CHAMBRE SOCIALE
Dossier n°80/1999
Arrêt n°18 du 20 décembre 2007
L’an deux mille sept Et le vingt décembre
La Cour de cassation, Chambre Sociale, siégeant en audience publique dans la salle des audiences ordinaires de ladite Cour, composée de :
Monsieur PODA Train Raymond, Président de la Chambre sociale, Président
Monsieur SININI Barthélemy, Conseiller
Madame SAMPINBOGO Mariama, Conseiller
En présence de Monsieur Ad C, 1erAvocat général, et de Madame OUEDRAOGO Haoua Francine, Greffier ;
A rendu l’arrêt ci-après :
LA COUR
Statuant sur le pourvoi en cassation formé le 30 juillet 1999 par Maître Harouna SAWADOGO au nom et pour le compte de sa cliente Ae Ac A contre l’arrêt n°34 rendu le 29 juin 1999 par la Chambre sociale de la Cour d’appel de Ab dans une instance qui oppose sa cliente à Madame B Aa Ag ;
Vu l’Ordonnance n°91-051/PRES du 26 août 1991, portant composition, organisation et fonctionnement de la Cour suprême ;
Vu la loi organique N°13/2000/AN du 09 mai 2000 portant organisation, attributions et fonctionnement de la Cour de Cassation et procédure applicable devant elle ;
Vu la requête afin de pourvoi en date du 29 juillet 1999 ;
Vu les conclusions du Ministère Public ;
Ouï Monsieur le Conseiller en son rapport;
Ouï les parties en leurs observations ;
Ouï Monsieur l’Avocat général en ses conclusions orales ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME
Attendu que Maître Harouna SAWADOGO, Conseil de Dame Ae Ac A, a introduit le pourvoi dans les forme et délai prescrits par la loi ; qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Attendu qu’il ressort de l’arrêt attaqué que Mme B Aa Ag a été embauchée par Mme A Marie France en 1989 en qualité de nurse en plein temps et classée dans la 2ème catégorie. Les enfants pour lesquels elle avait été embauché ont grandi, alors l’emploi de nurse ne s’avérait plus nécessaire ; que la fonction de boys cuisiner sous condition d’une disponibilité constante en cas d’invitation à la maison, lui fut proposé, elle accepta et fut classée en 4ème catégorie avec augmentation de salaire brut d’environ 35 % ;
Qu’au moment de l’acceptation du nouvel emploi, Mme B Aa Ag n’a pas informé son employeur de son état de grossesse, mais Mme A n’en fit pas un problème et lui confia une autre tâche compatible avec son état ; qu’il était évident que lors de son accouchement il fallait pourvoir à son remplacement ; qu’ainsi Mme A fit appel à un nouveau cuisinier lors de l’absence de Dame B ;
Qu’en fin janvier 1995, l’employeur eu un entretien avec son employée sur l’impossibilité de la poursuite des relations contractuelles qui les liaient ; que dès lors interviendra le licenciement de Mme B Aa Ag par lettre en date du 31 janvier 1995 ;
Attendu qu’estimant son licenciement abusif, Mme B saisissait l’Inspection du Travail afin d’obtenir des dommages et intérêts pour licenciement abusif ; faute de conciliation le Tribunal du Travail fut saisi du litige ; que par jugement n°31 en date du 14 avril 1998, ledit Tribunal déclarait le licenciement de Mme B Aa Ag abusif, condamnait par conséquent Mme A Af à lui payer la somme de 607.420 F à titre de dommages et intérêts ;
Que le 16 avril 1998, Maître Constantin OUEDRAOGO au nom de sa cliente Dame Ae Ac A interjetait appel de la décision ainsi rendue ;
Que le 29 juin 1999 la Chambre sociale de la Cour d’appel confirmait le jugement querellé en toutes ses dispositions ;
Que cet arrêt fait l’objet du présent pourvoi ;
Attendu que Maître SAWADOGO Harouna au soutien de son pourvoi invoque deux moyens de cassation : la violation de l’article 12 du décret n°77-311/PRES/FPT du 17 août 1977 et l’article 34 de la loi n°11-92/ADP du 22 décembre 1992 portant Code du Travail ;
Du moyen de cassation tiré de la violation de l’article 12 du décret n°77-311/PRES/FPT du 17 août 1977
Attendu que Maître Harouna SAWADOGO fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 12 du décret du 17 août 1977 qui dispose que : »en raison du caractère particulier des relations professionnelles entre le domestique et son employeur, chacune des parties pourra mettre fin à tout moment à son engagement moyennant un préavis d’un mois ou d’une indemnité correspondante, excepté le cas de faute lourdes » ;
