderesse) Intimée.

1972: le 1er décembre; 1973: le 27 août.

Présents: Les Juges Martland, Hall, Spence, Pigeon et Laskin.

EN APPEL DE LA COUR D’APPEL DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE


Sens de l'arrêt : Le pourvoi doit être accueilli, l’arrêt de la Cour d’appel infirmé et les jugements de première instance modifiés en ordonnant que la première action soit rejetée et que dans la seconde action la demanderesse recouvre de la défenderesse la somme de $40,155

Analyses

Préjudice - Déraillement par négligence - Dommages aux installations de déchargement - Réduction de la capacité de déchargement pendant réparations - Perte de bénéfices recouvrable - Calcul de la perte réelle.

La demanderesse a intenté deux actions contre la défenderesse en raison de dommages causés par des accidents similaires qui se sont produits à l’un de ses élévateurs à grain. A chaque fois, un wagon avait quitté la voie et les installations de déchargement de l’appelante avaient été endommagées par suite d’une erreur d’un employé des chemins de fer. La compagnie de chemin de fer a réparé les dommages matériels et les réclamations concernant la perte de profits due à la réduction de la capacité de déchargement jusqu’à l’achèvement des réparations nécessaires.

Les actions de la demanderesse pour les sommes de $33,658 et $232,594 respectivement ont été intégralement accueillies en première instance. En appel, le jugement de première instance a été infirmé par la Cour d’appel et la demanderesse s’est ensuite pourvue en cette Cour.

Arrêt: Le pourvoi doit être accueilli, l’arrêt de la Cour d’appel infirmé et les jugements de première instance modifiés en ordonnant que la première action soit rejetée et que dans la seconde action la demanderesse recouvre de la défenderesse la somme de $40,155.

La Cour d’appel a fait une erreur en n’accordant pas suffisamment d’attention au fait qu’il y a une preuve déterminante que l’appelante a réellement subi une perte substantielle même si sa réclamation en responsabilité civile a été grossièrement exagérée. Les wagons de grain détournés forment vraiment la base sur laquelle la réclamation doit être appréciée. La méthode adoptée par les chemins de fer pour les détournements de wagons, c’est-à-dire, la moyenne

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du mois précédent, est la méthode raisonnable pour évaluer le nombre de wagons perdus.

La perte de bénéfices résultant du premier accident n’a pas été prouvée. Quant au second accident, on évalue à 573 le nombre de wagons perdus et non 1,178 comme le réclame l’appelante. Le calcul de la perte de bénéfices sur les 573 wagons non déchargés en raison du second accident donne $40,155.

POURVOI à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique infirmant un jugement du Juge Gregory. Pourvoi accueilli.

J.P. van der Hoop et L.M. Blond, pour la demanderesse, appelante.

C.C. Locke, c.r., et Allan Graham, pour la défenderesse, intimée.

Le jugement de la Cour a été rendu par

LE JUGE PIGEON — Le présent appel est interjeté à l’encontre d’un arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique qui a infirmé le jugement de première instance; ce dernier jugement avait intégralement fait droit aux actions de l’appelante contre la compagnie de chemin de fer intimée pour les sommes respectives de $33,658 et $232,594. Les réclamations de l’appelante ont pour objet la perte de profit causée par des accidents similaires qui se sont produits à son élévateur n° 1 les 7 avril et 17 septembre 1966. A chaque fois, un wagon a quitté la voie et les installations de déchargement de l’appelante ont été endommagées par suite d’une erreur d’un employé des chemins de fer. La compagnie de chemin de fer a réparé les dommages matériels et les réclamations concernant la perte de profits qui est due, prétend-on, à la réduction de la capacité de déchargement jusqu’à l’achèvement des réparations nécessaires. La preuve révèle que l’appelante détenait une assurance contre les pertes de bénéfices et qu’il s’agit d’actions intentées pour le compte de l’assureur. Les réclamations, a-t-on expliqué, ont été préparées à l’origine en vue d’une indemnisation en vertu d’un contrat d’assurance dont les conditions n’ont pas été divulguées, et les réclamations sont maintenant présentées sous forme identique comme dommages‑intérêts délictuels.

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Je crois qu’il n’est pas nécessaire de résumer les motifs des jugements oraux des cours d’instance inférieure. Il me semble clair que la Cour d’appel n’a pas été d’accord à bon droit avec le juge de première instance qui avait écarté toutes les objections formulées contre la réclamation telle qu’elle a été préparée par le comptable agréé de l’appelante. D’autre part, je suis, avec respect, également convaincu que la Cour d’appel a fait une erreur en n’accordant pas suffisamment d’attention au fait qu’il y a une preuve déterminante que l’appelante a réellement subi une perte substantielle même si sa réclamation en responsabilité civile a été grossièrement exagérée. Il faut toutefois remarquer que la tâche de la Cour était exceptionnellement lourde dans les circonstances parce que la compagnie de chemin de fer a persisté jusqu’à la fin à ne formuler que des objections contre les calculs complexes présentés par l’appelante, ne suggérant une méthode différente sur aucun point. En droit, il est évidemment permis à un défendeur de procéder de cette façon mais, quand une réclamation repose sur une comptabilité complexe et que la méthode adoptée par le réclamant est fausse, il s’avère très difficile de faire une adjudication satisfaisante. Il convient d’ajouter que le comptable expert cité par la défense, tout en formulant des objections valables contre de nombreux éléments de réclamation, n’a jamais exprimé son point de vue dans des termes qui pouvaient être facilement compris par des personnes sans formation ou expérience en comptabilité.

