N° F.18.0011.F
P. B.,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Anne Rayet, avocat au barreau de Bruxelles, dont le cabinet est établi à Saint-Gilles, rue Defacqz, 78-80,
contre
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 16 mai 2017 par la cour d’appel de Bruxelles.
Par ordonnance du 23 novembre 2021, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le conseiller Sabine Geubel a fait rapport.
L’avocat général Bénédicte Inghels a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Les revenus professionnels visés à l’article 6, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992 sont, conformément à l’article 23, § 1er, première phrase, de ce code, les revenus qui proviennent, directement ou indirectement, d’activités de toute nature et, en vertu de l’article 27, comprennent, dans la catégorie des profits, tous les revenus d’une occupation lucrative.
Les revenus des capitaux et biens mobiliers visés à l’article 6, 2°, du même code, sont, suivant l’article 17, § 1er, dudit code, applicable au litige, tous les produits d’avoirs mobiliers engagés à quelque titre que ce soit et comprennent, en vertu du 3° de cette disposition, les revenus de la location, de l’affermage, de l’usage et de la concession de biens mobiliers.
En vertu de l’article 37, alinéa 1er, du même code, sans préjudice de l’application du précompte mobilier, les revenus des capitaux et biens mobiliers sont considérés comme des revenus professionnels lorsque les avoirs mobiliers sont affectés à l’exercice de l’activité professionnelle du bénéficiaire desdits revenus.
Il suit de ces dispositions que les revenus des avoirs mobiliers du contribuable ne sont susceptibles d’être taxés comme des revenus professionnels que si ces avoirs sont affectés à l’exercice de son activité professionnelle.
Après avoir constaté que le demandeur « conteste […] toute affectation professionnelle de ses droits d’auteur ou ses droits voisins à l’exercice de sa propre activité professionnelle de réalisateur et scénariste d’œuvres audiovisuelles », l’arrêt considère que l’« exploitation de ses scénarios de productions audiovisuelles qu’il négocie strictement avec divers partenaires […] et pour laquelle il conclut des contrats forme un tout avec ses prestations d’écriture et de réalisation desdits scénarios, réalisées en général avec le même comparse coauteur et négociées en même temps avec les mêmes sociétés de production », et que les conventions produites « s’inscrivent dans un ensemble d’opérations suffisamment fréquentes et liées entre elles, autour de projets qui se succèdent, pour être qualifiées […] d’occupation professionnelle [du demandeur] », sans qu’il y ait lieu d’« artificiellement scinder les différentes obligations issues du même contrat » ni d’« écarter du cercle professionnel la seule négociation de l’exploitation à durée déterminée du scénario commandé ».
L’arrêt, qui, sur la base de ces énonciations, décide que « la qualification en revenus professionnels résulte bien du lien direct des sommes litigieuses comprenant les droits d’auteur avec [la] profession de scénariste et réalisateur de productions audiovisuelles » du demandeur et qu’« il est inutile en conséquence, cette disposition n’ayant pas été appliquée par le fisc, de répondre aux développements [du demandeur] consacrés à l’article 37 du Code des impôts sur les revenus 1992 invoqué [par le défendeur] dans ses conclusions d’appel », viole les dispositions légales précitées.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause devant la cour d’appel de Liège.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Mireille Delange, les conseillers Marie-Claire Ernotte, Sabine Geubel et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du dix-sept janvier deux mille vingt-deux par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Bénédicte Inghels, avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.