N° D.21.0014.F
A. J., avocat,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Paul Lefèbvre, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 480, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’ordonnance rendue le 19 mai 2021 par le président du conseil de discipline d’appel des barreaux francophones et germanophone.
Le président de section Christian Storck a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Aux termes de l’article 13 de la Constitution, nul ne peut être distrait, contre son gré, du juge que la loi lui assigne.
L’article 456, alinéa 4, du Code judiciaire dispose, par dérogation à l’alinéa précédent, en vertu duquel chaque conseil de discipline est compétent pour les avocats appartenant aux ordres du ressort de la cour d’appel au siège de laquelle il est institué, que, à l’égard du président, des présidents de chambre, des assesseurs et assesseurs suppléants, secrétaires et secrétaires suppléants du conseil de discipline et des avocats membres du conseil de discipline d’appel, et à l’égard des bâtonniers et membres des conseils de l’Ordre, la procédure disciplinaire en première instance est de la compétence du conseil de discipline d’un autre ressort, désigné par le président du conseil de discipline d’appel.
Cette disposition prévoit, à l’égard des avocats qui y sont visés, une cause de dessaisissement du conseil de discipline dont le jugement est confié au président du conseil de discipline d’appel.
La décision que rend celui-ci, qui a pour effet de soustraire le litige au juge naturel de l’avocat concerné et de l’attribuer à un autre juge, ne constitue pas une mesure d’ordre au sens de l’article 1046 du Code judiciaire.
L’ordonnance attaquée, qui, pour dire irrecevable l’opposition du demandeur à la décision du président du conseil de discipline d’appel de désigner le conseil de discipline d’un autre ressort pour connaître de la contestation visée à l’article 458, § 2, alinéa 2, du Code judiciaire, tient cette décision pour une mesure d’ordre, viole les articles 13 de la Constitution, 456, alinéa 4, et 1046 dudit code.
Le moyen est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’ordonnance attaquée ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’ordonnance cassée ;
Condamne l’Ordre des barreaux francophones et germanophone aux dépens ;
Renvoie la cause au président du conseil de discipline d’appel des barreaux francophones et germanophone, autrement composé, qui se conformera à la décision de la Cour sur le point de droit jugé par elle.
Les dépens taxés à la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Sabine Geubel, Ariane Jacquemin, Maxime Marchandise et Marielle Moris, et prononcé en audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et un par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.