Les faits ne sont aucunement en litige. Ils sont tous établis par une preuve déterminante, une preuve surtout littérale. Des renseignements complets ont été donnés en ce qui concerne les opérations de l’appelante au temps pertinent, jusqu’à un tableau indiquant jour par jour, pour une période de dix-huit mois, le nombre de wagons de grain détournés d’elle ou détournés vers elle. Étant donné les circonstances exceptionnelles de la présente affaire, il me paraît nécessaire d’étudier la preuve de la même manière qu’un juge de première instance parce que je ne puis accepter les conclusions de la Cour d’appel sur les questions de fait, tout en

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admettant que c’est à bon droit qu’elle a infirmé celles du premier juge.

Les wagons de grain détournés forment vraiment la base sur laquelle la réclamation doit être appréciée parce que, comme l’avocat de la compagnie de chemin de fer l’a signalé, les revenus et les profits de l’appelante pour 1966 étaient supérieurs à ceux de l’année précédente. Ses stocks étaient plus élevés aussi de même que les quantités de grains reçues, entreposées et expédiées. Aucun navire n’a été détourné de son quai. Ceci ne signifie pas qu’elle n’a subi aucune perte parce que si, sans les inconvénients causés par les accidents, elle était en mesure de manutentionner et d’entreposer encore plus de grain et, par conséquent, de réaliser des profits plus élevés, elle a sans aucun doute le droit de réclamer la perte subie quoique, malgré cette perte, ses profits aient été supérieurs à ceux de l’année précédente.

La réclamation présentée au procès est basée sur une comparaison entre le nombre moyen de wagons de grain déchargés quotidiennement à l’élévateur n° 1 et le nombre réel de wagons déchargés au cours de la période pendant laquelle les installations de l’appelante étaient endommagées par suite des accidents, en allouant certaines réductions applicables à d’autres causes. Le choix de la période de base est évidemment d’une importance capitale. L’avocat de la compagnie de chemin de fer a avancé que la période appropriée serait une année entière. Ceci voudrait dire une moyenne d’environ 100 wagons par jour ouvrable régulier (c’est-à-dire les samedis et dimanches exceptés). Sur cette base, il n’y aurait aucune perte due au premier accident, le nombre moyen de wagons déchargés au cours de la période comprise entre la date de l’accident et la fin des réparations équivalant environ à cette moyenne annuelle. Ce ne serait pas une conclusion juste parce que les deux accidents se sont produits à un moment où les installations de l’appelante étaient occupées au maximum. La liste des déchargements quotidiens indique que des wagons avaient été déchargés à l’élévateur 1 ou 3 les quatre samedis précédant l’accident du 7 avril bien que du

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travail le samedi ne semble avoir été effectué que quatre fois le reste de l’année. L’accident du 17 septembre s’est produit quatre jours seulement après une interruption de deux semaines effectuée aux fins d’inventorier les stocks de grain.

Pour son calcul de la moyenne de wagons déchargés au cours d’un jour ouvrable régulier, le comptable de l’appelante a considéré les dix jours précédant le premier accident. Pour le second accident, il a pris les trois jours le précédant immédiatement plus les trois jours suivant la reprise des opérations par le basculateur de wagons automatique. Dans les deux cas, il arrive à 130 wagons par jour. A mon avis, cette base n’est pas équitable. La période est trop courte et il n’y a pas d’uniformité. Il aurait obtenu une moyenne plus basse en tenant compte des jours qui ont suivi les réparations, après le premier accident.

Il me semble clair que la méthode adoptée par les chemins de fer, c’est-à-dire, la moyenne du mois précédent, est la méthode raisonnable pour évaluer le nombre de wagons perdus, d’une manière qui est équitable pour les deux parties. C’est une méthode qui avait cours dans le milieu et qui était suivie depuis assez longtemps. Tous les intéressés en étaient satisfaits et l’avaient acceptée comme appropriée. La moyenne annuelle ne serait pas juste parce qu’elle ne représente pas une période au cours de laquelle un rendement maximum serait normalement prévu. La moyenne à court terme variable choisie par le comptable de la réclamante n’est pas juste non plus parce qu’elle est basée sur des périodes trop courtes qui ne sont pas choisies d’une manière uniforme et objective.

A Vancouver, il n’y a ni pénalité ni surestarie sur le grain d’exportation, qui est essentiellement ce que l’appelante manutentionnait à l’élévateur n° 1. La pratique des chemins de fer consiste à détourner des wagons à un autre élévateur toutes les fois qu’il y aurait autrement une accumulation de wagons chez le destinataire. La règle non écrite a été énonçée comme suit par le surintendant du chemin de fer, qui était à la retraite à l’époque du procès:

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[TRADUCTION]… Si, d’après le surintendant des transports, l’élévateur A a un approvisionnement sur roues de plus de huit jours, et l’élévateur B peut accueillir plus de wagons qu’il n’en a sur la voie ferrée, alors des détournements ont lieu.

L’expression «approvisionnement sur roues» signifie des wagons chargés quelque part sur la ligne de chemin de fer. Habituellement, il ne faut que deux jours à un wagon chargé pour atteindre la cour à Coquitlam, où il est prêt à être acheminé vers une voie couverte d’élévateur pour être déchargé.

