La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/04/2019 | BURKINA FASO | N°24

Burkina Faso | Burkina Faso, Cour de cassation, Chambre civile, 04 avril 2019, 24


Dossier RG : 108/2013
AUDIENCE PUBLIQUE DU 04 AVRIL 2019

La Cour de cassation, Chambre civile, siégeant en audience publique dans la salle des audiences ordinaires de ladite Cour, composée de :
Monsieur KONTOGOME O. Daniel, Président
Madame ZONGO Priscille, Conseiller
Monsieur OUEDRAOGO R. Jean, Conseiller
En présence de Monsieur NIKIEMA Placide,Avocat Général
Et de Maître SAVADOGO Alimata, Greffier

A rendu l’arrêt ci-après :

LA COUR

Statuant sur le pourvoi en cassation formé le 14 juin 2013 par Maître SOMBIE Mamadou avocat à la Cour

agissant au nom et pour le compte de S. H contre l’arrêt n° 094 du 2 Mai 2013 rendu par la Chambre civ...

Dossier RG : 108/2013
AUDIENCE PUBLIQUE DU 04 AVRIL 2019

La Cour de cassation, Chambre civile, siégeant en audience publique dans la salle des audiences ordinaires de ladite Cour, composée de :
Monsieur KONTOGOME O. Daniel, Président
Madame ZONGO Priscille, Conseiller
Monsieur OUEDRAOGO R. Jean, Conseiller
En présence de Monsieur NIKIEMA Placide,Avocat Général
Et de Maître SAVADOGO Alimata, Greffier

A rendu l’arrêt ci-après :

LA COUR

Statuant sur le pourvoi en cassation formé le 14 juin 2013 par Maître SOMBIE Mamadou avocat à la Cour agissant au nom et pour le compte de S. H contre l’arrêt n° 094 du 2 Mai 2013 rendu par la Chambre civile de la Cour d’appel de Ouagadougou dans l’affaire opposant son client à O/D. B. représentée par Maître KEITA Mamadou et la commune de Bogodogo représentée par Maître BAADHIO Issouf ;

Vu la loi organique n°018-2016/an du 26 mai 2016 portant composition, organisation, attributions, fonctionnement de la Cour de cassation et procédure applicable devant elle ;

Vu la loi organique n°13/2000/AN du 09 Mai 2000 portant organisation, attributions et fonctionnement de la Cour de cassation ;

Vu la loi 022/99/AN du 18 Mai 1999 portant Code de procédure civile ;

Vu le rapport de Madame le Conseiller ;

Vu les conclusions du Ministère Public ;

Oui le Conseiller en son rapport ;

Oui les parties en leurs observations orales ;

Oui Monsieur l’Avocat général en ses conclusions orales ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi.

Vu les articles 38, 115 et 533 du Code de procédure civile ;

SUR LA RECEVABILITE

Attendu que le pourvoi a été formé dans les forme et délai requis par la loi ;

Qu’il est recevable ;

AU FOND

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que les deux parties sont chacune détentrice d’un PUH afférent à la même parcelle 12 lot 19 du secteur 15 de la ville de Ouagadougou ;

Que le requérant a obtenu l’annulation du titre détenu par la défenderesse devant les juridictions administratives ; que sommée de libérer les lieux celle-ci a assigné son adversaire devant le tribunal de grande instance de Ouagadougou qui a fait droit à sa demande en condamnant le requérant à lui payer des impenses évaluées à 18.803.649 F ; que ce dernier a relevé appel pour obtenir l’annulation de ladite décision et a en outre, devant la même juridiction assigné en intervention forcée la mairie de Bogodogo pour lui rendre commune la décision à intervenir au motif qu’elle est l’autorité qui a attribué la parcelle à la défenderesse et l’a autorisée à construire bien qu’ informée de la double attribution.

Attendu que faisant suite, la Cour d’appel a déclaré irrecevable l’assignation en intervention forcée dirigée contre la mairie et confirmé le premier jugement condamnant au paiement des impenses ; que c’est cet arrêt qui fait l’objet du pourvoi.

Sur le premier moyen tiré de la violation par mauvaise interprétation des articles 115 et 533 du Code de procédure civile

Attendu que le demandeur, S. H, fait grief à l’arrêt critiqué d’avoir violé les articles 115 et 533 du Code de procédure civile en ce qu’il a déclaré irrecevable l’action en intervention forcée dirigée contre la municipalité de Bogodogo alors :
- d’une part que le requérant avait intérêt à demander que le jugement à intervenir lui soit commun motif pris de ce qu’elle est l’autorité ayant irrégulièrement attribué la parcelle à la défenderesse et l’a autorisée à réaliser les constructions bien qu’il existe un litige ;
- d’autre part que l’évolution du litige impliquait la mise en cause de la mairie ;

Attendu que pour confirmer le premier juge ayant déclaré l’assignation en intervention forcée irrecevable, le juge d’appel soutient que la cause relève de la compétence exclusive des juridictions administratives car la commune est une collectivité publique appelée à répondre de ses actes ; que par application de l’article 38 du Code de procédure civile qui dispose en son alinéa 1 que « le Tribunal de grande instance connaît de toutes les demandes incidentes qui ne relèvent pas de la compétence exclusive d’une autre juridiction » il y a lieu de déclarer l’action irrecevable ;

