N° C.20.0139.F
1. M. R.,
2. L. R.,
3. SR LEGAL PTY LIMITED, société de droit australien, dont le siège est établi à Baulkham Hills (Australie), Century Circuit, 12, Suite 407,
demandeurs en cassation,
représentés par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,
contre
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Affaires étrangères et européennes, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Petits Carmes, 15,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Beatrix Vanlerberghe, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Anvers, Amerikalei, 187/302, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 6 juin 2019 par la cour d’appel de Bruxelles.
Le conseiller Maxime Marchandise a fait rapport.
L’avocat général Thierry Werquin a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, les demandeurs présentent deux moyens.
III. La décision de la Cour
Sur la recevabilité de la note du défendeur :
En vertu de l'article 1107, alinéa 3, du Code judiciaire, chaque partie peut demander à l’audience que l’affaire soit remise pour répondre verbalement ou par une note aux conclusions écrites ou verbales du ministère public.
Si elle autorise chacune des parties à répondre aux conclusions du ministère public, cette disposition ne permet à aucune d'elles de répondre à la note d'une autre déposée en application de celle-ci.
Il y a lieu d'écarter la note du défendeur.
Sur le premier moyen :
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen par le défendeur et déduite de la non-application au litige de la disposition invoquée :
En vertu de l’article 1080 du Code judiciaire, la requête en cassation contient, à peine de nullité, l'indication des dispositions légales dont la violation est invoquée.
Un moyen qui indique comme violé un article d’une loi dont le texte a été modifié par une loi ultérieure vise cet article tel qu’il a été modifié.
Le moyen est pris de la violation de l'article 23 du Code judiciaire et, à défaut de précision, vise cet article tel qu'il est applicable après sa modification par la loi du 19 octobre 2015 modifiant le droit de la procédure civile et portant des dispositions diverses en matière de justice, entrée en vigueur le 1er novembre 2015, et par la loi du 21 décembre 2018 portant des dispositions diverses en matière de justice, entrée en vigueur le 10 janvier 2019.
Aux termes de l’article 1er de l’ancien Code civil, la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif.
L’article 3 du Code judiciaire prévoit que les lois d’organisation judiciaire, de compétence et de procédure sont applicables aux procès en cours.
L’article 24 de ce code dispose que toute décision définitive a, dès son prononcé, autorité de chose jugée.
Il suit du rapprochement de ces dispositions que l’autorité de la chose jugée qui s’attache à une décision s’apprécie au regard de la loi en vigueur au moment de sa prononciation.
L’arrêt attaqué examine l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 11 avril 2013.
Partant, l’article 23 du Code judiciaire n’est applicable au litige entre les parties qui a été tranché par l'arrêt attaqué ni tel qu’il a été modifié par la loi du 19 octobre 2015 ni tel qu’il a été modifié par la loi du 21 décembre 2018, et cet arrêt n’en fait d’ailleurs pas application dans ces versions.
La modification de l’article 23 peut influencer le bien-fondé du moyen, dès lors que la loi nouvelle définit différemment le critère selon lequel doit être vérifiée l’identité de la cause d’une prétention ou d’une contestation élevée par une partie dans les deux instances concernées.
Les autres dispositions légales dont la violation est invoquée ne sauraient, si le moyen était fondé, suffire à emporter la cassation.
La fin de non-recevoir est fondée.
Sur le second moyen :
Quant aux deux branches réunies :
En considérant que les deux premiers demandeurs « ne démontrent [pas] la violation d’un engagement international précis qui interdisait [au défendeur] de décider, au cours de la période litigieuse, qu’en ..., [ces demandeurs] ont perdu leur nationalité belge pour le motif qu’en 1997, ils ont perdu la British dependant territories citizenship et qu’ainsi pareille décision (si elle s’avérait exacte) aurait pour effet de les rendre apatrides », l’arrêt attaqué répond à leurs conclusions soutenant, par les énonciations reproduites au moyen, que le défendeur a violé l’article 20 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et statue sur ce moyen comme il eût dû le faire s’il n’avait pas commis la violation alléguée de la foi due à ces conclusions.
Le moyen, en aucune de ses branches, ne peut être accueilli.
Par ces motifs,
La Cour,
sans avoir égard à la note du défendeur,
Rejette le pourvoi ;
Condamne les demandeurs aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de cinq cent vingt euros dix centimes envers les parties demanderesses, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l’aide juridique de deuxième ligne, et à la somme de six cent cinquante euros due à l’État au titre de mise au rôle.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Michel Lemal, les conseillers Sabine Geubel, Ariane Jacquemin et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du cinq novembre deux mille vingt et un par le président de section Christian Storck, en présence de l’avocat général Thierry Werquin, avec l’assistance du greffier Patricia De Wadripont.