Pour le mois de mars 1966, les déchargements de wagons à l’élévateur n° 1 ont atteint le total de 2,807 wagons. En soustrayant 62 wagons déchargés au cours de deux samedis, on arrive à un total de 2,745 wagons déchargés en 23 jours ouvrables réguliers, c’est-à-dire, une fraction au-dessus de 119 wagons par jour, disons 120. Ce dernier chiffre me semble raisonnable pour le mois d’avril plutôt que celui de 130 susmentionné.

On réduit de 110 le nombre de 198 calculé par le comptable de l’appelante en substituant le chiffre de 120 wagons par jour à 130 comme évaluation raisonnable du nombre de wagons à être déchargés dans des conditions normales durant les onze jours au cours desquels les installations de l’appelante ont été désorganisées par l’accident du mois d’avril. A mon avis, il faut en déduire 31 de plus parce que l’appelante n’a fait aucun déchargement le deuxième samedi après l’accident. Le premier samedi suivait le Vendredi saint, qui était un jour férié, et il y avait un motif valable pour ne pas tenter de travailler ce jour-là. Mais, en ce qui concerne l’autre samedi, aucun motif valable n’a été avançé. Pressé de répondre sur ce point, le contrôleur de l’appelante a finalement dit:

[TRADUCTION]… Je ne suis pas le surintendant de l’élévateur et je ne puis vous donner aucune réponse précise quant à la raison pour laquelle il n’y a pas eu plus de surtemps. Je regrette.

Je ne puis accepter, comme le juge de première instance l’a apparemment fait, que cette preuve était insuffisante parce que le fardeau de prouver le défaut d’atténuer la perte incombe-

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rait à la défense. Il n’est pas nécessaire de considérer s’il s’agit plutôt d’une affaire dans laquelle un demandeur n’a pas établi sa perte d’une manière satisfaisante. A mon avis, la présente affaire n’est pas de nature à être décidée au niveau du fardeau de la preuve. Tous les faits ont été consignés en preuve et les seules questions en cause se rapportent aux déductions et conclusions que l’on peut à bon droit en tirer. En l’espèce, il est établi que l’appelante a procédé à des travaux de déchargement au cours de plusieurs samedis précédant l’accident. On peut raisonnablement en déduire que l’accomplissement de pareils travaux était également possible après l’accident à moins d’une raison valable, comme dans le cas du premier samedi.

Ainsi, au cours des onze jours ouvrables suivant l’accident du mois d’avril, la perte de l’appelante s’établit à 57 wagons. Ce nombre représente-t-il vraiment une perte de l’appelante? Pour répondre à cette question, il faut retenir qu’un exploitant d’élévateurs ne perd pas nécessairement des wagons de grain parce qu’ils ne peuvent pas être déchargés un jour donné. Comme il a été mentionné plus haut, la preuve révèle que le consignataire ne peut être considéré comme ayant une «accumulation» nécessitant un détournement que seulement quelque six jours après l’arrivée des wagons à Coquitlam. Une étude des détournements démontre qu’au cours de la période allant du 8 avril inclusivement au 22 avril inclusivement, 123 wagons ont été détournés vers d’autres élévateurs tandis que 100 wagons ont été détournés vers l’élévateur n° 1, mais, au cours des six jours suivants, 20 wagons seulement ont été détournés vers d’autres élévateurs tandis que 72 ont été détournés vers l’élévateur n° 1. Ainsi, au cours de la période entière, y compris les six jours suivants, il n’y a pas eu de détournement net vers d’autres.

Au sujet des détournements, le Juge en chef Davey a dit:

[TRADUCTION] Il semble donc et ce point est, je crois, établi assez indirectement dans le factum de l’intimée, que la perte que l’intimée dit avoir subie ne consiste pas en wagons qui lui ont été consignés et ne

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lui ont pas été livrés à cause de détournements vers d’autres élévateurs par le P‑C., mais en détournements à partir d’autres compagnies que l’intimée aurait reçus si sa capacité de manutention n’avait pas été réduite par les dommages causés.

En cette Cour, l’avocat de l’appelante a prétendu que cette dernière avait perdu un nombre substantiel de wagons en insistant sur le fait que le tableau des détournements sur une période de dix-huit mois, du 1er janvier 1966 au 30 juin 1967, établit un détournement net de 2,841 wagons vers les élévateurs n° 1 et n° 3 de l’appelante (4,591 moins 1,750 détournés vers d’autres établissements). Cela fait en moyenne un gain de 7 à 8 wagons par jour ouvrable régulier sur toute la période, mais il y a un motif déterminant pour ne pas tenir compte de cette moyenne. On ne peut pas raisonnablement s’en servir quand on prend une moyenne à court terme plutôt qu’une moyenne à long terme pour établir la réclamation. Comme nous l’avons vu, l’appelante ne pourrait rien réclamer sur la base de la moyenne annuelle des wagons déchargés. Elle ne peut donc pas employer une moyenne à long terme pour évaluer le nombre de détournements.

En compilant les détournements pour le mois de mars 1966 on se rend compte que le simple fait de passer d’une moyenne annuelle à une moyenne mensuelle change complètement la situation. Les chiffres sont les suivants:

Wagons détournés vers d’autres...............

191

Wagons détournés vers l’élévateur n° 1

53

Détournement net vers d’autres.................