Attendu qu’il est constant que la mairie est appelée pour répondre de sa responsabilité civile et des conséquences dommageables de son fait, dans le litige opposant les parties conformément aux dispositions des articles 1382, 1383 et 1384 du Code civil ; que dès lors, la juridiction compétente est bien celle de droit commun, à savoir le Tribunal de grande instance ;

Qu’en ayant statué ainsi qu’il l’a fait, alors qu’il ressort de l’arrêt que c’est par sa négligence coupable que la mairie de Bogodogo a encouragé Madame O/D.B à édifier les constructions incriminées sur le terrain litigieux et que le requérant est fondé à l’appeler à la charge des impenses, l’arrêt attaqué a violé l’article 38 du Code de procédure civile et encourt cassation de ce chef, le moyen étant fondé ;

Attendu qu’en somme, il y a lieu de casser la décision attaquée ;

Sur le deuxième moyen tiré de la violation de l’article 555 du Code civil

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir condamné le requérant sur le fondement de l’article 555 du Code civil à rembourser à la défenderesse le coût des investissements réalisés sur les lieux litigieux alors que celle-ci est de mauvaise foi puisqu’elle était informée du litige à la date où elle entreprenait les constructions ;
Attendu cependant que la mauvaise foi est une question de fait que seuls les juges du fond apprécient souverainement, la connaissance des faits de la cause par la Cour de cassation étant prohibée ; qu’il s’ensuit que le moyen est irrecevable ;

Sur le moyen tiré du défaut de base légale

Attendu qu’il est reproché à la décision critiquée d’avoir condamné le requérant à payer des impenses alors que les conditions d’application de l’article 555 du Code civil ne sont pas réunies en ce que la Cour n’a pas recherché si le requérant a demandé de conserver ou de détruire les réalisations faites sur son sol ;

Attendu cependant qu’il ressort de l’arrêt que c’est après avoir obtenu l’annulation du titre détenu par la défenderesse devant les juridictions administratives que le requérant a sommé celle-ci de libérer les lieux ; que l’arrêt attaqué ayant constaté la bonne foi du constructeur, le propriétaire qui a gardé le silence ne peut encore soulever une mauvaise application de l’article 555 du Code civil ;

Que la disposition applicable dans les rapports entre le propriétaire du sol et le constructeur des travaux est sans nul doute l’article 555 du Code civil ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

En la forme
Déclare le pourvoi recevable

Au fond

Casse et annule l’arrêt n° 094 du 02 Mai 2013 rendu par la Chambre civile de la Cour d’appel de Ouagadougou en ce qu’il a déclaré irrecevable l’action en intervention forcée contre la mairie de Bogodogo ;

Renvoie la cause et les parties devant la Cour d’appel de Ouagadougou autrement composée pour être fait droit ;

Met les dépens à la charge des défendeurs ;

Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Chambre civile de la Cour de cassation du Burkina Faso les jour, mois et an que dessus ;

Et ont signé le Président et le greffier.


Synthèse
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 24
Date de la décision : 04/04/2019
Type d'affaire : Arrêt

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE, ACTION EN REPARATION DE PREJUDICE CAUSE PAR UNE MUNICIPALITE, ACTION EN INTERVENTION FORCEE CONTRE LA MUNICIPALITE, DROIT APPLICABLE ; POUVOIR DES JUGES, PPRECIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND, APPRECIATION DE LA BONNE FOI- MOYEN DE FAIT, IRRECEVABILITE ; ACTION EN JUSTICE, ACTION EN REMBOURSEMENT D’IMPENSES, CONSTRUCTEUR DE BONNE FOI-CHOIX DU PROPRIETAIRE DU SOL (NON)

Lorsque la municipalité, collectivité publique est appelée à une cause pour répondre des conséquences dommageables de son fait, il est fait application des dispositions du Code civil régissant la responsabilité civile délictuelle et c’est à tort qu’une Cour d’appel a déclaré irrecevable l’appel en intervention forcée contre une mairie motifs pris de ce que « la cause relève de la compétence exclusive des juridictions administratives car la commune est une collectivité publique appelée à répondre de ses actes ». Le moyen tiré de la violation de l’article 555 du Code civil n’est pas recevable dès lors qu’il tend à amener la Cour de cassation à procéder à une appréciation des faits de la cause. Au sens de l’article 555 du Code civil, il appartient au juge de rechercher si le propriétaire du sol où le tiers qui a érigé des constructions a choisi entre le remboursement de la valeur des réalisations ou la destruction des constructions si le constructeur est de mauvaise foi ; mais dès lors que ce dernier est reconnu de bonne foi, il est fondé à poursuivre le remboursement de la valeur des impenses ; justifie sa décision et l’application de l’article 555 du Code civil, le juge qui, pour confirmer une décision en ce qu’elle a fait droit à une demande de remboursement du montant des impenses, a retenu que le constructeur est de bonne foi.


Parties
Demandeurs : SH
Défendeurs : ODB et Arrondissement de BOGODOGO

Origine de la décision
Date de l'import : 13/01/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bf;cour.cassation;arret;2019-04-04;24 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award