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04/03/2022 | BELGIQUE | N°C.19.0395.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 04 mars 2022, C.19.0395.F


N° C.19.0395.F
A. P., notaire,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,

contre
ASSOCIATION ROYALE DES DEMEURES HISTORIQUES ET JARDINS DE BELGIQUE, association sans but lucratif, dont le siège est établi à Ixelles, avenue du Général de Gaulle, 43, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0406.605.093,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Ann Frédériqu

e Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 4...

N° C.19.0395.F
A. P., notaire,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,

contre
ASSOCIATION ROYALE DES DEMEURES HISTORIQUES ET JARDINS DE BELGIQUE, association sans but lucratif, dont le siège est établi à Ixelles, avenue du Général de Gaulle, 43, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numéro 0406.605.093,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 453, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 11 mars 2019 par la cour d’appel de Bruxelles.
Le conseiller Ariane Jacquemin a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Aux termes de l’article 1592, alinéa 1er, du Code judiciaire, toute personne a le droit de surenchérir pendant les quinze jours qui suivent l’adjudication.
L’article 1593, alinéa 1er, de ce code dispose que, dans les cinq jours ouvrables de l’adjudication, le notaire fait placarder des affiches annonçant la faculté de surenchère qui mentionnent le nom du notaire instrumentant, la date et le prix de l’adjudication, la désignation précise du bien adjugé.
En vertu de l’article 1592, alinéa 3, du même code, le montant de la surenchère doit être consigné en l’étude du notaire au moment de la surenchère, laquelle doit être notifiée par un exploit d’huissier qui est dénoncé à l’adjudicataire.
Transposant à la surenchère les dispositions de l’article 1589 relatives au refus des enchères lors de l’adjudication, l’article 1592, alinéa 5, prévoit que le notaire peut refuser la surenchère des personnes dont la solvabilité ne lui paraît pas justifiée et qu’il peut dans tous les cas requérir caution du surenchérisseur.
L’arrêt considère que, « [exerçant] la faculté [prévue] à l’article 1592, alinéa 5, [du Code judiciaire] », le demandeur « a estimé […] que la faculté de surenchère, qui expirait le 11 juillet 2008, était subordonnée à la constitution ‘d’une garantie bancaire inconditionnelle de quatre cent mille euros à fournir lors de la surenchère ou un chèque certifié du même montant’ » et que « cette condition était expressément mentionnée sur les affiches que [le demandeur] a fait placarder en application de l’article 1593 [dudit] code ».
L’arrêt, qui constate que le demandeur « lui-même considérait à l’époque que la garantie bancaire de quatre cent mille euros devait être constituée lors de la surenchère », a pu, sans violer les dispositions légales précitées, en déduire que les documents établissant l’existence de cette garantie devaient « être portés [à sa] connaissance » à ce moment.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
L’arrêt, qui précise que « la preuve de l’engagement de la banque [de fournir la garantie bancaire requise lors de la surenchère] ne doit pas être confondue avec la preuve que les conditions de la surenchère étaient remplies [à l’expiration du délai pour surenchérir] », n’impose pas au demandeur de prouver par un écrit la date d’envoi et de réception d’un acte contenant un engagement commercial mais « de démontrer qu’il a », comme « il l’allègue », eu connaissance de cet engagement lors de la surenchère, ce que n’établissent pas les documents qu’il produit.
Le moyen, en cette branche, manque en fait.
Quant à la troisième branche :
Lorsque, faisant usage du pouvoir discrétionnaire d’apprécier la solvabilité du surenchérisseur que lui confère l’article 1592, alinéa 5, du Code judiciaire, le notaire requiert caution de celui-ci en exigeant qu’il fournisse une garantie lors de la surenchère, il est tenu par les conditions qu’il a lui-même fixées et doit pouvoir faire la preuve qu’elles ont été respectées.
L’arrêt, qui, comme il ressort de la réponse à la première branche du moyen, considère que le demandeur a subordonné la validité de la surenchère à la fourniture, au moment de celle-ci, d’une garantie bancaire inconditionnelle de quatre cent mille euros, décide légalement qu’« il devait pouvoir justifier auprès de toutes personnes directement concernées par la procédure de surenchère que les surenchères répondaient aux conditions fixées, sous peine de voir sa responsabilité engagée », et que, restant en défaut d’apporter cette preuve, il doit à la défenderesse réparation de son dommage.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Quant à la quatrième branche :
L’arrêt considère que « la faute commise par le [demandeur], consistant à avoir accepté à tort une surenchère qui ne répondait pas aux conditions posées [par lui] et avoir de ce fait manqué à son devoir d’impartialité, a empêché [la défenderesse] d’acquérir, en 2008, [le bien litigieux] pour le prix de 2.100.000 euros », que, « si [la réquisition de surenchère] avait été refusée par le [demandeur], comme cela aurait dû être le cas, il n’y aurait pas eu de troisième séance de vente et le bien aurait, par l’effet de la loi, été adjugé définitivement à [la défenderesse] pour le prix de 2.100.000 euros », et qu’« il est donc certain que, sans les fautes [du demandeur], [la défenderesse] aurait acquis [le bien] pour 2.100.000 euros ».
Le moyen, qui, en cette branche, repose sur la considération que l’arrêt accorde à la défenderesse la réparation d’une perte de chance, manque en fait.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de cinq cent seize euros cinquante-deux centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Michel Lemal, les conseillers Sabine Geubel, Ariane Jacquemin et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du quatre mars deux mille vingt-deux par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Formation : Chambre 1f - première chambre
Numéro d'arrêt : C.19.0395.F
Date de la décision : 04/03/2022
Type d'affaire : Autres - Droit civil

Analyses

Lorsque le notaire considère qu'une garantie bancaire inconditionnelle, mentionnée sur les affiches, doit être fournie lors de la surenchère par le surenchérisseur, les documents établissant l'existence de cette garantie devaient être portés à sa connaissance à ce moment (1). (1) C.jud., art. 1592, al. 1er, 3, 4 et 5, et 1593, al. 1er, avant leur abrogation par la loi du 11 août 2017.

SAISIE - SAISIE-EXECUTION - NOTAIRE [notice1]

Lorsque, faisant usage du pouvoir discrétionnaire d'apprécier la solvabilité du surenchérisseur, le notaire requiert caution de celui-ci en exigeant qu'il fournisse une garantie lors de la surenchère, il est tenu par les conditions qu'il a lui-même fixées et doit pouvoir faire la preuve qu'elles ont été respectées, sous peine de voir sa responsabilité engagée (1). (1) C.jud., art. 1592, al. 1er, 3, 4 et 5, et 1593, al. 1er, avant leur abrogation par la loi du 11 août 2017.

SAISIE - SAISIE-EXECUTION - NOTAIRE - RESPONSABILITE HORS CONTRAT - FAIT - Faute [notice3]


Références :

[notice1]

Code Judiciaire - 10-10-1967 - Art. 1592, al. 1er, 3, 4 et 5, et 1593, al. 1er - 01 / No pub 1967101052

[notice3]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 1382 et 1383 - 30 / No pub 1804032150 ;

Code Judiciaire - 10-10-1967 - Art. 1592, al. 1er, 3, 4 et 5, et 1593, al. 1er - 01 / No pub 1967101052


Composition du Tribunal
Président : STORCK CHRISTIAN
Greffier : DE WADRIPONT PATRICIA
Ministère public : WERQUIN THIERRY
Assesseurs : LEMAL MICHEL, GEUBEL SABINE, JACQUEMIN ARIANE, MARCHANDISE MAXIME

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2022-03-04;c.19.0395.f ?

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