138

Cela fait une moyenne de 6 wagons par jour ouvrable régulier perdus à cause des détournements et c’est la raison évidente du travail le samedi. Le dossier nous montre donc qu’en ce qui concerne les détournements, la situation était en fait meilleure après l’accident du 7 avril que durant le mois précédent. Ceci est facilement compréhensible parce que les installations de l’appelante ont été rapidement rétablies et, en pratique, au cours de toute la période, sur trois manches de réception accessibles au basculeur

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de wagons automatique, une seule était hors d’usage. Le fonctionnement des installations était assez bon avec deux manches de réception et les puits de pelletage étaient tous disponibles.

Dans l’ensemble, je ne crois pas que la perte de bénéfices résultant du premier accident ait été prouvée. Selon une évaluation raisonnable des déchargements possibles basée sur la moyenne du mois de mars, le déficit n’était que de 57 wagons. Ce déficit ne représente pas vraiment des wagons perdus parce que, au cours des cinq jours ouvrables suivant la fin des travaux de réparation, il a été à peu près comblé par 52 détournements nets vers l’élévateur n° 1 au lieu de détournements importants vers d’autres comme au mois de mars.

Les conséquences du second accident ont été beaucoup plus sérieuses. Les opérations de déchargement de l’appelante à l’élévateur n° 1 ont été complètement interrompues pendant quatre jours ouvrables entiers en plus de quelque quatre heures le jour de l’accident ainsi que la majeure partie de la journée au cours de laquelle les premières réparations ont été terminées. Après ces réparations, quatre puits de déchargement sur six exploités avec le matériel de déchargement à la pelle sont demeurés hors d’usage. Les travaux de réparation n’ont été complètement terminés qu’en juillet 1967 en raison de la vétusté de cet outillage qui datait de 1924 et pour lequel les pièces ne pouvaient être rapidement obtenues. Cependant, ces puits hors d’usage ne limitaient les opérations que quand le basculeur de wagons automatique cessait de fonctionner pour une raison ou pour une autre. Les tableaux versés au dossier indiquent que ceci se produisait peu fréquemment.

Pour la première période, soit le jour de l’accident, le samedi 17 septembre, et les cinq jours ouvrables suivants, on réclame la perte de 585 wagons basée sur une moyenne normale estimée à 130 wagons par jour. Pour le mois d’août, la moyenne serait de 115 wagons par jour, en excluant le samedi 6 août au cours duquel 27 wagons ont été déchargés. La preuve révèle toutefois qu’au mois d’août, les opérations ont été quelque peu gênées par la grève des chemins

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de fer, le 26 août ayant été le dernier jour au cours duquel des wagons ont été déchargés. Pour cette raison, la moyenne de mars de 120 wagons par jour serait, je crois, davantage justifiée. L’emploi de ce nombre au lieu de 130 réduit la réclamation de 60 wagons, ce qui donne une perte de 525 wagons pour cette première période. Sous réserve d’une autre déduction relative aux wagons déchargés à l’élévateur n° 3, c’est là, je crois, une perte réelle parce qu’il est clair qu’il y avait déjà une «accumulation» nécessitant des détournements quand les installations de l’appelante ont été endommagées. Ses opérations de déchargement avaient été arrêtées à des fins de vérification comptable gouvernementale depuis le début de septembre et n’avaient repris que le mercredi 14 septembre. Le samedi 17 septembre, il y avait eu deux périodes de travail et l’accident s’est produit au cours de la seconde période.

Relativement aux détournements, la liste versée au dossier indique 398 wagons détournés vers l’élévateur n° 1 au mois d’août, 32 seulement détournés vers d’autres. Cela représente une moyenne de 18 détournements favorables nets par jour pour ce mois qui comprend seulement 20 jours ouvrables réguliers. Mais, au cours de la semaine suivant l’accident, j’ai compté 134 wagons détournés vers d’autres et 131 au cours de la semaine suivante. En se basant sur les chiffres du mois d’août, on se serait attendu à ce que 180 wagons soient détournés vers l’élévateur n° 1 de l’appelante au cours de ces deux semaines, comparativement aux 2 wagons qui ont été effectivement accueillis et aux 265 wagons qui ont été détournés ailleurs. Ceci signifie une perte de 443 wagons, chiffre qui n’est pas tellement loin des 585 wagons réclamés et rectifiés à 525.

La différence est plus que compensée par le nombre de wagons déchargés à l’élévateur n° 3 au cours de l’additionnelle seconde période de travail ouvrée les 19, 20, 21 et 22 septembre. Au cours de ces quatre jours, 325 wagons ont été déchargés à cet élévateur comparativement à une moyenne de 44 par jour ouvrable au mois d’août, cette dernière moyenne étant supérieure

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à celle du mois de mars pour cet élévateur. Ainsi, un nombre additionnel de 149 wagons ont été déchargés au cours de ces quatre jours à l’élévateur n° 3, fait qui, je pense, a été erronément laissé de côté dans la réclamation de l’appelante. Le comptable de l’appelante a calculé le nombre de wagons perdus comme si l’élévateur n° 1 avait été une entreprise commerciale distincte quand, en fait, il était simplement une unité dans l’ensemble de l’entreprise. On pouvait parfaitement décharger des wagons à l’élévateur n° 3 lorsque l’élévateur n° 1 a été fermé et ensuite, s’il le fallait, transporter le grain pour expédition par l’élévateur n° 1. La liste des déchargements de wagons quotidiens indique que l’un des trois samedis au cours desquels les employés ont travaillé au mois de mars, les déchargements ont en fait eu lieu à l’élévateur n° 3 au lieu de l’élévateur n° 1. Sur ce point, je crois qu’il est déterminant que la réclamation concerne des chargements de pleins wagons de grain perdus. Relativement aux 149 wagons déchargés au cours de la seconde période de travail à l’élévateur n° 3, le fait est que ces wagons n’ont pas été perdus.