Qu’il soutient qu’il n’est pas contesté que Dame B Aa Ag avait la qualité de domestique et Dame Ae Ac A la qualité d’employeur ; qu’il conclut- que Dame Marie France en licenciant DAME B Aa Ag après respect d’un préavis de un mois, suivi de la liquidation et du règlement de ses droits légaux ne peut être accusée d’avoir commis un quelconque abus, qu’ainsi les juges du fond ont violé l’article 12 susvisé en déclarant le licenciement abusif et en faisant une fausse application de l’article 3 de la loi du 22 décembre 1992 portant Code du Travail ;
Mais attendu que selon les dispositions de l’article 33 du Code de Travail, en cas de contestation sur le licenciement, l’employeur est tenu de faire devant la juridiction saisie, la preuve de la légitimité des motifs allégués pour justifier la rupture du contrat ; que dans la présente procédure la légitimité de la cause du licenciement de Dame B Aa Ag n’a pas été prouvé par Dame A ;
Que s’il est vrai que l’article 12 du décret du 11 août 1977 permet à l’employeur de licencier le travailleur après préavis d’un mois et la liquidation de ses droits, il n’en demeure pas moins que les dispositions de ce décret ne peuvent pas être contraires à celle de l’article 33 du Code du Travail qui est une loi ; que ce décret n’empêche pas Dame A de prouver la légitimité du licenciement qui a une autre raison qu’elle refuse d’avouer ; que par conséquent ce moyen est mal fondé et est à rejeter ;
Du second moyen de cassation tiré de la violation de l’article 34 du Code du Travail
Attendu que le conseil du demandeur fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions de l’article 34 du Code du Travail en soutenant qu’il n’est pas établi que le licenciement était fondé sur la naissance de l’enfant de Dame B Aa Ag encore moins sur sa grossesse ;
Que la demanderesse au pourvoi indique qu’il est de principe que lorsque les investigations n’aboutissent pas, l’apparence bénéficie à l’employeur et que c’est à tort que les juges du fond ont invoqué l’article 34 du Code du Travail pour déclarer abusif le licenciement ;
Qu’il fait observer qu’il en est de même du motif selon lequel la lettre de licenciement est resté muette sur les motifs du licenciement puisque de doctrine bien établie, il ressort que l’employeur peut ne pas donner le véritable motif du licenciement, et ne révéler celui-ci que devant le Tribunal ; qu’il ajoute que le licenciement de Dame B Aa Ag était lié au fait que la nature de l’emploi qu’elle occupait n’était pas conciliable avec les absences intempestives à venir ;
Que Maître Harouna SAWADOGO conclut alors que c’est à tort que les juges du fond ont invoqué et appliqué faussement l’article 34 du Code du Travail, ce qui expose la décision attaquée à la censure et sollicite à la Cour de casser et annuler l’arrêt ;
Mais attendu qu’il n’est pas contesté que Dame B Aa Ag a été licencié suite à son accouchement qui découle de la grossesse ; que la nature de l’emploi qu’elle occupait n’était pas conciliable avec les absences intempestives à venir ; que ce motif invoqué par l’employeur confirme que c’est la grossesse qui a été la cause de la rupture du contrat de travail et ce en violation de l’article 34 du Code du Travail ; qu’aucun motif sérieux n’a été invoqué par Dame A ; qu’en conséquence la Cour d’appel n’a pas violé les dispositions de l’article 34 du Code du Travail qu’au contraire, elle a fait une saine appréciation des faits de la cause et une bonne application de la loi, qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé et doit être rejeté ;
PAR CES MOTIFS
EN LA FORME
Reçoit le pourvoi ;
AU FOND
Le déclare mal fondé et le rejette ;
Met les dépens à la charge du Trésor Public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Chambre sociale de Cour de Cassation du Burkina-Faso, les jours, mois et an que dessus ;
Et ont signé le Président et le Greffier.