N° S.20.0026.F
CENTRE EUROPÉEN D’ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE, société anonyme, dont le siège est établi à Uccle, rue Égide Van Ophem, 40, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0400.421.839,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 250, où il est fait élection de domicile,
contre
G. L.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 6 novembre 2019 par la cour du travail de Bruxelles.
Le 31 mai 2022, l’avocat général Bénédicte Inghels a déposé des conclusions au greffe.
Le président de section Mireille Delange a fait rapport et l’avocat général
Bénédicte Inghels a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
En vertu de l’article 3, § 3, 1°, de la loi du 16 mars 1971 sur le travail, les dispositions du chapitre III, sections II et IV à VII, qui concernent la durée du travail, le travail de nuit, le respect des horaires de travail, les intervalles de repos et les pauses, ne sont pas applicables aux travailleurs désignés par le Roi comme investis d'un poste de direction ou de confiance.
Aux termes de l’article 2, I, 3, de l’arrêté royal du 10 février 1965 désignant les personnes investies d'un poste de direction ou de confiance, dans les secteurs privés de l'économie nationale, pour l'application de la loi sur la durée du travail, sont considérées comme des personnes investies d'un poste de direction ou de confiance, dans tous les secteurs, les personnes pouvant, sous leur responsabilité, engager l'entreprise vis-à-vis des tiers.
Un tel pouvoir n’investit une personne d’un poste de confiance, qualité qui exclut l’application de ces dispositions légales limitant la durée maximale du travail et le travail de nuit et instaurant des périodes de repos journalier et hebdomadaire, que s’il porte sur des engagements d’une certaine importance.
Dans la mesure où il soutient que ce pouvoir investit une personne d’un tel poste quelle que soit la portée de l’engagement, le moyen manque en droit.
Pour le surplus, après avoir relevé que « la Cour de cassation a considéré qu’un poste de confiance, au sens [des dispositions précitées], n’implique pas que la fonction considérée comporte un pouvoir de décision autonome », l’arrêt décide que le défendeur, engagé sous contrat de travail, « ne peut pas être considéré de par ses responsabilités ou le contenu de sa fonction comme personne de direction ou de confiance », au motif qu’ « il n’est ni invoqué ni démontré [qu’il] faisait partie du personnel de direction, disposait d’un pouvoir d’autorité hiérarchique effectif au sein de l’entreprise, avait la responsabilité de l’ensemble d’une subdivision importante de l’entreprise [ou] disposait d’un pouvoir de décision autonome » et que son « autonomie [était] assez encadrée », dès lors qu’il devait « respecter des directives […] décrites dans la convention relative à l’exécution des travaux de rationalisation » ou exécuter « une mission […] prévue dans cette même convention », que son travail était « strictement encadré par des directives contenues dans des méthodologies » et qu’il était tenu « de téléphoner au bureau les lundi, mercredi et vendredi de chaque semaine » ou « chaque jour de la semaine ».
Par ces énonciations, l’arrêt, d’une part, fonde sur l’absence de pouvoir de décision autonome du défendeur sa décision que ce dernier n’occupait pas un poste de direction, non celle qu’il n’occupait pas un poste de confiance, d’autre part, considère que l’autonomie du défendeur était encadrée dans une mesure, excédant celle qui est inhérente au pouvoir de subordination, telle que ses fonctions ne l’investissaient pas d’un poste de direction ou de confiance.
Dans la mesure où il repose sur une interprétation différente de l’arrêt, le moyen manque en fait.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de quatre cent septante-sept euros cinquante-quatre centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, les présidents de section
Koen Mestdagh et Mireille Delange, les conseillers Antoine Lievens et
Eric de Formanoir, et prononcé en audience publique du vingt-sept juin deux mille vingt-deux par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Bénédicte Inghels, avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.