Dans son témoignage, le contrôleur financier de l’appelante a dit:

[TRADUCTION]… Nous avons constaté qu’après quatre jours, ou quatre nuits, la production était si mauvaise, les opérations si coûteuses, et inefficaces, si peu de wagons supplémentaires avaient été déchargés après deux périodes de travail au lieu d’une, nous avons cru, par économie, aussi à cause de la difficulté d’avoir les employés qui étaient plus ou moins formés ou équipés pour pelleter, qu’il était souhaitable d’abandonner la seconde période de travail, ce que nous avons fait, et c’est ce qui explique le premier chiffre de 48 le 23 septembre.

Les chiffres qui figurent dans les pièces révèlent la situation précise. Les 149 wagons supplémentaires déchargés en quatre jours donnent une moyenne de 37 pour chaque seconde période de travail ouvrée. Ce qui donne seulement 7 wagons de moins que la moyenne pour la première période de travail. Le coût supplémentaire par wagon déchargé au cours de la seconde période de travail dû à une productivité plus faible était, de toute évidence, si négligea-

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ble qu’il n’est pas surprenant qu’aucun chiffre n’ait été offert, bien qu’il soit assez décevant que l’avocat de la défense au procès n’en ait pas demandé. Une bonne indication se trouve toutefois dans les documents de réclamation. Un total de $2,475 est mentionné à titre de salaire épargné en raison de la mise à pied d’employés pendant que les installations de déchargement à l’élévateur n° 1 étaient hors d’usage et ces chiffres doivent comprendre deux périodes de travail. Ensuite, le coût supplémentaire de déchargement de wagons à la pelle plutôt qu’au moyen du basculeur de wagons automatique est évalué à 3 par wagon seulement. Pour 149 wagons, ceci représente moins que $500. Même en doublant ce montant en raison de la faible productivité, on atteint $1,000 seulement ou environ les 2/3 du coût en salaire d’une période de travail. Par contre, en comptant les 149 wagons qui ont été déchargés à l’élévateur n° 3 parmi les wagons perdus, l’appelante réclame plus de $30,000 à titre de dommages-intérêts quand, de toute évidence, elle ne peut réclamer, relativement à ces wagons, que le coût additionnel entraîné en les faisant décharger dans des conditions moins favorables à l’élévateur n° 3. Cette réclamation ne peut valoir pour plus qu’une fraction des coûts en salaire, et il en sera tenu compte plus tard.

Le fait est que les 149 wagons déchargés au cours de la seconde période de travail à l’élévateur n° 3 n’ont pas été perdus. Il faut donc encore soustraire 149 du nombre de 525 calculé précédemment, ce qui ramène le nombre de wagons perdus au cours de la première période après l’accident à 376. Ce calcul rejoint sensiblement le nombre estimatif des détournements dont quelques-uns ont certainement résulté de l’«accumulation» survenue pendant la fermeture pour l’inventaire des stocks de grain, plutôt que de l’accident qui s’est produit trois jours seulement après la reprise des opérations.

Relativement aux mois d’octobre et novembre 1966, janvier, février et mars 1967, la réclamation a été présentée sur une base différente. L’appelante n’utilisait alors les puits de pelletage de l’élévateur n° 1 que quand le basculeur

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mécanique ne fonctionnait pas pour une raison ou pour une autre. À ces occasions, on ne pouvait manutentionner qu’un wagon à la fois au lieu de trois parce que deux puits de pelletage seulement étaient disponibles au lieu de six. La perte a donc été évaluée en ajoutant au nombre de wagons déchargés ces jours-là par le basculeur mécanique alors qu’il fonctionnait, trois fois le nombre de wagons déchargés à la pelle lorsqu’il ne fonctionnait pas. Jusqu’à la moyenne par jour pour ce qui a été considéré comme une période représentative, la différence entre le total ainsi obtenu et le nombre réel de wagons déchargés a été réclamée comme perte.

Les deux premiers jours pour lesquels une réclamation a été faite sur cette base sont le 31 octobre et le 1er novembre pour lesquels une perte totale de 56 wagons a été réclamée. Ceci constituait clairement une perte réelle. Le tableau des détournements indique qu’un nombre plus élevé que ça de wagons ont été détournés vers le Saskatchewan Wheat Pool au début du mois de novembre. J’ajusterai seulement le nombre à 54 en prenant 120 comme la moyenne appropriée à atteindre plutôt que 122.

La situation est quelque peu différente en ce qui concerne la perte réclamée pour les 16, 17, 24 et 25 janvier 1967. Quelques wagons seulement ont été détournés vers d’autres élévateurs au cours de la dernière moitié de janvier. Cependant, l’appellante a certainement perdu le nombre considérable de détournements obtenus des autres qu’elle avait eu en décembre. Ces derniers; s’élevaient à 138 avec seulement quelques-uns dans l’autre sens. En janvier, il n’y a eu aucun détournement favorable à proprement parler et un léger surplus net de détournements vers d’autres. La réclamation me paraît donc fondée bien que je ne sois pas d’accord que le choix des autres jours du mois de janvier soit justifié comme base de comparaison. La moyenne de 131 obtenue de cette façon est trop élevée. En prenant encore 120 comme moyenne quotidienne appropriée, la réclamation pour quatre jours en janvier s’établit à 143 au lieu de 161. Il convient de remarquer que le dossier indique du travail effectué le samedi 21 janvier

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aux deux élévateurs n° 1 et n° 3. Ceci nous indique que l’appelante voyait que la réduction des opérations de déchargement signifiait qu’elle perdait des affaires et prenait les mesures appropriées pour limiter cette perte.

C’est exactement ce que je ne puis trouver relativement à la réclamation de 326 wagons pour la semaine du 20 au 24 février. Il n’y a eu aucun travail d’effectué le samedi 25 février, après que le basculeur mécanique eut été réparé le 24. Durant le mois entier, 14 wagons seulement ont été détournés vers d’autres élévateurs et il ne semble pas que l’appelante ait perdu un nombre appréciable de détournements favorables. Il est vrai que dans la période du 1er au 18 février, 70 wagons ont été détournés vers l’élévateur n° 1 et 5 seulement dans la semaine du 20 au 24 février mais 7 wagons seulement y ont été détournés dans la semaine du 25 février au 2 mars. Ceci indique qu’il n’y avait aucune accumulation de wagons susceptibles d’être détournés. Une réduction des activités de déchargement n’est pas en elle‑même la preuve d’une perte de bénéfices, mais seulement de la possibilité d’une telle perte. S’il n’y a eu aucun wagon détourné vers d’autres élévateurs ni aucun détournement favorable perdu, il n’y a eu aucune perte. Je suis donc d’avis de rejeter la réclamation pour le mois de février de même que celle pour le 20 mars qui est manifestement injustifiée puisqu’elle ne vise qu’une journée seulement à un moment où la moyenne quotidienne était réduite à 101. Tous les wagons non déchargés à cette occasion pouvaient facilement l’être la journée suivante.

Le dernier élément de la réclamation qui reste à étudier est celui qui est relatif au 28 octobre. Au cours de cette dernière journée, des criblures ont été déchargées, 111 wagons ont été effectivement manutentionnés et on prétend que ce faible rendement était dû aux moyens restreints. Sur ce point, je trouve que la preuve n’est absolument pas convaincante. Au cours des deux journées qui ont immédiatement précédé, à l’égard desquelles aucune réclamation n’est faite, 114 wagons seulement ont été

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déchargés. Je suis d’avis de ne pas accueillir cette partie de la réclamation.

L’addition des pertes accueillies donne un total de 573 wagons au lieu des 1,178 réclamés relativement au second accident. C’est environ la moitié. C’est aussi à peu près la quantité réclamée pour la première période, une quantité que l’on aurait pu grosso modo accepter comme une évaluation facile. Cependant, puisqu’il s’agit de dommages pécuniaires habituellement considérés comme susceptibles d’une évaluation assez précise, je me suis considéré tenu de faire une analyse détaillée qui a révélé, malgré l’apparente précision des chiffres soumis, le haut degré d’imprécisions dû aux innombrables hypothèses sur lesquelles pareils calculs sont effectivement basés.

Avant de calculer le montant de dommages-intérêts à accorder, il est malheureusement nécessaire de refaire le calcul de la perte de profit par boisseau parce que le comptable de l’appellante a beaucoup exagéré le profit moyen de l’appelante par boisseau de grain manutentionné. Sa méthode a consisté à additionner le revenu brut de l’appelante dans une période donnée et à diviser le total par le nombre de boisseaux manutentionnés. Sa théorie veut qu’on ne tienne aucun compte des dépenses parce qu’elles n’augmentent pas en fonction de la quantité de grain manutentionnée.

Relativement aux frais d’entreposage par exemple, on nous signale avec raison que les coûts sont tous les mêmes, que les compartiments soient remplis ou à moitié remplis. Cette affirmation n’est toutefois vraie que s’il reste en tout temps une capacité inutilisée au moins égale à la quantité de grain réclamée comme ayant été perdue. En l’espèce, elle n’aurait pas été absolument vraie si le nombre entier de wagons réclamés comme ayant été perdus à cause des deux accidents avait été accordé. La capacité de l’élévateur no 1 est donnée comme étant de 7,111,500 boisseaux. Les rapports versés au dossier indiquent que le maximum entreposé était le stock du 22 novembre 1966, de 5,841,763 boisseaux. La capacité inutilisée était donc de 1,269,737 boisseaux, mais la récla-

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mation à cette date est de 850 wagons de 1,910 boisseaux chacun, ou 1,623,500 boisseaux. La capacité aurait ainsi été dépassée de 353,763 boisseaux ou 186 wagons. La capacité disponible dans d’autres élévateurs n’aurait pas pu être prise en considération à l’égard d’une réclamation qui ne tenait pas compte de l’utilisation de leur capacité de déchargement. Mais la réclamation accueillie pour 573 wagons représente 1,094,430 boisseaux, ce qui est sensiblement moins que la capacité d’entreposage inutilisée disponible dans l’élévateur no 1 à toutes les époques pertinentes.

En ce qui concerne le nettoyage et le séchage, il est certainement faux de présumer que l’appelante aurait manutentionné un million de boisseaux additionnels sans subir de dépenses. Pour les droits de quai et de mouillage, le comptable de l’appelante a bien vu que, même si aucun navire additionnel ne serait entré au dock sans perte de wagons de grain, il était néanmoins juste d’affecter le revenu de ces droits à chaque boisseau de grain parce que chaque boisseau expédié contribuait à le gagner, mais il n’a pas vu que tandis que chaque boisseau nettoyé contribuait effectivement à gagner le revenu tiré du nettoyage, il contribuait aussi aux dépenses nécessaires d’exploitation de l’établissement. Les frais de nettoyage ne sont pas, comme les droits de quai et de mouillage, simplement pour l’utilisation des lieux, mais bien pour du travail effectué. Quant à ces frais, la seule réclamation justifiée serait pour la recette nette après déduction des dépenses courantes. Cependant, comme il n’y a pas d’autre base disponible, je retiendrai ces éléments de réclamation au chiffre proposé subordonnément à un rajustement sous forme de crédit sur la réclamation.

L’intérêt et le change devraient évidemment être rejetés comme le juge de première instance l’a signalé, bien qu’il ait pensé, à tort selon moi, que cela n’en valait pas la peine. Il est clair que ces éléments de réclamation ne se rapportent pas à la perte et on peut dire la même chose des «échanges».

L’élément «divers» a aussi été réclamé sans droit. Selon la preuve, il comprend des choses

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comme des remises. Du point de vue de la comptabilité, il est tout à fait juste d’inclure une remise dans le revenu parce que les dépenses remboursées se trouvent de l’autre côté du grand livre et sont donc déduites dans le calcul du profit, mais quand une perte de profit est réclamée sans déduction des dépenses, cela devient inadmissible, car cela revient à souffler indûment le profit.

Ceci s’applique également au «chargement en surtemps». Il s’agit d’un montant facturé aux navires et couvrant les dépenses accrues dues aux heures supplémentaires exécutées lors des chargements. Aucun profit réel ne peut en être retiré, du moins pas d’après le dossier de la présente affaire, et ce n’est pas relié à la perte.

Le revenu provenant de la fabrique d’agglomérés a aussi été erronément inclus dans la réclamation pour perte de bénéfices. La preuve indique clairement que c’est une opération distincte qui n’a pas été gênée par l’accident. Il a été clairement prouvé que l’appelante pouvait s’approvisionner, et s’est effectivement approvisionnée, à d’autres sources quand l’exploitation de ces installations l’exigeait. Même si ses propres approvisionnements étaient insuffisants à cause de l’accident, la position de l’appelante était la même que si une marchandise facile à obtenir ailleurs n’avait pas été livrée tel que stipulé, elle n’a subi par là aucune perte.

Les «criblures» constituent un autre élément important qui a aussi été réclamé sans droit. On nous a expliqué que les criblures étaient des substances étrangères retirées du grain. Le produit de la vente en est mis en commun et distribué aux expéditeurs en proportion de la quantité de substances étrangères contenue dans leurs wagons. Personne ne perdait de profit sur les criblures quand des wagons étaient détournés. L’appelante n’était pas tenue de payer les expéditeurs pour les criblures provenant de ces wagons et les expéditeurs devaient demander le paiement à l’exploitant de l’élévateur où leur grain était détourné. On a voulu assimiler cette obligation de l’appelante envers les expéditeurs à son obligation de leur rendre compte de son profit net à la fin de l’année. A

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mon avis, c’est à bon droit qu’on a considéré que cette dernière obligation n’est pas un débit réel et n’empêche pas de recouvrer le profit perdu, mais l’obligation de payer les criblures n’est pas une attribution de profit, c’est un débit réel: l’obligation est celle de payer un prix de vente, une dette qui n’intervient pas dans le cas de wagons de grain détournés. Cela n’aurait constitué une perte de profit que s’il avait été établi que sur les wagons de grain détournés vers d’autres élévateurs, les expéditeurs n’ont rien eu pour les criblures. Cela n’a pas été prouvé et ne peut pas être présumé. L’appelante peut réclamer comme une perte le profit qu’elle n’a pas fait, mais non le prix de marchandises qu’elle n’a pas reçues et qu’elle n’a pas eu à payer.

Finalement, tous semblent avoir oublié le témoignage suivant du contrôleur financier de l’appelante:

[TRADUCTION] Q. Le revenu que Pacific Elevators retire est-il le même dans le cas d’un wagon qui a été détourné vers elle, le même que le revenu qu’elle retire d’un de ses propres wagons?

R. Non.

Q. Voulez-vous préciser?

R. Le chemin de fer détourne vers Pacific Elevators un wagon appartenant, par exemple, au Alberta Wheat Pool: Pacific Elevators paiera au Alberta Wheat Pool, dans le cas d’un wagon de blé, un cent et demi le boisseau, ou, dans le cas d’un wagon de céréales secondaires, un cent le boisseau.

Q. Ainsi, le revenu est inférieur à celui que vous recevriez sur un de vos propres wagons?

R. C’est exact.

Le montant net payé par l’appelante pour détournements est une somme très substantielle au chapitre de ses dépenses. Puisque les wagons détournés ailleurs ou détournements favorables perdus étaient composés à 85 pour cent de blé, la réclamation doit être réduite de 1,425 cents par, boisseau. L’appelante a reçu cette somme sur les wagons détournés vers d’autres et aurait été obligée de la payer pour les wagons détournés vers l’élévateur n° 1.

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Le tableau suivant donne le résultat des ajustements requis apportés au calcul des gains par boisseau déposé comme Pièce 19. Puisque le nombre de wagons perdus en novembre est extrêmement petit, je ne fais aucun calcul distinct et j’emploierai le chiffre du mois d’octobre dans le calcul de la perte réelle.

AJUSTEMENT DE LA PERTE DE GAINS PAR BOISSEAU

3 mois se terminant en septembre

4 mois se terminant en octobre

7 mois se terminant en janvier

$

$

$

Éléments rejetés

Intérêt et change

22,363

26,519

56,909

Divers............................................

111,663

885

84,845

Chargement en surtemps...........

9,900

12,210

24,640

Fabrique d’agglomérés..............

98,780

131,021

249,916

Criblures.......................................

551,934

739,690

1,426,656

Echanges.....................................

14,316

139,338

154,214

Total......................

808,956

1,049,663

1,997,180

Nombre de boisseaux manutentionnés............................

15,113,641

21,409,938

40,281,254

Réclamation par boisseau.........

10.570¢

10.998¢

11.181¢

Rejeté............................................

5.353

4.903

4.958

Perte par boisseau......................

5.217¢

6.095¢

6.223¢

Frais de détournement................

1.425

1.425

1.425

Perte nette par boisseau............

3.792¢

4.670¢

4.798¢

CALCUL DE LA PERTE RÉELLE

Mois

Wagons perdus

Boisseaux perdus

Perte nette par boisseau

Perte réelle

Septembre......................

376

718,160

3.792¢

$27,233

Octobre...........................

54

103,140

4.670¢

4,817

Janvier.............................

143

273,130

4.798¢

13,105

Total.....................

573

$45,155

[Page 822]

Cela fait donc un total de $45,155 comme perte de bénéfices sur 573 wagons non déchargés en raison du second accident au lieu de la somme de $244,869 réclamée pour 1,178 wagons avant de considérer les crédits à être alloués. Puisque j’ai exclu de la perte les wagons déchargés lors de la seconde période de travail à l’élévateur n° 3, le crédit de $2,475 applicable à l’économie de salaire en raison de la mise à pied d’employés à l’élévateur n° 1 doit être réduit de plus de la moitié afin de tenir compte du rendement réduit. Je le fixerai à $1,000 et, aussi, je supprimerai complètement le crédit applicable au coût supplémentaire du déchargement à la pelle, parce que j’ai traité le rendement réduit comme occasionnant simplement un retard dans le déchargement.

Quant au dernier crédit, l’économie supplémentaire de dépenses, il doit être retenu en partie afin de tenir compte de l’inclusion dans la perte de gains du plein revenu brut provenant des opérations de nettoyage et de séchage. Ayant réduit de moitié à peu près le nombre de chargements perdus, j’établirai ce crédit à $4,000 au lieu de $8,000. Ceci représente un peu moins de la moitié du revenu provenant des opérations de nettoyage et de séchage sur onze cent mille boisseaux. Ainsi, le crédit total qu’il convient d’allouer à l’encontre de la perte de gains s’élève à $5,000, ce qui ramène à $40,155 le montant pour lequel l’appelante a droit, à mon avis, d’obtenir jugement.

Il ne me paraît pas qu’il y ait lieu de faire une déduction pour l’impôt sur le revenu comme l’a prétendu l’avocat du chemin de fer. En l’espèce, il a été établi que l’appelante n’a payé aucun impôt sur le revenu parce que tous ses profits sont allés à des compagnies qui lui expédiaient leur grain en vertu d’arrangement contractuels à cet effet. En outre rien ne démontre que l’indemnité pour la perte de bénéfices en question sera traitée aux fins de l’impôt sur le revenu autrement que comme le revenu perdu l’aurait été.

Retenant que l’appelante échoue complètement dans sa première action et n’a gain de cause dans la seconde que pour le sixième de sa

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réclamation, que le premier et le second pourvoi étaient tous deux nécessaires mais pour n’avoir gain de cause qu’en partie seulement, je crois que ce qui est le plus juste est de n’adjuger de dépens dans aucune Cour.

Je suis donc d’avis d’accueillir le pourvoi, d’infirmer l’arrêt de la Cour d’appel et de modifier les jugements de première instance en ordonnant que la première action soit rejetée et que la demanderesse recouvre de la défenderesse la somme de $40,155 dans la seconde action.

Appel accueilli.

Procureurs de la demanderesse, appelante: Harper, Grey, Easton & Co., Vancouver.

Procureurs de la défenderesse, intimée: Ladner, Downs & Co., Vancouver.


Parties
Demandeurs : Pacific Elevators Ltd.
Défendeurs : Canadian Pacific Railway Co.

Références :
Proposition de citation de la décision: Pacific Elevators Ltd. c. Canadian Pacific Railway Co., [1974] R.C.S. 803 (27 août 1973)


Origine de la décision
Date de la décision : 27/08/1973
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : [1974] R.C.S. 803 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1973-08-27;.1974..r.c.s..803 ?
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